AS (2013) CR 08

SESSION ORDINAIRE DE 2013

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la huitième séance

Jeudi 24 janvier 2013 à 15 h 30

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso, dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 30, sous la présidence de M. Hörster, Vice-Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT* – La séance est ouverte.

1. Développement récents au Mali et en Algérie et menace pour la sécurité
et les droits de l’homme dans la région méditerranéenne
.
Débat selon la procédure d’urgence (suite)

LE PRÉSIDENT* - Nous reprenons le débat selon la procédure d’urgence sur le rapport « Développements récents au Mali et en Algérie et menace pour la sécurité et les droits de l’homme dans la région méditerranéenne » (Doc 13107), présenté par Mme Woldseth au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie.

Nous continuons la discussion générale. Je rappelle aux orateurs qu’ils disposent d’un temps de parole de trois minutes.

Afin de pouvoir entendre M. Füle à 16 h 15, j’interromprai la liste des orateurs vers 15 h 45 pour laisser du temps à la réponse de la commission et aux votes.

Il n’y a pas d’opposition ?

Il en est ainsi décidé.

Dans la suite du débat, la parole est à M. Bockel.

M. BOCKEL (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, permettez-moi de saluer le travail de notre commission et son avis extrêmement circonstancié. Nous avons eu raison de placer la question du terrorisme islamique au Sahel à l’ordre du jour de notre Assemblée. Comme l’a indiqué Angela Merkel la semaine passée, le terrorisme au Mali n’est pas seulement une menace pour l’Afrique, il l’est aussi pour l’Europe. Il n’est d’ailleurs pas anodin que la Belgique, le Danemark, l’Italie et le Royaume-Uni aient rapidement annoncé leur volonté d’apporter un soutien logistique aux troupes françaises. Celles-ci ont été amenées à intervenir pour répondre à une situation d’extrême urgence et de danger pour la population malienne.

Cet engagement militaire, c’est avant tout l’engagement de la France pour la défense de la démocratie, de la liberté et la lutte contre le fondamentalisme. Je le répète, ce combat est juste, tant Aqmi incarne tout ce que notre Organisation honnit. Rappelons tout de même d’où proviennent les subsides de ce réseau : trafic de drogues, d’armes, de migrants et prises d’otages.

Une fois passé ce constat, on peut s’interroger sur le rôle de l’Union européenne, qui pourrait être plus active. La haute-représentante pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité pourrait, par exemple, mobiliser le Conseil européen sur ce sujet, non seulement sur le plan technique, mais également politique. Il y va de la crédibilité politique de l'Union européenne.

Cette intervention se passera d’autant mieux qu’elle aura un véritable soutien politique à côté du soutien militaire. Les habitants ne s’y sont pas trompés. Il faudrait que se tienne rapidement une vaste conférence internationale sur cette question.

J’étais ce matin en commission de la défense et des affaires étrangères du Sénat français où nous avons auditionné à huis clos M. Le Drian, notre ministre. Nous avons évoqué des questions extrêmement concrètes qui se posent sur le terrain. Les forces maliennes et africaines sont en train d’arriver et l’un de nos soucis est de former ces soldats, à la fois sur le plan militaire, mais également sur la question sensible – qui concerne notre Assemblée – des droits de l’homme.

Des exactions ont déjà été signalées par des ONG. Il convient donc d’être très attentif. Le message a d’ailleurs été passé très clairement par les autorités françaises aux autorités maliennes : ces soldats doivent bénéficier d’une formation afin de prévenir ce genre de débordements, qui ne sont évidemment pas acceptables.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Salles.

M. SALLES (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, la situation malienne est préoccupante depuis de nombreux mois. Dans un Etat en décomposition, les terroristes islamistes, lourdement armés, ont pris le contrôle du nord du pays et notamment de la ville de Tombouctou sans qu’aucun Etat intervienne. La Résolution 2085 des Nations Unies, adoptée en décembre 2012, prévoyait le déploiement d’une mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine. Cependant, devant la menace imminente, le gouvernement provisoire du Mali a lancé un véritable appel au secours afin que la France intervienne. C’est ainsi que notre pays s’est engagé dans cette opération afin de protéger le sud du Mali et faire reculer les terroristes qui contrôlaient le nord.

Depuis lors, chacun a pu suivre le développement de ces opérations dans les différents médias qui relatent ces événements.

Chacun comprend bien qu’on se trouve dans une situation d’urgence qui n’a pas permis de mettre en place immédiatement une force internationale. Néanmoins, il est tout aussi évident que la lutte contre le terrorisme dans la région, qui dépasse d’ailleurs les frontières du Mali pour s’étendre sur l’ensemble du Sahel, ne sera pas une aventure de courte durée. Ce sera un combat long et difficile, pour lequel une coopération internationale associant les pays africains est indispensable. Le Mali est l’avant-poste d’un combat contre le terrorisme et contre les trafics les plus dangereux pour les droits de l’homme, pour la démocratie, voire pour la stabilité dans l’ensemble de la région méditerranéenne. Ce pays est, en effet, devenu la plaque tournante de mouvements terroristes venus du monde entier.

C’est pourquoi je soutiens le rapport qui nous est présenté par notre collègue, Mme Woldseth, que je tiens à féliciter. Il est indispensable dans un premier temps de susciter la mise en place le plus rapidement possible d’une force internationale dans la région, afin d’épauler et de prolonger les actions initiées par la France. Mais il est tout aussi important d’aider le Mali à reconstituer des institutions démocratiques. Je partage le souci de la rapporteure de voir établie par le Mali une feuille de route de transition, dans le cadre d’un dialogue politique ouvert. L’ordre constitutionnel et l’unité du pays sont en jeu. La communauté internationale tout entière aura sa part de responsabilité dans l’avenir de ce pays, mais aussi dans le respect des droits de l’homme dans la région.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Loncle.

M. LONCLE (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, au-delà du rapport de notre excellente collègue, Mme Woldseth, et de la résolution qui nous est proposée, je souhaite faire quatre remarques sur la sécurité au Sahel.

Première remarque : l’action de la France, engagée à la demande des autorités maliennes, appuyée par l’Union européenne, les Etats-Unis, l’Union africaine, les Etats d’Afrique de l’Ouest, validée par l’ONU, est à la fois légale sur le plan international et légitime. Cette action comporte trois volets :

Un volet sécuritaire pour combattre AQMI et les groupes alliés et pour permettre au Mali de recouvrer son intégrité.

Un volet politique pour un dialogue nécessaire avec les forces politiques du Nord, à l’exclusion des groupes terroristes, stabiliser la gouvernance malienne avec une feuille de route conduisant à l’organisation d’élections présidentielles et législatives dès que possible dans un Mali sécurisé.

Un volet de développement économique, piloté par l’Union européenne, un plan qui doit permettre de lutter contre la pauvreté, elle-même terreau des menées terroristes.

Ma deuxième remarque a trait à la sémantique. Il ne s’agit pas de je ne sais quelle croisade contre le terrorisme, mais d’une lutte déterminée contre des groupes gangstéro-djihadistes, narco-salafistes, trafico-terroristes. Leur action relève de la barbarie. Pour exemple, les prises d’otages, les atrocités qu’ils font subir aux populations du Nord, notamment aux femmes, ou récemment le raid meurtrier sur le site gazier du sud-algérien.

Troisième remarque : nous – la communauté internationale, les démocraties – devons constater, pour le regretter et en tenir compte à l’avenir, que l’intervention en Libye, il y a quelques mois, de l’OTAN, de la France et de la Grande-Bretagne en tête, a été menée et conclue sans que les puissances concernées en aient mesuré les conséquences. Résultat : un désordre considérable dans cette immense région du Sahel, lequel s’est accompagné de déplacements de population, de pillages d’armes, de la multiplication des trafics qui nourrissent le terrorisme.

Quatrième remarque : il s’agit d’un témoignage émanant du Président de l’Union africaine, le Président du Bénin, qui dans une lettre adressée au Président François Hollande, publiée hier, indiquait ceci : « En ma qualité de Président en exercice de l'Union Africaine, ma conviction – l’Union africaine comprend 54 pays – a toujours été qu'il ne s'agit pas d'un dossier africain, même si le théâtre se faisait en Afrique, mais celui de la Communauté internationale tout entière, en ce sens qu'il concerne le terrorisme. Point n'est besoin de rappeler que le terrorisme n'a pas de frontières. C'est pourquoi il appelle une riposte internationale qui fera appel aux Forces des pays les mieux équipés. »

Il ajoute : « Je voudrais vous assurer que le sang versé des citoyens français au nom de la liberté, de la démocratie, des droits de l'homme sera inscrit dans les annales des relations entre la France et l'Afrique. » C’est la raison pour laquelle j’ai la fierté de soutenir cette action dont j’ai tenté de décrire les divers aspects.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Agramunt.

M. AGRAMUNT (Espagne)* – J’exprime mon soutien à notre rapporteure, auteure de cet important rapport qui traite d’une situation urgente.

Les événements actuels se déroulent dans des pays qui peuvent paraître se situer loin de chez nous, mais qui se situent en réalité aux frontières du Conseil de l'Europe, tout près de chez nous, peut-être plus près de l’Espagne que de la Norvège, mais en fait tous les pays du Conseil de l'Europe et de l’Europe sont concernés, car aucun d’entre eux ne peut se permettre de faiblesse dans la lutte contre le terrorisme, problème crucial pour le monde entier.

Madrid a été touchée par le terrorisme islamiste, de même que Londres et d’autres villes encore. Ces faits se produisent chez nous et à nos portes. C’est pourquoi il convient d’accroître la coopération avec les forces de sécurité et de défense dans des pays comme l’Algérie et le Maroc, non pas seulement en raison du terrorisme qui y sévit, mais aussi en raison des trafics de stupéfiants, de personnes, d’armes qui sont le fait de diverses mafias et contre lesquels nous devons lutter.

Notre position et notre défense doivent par conséquent être très claires. À ce titre, j’exprime mon soutien au Gouvernement de la France pour son action et mon appui total au Gouvernement de l’Algérie. Certes, ces interventions ont eu des conséquences indésirables. Bien sûr, nous voulons tous la paix dans le monde, mais les gouvernements de l’Algérie et de la France ont agi avec diligence et fermeté pour défendre nos valeurs.

Par le passé, des rapports ont été produits sur les liens entre la production de pétrole et le terrorisme islamique. Cette situation est proche de ce qui se passe en Algérie, au Mali et au Sahel.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Beyneto.

M. BENEYTO (Espagne)* – Je présenterai quatre observations.

L’intervention militaire réalisée en respectant les normes internationales et sous mandat des Nations Unies était nécessaire. Elle doit se révéler efficace, ce qui suppose une plus grande participation de la communauté internationale, de l’Union européenne au premier chef et de différents pays, à l’image de l’Espagne qui s’est d’ores et déjà engagée à offrir son assistance en matière de transports et de formation militaire. Bien sûr, cette intervention doit pouvoir prendre fin en ayant produit des résultats, à savoir en ayant réglé le problème du terrorisme qui touche l’ensemble du Sahel. M. Agramunt a justement rappelé que la frontière sud de l’Europe est concernée par ces événements et par conséquent la frontière de l’Espagne.

Ce type d’interventions, que l’on préférerait éviter, suppose parfois l’emploi de la force. Elle en est la circonstance inévitable, mais sous mandat international. La participation des pays africains est essentielle ; de même, les pays voisins et frontaliers doivent être associés à l’intervention, ce qui pour l’heure n’est pas le cas.

La lutte contre le terrorisme est un devoir international. Le terrorisme est une force planétaire et les actions terroristes qui ont eu lieu dans le nord du Mali sont le fait de personnes de différents pays. Or, pour l’heure, une action internationale coordonnée pour lutter contre ce fléau fait défaut. La lutte contre le terrorisme suppose également que les conventions du Conseil de l'Europe soient pleinement appliquées. Je pense à celle dont a fait état Mme la rapporteure dans son texte, à savoir la Convention sur le financement de groupes terroristes.

J’en viens aux conséquences humanitaires. Les violations du droit humanitaire sont flagrantes dans le nord du Mali et d’éventuelles représailles pourraient se produire dans le sud du pays. Le Conseil de l'Europe se doit d’y être attentif, car le droit humanitaire et les droits de l’homme doivent absolument être respectés.

Enfin, il est impératif de s’attaquer aux racines du mal. Le Gouvernement libyen doit éradiquer le trafic d’armes vers le sud. Il est important également d’éradiquer la pauvreté. Or, les efforts menés jusqu’ici n’ont pas été particulièrement couronnés de succès – bien au contraire.

S’ajoute la question de l’autonomie politique des Touaregs. En outre, il convient d’être attentif à l’usage de la terminologie. En effet, il convient de faire attention à ne pas faire d’amalgame entre l’islamisme et les musulmans. À cet égard, je suis très heureux que Mme Woldseth évoque dans son rapport « des radicaux islamistes » ; c’est une très bonne chose.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Yatim.

M. YATIM (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Je veux saluer Mme Woldseth pour son rapport, ainsi que l’ensemble des membres de la commission pour le travail qu’ils ont accompli afin de rendre possible ce projet de résolution.

Les derniers développements de la situation au Mali, et surtout l’intervention militaire française, sont survenus en réponse à une demande spécifique du Gouvernement malien, approuvée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies. Cette intervention vise à stopper la menace des groupes terroristes, qui étaient en train de conquérir l’ensemble des territoires maliens. Mais cette dégradation de la situation résulte de germes semés par des régimes totalitaires comme celui de Khadafi.

Le terrorisme naît et se développe sur des terrains politiques, bien qu’il essaie d’instrumentaliser des valeurs, des croyances religieuses ou des sentiments nationalistes. Il importe donc d’être prudent dans la terminologie, afin de ne pas donner l’impression que notre combat contre le terrorisme est une guerre de religions ou un conflit entre cultures et civilisations.

Comme le montre le rapport de Mme Woldseth, les groupes du nord du Mali proviennent en grande partie de la Libye, après la chute du colonel Khadafi. Plusieurs de leurs membres ont participé aux génocides commis par son régime contre les populations libyennes. Il est clair que le terrain fertile du terrorisme est le despotisme et la dictature, comme celle de Khadafi.

Mais son terrain fertile, ce sont aussi les régions d’instabilité politique et de conflits gelés, qui sont les régions préférées des trafiquants d’armes, des trafiquants de drogue et des mouvements terroristes. Nous saluons le fait que, dans le projet de résolution, l’Assemblée se félicite que les rebelles touaregs aient récemment renoncé à leurs aspirations d’indépendance en échange d’une autonomie politique au sein du Mali : cette décision constitue une dynamique constructive à encourager pour la résolution des conflits régionaux.

La position du Maroc a toujours été de soutenir l’indépendance du Mali, son unité et sa stabilité politique ; notre gouvernement a toujours entretenu des relations étroites avec le gouvernement de Bamako.

Le Maroc joue également un rôle important dans les efforts déployés dans la région. Demain, vendredi, il va ainsi accueillir une importante réunion des ministres de l’Intérieur du Maroc, de l’Espagne, du Portugal et de la France, visant à poser les bases d’une coopération régionale élargie pour faire face aux défis menaçant la stabilité et la sécurité de la région.

Je conclurai en insistant sur un point déjà évoqué par beaucoup d’orateurs : l’approche militaire, qui a été précipitée par l’invasion des groupes intégristes, ne doit pas exclure l’approche politique, ni les efforts de développement économique et social de la région.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Ameur.

M. AMEUR (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Je voudrais féliciter Mme la rapporteure pour le travail accompli, et surtout pour ses conclusions pertinentes et ses recommandations cohérentes. Le conflit du Mali et la guerre en cours viennent nous rappeler quelques vérités et quelques enseignements.

Tout d’abord, au-delà de l’intervention militaire qui a pour objectif d’éviter la dislocation territoriale du Mali et la déstabilisation de la région, l’action de la communauté internationale doit privilégier une solution politique, seule susceptible de garantir une stabilité et une sécurité pérennes, ainsi que l’intégrité territoriale du Mali.

Ensuite, le cas du Mali souligne les dangers du séparatisme et les dérapages qui peuvent en résulter, en nous montrant comment une revendication régionale légitime, en l’absence d’une perspective politique claire, peut être exploitée par des extrémistes et trafiquants de toutes sortes, en vue d’instaurer un Etat de non-droit, moyenâgeux, source de tous les dangers. C’est pourquoi nous considérons que la décision des rebelles touaregs constitue une dynamique constructive à encourager pour la résolution politique et pacifique des conflits régionaux. C’est pourquoi aussi le Maroc ne cesse de plaider pour une solution politique et négociée du conflit du Sahara occidental, afin d’éviter que les connexions avec l’extrémisme et le trafic d’armes ne prennent des dimensions incontrôlables.

Le cas du Mali démontre également les limites d’un modèle économique et social générateur de précarité et de pauvreté, d’inégalités sociales et de disparités territoriales, un modèle qui crée les conditions favorables pour le développement de toutes les formes d’extrémisme, et qui constitue aujourd’hui un danger pour la région et même au-delà.

Le Maroc, fort de ses liens historiques, humains et culturels avec le Mali, ne s’est épargné aucun effort pour soutenir les autorités maliennes et pour préserver la sécurité du pays, sa souveraineté et son intégrité territoriale. Le Maroc appelle aujourd’hui à une coopération interrégionale forte pour faire face aux menaces liées au terrorisme et surtout pour promouvoir un développement politique et humain respectueux des valeurs démocratiques et des droits de l’homme, ainsi qu’un développement économique solidaire et durable. Seule cette approche globale et intégrée permettra d’apporter les réponses adéquates non seulement au terrorisme, mais surtout aux racines du mal et aux sources qui l’alimentent.

LE PRÉSIDENT* – La liste des orateurs étant épuisée, j’appelle la réplique de la commission des questions politiques et de la démocratie.

Madame la rapporteure, vous avez la parole.

Mme WOLDSETH (Norvège), rapporteure de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Tout d’abord je tiens à souligner, afin d’éviter tout malentendu, qu’aussi bien dans le rapport que dans le projet de résolution, le mot « islamisme » ne fait pas référence aux musulmans.

Je voudrais ensuite remercier tous les participants à ce débat. Personne n’a dit qu’il était en désaccord avec le rapport, ce qui prouve que nous sommes forts et unis dans la volonté de lutter contre le terrorisme où que ce soit dans le monde, en utilisant les moyens qui sont les nôtres, au Conseil de l’Europe.

Bien sûr, nous devons condamner toute forme de violence au Mali. Les femmes et les enfants devraient être en sécurité, et chacun devrait avoir la possibilité de vivre sa vie dans le respect de ses droits, comme tout citoyen.

Monsieur Mariani, je suis d’accord : c’est une affaire qui prendra, non quelques jours ou quelques mois, mais probablement plusieurs années. Nous ne pouvons qu’espérer qu’un dialogue ait lieu.

En effet, Lord Anderson, cela ne serait probablement pas arrivé dans un Etat stable et bien gouverné, et c’est bien pour cette raison que le Conseil de l’Europe, grâce à sa politique de partenariat, peut contribuer à faire évoluer ce type de pays vers davantage de stabilité et une meilleure gouvernance.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. le président de la commission.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Je voudrais remercier Mme Woldseth pour son travail et préciser deux choses.

D’abord, comme vous l’avez souligné, lorsqu’on emploie le terme « islamisme », on décrit une situation de fait, à savoir la forme de terrorisme visant à imposer des modèles et des solutions sous le couvert d’une idéologie qui instrumentalise une religion. Il convient donc de bien faire la différence entre « islamisme » et « musulmans ».

De toute évidence, il fallait intervenir au Mali : l’incendie risquait de se répandre. Rappelons-nous l’Algérie il y a vingt ans et les victimes de la guerre civile ! Nous devions prévenir ce risque au Mali.

Le thème dont nous débattons aujourd’hui s’inscrit évidemment dans un cadre plus vaste. Le terrorisme frappe également en Afghanistan, au Nigéria et dans bien d’autres pays encore. Il représente une menace concrète et réelle, qui doit être combattue par la force, comme au Mali, mais aussi par les instruments de la culture et de la politique. L’espoir qui a grandi au cours des dernières années sur les rives sud de la Méditerranée ne peut que nous inciter à avancer dans la bonne direction.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution sur lequel 17 amendements et 5 sous-amendements ont été déposés.

Le président de la commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement. Les amendements nos 4, 5, 13, 17, 2 et 15 sur le projet de résolution ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT* – Ils sont ainsi rédigés.

L’amendement no 4, déposé par Mmes Gerasimova, Nikolaeva, MM. Slutsky, Fetisov, Arshba, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 3, à supprimer la dernière phrase.

