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AS (2013) CR 30

 

SESSION ORDINAIRE DE 2013

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la trentième séance

Mardi 1er octobre 2013 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 10, sous la présidence de M. Mignon, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie.

La liste des candidats et leurs notices biographiques figurent dans le Doc. 13305.

Le vote aura lieu dans la rotonde derrière la Présidence.

A 13 heures, je suspendrai le scrutin. Il reprendra à 15 h 30 et sera clos à 17 heures.

Le dépouillement aura lieu aussitôt après, dans les conditions habituelles, hors de la salle des séances, sous le contrôle de deux scrutateurs, que nous allons désigner par tirage au sort.

M. Haupert et Mme Guzowska sont désignés comme scrutateurs.

Je leur rappelle qu’ils devront se trouver dans la rotonde derrière la Présidence à 17 heures.

Le résultat du scrutin sera annoncé si possible avant la levée de la séance de cet après-midi.

J’appelle votre attention sur le fait que si l’Assemblée devait procéder à un deuxième tour, il aurait lieu mercredi matin et après-midi.

Le scrutin est ouvert.

Nous continuons nos travaux pendant ce temps.

2. Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2012-2013

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle maintenant le débat élargi de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, en 2012-2013.

Je souhaite la bienvenue aux délégations des pays non européens membres de l’OCDE, à savoir le Canada, le Japon et le Mexique.

Conformément au règlement relatif aux débats élargis de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’OCDE, le vote a lieu à main levée afin de permettre aux délégations des pays non européens membres de l’OCDE mais qui n’appartiennent pas au Conseil de l’Europe de participer au scrutin.

Cette discussion commencera par la présentation du rapport de M. Van der Maelen, au nom de la commission des questions politiques (Doc. 13301), et continuera avec l’exposé de M.  Ghiletchi, rapporteur de la commission des questions sociales, saisie pour avis (Doc. 13313). Puis, l’Assemblée aura le plaisir et l’avantage d’entendre l’intervention de M. Angel Gurría, Secrétaire général de l’OCDE. Nous entamerons alors la discussion générale ; la liste des orateurs devra être interrompue à 11 h 30 afin de permettre à M. le Secrétaire général de l’OCDE d’intervenir, s’il le souhaite, et pour que nous puissions entendre la réplique de la commission et procéder aux votes nécessaires d’ici à 11 h 45.

Monsieur le rapporteur, je vous rappelle que vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir, à votre convenance, entre la présentation de votre rapport et la réplique aux orateurs.

Avant de vous céder la parole, je veux à nouveau souhaiter la bienvenue à M. Angel Gurría, qui a eu quelques petits problèmes ce matin pour rejoindre Strasbourg, puisque son train était en retard, mais qui est bien arrivé. J’ai été très heureux de l’entretien en tête-à-tête que nous avons pu avoir tout à l’heure dans mon bureau ; toutes vos explications, Monsieur le Secrétaire général de l’OCDE, sont passionnantes, et je suis intimement convaincu qu’elles passionneront l’Assemblée parlementaire, au sein de laquelle, vous le savez, vous êtes toujours le bienvenu.

Monsieur le rapporteur, c’est maintenant avec beaucoup de plaisir que je vous cède la parole.

M. VAN DER MAELEN (Belgique)* – Soucieux de respecter le souhait de l’Assemblée parlementaire, j’ai essayé de proposer un rapport plus politique. C’est pourquoi ce rapport se concentre sur les défis que nous devons relever en raison de la baisse de la confiance des citoyens envers les institutions, laquelle est due aux réponses politiques inefficaces à la crise économique et à une injustice fiscale patente.

Dans les années soixante, le Président Kennedy pouvait dire avec confiance qu’une marée montante soulève tous les bateaux. Il entendait par là que la croissance économique favorise l’élévation du niveau de vie pour tous : exploitants agricoles, travailleurs, dirigeants d’entreprise… De nos jours, dans la plupart des pays de l’OCDE, un tel optimisme fait défaut. La croissance est morose depuis au moins cinq ans. Même, le PIB de certains d’entre eux n’a pas retrouvé son niveau d’avant la récession. Le chômage atteint des niveaux alarmants, en particulier parmi les jeunes. Au cours de mes recherches pour préparer le rapport, j’ai eu l’impression, Monsieur le Secrétaire général, que l’OCDE avait mis du temps à comprendre combien cette crise économique était sérieuse. Les travaux du prix Nobel d’économie Paul Krugman, qui déclare que l’OCDE a trop vite eu une approche de statu quo, semblent confirmer tout cela.

Pour paraphraser le Président Kennedy, je dirai que, de nos jours, une marée montante soulève certains bateaux tandis que d’autres échouent. Les changements techniques, la mondialisation du commerce et de la finance, le déclin des mouvements syndicaux dans certains pays ont créé un monde dans lequel certains tirent plus de profits que d’autres. Les inégalités croissantes et le chômage parmi les minorités nous prouvent que les marchés ne suffisent pas à assurer une véritable croissance inclusive ; hommes et femmes politiques sont tout aussi importants. Il existe une théorie selon laquelle les meilleures politiques, associées à un gouvernement actif, sont nécessaires pour faire en sorte que tous puissent bénéficier du progrès.

En ce qui concerne les activités de l’OCDE, j’espère sincèrement pouvoir être optimiste. Au mois de mai 2012, l’OCDE a lancé une initiative appelée NAEC, pour Nouvelles approches face aux défis économiques. Elle vise un double objectif : d’une part, tirer les enseignements de la crise ; d’autre part, promouvoir une notion plus large de croissance, qui tienne compte également du bien-être, de l’inclusivité et du respect de l’environnement. Il s’agit là d’un des principaux thèmes dont nous discutons dans nos parlements nationaux : comment faire en sorte que l’on puisse sortir de cette crise ? Comment régler tous les problèmes sociaux ? Nous sommes particulièrement impatients, Monsieur le Secrétaire général, d’entendre ce que vous avez à nous dire à ce sujet, en particulier en ce qui concerne cette initiative tout à fait intéressante et importante.

Je passe maintenant au deuxième point du rapport. Les spécialistes ont, pendant des années, dit que le système fiscal international visant à éviter la double imposition des multinationales avait malheureusement abouti à ce que ces mêmes multinationales jouissent en fait d’une double non-imposition ! L’évasion fiscale choque l’opinion mondiale. L’année dernière, nous nous sommes rendu compte du degré auquel les multinationales recouraient à ces dispositifs.

Il était temps que l’OCDE mette en place un plan d’action et nous sommes heureux qu’elle l’ait fait. Au mois de juillet dernier, le G20 a approuvé ce plan d’action et l’Assemblée élargie se félicite de sa teneur, même si, je dois le dire, mon sentiment est partagé. Le plan comporte une dimension positive : certaines des recommandations sont de nature à permettre de mettre un terme aux avantages fiscaux qui ont été critiqués pendant des années et certaines propositions ont pour objet l’instauration de mesures que nous avons également soutenues pendant des années.

Cependant, le plan d’action de l’OCDE se fonde, à mon sens, sur ce que j’estime être une approche biaisée.

Monsieur le Secrétaire général, les citoyens protestent et des pressions sont exercées sur les gouvernements à court d’argent afin de lutter contre l’évasion fiscale des sociétés. L’OCDE, à mon sens, a opté pour un nouveau système, meilleur. Dans le système existant, nous nous rendons compte que l’on essaie d’imposer les multinationales comme s’il ne s’agissait que d’entités séparées œuvrant de façon indépendante dans différents pays. Vous savez, Monsieur le Secrétaire général, comme moi-même, comme tous les spécialistes, que ce n’est pas le cas.

L’OCDE sait, comme tout le monde, que ces sociétés ne sont pas des entités séparées, mais bien des sociétés unies, regroupées sous une direction centrale.

Un système fiscal adapté au XXIe siècle devrait reconnaître cette réalité économique et essayer d’imposer ces multinationales en utilisant une approche unitaire. La plupart des experts fiscaux, y compris de l’OCDE, reconnaissent les mérites de cette approche unitaire. D’ailleurs, le FMI a reconnu, au mois de juin dernier, qu’une approche unitaire « mérite une évaluation bien plus précise et réaliste ». Une transition graduelle vers un système de ce genre est non seulement possible mais nécessaire.

Une première étape serait de demander aux multinationales de soumettre à chaque autorité fiscale un rapport associé et réalisé pays par pays. Cela permettrait de souligner la substance économique de ce que font ces multinationales et de savoir où elles œuvrent. Et cela permettrait de construire et de promouvoir la norme émergente des rapports prévus pays par pays.

Monsieur le Secrétaire général, à mon sens, l’approche de l’OCDE est confrontée à un certain nombre d’obstacles politiques, dont je citerai les plus importants.

Premièrement, les recommandations de l’OCDE ne sont malheureusement pas contraignantes.

Deuxièmement, les conflits fiscaux entre les pays ne sont pas traités.

Troisièmement, les lobbies luttent afin d’éviter ces changements.

Quatrièmement, et il s’agit là d’un des points les plus critiques, il n’y a pas de solution immédiate pour les services internet. Google, Apple, Facebook, Amazon et tous les autres œuvrant dans cette économie numérique pourront s’en réjouir.

Enfin, cinquièmement, le prix de transfert ne permettra pas de régler le problème de cette double non-imposition.

Il me semble qu’il est de mon devoir de partager avec vous mes craintes, à savoir que ce plan d’action ne va pas suffisamment loin. Je crains que dans quelques années, lorsque nous nous réunirons pour évaluer ce plan d’action, nous arrivions à la conclusion que l’imposition équitable des multinationales reste malheureusement encore un rêve.

Je conclurai avec une question que j’adresse à M. Gurría.

Monsieur le Secrétaire général, pouvez-vous garantir à cette Assemblée que si ce plan d’action est mis en œuvre, il mettra un terme au statut grâce auquel les géants ne paient pas d’impôts ? Oui bien est-ce que les multinationales continueront à jouer à cache-cache en disant : « Impose-moi si tu le peux » !

Nous savons tous quels sont les gagnants de ce jeu – les grandes multinationales – et les perdants – les autorités fiscales de nos pays.

M. GHILETCHI (République de Moldova), rapporteur pour avis de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – Notre commission des questions sociales apporte son soutien au rapport préparé par M. Van der Maelen et relève la continuité de son travail d’analyse des défis économiques et fiscaux, qui s’appuie sur son précédent rapport, consacré à la lutte contre les paradis fiscaux, et qui s’intéresse aux initiatives récentes de l’OCDE.

Le rapport de cette année sur les activités de l’OCDE est en effet centré sur les nouvelles approches face aux défis économiques, appelées NAEC, ainsi que sur les problèmes relatifs à la fiscalité. Le rapporteur réunit ces deux concepts pour analyser les défaillances des politiques visant à redresser l’économie, répondre au problème du chômage, en même temps qu’à rétablir les finances publiques.

