AS (2012) CR 13

SESSION ORDINAIRE DE 2012

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(Deuxième partie)

COMPTE RENDU

de la treizième séance

Mardi 24 avril 2012 à 16 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso, dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 16 h 05, sous la présidence de M. Mignon, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Belgique (suite)

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, je vous rappelle que nous procédons ce jour à l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Belgique. Le scrutin a lieu dans la rotonde située derrière la Présidence de 16 heures à 17 heures.

Je rappelle aux deux scrutateurs désignés ce matin, Mme von Cramon-Taubadel et M. Flego, qu’ils doivent se trouver dans la rotonde derrière la présidence à 17 heures précises, afin de procéder au dépouillement.

Le résultat du scrutin sera annoncé si possible avant la levée de la présente séance ou, à défaut, à l’ouverture de la prochaine séance.

Le scrutin est de nouveau ouvert.

Nous continuons nos travaux pendant ce temps.

2. Faits personnels

LE PRÉSIDENT – Au titre de l’article 34.6 de notre Règlement, je suis saisi de deux demandes d’intervention. Je vous rappelle qu’aucune discussion ne peut s’engager à la suite d’une déclaration pour fait personnel.

Madame Fiala, vous avez la parole pour une durée de deux minutes.

Mme FIALA (Suisse)* – Ce matin, à l’issue du débat sur les vies perdues en Méditerranée, M. Voruz et moi-même, ainsi que plusieurs de nos collègues, avons été l'objet d'un malentendu lié à l'interprétation. Ancienne présidente de la sous-commission des réfugiés, je suis naturellement très favorable à ce rapport. J’ai appuyé sur le mauvais bouton au moment du vote. Je vous prie d’accepter mes excuses.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, Madame, de cette mise au point.

Monsieur Voruz, vous avez la parole pour une durée de deux minutes.

M. VORUZ (Suisse)* – Je ne dirai pas autre chose que ma collègue, Mme Fiala. Ayant compris que l’on nous demandait si nous refusions la résolution contenue dans le rapport, nous avons voté contre. Nous avons beaucoup travaillé au sein de la commission au titre de ce rapport et nos deux voix sont pour et non contre la résolution.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Voruz, merci pour ces précisions. Comme quoi il faut toujours être attentif à ce qui se dit en séance et éviter de discuter au moment de votes aussi importants ! Je suis persuadé que la rapporteure sera sensible à ces précisions. Bien évidemment, vos interventions figureront au procès-verbal.

3. L’égalité entre les femmes et les hommes : une condition du succès du Printemps arabe

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Mme Fatiha Saïdi, au nom de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, sur « L’égalité entre les femmes et les hommes : une condition du succès du Printemps arabe » (Doc.12893).

Nous entendrons à cette occasion Mme Bassima Hakkaoui, ministre de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social du Maroc, que je salue.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que le temps de parole des orateurs est aujourd’hui limité à trois minutes. Je vous demande de respecter scrupuleusement ce temps de parole, afin de permettre au plus grand nombre d’orateurs de s’exprimer.

Afin de laisser le temps nécessaire au bon déroulement du dernier débat de l’après-midi, nous interromprons la liste des orateurs vers 17 h 50, afin d’entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

C’est avec grand plaisir que je cède la parole à Mme Saïdi.

Mme SAÏDI (Belgique), rapporteure de la commission sur l’égalité et la non-discrimination – Monsieur le Président, Madame la ministre, chers collègues, si je devais résumer en trois mots mes visites au Maroc et en Tunisie, ce serait : espoir, crainte et vigilance.

Espoir, parce que les droits des femmes se sont imposés à l’agenda politique au lendemain des révolutions. Comme vous le savez, malgré la participation massive des femmes, les revendications étaient engagées autour de la liberté et de la dignité, mais pas autour du principe d’égalité.

La crainte est celle de voir les femmes perdre, sous la poussée des partis islamistes qui sont sortis renforcés de toutes les élections ayant eu lieu dans la région, les acquis qu’elles ont obtenus.

Vigilance, enfin, parce que c’est dans un état d’alerte permanent que sont engagées les forces progressistes féminines et féministes qui veillent sur les acquis engrangés, tout en tentant de les renforcer.

Les partis religieux que nous avons rencontrés nous ont assurés que les droits des femmes seraient respectés, mais force est de constater que la vision de la place de la femme au sein de la société lui trace des frontières délimitées par l’espace familial et un rôle traditionnel en tant que mère, épouse et garante de l’équilibre de la cellule familiale.

L’un des éléments qui est souvent revenu dans les discussions menées avec nos interlocuteurs tunisiens et qui suscitent de nombreuses questions est celui de l’inclusion de la charia comme source principale de droit inscrite dans la Constitution. Je rappelle également que les constitutions adoptées ou en cours d’élaboration doivent se doter de législations rigoureuses, capables de lutter de manière efficace contre toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Les législations doivent aussi être adaptées en regard de la levée sur les réserves de la CEDEF, qui est une avancée réalisée par les pays visités – je veux dire le Maroc et la Tunisie.

L’actualité est malheureusement venue nous éclairer aussi sur l’article 475 du Code pénal marocain qui permet à un violeur d’épouser sa victime et de racheter ainsi son crime. Je pense à l’incident dramatique que nous avons vécu, en l’occurrence le sort de la jeune Amina Filali.

Durant les révolutions, les femmes ont aussi fait l’objet de violences. Là aussi, il faut faire émerger la vérité sur ces exactions. En cela, les processus de justice transitionnels, avec un volet consacré au genre, comme ce fut le cas au Maroc avec l’instance « Equité et réconciliation », sont des moyens intéressants qu’il importe de soutenir.

Les femmes de la région souhaitent notre soutien. Nous devons multiplier et renforcer les programmes de coopération et inclure dans les priorités l’amélioration du statut des femmes et la lutte contre toutes les formes de violence qui leur sont faites. Ces axes sont fondés sur des droits universels, c’est-à-dire qu’ils sont non négociables et qu’ils ne doivent bénéficier d’aucun relativisme culturel.

La Commission de Venise peut mettre à disposition son expérience et son expertise dans une série de domaines, comme la formation des magistrats s’agissant des droits humains, ou encore l’analyse des facteurs qui entravent l’accès des femmes à la justice. Et je pourrais en citer bien d’autres.

Le Comité des Ministres doit aussi soutenir et renforcer les actions de coopération dans les domaines de la lutte contre les violences faites aux femmes et de l’organisation des campagnes de sensibilisation destinées au grand public.

Il faut également renforcer les associations, les syndicats et la société civile. Ces acteurs effectuent un travail remarquable. Outre leurs plaidoyers, ils mènent des actions sur le terrain dans des conditions difficiles. Nous ne devons cependant pas oublier les jeunes, qui sont les citoyens de demain, sur lesquels il faut miser dès le plus jeune âge.

Des multiples auditions que j’ai effectuées, je retiens la demande de création d’un réseau de femmes pour échanger les bonnes pratiques et les expériences. Il faudra donc privilégier cet axe de dialogue et d’échange. Au travers des groupes parlementaires, des syndicats et des associations, ces réseaux doivent se constituer en veillant à ce qu’ils reflètent le plus largement possible tous les groupes de population, y compris ceux des zones rurales, trop souvent oubliés. Il importe aussi de soutenir d’autres pays, comme la Tunisie et l’Algérie, afin qu’ils deviennent nos partenaires pour la démocratie.

Comme je souhaite conserver un temps suffisant pour les réponses aux orateurs, j’interromprai là cette présentation. Je ne peux toutefois conclure sans remercier les autorités marocaines et tunisiennes, qui m’ont permis d’effectuer mes visites dans d’excellentes conditions. Je remercie également toutes les personnes qui m’ont reçue, qui ont répondu à mes questions et enrichi ce rapport. Je remercie aussi la présidente de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, ainsi que M. Mendes Bota, qui a accordé une très grande attention à ce rapport. Je remercie enfin, bien évidemment, tous les membres du secrétariat, qui m’ont accompagnée tout au long de l’élaboration de ce rapport.

LE PRÉSIDENT – Madame la rapporteure, je vous remercie. Il vous restera huit minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

Avant d’ouvrir la discussion générale et de donner la parole à Mme Bassima Hakkaoui, je voudrais souhaiter à celle-ci la bienvenue et la remercier de sa venue à Strasbourg.

J’ai d’ailleurs été très heureux, Madame la ministre, de vous accueillir ce matin dans mon bureau. Nous avons eu une discussion très franche. Le débat qui a eu lieu tout à l’heure au sein des deux commissions réunies – la commission sur l’égalité et la non-discrimination et la commission des questions politiques et de la démocratie – était particulièrement riche. Nous avons beaucoup apprécié votre intervention, qui nous a fait vibrer. Vous avez pu constater à quel point votre auditoire était captivé par vos paroles. Je remercie d’ailleurs les présidents de ces deux commissions d’avoir organisé cette audition. Je salue également les autres intervenantes, qui ont pu s’exprimer et apporter des témoignages vivants sur ce qui s’est passé dans leurs pays respectifs.

C’est donc avec beaucoup de plaisir, Madame la ministre, que je vous accueille au nom de l’Assemblée parlementaire. Vous avez été parlementaire pendant près de dix ans avant de devenir ministre. Certes, c’est généralement ainsi que les choses se passent, mais tous les parlementaires ne deviennent pas ministres ! Vous avez présidé la commission parlementaire des secteurs sociaux de 2006 à 2009. Vous êtes présidente de l’organisation Femmes de votre parti depuis 2011.

Je me réjouis – nous nous réjouissons – du fait que le Maroc ait obtenu le statut de partenaire pour la démocratie, l’an dernier. Votre pays est d’ailleurs le premier à avoir obtenu ce statut. J’ai eu l’occasion de vous dire ce matin à quel point il était important pour nous de voir comment ce partenariat se développe. Nous vous observons donc attentivement – dans le bon sens du terme car, en fonction du résultat de l’expérience que nous sommes en train de mener au Maroc, il est évident que nous serons enclins à accorder ce statut de partenaire pour la démocratie à d’autres pays qui le souhaitent. Vous savez aussi que c’est pour nous l’occasion de mettre en place une véritable politique de voisinage avec tous les pays qui bordent la Méditerranée.

Nous sommes aussi attentifs au développement, depuis la création de ce statut, des perspectives d’un engagement plus important, notamment sur les questions d’égalité entre les femmes et les hommes. C’est là un sujet qui est cher au Conseil de l’Europe. La commission qui traite ces sujets au sein de l’Assemblée accomplit d’ailleurs un travail absolument extraordinaire.

Cette égalité entre hommes et femmes a une définition plurielle, comprenant la participation plus importante des femmes à la vie politique, publique et économique et par conséquent un rôle d’égal à égal avec les hommes dans nos sociétés. Je tiens d’ailleurs à dire que le Maroc n’est pas le seul pays concerné : beaucoup d’autres pays doivent faire des efforts en la matière.

L’égalité est synonyme d’égalité des chances ; elle ne pourra pas se concrétiser sans la garantie d’un accès égal à l’éducation. Vous le savez, l’une de nos commissions traite de la question de l’éducation. C’est pour nous un sujet important, puisque nous parlons de droits de l’homme. Or l’éducation est l’un des droits fondamentaux dont doivent bénéficier les hommes et les femmes.

Enfin, aussi longtemps que les femmes continueront à être victimes de violence, y compris au sein de leur famille, il ne pourra pas y avoir d’égalité. La lutte contre la violence à l’égard des femmes est une priorité pour notre Assemblée et je me réjouis d’en savoir plus sur les actions entreprises au Maroc afin d’éradiquer ce fléau. Lors de la précédente partie de session, au mois de janvier, nous avons d’ailleurs eu le plaisir de recevoir Mme Bachelet, qui préside l’Onu Femmes. Nous avons eu sur ce sujet un débat qui était particulièrement passionnant.

Je vous remercie d’avoir accepté notre invitation afin de participer à ce débat. C’est donc avec beaucoup de plaisir que je vous donne la parole, Madame la ministre.

Mme Bassima HAKKAOUI, ministre de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social du Maroc* – Monsieur le Président, permettez-moi d’abord de vous remercier une fois encore pour toutes les paroles pleines de bonté que vous m’avez adressées.

Je remercie aussi Mme Fatiha Saïdi qui a rédigé un rapport très important. Nous n’avons pas pu nous rencontrer autant que nous l’aurions voulu, mais elle a exercé de hautes responsabilités et j’ai eu la possibilité de partager avec elle de nombreuses réflexions sur les thèmes proches de mon ministère. Je répondrai à Mme Fatiha Saïdi en soulignant l’importance que j’accorde à son discours.

Je reviendrai aussi sur un aspect important, à mes yeux. En lisant ce rapport, nous n’avons pas eu la perception du Maroc avancé, du Maroc des libertés, du Maroc de l’égalité, mais nous avons trouvé une série d’observations et de propositions d’amendement sur les thèmes principaux et qui ont permis de faire évoluer la réflexion. Ils sont désormais intégrés dans le texte que nous pouvons lire dans sa version amendée.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les parlementaires de cette noble Assemblée, nous avons parlé de la nouvelle Constitution qui vise à traiter la femme et l’homme sur un pied d’égalité en termes de libertés et de possibilité de participer à tous les domaines de la vie sociale et économique.

Le principe de l’équité entre la femme et l’homme ne peut s’imposer qu’au travers de la constitution d’organes qui écartent la discrimination. Ce sont des éléments constitutionnels qui permettent l’égalité de chances entre les hommes et les femmes. Je pense notamment à l’article 32 qui évoque la nécessité de la protection de la femme et de l’enfant. Ces dispositions règlementaires font partie de nos réalisations les plus importantes cette année.

Je pense également au couronnement des réformes législatives de notre pays, qui est la pierre angulaire de tous les autres codes, y compris le Code de procédure pénale, du droit de la famille, de celui qui régit les caisses d’allocations familiales, et aux centres d’accueil de femmes et d’enfants. Mais je pense aussi à l’aménagement de toutes les procédures au sein des instances judiciaires, et à la rationalisation des rapports au sein des bureaux de police et des forces de sécurité, afin que tout le monde puisse être traité de manière équitable.

Monsieur le Président, le gouvernement considère que ces questions d’ordre social et économique sont indispensables pour lutter contre la marginalisation et l’illettrisme. Une initiative nationale en ce sens a été lancée par son Altesse Sérénissime le roi du pays, en vue d’engager une réflexion pour repenser les conditions de sécurité sociale et de vie dans la dignité.

Au cours de l’année 2012, nous avons amorcé un système d’aide pour les populations les plus précarisées ou marginalisées qui devrait profiter à un grand nombre de ressortissants de notre pays. Cela se fait avec le concours de notre ministre de l’Intérieur qui, le 30 mars, a décidé d’ouvrir la possibilité aux femmes d’exercer pleinement leurs droits économiques et de ne plus avoir à souffrir de discriminations.

Voilà ce qui a été mis en place par le Royaume du Maroc pour essayer de faire évoluer l’économie et permettre la participation des femmes en leur donnant la capacité d’être des entrepreneurs, en pénétrant dans les régions les plus reculées pour essayer de lutter contre la pauvreté et en participant aux services essentiels. Il faut ouvrir l’accès à des services essentiels tels que l’eau et l’électricité et, modifier ainsi en

profondeur le paysage rural. Cela a fait l’objet d’un effort constant depuis plusieurs décennies, avec un programme qui a culminé en 2009 en matière d’électrification. On note également un développement de la distribution d’eau potable dans des proportions infiniment plus élevées qu’auparavant.

S’agissant de l’égalité des hommes et des femmes, cette dernière a le plus souffert de la pauvreté, de la marginalisation et de la précarité, de l’absence de l’électricité et de l’eau. Permettre à l’habitante de tel ou tel point reculé du royaume d’accéder à ces services essentiels, c’est lui donner la possibilité de profiter de conditions de vie qui lui permettent d’exister dans la dignité et de jouer pleinement son rôle.

Parmi les autres éléments des programmes dont la mise en place a été accélérée au cours des quatre dernières années, je soulignerai la scolarisation obligatoire des enfants de six ans à onze ans dans une proportion quasi totale. Nous pouvons dire qu’il y a eu un accroissement par trois du taux de scolarisation, notamment des petites filles. C’est un indice particulièrement significatif du réaménagement en profondeur de la vie dans les zones rurales.

Permettre aux femmes de participer à la prise de décision est également un élément très important. Des dispositions législatives permettent une participation plus active des femmes avec une plus grande représentativité dans certaines organisations. Les taux actuels sont de 12,8 %, soit une augmentation déjà considérable par rapport à 2009. Nous sommes passés de 11 % en 2007 à 17 % en 2011.

Pour ce qui est de l’amélioration de l’image de la femme dans les moyens de communication, un pacte national a été élaboré en 2005. Le ministère de la Solidarité, de la Femme et de la Famille travaille aujourd’hui dans ce sens en coopération avec le ministère des Télécommunications.

Donc, sur le plan économique, politique et sociétal, nous pouvons dire qu’il existe une participation des femmes dans toutes les couches de la société. Le programme gouvernemental permet aux femmes de participer à toutes les instances de la vie sociale. Dans cette lutte contre l’analphabétisme, le gouvernement travaille pour essayer de pousser de l’avant les différents groupes de réflexion sur les lois et l’aide à apporter aux différents projets, afin d’aider la femme à entrer de plain-pied dans les circuits économiques, avec un rôle très important joué par la société civile en insistant sur la participation des femmes à la réflexion sur la mise en œuvre des politiques publiques.

Tout cela est maintenant à portée de main et est en train d’être réalisé grâce à la démocratie participative et aux décisions prises dans le cœur des processus électoraux, à la mise en œuvre et à l’évaluation des résultats de ces politiques.

Monsieur le Président, le choix de Michèle Bachelet qui s’occupe au sein des Nations Unies de l’égalité entre les hommes et les femmes, dont vous parliez précédemment, de célébrer la Journée de la femme le 8 mars 2012 au Maroc est un symbole et le signe que le Maroc est devenu un modèle qui, par ses choix, ses réalisations mais aussi par ses ambitions permet d’élever le niveau de vie et de répondre aux aspirations démocratiques de son peuple. C’est le fruit d’années de coopération et de réflexion sur le plan politique.

En fait, nous voyons ici qu’il y a un plan gouvernemental qui pousse de l’avant. Le plan Equité qui va s’étaler sur les années 2012 à 2016, est destiné à promouvoir les principes de l’égalité et de l’équité et à permettre de lutter contre toutes formes de discrimination et de racisme. Il s’agit de protéger la famille et l’enfance, de favoriser la représentation de la femme dans les institutions, de permettre l’arrivée des femmes au cœur même des processus de prise de décision, de lutter contre la violence et contre toutes les formes de violence contre la femme, y compris la violence au sein des familles et entre époux.

Toutes ces étapes sont indissociables dans la quête de l’égalité au sein de notre ministère. Ce sont des étapes contraignantes mais nécessaires dans les autres ministères pour promouvoir les droits humains.

Nous avons eu des discussions. Nous avons entendu Mme Fatiha Saïdi. Nous avons parlé d’une enfant, Amine Filali.

Le Code de procédure pénale est en cours de refonte. Il convient d’en profiter pour éradiquer toute faiblesse afin de surmonter toutes les difficultés. Des critiques sont émises, parfois objectives, parfois moins. Nous devons faire le tri entre le bon grain et l’ivraie pour savoir exactement ce qu’il convient d’enlever ou de garder.