L’amendement no 5, déposé par Mmes Gerasimova, Nikolaeva, MM. Slutsky, Fetisov, Arshba, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 3, à insérer le paragraphe suivant : « A cet égard, l’Assemblée, rappelant l’importance de la pleine mise en œuvre de la Résolution 2017 du Conseil de sécurité des Nations unies, engage les autorités libyennes à prendre toutes les mesures voulues pour empêcher la prolifération de tous types d’armes et de matériel connexe, en particulier de missiles sol-air portables, assurer leur bonne garde, et honorer les obligations qui incombent à la Libye en vertu du droit international en matière de maîtrise des armements, de désarmement et de non-prolifération, en appliquant dans leur intégralité les plans qu’elles ont élaborés à cet égard. »

L’amendement no 13, déposé par Mme Durrieu, MM. Bockel, Bapt, Lord Anderson, M. Braga, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 4, à insérer les mots suivants : « A cet égard, l’Assemblée estime que la décision des rebelles touareg constitue une dynamique constructive à encourager pour la résolution pacifique et politique des conflits régionaux. »

L’amendement no 17, déposé par M. Marcenaro, Mme de Pourbaix-Lundin, M. von Sydow, Lord Tomlinson, M. Flego, tend, dans le projet de résolution, à déplacer les paragraphes 6 et 7 après le paragraphe 2.

L’amendement no 2, déposé par MM. Walter, Pushkov, Arshba, Sidyakin, Shlegel, Belyakov, Makhmutov, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 8, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée reconnaît les activités anti-terroristes des forces de sécurité algériennes et la menace perpétuelle que représente Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et les groupes qui lui sont associés. Les gouvernements européens devraient continuer d’aider les autorités algériennes à combattre les menaces terroristes dans la région. »

L’amendement no 15, déposé par Mme Durrieu, MM. Bockel, Bapt, Lord Anderson, M. Braga, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 14, à insérer les mots suivants : « L’Assemblée appelle à cet effet les pays du voisinage à apporter leur soutien au processus politique et à continuer à s’engager activement pour la préservation de la sécurité et l’intégrité territoriale du Mali. »

Y a-t-il des objections à leur adoption ?

Ce n’est pas le cas.

Les amendements nos 4, 5, 13, 17, 2 et 15 sur le projet de résolution sont donc déclarés adoptés définitivement.

Nous en venons à la discussion des autres amendements. Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à trente secondes.

La parole est à M. Walter.

M. WALTER (Royaume-Uni)* – Monsieur le Président, nous disposons généralement, avant le débat des amendements, d’un document préparé par le service de la séance et qui présente chaque amendement en regard du texte de la résolution. Ce document n’était pas disponible avant l’ouverture de la séance. Pensez-vous que nous puissions en disposer rapidement ?

LE PRÉSIDENT* – Cette liste va vous être distribuée.

Pouvons-nous maintenant poursuivre nos travaux, chacun a-t-il bien les documents ?

L’amendement no 8, déposé par Mme Gündeş Bakir, M. Pylypenko, Mme Erkal Kara, M. Ahmet Kutalmiş Türkeş, Mme Lundgren, MM. Dişli, Mustafa, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 1, à supprimer le mot « islamiste ».

La parole est à Mme Gündeş Bakir, pour le défendre.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Le terrorisme n’a pas de religion, il ne convient donc pas d’associer ce mot, dérivé du nom d’une religion, à des notions de crime, de radicalisme ou de terrorisme dans une résolution ou un rapport du Conseil de l’Europe.

Mesdames et Messieurs, nous, musulmans, sommes offensés et blessés par les termes employés dans le rapport à propos de l’islam. Notre Président et le Secrétaire Général Jagland se sont exprimés en ce sens. M. Jagland a déclaré que nous devions arrêter d’employer l’expression « terrorisme islamiste » qui indique que le terrorisme concerne l’islam. Nous devrions dire que le terrorisme, c’est du terrorisme, et qu’il n’a pas de lien avec la religion. C’est précisément ce que je défends aujourd’hui. Je défends exactement les mêmes principes éthiques que ceux qui ont été défendus par notre Secrétaire Général, et j’en appelle à tous mes collègues pour me soutenir et que l’on supprime le terme « islamiste » accolé à celui de « terroriste ».

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Lord Anderson, contre l’amendement.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – Le terrorisme a bien des visages. S’il y avait un terrorisme chrétien, il faudrait le qualifier de tel. Il s’agit de personnes qui prétendent être influencées par l’islam , donc l’expression de terrorisme islamiste, ou quelque chose de ce genre, a bien un sens, appelons un chat un chat.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Dans ce cas, la commission a émis un avis favorable. Précisons que la commission a apprécié différemment l’usage de ce terme selon le contexte dans lequel il est utilisé.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 8 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement no 9, déposé par Mme Gündeş Bakir, M. Pylypenko, Mme Erkal Kara, M. Ahmet Kutalmiş Türkeş, Mme Lundgren, MM. Dişli, Mustafa, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 2, à supprimer le mot « islamistes ».

La parole est à Mme Gündeş Bakir, pour le défendre.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Al-Qaida est une organisation terroriste bien connue, alors que l’islam est une religion de paix. Par conséquent, les méthodes d’Al-Qaida ne sont pas approuvées par les musulmans ordinaires. Les résolutions du Conseil de l’Europe ne devraient pas associer les organisations terroristes et l’islam.

Ce libellé employé dans le rapport correspond au souhait d’Al-Qaida qui veut s’associer aux autres musulmans qui rejettent le mouvement. Cette formulation aiderait Al-Qaida à obtenir plus de soutien, il faut donc éviter ce type de libellé.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Recordon, contre l’amendement.

M. RECORDON (Suisse) – L’auteure de l’amendement se méprend. Il ne s’agit en aucune façon de stigmatiser l’islam dans son ensemble, mais un extrémisme islamiste, de la même manière que je stigmatise les excès de Calvin qui a fait brûler Michel Servet ou l’Inquisition dans ses extrêmes abus que l’on pourrait qualifier de « christianistes ».

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 9 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement no 3, déposé par M. Gross, Lord Anderson, M. Jakič, Lord Tomlinson, Mme Beselia, MM. Farina, Recordon, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 3, à remplacer les mots « l’Assemblée note » par les mots suivants : « L’Assemblée reconnaît la complexité de la situation locale et des politiques et contextes divers des groupes touareg, qui tirent souvent leur origine d’une négligence de longue date dont a été victime le Nord depuis l’époque des colonies et note ».

Cet amendement fait l’objet d’un sous-amendement. La parole est à M. Gross, pour le défendre.

M.GROSS (Suisse)* – Le sous-amendement concerne la fin de l’amendement. Il tend à remplacer les mots « colonies et note » par l’expression « colonies. Elle note ». Le reste est inchangé. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix le sous-amendement.

Le sous-amendement est adopté. 

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Gross, pour soutenir l’amendement no 3.

M.GROSS (Suisse)* – Je me suis déjà exprimé pour dire qu’il faut veiller à ne pas perdre de vue la complexité et la diversité des différents groupes et toute la situation locale, marquée par l’histoire. Nous devons en tenir compte lorsqu’il s’agira de définir une solution qui ne saurait être purement militaire.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Beneyto, contre l’amendement.

M. BENEYTO (Espagne)* – La référence au passé colonial est un élément qui ne me paraît pas avoir sa place ici. Il faut prendre en compte un certain nombre d’éléments, mais pas l’époque coloniale.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 3 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Hancock.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – Pour moi, cet amendement peut excuser les actes de certains de ces mouvements, qui peuvent être attribués au colonialisme. M. Gross a eu l’occasion de s’exprimer. C’est une façon de donner des prétextes au terrorisme, ce n’est pas utile du tout. Si c’était vrai, alors chacun pourrait se servir de ces éléments comme prétexte. On pourrait par exemple, en Angleterre, dire que ce sont les Romains qui sont responsables de tous nos problèmes. Ne donnons pas d’excuses au terrorisme !

M.GROSS (Suisse)* – M. Hancock n’avait pas à prendre la parole ! Mon collègue espagnol s’est exprimé contre l’amendement, je me suis exprimé pour, il n’a plus à parler ! Il faut écouter, il aurait dû entendre qu’il n’est pas question d’excuses ou de prétextes, mais d’expliquer la situation pour pouvoir ensuite définir une issue. Je crois qu’il faudrait quand même qu’il fasse preuve d’un petit peu de discipline. Il parle de la discipline pour les autres, mais ne semble pas se l’appliquer à lui-même.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur Gross, sur le plan de la procédure vous avez raison, nous avons déjà voté, mais dans une Assemblée comme la nôtre, il faut laisser les orateurs s’exprimer autant que possible.

Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement modifié.

L’amendement no 3 modifié est adopté.

M. Mignon, Président de l’Assemblée, remplace M. Hörster au fauteuil présidentiel.

LE PRÉSIDENT – Lord Tomlinson, vous avez la parole.

Lord TOMLINSON (Royaume-Uni)* – J’aimerais connaître, Monsieur le Président, le résultat de ce vote très long et laborieux sur l’amendement no 3. M. Hancock nous a interrompus à plusieurs reprises durant la procédure et j’aimerais bien connaître l’issue du vote.

LE PRÉSIDENT – J’arrive à l’instant, mais quelqu’un pourrait sans doute vous le donner ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – L’amendement no 3 a été adopté tel que modifié, par 67 voix pour, 18 voix contre et 9 abstentions.

LE PRÉSIDENT – Nous poursuivons donc.

L’amendement no 16, déposé par M. Marcenaro, Mme de Pourbaix-Lundin, M. von Sydow, Lord Tomlinson, M. Frécon, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 5, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée est également préoccupée de voir qu’en l’absence de toute solution internationale efficace, l’aggravation de la guerre civile en Syrie crée une situation critique et dangereuse de plus. »

La parole est à M. Marcenaro, pour le soutenir.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – L’amendement no 16 ne fait que constater qu’il y a des sources de conflit potentiel dont doit se préoccuper la communauté internationale car, à défaut, on risque d’avoir une situation dangereuse.

LE PRÉSIDENT – Le sous-amendement no 1 à l’amendement no 16, déposé par Mme Gerasimova, MM. Aligrudić, Ilić, Kox, Seyidov, Mmes Burykina, Borzova, M. Makhmutov, tend, dans l’amendement no 16, après les mots « solution internationale efficace », à insérer les mots suivants : «, qui devrait se fonder sur le communiqué de Genève concernant la Syrie, ».

La parole est à Mme Gerasimova pour le soutenir.

Mme GERASIMOVA (Fédération de Russie)* – J’ai présenté ce sous-amendement parce que le communiqué de Genève du 30 juin 2012 est la seule base pour un règlement politique et diplomatique de la crise en Syrie. L’Assemblée doit donc appeler toutes les parties au conflit en Syrie à cesser le feu et à engager un dialogue politique sur cette base.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de M. Marcenaro sur ce sous-amendement ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – La commission n’a pas examiné ce sous-amendement.

LE PRÉSIDENT – Je sollicitais l’avis de M. Marcenaro, auteur de l’amendement.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – J’y suis favorable à titre personnel.

LE PRÉSIDENT – Votre avis est favorable, mais la commission n’a pas pu se prononcer sur le sous-amendement. Je le mets aux voix.

Le sous-amendement est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous revenons à l’examen de l’amendement no 16, ainsi modifié.

La parole est à M. Beneyto, contre l’amendement modifié

M. BENEYTO (Espagne)* – C’est une petite nuance, mais si nous élaborons un rapport sur le Mali et l’Algérie, ce qui est déjà en soi un sujet complexe et difficile, évoquer la situation syrienne dans ce petit amendement ne me paraît pas tellement compatible avec la rigueur de ce rapport.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission sur cet amendement modifié ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT – Je le mets aux voix.

L’amendement no 16 modifié est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 14, déposé par Mme Durrieu, MM. Bockel, Bapt, Lord Anderson, M. Braga, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 6, à insérer les mots suivants : « L’Assemblée appelle, à cet effet, les pays membres, observateurs et partenaires à soutenir l’action de la CEDAO pour la mise en place de la mission internationale de soutien au Mali (MISMA), les invite à fournir le soutien financier et logistique nécessaires, pour le déploiement rapide des forces de cette mission, et à participer activement à la conférence des donateurs pour la défense du Mali qui se tiendra à Addis Abeba, le 29 janvier 2013. »

La parole est à Lord Anderson.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – Il s’agit de compléter le paragraphe. Si nous voulons soutenir la CEDAO, il faut lui donner les moyens nécessaires, y compris par la formation.

LE PRÉSIDENT – Le sous-amendement no 1 à l’amendement no 14, déposé par la commission des questions politiques et de la démocratie, tend, dans l’amendement no 14, à remplacer les mots « L’Assemblée appelle, à cet effet, les pays membres, observateurs et partenaires à soutenir l’action de la CEDAO pour la mise en place de la mission internationale de soutien au Mali (MISMA), les invite à fournir le soutien financier et logistique nécessaire pour le déploiement rapide des forces de cette mission, et à » par les mots suivants : « Elle leur demande également de », et déplacer l’amendement pour l’insérer à la fin du paragraphe 13.

La parole est à Mme Woldseth, pour le défendre.

Mme WOLDSETH (Norvège), rapporteure* – Il s’agit simplement de rendre le texte plus lisible. J’espère que ce sera soutenu.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de Lord Anderson sur ce sous-amendement ?

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – C’est une amélioration de la rédaction. Nous y sommes favorables.

LE PRÉSIDENT – L’avis de la commission est naturellement favorable.

Je le mets aux voix.

Le sous-amendement est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous revenons à l’examen de l’amendement no 14 ainsi modifié.

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement modifié ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT – Je le mets aux voix.

L’amendement no 14 modifié est adopté.

LE PRÉSIDENT – La présidence a été saisie par Mme la rapporteure de l’amendement oral suivant, déposé au nom de la commission, qui tend, dans le projet de résolution, paragraphe 8, à remplacer les mots « et observateurs du Conseil de l’Europe » par les mots « observateurs du Conseil de l’Europe et partenaires pour la démocratie ».

Je considère cet amendement oral comme recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent. Y a-t-il des objections à la prise en compte de cet amendement oral ?...

Ce n’est pas le cas.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme WOLDSETH (Norvège), rapporteure* – Cet amendement me semble aller de soi.

LE PRÉSIDENT – Personne ne souhaite s’exprimer contre.

L’avis de la commission est évidemment favorable.

Je mets aux voix cet amendement oral.

L’amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 7, déposé par Lord Anderson, M. Flego, Mme Mulić, Earl of Dundee, M. Benton, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 8, après les mots « et observateurs du Conseil de l’Europe. », à insérer les mots suivants : « L’Assemblée reconnaît que pendant de nombreuses années, les autorités et le peuple algérien ont souffert sur leur territoire d’attentats fort violents fomentés par des terroristes qui avaient des visées idéologiques absolutistes ; en conséquence, elle comprend bien pourquoi dans la situation d’urgence créée dans la raffinerie de gaz, les autorités ont opposé une réaction musclée aux terroristes avec lesquels il n’y avait aucune perspective de négociations sérieuses. »

La parole est à Lord Anderson.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – L’Algérie ne figure pas au premier plan de la résolution, mais je pense qu’il est important d’avoir en tête le passé de l’Algérie et les attentats terroristes qui ont été perpétrés sur son territoire pour comprendre la réponse très rapide de l’Algérie à cet attentat sur son territoire.

LE PRÉSIDENT – Le sous-amendement no 1 à l’amendement no 7, déposé par la commission des questions politiques et de la démocratie, tend, dans l’amendement no 7, à remplacer les mots « paragraphe 8, après les mots « et observateurs du Conseil de l’Europe. », insérer les mots suivants », par les mots suivants : « après le paragraphe 8, insérer les mots suivants ».

La parole est à Mme Woldseth.

Mme WOLDSETH (Norvège), rapporteure* – Il s’agit d’un amendement purement technique, afin que l’ensemble du texte soit plus lisible.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de l’auteur de l’amendement ?

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – Je suis toujours favorable à une meilleure lisibilité.

LE PRÉSIDENT – L’avis de la commission est naturellement favorable.

Je mets aux voix ce sous-amendement.

Le sous-amendement est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous revenons à l’amendement no 7 ainsi modifié.

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement modifié ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement modifié.

L’amendement no 7 modifié est adopté.

LE PRÉSIDENT– L’amendement no 6, déposé par Mme Memecan, M. Kayatürk, Mme Erkal Kara, M. Seyidov, Mme Pashayeva, MM. Huseynov, Ahmet Kutalmiş Türkeş, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 8, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée se félicite de l’action déterminée menée par l’Algérie pour délivrer les otages des raffineries de gaz d’In-Amenas. Elle soutient les autorités algériennes dans la lutte contre le terrorisme, qui est un crime contre l’humanité et qui n’a ni religion, ni nationalité, et elle réaffirme sa conviction que pour être efficace, la lutte contre le terrorisme ne peut être menée que dans un esprit de solidarité avec la communauté internationale. »

La parole est à Mme Memecan, pour le soutenir.

Mme MEMECAN (Turquie)* – Je le retire.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le président de la commission.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Je souhaite préciser que cet amendement est retiré par son auteur parce que la question a déjà été traitée au travers de l’amendement précédent, sous-amendé.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 6 est donc retiré.

L’amendement no 10, déposé par Mme Gündeş Bakir, M. Pylypenko, Mme Erkal Kara, M. Ahmet Kutalmiş Türkeş, Mme Lundgren, MM. Dişli, Loutfi, Mustafa, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 10, à supprimer le mot « islamistes ».

La parole est à Mme Gündeş Bakir, pour le soutenir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – L’islam prône la paix et défend des valeurs clairement définies. Les assassinats, la torture, les viols, les amputations et autres crimes évoqués dans le rapport n’ont pas de place dans l’islam. Bien au contraire, l’islam condamne tous ces crimes. Il faut éviter toute association entre une religion pacifique et des crimes abominables. Cette association découle de l’islamophobie ; c’est une sorte de discours de haine. Devons-nous inclure un discours de haine dans une résolution du Conseil de l’Europe ? Il s’agit ici, non pas de l’islam ou de la religion, mais de nos valeurs et de nos principes. Il faut être cohérent.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Bockel, contre l’amendement.

M. BOCKEL (France) – Il ne faut pas avoir peur des mots. Ne pas désigner les choses peut nuire et créer de la confusion. Il est évident que l’islamisme n’est pas l’islam, mais les islamistes qui agissent à Tombouctou s’y réfèrent. Il faut donc le condamner et, ce faisant, défendre le vrai islam. C’est précisément dans l’intérêt de l’islam de dire clairement les choses.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – La commission s’oppose à cet amendement. Je tiens à rappeler encore une fois que nous avons bien réfléchi à l’utilisation de l’adjectif « islamiste ». Il apparaît dans un contexte bien précis. Nous avons admis qu’il devait être supprimé dans certains paragraphes du texte, mais, dans ce cas précis, nous nous opposons à sa suppression.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 10 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 11, déposé par Mme Gündeş Bakir, M. Pylypenko, Mme Erkal Kara, M. Ahmet Kutalmiş Türkeş, Mme Lundgren, MM. Dişli, Loutfi, Mustafa, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 11, à supprimer le mot « islamistes ».

La parole est à Mme Gündeş Bakir, pour le soutenir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – L’islam prône la paix et défend des valeurs clairement définies. Le harcèlement, les mauvais traitements et la violence sexuelle à l’égard des femmes n’ont pas de place dans l’islam. Bien au contraire, l’islam condamne résolument tous ces crimes qui constituent pour lui des péchés très graves. L’islam prône une coexistence pacifique entre hommes et femmes. Il n’est pas du tout question de traiter durement les femmes. Le prophète Mahomet a d’ailleurs dit : « Les meilleurs d’entre vous sont ceux qui se comportent bien vis-à-vis de leur mère. » Comment une religion qui défend ces valeurs pourrait-elle être associée à des crimes aussi terribles ? Je demande donc la suppression de l’adjectif « islamistes ».

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Loncle, contre l’amendement.

M. LONCLE (France) – On peut comprendre les arguments de Mme Gündeş Bakir. Je me suis déjà exprimé sur la sémantique : selon moi, on aurait pu, y compris dans le rapport, trouver d’autres expressions – j’ai parlé pour ma part de « narco-djihadisme » ou de « gangstéro-salafistes ». Même si l’on peut trouver un accord sur les mots « radicaux islamistes », je considère que l’on n’a pas accordé suffisamment d’attention à la sémantique dans cette affaire extrêmement grave. On peut donc comprendre les réactions comme celle de Mme Gündeş Bakir.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 11 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement no 12, déposé par Mme Gündeş Bakir, M. Pylypenko, Mme Erkal Kara, M. Türkeş, Mme Lundgren, MM. Dişli, Loutfi, Mustafa, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 15, à supprimer le mot « islamique ».

Si cet amendement est adopté, l’amendement oral tombe.