Les crises mettent à dure épreuve les systèmes politiques tout en créant le meilleur environnement pour d’éventuelles réformes. Il est dans l’intérêt de tous que les avantages de la réforme puissent prendre le pas sur les défaillances du système. Les bonnes résolutions, permettant de protéger les personnes individuelles comme les entreprises, doivent être mises en place avec tout le soutien politique nécessaire, y compris par les parlements et par cette Assemblée.

Les décisions du passé, surtout à un niveau européen, ont été insuffisantes et tardives. En même temps, les effets négatifs de l’austérité dogmatique deviennent visibles non seulement parmi les jeunes, très marqués, mais aussi sur l’ensemble de la société.

Cela dit, il n’y a pas de solution unique. Les politiques « taille unique » fonctionnent rarement dans la vraie vie. Ce qui va marcher en Estonie ne marchera peut-être pas en Pologne ou en République de Moldova. La responsabilité des élus est d’adapter à la réalité locale les conseils donnés par la communauté internationale et de convaincre la population. La responsabilité d’organisations internationales telles que l’OCDE, le FMI ou la Banque mondiale est de savoir proposer des politiques plus nuancées.

Le rapporteur a identifié le problème de l’optimisation fiscale. En théorie, la question de l’impôt équitable n’a pas de couleur politique, mais dans la pratique ce n’est pas vrai. Les Etats continuent à avoir des difficultés face à l’évasion fiscale ainsi que face à certaines pratiques d’évitement fiscal, même si des petits pas ont été faits pour lutter contre les paradis fiscaux. Je comprends et j’apprécie la persévérance de M. Van der Maelen, qui défend une politique concertée internationale.

L’OCDE devrait utiliser son processus BEPS pour renforcer la définition du paradis fiscal. Je crois aussi que l’OCDE pourrait répondre aux risques engendrés par certaines banques fictives et proposer un meilleur contrôle et une meilleure régulation, comme l’a recommandé le Sommet du G20 à Saint-Pétersbourg.

Bientôt nous serons en 2015, échéance des objectifs du Millénaire. Il est donc important de voir que même si les inégalités ont augmenté, des réformes structurelles ont permis de protéger des millions de personnes de la pauvreté. Ce fut la campagne la plus efficace pour réduire la pauvreté dans l’histoire de l’humanité. Il est donc important de poursuivre dans cette voie afin que le plus grand nombre possible d’êtres humains connaissent un meilleur avenir.

En conclusion, la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable propose quelques amendements au projet de résolution, le but étant de renforcer le message politique de l’Assemblée à l’adresse de l’OCDE.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le Secrétaire général, nous sommes très heureux de vous accueillir dans cet hémicycle. Nous sommes également heureux d’accueillir les délégations parlementaires du Canada, du Japon et du Mexique, qui participent à ce débat annuel avec les mêmes droits que les membres de notre Assemblée parlementaire.

Comme vous le savez, l’an dernier nous avions un peu innové en donnant un regard un peu plus politique sur les activités de l’OCDE. Forts de cette expérience concluante, nous avons demandé cette année encore à notre commission des questions politiques et de la démocratie – M. von Sydow, le président, est présent – de se pencher sur les activités de votre Organisation.

Je tiens à souligner que nous apprécions toujours cet exercice. Les contributions à nos débats des délégations des pays non européens membres de l’OCDE enrichiront encore nos discussions.

Après plusieurs années de crise économique sévère, nous assistons à une reprise, certes un peu hésitante selon les pays – et j’ai beaucoup apprécié l’humour, Monsieur le Secrétaire général, avec lequel vous m’avez décrit ce matin certaines situations.

Pour en arriver là, de lourds sacrifices ont été imposés aux citoyens. Leur confiance dans la démocratie s’en est trouvée érodée. Il est donc essentiel que toute perspective de relance s’accompagne de mesures de développement à même d’accompagner la croissance et de restaurer la confiance de nos concitoyens dans nos institutions.

L’OCDE a donné le ton, et vous allez le donner, en ayant pour mot d’ordre la recherche d’une meilleure gouvernance pour une croissance inclusive. Tous nos gouvernements doivent faire face aux mêmes défis. Les avis avertis de votre organisation, Monsieur le Secrétaire général, nous sont précieux et nous sommes impatients de vous entendre. A la suite, vous participerez à la discussion générale et pourrez répondre aux questions si vous le souhaitez.

Monsieur le Secrétaire général, c’est avec grand plaisir que je vous cède la parole.

M. GURRÍA, Secrétaire général de l’Organisation de coopération et de développement économiques – Merci, Monsieur le Président. (Poursuivant en anglais) Merci également à M. Van der Maelen pour son excellent rapport.

Six ans après le début de la crise, nous y sommes toujours plongés, même si les perspectives économiques sont un peu meilleures. Dans notre rapport intérimaire du mois de septembre, nous annonçons en effet une légère reprise des économies avancées, telles que celles de l’Amérique du Nord, du Japon et du Royaume-Uni. La zone euro dans l’ensemble est sortie de la récession. Cela dit, la production reste atone dans plusieurs pays.

Les Etats-Unis n’ont plus d’argent pour faire fonctionner leurs administrations, nous ignorons si l’Italie arrivera à former un gouvernement, la formation d’un nouveau gouvernement s’annonce en Allemagne. À l’évidence, la superstructure politique a une incidence sur la reprise.

Dans le même temps, les blessures sociales de la crise sont loin d’être pansées et le chômage est le plus grand défi que nous ayons à relever. La reprise inégale et faible ne contribue pas à l’emploi. C’est ainsi que dans les pays de l’OCDE, le taux moyen du chômage avoisine les 8 %, représentant 48 millions de chômeurs, soit 15 millions de chômeurs de plus qu’avant la crise. Le chômage des jeunes atteint des niveaux spectaculaires dans de nombreux pays : 60 % en Grèce, 55 % en Espagne, 40 % en Italie et au Portugal, les jeunes peu qualifiés ayant été les plus touchés. A cela s’ajoute la montée des inégalités.

Pour résumer, la situation se caractérise par une faible croissance, un chômage élevé et une montée des inégalités. Aujourd’hui, dans les pays de l’OCDE, le revenu moyen des 10 % les plus riches de la population représente environ 9 fois le revenu des plus pauvres. De 7 à 1 il y a 25 ans, le rapport est passé à 9 à 1, soit une progression de 30%. Même dans des pays traditionnellement égalitaires tels que l’Allemagne, le Danemark ou la Suède, le différentiel des revenus entre les riches et les pauvres ne cesse de progresser : de 5 contre 1 dans les années 80, le différentiel est passé à 6 ou 7 contre 1 aujourd’hui. Le Chili ou le Mexique, mon pays, sont à 27 contre 1, le Brésil 50 contre 1. Quant à l’Afrique du Sud, elle a atteint les trois chiffres ! Les facteurs d’inégalité dépassent la question des revenus. Viennent s’y ajouter les volets de la santé et de l’éducation. Nous savons que les personnes aux faibles revenus vivent moins longtemps que les autres, qu’elles sont moins actives au plan politique et que leurs enfants enregistrent de mauvais résultats scolaires. C’est dire que nous n’avons pas réussi à casser la tendance négative.

Relever ces défis suppose que nous travaillions en simultané sur plusieurs fronts, que nous ayons des politiques favorables à la croissance, l’emploi et la croissance inclusive devant être étudiés au microscope.

Un des résultats les plus productifs du dialogue entre le Conseil de l’Europe et l’OCDE, ce sont précisément nos Nouvelles Approches face aux défis économiques, les NAEC. Il nous faut en effet tirer des enseignements de la crise. Comment s’organiser pour arriver à une croissance inclusive plus verte, plus durable, plus équilibrée, plus forte ? C’est ce à quoi nous nous attachons désormais. Mais il ne faut pas s’attacher uniquement à ce qui n’a pas fonctionné, car nous savons ce qui a achoppé. Nombre d’ouvrages ont d’ailleurs été écrits sur le sujet. Non, les membres de l’OCDE doivent s’interroger sur ce que nous aurions dû faire pour mieux se coordonner avec les autres. Car le train arrive, le train arrive et pour finir, on s’aperçoit qu’il est déjà reparti. Avec pour résultat une crise sans précédent !

Les NAEC visent à améliorer nos cadres d’analyse et nos conseils de politique générale, mais aussi à concevoir un modèle de croissance économique inclusif et résilient. Lors de la session de 2011, à l’occasion de notre cinquantième anniversaire, vous nous avez invités à étudier les sources de la crise, les enseignements à en tirer et la façon d’éviter de tels accidents.

Les NAEC sont plus qu’un projet, il s’agit d’une feuille de route, d’un état d’esprit. Nous continuerons toujours à rechercher de nouvelles approches pour relever les défis économiques afin d’aider les gouvernements à mieux comprendre les liens qui unissent les différentes politiques et à identifier les arbitrages qui président aux vecteurs des politiques et les résultats obtenus en termes de bien-être.

J’en viens maintenant au volet fiscal, l’idée étant d’arriver à une économie équitable et juste, qui requiert des finances publiques saines et suppose que les gouvernements coopèrent pour mettre un terme à la fraude et à l’évasion fiscale des multinationales, tant il est vrai que les lois fiscales nationales sont en décalage par rapport à la mondialisation des affaires et par rapport à la montée de l’économie numérique. C’est ainsi qu’au cours des dernières années, les multinationales ont tiré parti des lacunes de nos législations pour réduire de manière artificielle leurs impôts. Or, de telles pratiques minent l’intégrité des régimes fiscaux de par le monde, sans compter qu’elles engendrent des distorsions profondes en termes de concurrence économique.

En juillet 2013, nous avons présenté aux ministres des finances du G20 un plan d’action, intitulé « Lutter contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices ». Présenté au mois de février, le BEPS a ensuite été entériné par les ministres pour être présenté au Sommet du G8 à Lough Erne, en Irlande du Nord.

Les participants ont entériné le projet et dit : « Il faut que le G20 l’avalise aussi ! » Et tous les dirigeants ont donné leur feu vert à Saint-Pétersbourg. Des résultats concrets devraient en découler au cours des 18 à 24 prochains mois.