On connaît les cas de mariage forcé et le principe de l’acceptation éclairée de la jeune fille. Les amendes sont de plus en plus lourdes. Elles ont été portées de 200 dirhams à 25 000 dirhams. Les peines privatives de liberté sont renforcées. Le viol entre époux est reconnu. Les violeurs vont en prison. Il n’est pas question de discuter avec eux. Il y a des cas d’incapacité civique, mentale ou autres.

Le Code pénal est toujours sujet à révision. Il faut savoir comment se positionner par rapport à la clause 475 concernant le sort des jeunes filles. Des sanctions sont prévues.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, nous nous engageons à continuer à travailler pour enraciner les bases de la démocratie et des principes des droits de l’homme dans tous les rouages de la société. Cela se fera par les échanges d’idées, d’expériences entre toutes les parties de notre société civile et vous. Vous devez être informés de nos évolutions avec les institutions européennes et les organisations internationales pour nous aider à consolider la situation de la femme, à mieux enraciner les principes des droits humains. Nous devons regarder toujours plus loin.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, Madame la ministre, pour cette intervention passionnante.

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Schuster, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

Mme SCHUSTER (Allemagne)* — Au nom de mon groupe, je remercie très chaleureusement notre rapporteure, Mme Saïdi. Je me félicite de la présence de Mme la ministre. Elle a bien expliqué l’agenda et ce que nous devons améliorer. Choukran !

Après la Révolution du jasmin, qu’est-ce qui s’est amélioré pour les femmes ? Quand on discute avec les femmes de cette région, on constate qu’elles vivent dans une grande incertitude, car leurs droits risquent d’être amputés.

En Libye, le Conseil national de transition s’occupe peu des femmes. En Egypte, je crains fort que leur situation ne se dégrade. Il n’y a plus que 12 femmes dans l’Assemblée populaire nationale sur 518 membres, dont trois nommées par les militaires.

Au Maroc, la représentation des femmes a légèrement augmenté. Elle a quelque peu baissé en Tunisie. Tout ne se résume pas à des chiffres. Il faut savoir quelles sont les lois, les projets de réformes dont on veut discuter. La Tunisie et le Maroc ont indiqué que toutes leurs réserves sur la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes seront levées.

Au Maroc, il existe une nouvelle Constitution. En Tunisie, la Constitution de 1956 et le droit sur la personne de 1957 ont joué un rôle précurseur puisque le droit au divorce et l’interdiction de la polygamie y étaient déjà inscrits. Mme Saïdi a raison de rappeler que l’on peut craindre aujourd’hui que ces droits soient amputés.

Cela me conduit à une réflexion fondamentale. Nous savons que la religion occupe une place particulière dans les pays du Printemps arabe, mais la religion, la tradition, la culture ne doivent pas servir de prétexte pour limiter les droits universels de l’homme. Ils existent. Il n’est nullement besoin de les inventer.

Le Conseil de l’Europe et sa Commission de Venise peuvent apporter une aide importante pour encourager les différentes réformes constitutionnelles. Il est important de continuer à nous occuper de ce dossier car le Printemps arabe doit être une réussite. Les femmes y ont beaucoup participé. Elles ne doivent pas être les perdantes de ce Printemps. Evitons qu’il en soit ainsi. Le rapport va dans la bonne direction.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme O’Sullivan, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

Mme O’SULLIVAN (Irlande)* – Au nom de mon groupe, je salue ce rapport qui traite d’une large palette de questions et dont les recommandations sont très progressistes. Je reconnais également les initiatives positives qui ont été prises et la position très ferme de Mme la ministre. Il faut encourager la parité, droit de l’homme fondamental. Personne ne doit être discriminé en raison de son appartenance à un sexe ou en raison de ses convictions politiques ou religieuses. Bien des progrès ont été accomplis dans bien des pays depuis le début du XXe siècle, en matière de droits des femmes, de vote, d’emploi et dans d’autres domaines.

Aujourd’hui, il faut que les pays qui ont connu le Printemps arabe soutiennent et promeuvent ces droits sur le fondement de l’égalité entre hommes et femmes.

Il est une autre question qui sera l’objet de discussions, celle de la citoyenneté active. La consultation des citoyens et la participation en sont des éléments clés. Je crois que l’adoption de ces principes sera également de nature à nous permettre de parvenir à l’égalité entre hommes et femmes.

Comment tous les pays qui ont connu le Printemps arabe pourraient-ils se rallier à ce principe d’égalité ? Il faut d’abord que ce principe soit inscrit dans les constitutions. Ensuite, il faut le traduire en actes, il ne doit pas demeurer à l’état de paroles. Je reconnais le rôle joué par les femmes dans les pays du Printemps arabe, ainsi qu’au Bahreïn, en Arabie saoudite en Syrie et au Yémen. Je veux notamment signaler le rôle joué par les femmes le week-end dernier au Bahreïn où des manifestants ont été emprisonnés.

Le droit des femmes à participer à la vie politique de ces divers pays et au changement démocratique est essentiel. Il est très important que le Conseil de l’Europe joue un rôle clé dans le soutien au mouvement des femmes. De toute évidence, dans certains de ces pays, les femmes sont mises à l’écart, elles sont marginalisées, comme si on voulait les biffer de l’histoire du Printemps arabe.

Les femmes se voient aussi interdire de jouer un rôle politique important dans la vie politique. Nous le savons, dans de nombreux pays, leur représentation est très faible. Nous pourrions suggérer aux pays du Printemps arabe de créer un ministère de l’égalité ou un ministère de la condition féminine, comme il en existe au Maroc. C’est une recommandation du rapport, que je soutiens. Si les recommandations du rapport étaient mises en œuvre, nous verrions un changement se produire.

Le dialogue avec les forces politiques islamistes qui ont remporté les élections est essentiel. La question de la séparation de la religion et de l’Etat ne peut l’emporter sur celle de l’égalité entre hommes et femmes. Quel que soit le rôle des institutions religieuses, aucune ne saurait nier l’égalité entre hommes et femmes.

Les violences à l’encontre des femmes, notamment les viols de mineures, sont également une question essentielle.

Les médias aussi ont un rôle essentiel à jouer. Une presse libre peut apporter une contribution importante.

Enfin, je crois qu’il faut notamment soutenir les femmes qui vivent en zone rurale.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Mendes Bota, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

M. MENDES BOTA (Portugal)* –  De nombreuses femmes manifestaient place Tahrir et place Manama au Caire pour exiger la démocratie, la liberté, des réformes politiques et sociales, la dignité et le respect. Pendant quelques jours, ces femmes ont été vues comme les égales des hommes. Elles avaient souffert comme eux et étaient mues par la même détermination. Sans elles, la victoire sur les régimes dictatoriaux n’aurait pas été possible.

Nous, Européens, avons suivi ces événements avec attention, avec beaucoup d’espoir et même de joie, tout en gardant la distance nécessaire pour préserver la souveraineté et le droit à l’autodétermination de ces peuples arabes qui dessinaient leur propre destin. Nous avons ouvert la porte à la coopération et entamé le dialogue.

Nous n’avons pas encore perdu notre optimisme, des graines ont été semées pour la défense du droit des femmes, mais il ne faut pas non plus nous voiler la face. Après la chute de ces régimes autoritaires, de nouveaux murs de ségrégation entre hommes et femmes se sont élevés, qu’il faut abattre. Les femmes sont chassées des lieux publics, maltraitées, offensées. Le chemin de la démocratie, de l’égalité entre les genres et de la fin des sociétés patriarcales est encore long.

Que se passe-t-il donc au sud de la Méditerranée ? Parfois, l’hiver brûle et l’été glace. Le Printemps arabe ne s’épanouira pas tant que les femmes ne jouiront pas de leurs droits humains.

Je me souviens d’Ioulia Timochenko. Nous avons connu les mêmes problèmes en Europe.

Voyons ce qui s’est passé en Egypte. La seule manifestation interdite sur la place Tahrir a été celle de la Journée de la femme ! Les femmes ont été battues, soumises à des tests de virginité et déshabillées en public ! Aux dernières élections parlementaires, seules neuf femmes ont été élues. La question des femmes a été éliminée de l’agenda politique. De surcroît, l’une des femmes parlementaires élues a déclaré que sa priorité était de révoquer la loi garantissant le droit des femmes au divorce.

Cela nous amène à un autre type de réflexion. Est-il possible de construire une démocratie pluraliste qui garantisse les droits de l’homme et l’Etat de droit quand l’Etat est contrôlé par des partis islamistes embourbés dans le pire conservatisme religieux ? Il n’est pas étonnant que le rapport de Mme Saïdi, que je félicite d’ailleurs au passage, nous propose un certain nombre de dispositions. Je les appuie d’ailleurs pleinement.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Durrieu, au nom du Groupe socialiste.

Mme DURRIEU (France)* – Le Printemps arabe, c’est une onde de choc qui trouve son origine en Tunisie, qui traverse le Maroc, la Libye, l’Egypte, le Yémen, le Bahreïn et la Syrie. Partout, les revendications sont parties des jeunes, et souvent des femmes, revendications de liberté, de démocratie et d’emploi. Très vite aussi sont apparus des paradoxes : ce sont les vieux qui sont revenus, souvent d’exil.

Paradoxe des urnes, ce sont les islamistes qui sont arrivés au pouvoir, partout. C’était déjà le cas en 2006, en Palestine, avec la victoire du Hamas, et en 1991, en Algérie, avec celle du FIS. Partout, ils l’ont emporté avec le concours massif des femmes, qui leur ont apporté leurs suffrages.

La transition politique est difficile, non sans susciter des inquiétudes, non sans risques, avec ses enjeux. Le premier enjeu, fondamental en démocratie, est de préserver la condition de la femme. Il faut défendre les droits acquis. Vous, Tunisiennes, Marocaines, Turques et même Iraniennes, voire Egyptiennes, qui avez obtenu le droit de vote en 1956, avez souvent été des pionnières. Il faut aussi préserver et défendre farouchement la liberté en résistant à toutes les formes d’oppression.

Pardonnez-nous donc d’éprouver quelque déception en faisant, un an après, le bilan. Comment se peut-il que le Gouvernement marocain ne compte aujourd’hui qu’une femme au gouvernement, que je salue d’ailleurs ? Il y en avait sept dans le gouvernement précédent ! Nous attendions que vous fassiez plus, que vous fassiez mieux et, surtout, que vous fassiez mieux que nous. Nous sommes en proie au doute, nous éprouvons quelque crainte : qui aura le dernier mot ? quel est l’avenir de cette dynamique du Printemps arabe ?

Je formulerai trois observations.

Le facteur économique sera essentiel. Si toutes les inégalités doivent être combattues, c’est notamment le cas de celles dont elles sont victimes sur le plan économique et social.

Il faudra – cela me paraît impératif – définir la place de la religion dans l’Etat. Religion et politique : ce problème doit être abordé dans un esprit de tolérance et en respectant l’autre. Laïque, je considère que l’espace privé m’appartient, et je le sépare de l’espace public. Je souhaite que l’on respecte ce principe, y compris ici, au Conseil de l’Europe. Démocrate, je sais que la démocratie résulte d’un acte conscient et volontaire, d’une organisation difficile de la société, je considère que la loi démocratique civile doit être supérieure à la loi religieuse, c’est-à-dire à la charia ; on peut ne pas partager mon point de vue, mais je l’affirme.

Enfin, je reconnais qu’une voie arabo-musulmane vient de s’ouvrir et que l’Islam devra trouver sa place dans le domaine de la politique. Votre responsabilité est de contenir tous les extrémismes.

Pour terminer, je salue toutes ces femmes humiliées, battues, violées, excisées, toutes ces femmes combattantes, résistantes, je salue les femmes tunisiennes, marocaines, yéménites, syriennes, libyennes, égyptiennes. Je les salue, et je résume mon propos d’un mot fort d’émotion : espoir !

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Gafarova, au nom du Groupe démocrate européen.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan) * – Au nom du Groupe démocrate européen, je tiens tout d’abord à féliciter Mme Saïdi pour son rapport très riche en informations.

On doit en effet observer qu’il n’y a eu aucune avancée majeure dans la vie des femmes depuis le début du Printemps arabe, il y a un an. Il ne fait aucun doute que le Conseil de l’Europe et les organisations chargées de la protection des droits de l’homme et de la promotion des valeurs démocratiques sont aujourd’hui préoccupés par les violations des droits des femmes dans les pays du Printemps arabe. Notre débat démontre la volonté du Conseil en la matière. Nous savons que les vagues de soulèvement populaire, en Afrique du Nord comme au Proche et au Moyen Orient, provoquées par des difficultés économiques et politiques, ont laissé la place à des troubles massifs et à la guerre civile. Il ne saurait y avoir aucune explication logique à des massacres de milliers d’innocents. Le fait qu’ils continuent de se perpétuer dans la région est une honte.

Dans ces conditions, les droits de l’homme deviennent particulièrement difficiles à protéger et l’égalité entre les hommes et les femmes difficile à assurer. Il serait naïf de croire qu’on peut attendre une protection des droits de l’homme conforme aux normes les plus élevées durant la poursuite du conflit. Toutefois, on ne saurait non plus ignorer les faits qui se produisent, sous le prétexte qu’il s’agirait de questions de politique intérieure.

L’égalité entre les hommes et les femmes est un droit fondamental, énoncé dans de nombreux textes internationaux, qui assurent aux femmes des garanties. Toutefois, l’application réelle de ces droits exige que nous unifiions nos efforts. Nous devons travailler ensemble. Il est nécessaire, pour accorder plus de droits aux femmes, de promouvoir leur représentation dans toutes les sphères de la société et non pas seulement dans les sphères qui leur sont traditionnellement réservées : l’éducation et la santé. Il faut tirer parti du potentiel de la femme dans tous les domaines, notamment dans le domaine économique : la société dans son ensemble en tirera profit.

Le Conseil de l’Europe et ses Etats membres possèdent une expérience suffisante pour résoudre ces problèmes. C’est pourquoi nous devons unir nos efforts pour aider les personnes qui souffrent dans ces pays, notamment les femmes dont les droits sont violés.

Nous devons, à cette fin, mettre de côté nos intérêts et faire preuve de sincérité et de bonne volonté.

M. Mota Amaral, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Mignon au fauteuil présidentiel.

LE PRÉSIDENT – Dans la discussion générale, la parole est à Mme Bergamini.

Mme BERGAMINI (Italie)* – L’Assemblée parlementaire a vivement appelé de ses vœux ce rapport. Loin d’avoir été entrepris dans un état d’esprit paternaliste, ce travail a pour objectif d’observer avec la plus grande attention, sous l’angle de l’égalité homme-femme, les événements qui se produisent actuellement dans les pays qui ont connu le processus de démocratisation appelé de manière quelque peu simplificatrice le Printemps arabe. Cela étant, le rapport respecte les spécificités de chaque pays.

Il convient, me semble-t-il, de préciser que l’Assemblée souhaite encourager les femmes à continuer de se montrer protagonistes de ce grand mouvement de démocratisation. Leur attitude déterminera l’évolution politique de toute la zone de la Méditerranée.

Il est indispensable que les femmes, qui ont joué un rôle si important dans les printemps arabes, n’en soient pas aujourd’hui exclues ou ne soient pas marginalisées. Le Centre Nord-Sud, dont je suis la présidente, coopère depuis des années avec le Maroc, qui en est membre, ou la Tunisie. À ce titre, je comprends très bien ce que signifie la coopération en matière de démocratie parlementaire avec la société civile et toutes les forces non gouvernementales de ces pays.

Aujourd’hui s’est tenue la première réunion de la commission chargée de gérer ce nouveau réseau euro-méditerranéen des femmes, voulu par notre Assemblée.

Les progrès réalisés à la suite de ces mouvements révolutionnaires sont-ils suffisants pour les femmes ? N’oublions pas que leur émancipation a toujours connu des régressions. Gardons présent à l’esprit que notre cap est celui de la liberté, de la dignité et de l’autonomie des femmes, en sus de leur activité économique et sociale.

LE PRÉSIDENT – Il est bientôt 17 heures. Si d’autres membres de l’Assemblée souhaitent encore voter pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Belgique, ils doivent le faire sans tarder.

La parole est à Mme Blondin.

Mme BLONDIN (France) – Lorsque nous revoyons après plus d’un an les premières images des manifestants de la place Tahrir, de Sidi Bouzid ou de Benghazi, transmises par cet outil exceptionnel d’information qu’est Internet, nous ne pouvons qu’être frappés par le nombre de femmes descendues dans la rue pour dénoncer les pouvoirs en place, conférant à ces révolutions en gestation des élans féministes. L’image était forte, ces pays semblaient s’affranchir de tous les conservatismes, qu’ils soient politiques ou sociaux. Leur douleur personnelle, leur désir d’émancipation sociale devenaient le cri de tout un peuple.

Nous avons aussi à l’esprit une autre image de la place Tahrir : celle de cette femme traînée à terre, battue par trois soldats casqués, uniquement protégée de l’infamie par un soutien-gorge bleu. Elle venait tout simplement dénoncer le refus du pouvoir militaire de voir se concrétiser les promesses de la révolution déclenchée un an plus tôt. Que s’est-il passé en un an ? L’histoire des révolutions est toujours sensiblement la même. Aux espoirs et à l’euphorie succède généralement une phase de retour à l’ordre, plus ou moins longue.

Dans le contexte du Printemps arabe, ce retour à l’ordre est pervers, car il est en partie imposé par ceux qui sont les bénéficiaires du bouleversement de l’ordre établi : les partis confessionnels. Les porte-voix de la révolte ont été invités à rentrer chez elles. La politique est, en somme, un droit de l’homme, pas celui de la femme.

Je ne peux m’empêcher de faire référence à la Révolution française de 1789 : les femmes, qui y avaient participé activement, ont été sommées de regagner leurs foyers et de s’occuper des affaires domestiques et non plus politiques. Plusieurs de celles qui ont malgré tout porté la parole des femmes ont fini sur l’échafaud. Il a fallu attendre près de deux siècles pour qu’elles recouvrent des droits politiques.

Je félicite donc la commission sur l’égalité et la non-discrimination de se saisir de ce problème. Au travers des outils dont dispose notre Organisation, je pense notamment au Centre Nord-Sud, il convient de répondre à l’objectif de Victor Hugo : « Une moitié de l’espèce humaine est hors de l’égalité, il faut l’y faire rentrer : donner pour contrepoids au droit de l’homme le droit de la femme ».

Pour conclure, une autre image me revient en tête, celle de la blogueuse Aliaa Magda el-Mahdy. Elle pose nue, vêtue des seuls bas et de ballerines rouges, le rouge couleur symbolique de la révolution. Que nous dit-elle ? Elle dénonce une société sexiste, hypocrite et violente, qui vient d’imposer des tests de virginité à des manifestantes déçues de la place Tahrir. Voilà comment se traduit la frustration des jeunes héroïnes du Printemps arabe : la provocation face au silence qui s’impose progressivement, vicieusement. A nous, désormais, de porter leur voix !

LE PRÉSIDENT – Il est maintenant 17 heures. Le scrutin pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Belgique est clos. J’invite les scrutateurs, Mme von Cramon-Taubadel et M. Flego, à bien vouloir aller procéder immédiatement au dépouillement du scrutin au service de la séance. Le résultat sera proclamé si possible avant la fin de la présente séance.

Nous reprenons maintenant la discussion générale.

La parole est à Mme Marland-Militello.

Mme MARLAND-MILITELLO (France) – Permettez-moi, Madame la rapporteure, de vous adresser toutes mes félicitations pour votre rapport très complet et le choix de son titre. Si, comme vous, je regrette que les dernières élections dans les pays du Printemps arabe se soient traduites par une diminution de la représentation politique des femmes, je ne pense pas que l’introduction de mesures positives dans les lois électorales constitue l’unique solution.