La parole est à Mme Gündeş Bakir, pour soutenir l’amendement no 12.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Le Coran dit : « Si quelqu’un tue une autre personne, c’est comme s’il avait tué l’ensemble de l’humanité. Si quelqu’un a sauvé une vie, c’est comme s’il avait sauvé la vie de toute l’humanité. » Comment une religion qui affirme cela peut-elle être associée au terrorisme ? De même que l’on ne parle pas de terrorisme « juif » ou « chrétien », il n’est pas juste d’employer des expressions telles que « terrorisme islamique » dans nos résolutions, puisque le terrorisme n’a pas de religion.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Loncle, contre l’amendement.

M. LONCLE (France) – Je voudrais quand même faire observer à notre collègue qu’Aqmi signifie « Al-Qaida au Maghreb islamique ». Ce n’est pas nous qui avons trouvé cette appellation ; ce sont les bandes qui se sont organisées dans les conditions que l’on sait au Sahel.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 12 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous en venons à l’amendement oral.

La présidence a été saisie par Mme la rapporteure de l’amendement oral suivant, déposé au nom de la commission :

« Dans le projet de résolution, paragraphe 15, remplacer le mot " islamique " par le mot " islamiste ". »

Je considère cet amendement oral comme recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent. Y a-t-il des objections à la prise en compte de cet amendement oral ?...

Il n’y a pas d’objection. Nous allons donc l’examiner.

La parole est à Mme la rapporteure pour le défendre.

Mme WOLDSETH (Norvège), rapporteure* – Il s’agit de faire preuve de cohérence et d’éviter d’employer dans un paragraphe tantôt un terme, tantôt un autre. J’ai simplement voulu corriger le texte en utilisant l’adjectif « islamiste » partout.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l’amendement oral.

L’amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement n1, déposé par Lord Anderson, MM. Gross, Mota Amaral, Earl of Dundee, M. Benton, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 15, à ajouter la phrase suivante : « Une telle aide peut impliquer une intervention militaire, notamment la mise à disposition d’unités militaires et d’une formation militaire et la poursuite de l’aide au développement, mais en définitive, la stabilité durable ne pourra être atteinte que grâce à des lignes directrices politiques aboutissant à la reconstruction nationale, la consolidation de la démocratie et le respect des droits de l’homme. »

Cet amendement fait l’objet d’un sous-amendement no 1.

La parole est à Lord Anderson, pour soutenir l’amendement.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – Il s’agit de terminer sur une note positive, conforme aux idéaux du Conseil de l’Europe : ce n’est qu’avec un règlement politique que l’on obtiendra une stabilité durable.

LE PRÉSIDENT – Le sous-amendement n1 à l’amendement n1, déposé par MM. Aligrudić, Ilić, Gross, Mme Djurović, M. Kox, Seyidov, Mmes Burykina, Borzova, M. Makhmutov, Mme Gerasimova, tend, dans l’amendement no 1, après les mots « intervention militaire », à insérer les mots suivants : « autorisée par le Conseil de sécurité de l’Onu ».

La parole est à M. Aligrudić, pour le soutenir.

M. ALIGRUDIĆ (Serbie)* – Nous savons que l’intervention française au Mali est conforme au droit international et qu’elle a été autorisée par le Conseil de sécurité des Nations Unies. Ce sous-amendement vise à rappeler que toute intervention militaire dans le cadre de la résolution est pleinement conforme au droit international car autorisée par le Conseil de sécurité des Nations Unies.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Bockel, contre le sous-amendement.

M. BOCKEL (France) – Je saisis cette possibilité de m’exprimer, alors même que je ne suis pas opposé au sous-amendement – mais d’autres intervenants l’ont fait tout à l’heure et ce n’est d’ailleurs pas mon habitude –, pour saluer le rôle et la place de l’Algérie et évoquer les difficultés auxquelles ce pays est confronté par contrecoup. S’il doit y avoir une solution politique, il faut que l’Algérie y ait toute sa place car elle joue un rôle essentiel à nos côtés dans ce conflit.

LE PRÉSIDENT - Quel est l’avis de l’auteur de l’amendement sur le sous-amendement ?

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* - J’aurais préféré que l’on dise simplement : « conformément au droit international », afin de pouvoir prendre en compte d’autres normes juridiques. Cela étant, je suis prêt à accepter le sous-amendement.

LE PRÉSIDENT - Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – La commission ne l’a pas examiné, mais à titre personnel j’y suis favorable.

LE PRÉSIDENT – Je le mets aux voix.

Le sous-amendement est adopté.

LE PRÉSIDENT - Nous en revenons à l’amendement ainsi modifié.

La parole est à M. Hancock contre cet amendement.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* - Le terme « peut » me gêne dans l’amendement. Il est tout à fait certain qu’une intervention militaire est nécessaire au Mali, et peut-être aussi, à terme, pour aider l’Algérie. Il serait plus crédible de dire que l’aide « impliquera sans aucun doute une intervention militaire ».

LE PRÉSIDENT - Quel est l’avis de la commission sur l’amendement modifié ?

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT - Je le mets aux voix.

L’amendement n1 modifié est adopté.

LE PRÉSIDENT - Nous allons procéder maintenant au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc.13107 tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (90 voix pour, 1 voix contre, 5 abstentions).

Je félicite le rapporteur. Le travail sur le projet de résolution a été fait très rapidement pendant ces deux derniers jours par le secrétariat de la commission. Je remercie aussi le président de la commission.

2. Discours de M. Štefan Füle, commissaire européen en charge de l’élargissement et de la politique européenne de voisinage

LE PRÉSIDENT - L’ordre du jour appelle maintenant le discours de M. Štefan Füle, commissaire européen en charge de l’élargissement et de la politique européenne de voisinage.

Monsieur le commissaire, c’est un grand plaisir pour moi de vous accueillir parmi nous. Comme vous le savez, j’ai fait du rapprochement avec l'Union européenne une des priorités du mandat qui m’a été confié par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. Votre visite aujourd'hui parmi nous est donc très symbolique à mes yeux.

Au cours des dernières années, nous avons fait beaucoup pour renforcer le partenariat entre les institutions de l'Union européenne et le Conseil de l'Europe, notamment dans les pays qui aspirent à devenir membres de l’Union, ainsi que dans notre voisinage. Initiée l’année dernière, la mise en œuvre de nos rencontres régulières constitue déjà en elle-même un mécanisme efficace d’échange d’informations et de coordination de nos messages politiques. Je suis vraiment très heureux que nous ayons déjà pu nous rencontrer par deux fois à Bruxelles, et aujourd'hui pour la troisième fois ici à Strasbourg. Votre intervention dans l’hémicycle place notre coopération à un niveau plus avancé encore, et elle est le parfait témoignage, l’éclatante démonstration de notre volonté commune, de cette envie que nous avons de travailler ensemble. Nous ne pouvons que nous en féliciter.

Comme nous l’avons souligné dans notre déclaration conjointe, qui bien sûr est à la disposition de l’ensemble des parlementaires de cette Assemblée, notre forte coopération et notre engagement auprès de nos partenaires, à l’Est et dans les Etats de notre voisinage sud, représentent un outil déterminant pour soutenir les transformations nécessaires et le développement d’une démocratie profondément ancrée. Notre coopération dans ces pays, au niveau politique et sur le terrain, est déjà très bonne, mais sans doute pourrions-nous faire mieux encore. Pour cette raison, nous allons écouter votre intervention avec un grand intérêt, afin d’identifier conjointement de nouvelles opportunités de coopération et de nouvelles synergies.

Monsieur le commissaire, je vous donne la parole.

M. FÜLE*, commissaire européen à l’élargissement et à la politique européenne de voisinage* – Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée, Monsieur le Secrétaire Général, ceci est un moment très particulier pour moi. Je suis ravi de l’occasion qui m’est donnée aujourd'hui de m’adresser à l’Assemblée parlementaire. Le moment est bien choisi, après l’adoption du paquet Élargissement 2012, en octobre, et les conclusions du Conseil sur l’élargissement, le mois dernier, qui fixent un programme ambitieux pour le premier semestre 2013. Nous attendons également avec impatience l’adoption du prochain paquet Voisinage européen, en mars prochain.

J’aimerais exprimer ma reconnaissance pour la coopération très étroite et efficace avec le Conseil de l'Europe, en particulier pour ce qui concerne la mise en œuvre des critères politiques de Copenhague par les pays candidats et les candidats potentiels dans le domaine de la protection de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme. Je reconnais le rôle crucial joué par le Conseil de l'Europe, avec nos voisins à l’Est et au Sud, pour renforcer la démocratie et protéger les droits de l’homme.

Mesdames et Messieurs, au cours des dernières années, nous avons vu un certain nombre de pays d’élargissement faire des progrès considérables. La Croatie est ainsi en bonne voie pour devenir le 28e Etat membre de l’Union, la Serbie est un pays candidat, et les négociations d’adhésion ont commencé avec le Monténégro.

En 2013, il sera essentiel pour la crédibilité de notre politique que la dynamique de l’élargissement soit maintenue. Cela veut dire qu’il faudra continuer à échanger avec les gouvernements et toutes les autres parties prenantes importantes afin que l’élargissement avance et que dans douze mois, nous puissions dire que nos efforts ont produit leurs fruits.

Le Conseil de l'Europe est un partenaire clé pour différents aspects du processus d’élargissement. Notre coopération dans des programmes conjoints et des projets tels que le processus de Sarajevo sur les réfugiés s’est avérée excellente. Nous apprécions aussi les activités que déploie le Conseil en matière de lutte contre la discrimination et de promotion de l’intégration des Roms.

La Commission soutient aussi pleinement l’enquête menée sous les auspices d’Eulex sur les allégations, évoquées dans le rapport Marty, relatives aux crimes commis pendant et après le conflit au Kosovo.

Avant d’aborder le programme d’élargissement pour les douze mois à venir, j’aimerais d’abord évoquer quelques questions horizontales qui me semblent extrêmement importantes et qui vont peser sur cet élargissement.

Je commencerai par les questions bilatérales. Nous savons qu’il est important de tirer les enseignements du passé afin que le processus d’élargissement reste crédible et permette aux pays candidats et aspirants de se transformer efficacement. Le meilleur exemple en est le thème clé du paquet 2012, la priorité donnée à l’Etat de droit. Cette question centrale pour l’ensemble du processus d’élargissement est susceptible de faire une différence importante, car elle permet de renforcer les institutions et d’améliorer la vie de tous les jours des citoyens.

Notre approche, aux chapitres 23 et 24, s’intéresse plus particulièrement à l’Etat de droit. Les choses ont évolué, et pour tenir compte de notre expérience, aujourd’hui nous ouvrons ces chapitres au début des négociations et les refermons à la fin, afin de permettre à tous les pays concernés de s’améliorer et de prouver leurs performances dans un domaine très important. Nous montrons ainsi que le processus d’élargissement fonctionne.

Ensuite, il y a les questions bilatérales ouvertes. Il s’agit là d’un défi parce que nous avons clairement annoncé que nous ne voulions pas que ces questions fassent irruption dans l’Union européenne. Nous ne voulons pas que des « mines » bilatérales explosent au beau milieu d’un processus d’adhésion.

Ce qui m’amène à la question importante : comment aborder ces questions bilatérales ? Certaines peuvent être réglées entre les parties concernées, d’autres avec l’aide de l’Union européenne, comme cela a été le cas pour la Croatie et la Slovénie. Les pays peuvent aussi faire appel à la Cour de justice internationale de La Haye. Il est important que cette question soit reconnue, en 2013, comme un élément majeur dans les bonnes relations de voisinage. Il s’agit d’un principe auquel nous ferons référence de plus en plus à chaque fois que nous nous approcherons de la prochaine étape de l’élargissement.

Par ailleurs, il est important de voir comment nous pouvons concilier les 130 000 ou 140 000 pages de l’acquis, de la législation adoptée ces dernières années, avec tout ce qui se prépare, tout ce qui est décidé à chaque session du Conseil ou du Parlement européen, tout ce qui permet le renforcement de l’intégration, surtout dans la zone euro. La crise a montré qu’il est important de faire vivre l’acquis, qu’il est important que non seulement les pays candidats, mais également les pays aspirants à une adhésion, soient associés au changement dans la gouvernance économique de l’Union européenne.

La Commission européenne publiera son dernier rapport de suivi sur la Croatie, ainsi qu’une série de rapports. À partir de ceux-ci, le Conseil examinera si, dans le cas où suffisamment de progrès ont été réalisés, il convient d’ouvrir des négociations d’adhésion avec la Serbie, « l’ex-République yougoslave de Macédoine », et s’il convient d’approuver un mandat pour engager les négociations avec le Kosovo sur un accord de stabilisation et d’association.

Selon les progrès réalisés, un rapport sur l’Albanie est envisageable et j’attends avec impatience l’avancement des négociations d’adhésion avec le Monténégro, la Turquie ainsi qu’avec l’Islande, après les élections d’avril.

L’année 2013 apportera, je l’espère, des progrès dans le cadre du dialogue visa avec le Kosovo et la Turquie.

J’en viens maintenant à la Bosnie-Herzégovine. Vous êtes tous au courant de la situation de blocage du fait de l’arrêt Sejdić-Finci de la Cour européenne des droits de l’homme. Un an avant les élections n’est pas peut-être le meilleur moment pour envisager des compromis. Mais il n’y a pas d’autres choix pour la Bosnie-Herzégovine. Le Secrétaire Général Jagland a dit clairement que les prochaines élections ne pourraient pas répondre aux critères européens si cette question n’était pas réglée, et je le soutiens pleinement.

Non seulement la non-exécution de l’arrêt Sejdić-Finci retarde l’accord de stabilisation et d’association, mais elle empêche aussi une demande d’adhésion réelle à l’Union européenne. Une fois que l’accord de stabilisation et d’association entrera en vigueur, l’Union européenne pourra soutenir la Bosnie-Herzégovine pour qu’elle complète les lacunes de Dayton.

Le chef de délégation et représentant spécial de l’Union européenne, M. Sorensen, a reçu un mandat politique renforcé lors de sa visite à Bruxelles, la semaine dernière. La baronne Ashton et moi-même avons déclaré très clairement qu’il bénéficiait de notre soutien plein et entier pour intensifier ses contacts avec les dirigeants politiques et représentants de gouvernement, en vue de trouver une solution. J’ai également fait savoir clairement aux représentants de la Bosnie-Herzégovine que deux mythes devraient être dissipés lorsqu’il s’agit de l’exécution de l’arrêt Sejdić-Finci. Tout d’abord, il n’est pas vrai que les Etats membres de l’Union européenne en viendront à réduire le niveau d’exigence pour une demande d’adhésion si les autorités de Bosnie-Herzégovine continuaient à ne pas trouver de solution. Ensuite, il n’est pas vrai non plus que de retarder sans cesse l’exécution de cet arrêt finirait par déboucher sur une situation qui serait plus favorable après les prochaines élections parce que nous n’évaluerions pas ces élections au regard des normes exigées. C’est maintenant qu’il faut une solution. Et, le rôle des institutions de Strasbourg dans l’aide apportée à la Bosnie-Herzégovine étant crucial, je vous remercie pour votre coopération.

Mesdames et Messieurs, les temps sont difficiles pour l’Europe et l’élargissement continue à faire partie des solutions. L’Union européenne n’a pas pour propos de construire des murs mais plutôt de supprimer les divisions par les valeurs et les principes. Il n’y a pas d’instruments de transformation plus puissants que l’élargissement. Et nous devons continuer à l’utiliser avec sagesse.

J’en viens maintenant à notre politique européenne de voisinage. Suite au réexamen de mai 2011, l’Union européenne a mis davantage l’accent sur l’engagement partagé dans sa politique de voisinage pour tout ce qui concerne les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit. Nous avons introduit le principe du « plus pour plus ». La différenciation et la propriété partagée figurent au centre de cette politique. La mise en œuvre du « plus pour plus » se fonde sur l’idée que plus de progrès sur la voie des réformes débouche sur une relation plus forte avec l’Union européenne. Mais cela veut aussi dire qu’il faut être plus en phase avec les citoyens, qu’il ne faut pas se contenter des contacts avec les gouvernements, mais proposer aussi les partenariats à la société civile.

J’ai vu le travail formidable que réalise la société civile partout dans ce voisinage, il est important d’apporter une assistance durable et efficace à cette société civile pour que nous puissions ensemble atteindre nos objectifs partagés. Nous avons créé la Plate-forme pour la démocratie, nous renforçons le dialogue avec la société civile, mais il faut encore faire plus.

Notre nouvelle approche nous donne également la possibilité de renforcer nos contacts avec d’autres agents et moteurs de changement, parmi lesquels le Conseil de l'Europe. Je pense que tout incident et tout événement dans ce voisinage nous concerne tous. La politique de voisinage ne concerne pas que les institutions, nous devons l’ouvrir de façon que les acteurs non gouvernementaux et d’autres organisations internationales puissent tous partager ses objectifs et contribuer à son succès. Nous avons pour intention de publier le prochain paquet « Politique de voisinage » au mois de mars. Il contiendra une communication et de nombreux rapports.

Plus d’efforts seront nécessaires en 2013 pour mettre en œuvre toutes les recommandations clés. Il y aura une procédure annuelle sur notre partenariat avec le voisinage, tout particulièrement dans le domaine des libertés civiles et de l’Etat de droit. Ceci afin que nos engagements ambitieux constituent une réelle différence sur le terrain. Nous pensons que le moment est venu d’améliorer l’approche pour y inclure la PESC et la politique de sécurité et de défense communes afin que les outils de ces politiques répondent au mieux aux défis de sécurité.

Dans ce contexte général, la coopération avec le Conseil de l’Europe est essentielle et stratégique. Le Conseil de l'Europe peut apporter un plus indiscutable et indispensable du fait de sa dimension paneuropéenne, de sa grande expérience de rédaction de normes légales et d’harmonisation de législations, de construction d’institutions démocratiques.

L’expertise du Conseil de l'Europe et sa valeur ajoutée dans cinq domaines clés nous intéressent plus particulièrement : premièrement, la gouvernance constitutionnelle ; deuxièmement, la réforme de la justice ; troisièmement, la lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent ; quatrièmement, la promotion des valeurs démocratiques européennes ; cinquièmement, la consolidation de la démocratie. Un intérêt particulier est à porter à la liberté d’association et de réunion et au dialogue interculturel.

Notre expérience de coopération avec le Conseil de l'Europe dans notre voisinage oriental montre combien il est important de pouvoir compter sur son soutien à l’établissement de démocraties durables. Le travail conjoint de l’Eastern Partnership Summit, financé par l’Union européenne, la coopération multilatérale dans le cadre de la plate-forme pour la démocratie, la bonne gouvernance et la stabilité sont autant d’outils et d’efforts qui représentent une réelle différence pour nos voisins. La plate-forme et ses panels ont pour but de créer des normes de haut niveau dans divers domaines : élections, réformes du pouvoir judiciaire, lutte contre la corruption et contre la cybercriminalité.

En novembre, le deuxième sommet, qui se tiendra à Vilnius, sera consacré à la mise en œuvre du processus de réforme dans les pays partenaires à partir de la feuille de route du partenariat oriental. Les efforts des pays partenaires pour la mise en œuvre vigoureuse de ces réformes offriront un cadre efficace à ce sommet.

Nous l’avons toujours affirmé : pour les pays du partenariat, les possibilités offertes par l’article 49 du Traité de l’Union européenne restent d’actualité. J’entends ainsi la possibilité de s’associer à des projets partagés s’il y a partage de principes de liberté, de démocratie et de respect de l’Etat de droit. Le Conseil de l'Europe et l’Union européenne partagent cet intérêt et souhaitent travailler ensemble avec nos voisins du Sud.

J’aimerais rendre hommage aux efforts du Conseil de l'Europe, notamment pour l’adoption du statut de partenaire pour la démocratie, le dialogue de coopération avec le Maroc, la Tunisie et la Jordanie ainsi que pour l’ouverture de bureaux du Conseil de l'Europe à Tunis et à Rabat, et, bien sûr, pour notre programme conjoint : renforcement de la réforme démocratique auprès de nos partenaires du Sud.

Je reconnais le soutien important que les organes spécialisés du Conseil de l'Europe pourraient apporter à d’autres partenaires dans la région et surtout le soutien que seraient susceptibles d’offrir votre Assemblée ainsi que la Commission de Venise.

Ensemble, avec le Conseil de l'Europe, nous relevons ce défi, car nous voulons rendre notre offre plus attrayante auprès de nos partenaires et les convaincre qu’un engagement, des échanges intensifiés avec l’Union européenne, le respect des valeurs défendues par le Conseil de l'Europe sont un plus et que cela reflète les aspirations légitimes des citoyens dans les pays du voisinage.

Pour l’Union européenne, l’objectif ultime pour la région est une intégration au marché intérieur, l’élargissement de la zone économique afin d’y inclure des partenaires et d’y proposer nos normes. Expliquer les avantages que présentent ces projets de longue haleine est un défi. C’est plus complexe que pour nos partenaires à l’Est. Une telle ambition doit être rendue plus visible, plus concrète et expliquée aux populations des pays concernés.