Dans le même esprit, nous sommes en train de développer un échange d’informations automatique au niveau bilatéral, avant d’en tirer parti au niveau multinational. Voilà un travail commun de l’OCDE et du Conseil de l’Europe. Nous avons signé une convention multilatérale pour vous soutenir, pour soutenir les mesures proposées en matière fiscale. 60 pays y ont déjà adhéré et nous nous attendons à ce que 60 autres fassent de même au cours des mois à venir. L’on pourra ainsi passer de l’échange d’informations fiscales à la demande à un échange d’informations automatique à des fins fiscales. Dès lors, si vous détenez un compte dans un pays tiers, la banque le notifiera aux autorités, qui feront à leur tour rapport à vos autorités nationales, et si vous ne déclarez pas le compte, vous risquerez des ennuis. Il s’agit d’une spectaculaire montée en puissance. Et c’est ici que ce dispositif a vu le jour. Voilà donc deux éléments qui ont changé notre manière d’agir, à l’OCDE, et dont nous avons trouvé la source d’inspiration ici. La brochure qui présente l’échange automatique d’informations est à votre disposition.

M. Van der Maelen le dit très bien dans son rapport : la crise économique mondiale a eu des effets terribles sur la confiance. Selon un sondage, le niveau moyen de confiance accordée aux gouvernements nationaux des pays de l’OCDE était de 40 % en 2012, ce qui révèle une tendance marquée à la baisse. Le contrat social est menacé. Les gens ne croient plus en leurs gouvernements ni aux institutions qui ont été créées au cours des 100 dernières années. Les NAEC et nos BEPS sont des clés pour regagner cette confiance perdue. Pour les compléter, il faudra mettre au point une stratégie qui ciblera le déficit de confiance. Cette question va être de nouveau au cœur des activités politiques.

Monsieur Ghiletchi, le coût social de la crise est considérable. Dans bien des pays, des générations entières sont marquées à vie. C’est ce qui a mis à mal la confiance des citoyens dans leur gouvernement. C’est un problème de légitimité. Il ne s’agit pas d’une crise de plus : ce sont les fondations même de notre contrat social qu’il faut réparer, et ce rapidement. Il nous faut donc revoir et, si nous en sommes d’accord, réviser ensemble – OCDE et Conseil de l’Europe – nos concepts, nos théories, nos procédures et nos recommandations de politique générale.

Nous pouvons faire beaucoup ensemble. Nous avons une expertise technique, des compétences, nous avons votre orientation politique et votre soutien. Cela doit nous permettre d’agir. Je vous remercie beaucoup de m’avoir invité ; je suis très heureux de me retrouver parmi vous et je me réjouis de l’échange de vues que nous allons entamer.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, Monsieur le Secrétaire général, pour cette remarquable intervention, vivante et passionnante, à laquelle j’ai bien vu que mes collègues accordaient toute leur attention.

La discussion générale est ouverte.

M. KENNEDY (Royaume-Uni), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – C’est un grand honneur pour moi d’intervenir immédiatement après l’excellente présentation de M. le Secrétaire général. Au nom de l’ADLE, je félicite M. Van der Maelen pour son excellent rapport.

J’interviens au nom de l’ADLE et non du Gouvernement britannique, bien que mon parti en soit un partenaire de coalition. Notre gouvernement a fait part de son soutien à ce rapport, à une exception près, au demeurant tout à fait pertinente du point de vue du débat légitimement permanent, car consubstantiel au libéralisme, qui anime l’Europe et le monde : quel équilibre établir entre le libéralisme social, auquel je me rattache pour ma part, et un libéralisme économique plus marqué ? Ce débat, qui s’est concrétisé voilà bien longtemps à Bad Godesberg lorsque le FDP a changé de religion pour s’allier non plus aux sociaux-démocrates mais à la CDU, s’est répandu au sein du libéralisme européen et demeure très vivace au sein de l’aile libérale du Gouvernement britannique. Celui-ci a été très attentif à l’inquiétude dont le rapport se fait l’écho dans son paragraphe 10, lequel rappelle que, selon le Comité consultatif des syndicats auprès de l’OCDE (TUAC), « financer la rigueur budgétaire par des coupes dans les services publics, les régimes de sécurité sociale et des retraites ne ferait que prolonger la crise de l’emploi et le risque d’une crise sociale aggravée ».

Je comprends le point de vue de notre gouvernement. Certes, l’expression du point de vue des syndicats doit être accueillie avec sympathie. Toutefois, si l’approche libérale doit nous enseigner quelque chose en ces matières, c’est bien que, pour voler, un oiseau – tel l’oiseau de liberté qui symbolise notre parti – a besoin de deux ailes : la philosophie politique doit être mue par le cœur, certes, mais aussi par la tête. Voilà pourquoi j’appelle à la prudence, même si, pour ma part, je ne m’oppose pas frontalement à ce paragraphe : socialisme, conscience, oui, mais il faut aussi faire preuve de responsabilité en matière fiscale et de bon sens !

M. BINLEY (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Je félicite M. Van der Maelen pour cet excellent rapport, très détaillé. Plusieurs activités de l’OCDE méritent d’être saluées. Toutefois, nous ne partageons pas le point de vue selon lequel il faudrait plus de contrôles centraux et un modèle unique. Voici pourquoi.

Le paragraphe 7 du projet de résolution « se réjouit des efforts de l’OCDE pour intégrer sa Stratégie pour une croissance verte dans des domaines d’intervention clés ». Chez nous, au Royaume-Uni, l’idée est de parvenir à 25 % d’énergies renouvelables au niveau de l’Union européenne. Cela implique des éoliennes fournissant un certain niveau d’énergie. Il s’agit de réduire les émissions nocives. Mais prenons garde au prix, à la rentabilité, car certains pays extracommunautaires n’ont aucun intérêt à pérenniser leurs ressources.

J’en viens au paragraphe 10, sur lequel s’est déjà prononcé mon collègue Kennedy, ainsi que le Gouvernement britannique lui-même. Maggie Thatcher aurait estimé que cette affirmation n’avait aucun sens, et bien des personnes auraient été d’accord avec elle. Ma grand-mère aurait dit que, face à une crise financière, il fallait d’abord réduire les dépenses, ensuite faire en sorte de gagner plus d’argent. C’est simple, mais c’est au cœur de la probité en matière économique. Ne perdons pas cela de vue.

Les gouvernements ont causé la crise ; ils doivent faire quelque chose pour la résoudre. Au Royaume-Uni, en 2002, nous avons causé un déficit budgétaire, empruntant une livre pour en dépenser quatre. Ma grand-mère en aurait été horrifiée, Monsieur le Président ! Si je salue donc nombre des affirmations du rapport, je tiens à dire qu’il n’y a pas de modèle unique ici. Ce serait une folie que de penser le contraire. Pour le reste, je suis d’accord avec le rapporteur de la commission des questions sociales.

M. HUNKO (Allemagne), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Permettez-moi de remercier à mon tour M. Van der Maelen pour son rapport, tout particulièrement pour les points qu’il a évoqués dans son intervention. C’est un excellent travail. Mais j’aimerais également remercier le Secrétaire général de l’OCDE pour son intervention ici, bien sûr, mais pas seulement. Je le remercie aussi pour les nombreuses positions critiques qu’il a assumées tout au long de la crise. Fin juin notamment, l’OCDE a critiqué mon pays pour sa politique salariale, disant que, pour éviter les tensions en Europe, il fallait que l’Allemagne ajuste sa politique salariale. C’est un aspect très important de la crise de la zone euro. J’aimerais donc vous remercier, une fois encore, Monsieur le Secrétaire général.

M. Binley a évoqué le point 10 de la résolution. J’avoue que mon point de vue est très différent du sien, puisque je me félicite plutôt de ce point. Le rapporteur y fait référence au comité consultatif des syndicats auprès de l’OCDE, le TUAC, d’après lequel le financement de la rigueur budgétaire par des coupes dans les services publics et les régimes de sécurité sociale et de retraite ne fera que prolonger la crise de l’emploi et renforcer le risque d’une crise sociale aggravée.

Cela me rappelle les débats que nous avons eus l’an dernier au mois de juin lorsque nous avons adopté un rapport très critique sur la politique d’austérité. Nous avions constaté à l’époque que la consolidation des budgets ne peut pas s’opérer par leur seule réduction, il faut aussi augmenter les recettes. C’est l’aspect positif des nouvelles initiatives de l’OCDE. M. Van der Maelen l’a évoqué dans la résolution, en citant surtout l’initiative dite BEPS, « Erosion de la base d’imposition et transfert de bénéfices », qui permettrait de générer des recettes pour contrer les politiques d’évitement fiscal. Il était temps !

J’espère que le plan d’action aura une portée suffisante. J’imagine que nous aurons l’occasion d’en reparler l’année prochaine ou l’année suivante.

L’OCDE contient les termes « coopération » et « développement » dans son nom, ce sont les deux piliers de son activité. Pour notre Organisation, il est aussi important de mettre l’accent sur ces deux points : la coopération en lieu et place d’une concurrence inconsidérée, le développement au lieu de l’austérité. Le précurseur de l’OCDE est d’ailleurs né du plan Marshall d’après-guerre. Peut-être aurions-nous besoin d’un plan de ce genre aujourd’hui – surtout si je pense à la Grèce.

LE PRÉSIDENT – Avant de poursuivre, je rappelle aux collègues qui viennent d’arriver que le scrutin relatif à l’élection du juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie est en cours.

M. SASI (Finlande), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je tiens tout d’abord à remercier l’OCDE pour le travail qu’elle accomplit en faveur de la croissance et de l’économie mondiale et je remercie également M. Van der Maelen, dont le rapport est particulièrement intéressant.

A mon avis, il existe actuellement, et partout en Europe, un manque de confiance envers les institutions politiques, et l’évasion fiscale est un indicateur qui permet de mesurer à quel point cette confiance est ébranlée. Or cette évasion fiscale est aujourd’hui très répandue, ce qui prouve combien ce manque de confiance est grand. En fait, si les contribuables ne pensent pas que leur argent est bien dépensé, ils ne veulent pas payer d’impôts. Ils trouvent cela inacceptable. Dans certains pays, on voit des hommes politiques employer leur famille ou leurs amis et l’on assiste à un certain nombre de pratiques de ce type. Dans d’autres où l’argent est dépensé de façon sage, pour la santé et les services publics, les contribuables ont envie de payer des impôts parce qu’ils ont conscience d’en tirer des bénéfices. En tant qu’hommes politiques, nous devons donc être honnêtes et utiliser l’argent des contribuables de façon transparente et à bon escient.

Que dire du chômage ? La demande d’emploi est toujours là. Mais se pose aussi la question du coût de l’emploi. Certains pays ont mis en place un salaire minimum, en dessous duquel il est interdit de travailler. On peut penser qu’il existe une certaine inégalité, et nous devons faire en sorte que chacun ait accès au logement, à la nourriture, à la sécurité sociale, et intervenir si le salaire ne suffit pas à vivre. Mais il faut, à mon sens, dérèglementer le marché et accroître la flexibilité sur le marché du travail pour faire en sorte que tous puissent travailler.