L’exemple de la France, sur ce point, est significatif : en 2002 puis en 2007, la loi a introduit diverses mesures visant à promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives. Pourtant, force est de constater que les partis, quels qu’ils soient, trouvent souvent une « stratégie de détournement » et que les progrès ne sont pas encore à la hauteur des ambitions du législateur.

Ainsi, à l’Assemblée nationale, nous ne sommes que 20 % de femmes députées. Et si les femmes sont désormais mieux représentées dans les assemblées territoriales élues au scrutin de liste, elles le sont nettement moins dans leurs exécutifs, sans parler de leur faible nombre dans les postes à haute responsabilité au sein des entreprises.

D’ailleurs, comment ne pas noter en lisant votre rapport qu’au Maroc, malgré l’existence de quotas au parlement, les femmes ne représentent que 16,7 % des élus, alors qu’en Tunisie elles sont 27 % au parlement, soit bien plus qu’en France ?

Mais, dans cette région du monde, la Tunisie est à l’avant-garde en matière de droits et de statut des femmes, leur participation à la vie publique n’y étant pas une idée neuve. Bien sûr, la commission électorale avait instauré pour ces dernières élections une obligation d’alternance sur les listes, mais les femmes sont présentes depuis longtemps dans la vie socio-professionnelle tunisienne – ainsi, en 2010, représentaient-elles dans le corps judiciaire 27 % des juges et 31 % des avocats. Le parti Ennahda, qui avait promis de protéger les acquis en la matière, vient de refuser – malgré les pressions – d’inscrire la charia dans la nouvelle Constitution. C’est un signe positif dont nous devons nous réjouir.

La discrimination positive en faveur des femmes, qui entend pallier l’insuffisance démocratique, est en fait l’aveu d’un échec : celui de la mise en place d’une véritable politique d’égalité des chances entre hommes et femmes sur le plan social, économique et politique. Comme Mme Badinter, je considère de surcroît que l’application de cette discrimination-là présente le grave inconvénient de cantonner les femmes à des droits liés à leur sexe et risque de les dissocier de l’idée d’universalité de la nature humaine, ce qui pourrait un jour se retourner contre elles.

En outre, la promotion de l’égalité des chances passe d’abord, Messieurs, par votre éducation : vous devez savoir que les femmes sont à la fois vos semblables et différentes. En étant mieux éduqués, vous favoriserez leur égal accès à l’éducation et vous contribuerez à lutter contre les inégalités économiques et sociales qu’elles subissent.

Dans les pays du Printemps arabe, la citoyenneté active des femmes passera par l’égal accès des femmes à l’éducation et par la lutte contre les inégalités économiques et sociales, qui a d’ailleurs été à l’origine de ce Printemps. C’est à l’aune des droits des femmes que l’on pourra juger du succès des révolutions et du niveau de leur civilisation humaniste !

LE PRÉSIDENT –La parole est à M. Hancock.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – Je félicite Mme la rapporteure ainsi que le secrétariat de la commission pour cet excellent travail, équilibré, bienvenu et à bien des égards impressionnant.

Parfois, au cours d’une vie politique, on a la chance de se trouver au bon endroit au bon moment. Ce fut mon cas cet après-midi puisque j’ai eu la chance d’entendre six femmes issues du monde arabe s’exprimer avec force et éloquence quant à leur engagement. L’Assemblée ne peut que s’en féliciter et soutenir leur combat. Je pense, en particulier, aux propos de cette jeune Yéménite concernant une femme qui, au cours d’une manifestation, a été jetée à terre et frappée à coups de pieds par un homme qui n’appartenait ni à la police ni à l’armée mais qui manifestait, comme elle, et n’avait pas supporté l’audace dont elle avait fait preuve en marchant près de lui et non un pas en arrière. Cette jeune femme pensait que raisonner ainsi relevait du passé. Las…

Ce serait faire preuve de stupidité que de ne pas écouter les femmes ! Dans tout le monde arabe, elles revendiquent l’égalité, le respect et la protection de leurs droits, de leur famille ainsi que la participation à la vie politique. Le temps où les hommes dictaient leur volonté à l’ensemble de la société est révolu. Je note, d’ailleurs, qu’un tel résultat n’a été acquis en Europe que de haute lutte, les femmes n’ayant par exemple obtenu le droit de vote que fort récemment dans un certain nombre de pays.

Les femmes arabes sont grosses de l’avenir de leurs pays. Nulle société ne peut vivre si la moitié de la population y est reléguée. Les femmes arabes méritent mieux et nous devons faire notre possible pour que leurs ambitions ne soient pas déçues mais se concrétisent.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Bourzai.

Mme BOURZAI (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, « le succès ou l’échec d’une révolution peut toujours se mesurer au degré auquel le statut de le femme s’en est trouvé rapidement modifié dans une direction progressive ». Ces mots ne sont pas tirés de l’excellent rapport de notre collègue Fatiha Saïdi, que je félicite, mais du livre d’une célèbre militante des droits de l’homme, Angela Davies, intitulé Femmes, race et classe, paru il y a trente ans. C’est dire toute l’importance et la pertinence du débat que nous tenons après les auditions et les témoignages si émouvants que nous avons entendus cet après-midi.

En effet, il existe un risque que les femmes se retrouvent aujourd’hui exclues ou marginalisées dans la construction politique de leurs pays en dépit de leur large contribution aux mouvements révolutionnaires et au renversement des régimes précédents. Ce risque m’apparaît d’ailleurs d’autant plus plausible que l’histoire fournit malheureusement plusieurs exemples de cas dans lesquels les femmes ont été privées des bénéfices de la victoire. Les « Tricoteuses » de la Révolution française de 1789 furent ainsi spoliées de leurs droits par le fameux code Napoléon. Il en fut de même en Algérie où les femmes, qui étaient pourtant très engagées dans le mouvement de décolonisation, ont connu finalement un recul de certains droits après l’indépendance suite à l’adoption, en 1984, d’un code de la famille qu’elles furent nombreuses à appeler « code de l’infamie ». De même, en Iran, les femmes étaient nombreuses à réclamer le départ du Shah mais la mise en place de la République islamique s’est finalement traduite par un recul de leurs droits.

J’oscille donc aujourd’hui entre stupeur et inquiétude lorsque je vois le Conseil national de transition, en Libye, annoncer qu’il restaure la polygamie et interdit le divorce. Je m’inquiète lorsque j’entends certaines femmes égyptiennes déclarer, après tout le combat qu’elles ont pourtant mené pendant des mois place Tahrir, qu’elles préfèrent boycotter les élections législatives plutôt que de participer à un simulacre qui ne profitera en aucun cas aux efforts en faveur de la justice, de la liberté, de l’égalité et de la dignité.

J’entends déjà des voix qui s’élèvent pour me dire qu’il faut laisser le temps faire son œuvre, que les mentalités sont toujours lentes à évoluer. Il n’empêche que les droits des femmes sont souvent parmi les derniers à être mis en œuvre, quand ils le sont. Et si les femmes de la rive sud de la Méditerranée voyaient aujourd’hui leur participation confisquée, ce serait finalement tout l’espoir suscité par le Printemps arabe qui retomberait. Un tel dénouement reviendrait à dire que les droits de l’homme n’ont rien d’universel et qu’ils ne doivent s’appliquer qu’à la moitié de l’humanité, les hommes.

Dans une Assemblée comme la nôtre, attachée au principe d’universalité des droits de l’homme, une telle évolution ne saurait être acceptée. C’est pourquoi nous devons aider les femmes de ces pays car il ne s’agit pas d’un combat pour les femmes, mais d’un combat pour les pays tout entiers. C’est d’ailleurs bien ce qu’écrivait Stendhal il y a bientôt deux siècles : « L’admission des femmes à l’égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la civilisation et elle doublerait les forces intellectuelles du genre humain ».

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Erkal Kara.

Mme ERKAL KARA (Turquie) – Monsieur le Président, chers collègues, je voudrais tout d’abord remercier Mme la rapporteure pour son rapport détaillé. Je ne comprends cependant pas pourquoi, dans l’exposé des motifs, Mme Saïdi rappelle que la Turquie a aboli la polygamie. Celle-ci l’a été en 1926, alors pourquoi en parler maintenant ?

Les soulèvements en Tunisie et en Egypte l’année dernière ont entraîné des mouvements de protestation contre la dictature au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et dans la région du Golfe. Ces mouvements appellent à la démocratisation, à de nouvelles constitutions fondées sur l’égalité, la liberté d’expression et de réunion et des élections libres.

Les femmes comme les hommes ont payé le prix fort lors de ces mouvements de protestation. Elles doivent donc être en mesure de jouer pleinement leur rôle dans la construction de l’avenir de leur pays. Depuis des décennies, les femmes de ces régions sont fortement impliquées dans les réformes en organisant des grèves syndicales et en défendant leur droit à la liberté d’expression, en participant aux manifestations qui ont mené à l’éviction des anciens régimes. Après avoir joué un rôle vital dans la révolution, les femmes ne doivent pas être exclues du processus de réforme menant à la construction d’un nouvel avenir.

Malheureusement, peu de femmes sont nommées aux postes importants ou dans les nouveaux cabinets. Serait-ce le message suivant qui leur est adressé : « Seuls les hommes peuvent participer aux affaires sérieuses » ?

Dans toute la région, les femmes font pression sur leurs gouvernements pour qu’ils prennent des mesures significatives en vue, non seulement d’améliorer les droits des femmes, mais également d’aligner les lois nationales sur les engagements internationaux.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Rouquet.

M. ROUQUET (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, Mme Sihem Badi, ministre des Femmes et de la Famille de Tunisie, déclarait le 7 mars à Paris : « les femmes ne se sont pas contentées de participer aux mouvements de protestation, elles ont également pensé la révolution ». Elles sont descendues dans la rue pour combattre les régimes autoritaires et ont subi, comme les hommes, les coups, les arrestations, les tortures. Pourtant rien n’est acquis pour elles.

Certes, les situations varient d’un pays à l’autre mais au moment où les nouveaux régimes se mettent en place, il convient de nous montrer vigilants afin que les droits déjà acquis soient conservés et que de nouveaux droits soient accordés aux femmes. Car sans volonté politique de changement, le Printemps arabe ne se traduira pas en « Printemps des femmes ». Car sans égalité réelle entre les hommes et les femmes, la démocratie ne sera qu’une chimère !

Je prendrai deux exemples : le Maroc et la Tunisie. Le statut de Partenaire pour la démocratie du Maroc lui impose de s’engager pour le respect des droits de l’homme et de l’Etat de droit, notamment en matière de droits des femmes. De réelles avancées ont été obtenues, avec en particulier l’article 19 de la nouvelle Constitution qui consacre le principe de l’égalité des droits des femmes et des hommes. En tant que partenaire du Maroc, notre Assemblée a aussi des responsabilités et devra se montrer attentive à la mise en œuvre de ce principe constitutionnel ainsi que de la levée des réserves à la Convention CEDAW dans les textes législatifs, notamment le code pénal. Nous ne pourrons accepter que les textes ne se traduisent pas en droits réels pour toutes les Marocaines, comme c’est encore le cas pour la réforme de la Moudawana (code de la famille) de 2004 !

Le deuxième exemple est celui de la Tunisie, le pays du Maghreb le plus avancé en matière de statut de la femme. Le parti islamiste Ennahda s’est engagé à préserver les droits acquis des Tunisiennes, mais plusieurs déclarations récentes de responsables de ce parti sur l’adoption, les mères célibataires ou le mariage coutumier ont inquiété les femmes de ce pays et peuvent également inquiéter notre Assemblée. Néanmoins, le refus d’inscrire la charia dans la nouvelle Constitution est un signe positif qu’il convient de saluer ! Nous devons rester vigilants alors que des agressions se multiplient dans des établissements d’enseignement contre des femmes. Cela est inacceptable ! Mais préserver ces droits ne sera pas suffisant, car les femmes tunisiennes se sont battues pour accéder à une plus grande égalité, notamment en matière successorale : les nouveaux dirigeants devront prendre en compte ces demandes dans les réformes à venir !

Pour conclure, je reprendrai le message de l’appel des femmes arabes pour la dignité et l’égalité lancé le 8 mars dernier : « Ensemble, les hommes et les femmes arabes ont fait leur présent, ensemble ils doivent construire un avenir meilleur ».

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Michel.

M. MICHEL (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, à l’immense espoir qu’a suscité le Printemps arabe succède aujourd’hui une forme de scepticisme, pour partie lié à la montée en puissance au sein de ces nouvelles démocraties des partis islamistes radicaux, salafistes. Alors que ces révolutions avaient été conçues par leurs promoteurs comme un moyen d’ancrer durablement ces pays dans la modernité, la forte adhésion d’une partie des populations concernées à un discours conservateur et à une vision patriarcale de la société n’est pas sans susciter d’inquiétude.

Je veux bien croire que les pays concernés par le Printemps arabe sauront s’affranchir d’une inclinaison pour partie légitime à privilégier un modèle de développement politique reposant sur des valeurs niées sous les anciens régimes. Mais ces régimes, il faut bien le dire, respectaient toutes les religions.

Nous ne devons pas pour autant attendre les bras croisés qu’une semblable évolution s’opère. Nous avons développé depuis un an un certain nombre d’outils en vue de permettre aux nouvelles autorités locales de transformer ces pays en des démocraties modernes. Il s’agit pour nous, au travers de ces instruments de coopération, de bien réaffirmer le caractère universel des droits de l’homme. Il ne peut y avoir d’application relative de ces principes en fonction d’une réalité socio-culturelle.

L’affirmation des valeurs démocratiques passe plutôt par une mise en avant de réformes qui visent directement les femmes : statut de chef de famille, condamnation du viol marital, lutte contre la violence domestique, abolition de la polygamie, et j’en passe. Et ce n’est pas seulement le Code pénal, Madame la ministre, qui réglera ce problème, mais l’éducation d’une société tout entière.

Le Maroc ou la Tunisie ont déjà réalisé des progrès remarquables en la matière, soulignant combien dans ce domaine, comme dans d’autres, il n’existe pas de limite géographique à une mise en pratique pleine et entière des valeurs qui nous animent.

Ces premiers exemples de réussite doivent servir de fil conducteur aux pays voisins. Je suis d’ailleurs un peu surpris et déçu que notre excellente rapporteure se soit limitée à deux pays, le Maroc et la Tunisie, les plus en avance dans le domaine de la promotion de la femme. Elle n’a pas cité la Libye ou l’Algérie, où, depuis 1962, le statut des femmes a considérablement régressé. Je suggère d’ailleurs que notre rapporteure poursuive au sein de la commission ce travail engagé sur les pays de la Méditerranée où se sont produit des révolutions, afin d’établir un point précis de la situation.

Il s’agit de garantir le principe même de la démocratie et de permettre à ceux qui croient comme à ceux qui ne croient pas, ou à ceux qui ne croient pas aux mêmes religions, de vivre en harmonie au sein d’une société moderne, ouverte, qui respecte les différences.

Il nous appartient donc d’être vigilants. Le Printemps arabe ne s’est pas terminé avec la chute des autocrates. Il se poursuit. Il s’agit d’un mouvement de fond plus que d’une simple révolte politique. Il est indispensable que nous continuions donc à le soutenir et que nous contribuions à faire respecter les motivations de ses premiers promoteurs, ces anonymes de la société civile, ces enfants des réseaux sociaux, ces filles et ces fils de ces pays, qui ne sauraient comprendre que les valeurs au nom desquelles ils se sont soulevés ne soient pas transposables dans leurs pays.

LE PRÉSIDENT – Mme Quintanilla, inscrite dans le débat, étant absente de l’hémicycle, la parole est à Mme Anttila.

Mme ANTTILA (Finlande)* – Les droits de l’homme sont des droits fondamentaux, qui appartiennent à tous, l’égalité entre les femmes et les hommes en constituant l’un des aspects importants. Malheureusement, trop de femmes ne jouissent pas de ces droits fondamentaux. Pourtant, dans bien des pays, les femmes portent la très grande responsabilité de nourrir l’ensemble de la famille. Sans leur travail, les enfants et les hommes souffriraient de la faim. Elles exercent des rôles importants, elles doivent jouir des mêmes droits que les hommes.

Le Printemps arabe rend possibles les réformes constitutionnelles qui permettront de mettre en œuvre le principe de l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous avons tous vu les grands progrès qui ont été accomplis par ces pays. Nous avons tous constaté qu’ils sont sur la bonne voie. Ils ont besoin de notre plein soutien et nous sommes tout prêts à les aider dans leur tâche ambitieuse. De bonnes pratiques existent dans bien des pays, chacun sait que la démocratie repose sur les élections libres et je voudrais rappeler à cette occasion l’importance de l’égalité des droits politiques. Nous partageons tous les mêmes valeurs et le même engagement en faveur de la démocratie pluraliste, des droits de l’homme et de la primauté du droit. Les droits des femmes font partie intégrante des droits de l’homme.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Marin.

Mme MARIN (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, Anne Sugier, cofondatrice d’Atlanta + « pour la représentation des femmes aux Jeux Olympiques » rappelait récemment que le respect de la Charte Olympique aux JO de Londres serait révélateur de la situation des femmes dans le monde arabe, un an après la révolution. De la possibilité de pratiquer un sport sans discrimination à l’interdiction d’exprimer une opinion politique ou religieuse, les principes de la Charte olympique sont malheureusement souvent bafoués ! Rappelons qu’à Pékin, en 2008, quatorze délégations ont défilé avec des femmes voilées et plusieurs délégations ne comptaient aucune femme.

Ce moment d’universalité montre que l’égalité entre hommes et femmes est en péril, un péril qui ne touche pas que les pays arabes mais aussi l’Europe. Dans les pays du nord de la Méditerranée, si dans les textes, les femmes ont les mêmes droits que les hommes, dans la réalité, bien des inégalités subsistent.

Madame la rapporteure, plusieurs principes que vous proposez pourraient à bien des égards nous être adressés ! Certes, si je prends l’exemple de la France, l’égalité entre hommes et femmes a été inscrite dans le Préambule de la Constitution de 1946 et la parité dans la Constitution en 1999. Mais nous avons attendu 2008 pour que le principe de la parité soit élargi au-delà du champ politique aux responsabilités professionnelles et sociales.

Rappelons que nous ne votons que depuis 1945 et que nous ne sommes des « capables juridiques » que depuis 1965. Auparavant, la femme française devait demander l’autorisation de son mari pour exercer une profession ou gérer ses biens ! Et pourtant, malgré ces avancées, malgré des lois pendant cette législature qui s’achève sur le renforcement de la lutte contre les violences conjugales ou pour établir un quota de femmes au sein des conseils d’administration des entreprises, 50 % des saisines adressées au défenseur des droits en France le sont pour des femmes.

Vous avez raison, Madame la rapporteure, sans évolution des mentalités, les lois, les quotas, les réformes n’auront que peu de réalité. Si les pays nordiques sont cités en exemple sur les questions de l’égalité hommes-femmes, c’est que, dès le plus jeune âge, l’éducation nationale assure la promotion de l’idée d’égalité entre les sexes et la lutte contre les stéréotypes. En Suède, les femmes sont des hommes comme les autres !

Oui, le Conseil de l’Europe doit réaffirmer l’universalité et l’indivisibilité des droits de l’homme, sans interprétation liée à la culture ou à la religion. Nous sommes confrontés à un net recul de la liberté des femmes dans certains quartiers en Europe. Cela doit nous alerter, nous, responsables politiques du nord et du sud de la Méditerranée, sur la fragilité de la condition de la femme dans la société et se traduire par une grande vigilance. Ce que nous exigeons des pays du Printemps arabe pour devenir de « véritables démocraties », essayons de ne pas le perdre chez nous, essayons de l’appliquer dans nos démocraties du Conseil de l’Europe.

