AS (2013) CR 07

SESSION ORDINAIRE DE 2013

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la septième séance

Jeudi 24 janvier 2013 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso, dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 5, sous la présidence de M. Mignon, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Aménagement de l’ordre du jour

LE PRÉSIDENT – En raison d’un retard d’avion dont est victime M. Štefan Füle, je vous propose de modifier l’organisation des débats. Je propose donc que ce matin, nous commencions comme prévu par le débat d’urgence sur une initiative de la commission des migrations et qu’à 12 heures, nous entamions le second débat d’urgence portant sur la situation au Mali et en Algérie, que nous le poursuivions à 15 h 30 à l’ouverture de la séance de l’après-midi, afin qu’à 16 h 15, M. Štefan Füle puisse faire son intervention devant l’Assemblée parlementaire et qu’à 17 h 15, nous puissions aborder le rapport relatif à la liberté des médias.

Y a-t-il des objections à cet aménagement de l’ordre du jour ?...

Il en est ainsi décidé.

2. Modifications dans la composition des commissions

LE PRÉSIDENT – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2013) 01 Addendum 8 concernant la délégation française.

Y a-t-il des oppositions à ces modifications ?...

Elles sont adoptées.

3. Fait personnel

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Harutyunyan, pour un fait personnel.

M. HARUTYUNYAN (Arménie)* – J’ai demandé à intervenir pour un fait personnel suite à ce qui a été dit hier par M. Agramunt, l’un des corapporteurs de la commission de suivi sur l’Azerbaïdjan. Sans vergogne, il s’est livré à un certain nombre de commentaires qui allaient bien au-delà de son rapport sur l’Azerbaïdjan. Pour soutenir sa thèse, il a complètement déformé des arguments que j’avais avancés s’agissant du conflit du Haut-Karabakh. Il est regrettable et même inacceptable qu’un corapporteur qui est tenu, par sa fonction, à l’impartialité et à l’équité, agisse ainsi.

M. Agramunt a soit agi de manière préméditée dans le but de tromper l’Assemblée, soit démontré où allaient ses attachements. Je n’ai jamais prononcé en commission les paroles qu’il m’a prêtées hier dans l’hémicycle. Il est odieux qu’un membre de cette Assemblée, qui plus est corapporteur de la commission de suivi, puisse agir ainsi et mentir délibérément. Si sa mémoire lui fait défaut, je lui recommande de relire les comptes rendus de la réunion à laquelle il a fait référence.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Harutyunyan, votre déclaration figurera au compte rendu de notre séance. Nous prenons bonne note de votre réclamation, même si je n’ai aucun jugement à porter sur ce que vous avez dit, étant donné la place que j’occupe.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Hancock, pour un rappel au Règlement.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – Monsieur le Président, l’un de nos collègues vient de prendre la parole pour un fait personnel – il avait le droit de le faire –, mais n’aurait-il pas mieux valu en aviser d’abord M. Agramunt et lui demander son avis ? Après tout, il vient d’être accusé de mensonge ! Il devrait donc avoir la possibilité de réagir. En tout cas, la personne qui est intervenue aurait dû faire en sorte que celle qu’elle attaquait puisse être présente afin de réagir à ses propos. En effet, l’accusation qui vient d’être proférée sera consignée au compte rendu sans que M. Agramunt puisse se défendre.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Hancock, je ne fais qu’appliquer l’article 34.6 du Règlement. J’ai reçu une demande de parole pour fait personnel ; je l’ai acceptée. Il est bien précisé que cette intervention pour fait personnel ne peut être suivie d’aucun débat.

Je rappelle – ce n’est un secret pour personne – que nos séances sont publiques et que l’ordre du jour de cette première partie de session est connu de tous. Chacun devrait donc être à sa place dans l’hémicycle. Je ne suis pas responsable de l’absence de telle ou telle personne, y compris de celle de la personne dont il a été question dans l’intervention de M. Harutyunyan. Cette intervention sera rapportée à M. Agramunt ; s’il veut répondre, je lui donnerai tout naturellement la parole, conformément à l’article 34.6 de notre Règlement.

4. Migrations et asile : montée des tensions à l’Est de la Méditerranée
Débat selon la procédure d’urgence

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Mme Strik, au nom de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, sur le thème suivant : « Migrations et asile : montée des tensions à l’Est de la Méditerranée » (Doc.13106). La commission est à l’origine de cette demande de débat d’urgence qui, je vous le rappelle, a été acceptée à l’unanimité par les membres du Bureau.

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi matin, de limiter le temps de parole des orateurs à 3 minutes. Toutefois, au vu de notre ordre du jour et du nombre d’amendements présentés, il me semble possible de porter ce temps à 4 minutes, tout en entendant la totalité des orateurs. Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 12 heures.

Y a-t-il des oppositions ? Ce n’est pas le cas.

Il en est ainsi décidé.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Vous avez la parole.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées* – Je suis heureuse qu’une majorité se soit dessinée en faveur de la tenue du présent débat. Cela me permet de partager avec vous certains faits et chiffres alarmants. Je puis également vous parler de notre visite de travail en Grèce la semaine dernière. Une sous-commission ad hoc de la commission des migrations s’est en effet rendue en Grèce. Nous sommes allés voir comment, au Sud, on s’occupait de la question dont nous débattons aujourd’hui.

Des migrants arrivent continuellement en Europe. Si l’on ferme une porte, une autre est utilisée. L’Espagne et l’Italie ont renforcé les contrôles à leurs frontières. Elles ont signé avec les pays d’Afrique du Nord des accords pour le retour de ces populations. La pression est alors montée sur la Grèce de façon très importante : des migrants d’Asie, d’Afrique, mais aussi, de plus en plus, du Proche-Orient – notamment de Syrie – se retrouvent sur le territoire grec.

Nous avons été très honorés que notre Président, M. Mignon, nous accompagne pour une partie de la visite. Je suis convaincue que notre mission a été efficace. Nous avons été très bien reçus par les autorités locales de la région d’Evros, mais aussi par le parlement et par les ministères. Nos collègues grecs nous ont beaucoup aidés et ils n’ont cessé de nous accompagner.

Cela dit, nous avons été choqués et attristés lorsque nous nous sommes rendus dans les centres de rétention pour les migrants. La Grèce a 6 000 places de rétention et elle veut monter en puissance en passant à 10 000 places. Le long de la frontière avec la Turquie, où nous sommes allés, les centres nous sont apparus très en deçà des normes européennes : plus de 70 personnes se partageaient une cellule de 100 mètres carrés sans chauffage, sans eau chaude et même sans lumière. Ils ne peuvent aller à l’air libre que pendant une heure – et encore, derrière des barreaux. Il leur est difficile d’accéder aux soins médicaux et de communiquer avec le monde extérieur. Certains migrants nous ont dit qu’ils étaient là depuis cinq mois et qu’ils n’avaient pas pu appeler leur famille pour leur faire savoir qu’ils étaient toujours en vie. Beaucoup étaient préoccupés du sort de leurs proches. Les migrants étaient également dans l’incertitude pour leur avenir : ils ne savaient pas combien de temps ils allaient rester dans le centre. Une loi a été récemment modifiée : dorénavant, la rétention peut aller jusqu’à un an, voire 18 mois dans certains cas.

Les migrants sont encadrés par des policiers qui ne sont pas formés pour les aider : ils ne connaissent pas les besoins de ces personnes. Les migrants sont traités comme des criminels, alors qu’ils ont simplement cherché de meilleures conditions de vie ou une protection contre la guerre ou les persécutions. Bien sûr, ils peuvent déposer une demande d’asile, mais, dans la pratique, cela s’avère très difficile ; là encore, cela dépend des policiers. Ces conditions, de même que l’incertitude dans laquelle ils se trouvent, créent une situation extrêmement difficile.

Les mineurs non accompagnés se retrouvent parmi les adultes. Ils ne bénéficient d’aucune attention et d’aucune protection spécifiques. Or, comme vous le savez, la rétention des mineurs constitue une violation des droits de l’homme, de même que de plusieurs de nos résolutions.

M. Mignon et la sous-commission sont allés visiter la section des femmes. Nous avons constaté que leur situation était en deçà de la dignité humaine. Mme Fiala leur a promis de ne pas se taire sur ce qu’elle a vu. On comprend donc pourquoi le présent débat est important pour ces personnes. Nous avons été très heureux d’entendre que notre ancien collègue, M. Dendias, qui est en charge de la protection civile, a promis de libérer ces femmes et ces enfants au printemps, lorsque le premier centre ouvert serait prêt. Par ailleurs, les centres de rétention les plus détestables seront fermés sous peu. Des efforts sont faits pour résorber le retard dans le traitement des demandes d’asile – 50 000 dossiers sont en attente. Une procédure d’asile est également en cours d’élaboration, dans laquelle interviendraient des décideurs civils.

Tout cela montre que les autorités grecques font preuve de bonne volonté et reconnaissent la nécessité d’améliorer les choses. Mais la politique du pays n’est pas structurellement modifiée. La réponse grecque à l’immigration, c’est la rétention et une clôture de 12 kilomètres le long des frontières avec la Turquie, ce qui ne règle rien. On observe seulement un effet de déplacement : au lieu de traverser la frontière gréco-turque, les migrants passent par les îles grecques ou la frontière bulgare. Cette réponse n’est donc pas efficace. Elle est en outre inhumaine : on ne peut pas se contenter de renvoyer les migrants vers la Turquie, parce qu’il n’est pas du tout sûr que ce pays leur accordera la protection nécessaire.

Les demandeurs d’asile ne doivent pas être placés dans des centres de rétention. Il faut traiter leur demande rapidement, en prévoyant des clauses de sauvegarde procédurale. Les conditions d’accueil doivent également respecter les normes européennes. Un séjour irrégulier ne justifie pas non plus une rétention indéfinie. Dans ma résolution, je m’adresse au gouvernement grec pour qu’il réforme le plus tôt possible sa politique.

Mais cette situation préoccupante n’est pas seulement le fait des Grecs. La Turquie est le pays de transit principal pour les migrants à destination de l’Europe, et la Grèce, qui se trouve aux frontières sud-est de l’Europe, sert de point d’entrée. Ses frontières sont nos frontières communes, et nous sommes responsables de celles-ci.

Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur ce qui se passe. Pourtant, de nombreux Etats membres du nord n’assument pas leur responsabilité. Dans certains cas, ils appliquent la Convention de Dublin, qui leur permet de renvoyer les demandeurs d’asile dans le pays de première escale. Certes, la Grèce est financée par le Fonds européen des réfugiés et ce financement est important, mais il devrait être organisé de façon plus souple et efficace. Et ce n’est de toute façon pas la même chose qu’un partage de responsabilités.

Il existe plusieurs possibilités : on peut se répartir les demandeurs d’asile et les réfugiés entre Etats membres ; on peut revoir le régime de Dublin. Nous demandons en tout cas aux Etats membres européens de revoir leur attitude, de faire preuve d’une réelle solidarité et de proposer des solutions.

Je sais que cela est possible. Dans mon rapport, j’ai comparé cette crise humanitaire avec la crise financière et économique. En peu de temps, les pays de la zone euro ont réussi à sauver leurs banques et l’économie grecque, parce qu’ils se sont rendu compte qu’il y allait de leur intérêt. Quelle est la différence ici ? Un marché, un espace sans frontière !

Alors que l’Europe ferme les yeux, les mouvements xénophobes gagnent de l’influence en exploitant la situation des migrants. Ces derniers sont fréquemment attaqués et harcelés dans les rues, comme ce migrant pakistanais qui, la semaine dernière, a été poignardé à mort par deux jeunes Grecs. Les sondages révèlent par ailleurs la montée en puissance de l’Aube dorée. Or si la Grèce est en proie à la déstabilisation politique, un nouveau plan de sauvetage ne changera rien à l’affaire.

Si vous vous étiez rendus sur place, vous seriez convaincus de l’urgence de la situation. Or le problème se pose de façon encore plus aiguë avec l’explosion de la Syrie et la fuite de millions de personnes à la recherche d’un refuge. Certes, le Liban, la Jordanie, la Turquie en accueillent un grand nombre, et nous pouvons les en remercier. Mais il y a une limite à leurs capacités d’absorption. C’est ainsi que de plus en plus de Syriens essaient de gagner l’Europe à la recherche d’un traitement digne et humain et d’une protection. Mais au lieu d’être bien accueillis, ils se retrouvent dans des centres de rétention grecs.

Financer les pays limitrophes de la Syrie, c’est bien, mais cela ne suffit pas. L’Europe doit assumer ses responsabilités et organiser la réinstallation des réfugiés syriens au sein des pays européens. Il faut faire preuve de créativité, et offrir par exemple des bourses aux jeunes Syriens de telle manière qu’ils puissent, en exil, suivre un apprentissage pour assurer le futur de leur pays. La responsabilité en matière de protection ne commence pas à la frontière de chacun de nos pays, ni même à la frontière de l’Europe.

LE PRÉSIDENT - Madame la rapporteure, il vous restera cinq minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Kanelli, pour le Groupe pour la gauche unitaire européenne.

Mme KANELLI (Grèce)* - Je tiens, au nom de mon groupe, à remercier du fond du cœur Mme Strik et tous les membres de la commission qui sont venus dans la région pour se rendre compte de l’urgence de la situation. Ils ont, en très peu de temps, rédigé un rapport très équilibré et très objectif qui, en matière de droits de l’homme et pour juger des décisions qui ont été prises, ne s’en tient pas au « deux poids, deux mesures ».

Si j’étais un extra-terrestre en provenance de la planète Mars – et là, ce n’est plus la représentante grecque qui parle, mais l’être humain –, j’assimilerais la frontière gréco-turque aux portes de la misère, mais certainement pas à celles du paradis. Les masses de personnes qui affluent à ces portes n’en trouvent pas la clé, mais font face à un cerbère, à l’image de ce chien à trois têtes qui, dans la mythologie, garde l’entrée des Enfers.

Comment peut répondre un pays doté de milliers de kilomètres de côtes et de frontières terrestres ? Il ne peut ériger des murs, car ceux-ci seraient tellement laids et tellement grands que l’on pourrait les observer depuis l’espace.

Ces migrants en situation irrégulière sont le fruit de la politique. Si l’on observe une carte et si l’on considère les régions qui entourent les frontières dont nous parlons, on peut identifier les causes de cette arrivée de réfugiés : les prétendus « printemps arabes », les interventions extérieures, les guerres, qu’il s’agisse de l’Irak, de la Syrie ou même de l’Afghanistan... On peut trouver dans le monde entier des gens qui gagnent des sommes énormes en créant ces migrants. On appelle ces derniers des étrangers en situation irrégulière ou illégaux, mais ce sont avant tout des personnes désespérées, qui fuient la misère.

La seule politique que nous puissions mettre en œuvre est la coopération entre les Etats. Il faut aider ces gens à rester dans leur pays, à être heureux là-bas, à fréquenter leurs écoles, à pratiquer leur religion, à disposer de leur terre et de leur liberté. Ce ne sont pas des gens qui nourrissent des ambitions, mais des gens chassés par les armes ou la pauvreté. Il est impossible, dans quelque pays que ce soit, qu’un dixième de la population puisse accepter une telle misère en un court laps de temps. C’est pourquoi je vous invite vivement à voter en faveur de ce rapport. On ne peut qu’espérer que les choses vont s’améliorer.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Bakoyannis au nom du Groupe du Parti populaire européen.

Mme BAKOYANNIS (Grèce)* – Au nom de toute la délégation grecque, je remercie la rapporteure, le président de la commission et particulièrement vous, Monsieur le Président, d’être venus en Grèce. C’est en effet la première fois que nous avons eu le sentiment que nos collègues étaient véritablement auprès de nous pour constater de leurs propres yeux qu’il existait des problèmes en Grèce qui n’étaient pas connus et donc pas traités. Depuis deux ans, on ne parle quasiment que de la crise économique en Grèce, mais personne ne parle des immenses problèmes sociaux et humanitaires auxquels nous sommes confrontés.