Des accords sont essentiels. Nous devons faire en sorte que la compétitivité soit respectée lorsque l’on fixe les salaires. Si nous prenons les cas de la Grèce et de l’Allemagne et le rapport qui existe entre les revenus dans ces deux pays, nous voyons que la Grèce a choisi le chômage tandis que l’Allemagne faisait le choix du plein emploi. C’est un choix politique. C’est aussi le choix des syndicats.

Le projet de résolution fait allusion aux coupes budgétaires. Mais le vrai problème de cette crise est qu’au sein de l’Union européenne, on agit peu et trop tard. Il suffit pour s’en convaincre de penser à l’Islande ou à la Lettonie : en procédant à de fortes coupes budgétaires, on arrive à avoir une meilleure base, plus saine, sur laquelle on peut reconstruire l’économie. Il faut donc, à l’avenir, veiller à faire ces coupes au plus tôt afin de pouvoir supporter les coûts sociaux.

M. M. JENSEN (Danemark), porte-parole du Groupe socialiste* – Je tiens tout d’abord à féliciter notre collègue, M. Van der Maelen, pour l’intense travail qu’il a réalisé en vue de la rédaction de son rapport sur les activités de l’OCDE. Il s’appuie sur une analyse politique claire et sur des choix qui peuvent être un défi lorsque l’on traite d’une organisation impulsée principalement par l’économique et usant, entre autres, de nombreux termes techniques. Son rapport est très clair et bien ciblé.

En 2012 et 2013, l’OCDE a dû définir et mettre en œuvre des politiques à la lueur de la crise économique. Nous voyons enfin la reprise s’annoncer au plan mondial, en particulier aux Etats-Unis et au Japon. Malheureusement, la croissance reste faible en Europe et dans la plupart des pays de l’OCDE et, en tout cas, le chômage y est trop élevé.

En conséquence, au plan national, les gouvernements doivent mettre les bouchées doubles pour rétablir la croissance et la compétitivité, réduire le chômage, notamment celui des jeunes, et lutter contre le chômage de longue durée. Il faut rétablir la croissance, traiter les inégalités et améliorer la qualité de l’emploi.

C’est un défi exigeant puisque, parallèlement à cela, nous sommes confrontés à la globalisation, à la pauvreté, au vieillissement de la population, aux migrations, au changement climatique et à la raréfaction des ressources naturelles.

Régler le problème de l’emploi est vraiment le grand défi pour nos gouvernements et le monde entier. Dans cette lutte, un outil essentiel sera l’amélioration des connaissances et des compétences dans chaque pays. Il faut investir des fonds publics dans l’enseignement et la formation tout au long de la vie. C’est une absolue nécessité, tout comme les investissements publics dans la recherche, car cela peut améliorer la productivité.

Comme le dit M. Van der Maelen dans son rapport, nous savons qu’il est nécessaire de contrôler les dépenses publiques pour traiter de la crise de la dette souveraine.

Si l’on n’investit pas dans l’avenir, tout le monde sera perdant. Il y a donc deux piliers fondamentaux : le contrôle des dépenses publiques, d’une part, et la définition de priorités, d’autre part. Il faut économiser des ressources pour pouvoir investir dans le futur.

Le rapport de M. Van der Maelen souligne à juste titre le rôle important de l’OCDE en matière d’équité fiscale. Le Groupe socialiste est favorable à toutes les mesures qui permettront de mieux lutter contre les paradis fiscaux.

M. Boden, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Mignon au fauteuil présidentiel.

M. SCHWALLER (Suisse)* – Ce rapport offre un très bon aperçu de l’état du débat en 2013. Force est de constater que de nombreux pays doivent encore travailler à la mise en œuvre concrète de ses recommandations.

En ce qui concerne la rigueur budgétaire, les coupes dans les services publics, dans les régimes de sécurité sociale et les retraites ne feraient que prolonger la crise de l’emploi et risqueraient d’entraîner une grave crise sociale. Il convient de s’interroger sur les missions qui devront rester du ressort de l’intervention publique à l’avenir. La gestion de la sécurité sociale et des retraites doit s’adapter à la démographie. Lorsqu’un pays décrète que l’âge de la retraite est 55 ans ou 60 ans, il s’expose à de graves difficultés financières et budgétaires. Le financement de la sécurité sociale est, selon moi, l’aspect de la question le plus épineux.

(Poursuivant en français) Les efforts déployés par l’OCDE pour améliorer l’équité fiscale en s’attaquant à l’évasion fiscale illégale doivent être salués. Je soutiens l’idée de fixer des standards internationaux, notamment pour les échanges d’informations. Mais il ne suffit pas d’écrire des rapports et de fixer des standards. Ces derniers doivent être appliqués par toutes les places financières importantes de la planète. Aujourd’hui, les problèmes liés à l’évasion fiscale ne se situent plus uniquement dans les pays visés généralement par les rapports du Conseil de l’Europe.

S’agissant de l’échange d’informations, il est indispensable de fixer clairement quelles données et à partir de quels montants les sommes d’argent versées par les banques doivent être portées à la connaissance d’un autre Etat. Trop d’information tue l’information. Il ne sert à rien, comme c’est le cas actuellement, de transmettre une donnée concernant le paiement d’une facture de 7,5 euros pour un téléphone mobile !

Il appartient au Conseil de l’Europe de mieux contribuer à ce que le flux de données soit clairement défini et, surtout, à ce que les mêmes règles soient appliquées par tous les Etats, et pour le moins par ses Etats membres.

Mme GUZENINA-RICHARDSON (Finlande)* – Le rapport de M. Van der Maelen mérite d’être lu. Il se penche de manière honnête sur les problèmes actuels de nos sociétés. Sur les problèmes de liquidité, page 12, le rapporteur utilise le terme très intéressant d’« hystérèse », qui désigne les conséquences à long terme d’effets à court terme. Il écrit : « L’hystérèse se matérialise sous diverses formes : des investissements productifs réduits, des investissements moindres dans la recherche et le développement, un intérêt limité des chômeurs de longue durée pour l’activité professionnelle, des effets marquants sur les jeunes au début de carrière difficile, la baisse des investissements gouvernementaux matériels et en capital humain. »

Comme un médecin qui doit trouver les bons médicaments, l’OCDE a beaucoup réfléchi sur son rôle, envisageant lorsque c’est nécessaire des changements d’approche. Une approche trop libérale à l’égard du secteur financier n’est pas adaptée. Le rapport nous ouvre les yeux sur la réalité actuelle.

Notre travail, au Conseil de l’Europe, est de protéger les droits de l’homme et la démocratie. Ce rapport mérite toute notre reconnaissance car il identifie les effets humains des carences de nos gouvernements dans la lutte contre les paradis fiscaux. Nous devons comprendre ce qui nous a conduits à la crise actuelle pour trouver des remèdes efficaces. Le rapport de M. Van der Maelen nous y aide sans aucun doute.

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, je vous rappelle que le scrutin pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie est en cours. Je vous invite à aller voter.

M. BOCKEL (France) – Les scrutins qui ont été organisés de part et d’autre du continent ces dernières années se sont pratiquement tous traduits, à l’exception notable de l’Allemagne, par le rejet des équipes gouvernementales en place, qui ont dû faire face à la tempête économique et financière. Le verdict des urnes traduit souvent deux idées différentes : le refus de prolonger des gouvernements jugés trop laxistes et donc responsables de la crise, d’une part ; la lassitude à l’égard de cures d’austérité souvent sévères et dont les objectifs restent mal compris par nos concitoyens, d’autre part.

Il n’est pas anodin que le Fonds monétaire international ou l’Union européenne préconisent aujourd’hui une meilleure calibration sociale des programmes de soutien mis en place par les Etats qui rencontrent de graves difficultés financières. Je note que cette préoccupation est également mise en avant par l’OCDE dans son initiative sur les « Nouvelles approches face aux défis économiques ». La lutte contre le surendettement des Etats ou le combat contre le laxisme budgétaire ne peuvent être automatiquement synonymes de moins-disant social ou de surcharge fiscale. Il ne faudrait pas que le patient meurt guéri…

L’Union européenne insiste désormais sur la lutte contre les conséquences sociales de la crise en promouvant de nouvelles approches, à l’image du dispositif de garantie pour les jeunes. On doit s’en féliciter. Le chômage des jeunes est aujourd’hui un phénomène massif en Europe, y compris au sein de l’Union européenne. Je pense tout particulièrement aux jeunes de moins de 25 ans, qui ne sont ni étudiants, ni employés, ni stagiaires, qui sont sans formation. Ils sont près de 8 millions en Europe, et ce sont de futurs chômeurs de longue durée. Ce n’est pas acceptable.

La Commission européenne va inviter chaque Etat membre à présenter, dès 2014, une offre de qualité à tous ces jeunes sans emploi ou sans formation de moins de 25 ans. 8 milliards d’euros vont ainsi être dégagés pour financer ce dispositif.

Je relève que dans le même temps, l’Union engage une réflexion sur une allocation chômage européenne. Ce système d’assurance où les risques de chocs économiques seraient assumés par l’ensemble des Etats membres réduirait ainsi les fluctuations des revenus nationaux et offrirait des marges de manœuvres supplémentaires pour une budgétaire expansionniste en période de ralentissement. Ce régime représenterait une prestation de base, complétée par les Etats membres. L’instauration d’un tel dispositif aurait ralenti la chute des PIB espagnol et grec de respectivement 20 % et 10 %.

Cette révision, au sein de l’Union européenne, de nos approches économiques me semble aller dans le sens défendu par notre Assemblée, celui d’un traitement humain et responsable de la crise économique et de ses conséquences. Monsieur le Secrétaire général de l’OCDE, votre propre réflexion et vos initiatives vont également dans ce sens.

En tant que premier auteur, l’année dernière, d’un rapport de l’Assemblée sur les activités de l’OCDE, je voudrais, pour finir, féliciter M. Van der Maelen pour l’excellence de son travail, tout en regrettant que la sous-commission ad hoc créée au sein de la commission des questions politiques sur le suivi des travaux de l’OCDE ne se soit pas encore réunie.

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* - Ce débat donne une impression de déjà-vu : on ne fait que se répéter depuis un certain nombre d’années. Je me demande, cher Dirk, si nous ne vivons pas un rêve, voire un cauchemar.

Je pense en particulier à la partie du rapport consacrée à la lutte contre les paradis fiscaux, dont la conclusion est que les multinationales se moquent du droit, des Etats et surtout de l’ensemble de la société que nous représentons en tant que parlementaires. Une telle attitude entraîne en effet une délégitimation de la démocratie, des parlements et de la politique.