L’organisation Atlanta + souligne qu’aux JO, la seule médaille d’or remise par le Président du CIO est celle du marathonien. Je pense que ce serait un beau geste pour la parité dans l’histoire si, à Londres, dans le pays qui préside le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, le Président du CIO remettait aussi sa médaille à la marathonienne, souvent issue des pays du Sud. Ainsi toutes les jeunes filles pourraient se dire « pourquoi pas moi » !

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Voruz.

M. VORUZ (Suisse) – Les paragraphes 8.1 et 8.2 indiquent que les pays du Printemps arabe s’engagent sans équivoque en faveur de l’égalité des droits entre femmes et hommes, à savoir « qu’ils s’engagent sans équivoque à procéder à des réformes pour améliorer le statut des femmes et supprimer toute forme de discrimination à leur égard. Il faut donc mettre en place des dispositions spécifiques qui visent à promouvoir la représentation des femmes dans les instances publiques élues à tous les niveaux. »

L’ensemble du rapport demande que la condition des femmes soit respectée dans les faits, que ce soit en Tunisie, en Libye, en Egypte, voire au Maroc. Les propos de M. le ministre des Affaires étrangères et de Mme la ministre de la Solidarité du Maroc nous réconfortent sur ce point.

Le rapport marque une certaine inquiétude sur la commission de l’égalité et la non-discrimination quant à l’avenir de la condition des femmes dans ces pays, alors qu’elles ont été en première ligne lors des révolutions. De fait, les résultats des élections à l’Assemblée constituante en Tunisie et des législatives en Egypte pourraient nous laisser penser que la femme est exclue des réformes et que ses droits essentiels sont oubliés.

Certes, les peuples se sont exprimés en toute liberté et, selon moi, il n’y a pas lieu de mettre en doute les résultats de ces élections. Seulement, il faut s’assurer que le Printemps arabe ne devienne pas l’Hiver arabe pour les femmes. Ne dit-on pas que la femme est l’avenir de l’homme ?

Il ne convient pas de mélanger religion et politique. Les convictions religieuses profondes appartiennent à la personne et non à l’Etat, qui ne doit pas imposer une quelconque religion au peuple.

Une fois la résolution de la commission adoptée, je souhaite vivement que la commission de suivi nous renseigne régulièrement sur l’évolution de la situation.

LE PRÉSIDENT – M. Rzayev, inscrit dans le débat, étant absent de l’hémicycle, la parole est à Mme Anikashvili.

Mme ANIKASHVILI (Géorgie)* – Je veux remercier Mme la rapporteure pour son excellent travail et saluer Mme la ministre, dont la présence dans notre Assemblée est significative.

Le sujet du rapport est vital pour les pays de la rive sud de la Méditerranée. Ces pays connaissent une période de transition qui voit la naissance de la société civile, du respect des droits de l’homme et de l’égalité entre hommes et femmes. Cependant, on doit déplorer le fait que, un an après le début du Printemps arabe, les femmes n’aient pas vu leur vie améliorée dans ces pays. Au contraire, les élections législatives ont réduit leur représentation politique dans certains de ces pays.

Il faut également souligner que le Printemps arabe n’aurait pas été le même sans les femmes arabes. De nombreuses blogueuses ont été très actives dans les médias sociaux. Elles ont exprimé leur point de vue, diffusé des informations sur les événements et dirigé les mouvements de protestation. On ne peut donc que regretter que les autorités n’aient pas procédé à des réformes pour améliorer le statut des femmes et supprimer toute forme de discrimination à leur égard.

L’amélioration de la représentation politique des femmes est la première condition de la démocratisation d’une société. Aucun Etat ne peut être considéré comme véritablement démocratique s’il n’est pas fondé sur une participation équilibrée des femmes et des hommes à la vie publique. La possibilité donnée de manière égale aux hommes et aux femmes de jouir des droits humains renforce la stabilité politique et le développement démocratique de ces pays.

Le Conseil de l’Europe, ainsi que les autres organisations internationales partageant ces valeurs démocratiques, peuvent jouer un rôle décisif dans ce processus. Il est nécessaire de renforcer le dialogue avec la société civile et les organisations de femmes, de sensibiliser les médias à l’égalité des sexes, d’éliminer les barrières pratiques et juridiques qui entravent l’accès effectif des femmes à la justice, de renforcer les relations parlementaires, de lutter contre la violence à l’égard des femmes, y compris la violence domestique, et d’encourager l’indépendance économique et financière des femmes. Mais, surtout, nous devons promouvoir activement l’accès des femmes à l’éducation car c’est elle qui leur ouvre des opportunités dans la société des pays de la rive sud de la Méditerranée. Le Printemps arabe est le commencement pour les femmes de ces pays ; il est de notre obligation de les soutenir.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Szél.

Mme SZÉL (Hongrie)* – De nombreuses femmes ont participé à la lutte contre les régimes opprimant leurs peuples. Elles ont combattu en faveur de la démocratie et de la liberté ; elles se sont exprimées dans les médias et sur internet. Dans la plupart des pays concernés, des progrès ont été réalisés. Pour autant, il nous faut garder à l’esprit un certain nombre de choses, à commencer par celle-ci : l’égalité entre hommes et femmes est une cause incontournable. Sans elle, il n’y a pas de démocratie.

Depuis le Printemps arabe, le nombre de femmes dans les milieux politiques a diminué. En Egypte, elles représentent 2,2 %. Au Maroc le pourcentage est tombé de 16,7% à 12,3%. D’où l’idée de quotas. Pour l’instant, même là où ils existent, l’objectif n’a pu être atteint. Pour promouvoir la démocratie, il faut donc revoir ces quotas et modifier les législations.

Pour changer les systèmes de valeurs, pour que les femmes ne soient pas considérées comme des citoyennes de seconde zone, il faut traiter la question de l’égalité entre hommes et femmes en faisant preuve de sensibilité à l’égard de la culture locale. Les efforts pour y parvenir ne peuvent passer par la violence. Il faut donc, par exemple, que les pays de la région signent le plus rapidement possible la Convention des Nations Unies pour l’élimination de toute forme de discrimination contre les femmes. Il faut qu’ils introduisent dans leur Constitution le principe de l’égalité entre hommes et femmes et qu’ils l’appliquent concrètement. Pour permettre de changer à long terme les mentalités, il faut aussi permettre aux ONG d’agir.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Sabella.

M. SABELLA (Autorité nationale palestinienne, partenaire pour la démocratie)* – Nous nous battons pour obtenir davantage d’égalité entre les femmes et les hommes. Le titre du rapport – un excellent rapport, solidement étayé – le rappelle d’ailleurs fort judicieusement.

La question est de savoir si les femmes, parmi d’autres groupes de la société, peuvent être intégrées lorsque naissent de nouveaux systèmes politiques. Le défi pour ces systèmes est de parvenir à un équilibre entre les modèles traditionnels de la société, qui s’appuient sur la religion, le patriarcat et d’autres vieilles justifications, et des modèles plus ouverts et plus démocratiques qui mettent l’accent sur les droits des individus. Nous serons confrontés à ce défi pendant encore longtemps dans la plupart, sinon la totalité des sociétés arabes et musulmanes. Mais il ne faut pas battre en retraite : l’avenir de toute la région – je parle en tant que représentant d’un de vos voisins du sud – dépendra de notre capacité à intégrer les droits de l’homme dans des modèles qui continueront en même temps à respecter les identités collectives et familiales. D’ailleurs, il est impossible de nier le droit des individus – femmes ou hommes – à l’égalité et de leur refuser un accès sans obstacle à toutes les sphères de leur société, si nous voulons pouvoir continuer à espérer dans l’avenir des sociétés sur la rive sud de la Méditerranée.

La transformation du vieux en quelque chose de neuf est un processus difficile qui – certains d’entre vous l’ont déjà dit – ne va pas, parfois, sans certains reculs. Nous avons entendu aujourd’hui Mme la ministre du Maroc, qui a souligné les succès déjà rencontrés. Comme le rappelle le rapport, la Tunisie est un modèle qu’il faut préserver. L’exemple de ce pays montre qu’il est possible de réussir dans cet effort ; il peut constituer une source d’émulation pour d’autres pays et sociétés de la rive sud de la Méditerranée.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Biedroń.

M. BIEDROŃ (Pologne)* – Je félicite Mme Fatiha Saïdi pour son excellent rapport. Le processus de transition démocratique sur la rive sud de la Méditerranée ne va pas de pair avec un progrès en matière d’égalité entre les hommes et les femmes. Cette cause requiert une participation forte de la communauté internationale, y compris de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Je salue à cet égard le projet de résolution et j’en appelle aux membres de l’Assemblée pour qu’ils adoptent ce texte important.

Les expériences de transition démocratique en Europe centrale et en Europe de l’Est démontrent que les femmes ne bénéficient pas nécessairement et pleinement de la démocratie. Les droits des femmes sont souvent mis de côté pendant ces transitions, en dépit du fait qu’elles ont participé activement au changement. Non seulement la situation des femmes ne s’est pas améliorée, mais en plus, dans certains pays de ma région, les acquis précédents ont été perdus. Par exemple, après la transition démocratique, l’avortement a été interdit et pénalisé en Pologne. La législation en la matière est l’une des plus restrictives de toute l’Europe. Cette régression est due au fait que l’Eglise catholique est devenue particulièrement puissante après l’effondrement du communisme. Elle joue d’ailleurs toujours un rôle très important.

Ce ne sera pas le cas dans les régions dont nous parlons. Mais en tenant compte des enseignements que nous avons tirés à la lumière de ce qui s’est passé en Europe, nous devons veiller à ce que les mouvements des femmes sur la rive sud de la Méditerranée reçoivent un soutien plein et entier de la communauté internationale. Il faut en effet continuer à favoriser un changement positif pour les femmes dans cette partie du monde.

Je viens d’un pays dans lequel le Solidarność historique rimait avec égalité, liberté et unité, un symbole qui est devenu une réalité. Solidarność entre les hommes et les femmes est particulièrement nécessaire au sud de la Méditerranée, et je souhaite à toutes les femmes de la région beaucoup de force et bonne chance !

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Loklindt.

Mme LOKLINDT (Danemark)* – Tout d’abord, félicitations à Mme Saïdi pour ce rapport très complet dont le titre indique que la réussite du Printemps arabe dépend de l’égalité entre les femmes et les hommes. Je pense que personne n’en doute plus après les témoignages que nous avons entendus cet après-midi et qui constituent une excellente base pour le débat sur ce rapport.

Les droits de l’homme : les femmes doivent pouvoir en jouir pleinement dans le cadre des nouvelles constitutions en Egypte ou en Tunisie. Les droits de l’homme sont indivisibles et doivent être garantis à toutes les femmes, non seulement pour elles-mêmes, mais pour l’avenir même de leur pays en transition. Aucune culture, aucune religion ne saurait servir de prétexte à des discriminations à l'encontre des femmes.

Comme le rapport le souligne, le succès du Printemps arabe suppose un certain nombre de conditions, dont la participation des femmes à la vie publique et politique. Toutefois, nous savons que, même en Europe, la représentation des femmes ne va pas sans beaucoup de difficultés. A cet égard, nous devons donc lancer un appel aux hommes arabes, aux hommes responsables, qui ont un rôle important à jouer en la matière.

Mais donner davantage de pouvoir aux femmes passe aussi par l’éducation et la liberté économique. Pour donner aux femmes les mêmes chances qu’aux hommes dans la vie économique, sans doute faudra-t-il encourager leur accès à l’emploi en mettant en place des facilités pour l’accueil des enfants et en leur accordant de nouveaux droits sociaux.

Nous pouvons dire globalement qu’en tant que parlementaires européennes, et donc femmes, nous avons l’obligation de soutenir nos sœurs arabes dans la revendication de leurs droits. Ce rapport constitue à cet égard un bon point de départ et un document clé pour notre future lutte en faveur de leurs droits.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Blanco.

Mme BLANCO (Espagne)* – Je félicite Mme Saïdi, notre rapporteure, pour cet important rapport qui met sur la table un problème essentiel : le rôle des femmes lors du Printemps arabe.

Je voudrais également féliciter la ministre marocaine qui a lutté depuis de nombreuses années. Un proverbe arabe dit qu'être coupable, c’est savoir ce que l'on a à faire, mais de ne pas le faire. Les femmes, elles, ont fait ce qu’elles avaient à faire pendant le Printemps arabe. Elles sont sorties dans les rues. Jeunes et plus âgées, elles ont été à la tête de la révolution. Mais si les femmes, comme toujours depuis la Révolution française, ont participé aux révolutions, elles n’en ont pas ensuite récolté les fruits. Illustration de cela : l’Egypte où il n’y a que huit femmes parlementaires et la Syrie ou la Libye, où la situation est terrible aujourd’hui. En Syrie, l’Assemblée populaire ne compte que deux femmes pour vingt-huit hommes.

Comme vous le savez, Madame la ministre et Madame la rapporteure, nous, femmes du nord de la Méditerranée, connaissons très bien ce problème, il n’y a que cinquante ans que nous avons des droits. Auparavant, nous avions besoin de l'autorisation de nos pères, nos grands frères ou de nos maris pour tout ! Une femme médecin, comme je l’étais, ne pouvait même pas ouvrir un compte courant dans une banque et dépenser son argent comme elle le souhaitait ! Nous avons donc dû lutter dans les rues comme dans les mouvements féministes. Nous avons lutté pour entrer dans les partis politiques et pour prendre la parole au sein de ces partis et en leur nom.

Si les femmes des pays arabes qui ont été à l’avant-garde des révolutions n'en tirent pas bénéfice, cela voudra dire que les démocraties concernées ne sont pas complètes. Je dirai même que si les femmes n’y sont pas présentes, ce ne seront pas des démocraties !

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Memecan.

Mme MEMECAN (Turquie)* – Je voudrais féliciter Mme Saïdi pour son excellent rapport sur la situation des femmes dans les pays du Printemps arabe.

Après avoir lu le rapport, qui nous interpelle, et écouté le débat, j’estime qu’il faut que la question des femmes arabes reste à l’ordre du jour des travaux du Conseil de l’Europe pour nous permettre de rester informés et d’agir en cas de besoin. Les développements récents ont montré une fois encore qu’il est plus facile de chasser un patriarche répressif que de se débarrasser du patriarcat dans la société. Or, c’est contre cette forme d’oppression que nous devrons nous unir. Les femmes, soit la moitié de la population de la région, doivent être pleinement intégrées dans les réformes. Cependant, tendance négative, le nombre des femmes diminue dans les conseils de transition, les parlements et les gouvernements. C’est inquiétant, parce que ces instances sont responsables de l’élaboration des nouvelles constitutions et des systèmes politiques de leur pays. Cela n’ira pas sans l’accord des femmes. Les femmes arabes vont devoir créer des systèmes d’alliances, développer des tactiques de négociations pour élaborer des solutions viables pour leur participation politique.

Les femmes et les hommes de notre Assemblée doivent soutenir leur partenaire dans cette lutte grâce à un échange nourri d’expérience sur les tactiques à mettre en œuvre.

Mme Bergamini rappelait à juste titre que le Centre Nord-Sud peut nous en donner l’occasion. La première réunion qui s’est tenue à Rome l’an dernier, intitulée fort judicieusement « Les femmes, agents du changement », a permis de réunir les femmes les plus diverses, du Nord et du Sud, pour un partage d’expériences. Un réseau de femmes a été mis en place après la réunion de Rome pour poursuivre le dialogue.

La prochaine réunion du Centre Nord-Sud aura lieu début novembre à Istanbul. Cette réunion se concentrera sur la participation accrue des femmes à la vie politique et sociale, une chose plus facile à dire qu’à faire, mais des progrès peuvent être obtenus grâce à un soutien adéquat. Donner plus de place aux femmes arabes est une question essentielle pour permettre leur participation aux processus de prise de décision dans la vie politique et sociale.

Les questions concernant les femmes sont diverses dans les sociétés arabes, les réalités différentes, les moyens à mettre en œuvre différents. Il faut donc écouter ces femmes très attentivement avant de proposer nos solutions.

Ces occasions de réunir femmes d’Occident et du monde arabe sont d’excellentes occasions pour écouter, apprendre et partager nos expériences. Des femmes arabes nous ont impressionnés par leur combat héroïque pour mettre fin aux régimes répressifs de leurs pays et ouvrir une ère nouvelle. Nous avons toute confiance, nous savons qu’elles poursuivront leur bataille et parviendront à prendre en charge leur propre vie. Nous ne cesserons jamais de les encourager dans leur effort.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Alastal.

Mme ALASTAL (Autorité nationale palestinienne, partenaire pour la démocratie)* – Je remercie Mme Saïdi et la commission sur l’égalité et la non-discrimination pour ce rapport important et complet.

La femme arabe a créé les conditions du changement au cours du Printemps arabe, tant elle a été active dans les mouvements de protestation.

Ce rapport montre une évolution importante du statut de la femme après ce printemps, en Egypte, au Maroc et ailleurs, mais il y a encore un long chemin à parcourir avant de prétendre à une pleine égalité entre les femmes et les hommes dans la participation à la vie économique et politique.

Après avoir écouté les différents intervenants, les personnes venant de Syrie, de Libye, d’Egypte, de Tunisie, du Maroc et du Yémen, nous avons le sentiment que les femmes souffrent dans le monde arabe d’oppression, de violences domestiques, de discriminations, de violations des droits de l’homme, de négligences, de l’absence de capacité à participer à la vie sociale et politique.

Malgré ces souffrances, une petite fenêtre d’espoir s’est ouverte, donnant aux femmes l’impression qu’elles vont pouvoir accéder à la liberté de choix, à la liberté notamment d’accepter ou de refuser un mariage, à celle de participer à la vie sociale, économique, médiatique et politique dans leur pays, sans subir aucune discrimination et en se prévalant de l’Etat de droit.

Nous devons obtenir de véritables démocraties dans les pays arabes. Cela ne pourra se réaliser qu’avec le soutien de la communauté internationale, et en particulier du Conseil de l’Europe, qui a une longue expérience de la pratique de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit.

Le peuple palestinien souffre et travaille durement pour l’obtention de ses droits, pour garantir sa liberté et la vie dans son Etat. Il essaye d’être un partenaire complet de la démocratie. Mais après des luttes très longues et très anciennes, nous attendons toujours l’avènement du printemps palestinien !

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Chagaf, dernier orateur inscrit.

M. CHAGAF (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Je félicite Mme Saïdi pour son rapport. Néanmoins, j’aurais aimé que celui-ci dévoile les causes d’un drame qu’a tout récemment connu le Maroc.

Le 17 mars 2012, un « sit-in » a eu lieu devant le Parlement marocain à la mémoire d’Amina Filali, une jeune mineure qui s’est suicidée après avoir été contrainte de se marier avec son ravisseur. Ce drame nous interpelle tous, en particulier la délégation marocaine, qui a le statut de partenaire pour la démocratie.

Il est de notre devoir d’attirer l’attention sur ce drame tout en interpellant les responsables, le gouvernement, le parlement et la société civile, pour leur silence. Il faut réviser l’article 475 du Code pénal qui dispose clairement que lorsqu’une mineure nubile enlevée ou détournée a épousé son violeur, celui-ci ne peut être poursuivi que sur la plainte des personnes ayant qualité pour demander l’annulation du mariage et ne peut être condamné qu’après que l’annulation du mariage a été prononcée.