Pour comprendre la situation que nous connaissons, une seule image suffit : une petite porte assaillie par des milliers de personnes et gardée par un seul des 27 pays de l’Union européenne. Nous sommes la porte d’entrée. Et les milliers d’immigrés qui entrent chez nous ne veulent pas y rester, ils veulent bien entendu se rendre dans les 26 autres pays membres.

Nous avons des côtes de 16 000 kilomètres de long – soit la circonférence de l’Afrique – et 1 200 kilomètres de frontières terrestres montagneuses.

Une décision a été prise dans le cadre de Dublin II, selon laquelle toute personne arrivant dans un pays de l’Union européenne doit y rester. Cette décision a des conséquences graves en Grèce, sociales et économiques, mais également politiques. Pour la première fois, un pays qui a lutté contre le fascisme et qui a payé le prix fort durant la seconde guerre mondiale se retrouve avec un parti politique et des habitants qui croient aux idées fascistes ! Alors que les Grecs ont lutté contre la xénophobie et que bon nombre d’entre eux ont vécu dans de nombreux pays, aux Etat-Unis, en Allemagne et dans bien d’autres, aujourd’hui 10% des Grecs sont attirés par les idées fascistes, car ils constatent un manque de sécurité dans leur pays. En effet, on ne peut plus se promener dans les rues d’Athènes tranquillement, on ne reconnait plus notre pays !

Ce problème, nous devons le partager. Nous ne pouvons pas protéger les frontières de l’Europe avec une toute petite contribution européenne ! Nous ne pouvons pas être considérés comme responsables et être critiqués, alors qu’il n’y a pas de véritable politique européenne commune de l’immigration. Il faut que les autres pays membres de l’Union européenne cessent de nous montrer du doigt et de dire que nous sommes responsables car nous ne faisons pas le maximum. Je vous en prie, mes chers collègues, votez pour ce rapport et aidez-nous ! Nous avons besoin de votre aide.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Schennach, pour le Groupe socialiste.

M. SCHENNACH (Autriche)* – Merci du fond du cœur, Madame Strik, pour ce rapport et pour votre intervention en faveur d’autres réfugiés dans le bassin méditerranéen par le passé.

Nous sommes face à une véritable catastrophe humanitaire. Trop de gens sont bloqués, désespérés, à Istanbul ou en Grèce. Amnesty International a publié un rapport attirant l’attention sur cette catastrophe.

J’ai écouté avec une grande attention mes deux collègues grecques. C’est vrai, la Grèce a besoin d’aide, mais elle doit dans le même temps assumer ses responsabilités. Par exemple, les demandeurs d’asile doivent être traités de manière correcte et il n’est pas, par exemple, acceptable qu’en 24 heures, un fonctionnaire instruise un dossier de demande d’asile ! Ou qu’il n’y ait qu’une personne pour traiter tant de dossiers, quand on connaît le nombre de demandeurs.

Je ne veux pas critiquer les gens qui sont sur le terrain. Je n’utiliserais pas, moi, le terme « pogrom » pour ce qui arrive à ces migrants. Mais c’est vrai que dans le centre d’Athènes, de nos jours, des fascistes circulent à mobylette et font la chasse à des adultes comme à des enfants, simplement parce qu’ils sont des migrants ; d’ailleurs il vient d’y avoir un mort récemment.

Prévoir une disposition qui allonge l’incarcération des réfugiés de 6 à 12 mois est inacceptable. D’ailleurs, un demandeur d’asile ne devrait pas être en prison, il a besoin d’une aide humanitaire et d’une protection. Je sais bien qu’il y a une crise économique dramatique en Grèce, que les conséquences sociales sont considérables et qu’il faut effectivement que l’Europe aide la Grèce. Mais il ne faut pas oublier la Turquie. Il y a des charniers à Istanbul pour les demandeurs d’asile qui meurent de maladie ou qui sont tués.

Aujourd’hui il y a aussi à Istanbul des quartiers africains, asiatiques ou somaliens. Tant de réfugiés s’entassent dans cette ville ! Il convient donc de faire quelque chose pour régler cette question et essayer de canaliser ces flux de personnes qui viennent d’Afrique ou d’Asie. Il n’y a d’ailleurs pas que des personnes cherchant à traverser la frontière terrestre, d’aucuns essaient avec des Zodiacs et j’ai entendu dire que, dans certains cas, on les a fait couler en les perçant d’un coup de couteau !

Jusqu’ici, la Grèce était un pays accueillant, il n’y avait pas de fascistes, ce n’était pas un pays xénophobe, pourtant maintenant c’est le cas. Cette situation est épouvantable. Et on doit aussi déplorer les véritables razzias organisées par la police. On doit en appeler à la Grèce pour qu’elle change, mais nous devons aussi en appeler à l’Union européenne pour qu’elle mette à sa disposition tous les crédits nécessaires, dans un souci de protection, et non pas pour construire des prisons ou autres centres de détention.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Fiala, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

Mme FIALA (Suisse)* – Tineke, chère amie, je voudrais tout d’abord vous féliciter pour votre excellent rapport. Je soutiens tout ce qui s’y trouve. Nous avons été ensemble en Grèce et nous avons eu des émotions et des expériences communes. Je remercie également Mmes Kanelli et Bakoyannis pour leur accueil, elles nous ont tout montré dans la brutalité de la réalité.

En tant que Suissesse, bien sûr, je n’ai pas à souffrir de Schengen, et c’est vrai que je ne pourrais pas critiquer sans fard la Grèce, ce serait arrogant que de le faire. Ce que vit la Grèce, personne ne peut se l’imaginer. Un million de personnes en séjour irrégulier se trouvent dans le pays et des dizaines de milliers de personnes dans des camps de réfugiés. Et là, je suis d’accord avec M. Schennach, ce ne sont pas n’importe quels centres, ce sont des prisons. Si vous aviez vu cela, mes chers collègues, plus jamais, chez vous, vous n’autoriseriez la moindre déclaration populiste, tellement cette situation est honteuse.

Des réfugiés syriens, irakiens et palestiniens ont jeté leurs papiers, ils ont payé 8 000 dollars pour être acheminés dans le pays et ensuite ils se retrouvent en prison ! C’est une situation indigne sur le plan humanitaire en ce XXIe siècle !

Depuis août 2012, la Grèce a fermé ses frontières terrestres et ses frontières fluviales sont surveillées. C’est ainsi que 97 % des personnes ont pu être bloquées aux frontières. Mais n’oublions pas que la côte grecque est longue et que la Grèce compte 3 000 îles, ce qui rend le contrôle extrêmement difficile, voire impossible, plaçant ce pays dans une position de vulnérabilité.

Mon propos sur les centres de rétention sera dur, car ces centres sont très souvent dépourvus de chauffage, d’eau chaude, sans compter des conditions sanitaires misérables. Au surplus, les personnes sont séparées de leur conjoint pendant des mois, ignorant tout du sort qui leur sera réservé. Les familles non plus ne savent pas le sort qui attend leurs proches. C’est une tragédie humanitaire. Chers amis, je vous invite expressément à ne pas autoriser de telles situations et à y mettre un terme.

J’ai promis aux détenus que je ne me tairais pas. Je ne m’arrêterai pas ici, je continuerai de m’exprimer ailleurs. On ne peut pas sauver le monde, mais reconnaissons que les défis mondiaux exigent des solutions mondiales qui nous concernent toutes et tous !

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Chope, au nom du Groupe démocrate européen.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt l’intervention de Mme Fiala.

Nous avons effectué une visite extrêmement constructive en Grèce et je puis me rallier à la quasi-totalité des propositions du rapport. Toutefois, il souffre de quelques omissions. En effet, on ne parle pas suffisamment des trafiquants d’êtres humains, ni des milliers de personnes qui essayent d’entrer dans l’Union européenne, non pas parce qu’ils fuient les persécutions et sollicitent l’asile en tant que réfugiés, mais parce qu’ils veulent accéder à une vie meilleure. Dès lors, il n’y a aucune limite au nombre de personnes susceptibles d’être attirées par l’Union européenne. N’oublions pas que l’Union européenne compte 7 % de la population mondiale, mais produit 25 % du PIB mondial et représente 50 % des dépenses sociales mondiales. L’Union européenne est à cet égard un aimant pour les populations issues de régions plus défavorisées. Mais il n’existe pas de droit de l’homme permettant aux uns et aux autres de vivre là où ils le souhaitent. Et chaque pays a le droit de décider des personnes qu’il souhaite accueillir sur son territoire et de contrôler ses frontières.

À cet égard, je voudrais vous rapporter une anecdote. Alors que nous visitions un centre de rétention, j’ai parlé à des personnes qui étaient derrière une barrière, dont un jeune Afghan d’environ 22 ans, qui avait versé 8 000 dollars pour être conduit à travers l’Iran et la Turquie, où il devait prendre un bateau pour se rendre sur la côte orientale de l’Italie et donc éviter la Grèce. Le bateau ayant coulé, il a été arrêté par les autorités grecques, puis placé dans un centre de rétention. Il m’a dit qu’il souhaitait se rendre à Londres, où il avait vécu cinq ans et qu’il avait dû quitter le territoire six mois auparavant, les autorités du Royaume-Uni l’ayant expulsé et renvoyé par avion en Afghanistan. Il ne s’agit donc pas d’une personne qui se trouve dans une situation humanitaire désespérée, c’est une personne qui joue avec le système pour revenir au Royaume-Uni contre la décision de ce pays et en violation du droit international. Mettre sur un même plan des personnes qui fuient des persécutions et des personnes en situation irrégulière pour des raisons de choix personnel est une erreur et c’est pourquoi il convient d’établir un distinguo. Je regrette d’ailleurs que le rapport ne fasse pas état de notre rencontre avec les responsables des garde-côtes grecs qui nous ont rapporté que des personnes avaient des instructions pour faire couler les bateaux pneumatiques dans la Mer Egée, le long des côtes grecques, sachant que les autorités grecques se porteraient à leur secours avant de les transférer dans un centre. Bien sûr, ces personnes devraient être appréhendées et renvoyées dans leur pays, ce que la Grèce n’est pas en mesure de faire, faute d’accords avec, par exemple, l’Afghanistan, le Bangladesh ou le Pakistan. Aussi ai-je proposé un amendement pour parvenir à un équilibre dans la résolution afin que nous aidions ceux qui ont besoin d’assistance humanitaire et sanctionnions ceux qui jouent volontairement avec le système.

LE PRÉSIDENT – Mme Strik ne souhaitant pas répondre dans l’immédiat aux porte-parole des groupes, la parole est à Mme Fort.

Mme FORT (France) – Madame la rapporteure, je voudrais, pour ma part, revenir sur la situation des migrants et des demandeurs d’asile en Turquie. Hier, encore le ministre des Affaires étrangères turc, M. Davutoglu, a déclaré que la Turquie « ne fermera jamais ses frontières » aux réfugiés syriens. Madame la rapporteure, je crois que, comme vous le rappelez dans votre projet de résolution, nous ne pouvons que saluer la politique généreuse de la Turquie vis-à-vis des Syriens fuyant la guerre civile et les massacres. En effet, ce pays accueille déjà plus de 200 000 réfugiés et il est aujourd’hui légitime de se demander combien de réfugiés vont encore arriver et si la Turquie pourra, seule, supporter cet afflux massif. Cela d’autant plus que comme vous le savez tous les camps de réfugiés situés à proximité de la frontière syrienne sont régulièrement victimes de tirs d’obus des partisans du pouvoir syrien. Plus de 10 000 réfugiés syriens attendent encore à la frontière turque.

Le 16 janvier dernier, la directrice exécutive du programme alimentaire mondial, Mme Ertharin Cousin, s’est rendue dans les camps des réfugiés syriens. Elle a déclaré : « La crise continue, mais nous ne devons pas laisser un seul bébé avoir faim. Nous demandons aux donateurs du monde entier de se joindre aux efforts de la Turquie et de ceux qui aident déjà pour subvenir aux besoins alimentaires de tous ceux qui souffrent de la crise syrienne. » La Turquie a déjà dépensé 360 millions de dollars, dont 30 millions sont issus de la solidarité internationale.

Un rapport récent du Haut-Commissariat aux réfugiés de l’Onu indique que le manque d’espace dans les camps reste un défi majeur pour les autorités locales, alors que l’hiver fait son apparition. Il est prévu l’ouverture d’un nouveau camp à Nizip, pouvant accueillir jusqu’à 5 000 personnes. Cependant, la multiplication de camps de réfugiés ne peut être une solution.

Madame la rapporteure, je pense qu’il faut également réfléchir aux actions à mener pour qu’après la fin de la guerre, les réfugiés syriens puissent retourner dans de bonnes conditions dans leur pays.

De manière plus générale, pour les autres migrants et demandeurs d’asile, il est clair qu’aujourd’hui, la situation économique et sociale de l’Europe ne lui permet plus d’accueillir toutes les personnes qui croient à une vie meilleure dans un Eldorado européen qui n’existe pas.

La situation en Grèce est symptomatique des limites de cette politique d’accueil. J’ai été particulièrement touchée par les interventions de nos collègues grecques. Il est de notre devoir de décrire la situation, de dénoncer ce qui ne va pas, mais ne jetons la pierre à aucun pays européen. Au contraire, soyons solidaires. Il faut que la Turquie contrôle mieux sa frontière avec l’Europe, et le déploiement de Frontex sur le territoire turc pourrait être une ébauche de solution.

Si ce matin, au cours du débat selon la procédure d’urgence, nous faisons le constat du présent, il est indispensable de préparer également l’avenir ; pour ce faire, nous devons réfléchir ensemble à une politique plus cohérente à l’égard des pays d’origine des migrants. Le codéveloppement devrait être une priorité pour permettre à ces hommes et ces femmes désespérés de garder toute leur dignité et de croire en leur devenir.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Rouquet.

M. ROUQUET (France) – Madame la rapporteure, je veux tout d’abord vous féliciter pour votre rapport très complet, et pour vos propositions, qui me semblent particulièrement pertinentes.

J’ai eu l’occasion de me rendre en Grèce, il y a quinze jours, en compagnie de notre Président. J’ai constaté que dans certains lieux, les conditions de vie sont difficiles, voire intolérables. Nous garderons tous en mémoire le regard de ces femmes, de ces jeunes enfants, de ces hommes, enfermés. Mais soyons honnêtes : quel pays européen pourrait faire face seul à un tel afflux de migrants ? La Grèce est confrontée à une crise économique et sociale sans précédent, qui handicape tout à la fois les politiques d’accueil des migrants et leurs possibilités d’insertion. La crise qui installe les Grecs dans la précarité frappe aussi les migrants.

N’oublions pas non plus que, pour beaucoup, la Grèce est une porte d’entrée en Europe – pour des raisons en premier lieu géographiques. Ces migrants, souvent en transit ou demandeurs d’asile, ne sont pas le problème de la seule Grèce, mais de l’Europe tout entière. Monsieur le Président, vous avez d’ailleurs souligné, lors de votre visite à Athènes, que la solidarité européenne devait impérativement se manifester pour éviter que la situation autour de la Méditerranée ne devienne une catastrophe humanitaire.

Des milliers de migrants entrent irrégulièrement en Grèce chaque année ; la plupart d’entre eux passent par la Turquie. Pour gérer au mieux cet afflux massif de personnes fuyant la guerre ou la misère, des mesures doivent être prises de chaque côté de la frontière. Chaque protagoniste – la Grèce, mais aussi la Turquie – doit fournir une part de l’effort ; mais l’Union européenne, elle aussi, notamment avec Frontex et avec les garde-côtes européens, a un rôle important à jouer.

Le nombre très élevé de demandes d’asile et le manque criant de personnel et de moyens alloués à l’Agence nationale d’asile censée instruire ces demandes créent une situation intenable, tout particulièrement lorsque des mineurs sont concernés – et ils ne sont pas rares, ces mineurs isolés, sans famille, perdus à l’issue d’un périple qui les a coupés de tout !

