AS (2013) CR 03

SESSION ORDINAIRE DE 2013

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la troisième séance

Mardi 22 janvier 2013 à 10 heures

Dans ce compte rendu :

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso, dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 5 sous la présidence de M. Mignon, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Vérification des pouvoirs

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, je vais vous donner lecture de l’avis de la commission du Règlement, qui s’est réunie ce matin, sur la contestation des pouvoirs présentée hier.

« Le 21 janvier 2013, les pouvoirs non encore ratifiés de Mme Zaroulia (Grèce, NI) et de M. Gaudi Nagy (Hongrie, NI) ont été contestés pour des raisons formelles, conformément à l’article 7 du Règlement de l’Assemblée, aux motifs qu’ils appartiennent l’un et l’autre à des partis politiques qui ne respectent pas les valeurs du Conseil de l’Europe et qu’ils ont tenu des propos qui sont incompatibles avec ces valeurs.

La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles a examiné les diverses objections soulevées et a établi que la désignation de Mme Zaroulia et de M. Gaudi Nagy auprès de l’Assemblée parlementaire s’est faite dans le respect de l’article 25 du Statut du Conseil de l’Europe et de l’article 6 du Règlement de l’Assemblée. En conséquence, la commission conclut à la ratification des pouvoirs de Mme Zaroulia et de M. Gaudi Nagy.

La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles entend préciser que la démarche de contester les pouvoirs de membres individuels obéit à des critères strictement posés par le Règlement. L’article 7.1 ne permet pas de contester les pouvoirs d’un membre individuel de manière effective, s’agissant de le sanctionner du fait de ses actions ou de ses déclarations, lorsque celles-ci sont gravement contraires et portent atteinte de manière persistante aux principes et valeurs défendus par le Conseil de l’Europe. Il n’appartient pas à la commission, dans le strict cadre de sa compétence, de se prononcer sur l’existence de violations substantielles du Statut du Conseil de l’Europe, dont les obligations s’imposent aux Etats membres, qui relève d’une procédure distincte qui n’a pas été mise en œuvre par les contestataires à l’ouverture de la session.

La commission tient à préciser, avec la plus grande fermeté, que la présente décision ne saurait être interprétée comme un soutien ou une reconnaissance, même indirecte, d’activités, convictions, agissements ou positions politiques que l’Assemblée parlementaire n’a eu de cesse, au cours de soixante-trois années d’existence, de condamner. La commission rappelle l’attachement indéfectible de l’Assemblée parlementaire à la promotion et à la défense des droits de l’homme, de la démocratie et de la prééminence du droit, en particulier dans la lutte contre le racisme, la xénophobie, l’intolérance et l’antisémitisme.

La commission considère que le libellé actuel de l’article 7.1.c ne permet pas de contester les pouvoirs d’un membre individuel de manière effective, en particulier s’agissant de sanctionner un membre du fait de ses actions ou de ses déclarations lorsque celles-ci sont gravement contraires et portent atteinte de manière persistante aux principes et valeurs défendus par le Conseil de l’Europe. Aussi, elle invite le Bureau de l’Assemblée à la charger de réexaminer la question afin de prendre en considération les préoccupations qui se sont manifestées parmi les membres de l’Assemblée. »

La parole est à M. Gaudi Nagy, conformément à l’article 34.6 du Règlement, pour une déclaration personnelle de deux minutes. Cette prise de parole ne saurait être suivie d’un débat.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Je vous remercie, Monsieur le Président.

Je me félicite du rejet par la commission du Règlement de la contestation abusive présentée hier. Les raisons juridiques invoquées par Mme Nirenstein et plusieurs de ses collègues ne sont pas appropriées et ne permettent pas de faire pression sur l’ensemble des membres de l’Assemblée parlementaire.

En tant que juriste, j’ai été extrêmement déconcerté par cette initiative et j’espère vivement que nous tous, qui travaillons ici ensemble pour renforcer les droits fondamentaux des peuples européens, n’appuierons pas ce type de propositions.

Cette contestation était en fait une attaque contre les valeurs du Conseil de l’Europe. En ce qui nous concerne, mon parti et moi, nous sommes tout à fait prêts à œuvrer en faveur de la démocratie et des peuples opprimés, où que ce soit en Europe, et c’est ainsi que nous agirons à l’avenir.

LE PRÉSIDENT – Je rappelle qu’il s’agissait d’un fait personnel, par conséquent cette déclaration n’entraîne pas de débat. Nous allons donc immédiatement reprendre la suite de notre ordre du jour.

2. Modifications dans la composition des commissions

LE PRÉSIDENT – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans un document qui est à votre disposition (commissions (2013) Addendum 4).

Y a-t-il des oppositions à ces modifications ?

Ce n’est pas le cas. Elles sont adoptées.

3. La situation au Kosovo1 et le rôle du Conseil de l’Europe

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de M. Björn von Sydow, au nom de la commission des affaires politiques et de la démocratie, sur « La situation au Kosovo* et le rôle du Conseil de l’Europe » (Doc.13088).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi, de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

Monsieur le président von Sydow, vous avez la parole.

M. von SYDOW (Suède), rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie* – La situation au Kosovo est sombre. Le produit intérieur brut par habitant est sans doute le plus bas d’Europe. À peu près 30 % de la population vivent dans la misère. La sécurité et la sûreté ne sont pas garanties sur l’ensemble du territoire du Kosovo. Hier, des attaques ont eu lieu contre des cimetières serbes au Kosovo à l’aide d’explosifs. Les autorités kosovares ont immédiatement déclaré que ces actes étaient inacceptables, les ont condamnés et ont confié l’enquête à la police. Ce matin, la commission des questions politiques a constaté que la même chose s’est produite produit en Serbie.

Le Kosovo n’a pas d’Etat de droit. La corruption ronge l’ensemble du pays à tous les niveaux : dans le domaine judiciaire, où elle frappe les juges et les procureurs, ainsi que dans le domaine politique. En revanche, la police au Kosovo est considérée comme non corrompue et plutôt efficace.

Dans le domaine de l’éducation, les langues minoritaires doivent être plus présentes et mieux défendues dans les écoles. Ce qui est plus alarmant, c’est que les enfants reçoivent des enseignements sur la base de programmes scolaires tout à fait différents, qui ne peuvent que faire perdurer les divisions du passé. En référence aux propos de M. Marcenaro sur la réconciliation dans les Balkans, où l’éducation est centrale, j’insiste sur l’idée que les historiens doivent faire le travail nécessaire afin que tous les jeunes comprennent l’histoire de la même façon et en aient une vision plus équitable.

Les trafics au Kosovo ne portent pas uniquement sur la traite de femmes malheureuses qui transitent par le Kosovo en provenance d’autres parties du monde, c’est également vrai de femmes kosovares. Nous savons également qu’il y a dans ce pays une utilisation silencieuse mais très étendue de la violence à l’encontre des femmes.

Oui, la situation est sombre partout sur le territoire du Kosovo.

C’est le second rapport que je présente sur ce pays depuis sa déclaration d’indépendance. J’ai trouvé normal de mettre l’accent sur ces questions. L’Etat de droit doit être renforcé. Il faut que le droit et la loi soient prévisibles pour chaque citoyen et chaque entreprise du Kosovo.

Néanmoins, des améliorations ont été apportées. La cour constitutionnelle, par exemple, fait un bon travail et différents secteurs de la société kosovare ont exprimé leur respect à son égard. Les systèmes politique et électoral se sont améliorés, même s’il faut assurer davantage de liberté pour les médias.

On a souvent dit qu’il fallait respecter les normes avant de respecter le statut. Tous les organismes qui opèrent au Kosovo doivent respecter ces normes. Il faudrait une bonne gouvernance, la démocratie, l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme au même titre que pour tous les autres peuples européens. Le principal défi pour le Kosovo aujourd’hui, c’est la mise en œuvre de l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme, en particulier la lutte contre la corruption et la criminalité organisée.

Un développement tout à fait positif dont vous avez certainement entendu parler, car tous les médias européens en font état, est le dialogue entre Pristina et Belgrade sous l’égide de l’Union européenne, qui s’est établi au niveau des Premiers ministres. Cela ouvre une possibilité de résolution des problèmes politiques ainsi que des questions techniques. Si je suis bien informé, la plupart des engagements pris à ce niveau sont aujourd’hui véritablement mis en œuvre. Cette mise en œuvre est bien entendu cruciale.

Mon rapport porte également sur le rôle du Conseil de l’Europe et lui lance un appel pour agir en faveur de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit en élargissant nos programmes de coopération et en permettant aux autorités compétentes du Kosovo d’être directement impliquées dans la mise en œuvre de ses activités et ses programmes.

Nous savons que nos budgets sont limités. Mais la Commission européenne a depuis longtemps proposé au Conseil de l’Europe de mettre en œuvre des programmes financés par le budget de l’Union européenne. Juste avant Noël, cette proposition a été réitérée afin que les organes du Conseil de l’Europe puissent être en contact avec les autorités du Kosovo. Cela permettra une meilleure présence du Conseil de l’Europe, avec des programmes utiles non seulement au Kosovo, mais également aux pays voisins.

Enfin, j’espère – et c’est ce que nous disons dans la résolution – que nous allons pouvoir renforcer notre propre dialogue avec les représentants des forces politiques élues au sein de l’Assemblée du Kosovo. Cette résolution invite le Bureau de l’Assemblée à définir les modalités de ce dialogue dans le plein respect du statut de neutralité qui est essentiel et souligné par toutes les organisations internationales présentes au Kosovo.

Je vous invite, Mesdames et Messieurs, à vous prononcer sur ce rapport et attends notre débat avec impatience.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Monsieur le rapporteur. Il vous restera un peu plus de 4 minutes 30 pour répondre aux différents orateurs.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Michel, au nom du Groupe socialiste.

M. MICHEL (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, je remercie tout d’abord M. von Sydow, dont le rapport commence de façon très noire pour s’éclaircir à la fin.

Pour m’être moi-même rendu au Kosovo ainsi que dans tous les autres pays de la zone, j’ai pu constater que la situation évolue et s’améliore depuis deux ou trois ans, notamment grâce au dialogue renoué entre Pristina et Belgrade sous l’égide de l’Union européenne – dialogue qui, naguère, était totalement bloqué. Il est évident que la Serbie a tout intérêt à apaiser sa relation avec le Kosovo si elle veut intégrer l’Union européenne, car c’est aujourd’hui l’obstacle principal qui lui reste à franchir.

Passé ce constat diplomatique, je m’interroge cependant sur la réalité de ce dialogue sur le terrain. Sur le terrain, le Kosovo tente de devenir un État moderne et de consolider son régime démocratique. Il vise à intégrer dans le même temps le concert des nations européennes. Son principal défi est celui de la coexistence pacifique entre deux communautés qui ont vécu des années de guerre civile et qui, pour certains, sont toujours dans une haine réciproque totale. Les violences ont cessé aujourd’hui et, même si elles reprennent sporadiquement, elles sont condamnées par le gouvernement central. Il appartient à ce dernier désormais de dépasser ce stade et de faire émerger un véritable vouloir vivre-ensemble. J’ai encore en tête les propos d’une jeune habitante de Mitrovica, qui travaillait pour une association pro-européenne et refusait de voyager avec un passeport kosovar, souhaitant simplement disposer d’un passeport serbe. Cela en dit long sur l’état de la société du Kosovo aujourd’hui !

La décentralisation que les autorités disent vouloir promouvoir doit être mise en place et donner lieu à de véritables péréquations en vue de diminuer le rôle des structures parallèles – financées aujourd’hui par la Serbie, comme chacun sait. Par ailleurs, le bilinguisme doit être encouragé car, aujourd’hui, les deux communautés ne se comprennent pas parce qu’elles ne parlent pas la même langue.

Le nord du pays reste un défi de taille. Ce territoire tient plus, à l’heure actuelle, du sud de la Serbie que de la partie septentrionale du Kosovo. Mais, pour ma part, je ne militerai pas en faveur d’une partition – dont on a vu les résultats en Bosnie – ni a fortiori en faveur de la mise en place d’une Republika Srpska kosovare, tant une nouvelle division aurait une incidence considérable sur le devenir de la région et ouvrirait, à n’en pas douter, de nouvelles périodes d’instabilité non seulement au Kosovo, mais aussi en Serbie, en Macédoine et, bien sûr, en Bosnie-Herzégovine. Ces pays n’en ont vraiment pas besoin. De nombreux précédents montrent, à l’image de l’accord de Gasperi-Gruber de 1947 sur le Tyrol du Sud, qu’il existe des moyens pour permettre à toutes les parties de ce pays de s’intégrer pleinement.

En conclusion, Monsieur le Président, je voudrais suggérer que, lors d’une session, soit inscrit à l’ordre du jour un débat conjoint ou consécutif sur les quatre Etats qui ont quitté la Fédération de Serbie : le Monténégro, la Macédoine, la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo. Ces quatre pays ne sont pas aujourd’hui de vrais Etats démocratiques. Ils peinent à le devenir pour des raisons différentes, certes, mais qui s’apparentent. Entendre des rapports successifs sur ces quatre Etats permettrait à l’Assemblée parlementaire d’avoir un éclairage bien plus complet sur la situation.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Hancock, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – J’aimerais tout d’abord féliciter le rapporteur pour un excellent rapport équilibré. Permettez-moi toutefois une critique : l’équilibre du rapport me semble quelque peu altéré par l’optimisme dont il fait preuve. En effet, la réalité de la situation telle que nous la connaissons depuis une décennie, voire plus, ne nous permet pas de croire que les questions se règleront dans un avenir proche. Si ce rapport me paraît trop optimiste, il convient, en revanche, de reconnaître qu’il souligne bien les thèmes clés de la problématique.

Un des paragraphes-clés est le paragraphe 8, qui évoque les problèmes permanents liés à la corruption systématique. Rien ne sert de s’illusionner, tous ceux qui connaissent la situation au Kosovo savent bien les effets de cette corruption qui fait tache d’huile dans la région, voire au-delà. Son ampleur est telle que l’on ne peut raisonnablement penser que la situation s’est améliorée. Au contraire, il reste beaucoup à faire de ce point de vue. Le rapport parle de normalisation, mais est-il vraiment possible de normaliser une situation comme celle que vient de nous décrire notre collègue français dans la partie nord du Kosovo ? Sera-t-il jamais possible de rapprocher les communautés et de les amener à une situation qui ressemblerait à ce que nous appelons « normalité » ? Malheureusement, je regrette de devoir dire que je n’y crois pas et que je ne pense pas que ce soit un objectif que l’on puisse atteindre.

Lors de la réunion de ce matin de la commission des questions politiques, nous avons entendu les commentaires des représentants du Kosovo. C’était très intéressant. Ils ont parlé du rôle de la KFOR. La protection par la KFOR des droits de l’homme et des personnes au Kosovo restera encore un problème. Aucun de ceux qui se sont exprimés ce matin ne pensait que ce serait un effort à court terme et qu’un départ serait possible sous peu.

Ils nous ont également dit que les troupes de la KFOR protégeaient les églises et les activités religieuses des Serbes et d’autres minorités. Le fait que ceux-ci soient protégés par des militaires ou la police est tout de même problématique. Il ne me semble pas, en tout cas, normal que des églises soient protégées par la police. Cela signifie que perdure une réaction spontanée de la majorité musulmane albanaise au Kosovo, qui n’accepte pas que certains aient une autre religion. La religion chrétienne n’est visiblement pas suffisamment acceptée par les autorités du Kosovo.