Je saisis l’occasion de la présence de Mme la ministre, militante de la cause féminine, pour qu’elle réagisse positivement à la proposition de loi présentée par le groupe socialiste en vue d’amender les articles 20 et 21 du Code de la famille qui permettent le mariage des mineurs. Il s’agit de sauver nos fillettes de mariages précoces.

LE PRÉSIDENT – La liste des orateurs est épuisée.

Mme la ministre souhaite ajouter quelques mots.

Mme LA MINISTRE DE LA SOLIDARITÉ, DE LA FAMILLE ET DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL DU MAROC * – Je remercie tous ceux qui sont intervenus et qui ont enrichi notre compréhension de la situation. Au Maroc, nous avons réussi à atteindre nos objectifs et nous allons continuer dans cette voie.

S’agissant du rapport, je rappelle que les parlementaires marocains n’ont pas pu donner leur avis, ni participer à la réflexion sur les points qui figurent dans la recommandation et dans la résolution. Dans mon pays, il n’y a absolument pas de mélange entre la politique et la religion. Les deux domaines s’excluent l’un l’autre. Il n’y a aucune raison d’avoir peur. Nous veillons à ce que rien ne menace la démocratie, nous parlons avec tous les représentants de toutes les parties de la société. Nous sommes fiers de toutes les avancées de la démocratie.

Il a été dit que le nombre de femmes participant au gouvernement était plus élevé au cours de précédentes législatures. Effectivement, il y en avait sept dans le précédent gouvernement, au début de l’année 2007, et on peut regretter que leur nombre soit passé de sept à cinq sous le même chef de gouvernement, au cours de la même législature. Parmi ces cinq femmes, trois n’avaient aucune appartenance politique et une seule avait été proposée par un parti. Dès lors, on voit bien qu'il faut qu’une femme soit pressentie par son parti et qu’elle appartienne à l’appareil de celui-ci pour que sa nomination au gouvernement puisse vraiment être envisagée. C’est donc au niveau des partis politiques que le problème doit être posé. Ce sont eux qui n’appellent pas à une participation des femmes et c’est à ce niveau qu’il conviendrait de réfléchir aux moyens d’avoir plus de candidates.

Bref, il faut donc plutôt considérer qu’une seule femme participait précédemment au gouvernement. Nous espérons que les chiffres de la participation des femmes au pouvoir exécutif seront beaucoup plus élevés au terme de la législature actuelle.

Un certain nombre de problèmes doivent aujourd’hui être traités au niveau mondial. L’une des questions les plus importantes est celle de la violence faite aux femmes. On voit dans les pays les plus avancés d’Europe que les femmes continuent d’être victimes de violences. Nous devons faire de notre mieux, déployer toute l’énergie nécessaire pour éradiquer cette violence. Arrivés au degré de civilisation qui nous caractérise, nous ne sommes plus dans la situation où il serait permis à un quelconque individu de pratiquer la violence, où il serait permis au fort d’exercer sa force à son profit et au détriment d’un faible. Il faut essayer de réfléchir au niveau mondial à des solutions. C’est ainsi que nous pourrons conclure de manière appropriée les débats de cette journée, et tant d’autres auxquels vous participez.

Il faut consolider la position de la femme dans le monde entier.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Madame la ministre, de votre participation.

J’appelle maintenant la réplique de la commission. Madame la rapporteure, vous disposez encore de huit minutes.

Mme SAÏDI (Belgique), rapporteure – Chers collègues, je vous remercie toutes et tous de l’intérêt que vous avez accordé à ce rapport et de vos contributions également constructives. Je vous remercie également de vos félicitations, que je partage très largement avec tous les membres de la commission. Je vais essayer de répondre de manière construite à toutes vos questions et interpellations. Soyons concrets : non, la situation des femmes ne s’est pas améliorée au lendemain du Printemps arabe. C’est pourquoi j’ai évoqué la nécessité d'une constante des courants progressistes.

En Tunisie, des prédicateurs étrangers sont venus dans les mosquées exhorter les Tunisiens à pratiquer les mutilations génitales féminines, à rétablir la polygamie et à pratiquer le mariage coutumier. Je rappelle que les mutilations génitales féminines ne sont nullement pratiquées ni en Tunisie ni au Maroc et qu’elles constituent une atteinte flagrante à l’intégrité physique et, partant, aux principes d’égalité et de dignité humaine.

Bien souvent, l’Histoire se répète. Vous avez raison, Madame Blondin, Madame Bourzaï : de nombreuses femmes ont dû reprendre le chemin du foyer après avoir participé à la conquête de l’indépendance de leur pays. Il faut donc redoubler de vigilance et d’attention quant au sort de nos consœurs à travers le monde.

S’agissant de l’arrivée des islamistes au pouvoir, des Tunisiennes que j’ai rencontrées m’ont expliqué à quel point elles sont aujourd’hui libérées de l’oppression et de la dictature qui furent longtemps leur lot quotidien. Cela me paraît aussi important à rappeler.

L’éducation est évidemment un facteur indéniable de promotion des droits humains et d’égalité. Il importe de s’y appliquer dès le plus jeune âge. Nous l’avons souligné dans le rapport, et cela me permet aussi de rappeler que la question de l’égalité est multifactorielle. Vous l’avez bien expliqué, Madame la ministre, et cette approche globale doit aussi nous inciter à examiner nos politiques de coopération et de développement par le prisme de la question du genre.

Nous avons délibérément mentionné la question de la polygamie en Turquie pour souligner que des pays musulmans, des pays religieux, comme la Tunisie et la Turquie ont trouvé les moyens appropriés pour abolir la polygamie. La Turquie a été pionnière en la matière puisque la polygamie y est interdite depuis 1926 ; il nous paraissait important de le signaler.

Monsieur Michel, vous déplorez que le rapport ne résulte que de la visite de deux pays. C’est, cher collègue, un sentiment de frustration que je partage. Comme je l’ai expliqué en commission à Paris, il y a quelques mois, ce rapport a été élaboré dans la plus grande urgence. Nous ne souhaitions pas être les carabiniers d’Offenbach, nous voulions traiter la question au moment où elle se posait dans l’actualité.

Nous nous sommes donc rendus dans ces deux pays, la Tunisie, parce que c’était le pays dont la révolution était la plus aboutie, le Maroc, en raison des avancées réalisées par les réformes constitutionnelles et parce que nous souhaitions voir les réalisations issues des réformes de 2004. Tout comme vous, Monsieur Michel, je souhaite que les femmes algériennes soient aussi au rang de nos préoccupations. Elles sont aujourd’hui confrontées à des défis et à des enjeux considérables. Nous continuerons donc, je l’espère, notre travail en ce sens.

Merci, Madame Marin, de nous rappeler aussi combien les femmes occidentales que nous sommes sont encore confrontées à de nombreuses discriminations. Nous serons parvenues à l’égalité parfaite le jour où nous ne célèbrerons plus cette journée du 8 mars où nous répétons inlassablement que, nonobstant les avancées, il faut encore consentir de nombreux efforts. Je vous rejoins totalement sur cette question.

J’effectuerai un suivi rigoureux du rapport, comme le règlement me le permet pendant un délai d’un an.

Monsieur Sabella, je vous entends bien lorsque vous évoquez la difficulté qu’il y a à concilier tradition et modernité. Dans ce rapport, comme dans l’ensemble des philosophies qui sous-tendent nos pratiques politiques, nous gardons le cap sur les droits humains envisagés comme des principes universels non soumis à un relativisme culturel ou cultuel.

Que vous dire, Madame Alastal, sinon pour souscrire à votre vœu de voir un jour les femmes palestiniennes débattre avec nous des questions qui nous occupent ?

S’agissant, Monsieur Chagaf, de l’article 475 du Code pénal marocain, que nous n’avons pas évoqué dans notre rapport, l’événement dramatique que vous avez évoqué est survenu après la rédaction de notre texte, mais nous en avons discuté en commission à Paris et je me suis engagée devant mes collègues à le mentionner aujourd’hui en séance plénière. Je l’ai donc fait et je me réjouis que Madame la ministre soit également sensible à cette question et appelle aussi de ses vœux une modification de la loi.

Madame Bergamini, j’ai compris, dans vos propos, que vous avez bien perçu que le rapport que je vous ai livré est un rapport tout en nuances, résolument ouvert. Telle est vraiment la tonalité que j’ai voulu lui imprimer, sans aucune volonté de donner des leçons ou d’offenser l’un ou l’autre des Etats. Cela étant, ce n’est pas non plus un rapport timoré qui, à force de compromis ou de complaisance, en serait devenu incolore et inodore.

Ce rapport vise non seulement à pointer les avancées opérées, mais également à appuyer fermement sur le levier des efforts qui doivent être poursuivis, y compris dans nos réalisations et notre capacité à coopérer. Une fenêtre pour le renforcement de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les pays de la région s’est ouverte sous le souffle de la révolution : il importe aujourd’hui de veiller à ce qu’elle ne se referme pas brutalement.

Ce rapport veut aussi asseoir de manière formelle l’égalité entre les femmes et les hommes comme une condition essentielle, voire fondamentale, de l’aboutissement des processus engagés. Pour ce faire, il importe que le personnel politique et les institutions des pays de la région envoient des signes forts d’un désir de changement tangible, reposent sur une volonté réelle d’assurer l’égalité entre les femmes et les hommes, et non sur une simple volonté de marketing, destinée à faire plaisir à l’un ou l’autre des partenaires, car nous ne souhaitons pas que les femmes soient instrumentalisées à cette fin.

Enfin, je tiens à vous informer que l’expression Printemps arabe, que nous utilisons, est contestée par les Amazirs, qui estiment que ces mots leur confisquent la révolution. Pour cette raison, le Maroc préfère aujourd’hui évoquer un « Printemps démocratique ». Je tiens également à souligner que ce rapport est d’une importance cruciale pour les pays européens, car il concerne également les droits des femmes vivant en Europe mais qui sont originaires des pays où se sont produites les révolutions. Le statut personnel de leur pays d’origine les suit, où qu’elles se trouvent. Il est donc important de débusquer toutes les discriminations contenues dans les législations des pays d’origine qui pourraient porter atteinte aux droits des femmes vivant dans nos contrées.

LE PRÉSIDENT – Madame la présidente de la commission, désirez-vous répondre ?

Vous disposez d’un temps de parole de deux minutes.

Mme ACKETOFT (Suède), présidente de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – Nous traitons un sujet délicat puisque le Printemps arabe est une occasion immense à saisir par toute cette région pour consolider des institutions démocratiques fondées sur la primauté du droit et le respect de droits de l’homme égaux pour tous.

Le cadre constitutionnel des pays composant cette région, qui est au seuil de l’Europe, relève de leur propre responsabilité. L’Assemblée parlementaire n’a pas l’intention de donner des leçons aux autres Etats sur ce qu’ils doivent faire en matière de démocratie. Notre débat montre toutefois que si nous ne souhaitons pas imposer notre point de vue, nous voulons en revanche l’exprimer. Je suis heureuse que nous ayons bénéficié de la participation de Mme Bassima Hakkaoui, qui montre l’intérêt que les autorités marocaines portent à notre débat.

Comme le rappelle le titre du rapport, l’égalité entre les femmes et les hommes est une condition essentielle du succès du Printemps arabe. Cette révolte a conduit, selon les pays, à des réformes constitutionnelles, voire à des changements plus radicaux. L’objectif ultime étant l’instauration de libertés plus grandes pour les peuples, nous ne pourrons pas estimer qu’il est atteint si les femmes, considérées comme des citoyens de deuxième ordre, ne participent pas pleinement à la vie politique, sont marginalisées ou exclues. N’oublions pas qu’il faut également, en matière de droits de l’homme, combattre les violations graves des droits de la femme ou l’empêchement fait à une femme de disposer de son corps.

La commission sur l’égalité et la non-discrimination fait de son mieux pour apporter sa contribution au processus incessant conduisant au respect de ces droits.

LE PRÉSIDENT – La discussion est close.

La commission sur l’égalité et la non-discrimination a présenté un projet de résolution sur lequel aucun amendement n’a été déposé et un projet de recommandation sur lequel, non plus, aucun amendement n’a été déposé.

Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 12893.

Le projet de résolution est adopté (69 voix pour et 3 abstentions).

LE PRÉSIDENT – Nous allons procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc. 12893. Je rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

Le projet de recommandation est adopté à l’unanimité des 68 votants.

4. Temps de parole

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, compte tenu du nombre d’orateurs prévu pour les débats de demain mercredi après-midi, je vous propose de porter le temps de parole des orateurs de trois à quatre minutes. Il n’y a pas d’objection ?

Il en est ainsi décidé.

5. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme
au titre de la Belgique (Résultats du scrutin)

LE PRÉSIDENT – Voici les résultats du premier tour de scrutin pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Belgique.

Nombre de votants : 163

Bulletins blancs ou nuls : 5

Suffrages exprimés : 158

Majorité absolue des suffrages exprimés : 80.

Les suffrages ont été exprimés comme suit :

M. André Alen : 61 voix

M. Paul Lemmens : 85 voix

M. Pierre Vandernoot : 12 voix.

M. Paul Lemmens, ayant obtenu la majorité absolue des voix exprimées, est élu juge à la Cour européenne des droits de l’homme, au titre de la Belgique, pour un mandat de neuf ans, à compter du 13 septembre 2012. Nous le félicitons et lui souhaitons plein succès dans ses fonctions.

6. La promotion d’une citoyenneté active en Europe

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport présenté par Earl of Dundee, au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie, sur le thème « La promotion d’une citoyenneté active en Europe » (Doc. 12898).

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Earl of DUNDEE (Royaume-Uni), * – Ce fut pour moi un privilège et un grand honneur que de rédiger ce rapport.

La promotion de la citoyenneté active en Europe témoigne de trois évolutions importantes dans notre vision de la politique européenne.

La première concerne la reconnaissance du droit de saisine individuelle de la Cour européenne des droits de l’homme, laquelle met les Etats et les individus sur un pied d’égalité. Deux guerres mondiales ont été nécessaires pour que cette notion soit reconnue puisque, jusque-là, l’Etat primait même s’il portait atteinte aux droits de l’individu.

Ensuite, après l’élargissement de l’Union européenne, en 2004, la déclaration du Sommet de Varsovie en 2005 a encouragé le renouvellement démocratique sur le plan national et international à travers son renforcement à l’échelon local.

Enfin, comment concevons-nous la démocratie au sein du Conseil de l’Europe, avec 47 Etats membres ? Nous avons tendance à juger de sa valeur par rapport au bien-être des familles, des communautés et des individus, les institutions et les gouvernements passant en quelque sorte au second plan. Or nous savons fort bien que la souveraineté des Etats-nations ne doit pas être compromise : la démocratie locale ne supplante jamais la démocratie nationale, bien au contraire, alors que la qualité démocratique se juge in fine sur la vitalité dont elle fait preuve au plus près des citoyens.

La promotion de la démocratie locale ou de la citoyenneté active, aujourd’hui, fait l’objet d’un consensus. Tout le problème est de savoir comment la mettre en pratique en Europe. Un certain nombre de mesures me semblent accessibles.

Premièrement, un ordre du jour commun au sein du Conseil de l’Europe lui-même afin d’éviter les doublons et d’accroître notre efficacité. Il conviendrait également de mettre en place une structure administrative favorisant cette nouvelle démarche. Je tiens à saluer de ce point de vue la présidence ukrainienne de l'année dernière et les présidences britannique et bientôt albanaise de cette année, car elles ont su et sauront unir leurs efforts pour aller en ce sens.

Deuxièmement, nous avons besoin d’une meilleure coordination entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne. Trop de programmes, en effet, diffèrent. Le Comité des Ministres, qui représente 47 Etats membres – dont les 27 pays de l’Union – me semble bien plus capable d’adopter une approche paneuropéenne de coordination sur des questions touchant la démocratie locale et régionale qu’une instance de l’Union.

Troisièmement, il faut encourager une coordination de la diplomatie. Au sein de mon groupe parlementaire de coopération avec la Croatie, au Parlement britannique, j’ai pu moi-même favoriser des efforts en ce sens.

La démocratie participative ou citoyenneté active est une vaste notion. Elle implique de tenir compte des groupes religieux, des syndicats, des partis politiques, des entreprises, mais ce sont les citoyens eux-mêmes qui en sont au cœur, lesquels doivent être capables de prendre les décisions qui les concernent au premier chef. L’Union européenne, qui a fait de 2013 l’Année européenne des citoyens, doit inclure cet objectif central pour l’avenir même de la démocratie.

LE PRÉSIDENT – Il vous restera cinq minutes, Monsieur le rapporteur, pour répondre aux orateurs, dont le temps de parole est de trois minutes.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Loukaides, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

M. LOUKAIDES (Chypre)* – Un juge et intellectuel américain a déclaré en 2011 qu’il était possible d’avoir soit la démocratie, soit une concentration des richesses entre les mains de quelques-uns mais que les deux sont impossibles à concilier. Parler de citoyenneté active implique d’abord l’établissement d’une société juste rejetant le néo-libéralisme et le capitalisme.

Promouvoir la démocratie et la citoyenneté active en Europe suppose également de lutter contre les déficits démocratiques sur les plans national et européen. Quels sont donc les objectifs de l’intégration européenne ? Quelle forme doit-elle prendre ? Le déficit de proximité avec les citoyens est également patent. Malgré les libertés et les droits acquis, l’Europe semble être un terrain de jeu pour les diplomates et les experts, la participation des citoyens étant secondaire et limitée.

En outre, les Européens ignorent leurs droits, lesquels sont d’ailleurs souvent mal vus des décideurs.

Enfin, l’inefficacité économique et sociale d’une Europe désemparée face à la mondialisation et à la crise me paraît évidente. Les politiques mises en place favorisant les riches, les capitalistes imposent des salaires toujours plus bas et des prestations sociales moins élevées. Comment, dès lors, assurer aux plus vulnérables que le système qui les a mis dans cette situation tient à faire d’eux des citoyens actifs ? Comment persuader les contribuables qui pratiquent l’évasion fiscale de participer à une telle évolution ? Comment parler de citoyenneté active quand des citoyens européens français et néerlandais rejettent par référendum une constitution que leurs parlements respectifs leur imposent deux ans plus tard ? Il en est de même pour le pacte budgétaire européen, la volonté des peuples ayant été une fois encore ignorée – seule l’Irlande procèdera à un référendum en raison de sa constitution.

Il faut mettre un terme à ces hypocrisies et à ces incohérences !

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Čigāne, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

Mme ČIGĀNE (Lettonie)*– Ce rapport évoque plusieurs points importants aussi bien sur le plan conceptuel que pratique. Il insiste notamment sur la participation au niveau local. Faire participer les citoyens sur le terrain à des activités concrètes est indispensable. Ils peuvent ainsi se rendre compte des difficultés que l’on rencontre en politique.

Dans le contexte de crise économique que nous connaissons, il est indispensable de prendre ces problèmes à bras le corps. Ce qui est proposé est une bonne réponse, de nature à apaiser la colère montante des citoyens qui ne sont pas toujours conscients des enjeux.

Je pourrais citer plusieurs bons exemples de participations citoyennes dans l’élaboration de différentes politiques qui pourraient utilement être repris dans d’autres Etats membres en vue de l’épanouissement de la société civile.

Ce rapport pose un certain nombre de questions sur la participation des jeunes, telle que l’extension du droit de vote aux jeunes de 16 ans. Il est certain que s’ils ne se sentent pas associés aux choix politiques alors qu’ils souhaitent y participer, ils perdent leurs illusions et se détournent de la politique. Cela peut donc être une solution pour les jeunes qui pensent que rien ne change en dépit des élections !