Les autorités grecques sont résolues à résorber l’arriéré des demandes d’asile – qui serait de quelque 50 000 – et à améliorer les conditions de rétention. Je m’en réjouis. Plusieurs centres qui ne répondaient pas aux standards européens ont d’ores et déjà été fermés. C’est un pas positif, mais je crains que, sans une aide concrète de l’Union européenne et des pays membres de l’Union, la Grèce n’éprouve des difficultés croissantes à poursuivre ses efforts.

Chers collègues grecs, soyez persuadés que nous avons conscience des difficultés auxquelles vous êtes confrontés et que j’ai pu constater, avec de nombreux collègues, lors de notre visite. Toutefois, dans la pénombre de la crise, les valeurs du Conseil de l’Europe doivent rester notre lumière et notre guide. Nous vous accompagnerons dans cette voie.

LE PRÉSIDENT – M. Agramunt, inscrit dans le débat, n’étant pas présent dans l’hémicycle, la parole est à M. Bies.

M. BIES (France) – Monsieur le Président, chers collègues, je voudrais tout d’abord remercier Mme Strik pour son rapport, que nous devons entendre comme un message d’alerte.

D’un côté, une population qui subit violemment et durement une crise économique, de l’autre, des migrants, des réfugiés et une organisation politique qui n’a pour unique programme que l’agitation et la haine : il s’agit d’un cocktail que nous ne connaissons, hélas !, que trop bien sur notre continent.

Jamais une réponse nationale n’a pu relever un tel défi, et pourtant, à chaque fois, le réflexe, c’est le nationalisme ! Pour l’observer, nul besoin d’aller jusqu’en Méditerranée. Nous sommes tous concernés : chacun dans nos pays, nous avons des exemples précis en tête. Pour ma part, je me souviens d’un Président de la République qui, il y a quelques mois, envisageait de suspendre la participation de la France aux accords de Schengen. C’est pourtant l’inverse qu’il convient de faire.

Quoi qu’on puisse penser dans nos pays respectifs, pour nos voisins, l’Europe est attractive. Cette attractivité, nous la voulons, nous la revendiquons même, mais nous refusons de l’assumer. Face à la crise économique et financière qui a failli faire sortir la Grèce de la zone euro, il n’y avait qu’une réponse possible : la solidarité européenne. Face à la pression migratoire que connaissent l’ensemble des pays européens situés sur les rives de la Méditerranée, et principalement la Grèce et la Turquie, une seule réponse est là encore possible : la solidarité européenne. Cette solidarité, nous devons la construire avec ambition, mais aussi au regard des évolutions démographiques que connaîtra l’Europe au cours des prochaines décennies.

Je partage le point de vue selon lequel, si l’on n’envisage la politique migratoire qu’à travers le prisme des contrôles des frontières, cela ne nous amènera qu’à déplacer la pression migratoire d’une frontière à l’autre. Répartir l’accueil et le traitement des flux migratoires arrivant aux frontières extérieures de l’Europe entre les Etats européens peut paraître ambitieux ; c’est pourtant une nécessité.

Face à ce constat, le Conseil de l’Europe, et plus précisément notre Assemblée, a un rôle majeur à jouer : favoriser la prise de conscience des Etats membres et de l’Union Européenne afin qu’une véritable politique migratoire européenne voie le jour. Tel est le sens de ce projet de résolution et de ce projet de recommandation. Mais face aux évolutions démographiques, il me semblerait pertinent de valoriser également les aspects bénéfiques des migrations pour l’Europe, tant du point de vue économique que du point de vue culturel.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Memecan.

Mme MEMECAN (Turquie)* – Je souhaite tout d’abord féliciter Mme Strik pour son travail remarquable et la remercier pour son engagement permanent et sans faille aux côtés des migrants.

Monsieur Schennach, je voudrais vous dire qu’il n’y a pas, à Istanbul, de cimetière dans lequel on entasse des migrants !

Compte tenu de sa situation géographique, la Turquie est confrontée à un afflux croissant de migrants en situation irrégulière, en provenance de pays politiquement et économiquement instables, situés plus à l’est. La traite de personnes a pris de l’ampleur ces derniers temps dans la mer Egée et nous avons intensifié nos efforts depuis deux ans pour maîtriser la situation. Depuis la signature du protocole de 2010, notre coopération avec la Grèce s’est grandement améliorée. En outre, deux projets de loi sont actuellement soumis au parlement, l’un sur la lutte contre la traite des personnes et l’autre sur la protection des étrangers. Par ailleurs, nous allons créer un bureau des politiques de l’immigration pour améliorer les mécanismes actuels.

Actuellement, notre pays accueille de nombreux réfugiés syriens. Ils sont aujourd’hui 150 000 sur notre territoire. Je regrette que l’on revienne aujourd’hui sur certaines résolutions adoptées dans le passé et je voudrais vous rappeler que les Syriens ont besoin d’un soutien urgent de la communauté internationale. Nous attendons de nos partenaires du Conseil de l'Europe un soutien concret pour nous aider à traverser cette période difficile. Débattre n’est pas suffisant. Vous devez partager le fardeau avec nous, et le plus tôt sera le mieux !

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Gündeş Bakir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Les restrictions géographiques apportées par la Turquie à l’accueil de réfugiés sur son territoire, en les limitant à ceux qui sont originaires d’Europe, correspondent à un droit reconnu par l’article 1.B. de la Convention de Genève de 1951. L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire A.G. et autres c. Turquie indique clairement que la limitation géographique ne peut être considérée comme une discrimination au regard du droit défini par la Convention européenne des droits de l’homme. Compte tenu de cette décision, la Turquie n’est pas tenue de lever la restriction géographique. Toute tentative pour s’y opposer constituerait une atteinte au droit souverain de la Turquie et à la Cour européenne des droits de l’homme.

La frontière est de l’Europe n’est pas celle entre la Turquie et la Grèce, mais celle entre la Turquie et la Syrie. Il ne faut pas oublier que la Turquie fait partie de l’Europe et qu’elle a coopéré de manière permanente avec la Grèce pour lutter contre l’immigration illégale et le trafic des êtres humains. De nombreux protocoles bilatéraux ont été signés en ce sens. Dans le cadre du protocole de réadmission entre la Turquie et la Grèce, une réunion d’experts s’est d’ailleurs tenue à Ankara en novembre 2012. Les délégations des deux pays sont convenues de s’attaquer avec efficacité aux migrations irrégulières, ainsi qu’à la traite des êtres humains. La Turquie s’acquitte pleinement de ses obligations et accueille plus de 150 000 Syriens dans quinze camps situés sur son territoire. À ce jour, la Turquie a consacré plus de 550 millions de dollars prélevés sur ses propres ressources nationales pour subvenir aux dépenses des camps de réfugiés. Ces dépenses s’élèvent, pour un camp de 10 000 réfugiés, à 2,5 millions de dollars chaque mois. L’assistance financière de la communauté internationale est encore trop faible.

Le peuple syrien peut compter sur la solidarité de la Turquie. Toutefois, compte tenu de l’ampleur du problème, notre pays attend de la communauté internationale qu’elle partage avec lui le fardeau humanitaire. Il faut désormais envisager des camps au sein même de la Syrie. La Turquie a commencé à transférer l’aide humanitaire à partir de la frontière turco-syrienne par le biais du Croissant-Rouge. Nous devons trouver des solutions durables au problème de l’immigration illégale du peuple syrien. Des clôtures en fil barbelé ou des gardes-frontières plus nombreux ne seront pas suffisants tant qu’un gouvernement démocratique de transition ne sera pas établi en Syrie. Ce doit être notre première priorité.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Pipili.

Mme PIPILI (Grèce)* – La Grèce ne peut accueillir toute la misère du monde. Le problème n’est pas seulement grec, il est européen. Depuis fort longtemps, nous tentons de vous le faire comprendre et, enfin, quelqu’un nous a entendus. Nous vous remercions, Monsieur le Président, pour la position que vous avez adoptée. La Grèce remplira ses obligations mais elle doit aussi bénéficier d’un soutien suffisant.

Madame Strik s’est récemment rendue en Grèce avec d’autres membres de l’Assemblée. Ils ont voyagé le long du fleuve Evros, accompagnés de journalistes et de représentants d’ONG. Leur enquête sur place, leurs visites des centres de rétention et leur dialogue avec les réfugiés, leur ont permis de se rendre compte de la réalité de la situation.

Au cours des dernières années, l’Europe semblait ne pas comprendre que la Grèce n’était pas en mesure de faire face seule à l’invasion de réfugiés humanitaires. Nous sommes un petit pays de onze millions d’habitants. Nous n’avons connu aucune expérience coloniale. Au contraire, notre pays est un pays de réfugiés et je suis moi-même issue d’une famille de réfugiés de l’Asie mineure. Notre pays est également un pays de migrants.

En 2010, à la frontière avec la Turquie, 132 000 réfugiés migrants irréguliers ont été arrêtés selon un rapport de Frontex. Celui-ci souligne par ailleurs que 90 % des migrants irréguliers qui cherchent à se rendre en Europe sont arrêtés aux frontières grecques et que 600 000 sans-papiers vivent dans le centre d’Athènes. Cela pose évidemment beaucoup de problèmes, notamment avec une extrême droite raciste.

Je me félicite que le Conseil de l'Europe ait pris aujourd’hui la dimension du problème. Il n’est pas vrai de dire que la Grèce ne se préoccupe pas des enjeux humanitaires. Ce sont les gardes-frontière, les garde-côtes et les pêcheurs grecs, qui touchent de très bas salaires, qui continuent chaque jour à sauver des désespérés dans les eaux du fleuve Evros et de la Mer Egée !

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Tzakri.

Mme TZAKRI (Grèce)* – Chers collègues, je voudrais avant tout féliciter notre rapporteur qui a présenté un rapport très équilibré. La question de l’immigration irrégulière a été d’une grande importance pour tous les gouvernements grecs des vingt dernières années. Les citoyens grecs, notamment ceux qui vivent dans les grandes villes, sont préoccupés par les incidences de ce phénomène sur leur vie quotidienne.

Chacun comprendra les pressions qui s’exercent sur les économies locales et les vies des populations lorsque l’on voit affluer des immigrants irréguliers qui traînent dans ces villes, sans emploi, souvent en mauvaise santé et dans des conditions de vie difficiles. C’est un terreau fertile pour le racisme, nul ne peut le nier.

Quelle est l’histoire de ce problème en Grèce ? Après l’effondrement de l’Union soviétique, un grand nombre de migrants, provenant surtout de pays voisins, a afflué en Grèce. Ces gens se sont rapidement intégrés au sein de la population locale et se sont insérés dans l’économie. Après 1998, ils ont été acceptés comme citoyens de notre pays. Mais à partir de 2005, le tableau a commencé à changer. La Grèce est alors devenue le centre d’une crise de migration, car ce sont alors des centaines de milliers de personnes qui ont afflué dans le pays. Des immigrants en situation irrégulière sont venus du monde entier, notamment d’Asie, d’Afrique et du Moyen Orient, tentant d’échapper à la crise économique et sociale et, bien sûr, fuyant des guerres meurtrières. Ils voyaient dans la Grèce une porte ouverte pour l’Europe, leur chance pour une vie meilleure.

Mais bien entendu, il n’était pas possible que la Grèce assume ce problème immense. Pour comprendre l’étendue du problème en chiffres, sachez qu’en 2011 la Grèce a accueilli pratiquement 100 000 personnes, et ce n’est là qu’un petit fragment d’un tableau beaucoup plus large. Comme toujours, la Turquie n’a pas coopéré avec les autorités grecques.

L’Union européenne espérait qu’il serait possible de maîtriser ces flux de migration grâce à Frontex, puis en finançant d’autres mesures – par exemple des renvois dans les pays d’origine –, et ainsi traiter la majeure partie du problème ou au moins aider l’économie grecque ou sa société. Mais aucune de ces mesures n’a réellement été couronnée de succès. Sur ces questions d’immigration, il faut que les autres pays européens considèrent la Grèce comme une partie d’un pays uni. Parce qu’il est évident que si cette frontière venait à craquer, la frontière ne ferait que se déplacer au pays européen suivant.

Vous comprenez bien que la Grèce ne peut plus accepter le règlement Dublin II et ne peut plus être le pays accueillant toute l’immigration en situation irrégulière au nom de toute l’Union européenne. Nous devons nous protéger avec tous les moyens acceptables, recourir à la solidarité nationale et préserver notre bien-être économique et social. Cela impose d’ailleurs que la Grèce change rapidement d’attitude à l’égard de cette question. Il faut que nos partenaires européens comprennent bien qu’il ne s’agit plus d’un problème grec, mais d’un problème européen.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Dame Angela Watkinson.

Dame Angela WATKINSON (Royaume-Uni)* – Pour commencer je voudrais remercier Mme Strik pour son excellent rapport et pour tout le temps et les efforts qu’elle y a consacrés. Le fruit de son travail est bon, et nous donne une bonne base de discussion dans cet hémicycle.

Ce problème des migrants est un défi pour de très nombreux pays, particulièrement ceux que nous évoquons. Le conflit syrien crée des difficultés supplémentaires pour la Grèce et la Turquie. Ces pays ont besoin d’une aide de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe. Nous devons travailler ensemble et programmer ensemble une série de mesures pour répondre à la situation. Il est vrai que la Grèce est dans une situation d’autant plus difficile qu’elle connaît une crise aiguë, ce qui favorise des poussées xénophobes qui sont à l’origine d’une vague d’agressions contre des migrants de la part d’extrémistes. En fait, la Grèce est dépassée et ses capacités d’accueil sont totalement submergées. Aucun pays, et l’exemple de la Grèce le démontre à l’envi, ne peut faire face seul à toute la misère du monde et accueillir de tels flux de migrants. M. Chope a déposé plusieurs amendements afin d’établir la distinction entre les demandeurs d’asile, les réfugiés, et tous ceux qui essaient d’entrer dans un pays pour des raisons qui n’ont rien d’humanitaire. Cette distinction doit être faite.

La Turquie est le principal pays de transit. Si mes informations sont bonnes, je crois qu’il y a déjà là-bas 150 000 réfugiés syriens. Un orateur précédent évoquait le chiffre de 200 000 personnes, qui est peut-être plus proche de la vérité à l’heure actuelle. Il y a en tout cas énormément de réfugiés en Turquie qui cherchent à entrer dans l’Union européenne par la Grèce. Une fois de plus, il faut établir s’il s’agit de vrais demandeurs d’asile et si ces personnes ont vraiment droit au statut de réfugié. Les femmes sont d’autant plus vulnérables qu’elles risquent d’être victimes de harcèlement sexuel ou autre. Les enfants, les mineurs et les autres personnes vulnérables doivent aussi faire l’objet d’une attention particulière.

Il faut éviter de mettre les gens systématiquement derrière les barreaux, et ceux qui y sont doivent être bien traités. Ceux qui sont déjà traumatisés ne doivent pas être retenus dans des centres insalubres sans lumière et sans chauffage. D’ores et déjà, la Grèce a renforcé ses moyens aux frontières, et prévoit de revoir ses mécanismes pour traiter les demandes d’asile et de réfugiés. Mais encore une fois, le système explose sous toutes les coutures, il est submergé.

Il faut repenser toute la situation. Le rapport, qui est très bon, fait plusieurs suggestions très utiles, notamment le partage du fardeau par l’Europe, une intervention du HCR pour aider la Turquie, la prise de mesures de réinstallation des réfugiés syriens, et aussi des mesures pour accélérer le traitement de tous les dossiers en instance.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Groth.