Nous faisons face à la crise économique et financière, à des problèmes d’emploi, mais également à une crise politique, à ce que M. Gurría appelle le « déficit de confiance ». Plus encore, nous assistons à un véritable mépris, à une haine envers les représentants de l’Etat. Un gouvernement vient de se constituer dont je ne citerai pas le nom, qui traduit la montée dans un certain nombre de pays du fascisme et du nazisme et de l’opposition à la démocratie parlementaire.

Je ne parle pas seulement des groupes ouvertement fascistes ou stalinistes, mais aussi d’un fascisme silencieux, hostile à la démocratie, aux partis politiques et au parlementarisme, vus comme les responsables de tout ce qui est en train de se passer – par exemple le fait que nous continuions à perdre des droits que nous pensions définitivement acquis dans notre société de bien-être.

Ma question est donc la suivante : que faisons-nous, en tant que parlementaires, pour exiger des gouvernements qu’ils agissent envers ces multinationales ? Ainsi, alors qu’une de ces sociétés vend des produits chimiques aux deux parties en conflit en Syrie, nous ne faisons rien pour l’empêcher ! On a l’impression que la politique a atteint des limites que nous ne parvenons pas à dépasser, ce qui empêche de parvenir à ce que souhaitent pourtant tous les parlements : lutter contre les paradis fiscaux. Nous ne devons pas perdre en crédibilité en disant aux gens : « Réduisez vos dépenses, acceptez la perte de pouvoir » tout en laissant de véritables mercenaires juridiques se moquer ouvertement de l’Etat de droit.

Un certain nombre de gouvernements ont affirmé avoir mis en œuvre des mesures destinées à lutter contre la fraude fiscale extraterritoriale. Mais le paragraphe 80 du rapport contredit cette affirmation. Pouvez-vous, Monsieur le rapporteur, revenir sur le problème du respect des normes en matière de lutte contre la fraude fiscale ?

Pour finir, je souhaite remercier M. Van der Maelen et M. Gurría pour leurs propos.

M. HAWN (Canada, observateur)* - Je remercie le rapporteur pour l’approche adoptée dans son analyse des défis les plus importants auxquels doit faire face l’économie mondiale comme des mesures préconisées par l’OCDE.

D’une façon générale, nous sommes d’accord avec l’état des lieux dressé par le rapporteur, inspiré d’ailleurs des perspectives économiques publiées par l’Organisation. Cela étant, nous sommes préoccupés par le rythme de la reprise économique, tout en approuvant les réponses proposées par le G20, qu’il s’agisse de l’assouplissement de la politique monétaire, de la stabilisation du système financier ou des mesures budgétaires destinées à stimuler la demande intérieure. L’état de l’économie serait d’ailleurs pire si de telles mesures n’avaient pas été prises. Elles n’ont pas seulement pour objet d’éviter une catastrophe, mais aussi d’ouvrir la voie à une croissance durable.

Il est important d’asseoir la reprise, mais la pérennité budgétaire doit être également au rendez-vous, comme l’a confirmé le dernier G20 qui s’est tenu en Russie.

S’agissant des activités de l’OCDE, nous affirmons que celle-ci doit se concentrer sur son métier de base consistant à analyser la situation et à recommander des réformes structurelles clés de façon à assurer une reprise mondiale durable.

Des initiatives ont été prises, comme les « New Approaches To Economic Challenges » – NAEC – qui visent surtout le caractère inclusif et pérenne de la croissance. Mais prenons garde à l’excès d’ambition et de complexité : il faut être réaliste et développer des projets capables de déboucher sur des résultats concrets. En particulier, nous croyons beaucoup à l’équilibre socio-économique : la force de l’économie canadienne, assise sur d’importants programmes sociaux, est la preuve qu’un tel équilibre est nécessaire.

S’agissant du volet fiscal, nous sommes d’accord sur l’approche modérée adoptée par l’OCDE dans son plan d’action connu sous le nom de BEPS – « Base Erosion And Profit Shifting ». Nous saluons le rôle joué par l’Organisation ainsi que par le G20 pour placer le BEPS au centre de l’attention et promouvoir des mesures de lutte contre ce phénomène.

Cependant, contrairement à ce qu’affirme le rapporteur, la faible régulation en matière de prix de transfert n’est pas la principale cause de la double non-imposition. Le plan d’action de l’OCDE montre que ce phénomène n’est qu’un des aspects de la fiscalité internationale pouvant avoir une incidence sur le BEPS. Ce sont d’autres phénomènes qui entraînent la double non-imposition.

Le Canada n’est pas favorable à une imposition unitaire des sociétés transnationales : nous soutenons le consensus international en faveur du principe de pleine concurrence.

En ce qui concerne les paradis fiscaux, nous soutenons les travaux du Forum global sur la transparence et l’échange d’informations à des fins fiscales ainsi que ses propositions en matière d’administration fiscale.

Je remercie le rapporteur pour son travail. Nous ne partageons pas toutes ses conclusions, mais nous sommes très heureux de pouvoir participer à un tel débat.

M. REIMANN (Suisse)* - L’existence de l’OCDE est une bonne chose, mais cela ne signifie pas que tout ce qu’elle fait soit nécessairement bon. Il est donc normal d’en évaluer périodiquement l’activité, y compris ici, à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. À cet égard, je me félicite de la publication de ce rapport et de la discussion très franche qui l’accompagne, même si j’ai quelques réserves à formuler à son sujet, dont certaines feront d’ailleurs l’objet d’amendements.

De manière générale, le rapport me semble faire un éloge excessif des activités de l’Organisation – peut-être en raison de sa coloration principalement socialiste. Selon moi, ce document – et l’OCDE elle-même – est trop influencé par le credo selon lequel la centralisation est une solution supérieure à toutes les autres pour résoudre les problèmes. Il faut des discussions, des échanges d’informations, la formulation de propositions et, à cet égard, l’Organisation fournit un travail utile. Mais l’OCDE ne doit pas me dire comment organiser le financement politique dans mon pays – la majorité parlementaire s’en charge très bien –, ni ce qu’il convient d’entendre par équité fiscale ou quelle recette fiscale doit être considérée comme justifiée. Sur ces sujets, il peut exister des différences de point de vue d’un pays à l’autre, ou entre un pays et le Château de la Muette.

De même, on parle trop souvent de paradis fiscal sans prendre la peine de définir clairement ce concept. Dans ce domaine également, des différences considérables peuvent être observées selon les pays.

On pourrait également se pencher sur des expressions telles que « l’échange automatique d’informations en matière fiscale » ou les « règles communes sur l’échange d’information sur les entreprises transnationales ». Cela pose un problème d’efficacité : je me demande s’il est utile de tout centraliser et de vouloir contrôler ces questions sur un plan international, voire mondial. C’est cela qui ne me plaît pas toujours dans les travaux de l’OCDE : le recours à un processus qui n’est pas nécessairement démocratique ni légitime pour promouvoir le centralisme comme mode d’action supérieur à tout autre. De mon point de vue, il y a plus, et mieux, à faire.

M. TIMCHENKO (Fédération de Russie)* – J’exprime ma reconnaissance, comme les intervenants qui m’ont précédé, au rapporteur. Je me félicite de la présence parmi nous du Secrétaire général de l’OCDE, que je remercie pour son intervention très émotionnelle.

Nous n’appartenons pas à l’OCDE, mais notre coopération remontant à 20 ans, nous avons de proches relations. Nous sommes observateurs dans la plupart de ses organes. Nous pouvons nous exprimer sur les questions étudiées et participer à l’élaboration des recommandations.

On publie de façon régulière des aperçus économiques sur la Russie, notamment des études particulières sur certains secteurs de l’économie et des relations sociales, ce qui a une incidence positive sur le développement de notre pays. La coopération pour élaborer la législation antimonopole pour attirer les investissements étrangers et transformer l’économie est particulièrement importante pour nous.

Je partage la préoccupation du rapporteur concernant les systèmes d’investissement des transnationales. La Russie avance pour adhérer à l’OCDE. En 2012 nous avons rempli deux conditions importantes : adhérer à la convention sur la mise en œuvre des transactions commerciales et signer le protocole. Mesdames et Messieurs, nous espérons que l’adhésion à cette organisation aura un effet positif sur la Russie et l’économie mondiale.

Aujourd’hui la situation en Russie est la même que dans le reste de l’Europe. Nous rencontrons les mêmes difficultés : vieillissement de la population, migrations, changement climatique, épuisement des ressources naturelles. Il est difficile d’évaluer le rôle de l’OCDE dans tout cela.

En 2013 la Russie est sur la bonne route. Nous pouvons citer de nombreuses décisions prises dans notre pays qui rejoignent les recommandations de l’OCDE. Nous sommes prêts à passer à une étape plus qualitative de nos relations avec cette organisation.

M. BENEYTO (Espagne)* – Je remercie M. Van der Maelen pour son rapport et le Secrétaire général de l’OCDE pour son intervention particulièrement intéressante.

Certains points du rapport méritent d’être traités de façon détaillée. Nous avons déjà parlé de l’hystérèse qui touche de façon générale un grand nombre de politiques adoptées. Les pays du sud de l’Europe sont passés d’une perspective où l’austérité et la consolidation fiscale étaient les objectifs principaux, à la croissance, plus importante maintenant. Au Japon et ailleurs, les liquidités sont le moyen fondamental pour sortir de la crise. C’est un changement radical de pensée. L’OCDE et le rapport montrent clairement qu’il nous faut de nouveaux objectifs de politique macro-économique et adopter une vision plus globale.

À quel moment l’augmentation des impôts est-elle négative ? Concernant la pression fiscale, l’OCDE a un rôle essentiel à jouer. Quels sont les effets négatifs de certaines réformes structurelles ? Chaque pays connaît des circonstances particulières. Elles sont différentes en Espagne, au Portugal et en Italie. Nous avons opéré des réformes structurelles pour sortir de la crise et relancer la croissance économique mais la dette persiste. Elle doit être considérée différemment, de manière novatrice, au Japon et aux États-Unis aussi.

L’OCDE est le grand lieu pour la pensée occidentale. Elle doit s’ouvrir au reste du monde, être plus proactive pour nous éclairer sur les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Il ne faut plus utiliser les solutions traditionnelles. Le Conseil de L’Europe pourra vous aider dans ce travail.

M. RECORDON (Suisse) – Je remercie notre rapporteur pour son document certes stimulant mais incomplet malgré sa richesse. Je m’exprimerai sur trois points.

Le premier concerne le lien entre les points 5 et 7 du projet de résolution, relatifs aux éléments de croissance et environnementaux. Dieu merci, nous ne sommes plus gouvernés par la grand-mère de M. Binley ! Nous n’en sommes plus à l’époque monétariste et déflationniste qui a provoqué la terrible crise de 1929. Nous sommes face à un autre défi. Nous devons ménager les ressources publiques, l’environnement et notre planète. La biodiversité et les ressources énergétiques sont cruellement en question. La disparition des abeilles pourrait menacer notre production agricole.