Mais nous sommes également menacés par les tentatives de répression de la participation active des citoyens. En Russie, par exemple, des membres d’un groupe de rock ont été arrêtés et mis en détention préventive pour avoir interprété une chanson critiquant le futur président.

Mme Woldseth, Vice-Présidente, remplace M. Mota Amaral au fauteuil présidentiel.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à Mme Guţu, au de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

Mme GUŢU (République de Moldova) –  Je voudrais remercier le rapporteur pour la mise en valeur, une fois encore, de la citoyenneté active, concept clé de la démocratie dans les sociétés modernes. Convoitée par les pays émergents des empires totalitaires, la citoyenneté active, avatar de la démocratie, s’affiche aujourd’hui dans certains pays, tantôt comme une grande dame d’un certain âge fatiguée par le poids des années, tantôt comme un gamin de 16 ans, désireux de connaître le monde, d’expérimenter et prêt à se jeter sous les roues du risque de la liberté maximaliste. J’ose cette métaphore pour montrer à quel point la citoyenneté active est différente dans les pays membres du Conseil de l’Europe.

La fatigue de la citoyenneté active dans certains pays européens – je veux surtout parler de la démocratie électorale – est due à l’instabilité d’une qualité de vie qui n’évolue guère malgré l’alternance des gouvernements.

Mais il paraît que la crise économique a éveillé les masses, que les syndicalistes sont au service des citoyens, que des gouvernements sont tombés en Europe. Nous pouvons même affirmer, sans le moindre cynisme, que la crise économique mondiale a donné un coup de pouce à la démocratie électorale, donc à la citoyenneté active. Le taux de participation aux élections est un indice éloquent. Mieux encore, quand des pays européens, tels la République de Moldova, la Roumanie, la Pologne ou les pays baltes connaissent le phénomène de l’émigration, quand la diaspora contribue sérieusement au maintien de la croissance économique des pays, il serait bon de leur suggérer de mettre en place le vote par procuration !

Un autre type de citoyenneté active est la démocratie discursive, liée à la liberté d’expression des médias, des décideurs politiques, des formateurs d’opinions, des mouvements syndicalistes.

Les solutions proposées par le rapporteur confirment l’importance des échanges d’expériences qui ont eu lieu au niveau des villes et des gouvernements. L’accent est mis sur la dimension locale du phénomène.

La citoyenneté active est antinomique de l’indifférence qui, à l’heure actuelle, s’empare des mentalités sociales. Dans certains pays, cette indifférence est devenue le mot d’ordre de la société. Tel est le cas de mon pays, qui débute en matière de démocratie. Pour paraphraser Descartes : « Je suis citoyen actif, donc j’existe ».

Le rapport met en valeur l’importance des ONG dans la promotion de la citoyenneté active. Or il importe que les ONG ne prennent pas une allure opportuniste ou partisane, comme cela se produit dans certains pays.

Par ailleurs, nous constatons une diminution de l’intérêt des citoyens à l’égard de la politique qui va de pair avec la raréfaction des leaders politiques intègres. Enfin, l’éducation a une citoyenneté active à l’école et, bien entendu, dans la famille, est une solution précoce pour la mise en place d’une démocratie participative.

J’ai connu le totalitarisme communiste. Il y avait ni droit à la propriété, ni liberté d’expression, ni liberté de circulation. On ne peut imaginer à quel point la réalité soviétique a tué toute forme de responsabilité et provoqué une indifférence atroce dans l’esprit des citoyens. Dieu merci, cette époque est révolue ! Dans ces conditions d’éducation atrophiée, c’est ma famille qui m’a formée et qui m’a fourni de véritables leçons de vie. Mais il n’en a pas été de même pour tous mes concitoyens.

Mon pays, ainsi que d’autres pays de l’Europe de l’Est se sont engagés dans la voie de la démocratie. Une des tâches les plus difficiles pour y arriver est le changement des mentalités. « Il faut cultiver son jardin », disait le philosophe Pangloss, l’un des personnages de Candide, le conte de Voltaire. Il faut chasser l’indifférence de nos sociétés pour laisser place à la citoyenneté active et à la démocratie participative.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à Mme Huovinen, au nom du Groupe socialiste.

Mme HUOVINEN (Finlande)* – Avant de venir à Strasbourg, j’ai mis à jour mon profil Facebook et j’ai indiqué que j’étais en route pour venir parler de questions relatives à la démocratie et aux droits de l’homme. Un ami m’a alors demandé comment, mis à part en votant, un citoyen ordinaire peut participer à la démocratie. Excellente question !

La démocratie est la meilleure façon de relever les défis communs que nous affrontons, mais ce n’est pas un système idéal. C’est la raison pour laquelle nous devons en permanence envisager des moyens pour accroître les possibilités données à nos citoyens de prendre part à la prise de décisions démocratiques par d’autres moyens que le vote.

Je voudrais remercier le rapporteur qui propose un large éventail de solutions pour améliorer le processus démocratique, même si je pense que le rapport aurait pu aller bien plus loin.

Promouvoir la citoyenneté active en Europe est sans doute l’un des défis majeurs qui se pose à nous, et j’avoue que j’aurais souhaité que nous soyons en mesure d’avoir une approche plus large, plus complète. Toutefois, l’insertion, même tardive, de mesures permettant de renforcer la participation des jeunes est une bonne chose. On ne saurait laisser penser que les jeunes ne font pas partie du système démocratique.

J’espère que les exemples présentés dans ce rapport nous encourageront tous à développer nos sociétés dans le sens d’une plus grande inclusion. En Finlande, nous organisons régulièrement des parlements des jeunes. Cela a permis de renforcer la démocratie à l’école ainsi que les possibilités données aux adolescents de présenter leurs idées et de les voir reprises dans la législation nationale. Nos démocraties ne sont fortes que dans la mesure où un grand nombre de personnes peuvent y participer.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Heald, au nom du Groupe démocrate européen.

M. HEALD (Royaume-Uni)* – Je porte la cravate du Parlement finlandais et j’aimerais rendre hommage aux 200 conseils de jeunes que compte la Finlande. Nous devrions tous nous inspirer de cet exemple. Je signale d’ailleurs que le Parlement des jeunes se réunira en octobre, ici, à Strasbourg.

Aider les jeunes à se forger une idée de ce qu’est un citoyen actif est certainement une excellente approche. A cet égard, je rends hommage au rapporteur qui en a fait un thème majeur de son rapport.

Qu’est-ce donc qu’un citoyen actif ? C’est, je pense, quelqu’un qui maîtrise les moyens électroniques modernes. Nous avons vu comment le Printemps arabe a su se servir des Blackberry et autres iPhones. Par ailleurs, les sites internet offrent la possibilité aux citoyens d’échanger de manière active. Je crois que nos parlements pourraient faire bien davantage en laissant les citoyens formuler des commentaires sur les lois que nous préparons et promulguons. Westminster compte des sites qui permettent de s’exprimer tout au long de la procédure d’approbation d’une loi. C’est ainsi que j’ai pu exprimer mes idées sur la réforme du Parlement au Royaume-Uni.

Selon moi, le citoyen actif doit être protégé par la loi et l’Etat de droit. Il doit avoir confiance en sa capacité d’action. À cet égard il est essentiel que nous améliorions l’application de la Convention européenne des droits de l’homme dans chacun de nos Etats membres.

Le citoyen actif est conscient de son pays, de sa région, de sa ville. L’éducation à la citoyenneté des jeunes est centrale à ce titre. Le citoyen actif est conscient des valeurs qui lui ont été transmises par la famille et l’école, c’est une personne qui reconnaît l’importance de l’action sociale, de l’engagement bénévole, une personne qui comprend que les pouvoirs locaux s’investissent à tous les niveaux. Il est un avocat, un ambassadeur dans son entreprise, de la responsabilité citoyenne.

Je ne suis pas d’accord avec M. Loukaides sur tout. Par exemple, je ne pense pas qu’il faille rejeter le capitalisme, nous voulons un capitalisme à visage humain.

LA PRÉSIDENTE* – Earl of Dundee, souhaitez-vous répondre à ce moment du débat ?

Earl of DUNDEE, (Royaume-Uni), rapporteur)* – Il me semble plus utile, Madame la Présidente, d’intervenir à la fin de la discussion.

LA PRÉSIDENTE* – Nous poursuivons donc le débat. La parole est à M. O’Reilly.

M. O’REILLY (Irlande)* – Dans le meilleur des mondes, la démocratie commence au pas de sa porte. Il appartient aux parents de promouvoir une atmosphère démocratique, les jeunes comme les parents devraient pouvoir ainsi se faire entendre et être respectés. Il en irait ainsi, de fil en aiguille, à tous les échelons de la société. Voilà comment cela se passerait dans le meilleur des mondes, vers lequel nous tendons.

Selon moi, l’école est, après la famille, le berceau de la démocratie. A cet égard, les écoles devraient compter en leur sein des conseils d’élèves ou d’étudiants actifs. De telles entités existent dans l’une des écoles que fréquente l’un de mes fils et elles fonctionnent efficacement. Un conseil actif au sein des écoles est une première étape, à laquelle devrait faire suite un parlement des jeunes, car il est essentiel que les jeunes constatent que leurs points de vue débouchent sur des éléments concrets.

Ensuite, renforcer l’échelon de la démocratie locale passe par le prélèvement d’impôts locaux, distincts des impôts nationaux, les autorités locales ayant parallèlement la responsabilité d’en affecter les ressources. C’est ce qui conditionne la mise en œuvre de la démocratie locale et c’est ainsi que le Conseil de l’Europe doit concevoir les choses. Je rends hommage au passage aux travaux d’Alan Meale, mon collègue britannique, et à Earl of Dundee pour son rapport.

La crise a eu un impact sur la démocratie et sur l’attitude des citoyens au regard de la démocratie, en ce sens qu’elle a mis l’accent sur l’action des autorités. Evidemment, des tendances antidémocratiques peuvent émerger, contre lesquelles il convient de lutter. L’Union européenne souffre d’un déficit démocratique. Pour ma part, je suis convaincu que le président de la Commission européenne devrait être élu au suffrage universel direct – c’est une proposition qu’il conviendrait d’envisager. Je me réjouis également que tout individu puisse saisir la Cour européenne des droits de l’homme.

L’Europe comprend des groupes de pression, des syndicats, qui doivent être forts et efficaces. En tout cas, le rapport d’Earl of Dundee arrive à point nommé et le Conseil de l’Europe se doit de rester très vigilant pour une véritable participation active à la vie démocratique dans les Etats membres.

LA PRÉSIDENTE – La parole est à Mme Myller.

Mme MYLLER (Finlande)* – Le rapport sur la citoyenneté active vient à point nommé, car je suis fort préoccupée par la situation de la démocratie en Europe.

Qu’est-ce que la démocratie sans des citoyens actifs et comment la démocratie peut-elle fonctionner si ses membres ne peuvent faire entendre leur voix ? L’objectif commun, aussi bien du Conseil de l’Europe que de l’Union européenne, consiste à renforcer la démocratie et à autonomiser les populations. Je songe là aussi bien à la démocratie représentative et directe entre l’Etat et la société civile qu’aux relations qui doivent s’établir entre institutions politiques et ONG.

Les gens recherchent sans cesse des moyens nouveaux, les plus directs, pour exercer une influence sur leur société. Nous devons donc être à l’écoute et mettre en place de nouvelles méthodes permettant aux citoyens de se faire entendre tout en respectant nos institutions démocratiques communes. La démocratie directe n’est pas destinée à ceux qui crient le plus fort, c’est un moyen qui est destiné à tout un chacun et la promotion des valeurs démocratiques est un processus qui doit commencer dès l’école.

La Finlande dispose d’une démocratie régionale forte dans le cadre de ses municipalités, mais le système n’est pas pour autant idéal, car nombre de citoyens, notamment les jeunes, ne participent pas aux réunions publiques sur des questions concernant la cité. Heureusement, les conseils des jeunes qui ont été établis démocratiquement sont actifs et capables de proposer une voie à ces jeunes. Sans doute faudrait-il l’explorer plus largement pour inciter les jeunes à participer davantage. Une nouvelle loi finlandaise propose par ailleurs des conseils obligatoires pour le troisième âge afin d’accorder aux personnes âgées un espace de discussion leur permettant de se faire entendre. Ces deux exemples visent bien entendu à renforcer la démocratie à la base et à permettre à la population de s’impliquer davantage dans le débat public.

Le Conseil de l’Europe et l’Union européenne se doivent d’aborder ces questions ensemble, par le biais de politiques communes. Les moyens de défendre ces valeurs démocratiques et même de les accroître sont au cœur de nos objectifs. J’espère d’ailleurs que ce débat nous permettra d’élaborer des réflexions positives en la matière.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Binley.

M. BINLEY (Royaume-Uni)* – Je me réjouis de ce rapport et félicite son auteur, mon ami Earl of Dundee. Quel meilleur homme que lui aurions-nous pu choisir pour rédiger ce rapport ? Ce choix est d’ailleurs un symbole de la démocratie qui prévaut dans cette enceinte.

Je souhaite souligner deux éléments qui constituent le fil conducteur de ce rapport. Au paragraphe 16, le secteur privé est invité à participer à la vie en société. Par ailleurs, il est fait référence à l’article 11 du Traité de Lisbonne, qui nous invite à accéder aux souhaits des citoyens. Ces deux ambitions sont très importantes, mais il est difficile de les concilier. Pour y parvenir, il faudra faire bien plus que maintenant, surtout à l’échelle locale. Les citoyens doivent développer un plus grand sens de la propriété si nous voulons qu’ils s’impliquent davantage dans leur communauté. Les pouvoirs locaux pensent très souvent que cela peut se faire sans eux, oubliant ainsi la responsabilité qui leur incombe pour ce qui est de faciliter ces rencontres.

En ce qui concerne la consultation des citoyens, le rapporteur estime que seuls cinq pays la pratiquent correctement. De fait, dans mon propre pays, les consultations sont mal choisies, leur durée est trop courte et les questions posées sont sélectionnées sans que l’on se demande s’il s’agit bien de celles que les citoyens souhaiteraient qu’on leur pose.

Je terminerai en vous donnant un exemple de participation active des citoyens. Dans ma circonscription de Northampton, il existe un programme de réinsertion sociale que nous appelons « Northampton Alive ». Quinze projets, qui se déroulent à des moments différents, sont gérés par un petit comité de pilotage composé de personnes qui sont habilitées à prendre des décisions et à expliquer à la presse locale ce qui se fait. Nous avons également créé un forum regroupant 60 à 80 dirigeants de notre communauté afin qu’ils formulent des réactions. C’est ainsi que la population locale suit l’évolution du projet et y participe.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à Mme Grosskost.

Mme GROSSKOST (France) – Je salue tout d’abord le rapporteur pour le travail qu’il a accompli. Le rapport fait un point très complet sur l’idée de citoyenneté active en Europe et sur les nombreuses actions entreprises par les différents organes du Conseil de l’Europe.

Il peut paraître paradoxal d’évoquer la citoyenneté active comme remède à une démocratie représentative diminuée et essoufflée, alors même que dans plusieurs Etats membres des élections majeures ont lieu ou vont avoir lieu. Je pense bien sûr à la France, mais aussi à la Serbie et à la Grèce. Pourtant, la « crise de la représentation » que notre Assemblée évoquait dans sa Résolution 1746, adoptée en juin 2010, ne peut être niée.

L’abstention progresse lentement, inexorablement, pour la plupart des élections et dans la plupart des pays. Serions-nous donc lassés de ce droit de vote pour lequel nos aïeux – parfois même nos grands-parents ou nos parents – se sont battus ? Les idées extrémistes, souvent alimentées par la désillusion envers la politique, se répandent insidieusement dans le débat public. Serions-nous donc aveugles aux risques qu’elles représentent pour les droits de l’homme et pour la démocratie, dont nous sommes ici les gardiens vigilants ?

Il nous faut donc trouver les moyens de cultiver et de renforcer l’intérêt des citoyens pour la chose publique. Il nous faut favoriser leur implication désintéressée dans la conduite des affaires communes. Les citoyens sont l’âme vivante de la démocratie ; c’est de leur action que celle-ci tire sa vigueur ; c’est grâce à leur dévouement qu’elle peut prospérer.

Peut-on alors cantonner l’exercice de la citoyenneté active aux seuls niveaux local et régional ? La question mérite d’être posée. Le rapport rappelle, à juste titre, l’apport du Traité de Lisbonne au développement de la participation citoyenne aux processus décisionnels de l’Union européenne, grâce à l’entrée en vigueur récente de l’« initiative citoyenne européenne ».

C’est une excellente évolution, mais il ne faut pas oublier la dimension première de la citoyenneté : celle qui fait d’elle le principe de la légitimité politique, dans le cadre de l’Etat. Le citoyen n’est pas seulement un sujet de droit, il est également le détenteur d’une part de la souveraineté. C’est la communauté des citoyens qui choisit les gouvernants, qui contrôle leur action, qui est la source du pouvoir et qui justifie que les décisions prises par les gouvernants soient exécutées.

Dans la construction de cet espace politique commun, la citoyenneté est avant tout ce qui transcende les particularismes et qui place tous les individus sur un pied d’égalité. C’est par la citoyenneté que nous échappons au destin déterminé par notre naissance ; c’est par la citoyenneté que nous ne sommes pas enfermés dans une culture orientée par nos appartenances sociales. Et qu’importe si l’abstraction de l’individu-citoyen a été contestée par Burke et, après lui, par les penseurs contre-révolutionnaires ! Elle doit quand même guider notre action.

Le risque existe, alors, que la citoyenneté active, entendue comme l’implication des citoyens dans la vie des communautés locales, ne conduise à un fractionnement de l’espace politique, où chaque groupe ou individu pourrait plaquer son propre système de valeurs, où la citoyenneté deviendrait à géométrie variable et où l’esprit public serait cloisonné entre les bornes que chacun se fixerait.

Faisons vivre en nos sociétés le sentiment de l’universel. C’est la meilleure garantie que nous puissions offrir à la démocratie.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Kennedy.

M. KENNEDY (Royaume-Uni)* – C’est un plaisir tout particulier – personnel et professionnel – que de rendre hommage à mon collègue Earl of Dundee, qui a su rédiger, comme d’habitude, un rapport stimulant. Hier encore, à Westminster, je n’étais pas d’accord avec certains collègues conservateurs, mais pour une fois je suis sur la même longueur d’onde que l’un d’entre eux !

Comme le disait un responsable politique américain, toute politique est locale. Je partage cette conviction avec le rapporteur. Nous sommes tous les deux Ecossais, même si je me considère avant tout, pour ma part, comme étant des Highlands… Quoi qu’il en soit, nous sommes Ecossais, mais aussi Britanniques et Européens. Cette identité, qui doit s’envisager à plusieurs niveaux, est justement au cœur de la réflexion de ce rapport, y compris s’agissant de la démocratie locale.

Voilà bien longtemps que j’ai été élu pour la première fois représentant des Highlands. À l’époque, il arrivait que l’on ait plus facilement l’oreille des autorités en allant à Bruxelles qu’à Westminster. Or, en-dessous du niveau européen, il y a celui des Etats-nations. Les bureaucrates et les politiciens sont parfois condescendants et paresseux. Ils oublient d’associer les gens sur le terrain au plan local aux activités. Ce rapport est une piqûre de rappel bien utile.

Ma circonscription compte la ville d’Inverness, tout au nord de l’Ecosse. Plusieurs initiatives intéressantes y ont été prises et l’on se rend compte que le rôle des villes en la matière est très important. Je suis heureux qu’Earl of Dundee l’ait rappelé.