Mme GROTH (Allemagne)* – Je ne peux qu’abonder dans le sens de l’oratrice précédente. Ceux qui étaient avec nous en Grèce la semaine dernière ont entendu cette réfugiée syrienne dire que plutôt que de rester derrière des barreaux ici, elle préférait mourir dans son pays. Souvenez-vous aussi de ce jeune Pakistanais qui, Dieu sait comment, est arrivé en Grèce. Il était traumatisé et très malade, on l’a bien vu et nous ne l’oublierons jamais. De même que nous n’oublierons jamais toutes ces femmes entassées de manière inhumaine dans la prison de Petrou Ralli et qui nous ont demandé en pleurant de les libérer. Elles nous ont dit qu’elles devenaient folles, qu’elles allaient mourir ici et qu’elles ne le supportaient plus.

Je voudrais que tous les ministres de l’Union européenne aillent là-bas, qu’ils aillent voir ces prisons et qu’ils remettent sur le métier ce règlement Dublin II qui est totalement inhumain. Cela a été dit plusieurs fois : il faut jeter aux oubliettes ce règlement Dublin II. Je suis dans l’opposition en Allemagne, et je vous le dis clairement, si l’Allemagne était dans la position géographique de la Grèce, elle aurait déjà fait en sorte qu’il soit supprimé. Or, évidemment, l’Allemagne préconise le maintien de Dublin II. C’est encore la thèse qui a été défendue à Bruxelles la semaine dernière.

C’est inhumain et, moralement, nous sommes complices de cette situation inhumaine. Si nous ne faisons pas tout pour aider les réfugiés qui fuient la guerre et la famine, comme les Syriens, si nous ne pouvons pas leur assurer un abri sûr dans nos pays riches, c’est scandaleux.

Un mot du Liban. Ce petit pays se prépare cette année à accueillir 300 000 réfugiés syriens supplémentaires. Toutes proportions gardées, c’est comme si 25 millions de personnes supplémentaires arrivaient sur le continent européen. Nous payons cher la protection de la frontière extérieure de l’Union européenne, pour empêcher l’arrivée de migrants, mais nous ne dépensons pratiquement pas un centime pour apporter à ces êtres qui en ont tant besoin des refuges et des soins médicaux. Il faut hurler notre indignation et demander de redéployer les crédits. On ne peut dépenser des millions et des millions pour installer des grillages et des caméras de surveillance et n’en dépenser qu’à peine une poignée pour assurer l’accueil des réfugiés en Grèce, leur donner un toit et un minimum de soins.

J’ai peur quand je vois la résurgence du nazisme ou du fascisme en Grèce, mais elle n’est pas la seule à être menacée. D’autres cas récents nous interpellent, en Hongrie et ailleurs. Nous devons établir des digues contre ces phénomènes inquiétants. En tant que responsable politique, je ne peux que lancer un appel pour que nous accueillions bien mieux ces réfugiés, ces Syriens et d’autres que l’on oublie toujours : les Palestiniens. On les oublie toujours, mais où voulez-vous qu’ils aillent, eux ? Ils sont des milliers à fuir la Syrie, et ils doivent aussi croupir dans certaines de ses prisons. Nous en avons rencontré quelques-uns. Ces gens sont désespérés, ils ne savent vraiment plus à quel saint se vouer ni où aller.

J’espère donc que ce rapport et ses propositions emporteront l’unanimité.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Marias.

M. MARIAS (Grèce)* – C’est la première fois que je participe à une session de l’Assemblée parlementaire et je suis ravi d’être ici alors que nous discutons d’une question importante pour la Grèce. Je ne veux pas parler à partir d’un texte, car je pense qu’il faut dire la vérité ressentie.

Notre pays a accueilli des milliers de migrants venus d’Union soviétique. Nous les avons intégrés et acceptés non en raison d’une quelconque responsabilité légale, mais parce que le peuple grec est chaleureux, qu’il aime les étrangers et qu’il est aidant face à la misère. Mais aujourd’hui, nous recevons des masses de migrants et cela crée une tension énorme. Des milliers de migrants se retrouvent enfermés en Grèce, et très peu d’entre eux, en fait, sont vraiment des demandeurs d’asile. Ce sont des migrants sans-papiers qui, d’ailleurs, ne souhaitent pas rester en Grèce mais veulent aller ailleurs en Europe.

Dublin II a fait de la Grèce une réserve d’âmes. Nous ne pouvons pas le supporter ni du point de vue économique, ni du point de vue social. La Grèce compte actuellement 1,5 million de chômeurs, des milliers de commerces ferment, le PNB a baissé de 25%, les suicides se succèdent, la Troïka nous impose un programme : nous sommes en pleine crise ! Je vous pose la question : croyez-vous vraiment qu’il nous soit possible, en pareille situation, de gérer des centaines de milliers de réfugiés ? Nous ne pouvons pas gérer cette situation. Nous ne pouvons pas être seuls responsables. Sans une solidarité européenne, nous allons avoir une explosion, dont le racisme et le nazisme ne sont que les premiers signes. L’Europe doit assumer ses responsabilités. La Turquie aussi a ses responsabilités, car des milliers de gens traversent la Turquie pour arriver sur les îles de la mer Egée ou à la frontière d’Evros.

Tout cela se passe dans le silence, mais chacun doit assumer ses responsabilités. Il faut instaurer une politique européenne. L’Union européenne a investi des milliards pour sauver les banques. Très bien ! Il faut maintenant penser aussi au flux des réfugiés et des migrants car, après la Syrie, le problème sera encore accru. La Grèce ne peut pas être le réceptacle de millions de migrants tout simplement pour qu’ils n’arrivent pas en Europe occidentale.

Je vous demande, s’il vous plaît, de saisir toute l’importance de cette question. Peut-être ne sommes-nous pas totalement d’accord avec les propositions de ce rapport, mais il a le mérite de faire un premier pas dans la bonne direction.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Neill.

M. NEILL (Royaume-Uni)* – A mon tour, je félicite la rapporteure de la qualité de son très important rapport, car il traite d’un sujet brûlant pour nous tous. Le Royaume-Uni accueille des migrants sur ses côtes depuis très longtemps. Le rapport montre néanmoins qu’il faut traiter la question sur un plan holistique, sur l’ensemble de l’Europe.

Je voudrais rendre hommage à la Grèce et au travail qu’elle accomplit dans des circonstances difficiles. Il faut au moins reconnaître le bon travail réalisé et s’efforcer de lui apporter un soutien pratique pour faire face à ce problème. C’est ce que fait d’ailleurs le Gouvernement britannique par le biais du bureau d’aide aux demandeurs d’asile qui traite les dossiers de demande d’asile. Au Royaume-Uni, nous avons accru nos capacités et avons accéléré la procédure. Nous sommes prêts à partager notre expertise avec d’autres. Nous essayons d’apporter un soutien pratique à la Grèce par le biais de Frontex, en particulier à la frontière entre la Grèce et la Turquie, car ce soutien pratique est essentiel.

Il faut, en même temps, reconnaître que si nous avons une obligation d’aider les véritables réfugiés et demandeurs d’asile, il faut établir une distinction entre ceux qui, honnêtement, véritablement, sont sous pression, et ceux qui, cyniquement, essaient de manipuler le système. C’est la raison pour laquelle j’appuie les amendements présentés par M. Chope, car il est vrai, comme l’ont dit plusieurs collègues au cours du débat, qu’il existe une minorité qui, cyniquement, manipule le système. Il faut certes faire preuve de compassion, mais il faut un système ferme et juste pour contrôler les frontières, et j’espère que le rapport le reflètera.

Nous devons coopérer et travailler ensemble, bien évidemment, mais j’aurais quelques réticences à dire qu’il faut un partage physique et matériel du fardeau. Cela ne peut se faire que de façon volontaire. Notre pays a une longue histoire du traitement de l’immigration. Nous avons accueilli ceux qui étaient expulsés d’Ouganda et du Kenya à l’époque d’Idi Amin Dada. Cela se reproduit aujourd’hui avec la Syrie, mais soyons prudents. Nous ne pouvons pas rendre obligatoire au sein de l’Union européenne le partage du fardeau car, parfois, cela peut être contre-productif.

L’objectif principal est d’instaurer un système de protection qui puisse permettre à ces immigrés de rentrer dans leur pays d’origine lorsque la situation s’y sera améliorée, ou tout au moins de s’intégrer pleinement dans la communauté dans laquelle ils se seront installés. En étant trop rigide et en appliquant un système obligatoire, trop contraignant, on risque d’encourager les attitudes extrémistes à l’égard des migrants. Il faut trouver l’équilibre.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Tatsopoulos.

M. TATSOPOULOS (Grèce)* – Dans la littérature, le théâtre et le cinéma, mais aussi dans la vraie vie, nous sommes tous très proches de cette image du bon patron, toujours gentil, poli et cultivé et, du mauvais gardien, toujours brutal et qui joue le mauvais rôle dans l’histoire.

En réalité, nous savons tous que ce mauvais gardien n’est là que pour suivre les ordres du gentil patron, lequel donne les ordres. Parfois, ce gentil patron est très loin ; il n’entend pas les cris des victimes du mauvais gardien. Toutefois, cela ne diminue en rien les responsabilités de ce même patron.

La Grèce est un petit pays qui connaît sa cinquième ou sixième année de crise économique. Le chômage touche aujourd’hui 30 % de la population – 50 % chez les jeunes. Les citoyens subissent une dégradation de leur niveau de vie extrêmement violente, la plus violente, à vrai dire, qu’a connue un pays européen en temps de paix. Notre pays est en situation de crise généralisée. En outre, sa situation géographique et historique attire des personnes qui se trouvent dans des conditions économiques et sociales encore pires que celles des Grecs.

Tous ceux qui arrivent chez nous pensent qu’il s’agit seulement d’une porte d’entrée. Des milliers de personnes arrivent de très loin – par exemple du Bangladesh – en passant par les Emirats arabes unis. Ils sont d’ailleurs convaincus par ceux qui les ont aidés à parvenir jusque chez nous et qui les manipulent qu’ils vont trouver un travail le jour même de leur arrivée ! Ces personnes sont victimes de mensonges. On les dépose en Grèce et ils pensent parfois qu’ils se trouvent dans un autre pays – l’Italie, notamment – et qu’ils arrivent dans un paradis. Quelle n’est pas leur surprise quand ils découvrent que leur rêve n’a rien à voir avec la réalité !

Vous avez pu constater vous-même, Monsieur le Président, l’étendue de cette tragédie. Je ne parlerai pas des conditions qui règnent dans les centres de rétention. Je ne veux pas chercher à mettre une note plus ou moins bonne aux différents centres : les conditions y sont exécrables au regard des standards européens ; c’est une tragédie. La Grèce ne doit pas jouer le rôle du mauvais gardien, pour reprendre l’image que j’ai utilisée au début de mon propos. Nous devons entreprendre une campagne mondiale pour faire comprendre quelles conditions ces immigrés vont rencontrer en arrivant en Grèce. Il faut leur expliquer que ce qu’ils entendent n’est pas vrai. Dublin II doit vraiment être modifié. Nous devons répartir la charge entre tous les pays de l’Union européenne, faute de quoi la Grèce serait de toute façon condamnée à ne pas pouvoir accomplir sa mission.

LE PRÉSIDENT – La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle la réplique de la commission.

Madame la rapporteure, il vous reste 5 minutes. Vous avez la parole.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Je remercie les différents intervenants, qui ont largement adhéré à mon rapport. En Grèce, la situation humanitaire des réfugiés est inacceptable. Il faut donc s’occuper de ce problème. La commission ad hoc incluait – c’était un choix délibéré – tous les groupes politiques, qui étaient représentés notamment par M. Chope, Mme Fiala, M. Santini, Mme Groth, M. Cederbratt, M. Rouquet et M. Mignon.

Nous avons tous eu la même réaction et le même sentiment sur la situation, ce qui est vraiment très important. En effet, même si nous disons que nous ne pouvons pas laisser la Grèce seule face au problème de la crise humanitaire, encore faut-il que nous trouvions un écho dans les parlements nationaux des Etats membres. À la table des négociations, c’est l’impasse : les Etats du Nord et ceux du Sud se battent pour savoir qui doit assumer la responsabilité. Or il faut sortir de cette impasse car les victimes de cette situation sont les demandeurs d’asile qui sont bloqués. Mme Fiala l’a dit à juste titre : certes, il ne faut pas se taire, mais après il faut relayer le message dans les capitales et plaider en faveur d’une solidarité accrue.

M. Schennach a raison : la Grèce a des comptes à rendre, mais on peut utiliser la solidarité européenne pour investir en priorité de façon à améliorer la situation. Il faut, non pas augmenter le nombre de places de rétention, mais investir dans les centres ouverts et utiliser les clauses de sauvegarde en matière d’asile. Cela ne sera possible que si l’on change d’attitude. Il convient de dire aux responsables de Frontex que la dissuasion, c’est bien, mais qu’encourager la protection, c’est mieux.

La Grèce a des responsabilités pour ce qui est de faire évoluer cette situation ; je sais qu’elle est disposée à le faire. La situation des demandeurs d’asile est mauvaise ; cela ne date pas d’hier, ni même du début de la crise financière. La Cour de Strasbourg, il y a deux ans, avait déjà interdit aux Etats membres de renvoyer les gens en Grèce parce que ce pays violait les droits fondamentaux des demandeurs d’asile.

Il y a urgence. On ne peut pas attendre le règlement de la situation financière. Pour l’instant, les hommes politiques sont prudents : ils veulent améliorer la situation des migrants tout en s’occupant de la crise financière, mais ils ont peur que cela n’augmente la xénophobie. Tout au contraire, je suis pour ma part convaincue que, si l’on pérennise la situation actuelle, si tous ces migrants circulent dans les rues et si on ne les aide pas, cela pourrait alimenter les sentiments xénophobes. L’Aube dorée ne peut que tirer parti de la situation actuelle. J’invite donc instamment le Gouvernement grec à améliorer la situation. Il ne faut pas avoir peur d’un effet contre-productif.

M. Chope et M. Neill, entre autres, ont dit qu’il fallait faire le tri entre les demandeurs d’asile, d’une part, et, ceux qui sont en situation de séjour irrégulier d’autre part. Mais c’est exactement ce que fait le rapport. À l’heure actuelle, on retient les gens et on les expulse, ce qui a aussi une incidence sur les réfugiés qui ont fui la guerre en Syrie, lesquels veulent être protégés. Nous sommes donc bien d’accord : il faut faire le tri.

Selon M. Chope, il faut souligner l’importance de prendre des mesures d’ensemble visant à fermer les frontières et empêcher que les migrants irréguliers ne viennent en Europe. Le problème est que l’on ne peut pas distinguer entre migrants irréguliers et demandeurs d’asile avant que ces personnes soient arrivées en Europe. Dissuader, expulser, refouler, c’est une politique aveugle qui interdit de voir si quelqu’un a besoin de protection ou non. Or cela ne se lit pas sur le visage des gens. Il faut donc avoir, en matière d’asile, une procédure adaptée.

La traite et la contrebande sont deux choses différentes, et les passeurs relèvent de la seconde. Mais les réfugiés ne reçoivent pas un visa pour obtenir la protection des pays dans lesquels ils vont se trouver. Ils sont obligés d’avoir recours à des passeurs pour pouvoir entrer en Europe et, ensuite, demander une protection.

M. Chope et d’autres ont donné l’impression que nous étions menacés par une immense vague de migrants irréguliers en Europe. Mais Mme Groth a ramené la problématique à sa juste proportion, en rappelant que le Liban s’apprêtait à accueillir 300 000 réfugiés syriens, alors qu’il s’occupe d’ores et déjà de 400 000 réfugiés palestiniens. Or le Liban est un petit pays, et il est fragile.

Si nous voulons promouvoir la paix et la stabilité de par le monde, il faut assumer nos responsabilités et accueillir les gens qui ont dû fuir leur patrie. Nous devons être généreux, mais aussi rationnels.

Pour finir, je voudrais remercier tous ceux qui nous ont permis de faire ce rapport. Je remercie M. Mignon, M. Rouquet et tous les membres de la commission ad hoc d’avoir été présents lors de la visite. Merci à M. Santini, qui est à l’origine de cette demande de débat d’urgence. Merci au personnel du secrétariat qui nous a aidés pendant la visite et nous a permis de ficeler ce rapport en très peu de temps.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le président de la commission.