La coordination entre l’Union européenne et le Conseil de l'Europe est centrale pour une action cohérente et efficace. Nous avons besoin que tous produisent des efforts pour atteindre les objectifs communs et soutenir nos valeurs communes. Je suis convaincu que la clé est de travailler main dans la main, d’apporter le meilleur soutien possible à un processus démocratique dans les pays partenaires. J’espère que nous aurons la possibilité d’élargir à l’avenir notre collaboration pour la rendre encore plus stable et plus stratégique. Je vous remercie de votre attention.

J’attends avec impatience le débat qui va suivre.

LE PRÉSIDENT* – Merci beaucoup, Monsieur le commissaire européen.

Mes chers collègues, nous avons un programme un peu serré. M. le commissaire m’a demandé s’il était possible de regrouper plusieurs questions. Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je vous propose de donner la parole aux porte-parole des groupes auxquels M. le commissaire répondra globalement.

La parole est à M. Vareikis, au nom du Groupe du parti populaire européen.

M. VAREIKIS (Lituanie)* – Monsieur le commissaire, vous avez indiqué que l’Union européenne était une union de valeurs. La politique de voisinage pose un problème. Je pense à l’affaire Ioula Timochenko ou à l’affaire Loutsenko. En quoi cela influencera-t-il votre point de vue sur la politique de voisinage ? Ces questions sont-elles prioritaires pour vous ?

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Mme Vučković, au nom du Groupe socialiste.

Mme VUČKOVIĆ (Serbie)* – Malgré les progrès indéniables réalisés par les pays de l’ouest des Balkans, on relève un moindre appui populaire en faveur des réformes. Selon vous, est-ce parce que l’Union européenne s’est notamment concentrée sur les priorités politiques et insuffisamment sur les réformes économiques et sociales dans ces sociétés ? N’est-il pas nécessaire aujourd’hui d’encourager les pays de l’ouest des Balkans pour ranimer l’enthousiasme à l’égard des réformes et de l’élargissement ?

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Mme Fusu, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe

Mme FUSU (République de Moldova) – Monsieur le commissaire, cinq pays membres du Conseil de l'Europe participent également au partenariat oriental, à savoir l’Ukraine, la Géorgie, l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la République de Moldova. Peut-on considérer le partenariat comme une antichambre de l’intégration européenne et comment s’applique la notion du « more for more » ou « plus pour plus » ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à Sir Roger Gale, au nom du Groupe démocrate européen.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Etant donné la porosité des frontières de l’espace Schengen, M. le commissaire peut-il donner à l’Assemblée l’assurance que tout élargissement futur sera accompagné par des propositions de renforcement de la sécurité aux frontières ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Petrenco, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Monsieur le commissaire, comme vous connaissez bien la situation dans la République de Moldova, vous ne pouvez ignorer que tous les organes du pouvoir exécutif y ont été répartis entre quelques forces politiques ; que les services secrets et la Cour suprême de justice sont soumis au pouvoir exécutif, ce qui est inacceptable dans un pays démocratique. Peut-on considérer que la Moldova est un succès du Partenariat oriental ? Si tel est le cas, tout le Partenariat n’est-il pas un immense échec ? Ne serait-il pas temps de définir certaines priorités à la Moldova, comme de supprimer la mafia et de chasser les criminels des plus hautes instances de l’Etat ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le commissaire européen.

M. LE COMMISSAIRE EUROPÉEN* – Monsieur Vareikis, le problème des décisions judiciaires à motivation politique nous préoccupe au plus haut point. Sur la base des propositions de Mme Ashton et de moi-même, nous avons indiqué à la fin de l’année dernière que les accords d’association négociés avec l’Ukraine, qui sont un instrument très important pour faire progresser l’association politique et l’intégration économique, pourraient être signés à l’occasion du sommet de Vilnius à condition que des progrès soient constatés dans trois domaines, dont celui-ci. C’est également pourquoi nous avons appuyé la mission Kwasniewski-Cox envoyée par le Président du Parlement européen, et que j’ai fait de cette question l’une des priorités de mon voyage en Ukraine les 7 et 8 février prochains.

Madame Vučković, j’ai admis dans mon intervention qu’il existait un écart croissant entre les acquis du passé et les défis actuels. Lors d’une réunion à Dublin, il y a trois jours, j’ai présenté aux pays candidats à l’adhésion des suggestions concrètes pour qu’ils traitent des questions économiques et sociales et que s’engage un dialogue avec la Commission sur ces questions. Celle-ci peut les aider à relever ces défis grâce à des instruments de préadhésion et d’assistance et grâce à une coopération renforcée avec les institutions financières européennes.

Le Partenariat oriental concerne six pays. Il ne s’agit en aucune façon d’une antichambre de l’Union, et j’ai rappelé dans mon intervention que, dans notre nouvelle politique de voisinage, nous nous référons pour l’adhésion à l’article 49 du Traité de Lisbonne. Il existe une cloison très nette entre les deux. Le travail mené dans le cadre du Partenariat oriental ne vise pas à abaisser les critères d’adhésion à l’Union, ni à remettre en question le rôle des Etats membres, mais à souligner le fait que, si des pays ont des aspirations européennes, des accords d’association se fondant sur les valeurs et les principes sur lesquels repose ce partenariat est la meilleure manière de se rapprocher de l’Union européenne, pour un jour pouvoir invoquer l’article 49 du Traité de Lisbonne.

Sir Roger Gale, je vous le garantis : la question de la sécurité renforcée aux frontières sera abordée. Je peux même vous dire que nous avons également l’intention de créer, à l’intérieur des pays, les conditions nécessaires pour que les faits dont nous avons été récemment témoins, c’est-à-dire l’afflux de demandeurs d’asile en provenance de certains pays de l’ouest des Balkans, ne se reproduisent plus.

J’avais également évoqué cette question dans mon discours : l’élargissement et le processus d’adhésion ne peuvent être un pur exercice formel. Lorsque nous sommes en négociation avec des pays qui ont connu par le passé l’expérience de régimes totalitaires, il importe de dépasser les aspects purement formels et de tenir compte de l’histoire de ces pays. Dans cette perspective, les chapitres traitant des valeurs et des principes sont très importants. Les chapitres 23 et 24 traitent précisément des libertés fondamentales, de la réforme du système judiciaire, de la liberté, de la justice et de la sécurité. Pour qu’un pays puisse entrer dans le système Schengen, il convient de répondre aux principales exigences. Ces chapitres sont ouverts dès le début du processus, et ne sont refermés qu’à la fin.

Lorsque nous travaillons avec les pays candidats, nous essayons de donner des références, un cadre précis. Les Etats membres auront la maîtrise entière du processus d’élargissement, ce qui leur permettra, non seulement de surveiller les progrès réalisés pendant la durée des négociations – qui se compte en années et non en mois –, mais aussi de guider l’ensemble du processus. Je ne doute pas qu’au terme de celui-ci, vous constatiez que la sécurité aux frontières s’est améliorée et qu’il y a bien d’autres résultats encore !

Oui, Monsieur Petrenco, la République de Moldova est une réussite du Partenariat oriental. Je le dis tout en étant parfaitement conscient des difficultés qui subsistent. Je considère en effet que le processus est en marche, même si les incidents qui se sont produits montrent qu’il reste encore beaucoup à faire pour garantir l’Etat de droit. Nous avons des contacts étroits avec les autorités moldoves pour faire en sorte que plus la République de Moldova se rapproche de l’Union européenne, plus nous les aidions à résoudre ces problèmes. Le Partenariat oriental réussit précisément grâce à cela : il ne s’agit pas seulement de fixer des objectifs ambitieux, ni de fournir aux Etats des instruments comme les accords d’association, les instruments d’intégration économique ou la libéralisation du régime de visas, mais aussi de renforcer les rapports avec la Commission et les Etats membres.

Le principe « plus pour plus » ne vaut pas uniquement pour les pays du Sud, mais aussi pour les pays de l’Est – avec bien entendu d’autres principes, comme celui de la différenciation. Seuls les partenaires du partenariat oriental qui s’attèlent sérieusement au processus de réforme reçoivent davantage de financements.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Monsieur le commissaire européen. Je vous propose d’entendre à nouveau une série de cinq questions de trente secondes chacune.

La parole est à Mme Bourzai.

Mme BOURZAI (France) – Monsieur le commissaire, le Conseil des Affaires étrangères du 25 juin dernier a rappelé les enjeux de la coopération mise en place entre les pays de l’Asie centrale et l’Union européenne. Celle-ci souhaite notamment que l’Ouzbékistan puisse accéder rapidement à l’Organisation mondiale du commerce et que le partenariat avec ce pays en matière de sécurité soit renforcé. Je rappelle par ailleurs que les sanctions européennes adoptées à l’égard de ce pays ont été levées en 2009 et que l’Union européenne dispose d’une délégation sur place. Quelle est votre appréciation de l’état de la démocratie en Ouzbékistan actuellement ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Zohrabyan.

Mme ZOHRABYAN (Arménie)* – La Résolution du Parlement européen du 7 avril 2011 sur la révision de la politique européenne de voisinage invite les institutions européennes à développer des liens de confiance avec des pays extérieurs à l’Union, par des consultations et des contacts informels ? Quelle est votre position sur cette approche novatrice, qui vise à garantir aux habitants de ces pays les mêmes droits que ceux des citoyens européens ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Gündeş Bakir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Comment analyser la position de pays qui bloquent l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne ? Pensez-vous que l’obstruction du processus d’adhésion par certains pays européens soit de l’intérêt de l’Union ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Gaudi Nagy.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Monsieur Füle, au mois d’octobre dernier, vous avez affirmé que la politique d’élargissement et de voisinage de l’Union européenne était fondée sur l’Etat de droit et que le processus d’adhésion de la Serbie dépendait de la situation au Kosovo.

Je voudrais attirer votre attention sur la situation des milliers de Hongrois qui vivent dans le Nord de la Serbie et dont les droits de l’homme sont violés. Pourriez-vous placer cette question au cœur des pourparlers avec la Serbie ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Cağlar, conformément à la Résolution 1376(2004) de l’Assemblée parlementaire.

M. ÇAĞLAR (représentant de la communauté chypriote turque)* – Je suis parlementaire chypriote turc et je me félicite de pouvoir m’exprimer aujourd’hui devant vous, Monsieur Füle, alors qu’il n’existe toujours pas de délégation chypriote turque à l’Union européenne.

En vertu de la Résolution 1376 de cette Assemblée, qui me permet d’assister au débat sans droit de vote, je voudrais vous demander à quel moment l’Union européenne s’inspirera de ce précédent et reconnaîtra les Chypriotes turcs ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le commissaire européen.

M. LE COMMISSAIRE EUROPÉEN* – L’Ouzbékistan ne fait pas partie de la zone dont je suis responsable. Je ne peux donc pas me prononcer sur l’état de la démocratie dans ce pays.

S’agissant des chapitres qui bloquent les négociations d’adhésion avec la Turquie, il me semble important de souligner que nous en avons ouvert treize et clos un, à titre préliminaire, sur les trente-cinq au total. Huit chapitres font l’objet d’un blocage unanime de tous les Etats membres, sur la base de la recommandation de la Commission européenne. En effet, la Turquie n’a pas respecté tous ses engagements dans le cadre du Protocole d’Ankara. Il est vrai que d’autres chapitres sont également bloqués unilatéralement.

Pendant cinq présidences successives de l’Union, nous ne sommes pas parvenus à ouvrir de nouveaux chapitres mais nous voulons aujourd’hui créer l’élan nécessaire pour remettre le processus d’adhésion sur les rails. Nous devons écouter l’opinion publique. Par ailleurs, il est souhaitable que l’Union européenne continue de servir de référence aux réformes en Turquie.

L’année 2013 sera cruciale pour l’Union européenne. Les Etats membres de l’Union auront l’occasion de réfléchir à nouveau au processus en cours avec la Turquie, qui peut elle-même décider de s’engager rapidement sur trois chapitres. La Turquie détient la clé du déblocage de huit chapitres. Lorsqu’elle respectera le protocole additionnel à l’Accord d’Ankara, alors la Commission proposera aux Etats membres de l’Union de dégeler ces chapitres. Il est indispensable de remettre les négociations sur les rails.

La Turquie est un pays crucial pour l’Union européenne, et ce pour de nombreuses raisons. Je ne crois pas, comme certains le pensent, que la Turquie ait plus besoin de l’Union que l’inverse. Dans notre village planétaire, alors que la pression des marchés financiers s’intensifie, l’Union européenne doit continuer de s’agrandir et de se renforcer. Certains pensent qu’avec chaque nouveau membre, l’Union s’affaiblit. C’est faux ! La République tchèque a adhéré à l’Union européenne en 2004 et je ne pense pas qu’elle ait affaibli l’Union. L’élargissement n’est pas un problème mais une solution. Il est l’ADN de l’Union européenne depuis sa création. Les deux processus, élargissement et approfondissement, ne sont pas séparés. Au contraire, ils interagissent.

L’Etat de droit est un thème primordial dans nos débats avec la Serbie. Cette notion recouvre les droits des minorités et tous les aspects que vous avez abordés. Je ne suis pas seulement en contact avec les autorités de Belgrade, mais également avec les autorités de Voïvodine. Croyez-moi, si j’avais le sentiment que la démocratie ou que d’autres valeurs étaient en péril en Voïvodine, j’interviendrais. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de problème. La dernière fois que nous nous sommes parlé, nous avons évoqué le budget et les ressources dont avait besoin la Voïvodine, et c’est une question que nous gardons à l’examen en veillant, au travers de nos contacts avec les autorités et en nous appuyant sur notre instrument le plus puissant, la conditionnalité, à ce que les autorités progressent et avancent en matière de droit des minorités.

C’est un honneur d’avoir entendu un représentant des Chypriotes turcs dans cette Assemblée. Je ne peux évidemment pas m’exprimer au nom du Parlement européen ni de ses membres, mais je transmettrai ce message, soyez-en assuré.

La deuxième question, si je l’ai bien comprise, portait sur les Etats non membres du Conseil de l’Europe. Monsieur le Président, serait-il possible de l’entendre à nouveau ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Zohrabyan.

Mme ZOHRABYAN (Arménie) – Dans la Résolution du Parlement européen du 7 avril 2011 sur la révision de la politique européenne de voisinage, il est demandé aux institutions européennes de mettre au point davantage de mesures et de programmes destinés à renforcer la confiance, notamment par des consultations et des contacts informels, avec les pays non reconnus, afin de soutenir la culture civique. Dans ce contexte, quelle est votre position sur cette approche novatrice pour vous assurer que les habitants de ces pays bénéficient des mêmes droits que les habitants de l’Europe ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le commissaire européen.

M. LE COMMISSAIRE EUROPÉEN* – Je dois dire que je suis gêné pour vous répondre. Vous faites mention d’un paragraphe que j’ai du mal à replacer dans son contexte parce que plusieurs éléments me viennent à l’esprit. Je suggère à Mme Zohrabyan de m’envoyer sa question par écrit, afin que je lui réponde précisément.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le commissaire, nous ferons en sorte que la question vous soit transmise.

La parole est à M. Xuclà.

M. XUCLÀ (Espagne)* – Ma question semblera certes secondaire à certains collègues, mais je crois qu’avec du talent, nous pourrions veiller à ce que « l’ex-République yougoslave de Macédoine » ait enfin un nom définitif, et que son nom ne soit plus un élément de blocage. Cela permettrait de supprimer les tensions qui existent encore.

LE PRÉSIDENT – MM. Badea et Villumsen, inscrits dans le débat, n’étant pas dans l’hémicycle, la parole est à Lord Anderson.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – Concernant toujours la Macédoine, dans quelle mesure la question du nom a-t-elle bloqué des progrès, sur quels dossiers, et voyez-vous des perspectives de solution à ce problème se profiler ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Ghiletchi.

M. GHILETCHI (République de Moldova)* – Monsieur le commissaire, vous l’avez dit dans votre intervention comme dans vos réponses, de nombreux pays du voisinage oriental sont confrontés à de grands défis. La République de Moldova et d’autres pays sont confrontés à des conflits gelés, tel que celui de la Transnistrie. Quel peut-être l’engagement de l’Union européenne pour aider des pays tels que la République de Moldova à résoudre ces conflits gelés afin qu’ils ne constituent plus un obstacle à notre intégration européenne ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Nikoloski.

M. NIKOLOSKI (« L’ex-République yougoslave de Macédoine »)* – En tant que chef de la délégation de la Macédoine, je n’aborderai pas la question du nom. Que pensez-vous de la situation à Skopje ? Je pense qu’autant l’opposition que le parti au pouvoir devraient s’occuper de tous les problèmes en suspens comme celui du nom. Par ailleurs, que pensez-vous du dialogue à haut niveau entre la Macédoine et l’Union européenne ? Est-ce un modèle à adopter pour d’autres pays ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Ilić.

M. ILIĆ (Serbie)* – Je vais vous poser une question très claire à laquelle j’attends une réponse tout aussi claire.

Que pensez-vous des efforts déployés par le Gouvernement serbe au cours des six derniers mois quant au processus d’intégration dans l’Union européenne de la Serbie ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. le commissaire européen.

M. LE COMMISSAIRE EUROPÉEN* – Trois questions portaient sur « l’ex-République yougoslave de Macédoine ». Permettez-moi d’y répondre en bloc.

S’agissant du dialogue à haut niveau sur l’adhésion, c’est une nouveauté. Cela n’entre pas dans le cadre de la procédure d’élargissement en tant que tel. C’est le produit de notre réflexion. D’autres pays candidats aspiraient à entrer dans l’Union européenne. Nous avons donc réfléchi, et nous avons pensé que des problèmes internes pesaient sur le programme européen, faisant que l’élan de la réforme ne pouvait plus être maintenu. C’est pour cela que nous avons mis en place ce dialogue de haut niveau, qui a permis d’aboutir à des progrès. L’élargissement a été placé dans le cadre du débat plus général qui existe dans « l’ex-République yougoslave de Macédoine ». Un certain nombre de résultats concrets ont été obtenus. Ainsi, nous avons amélioré le cadre électoral, la diffamation a été dépénalisée, et ainsi de suite. Nous nous sommes aussi penchés sur la question des bonnes relations de voisinage.

Derrière cela, il y a aussi la conviction de la Commission européenne qu’il est grand temps de cesser de répéter chaque année la même chose sur l’ouverture de négociations sans qu’aucun Etat ne tienne compte de ces recommandations. Il faut créer une dynamique dans ces pays. Nous l’avons fait, ce qui nous a permis d’adopter un langage plus vrai, qui porte plus ses fruits avec « l’ex-République yougoslave de Macédoine ».

D’ailleurs, les Etats membres qui ont appuyé ce dialogue à haut niveau ont aussi appuyé cette recommandation pour « l’ex-République yougoslave de Macédoine », que je qualifierai de non statique et qui montre clairement ce que nous attendons de ce pays en matière de réformes, de progrès quant aux bonnes relations de voisinage et également de solutions à trouver pour résoudre le problème de la dénomination du pays.

Une évaluation sera faite au printemps. Si elle est positive, les Etats membres pourront prendre la décision de passer à la phase de négociation d’adhésion.

Le nouveau langage adopté, cette nouvelle dynamique sont liés aussi à ce véritable esprit de réforme qui règne dans l’ARYM. M. Nimitz, l’envoyé spécial des Nations Unies, en a lui aussi profité. Il a parlé de la question du nom sur la base de la résolution qui avait été rédigée sur le sujet aux Nations Unies. Lui-même s’est rendu récemment dans la région, ce qui m’a paru encourageant. Des discussions sont en cours et les deux premiers ministres sont en contact. Un véritable dialogue s’est noué dans le cadre de ce processus.

J’espère fortement que les deux parties concernées dans ces pays, gouvernements et oppositions confondus, trouveront une réponse appropriée dans le cadre de ce processus suite aux événements du 24 décembre, l’objectif étant de respecter le calendrier sur la base duquel le Conseil européen a élaboré sa recommandation. Une opportunité s’offre maintenant de pouvoir ouvrir des négociations d’adhésion. Il ne s’agit pas que cela reste des mots inscrits dans une recommandation, il faut que cela relève d’une décision de ces Etats. C’est une opportunité à saisir, et il y a en la matière une responsabilité partagée par le gouvernement et l’opposition. Je me contenterai de vous dire cela. Je n’en dirai pas plus sur mes entretiens d’hier. Je me limiterai à vous dire que l’objectif était de se préparer à ce rapport. Il est important aussi de faire preuve d’imagination.

Nous venons de parler du dialogue à haut niveau sur l’adhésion. Avec la Turquie, la situation est positive. Avec le Kosovo, un dialogue structurel est mené sur la réforme du judiciaire et sur l’Etat de droit. L’important aussi est que nos partenaires comprennent que ce n’est pas une fin en soi que de faire preuve d’imagination et de créativité. Il est aussi important de se doter des bons instruments, des outils qui nous permettront de faire avancer les choses. Il est fondamental de comprendre que ce dialogue à haut niveau, on ne peut passer son temps à le recycler constamment, que le dialogue structurel sur tel ou tel point ne peut pas devenir une caractéristique permanente de notre relation. Il faut que ces parties comprennent que ce sont des cadres qui sont là pour nous permettre d’avancer vers la prochaine étape de l’élargissement.