Je suis tout à fait favorable à la normalisation, mais ce serait pécher par excès d’optimisme que de croire que la situation se résoudra dans un avenir proche. Je pense que, malheureusement, le problème se posera encore à nous pendant des années.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Leigh, pour le Groupe démocrate européen.

M. LEIGH (Royaume-Uni)* – Mon groupe remercie M. von Sydow pour son excellent rapport. Il est tout à fait essentiel pour nous de suivre la sombre situation régnant au Kosovo. Pour reprendre les propos d’un ancien Premier ministre britannique, on ne saurait parler du Kosovo comme d’un pays lointain, éloigné dans le temps et dans l’espace, dont on n’aurait rien à connaître. Nous devons tous nous préoccuper de ce qui s’y passe.

La semaine dernière encore, à Kamenica, un groupe d’enfants d’une école primaire serbe ont été attaqués par les étudiants d’une école albanaise qui les attendaient à un arrêt de bus. Il ne s’agit pas d’un incident isolé : c’est la cinquième fois que des écoliers sont attaqués dans cette ville depuis le début de l’année scolaire. Selon le maire de Kamenica, la situation, en termes de sécurité, est telle que les parents se demandent s’ils doivent envoyer leurs enfants à l’école. Dans de telles conditions, il ne peut pas y avoir de paix.

De la même façon, on sait que des stèles et des pierres tombales ont été vandalisées. Ces événements sont très dérangeants.

Nous devons revoir notre approche de ce conflit et réévaluer le rôle que nous y avons joué. L’intervention de l’Otan n’a peut-être servi qu’à exacerber les tensions. N’aurait-il pas été préférable de soutenir et encourager les groupes d’opposition, lesquels auraient pu réussir à mettre fin au régime de Milosevic ? Au lieu de cela, l’action de l’Otan, même si elle était pleine de bonnes intentions, a été perçue comme une attaque extérieure et a conduit l’opposition à rejoindre le camp de Milosevic en participant à un gouvernement d’union nationale, ce qui a également attisé la violence et accru les attaques serbes contre les civils albanais. Finalement, le résultat de l’intervention a été exactement l’inverse de celui qui était escompté : les victimes ont simplement changé de côté. Ce conflit a ainsi été une tragédie humaine sans nom ; il a fortement dégradé l’image de l’Europe dans le monde et a conduit à un exode des Serbes du Kosovo.

Beaucoup pensent que nous avons une attitude hypocrite. Si les attaques contre les Serbes se poursuivent, les gens commenceront à dire que, si nous acceptons le principe de l’autodétermination pour le Kosovo et que nous l’autorisons à quitter la Serbie, alors nous devons reconnaître ce même principe pour les Serbes du Kosovo, notamment dans le Nord, et leur accorder le droit de rejoindre la Serbie. Si je rejette de telles solutions, il n’en demeure pas moins qu’il revient aux autorités kosovares de faire en sorte que tous les citoyens aient le sentiment d’avoir une place dans le pays. C’est la raison pour laquelle nous devons conduire une politique de neutralité vis-à-vis du Kosovo. La situation ne peut s’améliorer qu’à travers un dialogue bilatéral.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Papadimoulis, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

M. PAPADIMOULIS (Grèce)* – Je remercie à mon tour M. von Sydow pour son rapport. Il s’agit d’un texte très équilibré. Le fait qu’il satisfasse également la représentation serbe est d’ailleurs la preuve qu’il a su adopter une approche positive.

Certes, ce rapport apparaît comme optimiste au regard de la situation réelle du Kosovo. Mais cet optimisme peut constituer un moteur pour chercher à améliorer la situation. Nous savons tous que, selon la Résolution 1244 de l’Onu, le Kosovo est un casus singularis. Nous savons aussi qu’un grand nombre de membres du Conseil de l’Europe ont reconnu le Kosovo. Cela dit, d’autres ne l’ont pas fait. C’est la raison pour laquelle le Conseil de l’Europe – et cela vaut aussi pour le présent rapport – doit être attentif, maintenir une position équilibrée et se concentrer sur ce qui peut améliorer la situation pour toutes les parties intéressées, à savoir le respect des droits humains, le renforcement du dialogue entre Pristina et Belgrade, la clarification du sort des personnes disparues et la lutte contre la corruption et la criminalité, laquelle est très répandue dans la région.

Nous devons renforcer l’autonomie et la sécurité des Serbes, mais aussi renforcer les autorités locales. Il nous faut investir dans la nouvelle génération, à travers des programmes auxquels toutes les parties pourront contribuer, ce qui permettra de promouvoir le dialogue et la coopération. La diversité culturelle est une richesse.

Le Groupe pour la gauche unitaire européenne considère donc qu’il s’agit là d’un bon rapport, mais qu’il est important de passer des paroles aux actes. Or, pour ce faire, il reste beaucoup de travail.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Vareikis, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

M. VAREIKIS (Lituanie)* – Je félicite le rapporteur au nom de mon groupe. Lors de notre réunion, nous avons décidé de soutenir ce rapport, même s’il ne constitue pas pour nous la fin de l’histoire, la solution définitive. En effet, longue est la liste des choses que le Gouvernement du Kosovo doit faire. Il suffit pour s’en convaincre de lire le paragraphe 11 du rapport : cela faisait longtemps que je n’avais pas vu une liste de recommandations à un gouvernement aussi fournie ! Bref, il y a encore beaucoup de pain sur la planche.

Comme vous le savez, deux pays d’Europe ne sont pas membres du Conseil de l’Europe : le Bélarus, pour les raisons que l’on connaît, et le Kosovo. Le sort de deux pays est en suspens. Nous avons créé le Kosovo en pensant que c’était la solution. Or nous voyons maintenant que c’est le problème. La question est donc simple : faut-il rejeter le projet de ce pays, faut-il l’améliorer ou encore le poursuivre en l’état ? Le rapporteur nous propose des méthodes pour l’améliorer. Or la faiblesse du projet du Kosovo tient au fait qu’il est fondé sur la victoire d’un camp sur l’autre et qu’il n’est pas le résultat d’un dialogue.

L’une des parties ne reconnaît pas le Kosovo. Il appartient bien sûr à ces personnes de juger ce projet. La mission du Conseil de l’Europe est quant à elle de permettre aux peuples de vivre ensemble, dans l’amitié. La reine Victoria était une femme tout à fait sérieuse et la victoire, qu’elle incarne par son nom, est chose tout aussi sérieuse, mais je crois que l’amitié est encore plus belle. Si l’on veut parvenir à un rapprochement entre les parties, il faut prendre des mesures. Il appartient notamment aux autorités du Kosovo de le faire.

Par ailleurs, l’adhésion au Conseil de l’Europe ou à l’Union européenne ne doivent pas faire l’objet d’un quelconque marchandage. L’une des parties s’attache à la démographie ; l’autre au patrimoine. On peut harmoniser ces deux points de vue.

En conclusion, ce rapport est très sérieux et les mesures proposées doivent impérativement être mises en œuvre au quotidien.

LE PRÉSIDENT – M. le rapporteur ne souhaitant pas répondre tout de suite aux porte-parole des groupes qui viennent de s’exprimer, la parole est à M. Fournier.

M. FOURNIER (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, l’année qui vient de s’écouler a correspondu à une nouvelle étape pour le Kosovo, lequel semble enfin, à l’aube du quinzième anniversaire de la création du Groupe de contact, trouver sa place sur la scène régionale, mais aussi internationale, et cela en dépit des incertitudes qui entourent encore son statut.

Je tiens au préalable à saluer la clairvoyance des autorités serbes qui, depuis deux ans et malgré un changement de gouvernement, poursuivent les négociations avec leurs homologues kosovars sous l’égide de l’Union européenne, afin de régler un certain nombre de problèmes techniques mais aussi politiques. Sans cette ouverture, je ne doute pas que le rapport présenté aujourd’hui par la commission des questions politiques, mais aussi la communication de la Commission européenne sur le sujet publiée en octobre dernier, seraient moins positifs sur le développement des institutions démocratiques au Kosovo.

Mon propos liminaire ne doit pas pour autant laisser penser que tout va bien au Kosovo, car je mesure grandement les difficultés qui persistent. N’oublions pas que ce pays est confronté à un triple défi : celui de la reconstruction, après des années de guerre civile larvée ; celui de la démocratie, le peuple kosovar n’ayant pratiquement jamais connu ce régime ; et celui de l’affranchissement de la tutelle internationale. Ce dernier point n’est d’ailleurs pas sans conséquences sur un autre enjeu fondamental pour le Kosovo, celui du développement économique.

Face à ces défis, le Conseil de l’Europe a un rôle indéniable à jouer. Les instruments dont nous disposons sont à même de respecter les positions neutres adoptées par notre Organisation sur la question du statut. Je regrette néanmoins, comme l’indique le projet de recommandation, que notre Organisation n’ait pas été en mesure de mettre en place d’autres mécanismes de suivi, notamment en ce qui concerne la lutte contre la corruption. Le Conseil de l’Europe doit s’affranchir de toute logique diplomatique en ce qui concerne le Kosovo et viser surtout au respect, sur place, des valeurs qui nous unissent ici. Le renforcement de l’Etat de droit à Pristina ne saurait être envisagé comme une reconnaissance implicite de l’indépendance ; il doit plutôt constituer une priorité sur un territoire qui, quel que soit son statut, est du ressort géographique du Conseil de l’Europe. Ne nous trompons donc pas de débat.

Je remarque d’ailleurs que l’Union européenne avance de son côté en lançant une étude de faisabilité concernant un accord de stabilisation et d’association avec le Kosovo, quand bien même cinq Etats membres se refusent toujours à reconnaître son indépendance. Nous ne pouvons, une nouvelle fois, nous perdre dans des débats stériles sur l’opportunité politique d’une action et laisser d’autres organisations reprendre nos missions. La commission des questions politiques souhaite donc avec raison que soit améliorée la coopération avec les autres acteurs internationaux, afin notamment d’éviter de dupliquer les efforts. Le risque de duplication suppose néanmoins une implication pleine et entière de notre Organisation. Permettez-moi donc d’appeler le Comité des Ministres à courir ce risque.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Mulić.

Mme MULIĆ (Croatie)* – Avant tout, j’aimerais féliciter M. von Sydow pour son excellent rapport et le travail très complet qu’il a réalisé sur « La situation au Kosovo* et le rôle du Conseil de l’Europe ».

En dépit d’un certain nombre de critiques exprimées par certains représentants de groupes politiques, j’approuve le ton optimiste de ce rapport. Je crois, comme les auteurs, que les progrès accomplis par le Kosovo sont bienvenus, mais que davantage d’efforts sont nécessaires, notamment en matière de réforme judiciaire, de prééminence du droit et de respect des droits de l’homme. De ce point de vue, l’accord signé par le représentant du Kosovo, Eulex et le représentant spécial de l’Union européenne au Kosovo constitue un pas dans la bonne direction. Je pense qu’un lien institutionnel plus fort du Kosovo avec l’Union européenne est d’une importance cruciale pour les progrès du pays.

Dans un des pays les plus pauvres d’Europe, encourager le développement socio-économique ne manquera pas de favoriser l’ancrage des valeurs européennes au Kosovo. À cet égard, l’entrée du pays dans la Banque européenne pour la reconstruction et le développement est un facteur essentiel de son intégration dans l’Europe.

La Croatie estime que la voix du Kosovo doit se faire entendre au sein des initiatives régionales et des organisations internationales. Sa participation active est en effet une valeur ajoutée pour la région. Le succès du processus de dialogue en cours entre la Serbie et le Kosovo contribue en particulier à la stabilité régionale dans l’Europe du Sud-Est. Ce dialogue devrait également faciliter la coopération inter-ethnique, ainsi que la communication, au sein du Kosovo, entre Albanais et Serbes.

La protection et la promotion des droits des minorités et l’intégration des communautés minoritaires demeurent un défi majeur au Kosovo. Mai en dépit de tous les efforts déployés en ce sens par ses institutions, il faut se souvenir que le Kosovo, n’étant membre ni des Nations Unies, ni du Conseil de l’Europe, n’est pas en mesure de ratifier les instruments internationaux en matière de droits de l’homme. Or nous devons donc tous garder à l’esprit qu’aucun Européen ne doit être exclu des avantages que fournit la Convention européenne des droits de l’homme.

Je le répète, la voix du Kosovo doit pouvoir se faire entendre dans les organisations internationales. En particulier, nous devons encourager fortement la possibilité, pour les membres de son assemblée, de participer au réseau parlementaire pour « le droit des femm2es de vivre sans violence ». Cela pourrait aider le Kosovo à améliorer ses normes juridiques et politiques dans le domaine de la prévention de la violence contre les femmes.

Enfin, je soutiens la proposition du Secrétaire Général visant à promouvoir une interaction directe entre les responsables du Conseil de l’Europe et les autorités compétentes au Kosovo.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Kalmár.

M. KALMÁR (Hongrie)* – Permettez-moi de féliciter M. von Sydow pour le deuxième rapport qu’il a produit sur le Kosovo. Par ce travail considérable, il est devenu un expert reconnu au niveau européen sur le sujet.

Cela fait pratiquement trois ans que l’Assemblée parlementaire a tenu son dernier débat sur le Kosovo, et de nombreuses évolutions ont eu lieu depuis. Nous sommes d’accord avec l’évaluation présentée dans le rapport ainsi que sur le contenu du projet de résolution, qui indiquent clairement que le grand nombre de questions pendantes exige une action, non seulement de la part des autorités kosovares, mais aussi en coopération avec la Serbie et les organisations internationales, en particulier celles intervenant dans la région.

La Hongrie a fortement soutenu la perspective européenne s’agissant du Kosovo et a joué un rôle actif dans la coopération internationale en faveur de son développement social et économique. Dans le cadre de projets d’assistance technique, nous partageons notre expérience en matière de bonne gouvernance, de développement rural et pour ce qui concerne les exigences relatives à l’adhésion à l’Union européenne. La coopération entre les deux pays est également intensive dans le cadre des projets IPA et la Hongrie participe à trois projets de jumelage au Kosovo.

Par ailleurs, conformément à la demande du Conseil nord-atlantique, l’entreprise hongroise HungaroControl assurera le contrôle de l’espace aérien kosovar, fermé à l’aviation civile. Lors de la mise en œuvre de ce projet, l’entreprise mènera des discussions avec tous les pays voisins.

Un défi majeur au Kosovo concerne la migration des Serbes vers d’autres régions de la Serbie, ce qui peut générer des tensions liées à la configuration ethnique de ces régions. Je pense notamment à la Voïvodine.

Enfin, un autre élément important est l’éducation. Le rôle des enseignants en histoire est essentiel dans la réconciliation. On peut ne pas avoir la même interprétation du passé, mais il ne faut pas aller trop loin. Les professeurs d’histoire doivent donc préparer les jeunes générations à un avenir commun, sans quoi il n’y aurait aucun avenir pour les nations de la région.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Szabó.

M. SZABÓ (Hongrie)* – À mon tour, je félicite le rapporteur pour son rapport. Quant au projet de résolution, il me paraît bon et je l’appuie.

Malgré les difficultés financières, et même si des progrès considérables doivent être encore accomplis, une société de radiodiffusion publique serbe a pu ouvrir au Kosovo, et les municipalités à majorité serbe ont désormais un droit à l’autofinancement, ce qui garantit leur économie. Par ailleurs, une révision de la Constitution a entraîné une modification des lois sur les intérêts vitaux, ainsi que des règles relatives à la décentralisation et à la protection du patrimoine culturel et religieux.