M. SANTINI (Italie), président de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées* – Je commencerai moi aussi par une série de remerciements qui n’ont rien de rituels. Merci à Mme Strik, notre rapporteure, pour avoir su insuffler de la passion dans ce rapport très volumineux ; merci au secrétariat, qui a su gérer le dossier en un temps record ; merci à vous, Monsieur le Président, d’être venu avec nous en Grèce – avoir parmi nous le Président de l’Assemblée du Conseil de l'Europe a évidemment beaucoup rehaussé l’importance de notre délégation – ; et merci de m’avoir soutenu sans réserve au Bureau lorsque j’ai proposé le débat d’urgence.

De nombreux collègues sont intervenus avec passion, ce qui confirme la pertinence de notre choix. Ce débat ne porte pas que sur la Grèce, mais il est vrai que ce pays est en première ligne, et ce pour deux raisons. D’abord, il reçoit un afflux considérable et imprévu de migrants provenant de nombreux pays, parfois lointains : la Syrie, bien sûr, mais aussi d’autres pays africains et asiatiques comme le Pakistan ou l’Afghanistan. Ensuite, cet afflux intervient au moment où sévit une crise économique particulièrement grave. Le fait que la Grèce soit en proie à cette crise depuis des années ne facilite pas les choses et ne lui permet sans doute pas d’accorder toute l’aide qu’elle souhaiterait donner aux migrants.

Nous lançons donc un appel à tous les pays d’Europe pour qu’ils acceptent de porter une partie de ce fardeau, y compris sur le plan économique. Quelqu’un a noté que la plupart des migrants ne souhaitaient pas rester en Grèce mais voulaient se rendre dans des pays qui, économiquement, s’en sortent mieux, comme l’Italie, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni ou la Suède. J’appelle donc ces pays à accepter d’accueillir physiquement un certain nombre de ces migrants, sans se contenter d’une aide économique.

Par ailleurs, les demandes d’asile doivent être traitées très rapidement et l’asile doit être accordé à ceux qui y ont droit. Mais quand il existe des dizaines de milliers de dossiers en souffrance, on ne peut se contenter d’accuser les lenteurs de l’administration. Une telle situation s’explique par l’afflux brutal de candidats au refuge, qui se retrouvent finalement coincés, attendant souvent un an que leur cas soit tranché.

Nous voulons obtenir des réponses très précises de la part des autorités politiques et administratives de la Grèce. En particulier, elles doivent promettre de fermer trois centres où nous avons constaté que les conditions de vie n’étaient plus tolérables. Nous voulons également obtenir l’engagement que des femmes et des enfants ne seront plus mis derrière les barreaux simplement parce qu’ils sont des migrants irréguliers. Si nous obtenons cela, du point de vue du Conseil de l'Europe, ce sera déjà un résultat concret. Cela permettra aux migrants de se sentir moins isolés, et à la Grèce de se sentir moins seule dans le concert des pays civilisés d’Europe. Le Conseil de l'Europe doit par ailleurs accorder un soutien sans faille à ce pays.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close.

La commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées a présenté un projet de résolution sur lequel sept amendements ont été déposés, ainsi qu’un projet de recommandation sur lequel quatre amendements ont été déposés.

La parole est à M. Schennach.

M. SCHENNACH (Autriche)* – Je souhaite juste corriger un propos que j’ai tenu tout à l’heure. Emporté par l’émotion, j’ai évoqué la présence de charniers en Turquie. Ils sont en fait en Grèce.

LE PRÉSIDENT – J’autorise Mme Bakoyannis à répondre rapidement.

Mme BAKOYANNIS (Grèce) – J’ai déjà entendu beaucoup de choses, mais c’est la première fois que j’entends parler de charniers en Grèce. Il n’existe rien de tel ! Faites un peu attention, mon cher collègue. Je sais que l’Autriche n’est pas située aux frontières de l’Europe, mais vous pouvez nous accorder un minimum de respect !

LE PRÉSIDENT – Je le répète, la discussion générale est close.

Nous allons tout d’abord examiner le projet de résolution sur lequel sept amendements ont été déposés. Le président de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées demande l’application de l’article 33-11 du Règlement.

L’amendement no 11 sur le projet de résolution a été adopté à l’unanimité par la commission. L’amendement n6 a également été adopté à l’unanimité. Toutefois, comme il fait l’objet d’un sous-amendement oral, il sera discuté selon les modalités habituelles.

En est-il bien ainsi, Monsieur le président ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission* - Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT - L’amendement no 11, déposé par Mmes Strik, von Cramon-Taubadel, MM. Szabó, Strässer, Sudarenkov, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 12.5, à supprimer les mots « de la fondation Soros ».

Y a-t-il une objection à son adoption ?

L’amendement no 11 sur le projet de résolution est donc déclaré adopté définitivement.

Nous en venons à la discussion des autres amendements.

Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement no 2, déposé par M. Chope, Earl of Dundee, Dame Angela Watkinson, MM. David Davies, Clappison, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 2, à supprimer les mots « des migrants en situation irrégulière, ».

La parole est à M. Chope pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – La rapporteure a reconnu qu’il était très important d’établir une distinction entre les demandeurs d’asile et les réfugiés, d’un côté, et les migrants en situation irrégulière, de l’autre. Notre amendement vise justement à établir cette distinction. Car le problème est devenu ingérable du fait de tous ces migrants en situation irrégulière.

LE PRÉSIDENT – La parole est à est Mme la rapporteure contre l’amendement.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Avec cet amendement, vous refusez de voir le problème dans son intégralité. Nous sommes là au début du texte, on décrit une situation, on peut donc penser qu’en temps normal, les pays sont en situation de faire face à l’afflux des personnes qui demandent une protection. Certes, en Grèce, on est dans une situation extraordinaire, car l’afflux de personnes fait exploser les cadres habituels, mais là on parle de tout le monde, je ne vois donc pas pourquoi on devrait établir cette distinction.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission* – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n2 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 3, déposé par M. Chope, Earl of Dundee, Dame Angela Watkinson, MM. David Davies, Clappison, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 14.1, à supprimer les mots « des migrants en situation irrégulière et ».

La parole est à M. Chope pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – De la même façon cet amendement vise à établir une distinction en termes de politique de détention, entre ceux qui cherchent à manipuler le système et les demandeurs d’asile qu’il ne faut pas mettre derrière les barreaux.

LE PRÉSIDENT – La parole est à est Mme la rapporteure, contre l’amendement.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – En fait, on demande à la Grèce de revoir sa politique en matière de rétention des migrants en situation irrégulière. Mais on ne dit pas qu’il ne faut jamais mettre un migrant en situation irrégulière en prison. On demande simplement de revoir la situation en général en étudiant les dossiers. S’agissant des femmes et des mineurs, n’oublions pas que leur mise en détention bafoue nos principes des droits de l’homme.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission* – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n3 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 4, déposé par MM. Chope, David Davies, Dame Angela Watkinson, Earl of Dundee, Mme Gillan, MM. Clappison, Aligrudić, Baroness Eccles, M. Evans, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 14.1.2, à remplacer les mots « et opérer une distinction entre les demandeurs d’asile et les migrants en situation irrégulière » par les mots suivants : « des demandeurs d’asile ».

La parole est à M. Chope pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Cet amendement a toujours le même objectif : établir une distinction s’agissant de la détention des demandeurs d’asile et des migrants en situation irrégulière. En ce qui concerne ces derniers, il n’est pas besoin de réduire leur durée de détention, contrairement aux demandeurs d’asile, l’idéal étant de ne jamais les mettre derrière les barreaux !

LE PRÉSIDENT – La parole est à est Mme la rapporteure, contre l’amendement.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Nous parlons là de réduire la durée de détention. Comme je l’ai déjà dit, parfois les personnes sont emprisonnées durant 18 mois sans que l’on se penche sur leur situation, c’est une véritable violation de droits de l’homme !

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n4 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 5, déposé par MM. Chope, David Davies, Dame Angela Watkinson, Earl of Dundee, Mme Gillan, MM. Clappison, Aligrudić, Baroness Eccles, M. Evans, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 15.1, à insérer le paragraphe suivant : « à réintroduire une obligation de visa pour ceux qui arrivent en Turquie en provenance du Maghreb ; »

La parole est à M. Chope pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Il s’agit là de prévoir la réintroduction d’une obligation de visa pour ceux qui arrivent de Turquie en provenance du Maghreb. Cela aiderait le pays à combattre la traite des personnes. Aujourd’hui, pour 50 livres sterling vous vous rendez du nord de l’Afrique en Turquie, ce qui alimente les circuits de passeurs.

LE PRÉSIDENT – La parole est à est Mme la rapporteure ? contre l’amendement.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Parler de la politique des visas ne nous incombe pas, n’outrepassons pas notre mandat. La commission des migrations doit s’occuper des droits de l’homme, des migrations en général, mais ne doit pas s’immiscer dans les choix des pays.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n5 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 1, déposé par Mme Gündeş Bakir, MM. Kayatürk, M. Dişli, Mme Erkal Kara, M. Türkeş, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 15.4.

La parole est à Mme Gündeş Bakir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – La réserve géographique appliquée par la Turquie est un droit reconnu par l’article 1-B de la Convention de Genève de 1951. Le paragraphe 15-4 de ce projet de résolution est en contradiction avec l’arrêt AG et autres c. la Turquie rendu par la Cour européenne des droits de l’homme, stipulant que cela ne peut être considéré comme une discrimination au regard des droits définis dans la Convention européenne des droits de l’homme. Imposer une décision contraire reviendrait à violer les droits souverains de la Turquie. C’est la raison pour laquelle nous proposons la suppression du paragraphe 15-4.

LE PRÉSIDENT – La parole est à est Mme la rapporteure, contre l’amendement.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Le Conseil de l'Europe a invité à maintes reprises la Turquie à lever cette réserve géographique car cette limite signifie que seuls les réfugiés qui fuient l’Europe peuvent solliciter l’asile et obtenir un statut de protection. Or je ne pense pas qu’il y ait énormément de réfugiés provenant d’Europe ! En revanche, nombreux sont ceux qui viennent des autres régions du monde. Et la Turquie doit également les assumer. C’est vrai, les réfugiés syriens sont accueillis très généreusement, mais ne sont traités que comme des invités. Il faudrait qu’ils aient accès à un réel statut de protection.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n1 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 6, déposé par MM. Chope, David Davies, Dame Watkinson, Earl of Dundee, Mme Gillan, MM. Clappison, Aligrudić, Baroness Eccles, M. Jonathan Evans, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 15.4, à insérer le paragraphe suivant : « à honorer son accord avec la Grèce en faveur du renvoi de migrants qui sont entrés en Grèce sans autorisation de la Turquie. »

La parole est à M. Chope pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Il existe un protocole de réadmission qui a été signé entre la Grèce et la Turquie en 2010. Je demande simplement que celui-ci soit honoré. Il n’y a eu que 105 réadmissions en 2012 en Turquie.

LE PRÉSIDENT – La présidence a été saisie par Mme Strik du sous-amendement oral suivant : « A la fin de l’amendement no 6, ajouter les mots « dans le respect du principe de non refoulement » ».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent. Y a-t-il des objections à la prise en compte de ce sous-amendement oral ?

Il n’y en a pas. Nous allons procéder à son examen.

La parole est à Mme Strik pour le soutenir.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Je ne saurais souscrire à l’amendement de M. Chope en l’état puisque les demandeurs d’asile qui sont refoulés en Turquie n’ont pas toujours l’accès à une procédure de demande d’asile en raison de la limitation géographique. Mais je pourrais y souscrire s’il était indiqué très clairement que la Grèce évaluait le besoin de protection de ces personnes, et que si elle considérait qu’elles n’étaient pas protégées, alors le protocole de réadmission pourrait s’appliquer.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de l’auteur de l’amendement ?

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Favorable.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – Favorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix le sous-amendement.

Le sous-amendement est adopté.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission sur l’amendement modifié ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – Favorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n6, modifié, est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc.13106, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté. (114 voix pour, 1 voix contre, 5 abstentions)

LE PRÉSIDENT – Nous allons maintenant examiner le projet de recommandation sur lequel quatre amendements ont été déposés.

Les amendements seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte, tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement no 7, déposé par MM. Chope, David Davies, Dame Watkinson, Earl of Dundee, Mme Gillan, MM. Clappison, Aligrudić, Baroness Eccles, M. Jonathan Evans, tend, dans le projet de recommandation, avant le paragraphe 4.1, à insérer le paragraphe suivant : « d’encourager les Etats membres à féliciter la Grèce pour ses récents succès en matière d’interception, de détention et de sanction de ceux qui s’engagent dans le commerce infâme de la traite des êtres humains ; »

La parole est à M. Chope pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Cet amendement vise à ajouter le paragraphe suivant : « d’encourager les Etats membres à féliciter la Grèce pour ses récents succès en matière d’interception, de détention et de sanction de ceux qui s’engagent dans le commerce infâme de la traite des êtres humains. »

Les membres de notre Assemblée veulent-ils avaliser une politique d’impunité à l’égard des passeurs et des trafiquants ou, au contraire, les sanctionner ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Strik, contre l’amendement.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Nous avons essayé de rendre la recommandation plus efficace. Or, la proposition qui nous est faite ne me semble pas une orientation appropriée. Vous demandez au Comité des Ministres d’encourager les Etats à féliciter un pays, je ne sais s’il ne serait pas préférable de voter des recommandations plus ciblées et pertinentes, susceptibles d’être appliquées.

J’émets également quelque objection quant à la teneur même de cet amendement. Il fait référence à ceux qui s’engagent dans le trafic ; en l’occurrence, il s’agit de passeurs, ils ne font pas de la traite d’êtres humains. Je crois qu’il convient de procéder à un distinguo. Au reste, nous reviendrons demain sur la traite en tant que telle, puisqu’un rapport sur la traite des travailleurs migrants à des fins de travail forcé sera présenté.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – Avis défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 7 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 8, déposé par M. Chope, Mme Kanelli, Dame Watkinson, Earl of Dundee, M. Clappison, Mme Gillan, Baroness Eccles, M. Evans, tend, dans le projet de recommandation, après le paragraphe 4.4, à insérer le paragraphe suivant : « d’étudier comment les Etats membres du Conseil de l’Europe peuvent aider la Grèce dans son important travail visant à démanteler les réseaux de trafic illicite de migrants et à arrêter les trafiquants ; »

La parole est à M. Chope pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Mme la rapporteure me rétorquera sans doute qu’il ne s’agit pas de trafiquants, mais des preuves de traite nous ont pourtant bien été fournies lorsque nous nous sommes rendus en Grèce. Dès lors, pourquoi ne pas viser à emprisonner ces trafiquants qui pratiquent la traite des êtres humains et qui provoquent même la perte de nombreuses vies humaines ?

LE PRÉSIDENT – La présidence a été saisie par Mme Strik du sous-amendement oral suivant : « A l’amendement no 8, supprimer les mots « et à arrêter les trafiquants » »

J’estime que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Y a-t-il des objections à la prise en compte de ce sous-amendement oral ?… Ce n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

La parole est à Mme Strik, pour soutenir le sous-amendement oral.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Pour les raisons précédemment exposées, il convient d’établir une distinction entre trafiquants et passeurs. C’est pourquoi je propose de retirer le dernier membre de phrase, auquel cas, je pourrais soutenir l’amendement.

LE PRÉSIDENT – Quelqu’un demande-t-il la parole contre le sous-amendement oral ?… Ce n’est pas le cas.

Quel est l’avis de l’auteur de l’amendement sur le sous-amendement oral ?