Mais bien entendu, tout cela est assorti de conditions à remplir. Il en va ici de la crédibilité de l’élargissement de l’Union, mais j’ai bon espoir que le dialogue à haut niveau, le dialogue structurel permettront de renforcer cette crédibilité, car c’est un véritable engagement de ces pays à un moment où l’attrait de l’Union européenne n’est plus ce qu’il était il y a quelques années. La situation est différente : une sorte de concurrence s’est installée au-delà de nos frontières qui n’existait pas il y a quelques années encore.

C’est une des raisons pour lesquelles cette stratégie de coopération a été mise en place entre l’Union européenne et le Conseil de l’Europe et c’est pour cela que je me réjouis que notre coopération ne cesse de se renforcer. L’Union européenne partage de plus en plus de dossiers avec le Conseil de l’Europe. Il n’y a pas de concurrence entre nos deux institutions, il s’agit juste de dire que l’Union européenne ne peut devenir une union politique tant qu’elle ne s’occupe pas de ces aspects fondamentaux que sont les libertés fondamentales, l’Etat de droit, la primauté du droit. Cela permet également de renforcer nos politiques à l’égard de nos partenaires. Il est fondamental que nous coopérions, Conseil de l’Europe et Union européenne. C’est important vis-à-vis de nos partenaires.

Vous avez abordé les conflits gelés. Dans la nouvelle politique de voisinage, qui date de mai 2010, nous avons avec le haut représentant dit très clairement que le service d’action extérieure de l’Union européenne va accumuler plus d’expérience et qu’à partir de là, il aura de plus en plus la capacité de contribuer à résoudre ces conflits gelés et à, peut-être, les transformer en opportunités.

La politique de voisinage a montré clairement que, pour cela, il faut avant tout plus de mesures à même de créer un climat de confiance et, pour cela, il faut investir dans des régions comme le Haut-Karabakh ou la Transnistrie, afin de préparer le terrain d’une solution. En Transnistrie, un rôle actif est joué par le biais du 5+2. Nous essayons par tous les moyens de trouver une solution. Nous encourageons vivement les autorités de Moldova à avoir une vision de ce que pourraient être les relations entre la Transnistrie et le reste du pays, une vision qui soit à la hauteur de leurs aspirations européennes.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le commissaire, pour respecter scrupuleusement l’horaire qui m’a été donné, il est maintenant l’heure de nous quitter. Je vous remercie très chaleureusement de votre intervention et pour avoir répondu à toutes ces questions. Je suis désolé pour mes collègues parlementaires qui avaient des questions à vous poser, mais l’ordre du jour étant ce qu’il est, je suis contraint de mettre un terme à ce débat.

Merci beaucoup, Monsieur le commissaire, et revenez nous voir aussi souvent que vous le souhaiterez.

M. Walter, Vice-Président, remplace M. Mignon au fauteuil présidentiel.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Mme Quintanilla, pour un rappel au Règlement.

Mme QUINTANILLA (Espagne)* – Avant que nous passions au prochain débat, je voudrais signaler que mardi, quand nous avons discuté du rapport sur la Bulgarie, une erreur est intervenue. J’ai voté pour le rapport. Je souhaite que cela soit consigné au compte rendu, même si je sais que mon vote ne peut plus être corrigé.

LE PRÉSIDENT* – Nous avons bien pris note de votre intervention, Madame Quintanilla.

3. L’état de la liberté des médias en Europe

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle à présent la présentation et la discussion du rapport de M. Johansson, au nom de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, sur « L’état de la liberté des médias en Europe » (Doc. 13078).

Dans ce débat, le temps des interventions est limité à 3 minutes.

Je vous rappelle que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 19 h 30. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 19 heures, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Vous avez la parole.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias*  Le travail que je vous présente aujourd’hui a été extrêmement prenant : il a duré deux ans. Il a commencé par des conférences et des auditions, mais aussi des rapports et des réunions de commission. Ce travail arrive à son terme à un moment où la liberté des médias connaît une période de déclin dans de nombreux pays. L’an dernier, plus de 100 journalistes ont été tués dans le monde ; des milliers ont été arrêtés ou ont subi des intimidations. Dans notre partie du monde, l’Europe, ce fut le cas également. Les temps sont durs pour les médias. Leur situation, notamment s’agissant de leur liberté, connaît une aggravation. L’Europe n’est pas, comme elle devrait l’être, une zone de libre parole. En effet, la Convention européenne des droits de l’homme, en particulier son article 10, rappelle que chacun a le droit à la liberté d’expression. Ce droit inclut la liberté de défendre ses avis, d’entendre des informations et de retransmettre des idées sans aucune ingérence des autorités et sans tenir compte des frontières. Telle est bien la raison d’être de ce rapport : il s’agit de défendre ces principes universels et non pas un pays, des intérêts nationaux ou la fierté des uns ou des autres.

Si l’on prend la liste de Freedom House, on s’aperçoit que de trop nombreux Etats membres ont connu une dégradation de leur notation ces dernières années – bien entendu, mon rapport en fait état. La liberté de parole et la liberté des médias sont particulièrement importants en temps de crise. Le droit de savoir est un pilier essentiel de la démocratie. Thomas Jefferson disait, il y a de cela plus de 200 ans, qu’il préférait des journaux sans gouvernement à un gouvernement sans journaux. En tant que responsables politiques, nous devons sans cesse nous souvenir que, comme le pensait Voltaire, la liberté de parole doit aussi être reconnue à nos ennemis et à leurs idées, quand bien même celles-ci nous paraissent détestables.

C’est pourquoi il faut toujours protéger la liberté de parole et empêcher les intimidations. Au cours de la rédaction du rapport, deux nations en particulier se sont adressées à moi : la Hongrie et la Turquie, dont il est fait mention dans mon rapport. Mes contacts avec eux ont été corrects, avec des débats sérieux, en particulier sur la situation générale des médias dans ces deux pays.

J’ai pu tirer de ces contacts deux conclusions. Tout d’abord, les paroles du Conseil de l’Europe revêtent de l’importance. Ensuite, les deux pays en question font des efforts sincères pour mieux répondre à nos normes en matière de liberté des médias.

Mais le travail dans ce domaine n’est pas achevé. Il y a toujours le danger de voir une majorité politique, dans quelque Etat membre que ce soit, tenter de manipuler les médias ou restreindre leur liberté, de même que la liberté d’expression des citoyens.

Pour conclure, depuis 1970, quelque 50 recommandations et résolutions ont été adoptées sur les différents aspects touchant à la liberté des médias, depuis la Recommandation 428 sur les médias de communication de masse et les droits de l’homme, en 1970, jusqu’à la Résolution 1950 (2011) sur la protection des sources des journalistes. J’aimerais que mon rapport fût le dernier, dans une Europe parfaite où chacun des membres du club respecterait les règles, sur la base des valeurs que nous partageons. Malheureusement, nous n’en sommes pas encore là.

Je vous remercie pour la confiance que vous m’avez témoignée jusque-là. Je remercie par ailleurs de tout cœur M. William Horsley, chercheur anglais, et le secrétariat du Conseil de l’Europe, qui m’ont apporté toute l’aide possible.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le rapporteur, il vous restera 7 minutes 40 pour répondre. Nous en venons à la discussion générale.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que vous disposez de trois minutes. Afin que tous les orateurs inscrits puissent s’exprimer, je surveillerai scrupuleusement le temps de parole.

Dans la discussion générale, la parole est à d’abord à M. Mogens Jensen, pour le Groupe socialiste.

M. Mogens JENSEN (Danemark)* – Au nom du Groupe socialiste, je voudrais remercier M. Johansson pour son rapport très complet et détaillé sur l’état de la liberté des médias en Europe. Cette question est au cœur du travail du Conseil de l’Europe. Le Groupe socialiste se félicite de l’éclairage qui nous est apporté grâce à ce rapport sur l’état de la question.

Le rapporteur peint un tableau alarmant de la situation des journalistes. Le temps ne me permet pas d’évoquer tous les pays où la situation n’est pas acceptable ; je me concentrerai sur les principaux problèmes.

En Russie, plusieurs journalistes ont été assassinés et d’autres ont fait l’objet d’agressions très violentes. Il faut que cela cesse. L’Assemblée parlementaire doit demander au Gouvernement russe d’assumer ses responsabilités et de mettre fin à cette situation.

Par ailleurs, nous sommes choqués de voir combien de journalistes sont en prison ou détenus en Turquie au motif qu’ils ont exprimé leurs opinions politiques pour contribuer au débat. Nous devons exiger que le Gouvernement turc engage une action résolue. Le Commissaire aux droits de l’homme, dans son rapport du 12 juillet 2011, a fait des recommandations que le Gouvernement turc doit mettre en œuvre sans délai.

Le Groupe socialiste soutient pleinement les recommandations faites au Comité des Ministres d’inviter les organisations qui défendent la liberté de la presse à élaborer des rapports à destination du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe sur les graves violations de la liberté de la presse. Et nous invitons le Comité des Ministres à mettre ces documents à notre disposition. De même, nous soutenons la création d’une plate-forme internet destinée à diffuser les informations provenant des organisations œuvrant en faveur de la liberté de la presse. Cela permettra à l’Assemblée parlementaire de discuter régulièrement de l’état de la liberté des médias, comme nous le faisons aujourd'hui à partir du rapport de M. Johansson.

Nous jugeons également important de voir les futurs travaux relatifs aux médias aborder la question du manque d’ouverture dans le capital des entreprises médiatiques dans certains pays. Nous devrons par ailleurs, au cours de ces travaux, garder à l’esprit les grands principes que les médias doivent respecter : correction, équilibre dans la présentation des informations, etc.

LE PRÉSIDENT - La parole est à M. Kennedy, pour l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe.

M. KENNEDY (Royaume-Uni)* - Je voudrais également, au nom de mon groupe, féliciter M. Johansson et ses collègues de la commission pour leur rapport. Je me réjouis qu’un ancien journaliste de la BBC, M. William Horsley, ait participé à ces travaux.

Il est un peu ironique d’entendre les représentants de tous les groupes politiques louer la liberté de la presse. En réalité, les relations entre les hommes politiques et la presse s’apparentent aux rapports entre un chien et un réverbère, sans que l’on sache bien à chaque fois qui est le chien et qui est le réverbère. Il faut s’en souvenir quand nous autres, parlementaires, évoquons la démocratie ou la liberté de la presse.

Cela étant, la présence d’une presse libre est essentielle pour veiller au bon respect de la démocratie. Les violences qui continuent trop souvent à s’exercer contre les journalistes nous préoccupent. Dans l’excellent ouvrage produit par le Conseil de l'Europe Human rights and a changing media landscape, on rappelle que la violence exercée sur un journaliste en rend souvent muets beaucoup d’autres. Or le mutisme n’est jamais bon dans une démocratie, et la presse est là pour le rappeler. Nous pleurons ainsi Mary Colvin, correspondante du Sunday Times, qui a perdu la vie l’an dernier dans des circonstances tragiques. C’était une bonne amie à moi.

Les droits des journalistes, qui sont essentiels, doivent aussi s’accompagner de responsabilités. Le rapport le reconnaît, et à cet égard, il est très équilibré. Un grand débat a lieu en ce moment au Royaume-Uni dans les deux chambres du Parlement sur l’enquête Leveson. Nous verrons quel en sera le résultat. Nous avons besoin de davantage de protection contre les excès des journalistes, dont certains ont fait l’objet de poursuites pénales, mais nous devons aussi garantir la liberté de la presse. C’est ce que rappelle le rapport, en faveur duquel je serai heureux de voter.

LE PRÉSIDENT - La parole est à Sir Roger Gale, pour le Groupe démocrate européen.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni) * - Je félicite M. Johansson pour son excellent rapport. Comme il l’indique dans son résumé, la liberté d'expression et d'information constitue la base de la bonne gouvernance et d’une démocratie prospère.

Le rapport met en lumière certaines lacunes et certains manquements dans différents pays. Un point me préoccupe plus particulièrement. Nous avons vu, au Royaume-Uni, combien le pouvoir de la presse, quand elle ne fait pas preuve de responsabilité, peut conduire à l’exigence d’un plus grand contrôle sur les médias. Le rapport Leveson, publié l’an dernier, pointe certaines allégations quant aux relations entre la presse et la police, et pourrait entraîner l’adoption de mesures drastiques.

Un document publié il y a à peine une semaine par la Commission européenne sur « la liberté des médias pour promouvoir la démocratie européenne » comprend des recommandations judicieuses. Mais il affirme aussi que le lien entre médias et démocratie justifie davantage d’ingérence de la part de l'Union européenne. C’est en fait une proposition voilée pour donner à la Commission une sorte de droit de contrôle sur les médias nationaux.

Le contrôle des médias par l'Union européenne au-delà des frontières des Vingt-sept est un autre sujet de préoccupation du Comité des Ministres, comme l’indique une lettre adressée à mon collègue M. Chope. En dépit des travaux du Conseil de l'Europe sur la diffusion transfrontalière, la commissaire Kroes a rappelé, d’après un membre du groupe des rapporteurs du Comité des Ministres, que l'Union européenne avait compétence exclusive pour ce qui concerne la Convention européenne sur la télévision transfrontière. Cette intervention de l'Union européenne tend à freiner les propres travaux du Conseil de l'Europe.

Tout cela montre les tensions qui existent entre d’un côté les médias et les régulateurs, les gouvernements et les censeurs potentiels, de l’autre. C’est pourquoi il est important que M. Johansson puisse continuer à travailler dans ce domaine et à produire des rapports. La liberté de la presse et la responsabilité des médias sont des questions dont notre Assemblée doit continuer à se saisir.

LE PRÉSIDENT - La parole est à M. Kürkçü, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

M. KÜRKÇÜ (Turquie)* - Nous nous félicitons de ce rapport précis qui vient au bon moment. Il s’agit d’un document très important. Les informations contenues sur les violations des droits de l’homme dans les différents pays cités ne laissent aucune excuse à ceux qui les ont commises. Ceux qui critiquent le rapport n’ont pas manifesté à l’égard des journalistes d’investigation la même tolérance que pour leurs meurtriers. C’est une véritable campagne internationale qu’il faut lancer pour défendre la liberté des médias.

Les situations évoquées dans ce rapport ont toutes un trait commun : on exalte hypocritement les valeurs européennes par rapport aux pratiques des dictatures qui sévissaient à l’époque de la guerre froide, alors que l’on retrouve aujourd'hui à peu près les mêmes schémas de relation entre presse et pouvoir que ceux que l’on croyait morts.

Il nous semble que pour certains il n’existe qu’une seule valeur européenne : la liberté totale du marché capitaliste et l’usage de la force pour défendre le pouvoir et la richesse de la nouvelle classe régnante. Pas de place là-dedans pour les droits de l’homme, pour les Lumières, pour l’antiracisme, l’antifascisme, le féminisme, le socialisme, pour toutes ces valeurs authentiquement européennes pour lesquelles les personnalités les plus éminentes de notre continent ont donné leur vie.

Le rapport mentionne des violations des droits de l’homme et de la liberté des médias en Turquie. C’est en effet là que l’on retrouve la population de journalistes incarcérés la plus importante du monde. Et je regrette que le parti au pouvoir, même aujourd'hui, continue à accuser les journalistes et à les traiter en criminels à partir d’allégations sans fondement. Dans le contexte de l’après - 11 Septembre, on traite de terroristes les critiques et les adversaires politiques. Ainsi, hier, un journaliste d’une vingtaine d’années a été arrêté en Turquie et accusé de terrorisme.

Telle est la contribution de la Turquie au paysage médiatique de l’Europe du XXIe siècle. Regardez le nombre de requêtes déposées devant la Cour européenne des droits de l’homme, il n’est pas surprenant que l’on retrouve là les ressortissants des pays mentionnés principalement dans ce rapport !

Vos peuples vous traitent comme vous les traitez, et j’espère que l’Assemblée ne se montrera pas le moins du monde tolérante face à ces violations de la liberté des médias.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Mme Kovács, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

Mme KOVÁCS (Serbie)* – Je félicite, au nom de mon groupe politique, notre rapporteur pour son excellent rapport. La liberté des médias et la sécurité des journalistes sont des conditions indispensables pour promouvoir la démocratie. Or nous assistons à une recrudescence de diverses formes de violence, agressions physiques, attaques de journalises, meurtres, utilisations abusives du pouvoir pour menacer les médias.

Les médias ne sont pas des institutions d’Etat, mais on les qualifie souvent de quatrième pouvoir en raison de leur influence sur l’opinion publique. Souligner l’importance de la liberté des médias et de la liberté d’expression, des conditions de travail des journalistes et de leur sécurité, est indispensable dans toute démocratie. Le public doit pouvoir être informé sur les affaires publiques et les journalistes doivent pouvoir diffuser des informations précises et fiables. Le journalisme d’investigation doit être soutenu et défendu.

Les journalistes sont souvent des cibles faciles d’agressions violentes, malgré notre volonté de les protéger. C’est hélas une triste réalité. Voilà pourquoi, nous, femmes et hommes politiques, devons prendre au sérieux la nécessité de mettre en place une législation visant à protéger tout le monde, notamment les journalistes qui souhaitent bien faire leur travail. Ce que nous pourrons faire pour lutter contre les auteurs de ces violences permettra de promouvoir la liberté des médias. Encourageons les journalistes à être actifs et utiles, mais assurons leur sécurité, car ils nous aident à jouir de notre droit fondamental à l’information.

Le groupe du Parti populaire européen a décidé d’appuyer les deux amendements concernant le radiodiffuseur public géorgien.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. le rapporteur, pour répondre aux porte-parole des groupes.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur* – Je remercie mes collègues pour le soutien qu’ils mon apporté, moi qui suis rapporteur pour la première fois dans cette Assemblée.

Je souhaiterais répondre à MM. Kennedy et Gale concernant la responsabilité des médias. Bien entendu, il est important de continuer à s’intéresser à cette question. C’est la raison pour laquelle j’ai cosigné aujourd’hui la proposition de résolution de M. Mogens Jensen qui sera traitée lors de la partie de session d’avril et qui concerne l’éthique du journalisme. Il y a une ligne de démarcation assez délicate entre la critique des médias et la surréglementation. Nous en reparlerons.

Sir Roger Gale a mentionné le rapport sur les médias présenté à la Commission européenne. Il y a une tentation actuellement dans l’Union européenne de demander qu’une nouvelle réglementation soit mise en place. Surveillons cela de près.

LE PRÉSIDENT* – Nous poursuivons la discussion générale.

La parole est à M. Kalmár.

M. KALMÁR (Hongrie)* – Je félicite le rapporteur et son équipe pour leur excellent travail.

Je suis un élu local, et un média est avant tout une entreprise économique. J’ai demandé à un rédacteur en chef d’un journal comment il arrivait à trouver un équilibre entre ses objectifs financiers et l’éthique journalistique. Il m’a répondu qu’il était obligé de respecter des règles éthiques tout en respectant les objectifs du business plan. Mais certains médias, pour survivre, renoncent totalement ou partiellement à leur liberté. Cela est vrai aussi pour certains journalistes indépendants. Un journaliste a des responsabilités à l’égard de sa famille. La politique influence la liberté des médias, comme le fait aussi la situation économique du journaliste. Il est difficile de trouver une solution à ce problème. Je dirais même que c’est quasiment impossible. Les questions financières ont donc un véritable impact.

Mon pays est mentionné dans le rapport. La loi de 2010 sur les médias et celle de la même année sur la liberté de la presse et sur les règles fondamentales portant sur le contenu des médias ont beaucoup été critiquées, aussi bien au sein de l’Union européenne que du Conseil de l'Europe. Les autorités hongroises ont mené un dialogue intense avec les instances internationales sur cette question. Le Conseil de l'Europe a adopté plusieurs recommandations demandant la suppression de certaines dispositions portant sur la protection des sources des journalistes, l’exigence d’un enregistrement, etc. Et conformément aux demandes de l’Union européenne, le Parlement hongrois a modifié sa loi. Mais en décembre 2011, le tribunal constitutionnel de Hongrie a proclamé que plusieurs dispositions étaient inconstitutionnelles et les a annulées. Cependant, la Cour constitutionnelle a obligé le parlement à adopter une nouvelle législation avant la fin mai 2012. Celle-ci a été promulguée le 18 juin 2012.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Vilmos Szabó.

M. V. SZABÓ (Hongrie)* – Je félicite le rapporteur pour son rapport, je suis tout à fait d’accord avec tous les principes qui y sont inscrits. Il est important de souligner que les libertés d’expression et d’information sont des piliers de la liberté et de la bonne gouvernance. Garantir ces principes est fondamental pour les Etats membres du Conseil de l'Europe.