L’Union européenne et le Conseil de l’Europe doivent jouer un rôle central dans la conduite de l’intégration du Kosovo à l’Europe. Il convient donc de renforcer le Bureau du Conseil de l’Europe à Pristina, notamment en ouvrant un centre régional à Peja/Pec. Les autorités du Kosovo doivent avoir une interaction avec le Conseil de l'Europe.

Le mécanisme de suivi du Conseil de l'Europe doit être appliqué et ce dernier doit pouvoir jouer un rôle clé pour la promotion de l’inclusion de toutes les communautés et de toutes les minorités sur les plans politique, social et culturel. Le Conseil de l'Europe peut jouer un rôle positif dans la sauvegarde du patrimoine culturel et religieux du Kosovo ainsi que dans le suivi de la mise en œuvre de la législation en la matière.

Nous pensons en Hongrie que les résultats obtenus dans le dialogue entre Belgrade et Pristina sont prometteurs mais encore fragiles. Nous nous félicitons des résultats obtenus lors des dernières réunions entre les Premiers ministres, MM. Dačić et Thaçi, à Bruxelles, mais ce dialogue ne doit pas s’arrêter là, il doit être maintenu.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Beck.

Mme BECK (Allemagne)* – Je voudrais tout d’abord réagir aux propos tenus par M. Hancock. Aujourd’hui, une grande partie des délégations française et allemande est absente parce qu’elle assiste à la cérémonie, à Berlin, de commémoration des cinquante ans du Traité de l’Elysée. Il est important de l’évoquer, quand on entend M. Hancock et son pessimisme. L’Allemagne et la France étaient les ennemis héréditaires par excellence, et pourtant, depuis de nombreuses années, ils célèbrent ensemble le Traité de l’Elysée ! Il y a donc toujours un espoir pour le changement, même quand celui-ci a l’air peu probable au regard de l’Histoire.

S’agissant de la légitimité de l’intervention de l’Otan, je réponds à M. Leigh que le Kosovo n’existerait pas s’il n’y avait pas eu Srebrenica. Les militaires serbes, sous le regard de l’OSCE, avançaient, et face à cette menace d’un second massacre, que fallait-il faire ? Simplement attendre la fin du régime Milošević ? Cette attente aurait risqué de durer longtemps.

La situation d’aujourd’hui est difficile. Nous voyons bien que les choses sont plus compliquées que nous l’imaginions il y a quinze ans. La question du statut fait problème, certes, mais la question essentielle pour nous est celle des droits de l’homme. Le Conseil de l'Europe doit adresser ce message : les Etats modernes ne doivent pas se fonder sur l’illusion de l’homogénéité ethnique. C’est une illusion qui ne peut qu’avoir des effets catastrophiques sur la cohabitation démocratique et en bonne intelligence de différents peuples, surtout dans une région où la diversité ethnique est telle qu’il faudrait créer des Etats de plus en plus petits – le Kosovo du Nord et ensuite la Voïvodine ! Il y a trop de régions et de sous-régions, elles ne peuvent pas toutes devenir autonomes ! La légitimité de chacun dans la multiethnicité doit être ce qui guide le Conseil de l'Europe dans l’accompagnement du Kosovo. C’est notre terrain le plus sûr.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Pushkov.

M. PUSHKOV (Fédération de Russie) – (Commençant en français) Nous trouvons le rapport bien équilibré. (Poursuivant en anglais)* Quel que soit le statut du Kosovo, les peuples qui y vivent doivent bénéficier de la prééminence du droit, du respect des droits de l’homme, de la même façon que toutes les populations en Europe.

Le Kosovo a été reconnu par un certain nombre de pays, pour des raisons politiques, notamment par des pays de l’Union européenne et de l’Otan. Ce soutien lui a permis de bénéficier du niveau de reconnaissance dont il bénéficie actuellement. Nous avons créé ce pays.

La résolution propose de définir des modalités permettant un dialogue avec les forces politiques au Kosovo. La question qui se pose est de savoir quelle serait l’approche à adopter vis-à-vis d’autres populations et d’autres territoires en Europe dont le statut pose également problème. Je rejoins sur ce point Mme Beck. Les populations qui vivent sur des nouveaux territoires peuvent-elles également bénéficier de la même bonne gouvernance que les autres peuples européens ?

Cette Assemblée se penchera-t-elle uniquement sur les droits du Kosovo, reconnu par un certain nombre de pays qui ont beaucoup d’influence, ou également sur les droits d’autres peuples en Europe, sans tenir particulièrement compte de leur statut actuel ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Djurović.

Mme DJUROVIĆ (Serbie)* – La délégation serbe est tout à fait d’accord avec le Conseil de l'Europe en ce qui concerne l’élaboration de normes démocratiques en Europe. Il est important qu’il maintienne sa position de neutralité tout en préservant la sécurité de ceux qui vivent au Kosovo.

La Serbie souhaite apporter son soutien aux efforts déployés par le Conseil de l'Europe, mais elle doit maintenir un rythme constructif dans le cadre de ses négociations avec Bruxelles. Cette phase de négociation est fragile et toute tentative visant à saper ses efforts pourrait être dangereuse à long terme.

Ces derniers mois, le nouveau gouvernement et le Parlement serbes ont fait des concessions significatives afin d’amorcer des négociations ; il faut que cela se poursuive, malgré les obstacles érigés par ceux qui profitent de la situation actuelle. Nous ne demandons pas à être applaudis, mais demandons simplement que la situation soit évaluée de façon non biaisée et que le mur du silence entourant certaines questions soit brisé. Je pense notamment à certains points figurant dans les rapports d’Europol et de la Cour des comptes européenne.

Pour conclure, je remercie le Conseil de l'Europe pour tous ses efforts ainsi que le rapporteur pour son rapport, sachant que ce n’était pas une tâche aisée.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Sasi.

M. SASI (Finlande)* – Je remercie vivement M. von Sydow pour son excellent rapport.

Trente-quatre membres du Conseil de l'Europe ont reconnu l’Etat du Kosovo, parmi lesquels la Finlande. Le Conseil de l'Europe est une organisation qui englobe l’ensemble des Etats européens qui œuvrent pour la défense des droits de l’homme. Il serait logique que le Kosovo fasse partie de notre Organisation et de notre Assemblée, car les droits de l’homme doivent être respectés dans tous les pays européens, qu’ils soient ou non membres du Conseil de l'Europe. Il est vrai que les autorités kosovares entretiennent un dialogue constant avec nous. C’est pourquoi il est de notre devoir d’aider le Gouvernement du Kosovo à mettre en œuvre les normes de protection des droits de l’homme du Conseil de l'Europe en poursuivant le dialogue.

Le rapport fait état des progrès réalisés. Pour autant, il appartient à la commission de suivi d’évaluer ce qu’il reste à faire pour atteindre les normes que promeut notre Assemblée en matière de protection des droits de l’homme, de respect de l’Etat de droit et de démocratie. Des difficultés subsistent, tels que la corruption ou la dépendance du judiciaire. Si l’on se replace dans une perspective historique, on sait qu’il est parfois nécessaire d’ériger des frontières pour améliorer la situation, mais si le Kosovo et la Serbie rejoignent l’Union européenne, les barrières entre ces deux pays tomberont d’elles-mêmes.

Sous l’égide de l’Union européenne, un dialogue a été ouvert pour trouver une solution. Mais les droits des Serbes au Kosovo doivent être garantis et une autonomie suffisante doit contribuer à faciliter les relations. Cela étant, si un Etat autonome pour les Serbes au sein du Kosovo pourrait être une solution, il faut aussi prendre en compte les intérêts des autres minorités présentes. Les droits des Serbes au Kosovo doivent être pleinement respectés, car il n’y a pas eu d’annexion du Kosovo à la Serbie.

LE PRÉSIDENT – Mme Marković, inscrite dans le débat, étant absente de l’hémicycle, la parole est à M. Mora Amaral.

M. MOTA AMARAL (Portugal)* – Je félicite très chaleureusement notre éminent collègue, M. von Sydow, pour ses efforts remarquables visant à promouvoir le dialogue entre les différentes entités impliquées dans la situation au Kosovo. La rédaction de ce rapport est une grande performance, il a fait preuve de persévérance, de patience, de compréhension humaine, ce qui est tout à son honneur.

Bien que la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo n’ait pas respecté les règles de la communauté internationale, elle a néanmoins été soutenue par un grand nombre d’Etats membres du Conseil de l'Europe en raison du caractère exceptionnel de la situation et de ses origines. Si tout peuple a le droit a l’autodétermination en vertu de la Charte des Nations Unies, l’indépendance n’est pas la seule façon d’affirmer ce droit au regard de l’identité et des intérêts de telle ou telle communauté. C’est pourquoi il convient de suivre attentivement la situation au Kosovo, car nous devons soutenir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la région. Le dialogue doit par ailleurs se poursuivre entre les autorités serbes et kosovares afin de régler les problèmes qui touchent les citoyens et qui dépassent les frontières administratives.

Si je suis peu enthousiaste à la perspective d’un élargissement permanent de l’Union européenne en raison des difficultés sociales, politiques et économiques que traversent ses Etats membres, en revanche, le soutien de l’Union européenne au processus de consolidation et de renforcement des institutions démocratiques dans les Balkans me semble d’une importance fondamentale. La stabilité dans les Balkans doit devenir une réalité. Elle comportera des avantages, y compris économiques, pour tous dans la région.

Le Portugal a toujours donné son appui à cette coopération. Cela dit, la question du Kosovo n’a peut-être pas été traitée avec toute la sagesse nécessaire. En effet, le Kosovo crée un précédent qui risque d’être invoqué à l’avenir. On voit d’ailleurs des exemples apparaître dans d’autres pays, tels que le Royaume-Uni, l’Espagne, la Belgique ou l’Italie. En ces temps difficiles, des solutions extrêmes sont recherchées pour trouver une voie de secours. Si le bon sens ne prévaut pas, nous risquons de nous trouver confrontés à bien des mésaventures, ce qui n’est pas sans risques pour les peuples concernés.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Schennach.

M. SCHENNACH (Autriche)* – Le rapport de M. von Sydow est impressionnant.

Madame Beck, je partage avec vous l’idée que l’espoir doit nous guider. Pour autant, nous voyons bien à quel point la paix reste fragile dans cette région. L’exemple de la France et de l’Allemagne que vous avez rappelé a surtout prouvé que les responsables des deux pays ne se fondaient pas sur le nationalisme. À Presevo, la police serbe démantèle des monuments albanais cependant qu’en retour, des cimetières sont dégradés. On comprend alors le caractère superficiel des solutions.

Le processus de suivi de l’Otan conduit les soldats à ne pas vivre dans les casernes, éloignés de la population. Ils vivent chez l’habitant pour s’imprégner de l’atmosphère au Kosovo. Le fait est que l’heure est décisive pour le Conseil de l'Europe, car il s’agit de défendre la démocratie et l’Etat de droit. La Cour des comptes européenne a condamné les actes de criminalité et de corruption internes à l’opération Eulex et à la Kfor, nous confrontant à la gestion de nos propres problèmes.

Le 18 janvier, sous la présidence de Lady Ashton, nous avons assisté à un petit effort de normalisation dans le domaine des tarifs douaniers et du financement des municipalités serbes, ce qui offre une petite autonomie à ces municipalités, quoique cela ait été contredit immédiatement et que d’aucuns s’opposent à toute idée d’autonomie. Reconnaissons toutefois que l’indépendance du Kosovo se fonde sur un budget provenant à 90 % des fonds de l’Union européenne – ce qui est en soi inquiétant. Face à cela, nous devrions être présents en tant que Conseil de l’Europe, et apporter notre soutien, car l’Union européenne ne peut pas le faire de la même manière que nous.

S’écarter du plan Ahtisaari, comme le demande Mme Beck, serait grave. Il n’y a pas que la minorité serbe : il existe un grand nombre de minorités sur ce territoire. Enfin, le rapport dit qu’il ne faut pas renvoyer les Roms au Kosovo pour l’instant. Que chacun l’entende !

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Nikoloski.

M. NIKOLOSKI (« l’ex-République yougoslave de Macédoine »)* – Je souhaite tout d’abord féliciter M. von Sydow pour son rapport sur la situation au Kosovo et sur le rôle du Conseil de l’Europe. Nous sommes bien entendu intéressés par le développement d’un pays stable et démocratique dans la région. Je rappelle que nous étions tous ensemble réunis au sein de la Yougoslavie. Nous poursuivons aujourd’hui notre coopération avec ce pays. La Macédoine a reconnu le Kosovo, nous respectons le droit des Kosovars à l’indépendance, et il faut que tous les critères qui s’imposent aux Etats européens soient également respectés. C’est important pour l’intégration européenne et nous sommes prêts à partager notre expérience en la matière, ainsi qu’en matière de résolution de conflits.

Lors de la crise du Kosovo, la Macédoine a recueilli un grand nombre de réfugiés, environ 300 000, ce qui représente 15 % de la totalité de notre population. Je suis heureux que la plupart aient pu rentrer chez eux après la crise et qu’ils vivent maintenant au Kosovo. Toutefois, un petit nombre de personnes, issues notamment des communautés rom et turque, ne peuvent pas retourner chez elles. Le projet de recommandation évoque, aux points 5.1.1 et 5.1.2, une assistance financière qui serait apportée afin de trouver une solution durable à la question des personnes déplacées et des réfugiés, en favorisant leur retour. Je demande aux autorités kosovares d’y travailler. Les personnes déplacées ont souffert, il faut que les autorités fassent preuve d’empathie et de sympathie à l’égard de ceux qui ne peuvent pas encore retourner chez eux en toute sécurité.

Nous souhaitons également maintenir notre bonne coopération avec la Serbie. Un dialogue entre Belgrade et Pristina est la seule manière de résoudre les difficultés. Il faut que les Serbes vivant au Kosovo soient respectés, de même que les autres minorités – y compris la minorité macédonienne.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Jakič.

M. JAKIČ (Slovénie)* – Je partage le point de vue du rapporteur selon lequel des progrès ont été réalisés au cours des quatre dernières années, c’est-à-dire depuis la déclaration d’indépendance du Kosovo en 2008. Plutôt que de « certains progrès », je parlerais de « progrès significatifs ». Après les élections parlementaires et présidentielle en Serbie en mai 2012, quatre évolutions importantes ont eu lieu, qui sont d’ailleurs mentionnées dans le rapport. Le fait que la question du Kosovo n’ait été qu’une préoccupation marginale durant ces campagnes électorales, mais que cela ait été suivi de réunions entre les premiers ministres serbe et kosovar, me semble plus important qu’il n’y paraît à première vue. Et c’est vrai, il reste encore beaucoup à faire.

Je suis également d’accord avec le rapporteur pour dire que le principal défi que doit relever le Kosovo est la mise en œuvre des normes relatives à la protection des droits de l’homme et au respect de l’Etat de droit. J’appuie donc la principale recommandation du rapporteur visant à ce que le Conseil de l’Europe contribue au développement d’un Kosovo stable, viable, pacifique, démocratique et multi-ethnique, en mettant l’accent sur le renforcement de la démocratie, sur la protection des droits de l’homme et sur l’Etat de droit, ce qui garantira la paix dans les Balkans et dans l’ensemble de l’Europe. Mais, avant tout, le Kosovo doit mettre en œuvre la législation existante sur la protection des minorités et renforcer le dialogue politique. Il s’agit d’ailleurs d’une des conditions pour rejoindre l’Union européenne.