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Je suis opposé à l’amendement, car les passeurs participent d’un processus qui permet aux trafiquants de fonctionner ; passeurs et trafiquants sont donc indissociablement liés. Sans quoi, on perd la notion de détention. C’est pourquoi il faut encourager la Grèce et les autres pays à appréhender les personnes qui se livrent à une telle activité. Ce serait une erreur d’omettre ce point dans le texte.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement oral ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – La commission a émis un avis favorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix le sous-amendement oral.

Le sous-amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous revenons à l’amendement no 8, ainsi modifié.

Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – Favorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement modifié.

L’amendement no 8 modifié est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 9, déposé par M. Chope, Dame Watkinson, Earl of Dundee, M. Clappison, Mme Gillan, Baroness Eccles, tend, dans le projet de recommandation, après le paragraphe 4.4, à insérer le paragraphe suivant : « de faciliter de toute urgence une discussion devant le Comité des Ministres sur les mesures supplémentaires à prendre pour prévenir et empêcher l’entrée illégale de migrants économiques qui ne sont pas des réfugiés, des demandeurs d’asile et qui n’ont pas besoin d’une protection internationale dans des Etats membres du Conseil de l’Europe ; »

La parole est à M. Chope pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Je ne crois pas que l’on puisse présenter des arguments contre le bien-fondé d’un tel amendement.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Strik, contre l’amendement.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – Cet amendement est contraire au principal message contenu dans le rapport. En effet, nous réclamons davantage de mesures dissuasives. Certes, il faut faire face à la migration irrégulière, mais il faut en premier lieu déterminer s’il y a ou non besoin d’une protection spéciale. Or, cela n’est pas possible avant l’entrée dans le pays. Des mesures de dissuasion générale créent un risque, celui de voir l’Europe violer certains droits de l’homme.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission – La commission a émis un avis défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 9 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 10, déposé par M. Chope, Earl of Dundee, Dame Watkinson, M. Clappison, Mme Gillan, Baroness Eccles, M. Evans, tend, dans le projet de recommandation, après le paragraphe 4.4, à insérer le paragraphe suivant : « d’encourager les Etats membres du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne à envisager de soumettre l’aide financière à des pays comme l’Afghanistan, le Pakistan et le Bangladesh, à la condition que ces pays soient prêts à accepter le retour de leurs ressortissants qui sont entrés en Grèce sans autorisation légale et ne sont ni des demandeurs d’asile, ni des réfugiés ; »

La parole est à M. Chope, pour le soutenir.

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – L’amendement no 10 est très précis, car des preuves nous ont été apportées par la Grèce, indiquant que le retour vers l’Afghanistan, le Pakistan et le Bangladesh s’avérait souvent compliqué. Je vous renvoie à mon intervention où j’ai évoqué un jeune Afghan qui était revenu délibérément en Europe après avoir été expulsé du Royaume-Uni. La Grèce et d’autres pays de l’Union européenne apportent une aide financière substantielle à ces pays. Il conviendrait peut-être de subordonner cette aide au fait qu’ils acceptent le retour de leurs ressortissants.

LE PRÉSIDENT – La présidence a été saisie de deux sous-amendements oraux.

Le premier est le suivant : « A l’amendement no 10, remplacer les mots " envisager de soumettre l’aide financière à des pays comme l’Afghanistan, le Pakistan et le Bangladesh à la condition que ces pays soient prêts à accepter " par les mots " avoir une position plus ferme contre les pays refusant " ».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Y a-t-il des objections à la prise en compte de ce sous-amendement oral ?

Il n’y en a pas. Nous allons donc procéder à son examen.

La parole est à Mme Strik pour le soutenir.

Mme STRIK (Pays-Bas), rapporteure* – J’admets l’existence du problème : certains pays n’ont pas à refuser le retour de leurs ressortissants entrés en Grèce sans autorisation légale, dès lors que ceux-ci n’ont pas besoin de protection particulière. Toutefois, l’amendement de M. Chope, trop concret, tend à interférer sur les politiques d’aide publique au développement et sur les politiques des visas – ce qu’une organisation comme la nôtre, qui vise à défendre les droits de l’homme, n’a pas à faire. Je ne crois pas qu’il faille aller aussi loin ; c’est pourquoi j’ai déposé ce sous-amendement.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de l’auteur de l’amendement sur ce sous-amendement oral ?

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Que signifie « avoir une position plus ferme » ? Mon amendement était beaucoup plus précis : il désignait nommément trois pays dont l’attitude pose des problèmes concrets pour la Grèce. Je rappelle en effet qu’une grande proportion des migrants entrant en Grèce proviennent de ces trois pays, et que ceux-ci en refusent le retour car ils nient, en dépit de toutes les preuves, qu’ils en soient originaires. Avis défavorable, donc.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix ce premier sous-amendement oral.

Ce sous-amendement est adopté.

LE PRÉSIDENT – Un second sous-amendement oral vient d’être déposé. Je vous en donne lecture : « Après les mots " en Grèce " insérer les mots " et Turquie " ».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Y a-t-il des objections à la prise en compte de ce sous-amendement oral ?

Il n’y en a pas. Nous allons donc procéder à son examen.

La parole est à Mme Gündeş Bakir pour le soutenir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – L’immigration illégale est un problème non seulement pour la Grèce, mais aussi pour la Turquie. Les mesures de protection devraient donc être étendues à celle-ci.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de l’auteur de l’amendement ?

M. CHOPE (Royaume-Uni)* – Je serai heureux de l’accepter dans un esprit de solidarité vis-à-vis de la Grèce et de la Turquie.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission* – Ce sous-amendement n’ayant pas été présenté à la commission, nous nous en remettons à la sagesse de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – Le grand nombre de parlementaires présents dans l’hémicycle est d’ailleurs un signe de l’intérêt que suscite ce débat !

Je mets aux voix ce second sous-amendement oral.

Le sous-amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission sur l’amendement ainsi modifié ?

M. SANTINI (Italie), président de la commission* – Favorable.

L’amendement n°10 modifié est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc.13106, tel qu’il a été amendé. Je vous signale que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

Le projet de recommandation, amendé, est adopté (126 voix pour, 3 voix contre, 2 abstentions).

5. Remerciements à Mme Renate Wohlwend

LE PRÉSIDENT – Avant de céder la présidence de la séance à M. Boden, je voudrais saluer Mme Wohlwend, qui participe à sa dernière session parlementaire.

Mme Wohlwend est membre de cette Assemblée depuis 1994 ; elle a été l’auteur d’une vingtaine de rapports particulièrement importants. S’étant prise de passion pour nos travaux, elle a toujours été très assidue aux réunions des commissions et en séance plénière, et ses prises de parole ont toujours été remarquables et remarquées. Elle fait partie de celles et de ceux qui auront marqué l’histoire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et de l’ensemble de l’Organisation.

En votre nom à tous, je la remercie et lui souhaite bonne chance pour la suite. Madame Wohlwend, croyez bien que nous vous regretterons !

Bien entendu, vous avez la parole.

Mme WOHLWEND (Liechtenstein)* – Monsieur le Président, je voudrais adresser un grand merci à vous ainsi qu’à tous les collègues qui m’ont soutenue dans mon travail. Comme vous l’avez dit, j’ai rédigé plusieurs rapports, notamment pour la commission des questions juridiques et des droits de l’homme ; j’ai fait des rencontres très enrichissantes, je me suis fait des amis, et je leur rendrai visite, ainsi qu’à tous mes anciens collègues, lorsque je reviendrai à Strasbourg en tant que touriste !

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Volontè.

M. VOLONTÈ (Italie)* – Au nom du Groupe du Parti populaire européen, je veux remercier Mme Wohlwend pour son travail durant toutes ces années. Merci, Renata, pour votre passion pour les droits de l’homme et pour votre compétence. Vous avez fait partie de plusieures commissions, et votre passage à la commission chargée de l’élection des juges aura marqué la vie de cette Assemblée et de notre groupe. Vous êtes un exemple pour nous tous !

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, je rappelle que M. Füle ne pourra s’adresser à notre Assemblée que cet après-midi, après la fin de second débat selon la procédure d’urgence que nous allons commencer maintenant.

M. Boden, Vice-Président, remplace M. Mignon au fauteuil présidentiel.

6. Les développements récents au Mali et en Algérie et la menace pour la sécurité et les droits de l’homme dans la région méditerranéenne

Débat selon la procédure d’urgence

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle le débat selon la procédure d’urgence sur « Les développements récents au Mali et en Algérie et la menace pour la sécurité et les droits de l’homme dans la région méditerranéenne », présenté par Mme Woldseth, au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc.13107).

Pour ce débat, le temps de parole des orateurs est limité à trois minutes, ainsi que l’a décidé l’Assemblée lors de sa séance de lundi matin. Nous achèverons ce débat cet après-midi, à la reprise de la séance, à 15 h 30.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de treize minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Vous avez la parole.

Mme WOLDSETH (Norvège), rapporteure de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Lors de la partie de session du mois d’octobre, la commission des questions politiques a évoqué le conflit du Mali et ses conséquences humanitaires et sécuritaires sur le Sahel et la région de l’Afrique du Nord. Lundi matin, le Bureau a décidé d’organiser ce débat d’urgence sur l’évolution de la situation au Mali et en Algérie et sur la menace qu’elle fait peser sur la sécurité et les droits de l’homme dans la région méditerranéenne. C’est la première fois que je présente un débat d’urgence et j’ai dû préparer cette intervention dans un temps très court. Je vous demande donc de bien vouloir m’excuser si je commets des erreurs.

Nous sommes très préoccupés aujourd’hui par la situation au Mali et en Algérie. La sécurité se détériore dans cette région et les droits de l’homme sont violemment bafoués, ce qui fait peser de lourdes menaces sur la région méditerranéenne. La prise d’otages d’In Amenas le 16 janvier dernier en témoigne. Des centaines d’Algériens et de travailleurs étrangers travaillant sur le site gazier ont été pris en otage par un groupe terroriste. Un grand nombre d’entre eux ont été tués et cinq sont encore portés disparus. L’Algérie est un voisin immédiat du Conseil de l'Europe. C’est pourquoi ce débat est aujourd’hui particulièrement important.

Le conflit du Mali, qui a éclaté en janvier 2012, trouve ses racines dans la volonté d’indépendance du peuple touareg depuis des années. L’Assemblée parlementaire se félicite que les rebelles touaregs aient renoncé à cette aspiration pour revendiquer désormais l’autonomie politique à l’intérieur du Mali. Ils ont même déclaré vouloir s’engager dans la lutte contre le terrorisme.

Les événements du Mali et de l’Algérie ont directement affecté la Norvège. En effet, le site gazier d’In Amenas était dirigé en partie avec une entreprise norvégienne, Statoil, en coopération avec BP et Sonatrach, la compagnie algérienne. A ce jour, cinq Norvégiens sont encore portés disparus. Cette attaque terroriste est l’une des pires que mon pays ait connues contre ses intérêts commerciaux. Je connaissais personnellement l’un des Norvégiens pris en otage. Huit familles norvégiennes ont retrouvé leurs proches sains et saufs. Trente-sept familles dans le monde ont perdu un être cher. Nous ne devons pas oublier non plus que de nombreuses familles algériennes sont dans le deuil.

Nous ne pouvons pas rester les bras croisés face à des tragédies de cet ordre. L’escalade du conflit au Mali a directement affecté l’Europe. Le Premier ministre norvégien, M. Stoltenberg, a déclaré hier devant l’Assemblée norvégienne : « On ne doit pas permettre aux terroristes d’atteindre leurs objectifs. Ce ne sont pas eux qui vont décider de la manière dont nous allons vivre, dont les entreprises norvégiennes font des affaires ou dont nos pays coopèrent entre eux. Ils ne réussiront pas à instaurer la terreur. » M. Stoltenberg a également souligné que la Norvège est et restera une démocratie ouverte.

Le Gouvernement norvégien, pendant toute la crise des otages, est resté en contact étroit avec l’ensemble des pays concernés, y compris l’Algérie. Pour M. Stoltenberg, la lutte contre la terreur doit être renforcée. Je partage pleinement cette position. Un échange de vues a suivi le discours du Premier ministre au Parlement norvégien. Tous les partis politiques de mon pays s’accordent sur la nécessité de lutter contre le terrorisme par des moyens politiques. Nous devons concentrer nos efforts sur les outils politiques dont nous disposons au Conseil de l'Europe. Démocratie, droits de l’homme, Etat de droit : voilà les piliers de notre Organisation, indispensables pour maintenir une coexistence pacifique à l’intérieur et entre les pays. Notre Organisation est basée sur des droits et des valeurs universels. Nous devons rester unis et condamner d’une voix unanime le terrorisme.

Je suis particulièrement préoccupée par le sort actuel des femmes et des enfants au Mali. Les femmes sont harcelées et subissent des violences, notamment des violences sexuelles perpétrées par les terroristes. Les enfants sont recrutés comme soldats. C’est tout à fait intolérable et l’on peine à imaginer la peur que doivent ressentir ces femmes et ces enfants. Les droits de la Convention universelle des droits de l’homme des Nations Unies sont enfreints quotidiennement. Nous devons lutter contre les terroristes dans cette région et partout ailleurs dans le monde.

Les terroristes sont originaires du monde entier. Il y avait trois Canadiens parmi ceux qui ont participé à la prise d’otages d’In Amenas. Personne ne doit vivre dans la terreur et j’en appelle aux Etats membres du Conseil de l'Europe pour qu’ils soutiennent la lutte contre le terrorisme dans la région, sous l’égide du Conseil de sécurité des Nations Unies. Il faut également appeler les autorités du Mali à rédiger une feuille de route pour restaurer l’ordre constitutionnel et l’unité du pays.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Madame la rapporteure, il vous restera cinq minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Mariani, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

M. MARIANI (France) – L’enjeu de la crise saharienne actuelle est immense. Il s’agit de savoir si un vaste foyer de guérilla islamiste pourra ou non s’installer durablement dans cette zone. Les troubles ne sont pas nouveaux mais nous sommes désormais arrivés à un point de rupture. Les groupes terroristes tentent d’étendre à tout le Mali le régime islamiste qu’ils ont installé par la force dans le nord. Ils menacent non seulement l’existence même du pays, mais aussi la pérennité des régimes démocratiques de la région.

Le 20 décembre, les Nations Unies ont adopté la Résolution 2085 qui prévoit le déploiement d’une force africaine, la Misma. Mais l’avancée des groupes terroristes a conduit le Président malien à demander l’assistance militaire de la France, pays avec lequel le Mali a des relations particulières. L’opération française Serval a donc débuté, largement soutenue par la communauté internationale. Les résultats sont là : l’offensive des groupes terroristes a été stoppée net, et c’était bien l’urgence.

Le déploiement rapide de la Misma est la prochaine étape. La CEDEAO et les pays africains mobilisés contre le terrorisme devront être soutenus dans ce sens.

Quelle sera la suite ? La lutte contre le terrorisme concerne l’ensemble de la zone saharienne. Ces groupes déterminés, lourdement armés, constituent une menace pour les Etats fragiles de la région et les populations. Chacun sait qu’ils financent leurs activités par toutes sortes de trafic, dont la drogue et les armes.

Madame la rapporteure, comme vous le rappelez à juste titre dans le projet de résolution, nous devons aussi nous inquiéter de l’infiltration au Mali de cellules terroristes venues du monde entier. Les méthodes employées sont en effet similaires à celles déjà rencontrées en Somalie ou en Afghanistan. Les actes perpétrés dans le sanctuaire islamiste installé à Tombouctou ont été particulièrement odieux. Le traitement infligé aux femmes et aux jeunes filles a été dégradant et intolérable. Il est surtout contraire aux traditions de ce pays, adepte d’un islam tolérant.

Ces violations répétées des droits de l’homme, ces atteintes à tous les droits, y compris culturels et religieux, doivent être condamnées avec force par notre institution. Et il est tout à fait regrettable qu’un pays avec lequel le Conseil de l’Europe a des liens particuliers, je veux parler de l’Egypte, ait condamné en début de semaine, par la voix de son président, l’intervention française.