Des cas concrets ont été mentionnés, neuf Etats sont nommés dans lesquels une pression est exercée sur les médias du service public. Il faut rappeler ces pays à l’ordre et leur demander de mettre un terme à ces pressions. C’est une obligation que de veiller à ce que le service public puisse travailler sans ingérence et sans pression. Il faut envisager une réglementation des médias pour garantir l’autonomie et l’indépendance rédactionnelle. Les partis au gouvernement ne doivent pas pouvoir utiliser le service public pour imposer leurs propres objectifs politiques.

Tous les jours des journalistes font l’objet d’attaques, sont incarcérés ou menacés de mort. Les responsables doivent à tout prix être traduits en justice.

Malheureusement, la Hongrie fait partie des neuf pays cités, où des pressions sont exercées. À l’occasion des élections législatives en 2010, le Gouvernement hongrois a adopté, à une majorité des deux tiers, une loi sur les médias pour limiter la liberté de la presse. D’autres lois, la loi électorale, par exemple, ou la Constitution ont subi de multiples violations des règles démocratiques et des droits fondamentaux. Ces faits ont été confirmés par la Commission de Venise.

Le Gouvernement hongrois a apporté quelques corrections à la législation sur les médias. L’Union européenne et le Conseil de l'Europe ont, en l’occurrence, joué un rôle non négligeable. Mais sur le fond, la réglementation n’a pas vraiment été modifiée et une pression continue de s’exercer sur les médias. Je citerai Klubradio, dont les émissions sont menacées depuis 2010.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Mme Graham.

Mme GRAHAM (Norvège)* – M. Johansson, que je remercie pour son excellent rapport, appelle notre attention sur la mauvaise santé de la liberté des médias du service public dans certains Etats membres du Conseil de l'Europe. Il est inacceptable que des journalistes soient persécutés et tués parce qu’ils exercent leur mission. Sans journalisme d’investigation, il ne peut y avoir de contre-pouvoir.

Le projet de résolution cite les Etats membres où des défis doivent être relevés en matière de liberté des médias. Il est nécessaire que tous les Etats membres du Conseil de l'Europe étudient attentivement la situation dans leur propre pays. Le droit à la liberté d’expression est fondamental, sans quoi la presse n’est pas libre. Mais la liberté d’expression ne signifie pas la liberté de menacer ou de proférer des discours de haine.

En Norvège, nous sommes fiers, parce que tous nos citoyens peuvent s’exprimer librement. Mais lorsque cette liberté est utilisée pour menacer d’autres journalistes, ce qui est inacceptable, il est nécessaire d’adopter une position très stricte. C’est ainsi que des journalistes se sont plaints de menaces à la police et que les personnes qui ont menacé des journalistes ont été arrêtées. Des représentants des médias ont utilisé cet argument pour démontrer la bonne efficacité du système qui protège leur travail de journalistes. D’autres, en revanche, ont déclaré que c’était là un exemple de restriction de la liberté d’expression. Le débat suscité par cet incident n’est pas neutre, car il est nécessaire de trouver un équilibre entre la liberté d’expression et la liberté individuelle. Je suis convaincu que ce débat doit s’ouvrir dans tous les pays.

Il convient de veiller à un bon climat de travail pour maintenir la liberté d’expression des médias, car des pressions sont exercées sur les journalistes pour qu’ils écrivent des articles à sensation. Or c’est une menace pour les journalistes et un défi que l’Europe entière doit relever. L’exemple de News of the World au Royaume-Uni montre à quel point la situation peut nous échapper et devenir une véritable menace pour la démocratie.

La liberté d’expression et la liberté des médias doivent être défendues par notre Assemblée et par l’ensemble du Conseil de l'Europe. C’est la raison pour laquelle le rapport de M. Johansson est si important et c’est la raison pour laquelle il est nécessaire que d’autres rapports suivent.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Recordon.

M. RECORDON (Suisse)* – À mon tour de me joindre aux remerciements et aux félicitations qui ont été adressés au rapporteur.

Je suis fort satisfait que nous dénoncions clairement les violations les plus grossières de la liberté d’expression et de ceux qui en sont les porteurs dans les médias. Je voudrais néanmoins relever qu’au-delà de cette évidente problématique qui nécessite un combat impitoyable de notre part et de bien d’autres encore en Europe, des problèmes plus insidieux se posent. Je reviens pour illustrer mon propos à l’intervention de M. Kalmár qui soulignait la problématique interne au secteur des médias : les médias ont de plus en plus de difficultés à dégager des bénéfices, les contraignant à serrer les marges et à tomber, comme le soulignait Mme Graham, dans le sensationnalisme.

Plus encore, je citerai les phénomènes de concentration. Voyez à quoi la concentration médiatique a pu aboutir dans une démocratie comme l’Italie, à quel point elle a pu polluer le débat politique et probablement les résultats des élections. Je crains fort que nous ne sous-estimions l’importance de la question. En ce sens, si je puis très amicalement adresser une petite critique à notre rapporteur, j’aurais souhaité que le point 2.2 du projet de recommandation précisât de manière plus claire que, parmi les graves violations, figurent celles qui proviennent d’une excessive concentration des médias. Je crois que l’on peut interpréter le point 2.2 de la recommandation dans ce sens. Je n’ai donc pas voulu présenter un amendement, mais je tiens à appeler votre attention sur la question. D’ailleurs, la Suisse est confrontée à l’heure actuelle à ce genre de problèmes.

Nous avons une piste, qui n’a pas vraiment été explorée : celle des médias électroniques, notamment ceux liés à internet qui permettent le développement, avec ce que l’on appelle des « pure players », d’une véritable presse « internautique », électronique. C’est une chance immense. Où en serait la liberté d’expression et la liberté des médias, non seulement en Europe, mais dans le monde – pensons à la Chine – si de tels médias n’existaient pas aujourd’hui ? Nous devons les exploiter le plus largement possible et leur donner les moyens d’agir. Nous ne pouvons que difficilement éviter une aide directe, ce qui est toutefois très délicat si nous voulons empêcher que les gouvernements n’en profitent pour influencer le contenu médiatique. Il est indispensable de réfléchir à une telle problématique nouvelle, qui deviendra, j’en suis persuadé, cruciale, comme le montrent déjà certains sites. Parmi les plus connus, je citerai celui d’Edwy Plenel et Mediapart, dont la contribution est très large.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Mme Schuster.

Mme SCHUSTER (Allemagne)* – J’adresse mes remerciements à M. Johansson pour son excellent rapport et pour son travail en sa qualité de rapporteur général sur ce dossier si important.

Il est bon d’avoir recours aux informations fournies par les ONG sur la presse. Le site internet de Reporters sans frontières affiche un baromètre de la liberté de la presse. En 2013, six journalistes ont déjà été assassinés, 195 ont été emprisonnés et 148 activistes en ligne ont été arrêtés et incarcérés.

Si l’on se reporte à la liste de 2011, à la dernière place, la 168e, on trouve le Bélarus, qui n’est pas membre de l’Assemblée ; à la 162e place, on trouve l’Azerbaïdjan, un pays dont nous avons discuté hier à l’occasion d’un débat très approfondi sur le rapport de la commission de suivi de M. Strässer, un rapport qui, je le regrette, n’a pas été adopté. À la 148e place, on trouve la Turquie, à la 142e la Russie. Je ne peux donc qu’être d’accord avec notre rapporteur.

On ne peut pas être satisfait de l’état de la situation dans les pays du Conseil de l’Europe. Des journalistes font l’objet de pressions, d’intimidations, de menaces, on s’en prend à leurs familles et à leurs proches, l’objectif étant qu’ils s’autocensurent. Des tactiques perfides sont employées pour faire taire les plus critiques. Il faudrait que les autorités des pays nommément cités dans le rapport prennent ses conclusions au sérieux, afin qu’elles protègent les journalistes, qu’elles traînent en justice les personnes qui se sont rendues coupables d’attaques contre les journalistes, et qu’elles assurent la protection de leurs sources.

J’appuie le projet de recommandation appelant le Conseil de l’Europe à coopérer très activement avec certaines organisations. Il faudrait faire un rapport au Secrétaire Général ainsi qu’au Commissaire aux droits de l’homme pour que le Conseil de l’Europe et l’Assemblée parlementaire puissent rendre des avis, comme l’avait fait M. Hammarberg après sa visite en Turquie, où il avait constaté des évolutions très préoccupantes, notées également par l’OSCE.

J’espère que ce rapport sera adopté avec une très vaste majorité.

LE PRÉSIDENT* – La parole est Mme Gündeş Bakir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – La liberté des médias et la liberté d’expression sont essentielles pour le bon fonctionnement d’une démocratie ; il faut que les citoyens disposent de sources d’information nombreuses et diversifiées, et qu’ils aient accès aux médias appropriés pour qu’une discussion ouverte puisse s’engager.

Contrairement à ce que prétend le rapport, les journalistes qui ont été condamnés en Turquie ne sont pas emprisonnés du fait de leurs activités de journalistes, mais à cause de leur implication dans des crimes tels que des assassinats, des vols, des contrefaçons et des falsifications de documents officiels, des actes de terrorisme, des tentatives de coup d’Etat militaire, des attentats à la bombe, des atteintes à la propriété ou des dépôts d’explosifs dans des lieux publics.

M. Johansson parle dans son rapport du « complot allégué Ergenekon » ; pourtant, l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Özkan c. Turquie indique bien qu’Ergenekon est une organisation criminelle engagée dans des activités visant à renverser le gouvernement. Cette organisation comprend des membres dans toutes les professions, y compris les médias. Ce n’est pas moi qui le dis, mais la Cour européenne des droits de l’homme !

Le rapport comprend d’autres erreurs factuelles. Ainsi, le rapporteur laisse entendre que la révision en 2008 de l’article 301 du code pénal turc n’a pas permis de résoudre les problèmes. Bien au contraire, on a constaté à la suite de la révision une diminution de 97 % – je dis bien 97 % – du nombre d’affaires ! Il n’y a plus actuellement de personnes placées en détention provisoire au titre de cet article.

Contrairement à ce que prétend M. Johansson, le rapport des observateurs des élections de juin 2011 ne comprend aucune phrase évoquant « un environnement médiatique biaisé » ; au contraire, il dit que « la commission ad hoc a conclu que les élections législatives organisées le 12 juin 2011 en Turquie avaient été démocratiques, bien menées et empreintes de pluralisme ».

Dans mon pays, la Turquie, 40 000 personnes ont perdu la vie à cause du terrorisme au cours de ces 30 dernières années ; il y a eu quatre coups d’Etat militaires en 50 ans. Dans un pays ayant notre passé, le respect de la loi et de l’ordre est essentiel. Nul ne peut se considérer comme étant au-dessus des lois. Les criminels ne doivent pas être encouragés à se cacher sous le couvert de l’impunité médiatique, et la liberté des médias ne peut pas être utilisée pour couvrir des crimes.

Les médias ont du pouvoir, et ils ont une responsabilité à l’égard du public. Les médias sont un outil de responsabilisation des institutions, mais ils doivent eux-mêmes agir de manière responsable. Tout manque en la matière serait une défaillance de la démocratie.

LE PRÉSIDENT* – La parole est Mme Bílgehan.

Mme BÍLGEHAN (Turquie) – Chers collègues, je suis fille de journaliste. Mon père avait l’habitude de me dire : « C’est le plus beau métier du monde ». Pourtant, il l’avait payé cher : il était resté deux ans en prison parce qu’il avait osé critiquer le gouvernement de l’époque ! C’était il y a 50 ans.

Il est désolant de noter que, selon le rapport de M. Johansson, cette situation perdure dans plusieurs pays dits « civilisés » appartenant au Conseil de l’Europe. Les dirigeants de ces pays ferment les yeux sur les violations du droit des journalistes à exercer convenablement leur métier. Je ne parle pas seulement des arrestations de centaines de journalistes, qui sont pour la plupart en détention provisoire depuis des années ; comme leurs procès sont toujours en cours, il convient de respecter la présomption d’innocence. Ils ont été inculpés au titre de lois se rapportant à la lutte contre le terrorisme ou dans le cadre de longues enquêtes sur des complots non prouvés. En l’espèce, le problème crucial est l’impartialité du pouvoir juridique – mais c’est une autre affaire.

Il existe d’autres violations de la liberté des médias : recours fréquent à la pratique de l’autocensure, intimidations de journalistes, pressions fiscales sur les propriétaires des médias, chantage au renvoi. En outre, comme l’indique le rapport, les radiodiffuseurs du service public doivent être protégés des ingérences politiques dans leur travail éditorial quotidien : ce n’est pas le cas aujourd’hui !

Je vous en donnerai un exemple plutôt cocasse : les spectateurs des séries télévisées turques, qui sont très populaires dans les Balkans, en Afrique et en Russie – il paraît qu’elles comptent 150 millions de spectateurs –, vont voir changer le scénario de leur film préféré à la demande du Premier ministre en personne : désormais, Le Harem du Sultan sera beaucoup plus pudique. Voyez jusqu’où peut aller l’ingérence politique !

Le mois de janvier est un mois sombre pour les médias turcs : Uğur Mumcu, un célèbre journaliste d’investigation, a été assassiné il y a exactement 20 ans aujourd’hui, et le journaliste d’origine arménienne, Hrant Dink, il y a 6 ans. Pour le premier, le coupable n’a jamais été retrouvé ; pour le second, un coupable a été arrêté, mais l’affaire n’a pas été éclaircie.

J’estime donc que le rapport de M. Johansson est très important pour tous les pays membres, et qu’un suivi serait nécessaire.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Herkel.

M. HERKEL (Estonie)* – Je voudrais remercier et féliciter M. Johansson. La liberté des médias en Europe est un sujet important, qui concerne tous les Etats membres, et qui devrait faire l’objet de discussions régulières, nourries de documents de ce type. Je le remercie d’avoir inclus le Bélarus dans le rapport. Il est important de suivre ce qui s’y passe, car ce pays, bien que n’appartenant pas à notre Organisation, est situé au cœur de l’Europe.

Les amendements no 7 et no 15 sur la radiodiffusion publique en Géorgie doivent être soutenus. En effet, il est indispensable de protéger les services publics. Un outil de diffusion public ne peut être placé entre les mains d’un Premier ministre.

Lors d’un précédent débat sur la liberté des médias, lorsque M. McIntosh était rapporteur, j’ai formulé des propositions afin que soit constitué de manière permanente un dossier sur les journalistes emprisonnés, assassinés ou qui ont fait l’objet d’intimidations dans les pays membres du Conseil de l’Europe. Ce dossier doit permettre d’accéder rapidement à un résumé des enquêtes les concernant.

Le point 4.1. de l’exposé des motifs présente plus de dix agressions mortelles contre des journalistes entre 2010 et 2012. Il ne faut pas oublier les journalistes qui ont subi des persécutions avant 2010. Le rapport fait référence aux affaires Politkovskaïa et Markelov, mais ce sont des personnalités connues et d’autres journalistes le sont moins. D’où la nécessité d’un dossier permanent et ouvert.

Le projet de recommandation, au point 2.2., invite le Comité des Ministres à adresser une invitation ouverte à la Fédération européenne des journalistes, à l’Association des journalistes européens, à l’Institution internationale de la presse et à Reporters sans frontières, entre autres, afin qu’ils rendent compte régulièrement des violations graves de la liberté des médias au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe. Cela nous permettrait de disposer d’un dossier complet sur l’ensemble des journalistes touchés par des atteintes à la liberté des médias en Europe.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Pylypenko.

M. PYLYPENKO (Ukraine)* – Je voudrais tout d’abord remercier le rapporteur pour son travail, dont le sujet doit constituer selon moi la priorité de notre Assemblée. La liberté des journalistes et la protection des médias est essentielle au fonctionnement de toute démocratie. Nos parlements nationaux doivent donc s’efforcer de mieux la protéger. La situation des médias en Europe varie d’un pays à l’autre, ce qui ne signifie pas pour autant qu’il ne faille s’intéresser qu’à quelques-uns. J’espère qu’à l’avenir le rapport portera sur l’ensemble des pays européens.

Je voudrais attirer votre attention sur la nécessité, sur un sujet aussi sensible, de ne se référer qu’à des informations solides et pertinentes. J’approuve le projet de résolution qui est proposé mais je ne soutiendrai pas les amendements qui contiennent des informations de nature subjective et controversées, qui n’ont pas fait l’objet de vérifications et qui peuvent être interprétées de diverses manières.

Ainsi, comment peut-on dire qu’il y a eu un nombre record de violations des droits des journalistes pendant les dernières élections en Ukraine ? Le rapport de l’Assemblée sur ces élections ne dit rien de tel. Allons-nous nous contredire nous-mêmes en soutenant ces amendements ? D’ailleurs, le rapport ne couvre même pas la période des dernières élections en Ukraine. Il va jusqu’en juin 2012, or les élections ont eu lieu au mois d’octobre...

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Sobolev.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Ce rapport décrit une situation abominable s’agissant de l’état de la liberté des médias dans de très nombreux pays d’Europe. Je remercie le rapporteur pour sa description réaliste de la situation en Ukraine. Les faits sont avérés. Pendant les élections, une chaîne de télévision de l’opposition, ainsi que trois canaux de diffusion, ont été fermés dans les deux tiers du territoire ukrainien. Cette manifestation de force du pouvoir est certes plus « propre » qu’il y a douze ans dans l’affaire Gongadzé mais, en réalité, cela revient au même : l’administration ferme les chaînes de télévision et de radiodiffusion de l’opposition.

Il y a six mois, au parlement, le parti de Ianoukovitch a fait adopter une loi spéciale visant à emprisonner pour cinq ans tout auteur de diffamation. Mais qui mène l’enquête ? Ce sont bien entendu les juges ukrainiens...Nous avons déposé deux amendements, les amendements nos1 et 2, sur la situation des journalistes en Ukraine. Nous demandons à l’Assemblée de bien vouloir les adopter. Ils reflètent la vraie situation des médias dans mon pays.

La procédure dans l’affaire Gongadzé est actuellement fermée. Il est impossible aujourd’hui d’avoir accès à la moindre information. Ce rapport envoie un message tout à fait essentiel pour l’Ukraine. Il faut une véritable protection des journalistes dans leur travail. Pour cela, les parlements nationaux doivent adopter des réglementations adéquates. Le Conseil de l'Europe doit aussi adopter une réglementation en la matière. Il y va de la liberté d’expression et de la démocratie.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Mme Memecan.

Mme MEMECAN (Turquie)* – La liberté des médias constitue un élément essentiel de la démocratie. Les récents progrès des technologies numériques ont transformé profondément le paysage médiatique. Les journalistes traditionnels se heurtent à de graves problèmes de chômage. La propriété, ouverte ou masquée, des médias doit faire l’objet d’une surveillance. Le resserrement de la liberté d’expression doit également être observé attentivement. L’éthique du journalisme est aujourd’hui en question.

On pourrait s’attendre à ce qu’un rapport intitulé « L’état de la liberté des médias en Europe » apporte quelques réponses et offre des lignes directrices aux Etats membres. Or ce document profère des accusations infondées, à l’encontre de trois pays principalement. Si le rapporteur avait mieux fait son travail de recherche et d’écoute, il aurait réussi à distinguer le vrai du faux.

Ce rapport me déçoit beaucoup, tout comme l’attitude de M. Johansson, qui n’a pas souhaité répondre à l’invitation et aux observations de la délégation turque. Le rapporteur s’est montré complètement hermétique à toute communication avec ses membres. Il me semble qu’un peu de courtoisie ne fait jamais de mal. Nous sommes tous membres de cette Assemblée, sur un pied d’égalité. Nous devons nous respecter !

J’espère que sous la plume d’un autre rapporteur, l’Assemblée pourra prochainement bénéficier d’un véritable rapport sur l’état de la liberté des médias en Europe.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à Mme Gafarova.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan)* – Mesdames et Messieurs, la liberté d’expression et le pluralisme sont essentiels pour le développement de la société moderne, car la liberté d’expression et la liberté d’information aident la société à mettre en place une véritable gouvernance démocratique.

Tous les Etats comprennent l’importance de cette situation et s’efforcent de créer un bon environnement pour les médias. Certains gouvernements cependant, inquiets de leur propre avenir, considérant les valeurs démocratiques comme une menace pour leur existence, n’ont pas très envie que les citoyens puissent accéder librement aux informations. Ils gênent donc le travail des médias de masse.

La République d’Azerbaïdjan, pays jeune et démocratique, Etat engagé sur les valeurs démocratiques, a déclaré que sa priorité était de garantir la liberté d’expression et le développement d’une presse indépendante. La Constitution de notre pays garantit la liberté d’expression. Chaque citoyen peut également rechercher librement l’information et la diffuser. La liberté des médias est garantie, la censure, y compris de la presse, est interdite. L’Etat prend des mesures efficaces pour assurer les fondations matérielles et techniques des médias. Des efforts sérieux sont faits dans ce sens.