La diversité des opinions sur le statut du Kosovo ne doit pas être un obstacle à l’unité de l’engagement. Notre neutralité actuelle ne doit pas empêcher le Conseil de l’Europe d’élargir ses relations de travail avec les autorités du Kosovo, afin de permettre à celles-ci de participer directement à la mise en œuvre des activités et des programmes du Conseil de l’Europe. La participation de nos collègues du Kosovo aux réunions de notre Assemblée en 2010 fut une première et importante étape dans cette perspective. Il est temps que le Bureau de l’Assemblée précise les modalités de cette coopération et intensifie son dialogue avec les représentants du Parlement kosovar, et cela quel que soit le statut du Kosovo. Tôt ou tard, le Conseil de l’Europe discutera de l’adhésion du Kosovo à l’Assemblée parlementaire. Plus vite le Kosovo sera prêt à appliquer les normes du Conseil de l’Europe, mieux ce sera pour le peuple kosovar et pour l’Europe tout entière.

LE PRÉSIDENT – MM. Shlegel et Agramunt, inscrits dans le débat, n’étant pas présents dans l’hémicycle, la parole est maintenant à Mme Kanelli.

Mme KANELLI (Grèce)* –Où est l’essence des droits de l’homme dans ce rapport ? On en parle, mais sans évoquer en rien les causes profondes ! Pourquoi sommes-nous ici ? Le Kosovo est-il un Etat, une zone géographique, ou le résultat de la guerre la plus sale et la plus inhumaine qui ait été conduite en Europe, et laquelle a été financée par les forces européennes et américaines ?

Nous parlons de dommages collatéraux à propos de toutes les guerres du monde. Ce rapport est censé traiter des droits de l’homme et des populations qui vivent au Kosovo, mais il n’évoque aucune des atrocités qui y ont eu lieu et qui s’y poursuivent. On parle de religions, de cimetières, mais ce n’est pas la vérité ; personne n’accorde d’attention à cela. Nous sommes des hypocrites. Nous parlons des droits de l’homme, sans nous attaquer aux causes de la traite des femmes, du trafic de drogue ; tout cela résulte de la guerre. Il faut dire la vérité.

Le Kosovo est frappé par la criminalité occidentale impérialiste. Si nous restons dans l’hypocrisie sans nous attaquer aux causes du mal, les droits de l’homme continueront d’être bafoués dans ce pays. D’ici quelques années, nous parlerons du Kosovo du Nord et du Kosovo du Sud, comme nous parlons aujourd’hui du Soudan du Nord et du Soudan du Sud. Les Français, les Anglais et les Allemands se préoccupent actuellement de la situation des droits de l’homme au Mali. Nous risquons également de voir un jour ce pays coupé en deux. Si nous voulons instaurer la paix dans le monde, nous devons d’abord nous attaquer aux monopoles économiques !

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Chisu.

M. CHISU (Canada, observateur)* –Ce rapport traite remarquablement de la situation dans ce pays et s’efforce de trouver le moyen de faire progresser ses relations avec le Conseil de l'Europe. Le Canada fait partie des pays qui ont reconnu l’indépendance du Kosovo. Nous avons fourni une assistance financière et participé à la mission Eulex entre 2008 et 2011 dans les domaines de la police, de la justice et du suivi des droits des minorités. Nous sommes favorables à une intégration accrue du Kosovo dans le système des relations internationales, notamment au sein du Conseil de l’Europe. À ce titre, les recommandations de la commission des questions politiques s’inscrivent dans le droit-fil de la volonté de renforcer le processus de démocratisation des institutions du Kosovo, de lutter contre le crime et la corruption, de promouvoir le respect des droits de l’homme et des minorités, et d’améliorer la coopération régionale.

Nous sommes convaincus que le Parlement du Kosovo est fermement engagé à protéger le droit des minorités, y compris le patrimoine culturel et religieux. Nous notons en particulier que la constitution du pays reflète cet engagement. Le développement du Kosovo vers un Etat multiethnique et démocratique est essentiel pour la paix, la stabilité politique et le progrès économique des Balkans. Nous sommes favorables à une intégration euro-atlantique de tous les pays de l’ouest de cette région. La normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie constitue un point essentiel pour la stabilité régionale. Les progrès récents dans les pourparlers bilatéraux, sous l’égide de l’Union européenne, entre le Kosovo et la Serbie sont très encourageants. Le dialogue engagé en mars 2011 a permis d’aboutir à des accords en matière de sécurité, de coopération commerciale et de liberté de mouvement. La mise en œuvre d’une gestion intégrée de la frontière entre les deux pays, à la suite de la réunion du 4 décembre 2012 entre les premiers ministres de la Serbie et du Kosovo, a été facilitée par Mme Ashton.

Ces différents acquis permettent d’envisager aujourd’hui une plus grande intégration du Kosovo dans la communauté des nations.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Gaudi Nagy.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Lorsque l’on aborde la question du Kosovo, on doit évoquer aussi celle du droit à l’autodétermination. Le Kosovo pourrait constituer un modèle sur le sujet. La clé du succès est sans nul doute le respect de l’histoire du Kosovo. Les Kosovars et les Albanais du Kosovo doivent trouver le moyen de vivre ensemble, en bonne intelligence, en respectant les valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe. Veillons à ne pas commettre les mêmes erreurs que dans le passé en oubliant l’importance de l’autodétermination. Je suis intimement convaincu de l’importance de l’adhésion du Kosovo au Conseil de l’Europe.

Ce rapport est très complet et le rapporteur est un véritable expert sur ce dossier. Je suis persuadé qu’il sait que le conflit actuel au Kosovo ne pourra être réglé sans la Serbie, qui doit convaincre ses populations vivant au Kosovo d’opter pour la coexistence pacifique, dans l’intérêt de tous. La Serbie ne doit pas oublier les erreurs du passé et accorder à ses minorités les mêmes droits que le reste de la population, notamment à la minorité hongroise de Voïvodine. À cette condition seulement la Serbie devrait pouvoir être autorisée à intégrer l’Union européenne.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Bakoyannis.

Mme BAKOYANNIS (Grèce)* – Contrairement à la plupart d’entre vous, je ne suis pas certaine que notre politique dans les Balkans soit la bonne politique. Nous avons voulu abolir les frontières en Europe mais, depuis vingt ans, de nouvelles frontières surgissent dans les Balkans. Je pense également, comme cela a été dit, que nous ne sommes pas ici pour discuter du statut du Kosovo. Les négociations actuelles entre Pristina et Belgrade montrent la volonté des deux parties d’aboutir à une réconciliation.

J’approuve pleinement ce rapport réaliste mais permettez-moi de suggérer plusieurs mesures pour renforcer notre action en faveur de la paix et de la stabilité dans la région. Tout d’abord, nous devons inviter des parlementaires femmes de Belgrade et de Pristina à participer au forum « Les femmes parlent aux femmes », où elles auront la possibilité de se trouver des affinités. Ensuite, le Conseil de l'Europe pourrait lancer une initiative en faveur des prochaines générations, en invitant une centaine de jeunes des deux pays afin de leur permettre de se rapprocher. C’est une condition essentielle à l’instauration de la paix dans la région. Enfin, nous devons favoriser l’indépendance de la justice, qui constitue un problème majeur aujourd’hui au Kosovo. Nous pourrions organiser des auditions confidentielles afin de définir les principaux enjeux en la matière.

Quant à l’ambassadeur grec Dimitrios Moschopoulos, il a été facilitateur dans les affaires religieuses à Pristina. Son rôle a été reconnu par le Secrétaire général des Nations Unies. Bien que la Grèce n’ait pas reconnu le Kosovo, elle entend jouer un rôle clé en tant que stabilisateur de la région dans le cadre des institutions européennes. La coopération entre les deux premiers ministres de la Serbie et du Kosovo constitue une avancée majeure, dont il faut espérer des résultats politiques. La nouvelle école de commerce de Mitrovica accueille depuis peu des élèves du Nord et du Sud. C’est la seule institution de ce type !

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Mehmeti Devaja.

Mme MEHMETI DEVAJA (« L’ex-République yougoslave de Macédoine »)* – Je souhaite féliciter le rapporteur pour son travail très équilibré. L’atmosphère est tendue dans la région, mais positive en ce qu’elle appelle au dialogue et à la recherche de solutions institutionnelles aux problèmes existants.

Cela fait cinq ans que le Kosovo a déclaré son indépendance, entouré d’Etats qui travaillent eux-mêmes dur afin de consolider leurs propres démocraties. Le Kosovo réaffirme son engagement en faveur de la prééminence du droit et du respect des droits de l’homme de toutes les communautés ethniques vivant sur son territoire.

Certes, des problèmes persistent, mais les autorités locales tentent de les résoudre en partenariat avec la Minuk, l’Eulex, ainsi que d’autres organisations internationales qui travaillent au Kosovo au renforcement de la prééminence du droit et du cadre juridique et législatif afin de lutter contre la corruption.

La lutte contre la corruption doit être un véritable engagement de toutes les parties prenantes au Kosovo. Les structures illégales et illégitimes, et le soutien qui leur est apporté, constituent un obstacle sérieux pour les autorités locales dans leur lutte contre la corruption. Les attaques contre les postes frontières et contre les institutions locales ne servent pas notre cause.

Le dialogue en cours au niveau des premiers ministres doit se poursuivre et se concentrer sur la normalisation des relations entre deux Etats souverains, et il doit avoir pour objectif de résoudre les problèmes quotidiens de la population. Les appels à la partition et au redécoupage des frontières sont dangereux pour l’ensemble de la région de l’ouest des Balkans.

Tout en nous félicitant du soutien apporté par l’Union européenne et le Conseil de l’Europe, je souhaite réaffirmer ici le fait que la perspective européenne est importante pour les pays de la région, et le Kosovo en particulier.

La situation demeure tendue, c’est le résultat des événements récents dans la vallée de Preševo. Le Kosovo a beaucoup souffert, bien assez. Nous nous souvenons de notre passé récent, et les tensions ne favorisent pas la paix, la réconciliation et l’avenir européen des Balkans. Il n’y a pas d’autre possibilité que le dialogue pour surmonter les conséquences de ce conflit. Un conflit gelé n'est conforme à l’intérêt d’aucune nation aspirant à un avenir européen.

Pour conclure, c’est une occasion supplémentaire pour le Kosovo et le Conseil de l’Europe de développer plus avant leurs relations, afin que le Kosovo devienne membre à part entière du Conseil de l’Europe.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Zohrabyan.

Mme ZOHRABYAN (Arménie) – Chers collègues, aujourd’hui nous examinons un rapport très important concernant la situation au Kosovo et le rôle que le Conseil de l’Europe peut y jouer.

En jouissant du droit à l’autodétermination des peuples, le Kosovo s’est proclamé indépendant en 2008. Oui, je suis d’accord avec le rapporteur, M. von Sydow, pour penser qu’indépendamment de la politique de neutralité appliquée par le Conseil de l’Europe à l’égard du Kosovo, et indépendamment du statut du Kosovo, toutes les personnes y vivant doivent bénéficier d’une bonne gouvernance, de la démocratie, de la prééminence du droit et des mêmes principes concernant les droits de l’homme que les autres personnes vivant en Europe.

Toutefois, le rapport de M. von Sydow m’oblige à mettre en parallèle la situation d’un autre Etat se trouvant sur le territoire de l’Europe, qui n’est pas encore reconnu, mais qui s’est proclamé indépendant sur la même base que le Kosovo. Le peuple du Haut-Karabakh aussi a proclamé son indépendance conformément à toutes les normes internationales.

Chers collègues, j’accepte pleinement le point du rapport de l’activité du Bureau de notre Assemblée indiquant que dans tous les cas où une question concrète sur le Kosovo sera à l’ordre du jour de notre Organisation, les représentants de l’Assemblée de ce pays peuvent être invités à participer à ces discussions. Nous saluons cette approche. Cependant, pourquoi ne pas appliquer cette approche pour le Haut-Karabakh, et assurer la présence et la participation aux discussions des représentants du parlement de ce pays ? Ce serait une décision juste et conforme aux valeurs fondamentales de notre organisation. Dans le même rapport d’activité du Bureau on se demande si la représentation des communautés de la partie nord de Chypre et de la Palestine au sein de notre Assemblée peut constituer un précédent pour le Haut-Karabakh, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud. Je suis de cet avis. Il faut étudier la question.

Oui, notre collègue M. von Sydow a raison de souhaiter que le Conseil de l’Europe intensifie son influence et son engagement au Kosovo en entretenant des relations avec les autorités du Kosovo à tous les niveaux. J’espère que le temps n’est pas loin où le Conseil de l’Europe, ainsi que mes collègues assis ici, admettront que le conflit non résolu ne peut justifier aucune atteinte aux droits de l’homme.

Le peuple du Kosovo, en exerçant son droit à l’autodétermination, a conquis son indépendance. Aujourd’hui nous discutons ici pour savoir comment aider le Kosovo à construire un Etat démocratique réel, car cet Etat rencontre plusieurs problèmes sérieux avec les libertés politiques, la prééminence du droit, le dialogue entre Pristina et Belgrade, la corruption et d’autres sujets fondamentaux. Je veux croire que le peuple et les autorités du Kosovo, avec le soutien de la communauté internationale, et avec notre soutien aussi, essayeront de construire une république démocratique réelle. C’est un tel régime que tente aujourd’hui de construire la République du Haut-Karabakh, bien qu’elle ne soit pas encore reconnue.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Gündeş Bakir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Nous voulons tous une Europe unie, stable et démocratique. Nous nous souvenons des deux guerres mondiales, et si elles nous ont appris quelque chose, c’est qu’il nous faut une Europe paisible et unie. Mais la situation dans les Balkans reste fragile. Tous, ici, nous devons être préoccupés de l’éventualité d’un conflit au Kosovo qui pourrait faire tâche d’huile. Comme l’a dit à juste titre le Président Clinton, ce serait un conflit sans frontières. Pour empêcher ces conflits, l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine et du Kosovo devraient être respectées par la Serbie avant son intégration euro-atlantique.

Les structures du Kosovo du nord peuvent aussi porter préjudice à l’Etat de droit. Certaines sont devenues des structures criminelles. La Serbie ne devrait pas encourager la formation de structures parallèles au gouvernement. Dans ce territoire, elle devrait respecter le droit du territoire de Pristina à établir son autorité partout sur le territoire, il faut respecter l’intégrité territoriale.

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe devrait s’opposer à des débats qui mettent à mal ce principe territorial. Il faut aussi relever qu’il ne serait ni juste ni correct sur le plan politique que le gouvernement de Pristina soit rendu responsable des violations des droits de l’homme, des cas de corruption ou de l’existence de formations criminelles dans l’ensemble du territoire du pays, à moins que les structures gouvernementales parallèles ne soient démantelées et que la région soit pleinement intégrée dans le reste du pays.

Certains facteurs externes expliquent la situation au Kosovo. Le Kosovo revient de loin. Il est aujourd’hui reconnu par 96 Etats. Afin d’établir un gouvernement effectif au Kosovo, le pays doit avoir la reconnaissance internationale. J’appelle tous les Etats membres du Conseil de l’Europe à reconnaître la souveraineté pleine et entière du Kosovo, qui doit avoir la possibilité de développer des coopérations internationales pour surmonter toutes les difficultés mentionnées par le rapporteur, y compris celles touchant la sécurité. Si le Kosovo était mieux reconnu internationalement, il pourrait s’intégrer sur le plan politique et économique et mieux lutter contre le crime organisé ou la corruption.

Tenant compte du fait que les Etats de Macédoine, du Monténégro et de Serbie sont tous aujourd’hui Etats membres du Conseil de l’Europe, j’appelle l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe à reconnaître le Kosovo en tant que membre du Conseil de l’Europe dans les meilleurs délais.