Madame la rapporteure, il est vrai que la « feuille de transition » doit être finalisée, mais cela ne sera possible qu’une fois que la guerre contre ces groupes terroristes sera achevée et la paix retrouvée. Le chemin peut être long, car nos adversaires sont déterminés. Déterminés à lutter contre l’Etat de droit, déterminés à combattre la démocratie, déterminés à enfermer les populations dans les profondeurs de l’obscurantisme. Ils sont déterminés à détruire les valeurs que nous défendons.

C’est pourquoi, chers collègues, au nom du Groupe du Parti populaire européen, je vous demande de soutenir le projet de résolution présenté par Mme Woldseth.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Lord Anderson, au nom du Groupe socialiste.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – Au nom du Groupe socialiste, je félicite vivement notre rapporteure. La région dont nous discutons était appelée par Churchill « le ventre mou de l’Europe ». Nous avons donc un intérêt à maintenir la stabilité dans la région et à promouvoir le développement humanitaire de cette région.

L’Algérie a connu dans son histoire récente des attentats terroristes violents, il faut donc comprendre sa réaction virulente à l’attaque de l’unité de production de gaz d’In Amenas. En ce qui concerne le Mali, le contexte immédiat est clair : un groupe bien armé de combattants provenant de Lybie a mis en fuite les forces locales. Ces forces armées n’auraient pas progressé si elles avaient rencontré un Etat stable et bien gouverné. Cette région a donc une histoire de fragilité, de négligence du nord du Mali, de pauvreté et de mauvaise gouvernance.

Quelle devrait être la réponse de l’Occident ? Avant tout, une réponse militaire immédiate de la France était nécessaire. Je félicite le Gouvernement français et nos collègues français car sans cette réaction, Bamako serait tombée et serait devenue une base terroriste. Bien sûr, cette intervention s’est faite dans le respect du droit international.

Les armées française et malienne ont besoin du soutien d’autres pays. Le Royaume-Uni a offert des transports, des forces spéciales, nos troupes sont en alerte et nous participons à la mission de formation de l’armée sous l’égide de l’Union européenne. Les pays de la région doivent toujours être en pointe. Nous devons être prêts, si on nous le demande, à fournir des formations comme nous le faisons avec la CEDEAO. Mais ce cas illustre que la diplomatie a parfois besoin du renfort, réel ou potentiel, de la force armée.

Deux remarques pour finir : nous ne devons pas laisser ces agissements terroristes nous faire oublier les bonnes nouvelles en provenance d’Afrique et de la région. Je pense par exemple au Maroc et au Ghana. En second lieu, nous devons reconnaître qu’en fin de compte, il faut une solution politique. Il faut une stabilité à long terme non seulement au Mali, mais dans toute la région. Nous devons aider les pays de la région, non pas dans l’ancien esprit colonial, mais si on nous le demande, afin de les assister dans la construction de structures démocratiques. Et aucune institution n’est mieux placée pour cela que le Conseil de l’Europe.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Schuster, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe.

Mme SCHUSTER (Allemagne)* – Au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe, je voudrais remercier la rapporteure. Les attaques terroristes sur le site gazier doivent être condamnées. Et c’est avec compassion que l’on doit s’exprimer à l’égard des victimes.

Nous condamnons les graves violations des droits de l'homme dans le nord du Mali. Dans le rapport du HCR, il est fait état d’exécutions, de mutilations et de tortures perpétrées par les extrémistes islamistes. Dès lors, il est juste que la Cour pénale internationale enquête sur le sujet. Mais il y a d’autres rapports préoccupants. Les troupes maliennes également se rendraient coupables de violations des droits de l'homme. On ne peut pas tolérer cela.

Plusieurs points importants doivent être mentionnés. La situation humanitaire va s’exacerber. Le HCR table sur 700 000 personnes qui seront poussées à fuir leurs foyers. Dès lors il est important d’impliquer les foyers limitrophes ainsi que le Mali pour que l’on puisse alimenter les personnes et que ces dernières aient accès à des soins médicaux.

La Résolution 2085 du Conseil de sécurité des Nations Unies est une chose, mais il faut également penser au processus politique. N’oublions pas que le gouvernement de transition est chargé de mettre au point une feuille de route pour un processus politique. Les problèmes que l’on connaît depuis longtemps ne peuvent pas être réglés sans ce processus politique et sans l’implication des Etats voisins. Dès lors, il faut dialoguer pour penser à d’autres mesures dans le contexte de la coopération au développement.

Enfin, les intérêts en matière de sécurité ont été malmenés. C’est un danger pour l’Afrique et pour l’Europe. Partout où le terrorisme se répand, notre sécurité est menacée. En tant qu’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, il est important de s’occuper du Mali, de la région et des pays voisins.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Walter, au nom du Groupe démocrate européen.

M. WALTER (Royaume-Uni)* – Monsieur le Président, je remercie le Bureau d’avoir accepté ma proposition de tenir ce débat aujourd’hui. Je tiens également à féliciter la rapporteure pour son excellent travail.

Soyons clairs s’agissant d’Al-Qaida au Maghreb islamique. C’est une organisation islamiste basée au Mali qui vise à renverser le Gouvernement d’Algérie pour y installer un Etat islamiste. Ce groupe a déclaré son intention d’attaquer des cibles algériennes, espagnoles, françaises et américaines. Elle a été désignée comme organisation terroriste par le Département d’Etat des Etats-Unis ainsi que par l’Union européenne. Ce groupe est lourdement impliqué dans le trafic de stupéfiants et d’autres activités criminelles, et s’est spécialisé dans le rançonnement d’otages afin de lever des fonds.

Ses racines se trouvent dans la féroce guerre civile algérienne du début des années 1990, mais il a évolué depuis vers un programme islamiste international. Son aire influence s’est étendue dans le Sahel au sud du Sahara, recrutant des membres venus de Mauritanie, du Maroc, du Niger, du Sénégal ainsi que du Mali où, allié à d’autres islamistes, il combat les troupes françaises sur le terrain.

Profitant de la crise malienne, ce groupe a fortement gagné en importance, lui permettant d’avancer dans son projet de diffuser la loi islamique et le djihad en Afrique de l’Ouest. C’est l’une des régions où les groupes sont le mieux armés en raison de l’argent qu’ils récoltent par le biais des enlèvements d’Occidentaux et du trafic de drogue et de cigarettes dans le Sahara. Des campagnes antiterroristes les ont repoussés des côtes méditerranéennes algériennes vers la région du Sahel – Niger, Mauritanie et Mali. C’est alors que leurs groupes ont installé des points d’appui dans les grandes villes. Ils ont été très actifs en Irak également, contre les Etats Unis, en commettant des attentats-suicides.

Néanmoins, contrairement à d’autres groupes affiliés à Al-Qaida, ils n’ont pas pu faire sauter des cibles en Europe ou aux Etats-Unis, mais ils ont fait peser des menaces dans plusieurs de nos pays ; ces terroristes ont recruté au Portugal, en Espagne, en France et dans d’autres pays, et ce groupe a montré qu’il était capable de perpétrer des attentats en Europe.

Ce groupe s’est rapproché de différents groupes terroristes au Yémen et dans d’autres pays de la région du Sahel. Nous pensons qu’en Europe, nous risquons de le regretter si nous ne reconnaissons pas les risques qui pèsent sur la sécurité et les droits de l’homme du fait de ces groupes terroristes. Il ne faut pas les ignorer.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Villumsen, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

M. VILLUMSEN (Danemark)* – Je voudrais présenter nos condoléances aux proches de tous les civils qui ont perdu la vie au Mali et en Algérie. C’est important d’avoir ce débat aujourd’hui. L’Afrique du Nord est notre proche voisin.

Le Groupe pour la gauche unitaire européenne partage les préoccupations affichées à propos de la situation. Cela dit, l’action militaire rapide n’est pas la solution avec un grand « S » pour régler ces problèmes, que ce soit en Afrique du Nord, ou ailleurs au demeurant.

Cette intervention militaire au Mali, pilotée par l’ancienne puissance coloniale, semble ne pas avoir d’objectif clair ni de calendrier précis. Cela signifie qu’ils ne savent pas quand ils pourront sortir du pays. Beaucoup spéculent sur un nouvel Afghanistan. Cela nous préoccupe vraiment. Car au cours des douze dernières années de guerre en Afghanistan, nous avons vu que de telles stratégies devaient éviter d’être mises en place pour éviter que l’on ne s’enlise, et ce au détriment de la vie des civils dans la zone concernée.

Pour l’heure, l’offensive islamiste semble être endiguée. Dès lors, on propose de voir s’il ne serait pas possible de négocier avec les rebelles touaregs et d’autres groupes pour en arriver à une solution durable pour le Mali. Il faut commencer par rechercher des possibilités d’en arriver à une solution durable au Mali plutôt que s’installer dans une nouvelle guerre.

Nous tous, ici, sommes fortement préoccupés par les actions conduites au Mali et en Algérie. Il faut rechercher d’autres options que l’option militaire. L’Histoire nous a montré que les solutions militaires sont rarement durables et, trop souvent, on a vu que ces solutions impliquaient les soldats, les civils et la communauté internationale dans une spirale dangereuse et obscure. N’entérinons pas une telle approche à nouveau. Essayons de trouver une solution durable au Mali.

LE PRÉSIDENT – Madame la rapporteure, vous avez la possibilité de répondre immédiatement aux porte-parole des groupes qui viennent de s’exprimer.

Je vois que vous ne le souhaitez pas. La parole est donc à M. Dişli.

M. DİŞLİ (Turquie)* – Les derniers événements au Mali et l’attaque terroriste sur le site gazier du sud-est algérien ont une fois encore montré que l’extrémisme et le terrorisme gagnent du terrain au Sahel et constituent une menace directe pour l’ensemble de la région, avec des répercussions qui dépassent même le cadre de cette région. La communauté internationale que nous représentons ne peut pas rester indifférente face à cette actualité au Sahel.

Au Mali, nous devons continuer à soutenir les efforts déployés sous la direction des pays africains afin de maintenir la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays et à mettre en place un régime stable et démocratique. À cet égard, la Turquie estime qu’il faut rapidement mettre en œuvre la Résolution du Conseil de Sécurité de l’Onu 2085 (2012), qui prévoit le déploiement d’une mission internationale dirigée par les Africains au Mali et soutient la décision de la CEDEAO. Face à l’actualité au Mali, il convient de définir une nouvelle action commune. Un nouveau processus a d’ailleurs été lancé à l’initiative de la Turquie dans le cadre de l’Organisation de la Conférence islamique.

Pour ce qui est de l’Algérie, l’attaque qui a eu lieu à In Amenas a montré, encore une fois, qu’il faut combattre le terrorisme de manière déterminée et efficace.

Le terrorisme n’a ni religion ni nationalité. C’est un crime contre l’humanité. Par conséquent, lutter contre le terrorisme doit être une mission qui nous regroupe tous. Nous devons être unis et solidaires contre ce fléau. C’est la raison pour laquelle cela me heurte d’entendre parler de « terrorisme radical islamique » ou de « terrorisme islamique ». En fait, l’islam et le terrorisme ne doivent pas être cités ensemble. Aucune religion, race, culture ou ethnie ne devrait être associée au terrorisme. Le terrorisme est un crime contre l’humanité. On ne peut associer quelque épithète que ce soit au terrorisme. Sinon, on ne fait que jeter de la confusion dans le débat et l’on risque de ne pas comprendre les vrais enjeux.

L’action contre le terrorisme ne saurait être sélective. Nous devons œuvrer ensemble contre tous les terroristes, toutes les organisations terroristes sans exception.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Muñoz-Alonso

M. MUÑOZ-ALONSO (Espagne)* – Ce débat est opportun, nécessaire même, et je remercie Mme la rapporteure pour son travail.

A ce stade, nous ne savons pas si la guerre au Mali et l’attaque sur le site gazier d’In Amenas sont liés. Cela dit, le Sahel, cette zone qui s’étend de la Mauritanie au Soudan, est devenue un sanctuaire pour les terroristes. Cela constitue un défi pour notre sécurité collective, et pour notre sécurité énergétique en particulier. Mais cela affecte les pays de la région ainsi que les pays européens les plus proches. L’Espagne est un des pays les plus proches du fait de notre implantation sur la péninsule ibérique mais aussi du fait de notre présence aux Canaries et dans le nord du Maghreb.

Aqmi et le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest, du fait du mouvement touareg qui recherche son indépendance, sont liés entre eux, mais nous risquons aussi d’entendre parler beaucoup d’un autre groupe, celui de Mokhtar Belmokhtar, puisque c’est un leader terroriste très décidé. C’est lui qui est intervenu. Des flux de terroristes liés à Al-Qaida vont de la Libye post-kadhafiste via le Soudan jusqu’à la Somalie, où sévit un autre groupe lié à Al-Qaida : Al Shabad. Ces mouvements terroristes, nous les connaissons. Ils ont agi au Maroc, en Algérie, y compris en Europe. Mais nous pensions qu’Al-Qaida avait ses bases en Afghanistan, surtout après le 11 septembre. Nous constatons maintenant qu’il s’est étendu.

L’Algérie, après une guerre civile sanglante, est un pays qui a une longue expérience de la lutte contre le terrorisme. J’applaudis à son intervention, il n’était pas possible de négocier. À mon avis, la France a raison également d’être intervenue à la demande du Mali avec l’appui du Conseil de Sécurité.

En réalité, la France appuie des forces armées assez faibles pour les aider à faire face à la menace terroriste. Espérons que le Mali fonctionnera mieux à l’avenir. En effet, force est de reconnaître que, à l’heure actuelle, ce pays multiethnique, rongé par la corruption et confronté à des réactions tribales ne fonctionne pas. Nous, Européens, nous devons aider ces pays africains à se structurer et à se défendre eux-mêmes. Il faut également prendre conscience du risque qui est tout proche de nous – pour ainsi dire à nos portes mêmes.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Rouquet.

M. ROUQUET (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, la conquête du nord du Mali par des groupes islamistes armés crée une situation préoccupante à plusieurs titres : d’une part, elle porte atteinte de façon inacceptable à la souveraineté et à l’intégrité territoriale d’un pays ; d’autre part, elle s’accompagne d’une série de violations de l’Etat de droit, de la démocratie et des droits de l’homme les plus élémentaires.

Dans son rapport publié il y a quelques jours, le HCR a dressé le tableau d’une situation particulièrement accablante : exécutions sommaires, viols, torture, recrutement d’enfants soldats, sans oublier la destruction des sites religieux à Tombouctou, patrimoine mondial de l’humanité. Ces actes évoquent un souvenir sinistre, celui des horreurs commises par les talibans. C’est pourquoi nous devons nous réjouir que la Cour pénale internationale ait ouvert une enquête pour les crimes de guerre commis depuis janvier 2012 au Mali.

A la tribune de l’Assemblée générale de l’Onu, le Président François Hollande a jugé que la situation était intolérable, inadmissible et inacceptable, non seulement pour le Mali mais pour tous les pays de la région. Fidèle à ses convictions et à ses engagements, la France a agi pour mobiliser la communauté internationale face à une menace intégriste qui risquait de s’étendre à tout le Mali et peut-être au-delà. L’intervention militaire française, décidée le 11 janvier à la demande du Mali, vise à répondre à une agression caractérisée mettant en jeu l’existence même de l’Etat malien, dans le respect de la Charte des Nations Unies et avec l’accord exprès du Conseil de sécurité. M. Ban Ki-moon a d’ailleurs salué l’action de la France.

L’intervention a un objectif simple et circonscrit : bien sûr, stopper l’avancée des groupes terroristes pour permettre à l’Etat malien de recouvrer son intégrité territoriale et sa souveraineté, mais surtout mettre en place les conditions pour que la Misma puisse se déployer et remplir la mission qui lui a été confiée par les Nations Unies.