A Londres, le débat sur le mode d’élection du maire est très animé. Je suis pour ma part tout à fait favorable à une élection directe du maire de Londres, et des autres maires ce qui va évidemment à l’encontre de la pensée politique britannique habituelle. Mais en tant que chef des libéraux démocrates, j’ai toujours défendu cette thèse.

Il faut que les institutions restent en phase avec la population. Je suis très heureux de vous recommander d’adopter ce rapport de mon collègue.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Kucheida.

M. KUCHEIDA (France) – Mes chers collègues, si on promeut la citoyenneté active en Europe, c’est qu’elle connaît des faiblesses, qu’elle est en danger et que l’on démontre aisément que rien n’est acquis.

Je remercie M. Dundee de son rapport qui montre bien toute la diversité des solutions pour essayer de faire avancer cette citoyenneté : engagements associatifs, mobilisation humanitaire, services volontaires et toutes les formes innovantes d’expression citoyenne. Mais il faut bien ajouter, malgré tout, que cela reste assez marginal, même si cela vient relayer dans une bonne mesure les modes de participation plus traditionnels. La démocratie ne serait-elle pas en danger parce qu’elle est trop acquise, parce qu’elle fait peut-être un peu trop partie de nous-mêmes ?

Si cette citoyenneté volontaire, instinctive, bénévole gagne en notoriété, c’est qu’elle ne sait pas mettre en valeur les initiatives humanitaires et solidaires des publics qui veulent l’exprimer. Pourtant, la promotion de cette citoyenneté est très inégale à l’échelle européenne et souvent anecdotique malgré la générosité des actions mises en œuvre par nos concitoyens. On peut se demander quelle est la place de tout ceci dans l’Europe des marchés, l’Europe de l’argent telle que nous la connaissons aujourd’hui.

Si je prends l’exemple de ma ville – et nombre d’entre vous ont insisté, à juste titre, sur le rôle des villes –, je peux vous narrer l’engagement de mon conseil municipal des jeunes. Agés de treize à seize ans, du jour au lendemain, ils ont voulu mener un certain nombre d’actions – comme d’habitude, des actions essentiellement humanitaires parce que vous savez que les jeunes sont très généreux. L’une d’entre elles notamment concernait le don du sang. Eh bien, dans cette ville où 300 personnes donnaient leur sang chaque année, elles sont aujourd’hui près de 2 000 à le faire, cela parce que des jeunes de treize à seize ans ont multiplié les actions. C’est vous dire que nous ne savons pas toujours quels peuvent être les différents viviers dans lesquels il y a à puiser.

Encore faut-il avoir aussi des moyens, car là où nous avons à promouvoir la citoyenneté, c’est toujours dans les milieux les plus difficiles, les plus faibles, les plus pauvres parce que c’est à partir de ces milieux que l’idée antidémocratique, l’idée anticitoyenne peut se développer. Nous en faisons aujourd’hui la triste expérience avec l’élection présidentielle française, en voyant certaines idées prendre le pas sur d’autres.

Toutes ces actions doivent se faire, mais à un niveau largement supérieur aux balbutiements actuels. Vous avez eu, Monsieur Dundee, le mérite de révéler ce que pourraient être les fils conducteurs pour la promotion de la citoyenneté active. Soyez-en remercié.

LA PRÉSIDENTE* – Je rappelle aux orateurs qu’ils ne disposent que de trois minutes et je les prie de respecter strictement ce temps de parole.

La parole est à Mme Clune.

Mme CLUNE (Irlande)* – Je suis heureuse d’avoir la possibilité de m’exprimer sur ce document important, qui nous invite tous à dresser le bilan de la situation et à veiller à faire savoir aux citoyens qu’ils peuvent prendre part à la démocratie et s’impliquer, qu’il s’agisse de la démocratie locale, nationale, voire, pour ceux d’entre nous qui sommes membres de l’Union européenne, pour les élections au Parlement européen.

Dans mon pays la participation aux dernières élections était de 70 % contre 67 % lors des élections précédentes. Ce sont plutôt de bons chiffres. Le sondage réalisé à la sortie des urnes a montré que ces citoyens avaient voté pour changer le gouvernement parce qu’ils se sentaient trahis par leurs hommes politiques. C’est un sentiment qui est assez largement répandu en Europe à l’heure actuelle. Ce qui me préoccupe dans mon pays, ce sont les élections au Parlement européen pour lesquelles la participation n’avait été que de 44 % en 1995. Si, en 2009, elle est remontée à 55 %, c’est que nous avons veillé à ce que les élections locales et celles pour le Parlement européen se tiennent en même temps puisque effectivement, comme cela a été dit, la démocratie locale est un bon moyen pour encourager les citoyens à participer.

Le niveau local est en effet la base même de la démocratie. Là, les citoyens ont vraiment l’impression qu’ils ont leur mot à dire, qu’ils ont voix au chapitre et peuvent changer les choses. Comme d’autres l’ont dit, cela peut être également le cas pour le maire de Londres. Les citoyens connaissent les candidats et, donc, veulent participer aux élections locales. Des rapports parus récemment dans les médias montrent que les gens connaissent parfaitement leurs maires, bien mieux que certains ministres du gouvernement. C’est une leçon à retenir. La pierre angulaire de la démocratie est bel et bien la démocratie locale car, à ce niveau, les gens ont vraiment envie de participer.

Au Danemark, on note que la première étape a consisté à réformer et donner plus de pouvoirs aux démocraties locales. Nous devons tous nous inspirer de cet exemple. Dans mon pays, aura lieu à la fin du mois prochain, un référendum sur le Pacte budgétaire européen, puisque nos institutions nous obligent à soumettre à référendum ce type de décision. Cela va sans doute faire davantage participer les citoyens et plus les intéresser que les débats au Parlement européen et les élections qui s’ensuivent. Il faut effectivement qu’il y ait davantage de débats. On parle lors de nos réunions de questions relatives à l’Union européenne, d’Internet, des réseaux sociaux, des speakers’ corners, des campagnes de mobilisation de la population afin que les gens se sentent concernés par les questions européennes.

Pour améliorer la participation des citoyens à la vie nationale en dehors des élections, notre gouvernement a proposé une modification de la Constitution, portant sur la durée du mandat du président et sur le vote des jeunes dès l’âge de dix-sept ans, et encourageant les femmes à prendre part à la vie publique et à la politique. Cet amendement à la Constitution a été élaboré par une centaine de personnes sélectionnées sur des bases statistiques. Ce ne sont pas des membres d’ONG, mais bien de simples citoyens. Nous espérons, par ce biais, accroître la participation démocratique de nos citoyens.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à Mme Szabó.

Mme SZABÓ (Hongrie)* – Je voudrais rendre hommage au rapporteur pour son travail. Il a appelé notre attention sur l’un des sujets les plus importants de notre temps, sujet d’autant plus d’actualité que 2013 sera l’Année européenne des citoyens.

Il est dans de nombreux domaines très important d’avoir dans toutes les classes d’âge des citoyens actifs. Pour nous, au Conseil de l’Europe, le rapport entre la démocratie et la participation active des citoyens est primordial.

Nous savons tous que ses grandes caractéristiques sont le respect, la responsabilité, la participation. Pour un démocrate qui pense et agit en tant que tel, le sentiment de responsabilité pour sa patrie, sa nation, sa société est d’une importance majeure.

Les citoyens doivent pouvoir peser sur les choix de l’Etat et des gouvernements, tracer la voie pour les familles, la société, pour améliorer les conditions de vie. Ils doivent pouvoir définir librement des marges de manœuvre, trouver les informations, exprimer leurs convictions dans les urnes.

Un rôle particulier revient aux citoyens appartenant à des minorités nationales. J’ajouterai le rôle déterminant et les responsabilités particulières des élites nationales et européennes. De moins en moins de gens votent et adhèrent aux partis politiques. Nombreux sont les déçus qui ont perdu toute confiance dans la démocratie participative et dans ses institutions. Par conséquent, l’extrême droite remonte. Les élites politiques doivent combler les déficits démocratiques, rétablir la confiance des citoyens dans la démocratie et les institutions démocratiques, prendre des mesures efficaces.

Le Conseil de l’Europe doit faciliter l’échange d’expériences et de bonnes pratiques.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Kalmár.

M. KALMÁR (Hongrie)* – Je félicite le rapporteur pour son travail sur ce thème actuel en Europe. Mais j’ai bien peur que ce document n’aborde pas réellement le problème de fond. Aujourd’hui, dans la politique locale et nationale, la population est de plus en plus apathique et sans illusion. Les gens ont le sentiment que la politique est de plus en plus éloignée de leur vie quotidienne.

Un citoyen veut que la politique l’aide à résoudre ses problèmes personnels ou ceux de sa communauté. Qu’obtient-il vraiment de la politique ? Il a le sentiment d’être une personne très importante pour les politiciens durant la campagne, jusqu’au moment où il met son bulletin dans l’urne. Après quoi il est pratiquement oublié.

Les gens ont tous le sentiment que la vie est de plus en plus difficile. On a du mal à trouver un emploi. Si quelqu’un a la chance d’en avoir un, il doit travailler de plus en plus pour le même salaire. Il n’a presque plus de temps pour sa famille, encore moins pour la citoyenneté active. Dans des pays du sud de l’Europe, le premier ministre élu ou le président ont été remplacés par Bruxelles, le FMI ou une autre institution financière.

En Roumanie, une loi permet d’organiser des référendums locaux. Lorsque les pouvoirs locaux du centre de la Roumanie ont organisé un tel référendum concernant l’éventuelle autonomie de la région, les résultats ont été attaqués par les préfets puis annulés par les tribunaux.

Les ressources affectées par les Etats aux systèmes de protection sociale et de santé ne sont pas suffisantes pour que ceux-ci fonctionnent de façon satisfaisante. Le citoyen est libre d’exprimer son opinion, les politiciens l’écoutent parfois mais il n’obtient rien.

Pourquoi faut-il être un citoyen actif ? Les citoyens pensent qu’il faut des changements radicaux. C’est la raison pour laquelle ils se tournent vers les partis extrêmes, à gauche ou à droite, comme en France. Si les citoyens ont le sentiment que la politique et les politiciens sont proches d’eux, qu’ils peuvent faire confiance à leurs élus, alors ils deviendront des citoyens actifs.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à Mme Szél.

Mme SZÉL (Hongrie)* – La citoyenneté et la communauté sont deux concepts étroitement liés. Le développement des processus démocratiques commence au niveau local puisque les gouvernements centraux peuvent voter des lois, fixer un cadre, mais rien n’est prévu au niveau local.

Il est important de faire participer deux groupes en particulier aux procédures locales. Certains ont essayé de modifier le contexte institutionnel. Des tentatives ont été faites pour renforcer l’engagement et la participation. En cas de succès, il existe aussi un potentiel de promotion et de construction de nouvelles institutions.

La participation des jeunes et des personnes âgées est déterminante. Ils peuvent apporter des ressources mais ils contribuent aussi au développement de la communauté. Les solutions créatives des jeunes peuvent entraîner le renouvellement d’anciennes structures par le biais des nouvelles technologies mises en œuvre dans les différents services publics. La communauté a aussi besoin de l’expérience des personnes âgées, de leur savoir. En faisant la promotion de conditions de travail adaptées à leur âge, en soutenant activement le rôle des personnes âgées dans la société, l’Europe apporte une réponse à une population vieillissante.

Encourager la participation active de ces groupes contribue à renforcer la solidarité entre générations également essentielles pour les valeurs européennes. Il est important de relever que les structures ont pour but de renforcer la participation des groupes sociaux. Pour ce faire, ils doivent tenir compte des intérêts particuliers des uns et des autres. La participation des jeunes exige une approche moins formelle. Celle des personnes âgées commence par la suppression d’éventuelles entraves.

Les différentes solutions institutionnelles proposées par les autorités publiques et les organisations civiles en faveur de la citoyenneté active montrent bien qu’il existe une division territoriale entre l’Est et l’Ouest de l’Europe. Dans l’Union européenne, il ne s’agit pas d’étendre le domaine institutionnel existant, mais d’inventer et de mettre en place de nouvelles structures pour la participation des citoyens. La participation des jeunes est perçue comme une forme de réaction contre la concentration des pouvoirs de l’Etat providence alors qu’à l’Est, un vide s’est fait du côté de l’Etat. Il s’agit de promouvoir le développement d’un secteur civil très faible.

Le Conseil de l’Europe a toujours été précurseur dans ce domaine. La Charte européenne sur la participation des jeunes à la vie locale et régionale, la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local, la Déclaration de Varsovie sont autant d’exemples de l’engagement du Conseil de l’Europe pour parvenir à un changement des relations entre l’État et les citoyens.

Selon Goethe « le meilleur gouvernement est celui qui nous enseigne à nous gouverner nous-mêmes. »

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Connarty.

M. CONNARTY (Royaume-Uni)* – J’admire le travail de la commission et de son rapporteur Earl of Dundee, sur un sujet d’une importance vitale. S’il n’y a pas de citoyenneté active, toutes nos activités sont vaines. Bien entendu, nous avons tendance, nous politiciens, à penser que notre travail a une valeur en soi, que les citoyens adhèrent ou non. Il y a un an, en Afrique du Nord, on a vu les citoyens se rebeller contre leur gouvernement. Très souvent les gouvernements sont sourds aux protestations des citoyens.

Le paragraphe 5 du projet de résolution donne un certain nombre de bons exemples. Ce n’est cependant pas tout à fait nouveau.

J’ai été élu local avant d’être député au Parlement britannique de Westminster. J’ai effectué mon dernier mandat local entre 1988 et 1992. Aux élections locales, la participation tournait alors autour de 60% ; c’était très bien. Mais pour d’autres élections locales, on pouvait être content si un quart des électeurs inscrits se déplaçait. Aujourd’hui, on constate que le parti nationaliste écossais qui a remporté les élections propose, par exemple, de limiter les possibilités financières des communes, et le Gouvernement britannique envisage maintenant de faire la même chose en Angleterre. Cela veut dire que, pour eux, la responsabilité des citoyens est très limitée, on ne leur donne pas les moyens dont ils avaient besoin.

En ce qui concerne la jeunesse, je suis tout aussi d’accord que Mme Huovinen et d’autres avec le rapporteur, qui souhaite plus de participation des jeunes.

C’est en octobre 2012 qu’aura lieu le Forum mondial pour la démocratie. Je veux aussi rappeler que le Président Mignon a annoncé qu’une Assemblée des jeunes se tiendrait alors, ici, à Strasbourg ; rendons-lui hommage. D’autres initiatives ont été prises, notamment à Istanbul, où j’étais. Des jeunes d’Azerbaïdjan m’ont alors contacté pour me faire part de leur vive préoccupation. Un député azerbaïdjanais leur avait annoncé que, fort de ses contacts avec les hautes autorités du pays, il gèrerait les choses et leur demandait de s’en remettre à lui. Le Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire doivent bien faire comprendre que les jeunes ne veulent pas être dirigés, que la jeunesse européenne veut s’exprimer librement.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Gaudi Nagy.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Je suis tout à fait d’accord avec Lord Dundee pour considérer que la citoyenneté active est un élément essentiel pour restaurer la confiance en la démocratie au plan européen. Ce déficit de la démocratie en Europe résulte avant tout de l’écart énorme qui existe entre ceux qui détiennent le pouvoir et la population, dont la qualité de vie s’est fortement détériorée du fait des coupes budgétaires dictées par le FMI ou imposées dans le cadre de l’Union européenne. Elles aboutissent à une baisse de l’investissement dans les ressources humaines et ne font qu’accroître les profits des compagnies multinationales. Il faudrait donc effectivement que les citoyens puissent réellement jouir de leurs droits et les gardiens des droits de l’homme, comme le Conseil de l’Europe, doivent concentrer leurs efforts sur la promotion et sur la défense des communautés traditionnelles, pas seulement sur la défense de la personne individuelle. L’Europe a été fondée par les nations. Aujourd’hui encore, elle est caractérisée par des communautés traditionnelles nationales.

Il est donc très important de soutenir les initiatives des citoyens européens, comme celle qui réunit toutes les communautés hungarophones, notamment celles qui vivent en Transylvanie et en Roumanie depuis 1920, à la suite de traités injustes. Il faudrait donc que des règles fussent adoptées afin de conférer un statut juridique particulier et des droits spécifiques aux communautés traditionnelles, notamment le droit à l’autodétermination. C’est d’ailleurs conforme à la Résolution 1832, adoptée par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe l’an dernier.

D’autres problèmes se posent, notamment la discrimination négative dont sont victimes les personnes qui ont une double nationalité, ou plus de deux nationalités. La Slovaquie a instauré des règles inacceptables à l’égard de la communauté hongroise de Slovaquie. Que s’est-il passé ? La Slovaquie a sanctionné un grand nombre de citoyens qui ont choisi d’avoir aussi la nationalité hongroise. Ainsi une femme de 99 ans a été récemment déchue de sa nationalité. Cela me paraît inacceptable. Le Conseil de l’Europe doit s’élever contre ce genre de pratique.

LA PRÉSIDENTE* – La liste des orateurs est maintenant épuisée.

J’appelle la réplique de la commission. Monsieur le rapporteur, il vous reste sept minutes.

Earl of DUNDEE (Royaume-Uni), rapporteur* – J’exprimerai tout d’abord ma gratitude à tous les orateurs pour leurs excellentes interventions. Il apparaît nettement que le thème de la citoyenneté active n’est pas un sujet polémique, mais, il y a peu de temps, c’était encore le cas. Pendant très longtemps, on a pensé que l’Etat venait en premier, et le citoyen en second. Aujourd’hui, grâce à l’expérience des cinquante ou soixante dernières années, nous sommes parvenus, en Europe, à une situation politique où aucune menace ne pèse sur la souveraineté ou l’intégrité nationales. Dans le même temps, en soulignant l’importance de la démocratie locale, nous pouvons insuffler plus de respect, plus de liberté, et cela plus efficacement que nous pourrions le faire à un niveau central. Il est donc essentiel d’agir au niveau local.

Il était tout à fait opportun de parler des jeunes, comme l’ont fait un grand nombre d’entre vous, chers collègues. Si l’on traite de la citoyenneté active, la question des jeunes est centrale. Nous voulons encourager ceux qui sont actuellement des enfants à devenir des membres actifs d’un environnement politique meilleur. Je suis tout à fait d’accord avec ceux qui ont parlé de l’engagement des jeunes. Plus les jeunes sont engagés, moins il y a de colère et de frustration. Il est donc souhaitable d’enseigner et d’encourager la démocratie dans les écoles, comme l’a dit M. Heald. Le magicien qu’il est en matière d’électronique aura bien compris qu’il est souhaitable que les jeunes s’expriment à propos des projets de loi à l’étude dans nos parlements respectifs.

La crise économique que traverse aujourd’hui l’Europe justifierait peut-être que nous y consacrions toute notre énergie. Dans ces conditions, est-ce tenter une diversion que de parler de citoyenneté active ? Je crois que nous sommes tous d’accord pour affirmer que ce n’est pas le cas. Peut-être même la citoyenneté active est-elle la réponse appropriée. Sans prévarication, sans abandon, sans démission face à l’objectif de renforcer sans cesse la démocratie, nous pourrons régler tous les problèmes, notamment ceux qui ont causé la crise économique. Je suis confiant dans la continuité des actions menées par les présidences successives, ukrainienne, britannique, et bientôt albanaise.

M. Kennedy a souligné, à juste titre, que les institutions européennes s’intéressent parfois aux moyens sans prendre en considération les objectifs. Nous avons un grand respect pour la démocratie locale en Ecosse. Comme la presse l’a rappelé, M. Kennedy et moi-même sommes d’accord pour conserver l’Ecosse au sein du Royaume-Uni.