En tenant compte de tout cela, nous avons adopté un concept pour le soutien de l’Etat aux médias, un fonds pour les médias a été mis en place, ce qui a permis de créer une atmosphère positive et ainsi 4 500 organes de presse et 3 600 ONG ont été créées en Azerbaïdjan. Au cours des deux dernières années, le Gouvernement d’Azerbaïdjan a consacré plus de 15 millions de dollars US pour apporter un soutien financier à ces organisations, promouvoir leurs activités, et leur fournir une base matérielle et technique solide. Cette aide a été apportée à tous les médias, y compris les journaux d’opposition.

Aujourd’hui, toutes les conditions permettant aux médias d’exercer librement et de manière indépendante sont en place en Azerbaïdjan. La liberté d’expression et d’information sont garanties par notre Constitution.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Geraint Davies.

M. Geraint DAVIES (Royaume-Uni)* – Nos principes de démocratie, de défense des droits de l'homme et de l’Etat de droit exigent que la liberté d’expression en ligne et hors ligne soit considérée comme un droit fondamental. L’Etat de droit doit se fonder sur les droits de l'homme et la démocratie ; et la démocratie doit se fonder sur la réforme et non sur la répression. C’est là qu’intervient le problème de la liberté d’expression, qui est parfois à l’origine de meurtres, d’assassinats et de violences. Or la liberté de la presse est le sang qui permet d’irriguer la démocratie et de la maintenir en bonne santé.

Nous avons vu que le nombre de journalistes détenus a augmenté ces dernières années de plus de 30 % en Turquie, en Russie, en Ukraine et au Bélarus. Au sein de cet hémicycle, nous devons être un phare de la liberté. Au Royaume-Uni, le rapport Leveson et les piratages de la part de journalistes de News of the World ont montré que l’autorégulation a échoué, et qu’une réglementation indépendante est nécessaire bien qu’une réglementation par l’Etat doive être évitée. La concentration de pouvoir dans les mains de Rupert Murdoch, dont les griffes rapaces trempaient dans trop d’affaires politiques, doit être brisée. Les relations de copinage permettant au rédacteur en chef de News of the World de devenir secrétaire de presse du Premier ministre britannique, tout cela ne va pas. Nous avons besoin de transparence pour assurer la liberté des informations.

De plus, la censure sur l’internet de la part du secteur privé se développe puisque de grandes sociétés comme Atos décident de couper la fourniture de services à des personnes et intimident ceux qui souhaitent s’engager et jouir de leur liberté d’expression.

La censure de la part du gouvernement devrait également être combattue. Le Gouvernement gallois a même tenté de faire cesser un feuilleton qui le critiquait. Cet instinct naturel de défense des politiciens souligne à quel point il est risqué que le Gouvernement britannique soit en mesure d’intercepter tous les emails et les textos. Ce serait envoyer un mauvais message aux régimes autoritaires qui peuvent étrangler la liberté d’expression naissante, la sécurité servant toujours de prétexte.

Le Conseil de l’Europe devrait porter la voix de tous ceux qui veulent que chaque citoyen ait un droit égal à être entendu, et la liberté des médias est essentielle pour garantir ce droit.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Agramunt.

M. AGRAMUNT (Espagne)* – N’étant pas membre de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, je n’ai pas participé à ce débat et je ne le maîtrise pas en profondeur. Mais j’ai découvert avec surprise que dans le texte du rapport, au paragraphe 19 du projet de résolution, l’Espagne figure parmi les pays qui exercent des pressions politiques sur les médias publics de radiodiffusion.

C’est absolument faux. C’est une insanité ! Je ne comprends pas d’où proviennent de telles informations. Je peux l’imaginer, car en Espagne, un parti est au pouvoir et d’autres sont dans l’opposition. Sûrement, l’un des partis d’opposition a dû mentir. En tout cas, notre ordre juridique est parmi les plus protecteurs d’Europe pour la défense et la protection de la liberté et de l’indépendance des journalistes, autant pour les médias publics que privés. En ce sens, je peux produire un grand nombre de décisions des tribunaux espagnols défendant la liberté d’informer des journalistes. Il n’y a aucun problème de ce type. Certes, il y a d’autres problèmes, notamment économiques, mais il n’y a aucune pression politique sur les médias.

De plus, j’ai eu la surprise de voir que l’amendement no 6 de la commission de la culture exclut certains Etats du paragraphe 19. Dans la version en langue anglaise de cet amendement, l’Espagne est également exclue, tandis que dans la version en langue française, l’Espagne ne l’est pas.

Je présenterai donc un amendement oral au cas où l’Espagne serait maintenue dans le texte. L’amendement en question propose de remplacer toute la liste des Etats, et n’en laisse que quatre dans la version en langue française : l’Espagne, l’Italie, la Roumanie et la Hongrie ; tandis que dans la version en langue anglaise il n’en reste que trois : l’Italie, la Roumanie et la Hongrie.

LE PRÉSIDENT* – Je suis sûr que les responsables vont vérifier ce point, Monsieur Agramunt.

La parole est à M. Belyakov.

M. BELYAKOV (Fédération de Russie)* – Chers collègues, je suis extrêmement déçu par ce rapport. Il ne fait pas de doute que dans le monde, les médias de masse exercent de plus en plus d’influence. Dans le monde, les grands Etats essaient de monopoliser les médias. Les grandes chaînes d’information ont tendance à informer le public non pas pour transmettre des valeurs démocratiques, mais pour imposer les points de vue de la majorité à la minorité, sans tenir compte de ceux qui ne défendent pas ces idées.

L’auteur du rapport l’a construit en laissant l’exclusivité à certains, qui refléteraient l’opinion de tous. Mais les faits relatés dans le rapport ne correspondent pas à la réalité. Plusieurs intervenants l’ont déjà dit : cela ne correspond pas à la réalité dans leur pays. Certains faits sont mentionnés ici sans être avérés, sans être expliqués, et ne donnent pas une image authentique de la situation.

Personnellement, étant membre de l’opposition, j’ai beaucoup fait pour en savoir plus sur l’affaire Magnitski. Des auditions parlementaires se sont tenues mais jamais, bien que je me sois beaucoup intéressé à cette affaire, je n’ai pu lire en Russie que M. Magnitski a été victime de tortures.

Or, dans ce rapport, c’est présenté comme une vérité, comme si des preuves venaient étayer ces propos. Des collègues de la Turquie, de la Moldova et d’autres pays nous ont dit que les faits qui étaient déclarés ici n’étaient en rien avérés. Ce rapport a été rédigé de manière formelle, mais il conviendrait de revenir sur la question et de préparer un vrai rapport qui fasse état de la réalité.

Un point m’intéresse en particulier, et c’est un sujet qui fait débat en France ou en Allemagne : le fonctionnement du journalisme de diffamation et la possibilité pour les journalistes qui sont témoins de faits, en Allemagne, par exemple, d’en faire état ou de les taire. Ici, il est question de journalistes, mais en Russie, des politologues qui étudient la situation en Lettonie n’ont pas été autorisés à se rendre dans ce pays où, pourtant, des idées vraiment fascistes dominent.

Il nous faudrait un nouveau rapporteur, pour un rapport de qualité cette fois !

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Rivard.

Il sera, je le crains, le dernier orateur que nous pourrons entendre.

M. RIVARD (Canada, observateur) – Je suis heureux de prendre la parole sur ce sujet d’une importance fondamentale pour les sociétés démocratiques. La liberté d’expression, la liberté des médias et la contribution inestimable des journalistes au maintien de démocraties transparentes et dynamiques sont bien enracinées dans nos traditions démocratiques, au point de ne plus être remises en question.

L’Europe et le Canada ont en commun la tradition de protéger la liberté d’expression, y compris celle des médias, dans leur loi constitutionnelle fondamentale. Au Canada, l’alinéa 2b de la Charte des droits et libertés protège la liberté d’expression et la liberté des médias. En Europe, les pays membres du Conseil de l’Europe sont tenus par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme de respecter la liberté des médias de communiquer des informations et la liberté d’expression en général.

La Charte canadienne et la Convention européenne, ainsi que les jugements des tribunaux ayant interprété ces documents s’inspirent des conventions internationales des droits de la personne et leur donnent suite – en particulier, la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Or, comme le rapporteur, M. Johansson, le rappelle dans son excellent rapport, les journalistes, et les médias en général, continuent à bien des endroits en Europe à faire l’objet de manipulations, d’intimidations, de harcèlements, de poursuites pénales, de détention et parfois d’assassinat par les autorités, simplement parce qu’ils font ce que nous jugeons important de faire et attendons d’eux, à savoir tenir les gouvernements responsables de leurs actes et en informer la société.

Bien que l’on puisse considérer certains des pays mentionnés dans le rapport comme des « démocraties émergentes » – des pays dont les pratiques et les traditions démocratiques diffèrent du modèle démocratique dominant en Occident –, il ne faut pas relâcher les efforts pour protéger les journalistes et mettre en place les changements juridiques et institutionnels propres à garantir la liberté et l’indépendance véritables des médias. C’est aux médias qu’il incombe de veiller au maintien de la règle de droit dans ces pays qui, dans bien des cas, aspirent à une plus grande transparence et obligation de rendre des comptes sur leurs institutions et sur la gestion publique.

Il est déplorable qu’en dépit de l’importance accordée aujourd’hui aux droits de la personne et en raison du fait que la règle de droit et la démocratie sont considérées comme les pierres angulaires du progrès dans les sociétés civilisées, nous continuions à assister à une érosion de la liberté de presse et de la liberté d’expression. Il faut continuer de mettre en lumière les pratiques et les lois antidémocratiques et dénoncer avec vigilance les atteintes portées à la liberté des médias.

Sans l’effort soutenu des parlementaires pour porter au grand jour les abus commis par les gouvernements à l’endroit des médias, les garanties constitutionnelles de liberté des médias et de liberté d’expression ne veulent rien dire.

LE PRÉSIDENT* – Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs. Les orateurs inscrits sur la liste qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent déposer dans les 24 heures leur intervention dactylographiée au service de la séance pour publication au compte rendu.

J’appelle à présent la réplique de la commission.

Monsieur le rapporteur, il vous reste 4 minutes 30. Vous avez la parole.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur* – L’un de nos collègues a abordé des questions intéressantes sur lesquelles je souhaite revenir. La question de la concentration des médias est importante pour l’avenir. Celle de l’internet aussi. Bien entendu, ce sont des problèmes qui seront traités dans de futurs rapports. Pour ce qui est des questions touchant à l’internet, trois rapports sont déjà en cours de préparation. Il faudra veiller à bien organiser notre calendrier afin de ne pas tout traiter en même temps, mais de prendre les choses une par une.

Concernant les amendements sur l’Ukraine et la Géorgie, j’ai constaté des divergences de vue au sein des délégations nationales respectives. Tout ce que je puis en dire, c’est que ces amendements tardifs ont été intégrés dans le rapport, car cette information est, pour nous, un investissement pour l’avenir. Si les gouvernements de l’Ukraine et de la Géorgie ne veulent pas se voir nommer dans de futurs rapports, à eux de jouer ! Ils savent comment résoudre le problème.

Cela vaut également pour la Turquie. Ce que certains prétendent quant à mon comportement à l’égard de la Turquie n’est pas juste. Je me suis rendu deux fois en Turquie – pas à l’invitation du gouvernement actuel d’ailleurs, mais avec d’autres délégations. Je me suis entretenu avec votre ambassadeur en Suède et j’appartiens à un réseau de parlementaires suédois qui discutent régulièrement de la Turquie et qui sont à l’écoute des voix de la Turquie. J’ai discuté de vos amendements à trois reprises, en octobre, mardi matin et ce matin en commission. Et ne l’oubliez pas, mes chers collègues turcs, vous avez perdu au moment du vote !

Nous savons qu’au sein même de la délégation turque, la façon de présenter la situation en Turquie varie énormément. C’est un peu à l’image des diplomates qui disent qu’ils sont d’accord pour dire qu’ils ne sont pas d’accord. Donc, le débat n’est pas fini !

Je citerai un ami, président du Club international des écrivains, rentrant d’une mission d’information : « Ce que nous avons entendu de la part des écrivains, des éditeurs de couleurs politiques différentes, c’est qu’ils essayaient de travailler dans un climat d’incertitude, sans savoir si ce qu’ils écrivaient risquait de les mener vers des poursuites pénales. Ce qu’ils savaient, c’est que s’ils étaient condamnés, leur carrière et leur vie seraient détruites et que cela serait également une catastrophe financière pour eux. Cette incertitude mène à l’autocensure en Turquie. C’est la raison pour laquelle nous disons, au sein de notre club d’écrivains, que la liberté d’expression en Turquie est limitée par l’autocensure. »

J’en resterai là par manque de temps, mais je pourrais vous citer encore bien d’autres documents, études, rapports et témoignages sur la situation en Turquie.

Pour ceux d’entre vous qui souhaiteraient en savoir plus sur la Turquie, je vous signale que la Fondation Carnegie a publié une étude sur la liberté d’expression dans ce pays, rédigée par Marc Pierini. Il n’est ni journaliste, ni homme politique, ni diplomate : c’est un ancien ambassadeur de l’Union européenne en Turquie. Il a donc toute liberté de parler de la situation dans ce pays. Or je peux vous assurer qu’il parle très franchement et qu’il va bien plus loin que je ne le fais dans mon rapport.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. le président de la commission.

M. WACH (Pologne), président de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias* – Je remercie M. Johansson pour ce rapport aussi excellent qu’équilibré, fondé non seulement sur un travail de recherche, mais aussi sur une grande expérience professionnelle. J’avais prévu de lire le texte de mon intervention, mais il me semble que le plus important est de clarifier les choses pour ce qui est des amendements, en particulier l’amendement no 6.

En commission, nous avions accepté un amendement tendant à supprimer les références à la Bosnie-Herzégovine, à la Croatie et à la République slovaque. Or l’amendement no 6 évoque aussi l’Espagne, alors que ce pays n’a pas du tout fait l’objet d’un débat lors de la réunion de commission. Il me semblait important de clarifier ce point.

J’ai cru comprendre que, à quelques exceptions près, vous alliez approuver ce rapport. Je voudrais dire que ce texte aborde un sujet très important : la protection des sources et celle des journalistes. Beaucoup d’autres questions tout aussi importantes ont été évoquées. En la matière, il y a toujours beaucoup plus à dire ; on ne peut jamais être exhaustif. Nous attendons déjà avec impatience le prochain rapport sur la question !

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias a présenté un projet de résolution sur lequel 15 amendements et un sous-amendement ont été déposés ; un projet de recommandation sur lequel aucun amendement n’a été déposé.

Tous les amendements seront donc seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements et l’organisation des débats.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

Le président de la commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement. L’amendement no 11 sur le projet de résolution a été adopté à l’unanimité par la commission ; toutefois, comme son adoption ferait tomber un autre amendement, il sera discuté selon les modalités habituelles.

L’amendement no 12, déposé par Mme Gündeş Bakir, M. Pylypenko, Mme Erkal Kara, MM. Ahmet Kutalmiş Türkeş, Mustafa, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 6.

La parole est à Mme Gündeş Bakir, pour le soutenir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Comme je l’ai dit dans mon intervention, les journalistes ne sont pas mis en prison à cause de leur activité de journaliste, mais parce qu’ils ont des liens avec des groupes terroristes, qu’ils fomentent des coups d’Etat ou qu’ils ont posé des explosifs dans des lieux publics. Nous souhaiterions donc que ce paragraphe soit tout simplement supprimé.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. le rapporteur, contre l’amendement.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur* – Je suis désolé, mais je ne suis pas d’accord pour tronquer nos conclusions. D’ailleurs, beaucoup d’ONG et d’autres personnalités sont parvenues aux mêmes résultats.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission* – Défavorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 12 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement n° 13, déposé par Mmes Gündeş Bakir, Memecan, MM. Ahmet Kutalmiş Türkeş, Rzayev, Mme Erkal Kara, MM. Pylypenko, Dişli, Mustafa, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 8, à remplacer les mots « n’a pas résolu le problème et cet article peut être appliqué de manière indue à des journalistes et autres personnes, comme l’a constaté la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Altug Taner Akçam c. Turquie du 25 octobre 2011 » par les mots suivants : « a résolu certaines difficultés découlant de l’application de l’article, ce qui a permis de réduire de 97,3 % le nombre d’affaires entamées en vertu de cet article ».

La parole est à Mme Gündeş Bakir, pour le soutenir.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – L’article 301 du Code pénal a été révisé, ce qui a entraîné une diminution de 97 % du nombre d’affaires engagées sur cette base. Personne n’est d’ailleurs détenu à cause de cet article. La correction que nous proposons correspond donc à la réalité.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. le rapporteur, contre l’amendement.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur* – Je suis opposé à cet amendement pour les mêmes raisons que précédemment.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission* – Défavorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 13 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement n°3, déposé par la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, tend dans le projet de résolution, paragraphe 9, à remplacer la première phrase par la phrase suivante : « Il est assez difficile pour l’Assemblée d’appréhender le nombre considérable d’investigations pénales qui ont été entamées contre des journalistes en vertu des articles 85 et 288 du Code pénal turc, de l’article 6 de la loi antiterroriste turque et de dispositions juridiques connexes, notamment parce qu’ils ont couvert les procès de masse concernant l’organisation criminelle Ergenekon. »

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur* – En gage de bonne volonté et dans un souci de compromis, nous présentons cet amendement qui vise à ce que Ergenekon soit considérée comme une organisation criminelle.

LE PRÉSIDENT* – L’avis de la commission est évidemment favorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement no 3 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement no 10, déposé par Mme Hovhannisyan, M. Harutyunyan, Mmes Karapetyan, Mikutienė, M. Pylypenko, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 15, à remplacer les mots « en Arménie, Bulgarie et République de Moldova » par les mots suivants : « en Bulgarie et dans la République de Moldova. L’Assemblée, tout en saluant les efforts déployés par l’Arménie pour traiter les questions relatives aux actions en diffamation, encourage les autorités arméniennes à poursuivre leurs travaux dans cette direction. »

Cet amendement fait l’objet d’un sous-amendement. Si l’amendement no 10 est adopté, l’amendement no 9 n’a plus d’objet.

La parole est à Mme Hovhannisyan, pour soutenir l’amendement n10.

Mme HOVHANNISYAN (Arménie)* – Cet amendement vise à ce que le paragraphe 15 soit mis en accord avec les évolutions récentes dans mon pays, qui sont d’ailleurs évoquées dans le rapport préparé par M. William Horsley. J’espère donc que mes collègues appuieront cet amendement.

LE PRÉSIDENT* – Le sous-amendement n° 1 à l’amendement n° 10, déposé par Mmes Fusu, Palihovici, M. Ghiletchi, M. Badea, M. Stroe, M. Igaş, M. Vareikis, tend, dans l’amendement no 10, après les mots « en Bulgarie », à supprimer les mots « et la République de Moldova ».

La parole est à Mme Fusu, pour le soutenir.

Mme FUSU (République de Moldova) – La diffamation est dorénavant dépénalisée dans notre pays. Nous avons même adopté une loi sur la liberté d’expression qui pénalise la censure et les entraves à l’exercice de la profession de journaliste par les fonctionnaires publics ou par les directeurs des institutions publiques de l’audiovisuel. Je ne suis donc pas d’accord avec le fait que la République de Moldova soit citée dans le paragraphe 15.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Petrenco, contre le sous-amendement.

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Je suis catégoriquement opposé au sous-amendement, compte tenu des graves scandales liés justement à la diffamation. On ne saurait donc exclure la République de Moldova du projet de résolution.

LE PRÉSIDENT* - Quel est l’avis de l’auteur de l’amendement sur le sous-amendement ?

Mme HOVHANNISYAN (Arménie) * - Je m’en remets au rapporteur : pour ma part, je défends mon amendement.

LE PRÉSIDENT* - Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. WACH (Pologne), président de la commission * - Défavorable.

LE PRÉSIDENT* - Je le mets aux voix.

Le sous-amendement no 1 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* - Nous en revenons à l’amendement. Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission * - Favorable.

LE PRÉSIDENT* - Je mets l’amendement aux voix.

L’amendement n° 10 est adopté.

LE PRÉSIDENT* - En conséquence, l’amendement n9 est devenu sans objet.

L’amendement n° 1, déposé par MM. Ariev, Sobolev, Mme Orobets, MM. Zingeris, Volontè, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 15, à ajouter la phrase suivante : « L’Assemblée est préoccupée par les tentatives de rétablir les poursuites pénales pour diffamation dans la législation ukrainienne. »

La parole est à M. Ariev, pour le soutenir.