La France n’a pas vocation à s’éterniser au Mali. Sa priorité est de passer la main à la force africaine le plus vite possible. De nombreux pays africains se mobilisent déjà, à l’image du Niger, du Bénin ou du Sénégal. Par ailleurs, la Misma sera aidée par l’Union européenne, qui a mis en place le 21 janvier un mécanisme de traitement des demandes et des offres de soutien logistique.

Non, la France n’est pas seule dans ce conflit et je veux ici remercier les pays représentés dans cette enceinte pour leur soutien et leur aide.

L’armée malienne est aujourd’hui mise en cause pour des exactions qu’elle aurait commises ces derniers jours. Sachez que la France prend très au sérieux les risques d’exactions qui pourraient être perpétrées pendant les opérations militaires. Sachez qu’elle sera vigilante et active en ce sens auprès des autorités maliennes. Sachez que la protection des droits de l’homme, la protection des civils et la lutte contre l’impunité constituent une priorité de l’action extérieure de la France.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Árnason.

M. ÁRNASON (Islande) – Venant d’un pays qui n’a pas d’armée et où, heureusement, on n’est pas habitué à la chose militaire, je voudrais d’abord dire que l’intervention française au Mali me semble logique et tout à fait nécessaire. On ne peut accepter qu’un état de sauvagerie soit instauré au cœur de l’Afrique du Nord et de l’Ouest par des groupes islamo-gangstéristes. C’est inacceptable, aussi bien pour les populations concernées que pour la communauté internationale.

On ne peut qu’espérer que les Français et leurs alliés africains ont une vision claire de l’objectif final de l’intervention militaire en cours. Il faut également s’assurer qu’ils en ont défini les buts politiques, notamment le rétablissement de la démocratie au Mali, pays tellement célébré pendant vingt ans.

Il est important que les autres pays européens soutiennent le combat de la France contre les forces djihadistes et apportent leur aide au peuple malien par tous les moyens en leur possession, afin que l’action militaire, politique et humanitaire soit couronnée de succès. Il faut également veiller à ce que la guerre ne se prolonge pas ni qu’elle s’« afghanise ».

En France et ailleurs, on parle beaucoup de terroristes et de terrorisme ; c’est bien normal. Mais une telle dénomination ne doit pas effacer les particularités locales de ce conflit. Les terroristes fuyant la Libye jusqu’au nord du Mali se sont substitués aux forces rebelles touaregs. Une des tâches à remplir au Mali et dans la région est de trouver une solution politique qui satisfasse l’aspiration touareg à l’autodétermination.

Le ministre français des Affaires étrangères, M. Fabius, a dit que, face au terrorisme, il fallait être implacable. Soit. N’oublions pas quand même que le terrorisme bien réel au Sahel a ses racines dans la pauvreté, le sous-développement et d'immenses problèmes économiques et écologiques. L’absence de démocratie, le non-respect des droits de l’homme, le bouleversement des valeurs fondamentales et le désespoir de la jeunesse sont aussi des invitations au terrorisme. Soyons donc implacables non seulement envers le terrorisme, mais aussi envers ses causes. Je remercie notre collègue norvégienne, Mme Woldseth, pour son bon rapport sur ce sujet brûlant.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Gross, dernier orateur que nous entendrons ce matin.

M. GROSS (Suisse)* – Il est sans doute vrai que cette intervention militaire était inévitable. Dans le sud du Mali et dans la capitale, on n’a plus trouvé, du jour au lendemain, le moindre drapeau français, car les magasins avaient été dévalisés. Cela montre bien à quel point les gens étaient contents de voir intervenir les Français.

Toutefois, faisons attention : l’intégrité territoriale du pays ne peut pas être rétablie uniquement par des moyens militaires ; il faut aussi prendre des mesures politiques. Il faut également reconstruire et que ce soit beaucoup mieux que ce qui existait avant : c’est justement parce que la situation était déplorable qu’il y a tant de crimes et de terrorisme, bref de problèmes dans le pays.

Il faut, premièrement, que nous fassions attention au choix des mots. Il y a des rebelles qui ne sont pas des terroristes. Il y a des délinquants qui ne sont pas des terroristes. Il y a aussi des musulmans qui ne sont ni des rebelles ni des terroristes. Certains terroristes ne sont ni musulmans, ni contrebandiers, ni passeurs, mais simplement des êtres cruels qui cherchent à opprimer leurs semblables et qui sont – parfois – mus par des sentiments religieux. On trouve aussi des islamistes qui cherchent à imposer aux autres leur religion par la violence, mais qui ne sont pas des terroristes. Nous devons être beaucoup plus nuancés que nous ne le sommes dans nos propos.

Deuxièmement – et notre ami islandais l’a très bien dit –, il ne suffirait pas de revenir au statu quo ante, car toutes les conditions d’une explosion de violence étaient déjà réunies avant cette guerre. Cela remonte en partie à l’ère coloniale.

À l’époque de la colonisation, en effet, le nord du Mali était totalement oublié, abandonné. Seulement 30% des Maliens savent lire et écrire, c’est tout dire ! Or moins les gens sont éduqués, plus ils sont livrés à eux-mêmes, et plus facilement ils peuvent se laisser convaincre par les mouvements terroristes de les rejoindre.

Ce n’est donc pas en recourant à l’armée que l’on pourra rétablir une société multiculturelle. Il faut prendre d’autres mesures pour rétablir l’intégrité territoriale et la cohésion du pays. De nombreuses erreurs ont été commises dans le passé : mauvais investissements, mauvais choix commerciaux. Nous devons donc changer beaucoup de choses dans la façon dont nous agissons.

LE PRÉSIDENT - Il nous faut maintenant interrompre pour cette séance l’audition des orateurs.

La discussion générale reprendra cet après-midi à 15 h 30.

Le programme étant très chargé, je vous prie, mes chers collègues, de vous montrer particulièrement ponctuels.

7. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT - La prochaine séance publique aura lieu cet après-midi, à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 heures.

SOMMAIRE

1. Aménagement de l’ordre du jour

2. Modifications dans la composition des commissions

3. Fait personnel

M. Harutyunyan

4. Migrations et asile : montée des tensions à l’Est de la Méditerranée

(Débat selon la procédure d’urgence)

Présentation par Mme Strik du rapport de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées (Doc.13106)

Orateurs : Mmes Kanelli, Bakoyannis, M. Schennach, Mme Fiala, M. Chope, Mme Fort, MM. Rouquet, Bies, Mmes Memecan, Gündeş Bakir, Pipili, Tzakri, Dame Angela Watkinson, Mme Groth, MM. Marias, Neill, Tatsopoulos

Réponses de Mme la rapporteure et de M. Santini, président de la commission des migrations

Vote sur un projet de résolution amendé

Vote sur un projet de recommandation amendé

5. Remerciements à Mme Renate Wohlwend

6. Les développements récents au Mali et en Algérie et la menace pour la sécurité et les droits de l’homme dans la région méditerranéenne

(Débat selon la procédure d’urgence)

Présentation par Mme Woldseth du rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc.13107)

Orateurs : M. Mariani, Lord Anderson, Mme Schuster, MM. Walter, Villumsen, Dişli, Muñoz-Alonso, Rouquet, Árnason, Gross

7. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Francis AGIUS*

Pedro AGRAMUNT

Arben AHMETAJ*

Miloš ALIGRUDIĆ

Karin ANDERSEN

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI/ Gerardo Giovagnoli

Khadija ARIB/Tineke Strik

Volodymyr ARIEV

Mörður ÁRNASON

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI*

Þuriður BACKMAN

Daniel BACQUELAINE/Dirk Van Der Maelen

Viorel Riceard BADEA

Theodora BAKOYANNIS

David BAKRADZE/Giorgi Kandelaki

Gérard BAPT/Philippe Bies

Gerard BARCIA DUEDRA

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

José María BENEYTO

Levan BERDZENISHVILI

Deborah BERGAMINI

Robert BIEDROŃ*

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY/Robert Neill

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL

Eric BOCQUET*

Olga BORZOVA

Mladen BOSIĆ/Ismeta Dervoz

António BRAGA

Anne BRASSEUR

Márton BRAUN*

Federico BRICOLO*

Ankie BROEKERS-KNOL*

Piet DE BRUYN/Ludo Sannen

Patrizia BUGNANO/Giuliana Carlino

André BUGNON*

Natalia BURYKINA

Sylvia CANEL*

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU*

Mikael CEDERBRATT/Kerstin Lundgren

Otto CHALOUPKA*

Irakli CHIKOVANI*

Vannino CHITI/Paolo Corsini

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV/Stanislav Ivanov

Lolita ČIGĀNE*

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH/Grzegorz Czelej

James CLAPPISON*

Deirdre CLUNE*

Agustín CONDE

Igor CORMAN*

Telmo CORREIA

Carlos COSTA NEVES

Joseph DEBONO GRECH*

Giovanna DEBONO*

Armand De DECKER*

Arcadio DÍAZ TEJERA/Carmen Quintanilla

Peter van DIJK

Klaas DIJKHOFF*

Şaban DİŞLİ

Jim DOBBIN

Karl DONABAUER/Sonja Ablinger

Ioannis DRAGASAKIS

Daphné DUMERY/Fatiha Saïdi

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU/Bernadette Bourzai

Mikuláš DZURINDA*

Baroness Diana ECCLES

Tülin ERKAL KARA

Gianni FARINA

Relu FENECHIU/Ionuţ-Marian Stroe

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA

Daniela FILIPIOVÁ*

Axel E. FISCHER*

Jana FISCHEROVÁ/Rom Kostřica

Gvozden Srećko FLEGO

Hans FRANKEN*

Jean-Claude FRÉCON

Erich Georg FRITZ

Sir Roger GALE

Jean-Charles GARDETTO

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Paolo GIARETTA*

Jean GLAVANY/Christian Bataille

Michael GLOS*

Pavol GOGA

Jarosław GÓRCZYŃSKI*

Svetlana GORYACHEVA/Anton Belyakov

Martin GRAF*

Sylvi GRAHAM/Ingjerd Schou

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST

Dzhema GROZDANOVA*

Attila GRUBER*

Gergely GULYÁS*

Pelin GÜNDEŞ BAKIR

Antonio GUTIÉRREZ*

Ana GUŢU/Corina Fusu

Carina HÄGG/Jonas Gunnarsson

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI/Marek Borowski

Mike HANCOCK

Margus HANSON

Davit HARUTYUNYAN

Håkon HAUGLI/Magnhild Meltveit Kleppa

Norbert HAUPERT

Alfred HEER/Gerhard Pfister

Martin HENRIKSEN*

Andres HERKEL

Adam HOFMAN*

Jim HOOD*

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER

Andrej HUNKO*

Susanna HUOVINEN/Riitta Myller

Ali HUSEYNLI*

Rafael HUSEYNOV*

Shpëtim IDRIZI*

Vladimir ILIČ

Igor IVANOVSKI*

Tadeusz IWIŃSKI*

Denis JACQUAT/Marie-Louise Fort

Roman JAKIČ

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI*

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN

Mats JOHANSSON

Jadranka JOKSIMOVIĆ/Aleksandra Djurović

Birkir Jón JÓNSSON

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Antti KAIKKONEN*

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA*

Mariusz KAMIŃSKI*

Marietta KARAMANLI/Jean-Pierre Michel

Burhan KAYATÜRK

Jan KAŹMIERCZAK*

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH

Serhiy KLYUEV/Volodymyr Pylypenko

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN*

Alev KORUN

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO*

Dmitry KRYVITSKY*

Václav KUBATA

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU*

Jean-Yves LE DÉAUT*

Igor LEBEDEV/Alexander Sidyakin

Harald LEIBRECHT/Annette Groth

Orinta LEIPUTĖ/Dangutė Mikutienė

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE*

Lone LOKLINDT*

François LONCLE

Jean-Louis LORRAIN*

George LOUKAIDES*

Younal LOUTFI*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Saša MAGAZINOVIĆ*

Philippe MAHOU*

Gennaro MALGIERI*

Nicole MANZONE-SAQUET*

Pietro MARCENARO

Thierry MARIANI

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA*

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Ivan MELNIKOV*

Nursuna MEMECAN

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Marie-Jo Zimmermann

Djordje MILIĆEVIĆ/Elvira Kovács

Federica MOGHERINI REBESANI*

Andrey MOLCHANOV*

Jerzy MONTAG*

Rubén MORENO PALANQUES

Patrick MORIAU

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Alejandro MUÑOZ-ALONSO

Lydia MUTSCH

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR/ Bernard Fournier

Oľga NACHTMANNOVÁ

Gebhard NEGELE

Aleksandar NENKOV

Pasquale NESSA

Fritz NEUGEBAUER

Baroness Emma NICHOLSON/Charles Kennedy

Elena NIKOLAEVA/Olga Kazakova

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL*

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE*

Liliana PALIHOVICI

Dimitrios PAPADIMOULIS/Petros Tatsopoulos

Eva PARERA*

Ganira PASHAYEVA

Lajla PERNASKA*

Johannes PFLUG*

Foteini PIPILI

Ivan POPESCU

Lisbeth Bech POULSEN/Nikolaj Villumsen

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA*

John PRESCOTT/Michael Connarty

Jakob PRESEČNIK*

Radoslav PROCHÁZKA*

Gabino PUCHE*

Alexey PUSHKOV*

Mailis REPS*

Eva RICHTROVÁ/Miroslav Krejča

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE/Rudy Salles

Maria de Belém ROSEIRA/Ana Catarina Mendonça

René ROUQUET

Marlene RUPPRECHT

Ilir RUSMALI*

Pavlo RYABIKIN

Rovshan RZAYEV

Giacomo SANTINI

Giuseppe SARO

Kimmo SASI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER

Damir ŠEHOVIĆ*

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN/David Crausby

Oleksandr SHEVCHENKO

Boris SHPIGEL/Yury Solonin

Arturas SKARDŽIUS/Remigijus Ačas

Ladislav SKOPAL/Dana Váhalová

Leonid SLUTSKY

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI/Alessandro Rossi

Yanaki STOILOV

Christoph STRÄSSER*

Karin STRENZ

Giacomo STUCCHI

Valeriy SUDARENKOV*

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ*

Melinda SZÉKYNÉ SZTRÉMI/Imre Vejkey

Chiora TAKTAKISHVILI

Vyacheslav TIMCHENKO/Robert Shlegel

Romana TOMC

Lord John E. TOMLINSON

Latchezar TOSHEV

Mihai TUDOSE*

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI

Tomáš ÚLEHLA/Pavel Lebeda

Ilyas UMAKHANOV*

Viktor USPASKICH/Egidijus Vareikis

Giuseppe VALENTINO*

Miltiadis VARVITSIOTIS/Liana Kanelli

Ljubica VASIĆ/Stefana Miladinović

Volodymyr VECHERKO/Larysa Melnychuk

Stefaan VERCAMER

Anne-Mari VIROLAINEN*

Luigi VITALI*

Luca VOLONTÈ*

Vladimir VORONIN*

Varujan VOSGANIAN*

Tanja VRBAT/Melita Mulić

Klaas de VRIES

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ

Piotr WACH

Johann WADEPHUL*

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON

Katrin WERNER

Renate WOHLWEND

Karin S. WOLDSETH

Gisela WURM

Karl ZELLER*

Svetlana ZHUROVA/Guennady Gorbunov

Emanuelis ZINGERIS*

Guennady ZIUGANOV/Anvar Makhmutov

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Monténégro*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Terence FLANAGAN

Maria GIANNAKAKI

Naira KARAPETYAN

Konstantinos TRIANTAFYLLOS

Łukasz ZBONIKOWSKI

Observateurs

Marjolaine BOUTIN-SWEET

Corneliu CHISU

Sladan ĆOSIĆ

Héctor LARIOS CÓRDOVA

Michel RIVARD

Bev SHIPLEY

Nycole TURMEL

Partenaires pour la démocratie

Mohammed AMEUR

Mohammed Mehdi BENSAID

Nezha EL OUAFI

Bernard SABELLA

Mohamed YATIM