Croissance et défis environnementaux recèlent une contradiction interne qu’il est possible de lever mais la voie est étroite. J’aurais souhaité que l’on creuse davantage, du côté de l’OCDE et du rapporteur, la manière de conduire cette croissance verte et de réduire le risque de contradiction entre la nécessaire croissance, condition de la prospérité sociale, et le nécessaire respect de l’environnement, condition de la survie de notre espèce.

Le deuxième point concerne les aspects économiques considérés sous l’angle fiscal. Ce rapport, comme celui d’il y a deux ans, pose les questions nécessaires. Je partage ses conclusions. Comme M. Schwaller, je demande que cela s’applique de manière générale et efficace. Nous faisons beaucoup de grandes déclarations, nous signons beaucoup de documents, mais je ne suis pas sûr qu’ils soient suivis d’application.

Il y a un danger dans la généralisation. Si nous pratiquons l’échange automatique avec des pays qui n’ont pas un niveau élevé de respect des droits humains, le détournement de la voie fiscale pour violer ces droits humains est un risque important.

Le troisième point concerne la restauration de la confiance des citoyens sans laquelle, et vous l’avez bien montré, la démocratie court un risque accru.

Mme SANTO (Japon)* – Je suis très heureuse d’être ici. La dernière fois que j’ai participé aux travaux de cette Assemblée, c’était il y a vingt-cinq ans. Dans l’intervalle, les choses ont bien changé.

Vous le savez, au début des années 1990, nous avons rencontré de nombreuses difficultés économiques, avec notamment de la déflation. Cela a duré pendant vingt ans. Il y a deux ans et demi, nous avons connu de nouveaux revers, pour les raisons que vous savez. Je veux remercier la communauté internationale pour le secours qu’elle nous a apporté.

Deux élections ont eu lieu récemment. Au mois de décembre dernier, la chambre basse a été renouvelée, et, cet été, ce fut le tour de la chambre haute. Le LDP est revenu au pouvoir pour la première fois depuis trois ans après avoir remporté les deux élections. Un changement politique est donc intervenu, et le gouvernement dispose maintenant de trois ans pour mener des politiques bien ciblées. D’ailleurs, on peut le dire, les mesures déjà prises sont bien appréciées. En fait, nous avons assoupli la politique monétaire, renforcé la politique budgétaire et assis les réformes structurelles. Ces mesures ont permis une bonne reprise, avec une croissance économique de 4,1 % sur trois ans. Le taux était de 3,8 % entre le mois d’avril et le mois de juin. Et l’indice des prix à la consommation progressait de 0,8 %, ce qui montre que l’on est finalement sorti de la période déflationniste.

Des progrès ont aussi été réalisés sur le front des dépenses publiques, qui étaient un gros souci pour le Japon. Un budget à moyen terme a été bouclé au mois d’août, et il s’agira de réduire de 50 % les dépenses d’ici à 2015. Cela concerne la dette publique des pouvoirs locaux et de l’Etat. Il s’agit de parvenir à un bon équilibre budgétaire en 2020. La fiscalité, on le sait bien, pose problème dans tous nos pays, mais elle est un instrument essentiel pour assainir les finances publiques. Il y a quelques heures, le Premier ministre a pris la décision de faire passer la taxe sur la consommation de 5 % à 8 % au 1er avril 2014.

L’économie, c’est essentiel. Il est important de prendre des mesures en la matière. Et les perspectives nous semblent brillantes pour notre pays.

M. MENDES BOTA (Portugal)* – Si la crise économique actuelle doit servir à quelque chose, c’est bien à mettre à nu les inégalités qui existent dans nos démocraties modernes, ce clivage entre les riches et les pauvres, les puissants et les impuissants. Ce sont toujours les classes défavorisées qui sont touchées le plus durement.

Le rapport soulève un certain nombre de questions légitimes. Je souhaite, pour ma part, évoquer trois aspects.

Les paradis fiscaux sont devenus une pratique courante, avec la complicité des grandes économies industrielles. La peur de perdre des investissements, la crainte de la délocalisation des entreprises et de l’augmentation, en conséquence, du chômage font que nous sommes devenus les otages d’un mode opératoire qui est, au mieux, impitoyable, au pire, hypocrite.

Les Etats sont contraints de compenser leurs déficits en surfiscalisant les personnes, les ménages et les entreprises, en réduisant les services publics, notamment pour la santé et l’éducation.

Nous soutenons donc les efforts de l’OCDE en vue de l’instauration par les Etats d’une plus grande transparence, notamment en ce qui concerne le patrimoine et les transactions, et en vue d’une plus grande coordination.

Il est également important de soutenir des initiatives telle la stratégie pour une croissance verte de l’OCDE, donc de renforcer les investissements dans les énergies propres. Cela permettra de créer des emplois durables et stables dans un domaine stratégique à long terme. C’est aussi une façon de réorienter les milliards qui ont été dépensés dans les hydrocarbures. Il n’est jamais trop tard pour souligner le potentiel de ces marchés. Certains estiment que pourraient être créés jusqu’à 30 millions d’emplois dans le monde.

Je vous invite à vous reporter au deuxième chapitre du rapport Van der Maelen, qui évoque la nécessité de trouver de nouvelles idées de financement. L’initiative dite NAEC y apporte sa contribution.

Il faut aussi réduire les écarts de salaires et rétablir le dialogue social, et nous devons créer plus de clarté.

Le progrès, dans nos sociétés, n’a jamais été linéaire et régulier. En tant que parlementaires, notre premier devoir est de considérer que le verre est à moitié plein, et non à moitié vide, et de donner plus d’opportunités à ce train du changement. Le coup d’envoi a été donné. Nous devons décider quel héritage nous entendons léguer aux générations futures. Lorsqu’elles le considèreront, admireront-elles un mausolée de nos ratages ou contempleront-elles la claire lumière des idées et de la philanthropie ?

M. JÁUREGUI (Espagne)* – C’est un bon rapport qui nous est soumis. Il me semble en particulier important de souligner les points 16 et 17 relatifs à l’harmonisation fiscale, à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Il s’agit là de promouvoir justice dans le monde. Le point 17 prévoit ainsi que les multinationales devraient rendre compte, sur le plan fiscal, dans le pays où elles sont établies.

Ajoutons deux idées qui, peut-être, ne sont pas suffisamment développées dans le rapport. Tout d’abord, il est nécessaire d’inclure la gouvernance économique du monde et de prévoir des impôts sur les mouvements financiers. Vous savez, Mesdames et Messieurs, que l’activité des banques, le marché des valeurs mobilières, le marché de la dette représentent trois fois plus que les montants générés par l’économie réelle. Voilà une source importante de ressources fiscales dont nous devons tenir compte. Et l’OCDE, Monsieur le Secrétaire général, doit mettre en place des méthodes, créer l’ingénierie nécessaire afin que cela soit possible, afin que l’on en tienne compte. Il faut imposer une taxe fiscale sur les mouvements financiers afin de mettre de l’ordre dans cette économie et dans ces flux disproportionnés. Si l’on ne remet pas un peu d’ordre dans cette économie financiarisée à outrance, nous créerons de nouveaux problèmes, de nouveaux produits dangereux, et de nombreux pays seront encore plus pauvres. C’est une cause pour l’humanité. Il faut gouverner l’économie en tenant compte de cela.

Deuxième point, il est essentiel, à mon sens, que l’OCDE serve d’instrument de mise en place d’un niveau minimum en ce qui concerne les conditions de travail dans le monde. C’est essentiel dans une économie qui permet à tout le monde de produire partout dans le monde. Peut-être peut-on s’inspirer des Nations Unies et faire en sorte que les droits de l’homme soient la base. C’est une cause que le Conseil de l’Europe a toujours défendue. Le Conseil de l’Europe doit le revendiquer et faire en sorte que cela soit traité sur le plan politique au niveau mondial.

M. FRITZ (Allemagne)* – Le rapport de M. Van der Maelen et les remarques de M. Ghiletchi ont montré que l’OCDE se trouve au cœur de l’évolution socio-économique du monde. Le débat est vif, mais il ne saurait en être autrement : l’OCDE ne doit pas annoncer des vérités objectives, elle doit fournir des éléments pour que des discussions s’engagent au niveau international et pour que des mesures soient prises au plan national. On ne peut pas enlever cette responsabilité aux différents gouvernements et parlements.

L’OCDE est montée en puissance depuis vingt ans. Elle est de plus en plus efficace, pour plusieurs raisons : elle a développé de nombreuses compétences, elle ne se limite pas au club des riches au plan mondial, elle a mis au point un réseau et de nouveaux acteurs ont été impliqués dans le dialogue. L’aspect développement intervient aussi, notamment avec le projet PEBS.

L’OCDE est un donc un élément important de la gouvernance mondiale. Elle est capable de fournir des éléments de décision au G20 et au G8.

Cela ne veut pas dire que tous les problèmes sont réglés, mais on a trouvé des points d’ancrage pour asseoir le consensus entre les différents Etats. Cela procure une base de discussion pour trouver des solutions.

La croissance inclusive est un autre élément important. Comment une société peut-elle être pérenne si la moitié d’une génération n’a pas la possibilité de décrocher un emploi ? Il ne s’agit pas, pour ce faire, de s’adresser uniquement aux Etats ; les entreprises ont aussi des responsabilités à assumer. Je pense notamment à la formation continue.

J’espère qu’à l’avenir, les collègues répondront aux invitations de l’Assemblée parlementaire, parce qu’on ne peut pas se limiter à un débat et à un rapport.

M. GÁNDARA CAMOU (Mexique, observateur)*– Au nom de la délégation mexicaine, je souhaite féliciter le rapporteur, M. Van der Maelen, pour son rapport clair et bien orienté, qu’il a présenté avec une grande conviction, ainsi que notre compatriote, M. Gurría.

Nous remercions également l’Assemblée de nous fournir l’occasion de participer à la discussion et au vote du rapport, bien que nous ne soyons qu’observateur au sein du Conseil de l’Europe.

L’un des thèmes principaux est la coopération pour le développement économique. La crise économique engendre un certain nombre de problèmes, tels que le chômage et l’absence de croissance. Les pays abordent ces difficultés avec des mesures différentes d’un Etat à l’autre.

En ce qui concerne le Mexique, le débat sur la réforme fiscale nous fait espérer de pouvoir faire face à un certain nombre de problèmes, tels que l’éducation et la santé. Nous sommes conscients de l’importance de la redistribution des richesses et nous avons mis en place un certain nombre de mesures ayant un impact sur les familles mexicaines.

Les réformes recommandées par l’OCDE nous permettent de trouver de nouvelles formules. Nous tenons particulièrement compte de ces recommandations dans le cadre des réformes structurelles en cours d’examen au sein du Congrès de l’Union.