M. ARIEV (Ukraine)* - L’an dernier, le Parlement ukrainien a voulu modifier le Code pénal afin de faire de la diffamation un délit pénal, ce qui aurait entraîné de nombreuses poursuites à l’encontre de journalistes et de médias indépendants. Après une campagne de protestation, le gouvernement a toutefois démenti avoir eu une telle intention. Pour éviter qu’il ne soit tenté de revenir à cette fâcheuse idée, je vous propose d’adopter cet amendement.

LE PRÉSIDENT* - La parole est à M. Pylypenko, contre l’amendement.

M. PYLYPENKO (Ukraine)* - Le parlement a rejeté ce projet, et le problème n’est plus à l’ordre du jour en Ukraine, ni au parlement, ni dans la société. Cet amendement est donc obsolète.

LE PRÉSIDENT* - Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission * - Favorable.

LE PRÉSIDENT* - Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n1 est adopté.

LE PRÉSIDENT* - L’amendement n°4, déposé par la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 15, à ajouter les mots suivants : « Se référant à la récente condamnation à 14 mois de peine de prison prononcée à l'encontre d’Alessandro Sallusti en Italie, l'Assemblée demande à la Commission de Venise de préparer un avis indiquant si la législation italienne en matière de diffamation est conforme à l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme. »

La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur * - Cet amendement, déposé à l’initiative de Mme Bergamini, concerne un cas pour le moins extraordinaire, celui d’un éditeur qui s’est vu infliger une peine de prison. Personnellement, je n’aurais pas publié l’article qu’il a publié, qui concernait la peine de mort. Mais nous pensons qu’il faut parler de ce sujet.

LE PRÉSIDENT* - L’avis de la commission est naturellement favorable.

Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n° 4 est adopté.

LE PRÉSIDENT*- L’amendement n° 11, déposé par MM. Hovhannisyan, Harutyunyan, Mmes Karapetyan, Mikutienė, M. Pylypenko, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 16, à remplacer la deuxième phrase par la phrase suivante : « Par conséquent, elle invite en particulier l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Fédération de Russie, la Turquie et l’Ukraine à prendre des mesures pour remédier aux lacunes identifiées dans les récents rapports d’observation des élections. »

La parole est à Mme Hovhannisyan, pour le soutenir.

Mme HOVHANNISYAN (Arménie) * - Cet amendement vise à garantir la conformité du paragraphe 16 avec le rapport du 6 mai sur les élections parlementaires en Arménie.

LE PRÉSIDENT* - Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission * - Favorable, à l’unanimité.

LE PRÉSIDENT* - Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n° 11 est adopté.

LE PRÉSIDENT* - En conséquence, l’amendement n° 14 est devenu sans objet.

L’amendement n° 2, déposé par MM. Ariev, Sobolev, Mme Orobets, MM. Zingeris, Volontè, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 16, à ajouter la phrase suivante : « L’Assemblée est préoccupée par le nombre record d’infractions concernant des journalistes enregistrées en Ukraine ces dix dernières années, en particulier lors des élections législatives de 2012. »

La parole est à M. Ariev, pour le défendre.

M. ARIEV (Ukraine)* - L’an dernier, en Ukraine, nous avons connu un nombre record d’infractions concernant des journalistes : 329 cas, selon le rapport sur la situation des médias, soit entre trois et cinq fois plus qu’au cours des années précédentes et deux fois plus qu’en 2004. L’amendement fait état de cette situation préoccupante.

LE PRÉSIDENT* - La parole est à M. Pylypenko, contre l’amendement.

M. PYLYPENKO (Ukraine) * - Cet amendement, s’il était adopté, serait en contradiction avec les rapports des dernières missions d’observation des élections en Ukraine, dans lesquels on ne mentionne pas un nombre record d’infractions concernant les journalistes.

LE PRÉSIDENT* - Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission * - Favorable.

LE PRÉSIDENT* - Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n° 2 est adopté.

LE PRÉSIDENT* - L’amendement n° 5, déposé par la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 17, à ajouter les mots suivants : « L'Assemblée se félicite du rapport sur la transparence de la propriété des médias en Europe élaboré en octobre 2012 par Access Info Europe (Madrid) et l’Open Society Media Programme (Londres) et invite l’Observatoire européen de l'audiovisuel (Strasbourg) à poursuivre le développement de sa base de données MAVISE sur la propriété des médias et à aider ses membres à établir la transparence de la propriété des médias. »

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur * - Il s’agit d’un simple geste de courtoisie. Je vous demande d’adopter cet amendement qui n’a suscité aucune controverse au sein de la commission.

LE PRÉSIDENT - La parole est à M. Szabó, contre l’amendement.

M. SZABÓ (Hongrie) * - Cet amendement n’a strictement aucun lien avec la liberté des médias en Europe. À mes yeux, il n’a tout simplement aucun sens. Il est des choses nettement plus importantes qui, elles, ne figurent pas dans le rapport.

LE PRÉSIDENT* - L’avis de la commission est naturellement favorable.

Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n° 5 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – J’ai été saisi d’un amendement oral n1 par M. Agramunt, dont le texte suit : « dans le projet de résolution au paragraphe 19, supprimer la mention de « l’Espagne » ».

Selon l’article 33.7.a. du Règlement, « Le Président peut, à titre exceptionnel, déclarer recevable un amendement oral s’il estime qu’il est destiné à apporter une clarification, à tenir compte de faits nouveaux ou à permettre une conciliation. Il sollicite éventuellement l’avis du président de la commission concernée avant de prendre sa décision. »

J’estime cet amendement oral non recevable au regard des critères du Règlement.

Nous passons à l’amendement n° 6, déposé par la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 19, à remplacer les mots « Bosnie-Herzégovine, Croatie, Espagne, Hongrie, Italie, Roumanie, République slovaque » par les mots suivants : « Espagne, Hongrie, Italie, Roumanie ».

La parole est à M. le rapporteur pour le soutenir.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur* – Cet amendement est simplement une mise à jour pour tenir compte de la situation dans ces pays des Balkans. Nous nous sommes appuyés sur des sources un peu anciennes lors de la rédaction du rapport, nous souhaitons donc cette mise à jour.

LE PRÉSIDENT* – La parole est M. Agramunt, contre l’amendement.

M. AGRAMUNT (Espagne)* – Je ne comprends toujours pas si dans la version anglaise l’Espagne est exclue ou non. Je ne m’y retrouve pas.

LE PRÉSIDENT* – Je comprends, Monsieur Agramunt, mais même après l’amendement, le texte anglais continuera à dire que l’Espagne fait partie de cette liste.

Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission* – Favorable. Et le texte anglais est correct.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n6 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement n° 7, déposé par la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 19, à insérer le paragraphe suivant : « L'Assemblée regrette que les gouvernements de certains Etats membres aient remplacé les cadres supérieurs dans leurs radiodiffuseurs de service public après un changement de gouvernement afin d'influencer l'orientation politique de ces radiodiffuseurs. À cet égard, il est particulièrement inquiétant de constater que le Premier ministre géorgien a suggéré de fusionner le radiodiffuseur de service public géorgien avec le radiodiffuseur privé TV9 appartenant à son épouse et de modifier la loi géorgienne sur la radiodiffusion. »

La parole est à M. le rapporteur pour le soutenir.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur* – Il y a là une situation suffisamment extraordinaire pour que nous voulions y intéresser le Conseil de l'Europe.

LE PRÉSIDENT* – La parole est à M. Berdzenishvili, contre l’amendement.

M. BERDZENISHVILI (Géorgie)* – Je suis contre cet amendement, la Géorgie n’étant même pas mentionnée dans le rapport. La situation des médias dans mon pays n’a pas été étudiée de façon appropriée par le rapporteur. Adopter cet amendement minerait la crédibilité de son travail.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n7 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement n° 15, déposé par M. Volontè, Mmes de Pourbaix-Lundin, Čigāne, Lībiņa-Egnere, MM. Zingeris, Xuclà, von Sydow, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 19, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée est préoccupée par une série d’inspections fiscales surprises de la société géorgienne de radiodiffusion, à la suite de déclarations politiques agressives de hauts responsables gouvernementaux parallèlement à l’adoption de modifications controversées de la loi sur la radiodiffusion. Ces mesures ont précédé des déclarations du Premier ministre Bidzina Ivanichvili selon lesquelles il serait souhaitable de fusionner la société géorgienne de radiodiffusion GPB avec la chaîne TV9, qui était aux mains de sa femme, et de modifier le contrôle de médias privés géorgiens. »

La parole est à Mme Čigāne pour le soutenir.

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Je vous demande, mes chers collègues, d’appuyer cet amendement, dans lequel on décrit la situation de la radiodiffusion publique en Géorgie. C’est important quand on sait que les radios publiques sont souvent vulnérables et font l’objet de pressions.

LE PRÉSIDENT* – La parole est M. Berdzenishvili, contre l’amendement.

M. BERDZENISHVILI (Géorgie)* – Je suis contre cet amendement, parce qu’il mentionne que les propriétaires des médias en Géorgie auraient changé. La police avait, en 2007, investi par la force les locaux de la chaîne TV9, et on dit ici qu’il faut changer de propriétaire.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n15 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement n° 8, déposé par la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 20, à insérer le paragraphe suivant : « L'Assemblée se félicite de l'organisation réussie du séminaire interparlementaire sur l'indépendance et le financement de la radiodiffusion de service public, qui a été accueilli par le Parlement croate à Zagreb, le 15 octobre 2012, avec le soutien financier de l’Open Society Media Programme. Elle invite les parlements nationaux et les organisations partenaires à collaborer à de futurs projets similaires. »

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

M. JOHANSSON (Suède), rapporteur* – Il s’agit d’un petit geste de courtoisie pour remercier les organisateurs d’un séminaire très réussi.

LE PRÉSIDENT* – La parole est M. Belyakov, contre l’amendement.

M. BELYAKOV (Fédération de Russie)* – Cet amendement est tendancieux comme le reste du rapport. Nous n’étions pas présents à cette conférence et quoi qu’il en soit il n’est pas possible de soutenir de tels propos dans le rapport, c’est très douteux et très subjectif.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de la commission ?

M. WACH (Pologne), président de la commission* – Favorable.

LE PRÉSIDENT* – Je mets aux voix l’amendement.

L’amendement n8 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13078, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (52 voix pour, 28 voix contre, 3 abstentions)

LE PRÉSIDENT* – Nous en venons au projet de recommandation sur lequel aucun amendement n’a été déposé.

Nous allons donc procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc. 13078.

Je vous rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

Le projet de recommandation n’est pas adopté (52 voix pour, 29 voix contre et 3 abstentions)

LE PRÉSIDENT* - Je remercie le rapporteur et le président de la commission pour le travail effectué.

4. Déclaration écrite

LE PRÉSIDENT* – Conformément à l’article 53 du Règlement, une déclaration écrite n° 534 a été déposée (Doc. 13109), intitulée « Afin de faciliter une solution pacifique négociée de la question kurde en Turquie, Abdullah Öcalan devrait être libéré ».

Les représentants, suppléants, observateurs et partenaires pour la démocratie qui désirent ajouter leur signature au bas de cette déclaration peuvent le faire au service de la Séance, bureau 1083.

5. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance publique aura lieu demain matin à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 19 h 40.

S O M M A I R E

1. Développements récents au Mali et en Algérie et menace pour la sécurité et les droits de l’homme dans la région méditerranéenne (Suite du débat selon la procédure d’urgence)

Orateurs : MM. Bockel, Salles, Loncle, Agramunt, Beneyto, Yatim, Ameur

Réponses de Mme Woldseth, rapporteure et de M. Marcenaro, président de la commission des questions politiques et de la démocratie.

Vote sur un projet de résolution amendé.

2. Discours de M. Štefan Füle, commissaire européen en charge de l’élargissement et de la politique européenne de voisinage

Questions : M. Vareikis, Mmes Vučković, Fusu, Sir Roger Gale, M. Petrenco, Mmes Bourzai, Zohrabyan, Gündeş Bakir, M. Gaudi Nagy, M. Çağlar, Xuclà, Lord Anderson, MM. Ghiletchi, Nikoloski, Ilić

3. L’état de la liberté des médias en Europe

Présentation par M. Johansson du rapport de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias.

Orateurs : MM. Mogens Jensen, Kennedy, Sir Roger Gale, M. Kürkçü, Mme Kovács, MM. Kalmár, Szabó, Mme Graham, M. Recordon, Mmes Schuster, Gündeş Bakir, Bilgehan, MM. Herkel, Pylypenko, Sobolev, Mmes Memecan, Gafarova, MM. Geraint Davies, Agramunt, Belyakov, Rivard

Réponses de M. le rapporteur et de M. Wach, président de la commission de la culture

Vote sur un projet de résolution amendé

Vote sur un projet de recommandation

4. Déclaration écrite

5. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Francis AGIUS*

Pedro AGRAMUNT

Arben AHMETAJ*

Miloš ALIGRUDIĆ

Karin ANDERSEN

Lord Donald ANDERSON*

Paride ANDREOLI*

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV

Mörður ÁRNASON*

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI*

Þuriður BACKMAN

Daniel BACQUELAINE/Dirk Van Der Maelen

Viorel Riceard BADEA*

Theodora BAKOYANNIS/Maria Giannakaki

David BAKRADZE/Giorgi Kandelaki

Gérard BAPT*

Gerard BARCIA DUEDRA*

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

José María BENEYTO*

Levan BERDZENISHVILI

Deborah BERGAMINI*

Robert BIEDROŃ*

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY*

Ľuboš BLAHA*

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL

Eric BOCQUET*

Olga BORZOVA

Mladen BOSIĆ*

António BRAGA*

Anne BRASSEUR

Márton BRAUN*

Federico BRICOLO*

Ankie BROEKERS-KNOL*

Piet DE BRUYN/Ludo Sannen

Patrizia BUGNANO/Giuliana Carlino

André BUGNON

Natalia BURYKINA*

Sylvia CANEL*

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU*

Mikael CEDERBRATT/Tina Acketoft

Otto CHALOUPKA*

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI*

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN/Ingjerd Schou

Desislav CHUKOLOV/Stanislav Ivanov

Lolita ČIGĀNE

Boriss CILEVIČS*

Henryk CIOCH*

James CLAPPISON*

Deirdre CLUNE*

Agustín CONDE*

Igor CORMAN*

Telmo CORREIA

Carlos COSTA NEVES*

Joseph DEBONO GRECH*

Giovanna DEBONO*

Armand De DECKER*

Arcadio DÍAZ TEJERA/Carmen Quintanilla

Peter van DIJK

Klaas DIJKHOFF*

Şaban DİŞLİ

Jim DOBBIN

Karl DONABAUER*

Ioannis DRAGASAKIS

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU/Bernadette Bourzai

Mikuláš DZURINDA

Baroness Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA

Gianni FARINA*

Relu FENECHIU*

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA/Raphaël Comte

Daniela FILIPIOVÁ*

Axel E. FISCHER*

Jana FISCHEROVÁ*

Gvozden Srećko FLEGO*

Hans FRANKEN*

Jean-Claude FRÉCON*

Erich Georg FRITZ

Sir Roger GALE

Jean-Charles GARDETTO

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Paolo GIARETTA*

Jean GLAVANY/Christian Bataille

Michael GLOS*

Pavol GOGA*

Jarosław GÓRCZYŃSKI*

Svetlana GORYACHEVA/Anton Belyakov

Martin GRAF*

Sylvi GRAHAM

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST

Dzhema GROZDANOVA*

Attila GRUBER*

Gergely GULYÁS*

Pelin GÜNDEŞ BAKIR

Antonio GUTIÉRREZ*

Ana GUŢU/Corina Fusu

Carina HÄGG*

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI/Marek Borowski

Mike HANCOCK

Margus HANSON

Davit HARUTYUNYAN/Vahe Hovhannisyan

Håkon HAUGLI*

Norbert HAUPERT

Alfred HEER*

Martin HENRIKSEN*

Andres HERKEL

Adam HOFMAN*

Jim HOOD/Joe Benton

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER

Andrej HUNKO*

Susanna HUOVINEN*

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV

Shpëtim IDRIZI*

Vladimir ILIČ

Igor IVANOVSKI*

Tadeusz IWIŃSKI*

Denis JACQUAT*

Roman JAKIČ*

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI/Jordi Xuclà

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN

Mats JOHANSSON

Jadranka JOKSIMOVIĆ*

Birkir Jón JÓNSSON

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Antti KAIKKONEN*

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA*

Mariusz KAMIŃSKI*

Marietta KARAMANLI/Jean-Pierre Michel

Burhan KAYATÜRK

Jan KAŹMIERCZAK*

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH*

Serhiy KLYUEV/Volodymyr Pylypenko

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN*

Alev KORUN

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO

Dmitry KRYVITSKY*

Václav KUBATA*

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU*

Jean-Yves LE DÉAUT*

Igor LEBEDEV*

Harald LEIBRECHT*

Orinta LEIPUTĖ

Terry LEYDEN*

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Lone LOKLINDT*

François LONCLE

Jean-Louis LORRAIN*

George LOUKAIDES/Stella Kyriakides

Younal LOUTFI*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Saša MAGAZINOVIĆ

Philippe MAHOUX*

Gennaro MALGIERI

Nicole MANZONE-SAQUET*

Pietro MARCENARO

Thierry MARIANI*

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA*

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER/Luc Recordon

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Ivan MELNIKOV/Tamerlan Aguzarov

Nursuna MEMECAN

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Marie-Jo Zimmermann

Djordje MILIĆEVIĆ/Elvira Kovács

Federica MOGHERINI REBESANI*

Andrey MOLCHANOV*

Jerzy MONTAG*

Rubén MORENO PALANES

Patrick MORIAU*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Alejandro MUÑOZ-ALONSO

Lydia MUTSCH/Félix Braz

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR*

Oľga NACHTMANNOVÁ*

Gebhard NEGELE

Aleksandar NENKOV

Pasquale NESSA*

Fritz NEUGEBAUER

Baroness Emma NICHOLSON/Charles Kennedy

Elena NIKOLAEVA/Olga Kazakova

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL*

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY*

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE/Geraint Davies

Liliana PALIHOVICI

Dimitrios PAPADIMOULIS

Eva PARERA*

Ganira PASHAYEVA*

Lajla PERNASKA*

Johannes PFLUG*

Foteini PIPILI

Ivan POPESCU

Lisbeth Bech POULSEN/Nikolaj Villumsen

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA*

John PRESCOTT/Michael Connarty

Jakob PRESEČNIK*

Radoslav PROCHÁZKA*

Gabino PUCHE*

Alexey PUSHKOV*

Mailis REPS*

Eva RICHTROVÁ*

Andrea RIGONI*

François ROCHEBLOINE/Rudy Salles

Maria de Belém ROSEIRA/Ana Catarina Mendonça

René ROUQUET

Marlene RUPPRECHT

Ilir RUSMALI*

Pavlo RYABIKIN

Rovshan RZAYEV

Giacomo SANTINI*

Giuseppe SARO*

Kimmo SASI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER

Damir ŠEHOVIĆ*

Senad ŠEPIĆ

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN/David Crausby

Oleksandr SHEVCHENKO

Boris SHPIGEL/Yury Solonin

Arturas SKARDŽIUS/Remigijus Ačas

Ladislav SKOPAL*

Leonid SLUTSKY

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI*

Yanaki STOILOV

Christoph STRÄSSER*

Karin STRENZ*

Giacomo STUCCHI*

Valeriy SUDARENKOV*

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO/Yevhen Marmazov

Vilmos SZABÓ

Melinda SZÉKYNÉ SZTRÉMI*

Chiora TAKTAKISHVILI

Vyacheslav TIMCHENKO/Robert Shlegel

Romana TOMC*

Lord John E. TOMLINSON

Latchezar TOSHEV

Mihai TUDOSE*

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI

Tomáš ÚLEHLA*

Ilyas UMAKHANOV/Alexey Ivanovich Aleksandrov

Viktor USPASKICH/Egidijus Vareikis

Giuseppe VALENTINO*

Miltiadis VARVITSIOTIS/Konstantinos Triantafyllos

Ljubica VASIĆ/Stefana Miladinović

Volodymyr VECHERKO*

Stefaan VERCAMER*

Anne-Mari VIROLAINEN*

Luigi VITALI*

Luca VOLONTÈ

Vladimir VORONIN/Grigore Petrenco

Varujan VOSGANIAN*

Tanja VRBAT/Melita Mulić

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ*

Piotr WACH

Johann WADEPHUL*

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON*

Katrin WERNER*

Renate WOHLWEND*

Karin S. WOLDSETH

Gisela WURM

Karl ZELLER*

Svetlana ZHUROVA/Guennady Gorbunov

Emanuelis ZINGERIS/Algis Kašėta

Guennady ZIUGANOV/Anvar Makhmutov

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Monténégro*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

Siège vacant, Roumanie*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

---

Représentants de la communauté chypriote turque (Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

Ahmet ETI

Observateurs

Marjolaine BOUTIN-SWEET

Corneliu CHISU

Sladan ĆOSIĆ

Michel RIVARD

Partenaires pour la démocratie

Bernard SABELLA