Jusqu’à la reconnaissance par tous les Etats membres du Conseil de l’Europe, le Kosovo devrait avoir le statut d’observateur et disposer de bureaux ici, au Conseil de l’Europe. Les parlementaires du Kosovo devraient avoir le droit de s’exprimer dans cet hémicycle et de déposer des amendements sur les résolutions qui les concernent. Une telle plate-forme de dialogue accru entre le Kosovo et la Serbie offrirait des possibilités d’amélioration des relations entre les deux pays.

Aucun Européen ne devrait être exclu du Conseil de l’Europe.

LE PRÉSIDENT – M. Xuclà, inscrit dans le débat, n’étant pas dans l’hémicycle, la parole est à Mme Woldseth.

Mme WOLDSETH (Norvège)* – Je suis tout à fait d’accord avec ce que disait Mme Gündeş Bakir, mais je voudrais tout d’abord remercier, à mon tour, M. von Sydow pour son travail sur le Kosovo. Le sujet n’était pas facile. Ce pays n’est pas membre de notre Assemblée, mais le rapporteur a réalisé un bon travail en se demandant comment, en tant qu’organisation, nous pouvons contribuer au renforcement de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit au Kosovo.

Je sais que l’intention du rapporteur n’est pas d’ouvrir une discussion sur le statut du Kosovo. Néanmoins, je souhaiterais que nos collègues du Parlement du Kosovo puissent être membres de notre Assemblée. La Norvège a reconnu le Kosovo et j’espère que davantage d’Etats membres du Conseil de l’Europe feront de même.

L’Union européenne a facilité le dialogue entre Belgrade et Pristina. C’était important et il est encourageant de noter que des progrès ont été réalisés. Nous ne pouvons qu’espérer que ce dialogue se poursuivra et que les deux parties se rapprocheront pour trouver des solutions afin de permettre aux Serbes et aux Kosovars de vivre côte-à-côte.

J’aimerais également saisir cette occasion pour encourager la Serbie à montrer au reste de l’Europe qu’elle prend ce dialogue au sérieux et souhaite véritablement améliorer ses relations avec Pristina.

Le Secrétaire Général, M. Jagland, mérite aussi d’être félicité pour les efforts qu’il a consentis en vue de faciliter le dialogue et de trouver des mécanismes pour aider le Kosovo. Il propose un dialogue direct entre le Conseil de l’Europe et les autorités du Kosovo. C’est un pas en avant important.

Cela fait des années que je travaille pour le développement dans les Balkans. La Bosnie est chère à mon cœur et ce n’est que l’année dernière que j’ai eu pour la première fois l’occasion de me rendre au Kosovo, à Mitrovica et à Pristina. Cette visite au Kosovo m’a beaucoup marquée. J’ai été frappée par le courage et l’optimisme de tous ceux que j’y ai rencontrés et cela m’a donné espoir pour leur avenir. En tant qu’Européens, nous nous devons de les aider à faire du Kosovo un pays démocratique et prospère.

LE PRÉSIDENT – M. Kaikkonen, inscrit dans le débat, n’étant pas dans l’hémicycle, la parole est à Mme Giannakaki, dernier orateur inscrit.

Mme GIANNAKAKI (Grèce)* – Le Kosovo représente l’un des problèmes juridiques les plus complexes de la diplomatie européenne. Bien que 34 des 47 Etats membres du Conseil de l’Europe aient reconnu son indépendance, tout débat sur le Kosovo dans le cadre de l’Assemblée doit avoir lieu en conformité avec la Résolution 1244 des Nations Unies et éviter toute spéculation sur son régime à venir. Le statut du Kosovo est un cas unique qui ne saurait s’appliquer à aucune autre région.

Après avoir moi aussi félicité M. von Sydow pour son excellent travail, je voudrais noter que l’essentiel du rapport concerne la promotion du dialogue entre Belgrade et Pristina, mais également dans toute la région du Kosovo. Les diverses autorités de la région, en collaboration avec les entités concernées de l’Union européenne et des Nations Unies veulent promouvoir les principes du Conseil de l’Europe : la démocratie, le respect des droits de l’homme et l’Etat de droit. Mais pour l’application des décisions du Conseil et des autres organisations internationales, il faut promouvoir l’autonomie de la communauté et la protection de ses droits.

En dépit de tous les efforts des autorités du Kosovo, l’évolution de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée reste très lente. Le manque de transparence de la vie économique et sociale qui affecte le Kosovo est une entrave qui empêche la région de se conformer aux principes européens. La corruption touche toutes les strates de la population et le Kosovo a encore à parcourir un long chemin pour en venir à bout.

Malgré la décision qui, nous l’espérons, sera prise avec Belgrade pour lutter contre la corruption et la criminalité organisée, les solutions qui seront apportées aux personnes déplacées devront être étudiées avec la participation de toutes les communautés vivant dans la région.

En conclusion, il faut donc condamner la criminalité organisée et prévoir aussi l’engagement d’un dialogue communautaire au sein de la société civile, car aucun résultat efficace ne viendra améliorer la vie de la population de la région si tous ne sont pas conscients de la nécessité pour une société de la diversité, cette diversité qui est pourtant un aspect traditionnel des Balkans.

LE PRÉSIDENT – La liste des orateurs est épuisée. C’est l’éclatante démonstration que lorsque, les uns et les autres, nous respectons scrupuleusement notre temps de parole, nous arrivons à entendre bien plus de parlementaires, ce qui est une excellente chose.

J’appelle la réplique de la commission. Monsieur le rapporteur, il vous reste encore 5 minutes pour répondre aux différentes interventions. C’est avec plaisir que je vous donne la parole.

M. von SYDOW (Suède), rapporteur* – Cela a été très intéressant d’écouter ce débat. Je vous remercie vivement de votre attitude positive sur mon rapport et ma contribution. Les points de vue sont encore divergents entre nous, mais il semble quand même que nous ayons trouvé un consensus sur les éléments fondamentaux. L’un d’entre eux est ce que nous ne cessons de répéter : il nous faut un dialogue.

Le dialogue qui existe aujourd’hui entre les Premiers ministres est un premier pas. Mais je me souviens encore d’une de mes visites au Kosovo, tout près de Pristina, lors de laquelle je me suis retrouvé dans une école qui comptait deux entrées : d’un côté entraient les enfants albanais qui jouaient dans une cour de récréation, de l’autre entraient les enfants kosovars parlant serbe qui restaient entre eux dans leur propre cour de récréation. J’ai demandé pourquoi ils ne se mélangeaient pas. On m’a répondu qu’ils ne voulaient pas jouer ensemble. Le dialogue doit donc s’instaurer à tous les niveaux, au sommet comme dans les salles de classe.

Je vous remercie tous pour vos contributions. J’espère que le Secrétariat Général pourra mettre en œuvre les différents programmes. Il faut en effet trouver des projets opérationnels. Je suis d’accord pour dire qu’il faut mettre l’accent sur les jeunes générations. Il faut aussi aider les femmes qui font l’objet de violences au sein de leur famille, voire de leur foyer.

S’il y a bien une chose positive, ce sont les bonnes intentions qui sont affichées au Kosovo, notamment au niveau des institutions. Mais l’essentiel est évidemment que ces bonnes intentions trouvent une traduction dans la réalité. A cet égard, dans les rapports précédents que nous avions adoptés et qui avaient été approuvés par le Comité des Ministres, nous avions proposé de chercher une façon de suivre les progrès réalisés s’agissant du respect des droits de l’homme et de l’instauration de l’Etat de droit par les autorités du Kosovo. Or il a été impossible de trouver une solution pratique, pour des raisons que je n’évoquerai pas ici.

Cette fois-ci, des représentants officiels du Conseil de l’Europe devraient pouvoir travailler au Kosovo, au Nord comme au Sud. Cela permettrait de voir comment les choses se passent au quotidien. Ce serait une bonne manière pour nous de promouvoir la mise en œuvre réelle de tous les engagements pris. Voilà ce qui sera possible si vous approuvez mon rapport et le projet de résolution qu’il contient. Bien sûr, l’application sera entre les mains du Secrétaire Général, qui décidera de la manière dont les représentants du Conseil pourront travailler avec les différents partenaires.

J’ai été intéressé par la discussion sur le statut, mais je m’abstiendrai de dire quoi que ce soit sur le sujet. Pour moi, le plus important est de réussir à garder les portes ouvertes – au plus haut niveau et jusque dans les écoles. Nous voulons que les Kosovars puissent vivre sur la base des mêmes normes que les autres peuples d’Europe. C’est bien là l’objectif de mon rapport.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le président de la commission des questions politiques et de la démocratie, pour deux minutes.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission des questions politiques et de la démocratie* – M. von Sydow a rédigé un excellent rapport sur une situation très délicate. En commission, nous avons discuté de son texte et lui avons apporté un appui unanime.

Le rapporteur insiste sur la distinction entre norme et statut. Ce n’est pas là une position opportuniste. En effet, il ne faut pas oublier la gravité d’une crise qui est à la fois politique et matérielle. Il y a de plus en plus de pauvreté au Kosovo, voire de misère, et la crise institutionnelle est réelle. De la même façon, il faut souligner l’absence de sécurité et de confiance dans la justice. Or ce sont autant de questions qui sont liées aux droits fondamentaux.

Par ailleurs, nous ne devons pas chercher à faire concurrence à d’autres organes plus compétents que nous pour s’occuper de questions comme celle du statut. S’agissant des normes, il est important de comprendre que les processus de réconciliation, dans des conflits comme celui-ci, sont longs ; ils nécessitent du temps et de la maturation. On ne peut pas les décréter du jour au lendemain. Il faut pour cela traiter des problèmes de fond, qui concernent la condition humaine et promouvoir une vision commune des droits fondamentaux. C’est uniquement sur cette base que l’on peut construire quelque chose de solide. Pour ces raisons, je remercie une fois de plus M. von Sydow pour son excellent travail.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close. La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution sur lequel 3 amendements ont été déposés ainsi qu’un projet de recommandation.

Le président de la commission des questions politiques et de la démocratie demande l’application de l’article 33-11 du Règlement. Les amendements nos 1 et 2 sur le projet de résolution ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien le cas, monsieur le président ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – Y a-t-il des objections ? Ce n’est pas le cas.

Les amendements nos 1 et 2 sur le projet de résolution sont donc déclarés adoptés définitivement. Ils sont ainsi libellés :

L’amendement no 1, déposé par Mme Saïdi, MM. Sannen, Mendes Bota, Vercamer, Van der Maelen, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 11.7.3, à insérer le paragraphe suivant : « en invitant l’Assemblée du Kosovo à établir une collaboration avec le réseau parlementaire de l’APCE « Pour le droit des femmes de vivre sans violence ». »

L’amendement no 2, déposé par M. von Sydow, Mmes Brasseur, Woldseth, MM. Gross, Herkel, Kox, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 12 par le paragraphe suivant : « L’Assemblée se félicite de la récente instruction donnée par le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe au Secrétariat de l’Organisation, qui autorise les agents à collaborer avec les autorités du Kosovo afin de faciliter la réalisation des activités et programmes de l’Organisation. »

Nous en venons à la discussion de l’amendement no 3.

Cet amendement, déposé par Mme Djurović, MM. Ilić, Milićević, Mmes Miladinović, Vučković, Marjanović, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 5, troisième phrase, à remplacer les mots « en particulier dans le nord du Kosovo » par les mots suivants : « dans le nord comme dans le sud du Kosovo ».

La parole est à Mme Djurović, pour soutenir l’amendement no 3.

Mme DJUROVIĆ (Serbie)* – Afin que le paragraphe 5 soit tout à fait cohérent, il est plus approprié de faire référence à l’ensemble du territoire du Kosovo, aussi bien le Nord que le Sud, comme c’est d’ailleurs le cas dans la première phrase du paragraphe en question.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le rapporteur, contre l’amendement.

M. von SYDOW (Suède), rapporteur* – Lors de la précédente réunion de la commission des questions politiques, qui s’est tenue à Turin, j’ai accepté, c’est vrai, que, dans la première partie du paragraphe, il soit fait référence au nord et au sud du Kosovo. Mais, dans la dernière partie du paragraphe, nous reprenons en fait ce qui est dit par la mission Eulex elle-même. C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement, que je vous demande de rejeter.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n° 3 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13088, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (115 voix pour, 11 voix contre et 5 abstentions).

LE PRÉSIDENT – Nous allons procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc.13088. Je vous rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

Le projet de recommandation est adopté (121 voix pour, 5 voix contre et 4 abstentions).

LE PRÉSIDENT – À mon tour, je souhaite féliciter M. von Sydow pour la qualité du travail qu’il a accompli, sur lequel j’avais eu l’occasion de m’entretenir avec lui à Turin. Je suis heureux qu’il ait rencontré l’approbation d’une large majorité.

4. Communication du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle une communication de M. Thorbjørn Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, qui sera suivie de questions des membres de l’Assemblée. Nous sommes très heureux de l’accueillir. Sa présence parmi nous est importante, et elle témoigne de l’intérêt qu’il porte à nos travaux. Nous suivons nous-mêmes ses activités avec beaucoup d’intérêt, et sommes toujours attentifs aux communications que lui ou la Secrétaire Générale adjointe ont l’habitude de faire devant le Bureau. Nous serons également très heureux de pouvoir lui poser des questions et d’entendre ses réponses.

La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. JAGLAND, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe* - Monsieur le Président, permettez-moi tout d’abord de vous féliciter pour votre réélection. Je me réjouis de pouvoir travailler avec vous une année de plus.

Chers amis, l’histoire n’est pas un processus linéaire. Parfois, elle avance doucement, mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. Nous vivons une époque où des changements qui prenaient des années interviennent désormais en l’espace d’une minute. Or devant ces changements de plus en plus rapides, les dirigeants politiques ne savent pas toujours comment réagir et les institutions politiques sont mal équipées.

C’est pourquoi l’Europe doit faire face à plusieurs crises concomitantes et liées les unes avec les autres : crise économique, crise des institutions. Les institutions européennes peinent en effet à gérer la crise économique, et sont souvent perçues comme incapables de fournir des réponses immédiates, concrètes et efficaces. La crise des institutions a ainsi fait naître une troisième crise, la crise de confiance.

La baisse abrupte de la confiance dans les institutions publiques ne se limite pas aux organes européens, comme le montre l’attitude des populations face à leurs institutions nationales, leur gouvernement et leur classe politique. L’austérité économique a certainement renforcé ces sentiments. Mais ce serait une erreur d’imputer tous nos problèmes à la seule crise économique et financière. De nombreux défis lui sont en effet antérieurs et sont liés à d’autres phénomènes.

L’effet cumulé de ces trois crises en a entraîné une quatrième, celle des valeurs. Nous n’avons peut-être pas perdu notre foi dans ces valeurs, mais de nombreux signes me font penser que nous avons peut-être perdu la volonté ou l’énergie de les faire vivre. C’est ce que font apparaître la montée des extrémismes, des discours de haine et des nouveaux nationalismes, ou encore la diabolisation de l’immigration et d’autres formes d’altérité. Pour contrer ces tendances préoccupantes, nous devons, au sein de cette Organisation et de tous les gouvernements européens, défendre certaines priorités clés.

La première de ces priorités est la lutte contre la corruption et contre toutes les formes d’abus de pouvoir. La corruption est en effet aujourd’hui la menace la plus importante pour la démocratie, car elle sape la confiance des citoyens envers l’Etat de droit. D’après les données de la Commission européenne, près de trois quarts des citoyens européens pensent que la corruption est un problème majeur dans leur pays, et près de la moitié d’entre eux estiment que son niveau a augmenté ces dernières années.