Le rapport de M. Gurría fait mention de deux grands domaines : l’ « inclusivité » et la croissance – l’indépendance au service de la croissance, la gouvernance au service de la croissance. Grâce à cela, nous allons générer de l’emploi.

Nous sommes face à un certain nombre de défis tels que l’environnement, les paradis fiscaux, le développement économique inclusif, la transparence, l’évasion fiscale, la fraude fiscale. Nous devons tous lutter dans ces domaines.

Je tiens une nouvelle fois à féliciter cette grande Organisation de coopération et de développement économiques dont le Mexique fait partie. Nous savons que l’évaluation qui va être réalisée ici sera profitable au développement du monde et de nos familles.

LE PRÉSIDENT – Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs. Les orateurs inscrits qui, présents dans le débat, n’ont pas pu s’exprimer, peuvent déposer leur intervention dactylographiée au service de la séance, au bureau 1083, pour publication au compte rendu.

Monsieur le Secrétaire général, souhaitez-vous ajouter quelques mots ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’OCDE – Volontiers, Monsieur le Président.

Monsieur Van der Maelen, vous m’avez demandé si la mise en œuvre du projet BEPS mettra un terme au syndrome selon lequel on ne peut imposer les trop gros. Si l’on veut taxer les multinationales, il faut modifier la législation, comme vous l’avez dit. Il ne s’agit pas de passer d’une non-imposition à une double imposition. Personne n’a dit qu’il fallait les taxer doublement, il faut simplement les taxer une fois. Il faut déterminer comment décliner cet impôt. La discussion technique est déjà engagée. Pour aller dans ce sens, il convient de modifier la législation, d’assurer une étroite coordination et il faut une volonté politique. C’est la raison pour laquelle le G20 à un rôle important à jouer.

Concernant l’échange d’informations en général, il est vrai qu’il n’existait aucune norme et qu’il n’y avait pas d’échange en matière fiscale. Ce sont 40 conventions bilatérales qui ont été signées par les pays avant que le G20 ne s’occupe de l’affaire en 2008. Aujourd’hui 1 200 conventions bilatérales ont été signées et l’on échange activement l’information, raison pour laquelle il est possible de migrer vers l’échange automatique. Et c’est la raison pour laquelle nous disposons des BEPS. Nous avons le socle, les pays, l’infrastructure.

Monsieur Ghiletchi, oui, nous voulons améliorer nos conseils de politique générale. C’est la raison d’être des NAEC. Vous avez eu raison d’évoquer les Objectifs du millénaire pour le développement (ODM), qui ont été un grand succès, le plus grand que l’on n’ait jamais obtenu pour réduire la pauvreté. Mais nous ne sommes pas encore au bout du chemin. Nous participons maintenant aux ODM post-2015. Nous parlons donc de développement durable.

Monsieur Kennedy, vous avez dit que nous avions besoin d’équilibre dans cette affaire. Vous avez raison. Mais il n’y a pas que la consolidation budgétaire. Certes, il faut parer au déficit, mais nombre de pays ont besoin de se consolider au plan budgétaire, faute de quoi le marché n’aurait plus confiance et il n’y aurait plus de possibilités de financement.

Même avec des budgets serrés, on a toujours la possibilité de s’occuper du social. Il faut laisser un espace à la santé, à l’éducation, aux infrastructures, aux jeunes, aux politiques d’activation pour que les gens soient remis au travail. Il y a toujours un espace, de la marge, même en période de consolidation budgétaire.

Je veux féliciter M. Binley, car sa grand-mère est une grande économiste ! Votre propos participe du bon sens : les citoyens doivent comprendre la situation. Elle n’est pas complexe, mais il convient de faire preuve de pédagogie et d’honnêteté. Une fois qu’ils l’auront comprise, ils nous aideront.

M. Hunko a relevé la faiblesse des salaires en Allemagne. L’Allemagne connaît une « success story » sur le plan économique. Toutefois, si elle a réduit le chômage, le salaire minimum n’y existe pas. C’est pourquoi nous engageons la discussion sur ce point. Que vous ayez ou non le salaire minimum au plan formel, il s’agit de définir le différentiel de salaire à réduire et d’éviter tout effet pervers, car le marché du travail dans les pays avancés est souvent dual. Mon propos vaut pour le Japon, les Etats-Unis, l’Italie, une partie de la main-d’œuvre ayant toutes les garanties voulues – parfois même trop – alors que l’autre partie n’en a aucune. C’est ainsi que les jeunes restent au bord de la route. Ils frappent à la porte mais ne peuvent pas entrer, car on ne la leur ouvre pas.

M. Sasi a parlé des pays nordiques, qui connaissent les taux d’imposition les plus élevés d’Europe et du monde. Pourtant les gens sont très satisfaits parce qu’ils ont l’impression que ce qu’ils obtiennent en retour est approprié. C’est la meilleure application qui soit du contrat social et c’est la raison pour laquelle ils sont disposés à contribuer.

L’Europe souffre du phénomène du crocodile, comme le disent les Allemands, relatif au coût unitaire de la main-d’œuvre en France, en Italie, en Grèce, au Portugal, en Irlande et en Allemagne. En raison de la monnaie unique, le différentiel de compétitivité a progressé de 30 à 40 % en douze ans. Rien ne se produisant par hasard dans ce bas monde, c’était délibéré et il faut maintenant y porter remède. C’est ainsi que l’Allemagne augmente son coût unitaire de la main-d’œuvre pendant que les autres pays font le contraire. Comme vous le voyez, la convergence est requise.

La question des compétences n’est pas directement liée au chômage tant il est vrai que des milliers d’entreprises regrettent de ne pas trouver d’ouvriers qualifiés ni les compétences nécessaires à leur développement. Le phénomène traduit bien, de fait, une erreur de choix. On relève une asymétrie entre les compétences universitaires, les formations professionnelles et la réalité des besoins du marché. C’est pourquoi nous avons engagé une initiative forte sur le volet des compétences.

La retraite, la santé, l’éducation, toutes ces questions dépassent celle du PIB. L’équité doit être au rendez-vous. Or nous assistons à une montée des inégalités qui enraye toute possibilité de revenir à l’égalité. L’aspect social doit donc rester au cœur de nos préoccupations. L’hystérèse, ce mot grec qui ressemble au nom d’une maladie, est synonyme de chômage de longue durée. Pervers et négatif, il provoque l’érosion du lien social. Les gens décrochent du marché du travail, avec le risque de ne jamais plus y revenir, et nous, nous risquons ainsi de perdre une génération entière.

La dette est un problème central. Félicitations à l’Espagne qui la consolide tout en opérant de nombreuses réformes structurelles sur le marché du travail pour enfin sortir de l’impasse. L’Espagne, qui enregistrait un déficit en compte courant de 10 %, atteint aujourd’hui quasiment l’équilibre. C’est dire que des mutations sont en cours, pas uniquement en Espagne, d’ailleurs. Pour résumer : consolidation, oui, mais accompagnée de mutations structurelles.

M. Recordon a évoqué l’environnement, la croissance. En matière environnementale, il faut changer de cap. Prenons garde à l’augmentation de la température, qui est actuellement de plus de deux degrés.

J’en viens à l’intervention de la parlementaire japonaise. Je suis d’accord avec les Abenomics et les « trois flèches » de la stratégie du Japon. Il est nécessaire d’augmenter la TVA qui passera, nous l’espérons, de 8 à 10 %.

Nous ne sommes pas un club de riches. D’ailleurs, c’est un Mexicain qui, en ma personne, dirige l’OCDE. Sont à bord le Chili et la Colombie. Le Costa Rica adhérera et les négociations avec la Fédération de Russie se poursuivent. Nous ne sommes pas un centre de réflexion, nous sommes des personnes actives, nous agissons et commandons des politiques.

L’aide publique au développement baisse en termes réels alors qu’elle devrait progresser. Mesdames, Messieurs les parlementaires, sollicitez donc vos gouvernements et dites-leur que les pauvres continuent de souffrir et qu’ils ont besoin de votre soutien.

S’agissant du Mexique, la question de la coopération en matière de développement est essentielle. Je félicite le Gouvernement et le Parlement mexicains pour l’ensemble des réformes qu’ils ont engagées. Le gouvernement, le parlement, la société s’unissent et le succès est au bout du chemin !

LE PRÉSIDENT – Merci, Monsieur le Secrétaire général, pour votre contribution intéressante à notre débat.

Le président de la commission saisie au fond et le rapporteur renonçant à leur temps de parole, la discussion générale est close.

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution (Doc. 13301) sur lequel 9 amendements ont été déposés.

Je vous rappelle que, conformément au règlement relatif aux débats élargis de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’OCDE, le vote a lieu à main levée afin de permettre aux délégations des pays non européens, membres de l’OCDE mais qui n’appartiennent pas au Conseil de l’Europe, de participer au scrutin.

Le président de la commission des questions politiques demande l’application de l’article 33-11 du Règlement sur les amendements 1, 2, 4 et 5, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien cela, Monsieur le président ?

M. VON SYDOW (Suède), président de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – J’en donne lecture.

L’amendement 1, déposé par MM. Van der Maelen, M. Jensen, Mahoux, Bremer, Mme Marjanović, M. Schennach, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 3, à remplacer les mots : « Bien que des signes de reprise se manifestent enfin, plus particulièrement aux Etats-Unis et au Japon, les perspectives de croissance demeurent faibles dans la plupart des pays de l’OCDE » par les mots suivants : « Il y a enfin des signes de reprise, notamment en Amérique du Nord, au Japon et au Royaume-Uni, tandis que la zone euro dans son ensemble n’est plus en récession. Une reprise durable n’est cependant pas encore solidement installée. »

L’amendement 2, déposé par la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 11, à ajouter la phrase suivante : « L’Assemblée élargie invite par ailleurs l’OCDE à utiliser cette initiative pour traiter les risques que posent les activités bancaires occultes et proposer des mesures permettant d’améliorer la surveillance et la réglementation, comme l’a recommandé le Sommet du G20 tenu à Saint-Pétersbourg les 5 et 6 septembre 2013. »

L’amendement 4, déposé par la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 17, après les mots « Pour garantir une taxation équitable des profits mondiaux », à insérer les mots suivants : « et une meilleure conformité avec la réglementation fiscale ».