S’agissant des modalités pratiques, il conviendrait d’instaurer une meilleure coordination à la fois au sein du Conseil de l’Europe et entre le Conseil et l’Union européenne. Il faut également encourager toutes sortes de solutions pratiques, toujours dans l’esprit d’une meilleure coordination, ce qui nous permettrait de renforcer la démocratie locale. Si nous y parvenons, alors, nous aurons rendu un grand service à l’Europe, permettant aux prochaines générations d’être plus présentes et plus confiantes et d’avoir un plus grand respect de la liberté et de la démocratie en Europe.

LA PRÉSIDENTE* – Mme la vice-présidente de la commission souhaite-t-elle intervenir ?

Vous disposez de deux minutes, Madame.

Mme LUNDGREN (Suède), vice-présidente de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Comme le débat l’a montré, ce sujet a suscité un vif intérêt. La participation active et la démocratie locale sont considérées comme des outils pour promouvoir une démocratie et une citoyenneté actives. Toutes les générations doivent être impliquées dans la lutte pour la démocratie. C’est un sujet clé pour l’Assemblée parlementaire et pour chacun des pays composant le Conseil de l’Europe. La question va bien au-delà de celle des élections. Il s’agit notamment d’associer l’ensemble des citoyens selon des modalités variables au sein de forums, en vue de permettre le débat et la participation ainsi que l’exercice des responsabilités. Toute la société doit avoir le sentiment qu’elle est respectée et écoutée. C’est ensemble que les décisions permettant d’avancer doivent être prises.

Je tiens à remercier le rapporteur et son équipe de la qualité de leur travail, qui a suscité un vif intérêt.

LA PRÉSIDENTE* – La discussion générale est close.

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution sur lequel quatre amendements ont été déposés. Par ailleurs, un amendement oral a été déposé.

Le président de la commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement. Tous les amendements écrits sur le projet de résolution ont été adoptés à l’unanimité par la commission. Est-ce bien le cas, Madame la vice-présidente ?

Mme LUNDGREN (Suède), vice-présidente de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* – Y a-t-il une objection ?

La parole est à M. Frécon.

M. FRÉCON (France) – Si la procédure exige que ces amendements, adoptés à l’unanimité par la commission, soient déclarés adoptés en séance publique, je m’inclinerai devant le Règlement.

Je formule toutefois une objection à l’amendement n3.

LA PRÉSIDENTE* – Il y a une objection. La demande du président de la commission est rejetée. Tous les amendements seront donc discutés selon les modalités habituelles. Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements et la feuille d’organisation des débats de la présente séance.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement n° 4, déposé par M. Wadephul, Mme Strenz, M. Schädler, Mme Frommelt, MM. Negele, Haupert, Hörster, Puche, Wach, Sasi, Herkel, Mendes Bota, Frunda, Sir Alan Meale, MM. Dobbin, Sheridan, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 2, à ajouter la phrase suivante : « L’Assemblée souligne l’importance du Prix de l’Europe, créé en 1955, qui a beaucoup encouragé un grand nombre d’activités, d’amitiés et de partenariats entre des communes d’États membres du Conseil de l'Europe et leurs habitants, et réaffirme sa détermination à continuer de développer ce précieux instrument d’interconnexion au niveau des communes. »

La parole est à Mme la vice-présidente, pour soutenir l’amendement.

Mme LUNDGREN (Suède), vice-présidente de la commission* – La commission a adopté à l’unanimité cet amendement.

LA PRÉSIDENTE* – Je le mets aux voix.

L’amendement n4 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement n° 1, déposé par M. Heald, Lord Boswell, Baroness Eccles, Lord Anderson, M. Donaldson, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 3, à supprimer les mots « (le Programme unique). »

La parole est à M. Heald, pour le soutenir.

M. HEALD (Royaume-Uni)* – Je suis heureux de défendre cet amendement qui a été adopté par la commission.

LA PRÉSIDENTE* – La commission est donc favorable à cet amendement ; je le mets aux voix.

L’amendement no 1 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – La présidence a été saisie par M. Connarty de l’amendement oral suivant :

Dans le projet de résolution, paragraphe 4.2.2, après les mots « à mettre en place, autant que possible, des conseils, », ajouter le mot « indépendants ».

Je considère cet amendement oral comme recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois pas être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent. Y a-t-il des objections à la prise en compte de cet amendement oral ?

Il n’y a pas d’objection. La parole est donc à M. Connarty, pour le soutenir.

M. CONNARTY (Royaume-Uni)* – Compte tenu de l’expérience du Parlement européen des jeunes, je pense que le paragraphe 4.2.2 a pour intention d’assurer l’indépendance des conseils de jeunes. C’est pourquoi il convient de le préciser dans le texte, afin que chacun comprenne que ces conseils ne représentent ni les gouvernements ni les partis.

LA PRÉSIDENTE* – Quel est l'avis de la commission ?

Earl of DUNDEE (Royaume-Uni), rapporteur* – Je suis favorable à cet amendement, qui me paraît une excellente initiative, car il convient, effectivement, de veiller à l’indépendance de ces conseils.

LA PRÉSIDENTE* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement n° 2, déposé par M. Heald, Lord Boswell, Baroness Eccles, Lord Anderson, M. Donaldson, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 7, à remplacer les mots « du Programme unique » par les mots suivants : « d'un agenda commun ».

La parole est à M. Heald, pour le défendre.

M. HEALD (Royaume-Uni)* – Cet amendement vise à préciser les mesures qui doivent être prises au paragraphe 7, trop général.

LA PRÉSIDENTE* – Quel est l’avis de la commission ?

Mme LUNDGREN (Suède), vice-présidente de la commission* – Avis favorable.

LA PRÉSIDENTE* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n2 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement n° 3, déposé par M. Heald, Lord Boswell, Baroness Eccles, Lord Anderson, M. Donaldson, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 7, à insérer le paragraphe suivant : « S'agissant de faire avancer la mise en place d'un agenda commun au sein du Conseil de l'Europe proprement dit, l’Assemblée suggère les cinq dispositions suivantes: l'application du rapport Chaves (conformément à la décision prise en 2011, à Kiev, par la Conférence des ministres européens chargés des collectivités locales et régionales); la définition annuelle de priorités; l'efficacité transparence dans les activités; la présentation annuelle de rapports aux citoyens; et la mise en place de structures administratives qui favorisent la nouvelle approche. »

La parole est à M. Heald, pour le défendre.

M. HEALD (Royaume-Uni)* – Il s’agit là encore d’être plus précis quant aux questions évoquées au paragraphe 7 en faisant état de l’accord auquel nous sommes parvenus concernant le rapport Chaves et en définissant des critères permettant de bénéficier d’un certain nombre de rapports en retour.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Frécon, contre l’amendement.

M. FRÉCON (France) – Je ne suis pas opposé au rapport mais à la majeure partie de cet amendement qui, sur cinq dispositions, n’en comporte qu’une concernant au premier chef la promotion de la citoyenneté active, que j’approuve d’ailleurs entièrement : la présentation annuelle de rapports aux citoyens. Les autres n’ont pas été examinées et doivent être débattues dans le cadre d’un autre texte. Je propose donc que cet amendement soit repoussé.

LA PRÉSIDENTE* – Quel est l’avis de la commission ?

Mme LUNDGREN (Suède), vice-présidente de la commission* – La commission est favorable à l’adoption de cet amendement.

LA PRÉSIDENTE* – Je le mets aux voix.

L’amendement n3 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc.12898, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (39 voix pour et 5 abstentions).

7. Prochaine séance publique

LA PRÉSIDENTE* – La prochaine séance publique aura lieu demain matin à dix heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 19 heures 45.

SOMMAIRE

1. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Belgique

2. Faits personnels

Mme Fiala, M. Voruz

3. L’égalité entre les femmes et les hommes : une condition du succès du Printemps arabe

Présentation par Mme Saïdi du rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination (Doc. 12893)

Intervention de Mme Bassima Hakkaoui, ministre de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social du Maroc

Orateurs : Mmes Schuster, O’Sullivan, M. Mendes Bota, Mmes Durrieu, Gafarova, Bergamini, Blondin, Marland-Militello, M. Hancock, Mmes Bourzai, Erkal Kara, MM. Rouquet, Michel, Mmes Anttila, Marin, M. Voruz, Mmes Anikashvili, Szél, M. Sabella, Biedroń, Mmes Loklindt, Blanco, Memecan, Alastal, M. Chagaf

Réponses de Mme la ministre, de Mme la rapporteure et de Mme Acketoft, présidente de la commission sur l'égalité et la non-discrimination

Votes sur un projet de résolution et sur un projet de recommandation

4. Temps de parole

5. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Belgique (résultats du scrutin)

6. La promotion d’une citoyenneté active en Europe

Présentation par Earl of Dundee du rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc. 12898)

Orateurs : M. Loukaides, Mmes Čigāne, Guţu, Huovinen, MM. Heald, O’Reilly, Mme Myller, M. Binley, Mme Grosskost, MM. Kennedy, Kucheida, Mme Clune, MM. Szabó, Kalmár, Mme Szél, MM. Connarty, Gaudi Nagy

Réponses de M. le rapporteur et de Mme Lundgren, vice-présidente de la commission des questions politiques

Vote sur un projet de résolution amendé

7. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque

Francis AGIUS*

Pedro AGRAMUNT

Arben AHMETAJ*

Alexey Ivanovich ALEKSANDROV*

Miloš ALIGRUDIĆ*

José Antonio ALONSO/Delia Blanco

Karin ANDERSEN

Donald ANDERSON*

Florin Serghei ANGHEL*

Khadija ARIB*

Mörður ÁRNASON

Francisco ASSIS*

Þuriður BACKMAN

Daniel BACQUELAINE*

Viorel Riceard BADEA*

Gagik BAGHDASARYAN*

Pelin Gündeş BAKIR

Gerard BARCIA DUEDRA

Doris BARNETT

José Manuel BARREIRO*

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

Alexander van der BELLEN*

Anna BELOUSOVOVÁ*

José María BENEYTO*

Deborah BERGAMINI

Robert BIEDROŃ

Grzegorz BIERECKI*

Gülsün BİLGEHAN

Oksana BILOZIR

Brian BINLEY

Roland BLUM

Jean-Marie BOCKEL*

Eric BOCQUET/Jean-Pierre Michel

Olena BONDARENKO

Olga BORZOVA*

Mladen BOSIĆ*

António BRAGA

Anne BRASSEUR

Márton BRAUN*

Federico BRICOLO/Paolo Grimoldi

Ankie BROEKERS-KNOL*

Piet DE BRUYN*

Patrizia BUGNANO

André BUGNON

Natalia BURYKINA/Valeriy Zerenkov

Sylvia CANEL*

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU

Mikael CEDERBRATT*

Otto CHALOUPKA*

Vannino CHITI/Paolo Corsini

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE*

Boriss CILEVIČS

James CLAPPISON

Ms Deirdre CLUNE

M. Georges COLOMBIER

Agustín CONDE*

Titus CORLĂŢEAN*

Igor CORMAN

Telmo CORREIA*

Carlos COSTA NEVES*

Cristian DAVID*

Joseph DEBONO GRECH*

Giovanna DEBONO/ Joseph Falzon

Armand De DECKER*

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Klaas DIJKHOFF*

Şaban DİŞLİ

Karl DONABAUER

Daphné DUMERY*

Alexander (The Earl of) DUNDEE

Josette DURRIEU

Baroness Diana ECCLES*

József ÉKES/Bernadett Szél

Tülin ERKAL KARA

Gianni FARINA

Nikolay FEDOROV*

Relu FENECHIU*

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA*

Daniela FILIPIOVÁ*

Axel E. FISCHER*

Jana FISCHEROVÁ*

Gvozden Srećko FLEGO*

Paul FLYNN*

Stanislav FOŘT*

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON

Erich Georg FRITZ*

Martin FRONC

György FRUNDA*

Giorgi GABASHVILI*

Alena GAJDŮŠKOVÁ

Sir Roger GALE*

Jean-Charles GARDETTO

Tamás GAUDI NAGY

Valeriu GHILETCHI

Sophia GIANNAKA*

Paolo GIARETTA/Vladimiro Crisafulli

Michael GLOS*

Obrad GOJKOVIĆ/Snežana Jonica

Jarosław GÓRCZYŃSKI

Svetlana GORYACHEVA*

Martin GRAF

Sylvi GRAHAM

Andreas GROSS*

Arlette GROSSKOST

Dzhema GROZDANOVA*

Attila GRUBER*

Antonio GUTIÉRREZ

Ana GUŢU

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI

Mike HANCOCK

Margus HANSON/Indrek Saar

Davit HARUTYUNYAN*

Håkon HAUGLI

Norbert HAUPERT

Oliver HEALD

Alfred HEER/Eric Voruz

Olha HERASYM'YUK*

Andres HERKEL/Paul-Eerik Rummo

Adam HOFMAN*

Serhiy HOLOVATY*

Jim HOOD/Michael Connarty

Joachim HÖRSTER*

Anette HÜBINGER*

Andrej HUNKO

Susanna HUOVINEN

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV*

Stanisław HUSKOWSKI*

Shpëtim IDRIZI*

Željko IVANJI*

Igor IVANOVSKI*

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT/André Schneider

Roman JAKIČ*

Ramón JÁUREGUI/Jordi Xuclà

Michael Aastrup JENSEN*

Mats JOHANSSON

Birkir Jón JÓNSSON*

Armand JUNG*

Antti KAIKKONEN/Sirkka-Liisa Anttila

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA*

Mariusz KAMIŃSKI*

Michail KATRINIS*

Burhan KAYATÜRK

Bogdan KLICH*

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN*

Tiny KOX/Tuur Elzinga

Marie KRARUP*

Borjana KRIŠTO

Václav KUBATA*

Pavol KUBOVIČ*

Jean-Pierre KUCHEIDA

Dalia KUODYTĖ/Egidijus Vareikis

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU*

Henrik Sass LARSEN*

Igor LEBEDEV*

Jean-Paul LECOQ

Harald LEIBRECHT*

Terry LEYDEN*

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Yuliya LIOVOCHKINA*

Lone LOKLINDT

François LONCLE/Bernadette Bourzai

Jean-Louis LORRAIN

George LOUKAIDES

Younal LOUTFI*

Saša MAGAZINOVIĆ*

Philippe MAHOUX*

Gennaro MALGIERI*

Nicole MANZONE-SAQUET

Pietro MARCENARO*

Milica MARKOVIĆ*

Muriel MARLAND-MILITELLO

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA/Riitta Myller

Frano MATUŠIĆ*

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA/ Maureen O'Sullivan

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA/Sonja Mirakovska

Evangelos MEIMARAKIS*

Ivan MELNIKOV*

Nursuna MEMECAN

José MENDES BOTA

Dragoljub MIĆUNOVIĆ*

Jean-Claude MIGNON/Christine Marin

Dangutė MIKUTIENĖ

Akaki MINASHVILI*

Krasimir MINCHEV*

Federica MOGHERINI REBESANI*

Andrey MOLCHANOV/Alexander Ter-Avanesov

Jerzy MONTAG*

Patrick MORIAU*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Alejandro MUÑOZ-ALONSO

Lydia MUTSCH

Philippe NACHBAR*

Adrian NĂSTASE*

Mr Gebhard NEGELE*

Pasquale NESSA

Fritz NEUGEBAUER*

Baroness Emma NICHOLSON*

Elena NIKOLAEVA*

Tomislav NIKOLIĆ*

Aleksandar NIKOLOSKI*

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Sandra OSBORNE/Charles Kennedy

Nadia OTTAVIANI*

Liliana PALIHOVICI

Vassiliki PAPANDREOU*

Eva PARERA

Ganira PASHAYEVA

Peter PELLEGRINI*

Lajla PERNASKA*

Johannes PFLUG*

Alexander POCHINOK*

Ivan POPESCU

Lisbeth Bech POULSEN*

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA*

Lord John PRESCOTT*

Jakob PRESEČNIK*

Gabino PUCHE*

Alexey PUSHKOV*

Valeriy PYSARENKO/Volodymyr Pylypenko

Valentina RADULOVIĆ-ŠĆEPANOVIĆ

Elżbieta RADZISZEWSKA*

Mailis REPS/Ester Tuiksoo

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE Maryvonne Blondin

Maria de Belém ROSEIRA

René ROUQUET

Marlene RUPPRECHT*

lir RUSMALI*

Armen RUSTAMYAN*

Branko RUŽIĆ*

Volodymyr RYBAK*

Rovshan RZAYEV*

Džavid ŠABOVIĆ/Ervin Spahić

Giacomo SANTINI*

Giuseppe SARO*

Kimmo SASI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER*

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN

Mykola SHERSHUN/Oleksiy Plotnikov

Adalbi SHKHAGOVEV*

Robert SHLEGEL/Anvar Makhmutov

Ladislav SKOPAL

Leonid SLUTSKY*

Serhiy SOBOLEV

Roberto SORAVILLA*

Maria STAVROSITU*

Arūnė STIRBLYTĖ/Arminas Lydeka

Yanaki STOILOV*

Fiorenzo STOLFI*

Christoph STRÄSSER

Karin STRENZ*

Giacomo STUCCHI*

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ

Melinda SZÉKYNÉ SZTRÉMI/Imre Vejkey

Chiora TAKTAKISHVILI

Giorgi TARGAMADZÉ/Magdalina Anikashvili

Dragan TODOROVIĆ*

Romana TOMC

Lord John E. TOMLINSON

Latchezar TOSHEV*

Petré TSISKARISHVILI*

Mihai TUDOSE*

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ

Konstantinos TZAVARAS*

Tomáš ÚLEHLA*

Ilyas UMAKHANOV*

Giuseppe VALENTINO*

Miltiadis VARVITSIOTIS*

Stefaan VERCAMER*

Anne-Mari VIROLAINEN

Luigi VITALI

Luca VOLONTÈ

Vladimir VORONIN/Grigore Petrenco

Tanja VRBAT*

Konstantinos VRETTOS*

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ*

Piotr WACH

Johann WADEPHUL*

Robert WALTER*

Katrin WERNER*

Renate WOHLWEND/*

Karin S. WOLDSETH

Gisela WURM

Karl ZELLER*

Kostiantyn ZHEVAHO

Emanuelis ZINGERIS*

Guennady ZIUGANOV*

Naira ZOHRABYAN*

Siège vacant, Chypre*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Paolo GRIMOLDI

Kerstin LUNDGREN

Jaana PELKONEN

Observateurs

Rosario GREEN MACÍAS

Hervé Pierre GUILLOT

Partenaires pour la démocratie

Walid ASSAF

ANNEXE II

Liste des représentants ou suppléants qui ont participé au vote pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Belgique

Deborah BERGAMINI

Robert BIEDROŃ

António BRAGA

Federico BRICOLO/ Paolo Grimoldi

Lise CHRISTOFFERSEN

Igor CORMAN

Arcadio DÍAZ TEJERA

Gianni FARINA

Jean-Claude FRÉCON

Andreas GROSS

Margus HANSON/Indrek Saar

Håkon HAUGLI

Tiny KOX/Tuur Elzinga

François LONCLE/Bernadette Bourzai

João Bosco MOTA AMARAL

Alejandro MUÑOZ-ALONSO

Joseph O'REILLY

Sandra OSBORNE/Charles Kennedy

Ivan POPESCU

Valeriy PYSARENKO/Volodymyr Pylypenko

René ROUQUET

Mykola SHERSHUN/Oleksiy Plotnikov

Giacomo STUCCHI