Nous rencontrons la corruption dans tous les pays. Par exemple, la Finlande poursuit actuellement des dirigeants d’une grande entreprise d’armement pour des faits de corruption dans plusieurs pays d’Europe du sud-est. En Slovénie, le gouvernement risque de tomber suite à la publication du rapport d’une commission anticorruption mettant en cause le Premier ministre ainsi que le dirigeant de l’opposition. Dans mon propre pays, il a récemment été beaucoup question de corruption au niveau municipal : nous pensions être propres, mais nous ne le sommes pas. En Italie, le scandale concernant les pollutions par des déchets industriels prend de l’ampleur, et les gens sont de plus en plus en colère en apprenant la façon dont la Mafia a infiltré les organes politiques afin de perpétuer ses activités. Enfin, l’ancien président comme le président actuel de la Fédération de Russie ont déclaré que la corruption représentait le défi principal auquel était confronté leur pays. Bien sûr, ce ne sont que quelques exemples, qui montrent que nous devons agir.

La première condition de la lutte contre la corruption est l’existence d’un pouvoir judiciaire fiable, efficace et indépendant. Or, dans de nombreux pays, seul un processus de longue haleine permet de développer un tel pouvoir. C’est le cas par exemple en Ukraine. La prison de Mme Timochenko a reçu un grand nombre de visiteurs, ce qui est une bonne chose en soi. Mais trop souvent, ces derniers pensent que le travail est terminé lorsque la visite est achevée et qu’une photo a été publiée dans les médias. Cela ne change pourtant pas grand-chose. Seuls des efforts constants sur les pratiques feront naître, tout doucement, un pouvoir judiciaire indépendant susceptible de faire la différence. C’est ce que nous faisons dans le cadre d’un vaste programme de réforme de l’ensemble du secteur judiciaire en Ukraine. Ces efforts continueront, mais ils coûtent cher. C’est pourquoi nous devons concentrer nos moyens sur des choses essentielles, comme d’aider les Etats membres à développer un pouvoir judiciaire indépendant.

La lutte contre la corruption requiert également une véritable liberté d’expression. Sans des médias libres et indépendants, le système de contrepoids ne pourrait fonctionner, et il n’y aurait aucune garantie effective contre l’abus de pouvoir et l’incurie. Une fois de plus, il s’agit là d’une prérogative par excellence du Conseil de l’Europe, qui doit être renforcée encore davantage à l’avenir, et le sera.

De la même manière, il ne peut y avoir aucune lutte efficace contre la corruption sans un parlement véritablement autonome, capable de contrôler le pouvoir exécutif. Malheureusement, trop de parlements en Europe prévoient des immunités très attrayantes pour les puissants, surtout lorsqu’ils viennent du milieu des affaires. Ils cherchent à obtenir un siège au Parlement pour s’y cacher – et peuvent s’y cacher longtemps quand le pouvoir judiciaire n’est pas efficace et qu’en plus ils contrôlent les médias. Et c’est malheureusement la situation que nous connaissons dans certains de nos Etats membres. J’en appelle à votre Assemblée indépendante pour qu’elle s’engage dans la lutte contre ce mal dont souffrent nos démocraties, sinon nous courrons le risque d’une perte de confiance supplémentaire. Le GRECO ainsi que Moneyval sont nos deux outils principaux dans la lutte contre la corruption. J’en appelle à vous pour que vous fassiez en sorte que vos gouvernements et parlements étudient leurs recommandations et les appliquent dans les meilleurs délais.

Deuxième priorité : la lutte contre l’intolérance et le discours de haine. Un mal qui se répand et qui est le premier signe de quelque chose de beaucoup plus inquiétant. Cette priorité fait suite à un travail qui a commencé avec le rapport « Vivre ensemble ». Chaque jour, depuis sa publication, l’Europe se voit rappeler sa pertinence, parfois de manière extraordinairement tragique. Souvenez-vous de l’attentat perpétré en Norvège le 22 juillet 2010 qui a fait 93 morts, ou de l’incident qui s’est déroulé récemment lors d’un match de football, en Italie du Nord, certes moins tragique mais qui ouvre la voie aux actes : l’équipe de Milan a quitté le terrain quand les supporters de l’équipe adverse se sont mis à insulter les joueurs de couleur noire. Je vous citerai également l’exemple du club de football du Zénith de Saint-Pétersbourg, dont les supporters ont publié une lettre ouverte disant qu’ils n’accepteraient pas des joueurs de peau noire.

Le Conseil de l'Europe doit assumer un rôle prépondérant dans la lutte contre toute forme d’extrémisme et de violence, afin que nous puissions continuer à vivre ensemble dans la diversité, parce que l’Europe est un continent fait de diversité.

Troisième priorité : la protection des minorités. C’est là que notre engagement pour les valeurs et les normes est le plus fortement mis à l’épreuve. Au centre même de ce travail doit se trouver notre action en faveur des Roms. La discrimination à l’égard des Roms, la plus grande minorité de notre continent, est une honte pour nous tous. Le Conseil de l'Europe et l’Union européenne sont unis pour passer des belles paroles aux actes concrets. Nous devons tous ensemble nous opposer au racisme et aux préjugés dont souffrent les Roms, qui sont probablement les entraves majeures aux actions utiles au niveau local. Sans oublier les autres minorités vulnérables de la population, les catégories ethniques, religieuses, sexuelles, ou tous les autres groupes de personnes qui ont besoin d’attention dès lors qu’il s’agit de la protection de leurs droits et de leur dignité.

Quatrième et dernière priorité : la consolidation de l’espace juridique que représente le Conseil de l'Europe. Tout d’abord, la nécessité de compléter le maillage juridique territorial et de nous assurer que les normes et les mécanismes du Conseil de l'Europe soient bien appliqués partout. Le Bélarus est le premier absent dans ce maillage. J’ai la ferme intention de continuer à m’engager dans un véritable dialogue avec ce pays. Le rythme du processus dépend bien sûr des progrès réalisés par le Bélarus dans le domaine de la démocratie et des droits de l’homme. L’abolition de la peine de mort et la libération des prisonniers politiques sont parmi nos premières attentes. Mais le Bélarus a vocation à faire partie du Conseil de l'Europe et nous devons faire tous les efforts nécessaires pour que cela se réalise un jour.

L’autre trou dans le maillage juridique concerne les zones de conflits gelés. Et à cet égard le Kosovo est un cas particulier, du fait notamment de la Résolution1244 du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Cette dernière année nous avons fait des progrès importants pour ce qui est de notre implication au Kosovo, jetant ainsi les bases pour une expansion quantitative et qualitative de nos activités. Nous sommes maintenant en mesure de travailler directement avec les autorités compétentes au Kosovo et donc de réaliser des programmes conjointement avec l’Union européenne. Je suis heureux que cela ait pu être obtenu par un dialogue avec les autorités compétentes.

Pour ce qui est des autres zones grises, l’absence d’un cadre des Nations Unies limite notre possibilité d’implication, mais j’ai bien l’intention de poursuivre mes efforts dans le domaine de la création de mesures visant à renforcer la confiance. L’objectif ultime a toujours été de permettre à tous les citoyens européens de jouir des normes du Conseil de l'Europe, quel que soit l’endroit où ils vivent. Il est insupportable que les instruments pour les droits de l’homme ne puissent être utilisés dans ces zones.

Venons-en au voisinage. Les concepts qui ont servi de base pour la reconstruction de l’Europe après la seconde guerre mondiale, puis la chute du mur de Berlin, à savoir la paix, la sécurité et la prospérité, doivent s’appliquer aujourd’hui à un espace géographique bien plus vaste, notamment en Afrique du Nord, au Moyen-Orient et en Asie Centrale. C’est une nécessité. Aujourd’hui, nous avons déjà des accords de coopération avec la Tunisie, le Maroc et la Jordanie.

L’étape suivante devrait consister à offrir une perspective de statut officiel aux pays des régions voisines qui seraient intéressées, qui satisferaient à certains critères et souhaiteraient mettre en place une relation plus structurée avec le Conseil de l'Europe. Un tel statut serait fondé largement sur la participation aux conventions pertinentes du Conseil de l'Europe, ce qui tout à la fois offrirait un espace juridique plus ample du Conseil de l'Europe et serait une incitation forte pour construire l’avenir post-Printemps arabe, dans le droit-fil des normes universelles de démocratie et des droits de l’homme.

La troisième facette de l’achèvement de cet espace juridique européen est plus de nature géopolitique que géographique : il s’agit de l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme. Je suis préoccupé, car les négociations semblent être confrontées à une impasse. Cette adhésion, décidée en vertu du Traité de Lisbonne, permettrait de combler deux lacunes. C’est ainsi que chaque état en Europe serait soumis aux mêmes règles et à la même Cour et que les bases seraient jetées d’un dialogue sur un pied d’égalité avec l’ensemble des acteurs géopolitiques en Europe. Les avantages potentiels en matière de stabilité durable et de sécurité sur notre continent sont immenses et nous ne devons donc ménager aucun effort pour parvenir le plus rapidement possible à l’achèvement de ce processus d’adhésion. Mettre en péril de tels avantages en vertu d’intérêts étroits et à court terme serait faire preuve d’un manque total de responsabilité. C’est pourquoi je souhaite à nouveau vous lancer un appel afin que vous veilliez à l’action de vos gouvernements en la matière et que vous conserviez cette question dans votre champ de vision.

La quatrième facette de cet espace juridique commun que nous construisons est virtuelle. Le Conseil de l'Europe a accompli des progrès sensibles pour adapter ses normes aux progrès très rapides des technologies, notamment des technologies de l’information, mais nous ne sommes qu’au début de l’exercice et nous devons déployer les efforts les plus larges pour que les normes en matière de démocratie et de prééminence du droit soient appliquées et respectées non pas seulement « offline », mais désormais « online ».

Pour atteindre nos objectifs, nous devons continuer à améliorer nos méthodes de travail et consolider plus avant les partenariats, notamment avec l’Union européenne, l’OSCE, les Nations Unies et avec les ONG les plus réputées et les plus importantes. Il convient également d’élargir la pratique de plans d’actions d’assistance destinés aux Etats membres du Conseil de l'Europe. Un plan d’action constitue un cadre pour une assistance qui soit tout à la fois plus structurée, plus cohérente, plus complète et mieux ciblée, garantissant une utilisation plus efficace des ressources et par conséquent de meilleurs résultats. J’ai déjà cité l’exemple de l’Ukraine, qui se fonde sur un plan d’action concerté entre nous et son gouvernement. Le schéma de ces plans d’action se fonde sur les données fournies par le suivi conventionnel et non conventionnel du Conseil de l'Europe ainsi que par les mécanismes d’évaluation, y compris les rapports de l’Assemblée et du Commissaire aux droits de l'homme, et sur les arrêts de la Cour. Une analyse intégrée de l’ensemble de ces données nous aide à identifier les lacunes comme les solutions appropriées qui doivent être appliquées.

J’ai l’intention d’améliorer les moyens pour tirer profit de tels mécanismes d’évaluation et de suivi. D’ailleurs, je ne manquerai pas d’en débattre avec le Comité des Ministres au cours des semaines qui viennent. Un fort potentiel non encore utilisé devrait être mis à profit par un traitement mieux intégré et mieux ciblé des données. Je suis convaincu que tous les Etats membres tireraient profit et bénéficieraient amplement de cette radiographie panoramique de leurs performances et d’un dialogue sur les problèmes et les solutions possibles, ce que j’appellerai « la matrice du Conseil de l'Europe », une matrice qui serait non politique. L’ensemble du travail et des conseils fournis s’appuierait strictement sur des obligations contraignantes au plan juridique et politique. Il ne s’agit nullement pour le Conseil de l'Europe de dicter quoi que ce soit, mais de travailler avec les autorités concernées, aussi bien pour l’identification des défis que pour l’élaboration des solutions. La matrice en question pourrait d’ailleurs s’accompagner d’un plan d’actions du Conseil de l'Europe, qui donnerait effet aux conclusions de cette matrice. La matrice ne donnerait pas lieu à l’ajout de nouveaux mécanismes de suivi ou à de nouvelles procédures, ce serait simplement un moyen d’obtenir un meilleur retour sur investissement - ce terme recouvrant les efforts déployés par les Etats membres et le Conseil de l'Europe.

Le Conseil de l'Europe se trouve à la croisée des chemins. De nombreux problèmes liés aux droits de l’homme et à la prééminence du droit se posent dans des Etats membres – je pense d’ailleurs qu’il existe des difficultés dans l’ensemble des Etats membres. Si nous ne parvenons pas à faire la preuve que nous sommes en mesure de fournir une réponse efficace, nous allons progressivement saper la crédibilité même de notre Organisation. C’est la raison pour laquelle nous devons établir un distinguo entre les Etats membres qui reconnaissent clairement les lacunes dont souffre leur pays, ceux qui souhaitent travailler avec nous pour trouver des solutions et par ailleurs les Etats qui connaissent des problèmes, mais qui ne voulant pas l’admettre, ne souhaitent pas non plus s’engager dans des plans d’action concrets. Ces derniers doivent être soumis à des pressions croissantes de notre part, faute de quoi nous perdrons collectivement toute crédibilité.

Pour conclure, je reprendrai les termes par lesquels j’ai commencé cette allocution : oui, c’est vrai, la situation politique et économique est préoccupante. Pour autant, nous ne devons pas céder au pessimisme. Après tout, la construction de l’Europe ne trouve-t-elle pas ses origines dans une période bien plus sombre ? Les fondateurs de l’Europe ont estimé que la coopération et l’intégration fondées sur une solidarité transeuropéenne pour surmonter les défis de sécurité, politiques, économiques et sociaux de l’après-guerre pouvaient réussir. Ce fut le cas à l’époque, ce peut l’être encore aujourd’hui. Reste à retrouver le sens de cette solidarité européenne, car notre perspective doit être paneuropéenne. Que l’Union européenne surmonte la crise économique s’inscrit dans l’intérêt de tous. Dans le même temps, il convient de garder à l’esprit que l’Union européenne représente plus que l’économie. Sans valeurs communes pour tous, l’Europe ne se maintiendra pas. L’Europe a besoin d’une alliance paneuropéenne fondée sur des valeurs communes reposant sur des normes agréées par tous, supervisées par des mécanismes communs, dans le cadre desquels chaque partenaire dispose des mêmes droits et des mêmes responsabilités. L’Europe a par conséquent besoin du Conseil de l'Europe. C’est pourquoi nous devons aller de l’avant, fixer des priorités claires et nous attacher à les atteindre. Ce que nous faisons et continuerons de faire à l’avenir.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le Secrétaire Général, je vous remercie beaucoup.

Nous abordons les questions. Je vous rappelle, mes chers collègues, que vous disposez de trente secondes pour poser vos questions.

La parole est à M. Herkel, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

M. HERKEL (Estonie)* – Monsieur Jagland, je vous remercie d’avoir abordé la question de la peine de mort et des prisonniers politiques au Bélarus. Une délégation du Conseil de l'Europe s’est déplacée à Minsk. Vous avez évoqué une réunion au plus haut niveau, dont l’Assemblée n’a pas été correctement informée. Pourriez-vous nous dire comment les branches de notre Organisation coopèrent entre elles ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Il est de la plus haute importance que nous essayions de faire avancer la démocratie, les droits de l’homme et la primauté du droit dans ce pays qui fait partie de l’Europe. Le Bélarus n’est pas membre de notre Organisation pour des raisons précises, même s’il existe des interactions entre le Conseil de l'Europe et le Bélarus.

A l’automne dernier, à l’occasion de la réunion du groupe de haut niveau initié par le Secrétaire général des Nations Unies, j’ai rencontré l’ancien Premier ministre du Bélarus, dont j’ai trouvé l’attitude plus ouverte. Plusieurs délégations des Etats membres du Conseil de l'Europe et de l’Union européenne ont essayé de déterminer les intentions véritables du Bélarus. C’est pourquoi j’ai décidé d’envoyer mon chef de cabinet à Minsk pour en savoir plus.

J’ignore si vous considérez que c’est une visite de haut niveau ; il s’agissait d’une mission d’enquête visant à savoir ce qui se passe véritablement sur le terrain. Nous devons être prêts à développer nos relations avec ce pays dès qu’il sera en mesure de le faire. Il reste que, comme je l’ai souligné à maintes reprises, tout pas en ce sens devra être précédé de la suspension de la peine de mort et de la libération de la totalité des prisonniers politiques. Il s’agit d’une condition impérative.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Lord Anderson, au nom du Groupe socialiste.

LORD ANDERSON (Royaume-Uni)* – Monsieur le Secrétaire Général, vous avez dit que des avancées avaient été notées au Kosovo après que des instructions ont été données au personnel pour coopérer avec les autorités kosovares en vue de la mise en œuvre des projets. Il s’agissait d’une première étape. Quelle sera la deuxième étape ? Comment travailler avec les autorités de l’Union européenne dans le cadre de la réconciliation ? Quelles seront les relations entre le Conseil de l’Europe et le nouveau consul général du Kosovo qui sera bientôt établi ici-même, à Strasbourg ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – La prochaine étape dépendra dans une large mesure du dialogue en cours entre Pristina et Belgrade. Nous avons dit et répété que nous ne voulions rien faire qui pourrait saper ce dialogue ; bien au contraire, nous souhaitons contribuer à son renforcement, et nous avons pris une mesure importante, en accord avec Belgrade. Il faut maintenant voir comment les choses vont évoluer. Il existe des programmes en cours, qui sont importants à la fois pour Belgrade et pour le Kosovo. Il faut que nous soyons en mesure d’utiliser certains de nos organes de suivi au Kosovo. Pour cela, il était nécessaire d’obtenir cet accord, afin que les organes de suivi puissent travailler sur place, et faire leur rapport aux autorités. Si nous pouvons effectuer un suivi de la situation en matière de droits de l’homme au Kosovo, cela nous permettra de renforcer le dialogue avec Pristina.

Voilà où nous en sommes pour le moment. Quant à ce qui passera à l’avenir, et quelles seront les relations que nous entretiendrons avec le nouveau consul général à Strasbourg, nous l’ignorons ; il s’agit d’une question qui regarde les relations entre la France et le Kosovo, mais qui ne concerne pas directement le Conseil de l’Europe.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Brasseur, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

Mme BRASSEUR (Luxembourg) – Ma question s’inscrit dans la continuité de celle de M. Herkel. Vous avez dit, Monsieur le Secrétaire Général, que nous devions adapter nos méthodes de travail. Nous avons déjà beaucoup d’entités très compétentes au sein du Conseil de l’Europe ; comment pensez-vous augmenter la coopération entre elles, afin de renforcer la cohérence de notre démarche et d’accroître notre crédibilité ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Vous avez raison : nous avons plusieurs entités, mais il s’agit d’organes indépendants – c’est ainsi qu’ils sont définis. Il faut en effet une meilleure coordination entre eux. Pour ce qui est du suivi, il faut utiliser au mieux les résultats auxquels ils parviennent. C’est pourquoi j’évoquais une matrice permettant d’examiner avec précision la situation en matière de droits de l’homme et de prééminence du droit dans chaque pays. En fonction des résultats, nous pourrions discuter avec les pays membres concernés des mesures à prendre pour corriger le tir. Nous utiliserons également les rapports du Commissaire aux droits de l’homme, ainsi que ceux de l’Assemblée parlementaire.

Le Kosovo est un bon exemple de l’interaction possible entre la dimension interparlementaire et la dimension intergouvernementale. Nos actions sur le terrain se fondent sur les rapports de votre rapporteur, et j’ai établi sur place des contacts directs excellents, afin d’avancer. L’Assemblée parlementaire prépare donc la voie, le but étant de trouver le moyen d’accéder directement aux bons interlocuteurs.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. David Davies, au nom du Groupe démocrate européen.

M. David DAVIES (Royaume-Uni)* – Monsieur le Secrétaire Général, partagez-vous les préoccupations d’un grand nombre d’entre nous face aux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, qui empêche les États-membres d’extrader des terroristes ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Si nous n’exécutions plus les arrêts de la Cour, cela me préoccuperait davantage ! La loi veut que la Cour européenne des droits de l’homme ait le mot de la fin : je respecte la loi, et je me dois de défendre les arrêts de la Cour.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Petrenco, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Monsieur le Secrétaire Général, notre groupe souhaite attirer votre attention sur l’évolution très inquiétante d’un certain nombre d’Etats membres du Conseil de l'Europe, dans lesquels de graves violations des droits fondamentaux et des libertés sont observées. En Moldova, les symboles de l’opposition sont interdits et les militants persécutés. Le système judiciaire, extrêmement corrompu, participe aux violations des droits de l’homme. Quelle action envisagez-vous afin de lutter contre de tels phénomènes en Europe ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – J’ai évoqué certaines de ces questions avec les dirigeants de la République de Moldova, et en particulier la fermeture d’une chaîne de télévision. J’ai invité l’opposition et le gouvernement à rechercher ensemble une solution. Le Conseil de l'Europe est attentif au processus de réforme en Moldova dans le cadre du processus de suivi. La réforme du système judiciaire est très longue, puisque de nouveaux acteurs et de nouvelles pratiques sont nécessaires pour défendre les normes préconisées par les conventions du Conseil de l'Europe. Passer d’un système à l’autre prendra du temps, en Moldova comme dans d’autres pays. C’est un processus complexe, qu’il faut bien entamer un jour, à travers des réformes concrètes. Le Conseil de l'Europe est évidemment très vigilant à son bon déroulement.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Durrieu.

Mme DURRIEU (France) – L’Union européenne a reçu le Prix Nobel de la paix, grâce à vous sans doute. Or la France est directement engagée dans le conflit du Mali. Elle a répondu à l’appel d’urgence de ce pays en attendant que les forces africaines soient prêtes à affronter un adversaire terrible. Les djihadistes sont des terroristes redoutables et bien armés. Ce danger menace-t-il l’Europe ? L’Europe doit-elle s’engager plus concrètement ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Ce sujet ne relève pas des domaines de compétence du Conseil de l'Europe. Je ne peux donc m’exprimer qu’à titre personnel et dire qu’il faut toujours faire preuve, selon moi, d’une grande prudence lorsque l’on envisage l’usage de la force. Pour autant que je puisse en juger, le conflit au Mali s’explique en grande partie par la pauvreté du pays et par le conflit entre le Nord et le Sud. Bien entendu, les choses sont beaucoup plus complexes que cela. Je peux difficilement me prononcer au nom de l’Union européenne. Devrait-elle intervenir ? Je pense personnellement que nous devrions nous inspirer des expériences passées d’interventions militaires.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Baroness Nicholson.

Baroness NICHOLSON (Royaume-Uni)* – Monsieur le Secrétaire Général, avez-vous envisagé d’utiliser l’influence des organes du Conseil de l'Europe pour nous protéger contre la corruption et le lobbying politique, qui détruisent la confiance des populations dans la classe politique ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Une assemblée parlementaire, qu’elle soit nationale ou européenne, se doit d’être autonome afin de contrôler le pouvoir politique. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe doit bien entendu contribuer à défendre les normes et les engagements qui découlent des conventions, et ce de manière indépendante. Or il est impossible de rester indépendant si l’on perçoit des pots-de-vin. La corruption est un fléau redoutable, qui sape les organes politiques et érode la confiance des citoyens. Ce sujet doit constituer une priorité pour nous tous, à tous les niveaux.

Nous sommes la seule Organisation qui dispose d’organes tels que le GRECO et Moneyval. Nous devons nous efforcer d’appliquer, chacun dans nos pays, les recommandations qui en émanent, en particulier sur le financement des partis politiques. Pour lutter contre la corruption, il convient de commencer par les institutions politiques afin d’éviter une propagation à l’ensemble de la société. Ce phénomène est connu et il explique d’ailleurs les révolutions du monde arabe. Les populations se sont révoltées contre la mauvaise gestion et le détournement des fonds publics. Nous devons mettre un terme à ce phénomène en Europe tant qu’il en est encore temps.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Szabó.

M. SZABÓ (Hongrie)* – Monsieur le Secrétaire Général, vous vous êtes rendu à Budapest en novembre dernier. Pourquoi n’avez-vous pas jugé bon d’en informer la délégation hongroise de l’Assemblée ? Vous avez rencontré des représentants du gouvernement à Budapest. Pourquoi n’avez-vous pas rencontré des représentants de l’opposition ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – J’ai rencontré László Kovács à Budapest. Cette visite poursuivait deux objectifs. Je devais tout d’abord intervenir dans le cadre d’une conférence contre les discours de haine. Des députés d’un grand nombre de partis y étaient présents. A l’issue de cette conférence, j’ai rencontré des représentants du gouvernement et évoqué avec eux certaines lois controversées, notamment celles sur le pouvoir judiciaire et la liberté des médias. Depuis, nous avons d’ailleurs fait de nombreux progrès sur ces deux dossiers, grâce à cette réunion. J’ai également rencontré l’opposition lors de ma visite à Budapest. Elle m’a livré son point de vue sur la situation du pays.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Christoffersen.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – Monsieur le Secrétaire Général, au mois d’octobre 2010, vous avez lancé une réunion de haut niveau sur la question rom, qui a permis d’améliorer la coopération dans la lutte contre les discriminations à l’égard de cette population aux niveaux régional, national et européen. Avez-vous le sentiment que des progrès ont été enregistrés sur cette question importante ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Des progrès sont en effet notables dans les actions menées par les institutions européennes et je félicite l’Union européenne, et en particulier la Commission européenne, pour ses dernières initiatives.

De notre côté, nous avons mis en œuvre la recommandation de la Réunion de haut niveau sur l’éducation des médiateurs, déployés dans les zones de vie des Roms. Il s’agit de faciliter aux Roms l’accès aux écoles, aux hôpitaux et au logement. Nous avons formé un millier de médiateurs sociaux. J’en ai d’ailleurs discuté à Budapest juste avant Noël. Nous dialoguons avec tous les pays voisins pour déterminer comment utiliser au mieux ces médiateurs. Nous avons également mis en œuvre de nombreuses mesures mentionnées dans la déclaration de Strasbourg.

Le problème, et je le dis ici clairement, se pose aux niveaux national et local. Par exemple, les financements importants que la Commission européenne a mis à disposition de ses Etats membres ne sont pas pleinement utilisés par ces derniers. Pourquoi ? Peut-être n’est-il pas très populaire de faire quelque chose en faveur des Roms auprès de la population ? Pourquoi les fonds disponibles pour faire quelque chose de concret pour ces populations roms ne sont-ils pas utilisés ? Comme je l’ai dit dans mon discours, je crois que l’une des raisons tient aux préjugés qui existent à l’encontre de ces populations. Nous devons combattre ces préjugés. Il existe un racisme généralisé dans ces pays, et vous, en tant que parlementaires, vous devez prendre position contre ces attitudes et pousser vos gouvernements à agir et les encourager à utiliser ces financements qui ont été proposés par l’Union européenne. Là encore, nous avons une responsabilité non seulement au sein de cette Assemblée, mais également aux niveaux local et national.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Legendre.

M. LEGENDRE (France) – Monsieur le Secrétaire Général, nous avons fêté l’an dernier le cinquième anniversaire du mémorandum d’accord entre l’Union européenne et notre Organisation. Force est de constater que la complémentarité recherchée au travers de ce document s’est muée en une véritable duplication de nos activités. La nomination d’un représentant spécial de l’Union européenne en charge des droits de l’homme ne laisse pas d’interroger alors que le mémorandum devait faire du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe le pivot des relations entre les deux organisations. N’est-il pas temps, monsieur le Secrétaire Général, de préparer un nouveau texte définissant clairement les compétences des uns et des autres ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Pour ma part, je vois la nécessité de faire l’inverse, c’est-à-dire de faire des choses concrètes, et c’est justement ce que nous faisons. Ainsi, ce que nous faisons avec les pays voisins n’aurait pas pu être fait sans le financement de l’Union européenne. Le programme de réformes en Ukraine, qui coûte environ 23 millions d’euros, est financé par l’Union européenne. De nombreux programmes conjoints n’auraient pas pu être mis en œuvre sans ce partenariat que nous avons su établir avec l’Union européenne. Je crois qu’il faut continuer dans cette direction.

Il est vrai que l’on aurait pu discuter de la création du représentant des droits de l’homme de l’Union européenne. Mais nous ne devons pas voir cette création comme une menace. Lorsqu’un acteur majeur de la scène internationale tel que l’Union européenne veut renforcer les droits de l’homme, cela constitue un atout pour nous, et pour beaucoup d’Etats européens. D’ailleurs, de nombreux États européens ont un représentant spécial pour les droits de l’homme pour leur propre territoire. Pour l’Union européenne, c’était assez naturel de se doter d’un tel représentant spécial pouvant travailler tout particulièrement sur les droits de l’homme. Les Etats-Unis en ont un, la Russie en a un, je crois que la France et l’Allemagne aussi, de nombreux pays européens ont un tel représentant spécial, pourquoi pas l’Union européenne en tant que telle ?

Ce n’est pas une menace à mes yeux, mais plutôt un immense atout pour l’Europe. Plus il y aura de pays, d’entités et d’organisations qui se concentreront sur les droits de l’homme, l’un de nos domaines de compétence, mieux cela sera ; la solution est de coopérer. J’ai déjà rencontré ce nouveau représentant spécial pour les droits de l’homme, et je pense qu’il ne devrait pas y avoir de problèmes pour le Conseil de l’Europe. C’est une nouvelle voie à explorer pour coopérer avec d’autres partenaires.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Sir Roger Gale.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Le Secrétaire Général s’est qualifié à l’instant comme l’homme de l’Etat de droit. Moi, je suis l’homme du parlement souverain. Est-ce que le Secrétaire Général a expliqué aux ministres et à la Cour européenne des droits de l’homme qu’il n’est pas possible pour un gouvernement de contraindre un parlement souverain à amender une loi s’il ne souhaite pas le faire, puisqu’il vote de façon démocratique ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Ce que je peux vous expliquer, c’est que c’est la logique de la Convention. Si, dans un parlement national, on décide de ratifier une convention, on se soumet aux règles de cette convention.

La Convention a établi une Cour qui a le mot de la fin pour tout ce qui concerne la Convention. Si le Royaume-Uni ne souhaitait pas se soumettre à la Convention, c’était son droit souverain de s’en retirer. C’est le droit souverain de tout Etat membre de se retirer de toute convention, et même de quitter l’Organisation. Mais un Etat membre n’a pas le droit de rester dans une convention sans exécuter les arrêts de la Cour, c’est l’état du droit.

On ne peut pas tout avoir : soit vous êtes partie à la Convention, et vous exécutez les arrêts de la Cour, soit vous êtes dehors. Mais si un Etat membre souhaite quitter le système conventionnel, il ne peut pas refuser à d’autres le droit de quitter la Convention.

Je me souviens de la visite de Willy Brandt en Norvège. À l’époque, beaucoup de jeunes Norvégiens étaient contre l’adhésion de leur pays à l’Otan. Il avait réuni certains de ces jeunes pour échanger avec eux et entendre leurs arguments. Tout d’un coup, il leur a dit : « Je comprends que vous vouliez que la Norvège quitte l’Otan. Mais est-ce que ce droit appartient aussi à l’Allemagne ? Pensez-vous que c’est un bon futur pour l’Europe que de renationaliser la sécurité ? Ne comprenez-vous pas que c’est quelque chose que nous avons connu dans le passé ? » Je dis la même chose à propos de la Convention. Est-ce une bonne chose pour l’Europe et son avenir de renationaliser les droits de l’homme et la prééminence du droit ?

Sir Roger GALE * - Me posez-vous la question ?

M. LE SECRETAIRE GENERAL DU CONSEIL DE L’EUROPE *- Je profite simplement de l’occasion pour dire ce que j’en pense. Je crois qu’il faut continuer à construire des responsabilités militaires communes, mais aussi des responsabilités collectives pour les droits de l’homme et l’État de droit. Et si un Etat souhaite se retirer, d’autres pourraient décider de faire de même. Que cela signifierait-il pour nous tous ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Gaudi Nagy.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Monsieur le Secrétaire Général, j’ai été content d’entendre que vous souhaitiez protéger les minorités. Souhaitez-vous défendre les droits de ceux, Roms y compris, qui quittent les régions dans lesquelles la majorité des délits sont commis par les populations roms et où la vie quotidienne est devenue presque insupportable ? Comment pourriez-vous les convaincre qu’ils doivent vivre dans la peur d’être les victimes des Roms ?

Pouvez-vous comprendre que d’autres minorités, comme les Hongrois en Roumanie, privées de leurs droits fondamentaux, puissent également réclamer une autonomie territoriale ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Avant de répondre à cette question concrète, je voudrais m’informer davantage. Mais je pense qu’il convient de défendre toutes les minorités. Nous avons, vous le savez, une Convention-cadre pour les minorités nationales dans laquelle celles-ci sont justement définies. Je ne sais ce qu’il en est exactement en Roumanie, mais nous devons, en tout cas, défendre les obligations qui découlent de cette convention-cadre.

Tout ce que je peux vous dire, c’est que l’Europe est et restera un continent marqué par la diversité, rassemblant un grand nombre d’ethnies et de groupes religieux. Nous devons respecter cette diversité mais, dans le même temps, nous nous devons de dire à chacun qu’il convient de respecter les valeurs communes dont, bien évidemment, la prééminence du droit. On ne saurait être habilité à commettre des crimes uniquement parce que l’on appartient à une minorité – bien évidemment, non : les règles s’appliquent à tous et les responsabilités s’imposent également à tous. Nous devons nous centrer sur nos responsabilités communes. Sur ce continent, il n’y a pas que les minorités, il y a aussi des valeurs qui s’appliquent à tous, des valeurs communes, celles qui sont incarnées dans la Convention européenne des droits de l’homme.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Huseynov, qui posera la dernière question.

M. HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Monsieur le Secrétaire Général, l’occupation de 20 % du territoire de l’Azerbaïdjan par l’Arménie grâce à l’aide de puissances extérieures est bien connue – cela a été évoqué dans une résolution de notre Assemblée. Au lieu de mettre un terme à cette occupation qui dure depuis vingt ans, l’Arménie s’est lancée dans des activités subversives qui violent l’espace aérien de l’Azerbaïdjan et a essayé de construire un aéroport dans les territoires occupés du Haut-Karabagh et d’organiser des vols violant les conventions internationales. Quelle est votre position face à ces activités qui empêchent toute solution pacifique du conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le Secrétaire Général.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L’EUROPE* – Le Conseil de l’Europe n’est pas un acteur direct de ce conflit, mais nous savons combien c’est important pour ces deux Etats membres du Conseil de l’Europe qui sont parties à ce conflit. Il est toutefois important d’améliorer l’Etat de droit et la démocratie et de renforcer le respect des droits de l’homme dans ces deux pays, car je suis convaincu que c’est encore la meilleure façon de garantir la paix. C’est cela notre contribution : être capable, comme je le disais précédemment, d’effacer ces taches noires qui existent sur notre continent, tel le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie.

Mais le respect des droits de l’homme n’a rien à voir avec la question de savoir si l’on est dans une zone en conflit ou pas. Il faut garantir le droit d’accéder à la justice et de bénéficier des mêmes protections des droits de l’homme que tous les autres peuples européens. Comme je l’ai indiqué dans mon discours, nous allons continuer à travailler avec les deux pays. Nous avons réussi à faire quelques progrès au Kosovo, mais il est d’autres zones où nous devons encore travailler. Nous avons pris des mesures pour construire la confiance en Transnistrie. C’est le type d’actions que nous menons à bien.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le Secrétaire Général, il me reste à vous remercier au nom de l’ensemble des parlementaires pour votre intervention et les réponses que vous nous avez apportées.

Je remercie aussi mes collègues d’avoir respecté les 30 secondes qui leur étaient imparties pour poser une question.

5. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance aura lieu cet après-midi, à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 h 5.

SOMMAIRE

1. Vérification des pouvoirs

Le Président, M. Gaudi Nagy

2. Modifications dans la composition des commissions

3. La situation au Kosovo3 et le rôle du Conseil de l’Europe

Présentation par M. von Sydow du rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc.13088)

Orateurs : MM. Michel, Hancock, Leigh, Papadimoulis, Vareikis, Fournier, Mme Mulić, MM. Kalmár, Szabó, Mme Beck, M. Pushkov, Mme Djurović, MM. Sasi, Mota Amaral, Schennach, Nikoloski, Jakič, Mme Kanelli, MM. Chisu, Gaudi Nagy, Mmes Bakoyannis, Mehmeti Devaja, Zohrabyan, Gündeş Bakir, Woldseth, Giannakaki.

Réponses de M. le rapporteur et de M. Marcenaro, président de la commission des questions politiques

Vote sur un projet de résolution amendé

Vote sur un projet de recommandation

4. Communication du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

Questions : M. Herkel, Lord Anderson, Mme Brasseur, MM. David Davies, Petrenco, Mme Durrieu, Baroness Nicholson, M. Szabó, Mme Christoffersen, M. Legendre, Sir Roger Gale, MM. Gaudi Nagy, Huseynov

5. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Francis AGIUS*

Pedro AGRAMUNT

Arben AHMETAJ*

Miloš ALIGRUDIĆ/Vesna Marjanović

Karin ANDERSEN/Ingjerd Schou

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI/Alessandro Rossi

Khadija ARIB/Pieter Omtzigt

Volodymyr ARIEV

Mörður ÁRNASON

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI*

Þuriður BACKMAN

Daniel BACQUELAINE/Dirk Van Der Maelen

Viorel Riceard BADEA

Theodora BAKOYANNIS

David BAKRADZE

Gérard BAPT*

Gerard BARCIA DUEDRA/Sílvia Eloïsa Bonet Perot

Doris BARNETT

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK

José María BENEYTO/Jordi Xuclà

Levan BERDZENISHVILI*

Deborah BERGAMINI*

Robert BIEDROŃ*

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY/Edward Leigh

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL/

Eric BOCQUET/Jean-Pierre Michel

Olga BORZOVA

Mladen BOSIĆ/Mladen Ivanić

António BRAGA*

Anne BRASSEUR

Márton BRAUN

Federico BRICOLO*

Ankie BROEKERS-KNOL

Piet DE BRUYN/Ludo Sannen

Patrizia BUGNANO*

André BUGNON

Natalia BURYKINA

Sylvia CANEL*

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU*

Mikael CEDERBRATT/Kerstin LUNDGREN

Otto CHALOUPKA/Pavel Lebeda

Irakli CHIKOVANI*

Vannino CHITI/Paolo Corsini

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH*

James CLAPPISON

Deirdre CLUNE*

Agustín CONDE

Igor CORMAN*

Telmo CORREIA

Carlos COSTA NEVES

Joseph DEBONO GRECH*

Giovanna DEBONO*

Armand De DECKER*

Arcadio DÍAZ TEJERA/Carmen Quintanilla

Peter van DIJK

Klaas DIJKHOFF*

Şaban DİŞLİ

Jim DOBBIN

Karl DONABAUER

Ioannis DRAGASAKIS

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA

Baroness Diana ECCLES

Tülin ERKAL KARA

Gianni FARINA*

Relu FENECHIU*

Vyacheslav FETISOV

Doris FIALA*

Daniela FILIPIOVÁ*

Axel E. FISCHER*

Jana FISCHEROVÁ/Rom Kostřica

Gvozden Srećko FLEGO

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON*

Erich Georg FRITZ

Sir Roger GALE

Jean-Charles GARDETTO

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI*

Paolo GIARETTA/Renato Farina

Jean GLAVANY*

Michael GLOS*

Pavol GOGA

Jarosław GÓRCZYŃSKI

Svetlana GORYACHEVA/Anton Belyakov

Martin GRAF

Sylvi GRAHAM

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST*

Dzhema GROZDANOVA

Attila GRUBER/Péter Hoppál

Gergely GULYÁS/László Koszorús

Pelin GÜNDEŞ BAKIR

Antonio GUTIÉRREZ

Ana GUŢU/Corina Fusu

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI/Marek Borowski

Mike HANCOCK

Margus HANSON

Davit HARUTYUNYAN/Armen Rustamyan

Håkon HAUGLI

Norbert HAUPERT

Alfred HEER

Martin HENRIKSEN

Andres HERKEL

Adam HOFMAN*

Jim HOOD

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER*

Andrej HUNKO

Susanna HUOVINEN

Ali HUSEYNLI*

Rafael HUSEYNOV

Shpëtim IDRIZI*

Vladimir ILIČ

Igor IVANOVSKI

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT*

Roman JAKIČ

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI

Michael Aastrup JENSEN

Mogens JENSEN

Mats JOHANSSON

Jadranka JOKSIMOVIĆ/Aleksandra Djurović

Birkir Jón JÓNSSON*

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Antti KAIKKONEN

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA*

Mariusz KAMIŃSKI*

Marietta KARAMANLI*

Burhan KAYATÜRK

Jan KAŹMIERCZAK

Serhii KIVALOV

Bogdan KLICH*

Serhiy KLYUEV/Volodymyr Pylypenko

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN*

Alev KORUN

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO

Dmitry KRYVITSKY/Olga Kazakova

Václav KUBATA

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU*

Jean-Yves LE DÉAUT*

Igor LEBEDEV/Sergey Kalashnikov

Harald LEIBRECHT*

Orinta LEIPUTĖ

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Lone LOKLINDT*

François LONCLE*

Jean-Louis LORRAIN*

George LOUKAIDES/Stella Kyriakides

Younal LOUTFI*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Saša MAGAZINOVIĆ

Philippe MAHOUX*

Gennaro MALGIERI

Nicole MANZONE-SAQUET/Bernard Marquet

Pietro MARCENARO

Thierry MARIANI

Epameinondas MARIAS/Maria Giannakaki

Milica MARKOVIĆ

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA/Riitta Myller

Frano MATUŠIĆ*

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE/Michael Connarty

Ermira MEHMETI DEVAJA

Ivan MELNIKOV/Otari Arshba

Nursuna MEMECAN

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/ Bernard Fournier

Djordje MILIĆEVIĆ

Federica MOGHERINI REBESANI*

Andrey MOLCHANOV*

Jerzy MONTAG*

Rubén MORENO PALANQUES

Patrick MORIAU*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK/Marek Krząkała

Alejandro MUÑOZ-ALONSO

Lydia MUTSCH*

Lev MYRYMSKYI

Philippe NACHBAR/Jacques Legendre

Oľga NACHTMANNOVÁ

Gebhard NEGELE

Aleksandar NENKOV*

Pasquale NESSA*

Fritz NEUGEBAUER

Baroness Emma NICHOLSON

Elena NIKOLAEVA

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL/Iwona Guzowska

Carina OHLSSON/Jonas Gunnarsson

Joseph O'REILLY

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE*

Liliana PALIHOVICI*

Dimitrios PAPADIMOULIS

Eva PARERA

Ganira PASHAYEVA

Lajla PERNASKA*

Johannes PFLUG

Foteini PIPILI

Ivan POPESCU

Lisbeth Bech POULSEN/Nikolaj Villumsen

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT/David Crausby

Jakob PRESEČNIK/Polonca Komar

Radoslav PROCHÁZKA*

Gabino PUCHE

Alexey PUSHKOV

Mailis REPS/Indrek Saar

Eva RICHTROVÁ/Miroslav Krejča

Andrea RIGONI*

François ROCHEBLOINE*

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET*

Marlene RUPPRECHT

Ilir RUSMALI*

Pavlo RYABIKIN

Rovshan RZAYEV

Giacomo SANTINI

Giuseppe SARO

Kimmo SASI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER/Elisabeth Schneider-Schneiter

Damir ŠEHOVIĆ

Senad ŠEPIĆ

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO

Boris SHPIGEL/Yury Solonin

Arturas SKARDŽIUS

Ladislav SKOPAL/Kateřina Konečná

Leonid SLUTSKY

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV

Christoph STRÄSSER

Karin STRENZ*

Giacomo STUCCHI

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO/Yevhen Marmazov

Vilmos SZABÓ

Melinda SZÉKYNÉ SZTRÉMI

Chiora TAKTAKISHVILI*

Vyacheslav TIMCHENKO*

Romana TOMC

Lord John E. TOMLINSON

Latchezar TOSHEV

Mihai TUDOSE/Florin Iordache

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI/Konstantinos Triantafyllos

Tomáš ÚLEHLA*

Ilyas UMAKHANOV*

Viktor USPASKICH/Egidijus Vareikis

Giuseppe VALENTINO*

Miltiadis VARVITSIOTIS/Liana Kanelli

Ljubica VASIĆ/Stefana Miladinović

Volodymyr VECHERKO/Larysa Melnychuk

Stefaan VERCAMER*

Anne-Mari VIROLAINEN

Luigi VITALI*

Luca VOLONTÈ*

Vladimir VORONIN/Grigore Petrenco

Varujan VOSGANIAN*

Tanja VRBAT/Melita Mulić

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ

Piotr WACH

Johann WADEPHUL*

Robert WALTER*

Dame Angela WATKINSON

Katrin WERNER

Renate WOHLWEND

Karin S. WOLDSETH

Gisela WURM

Karl ZELLER*

Svetlana ZHUROVA

Emanuelis ZINGERIS*

Guennady ZIUGANOV*

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Monténégro*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Joris BACKER

Johannes HÜBNER

David DAVIES

Cheryl GILLAN

Elvira KOVÁCS

Robert SHLEGEL

Spyridon TALIADOUROS

Observateurs

Marjolaine BOUTIN-SWEET

Corneliu CHISU

Sladan ĆOSIĆ

Aldo GIORDANO

Javier LOZANO ALARCÓN

Héctor LARIOS CÓRDOVA

Michel RIVARD

Bev SHIPLEY

Nycole TURMEL

Partenaires pour la démocratie

Mohammed AMEUR

Mohammed Mehdi BENSAID

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Mohamed YATIM


1 Toute référence au Kosovo, que ce soit à son territoire, ses institutions ou sa population, doit se comprendre en pleine conformité avec la Résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies et sans préjuger du statut du Kosovo.

2 Toute référence au Kosovo mentionnée dans ce texte, que ce soit le territoire, les institutions ou la population, doit se comprendre en pleine conformité avec la Résolution 1244 du Conseil de Sécurité des Nations Unies et sans préjuger du statut du Kosovo.

3 Toute référence au Kosovo, que ce soit à son territoire, ses institutions ou sa population, doit se comprendre en pleine conformité avec la Résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies et sans préjuger du statut du Kosovo.