L’amendement 5, déposé par la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 18, à ajouter la phrase suivante : « L’Assemblée élargie considère que l’OCDE devrait renforcer sa définition des paradis fiscaux et préciser quels types de régimes fiscaux peuvent être classés parmi les pratiques fiscales dommageables. »

En l’absence d’objections, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

LE PRÉSIDENT – Nous en venons à la discussion des autres amendements. Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement 6, déposé par MM. Rivard, Hawn, Shipley, Mitchell, Binley, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 10, à supprimer les mots « Tout en relevant que » et les mots «, l’Assemblée élargie soutient aussi l’appel du Comité consultatif des syndicats auprès de l’OCDE (TUAC) pour lequel “financer la rigueur budgétaire par des coupes dans les services publics, dans les régimes de sécurité sociale et des retraites ne ferait que prolonger la crise de l’emploi et le risque d’une crise sociale aggravéeˮ ».

M. RIVARD (Canada, observateur)* – Les pays doivent disposer des ressources nécessaires pour réaliser des investissements ciblés vers la création d’emplois et la croissance.

M. VAN DER MAELEN (Belgique), rapporteur* – Je l’ai dit ce matin en commission : le paragraphe 10 est particulièrement équilibré. Certains d’entre vous estiment qu’il faut une consolidation fiscale, d’autres s’y opposent au motif que celle-ci serait néfaste au modèle social de nos pays. À mon sens, ces deux points de vue sont erronés. Dans le texte, nous disons que la plupart des pays ont besoin d’une consolidation fiscale, mais qu’il convient d’être attentif à son impact social. Je demande donc à l’Assemblée élargie de voter pour ce texte équilibré sans adopter l’une ou l’autre des positions radicales que j’ai évoquées.

M. VON SYDOW (Suède), président de la commission* – L’avis de la commission est défavorable.

L’amendement 6 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 3 est retiré par M. Ghiletchi, rapporteur pour avis.

L’amendement 7, déposé par MM. Rivard, Hawn, Shipley, D. Davies, Mitchell, Binley, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 17.2, à supprimer les mots «, ce qui constituerait un premier pas sur la voie d’un éventuel accord multilatéral relatif à un système de taxation uniforme des sociétés transnationales ».

M. RIVARD (Canada, observateur)* – Ni le G8, ni le G20, ni l’OCDE n’ont soutenu ce projet. Les bénéfices d’une éventuelle imposition uniforme mentionnés au paragraphe 59 ne nous paraissent pas attestés. Je vous renvoie plutôt au paragraphe qui traite des rapports pays par pays et qui tient compte du plan d’action de l’OCDE.

M. VAN DER MAELEN (Belgique), rapporteur* – On a constaté au cours de ce débat une divergence entre la délégation canadienne et moi-même, rapporteur. À mes yeux, le système actuel ne peut plus fonctionner. Nous pourrions en discuter pendant des heures. Je suggère, comme l’un de nos collègues, d’attendre environ deux ans puis de procéder à une évaluation afin de voir si nous parvenons à mettre un terme à ce petit jeu de cache-cache qui pourrait s’appeler « Impose-moi si tu peux ! ». J’invite l’Assemblée à voter contre cet amendement.

M. VON SYDOW (Suède), président de la commission* – La commission est défavorable à l’amendement.

L’amendement 7 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 8, déposé par MM. Rivard, Hawn, Shipley, Mitchell, D. Davies, Binley, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 17.3 par le paragraphe suivant : « à inviter toutes les juridictions à s’engager à mettre en œuvre la norme mondiale sur l’échange automatique de renseignements et l’Assemblée élargie espère que le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales créera bientôt un mécanisme permettant de suivre et d’examiner la mise en œuvre de cette norme ».

M. RIVARD (Canada, observateur)* – Ni le G8, ni le G20, ni l’OCDE n’ont adopté cette approche « Big Bang ».

M. VAN DER MAELEN (Belgique), rapporteur* – Nos collègues canadiens oublient que la transparence quant aux bénéficiaires effectifs est nécessaire car essentielle à l’équité fiscale. C’est l’une des grandes avancées opérées par l’OCDE, le G8, le G20. Je souhaite donc que l’Assemblée élargie vote contre cet amendement.

M. VON SYDOW (Suède), président de la commission* – L’avis de la commission est défavorable.

L’amendement 8 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 9, déposé par MM. Rivard, Hawn, Shipley, Mitchell, D. Davies, Binley, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 18, à remplacer les mots « l’évasion fiscale agressive, phénomène répandu que les paradis fiscaux continuent d’encourager » par les mots suivants : « le phénomène répandu d’évasion fiscale agressive ».

M. RIVARD (Canada, observateur)* – La notion de « paradis fiscal » n’a pas été définie et donne lieu à un grand nombre d’interprétations. En particulier, il n’est pas nécessairement opportun d’identifier évasion fiscale et paradis fiscal.

M. VAN DER MAELEN (Belgique), rapporteur* – La commission a voté contre cet amendement, à juste titre. Personne ici n’aura manqué de remarquer ce qui s’est passé au début de l’année, lorsque l’on a découvert les nombreuses fuites extraterritoriales, organisées par les paradis fiscaux. Je ne comprends pas pourquoi nos collègues canadiens veulent modifier le projet de résolution sur ce point.

M. VON SYDOW (Suède), président de la commission* – La commission est défavorable à l’amendement.

L’amendement 9 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13301, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté à l’unanimité.

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, je vous rappelle que le scrutin pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie est en cours. Il sera clos à 13 heures ; il reprendra cet après-midi à 15 h 30 et sera clos à 17 heures.

J’invite ceux d’entre vous qui n’ont pas encore voté à le faire.

M. Mignon, Président de l’Assemblée, reprend place au fauteuil présidentiel.

3. Discours de M. Narychkine,
Président de la Douma d’Etat de la Fédération de Russie

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle maintenant le discours de M. Narychkine, président de la Douma d’Etat de la Fédération de Russie.

Monsieur le président, c’est un grand honneur de vous recevoir à Strasbourg. La Fédération de Russie est un acteur incontournable sur la scène politique européenne et internationale. Les discussions sur le conflit syrien en ont été l’illustration parfaite, la communauté internationale a clairement besoin du soutien de la Fédération de Russie pour trouver des solutions face aux problèmes les plus pressants de l’actualité politique internationale.

Dans cette perspective, votre venue à Strasbourg revêt une importance toute particulière pour notre Assemblée au moment où nous allons examiner, selon la procédure d’urgence, la situation en Syrie. Le débat aura lieu jeudi matin. Il en va de même pour la recherche de nouvelles synergies dans les actions du Conseil de l’Europe et de l’Union Européenne dans le domaine de la protection des droits de l’homme. Nous sommes tous très impatients d’entendre votre point de vue sur ces questions.

Monsieur le président, la Fédération de Russie est membre de notre Organisation depuis dix-sept ans. Je crois sincèrement que le bilan de la participation de votre pays aux activités de notre Organisation est positif. Nous ne sommes certes pas d’accord sur tous les points et certaines lois dans votre pays suscitent des interrogations au regard du respect des standards qui sont les nôtres. En même temps, dans de nombreux dossiers, l’expérience de la Russie mériterait d’être partagée avec tous les autres Etats membres. Je citerai, par exemple, le fédéralisme, la protection des droits des minorités internationales ou le dialogue interculturel.

Notre Assemblée est un lieu de débat où les parlementaires expriment leurs idées et leurs opinions librement. Je suis donc très heureux que nous poursuivions ce dialogue aujourd’hui au plus haut niveau. J’espère sincèrement que nous aurons l’occasion de rapprocher nos positions et de renforcer notre coopération, dans un climat de franchise, de respect, d’amitié et d’ouverture.

Monsieur le président, je vous donne maintenant la parole avec grand plaisir, afin que vous puissiez vous adresser à notre Assemblée parlementaire.

M. NARYCHKINE, président de la Douma d’Etat de la Fédération de Russie – Je tiens à exprimer ma gratitude à M. Jean-Claude Mignon, Président de l’Assemblée parlementaire, pour son invitation à m’adresser devant vous, chers membres de l’Assemblée parlementaire.

J’ai tenu à commencer mon intervention en français, afin de souligner mon respect le plus profond pour la France, pour sa grande culture et son histoire, pour les habitants de cette ville et l’organisation strasbourgeoise.

(Poursuivant en russe) Il y a un an, ma visite ici n’a pu avoir lieu. Toutefois, les raisons qui m’ont obligé à reporter mon voyage à l’époque sont devenues les circonstances de notre rencontre de ce jour. Des tentatives visent aujourd’hui à saper les travaux de l’Assemblée et la détourner de décisions touchant aux questions d’actualité et de fond liées à la nécessité de réformer le système de suivi parlementaire. C’est un sujet important, sur lequel je reviendrai par la suite, mais ma rencontre avec MM. Jagland et Mignon, à l’égard desquels j’ai un profond respect, a accru ma conviction que le niveau de responsabilité qui incombe aux démocraties parlementaires d’Europe ne cesse d’augmenter pour atteindre des hauteurs sans précédent.

Nous nous rencontrons à un moment dramatique et, même si les événements en Syrie se passent loin de l’Europe, leur déroulement et ce qui les a précédés témoignent du fait que les menaces actuelles portées à la paix sont liées directement à l’ignorance du droit et des libertés fondamentales. Dans un mauvais scénario, les conséquences pourraient être considérables pour tous les pays. C’est la raison pour laquelle le plus dangereux dans une telle situation est de s’en détourner, de garder le silence et de faire preuve d’indifférence. Les pays d’Europe savent à quoi conduit l’indifférence. Lorsque l’Europe a glissé dans la première guerre mondiale, les pertes en vies humaines se sont comptées par millions et, lors de la seconde, par dizaines de millions. Nous le savons donc bien, et si la position de certains pays d’Europe a été ferme et clairement exprimée – je pense ici à la décision du Parlement du Royaume-Uni qui a interdit à son gouvernement de participer aux frappes contre la Syrie –, l’initiative du Président de la Russie pour régler la situation en Syrie a été largement appuyée, et a commencé à s’incarner puisque vous connaissez tous le résultat du Conseil de Sécurité et la décision prise il y a quelques jours.

L’attachement multiséculaire de l’Europe aux valeurs humanitaires sur lesquelles s’ancrent son droit et ses principes de développement actuels joue un rôle important. Sans doute vous demandez-vous pour quelle raison j’en parle maintenant. C’est tout simplement parce que les événements de la seconde guerre mondiale commencent à tomber dans l’oubli. On essaie même de revenir sur ses enseignements en déformant les causes et l’essence même de cette tragédie qui fut la plus effroyable du XXe siècle. A cette époque, les nazis qui se croyaient exceptionnels et jouissaient de la suprématie ont cyniquement donné l’ordre de l’extermination totale d’une série de nationalités dans toute l’Europe.

L’indifférence a permis à cette idéologie de se propager. L’indifférence est parfois trompeuse, voire attirante, et comme l’a dit Elie Wiesel, lauréat du Prix Nobel de la paix, c’est précisément cette indifférence aux souffrances de l’homme qui le déshumanise.

L’an prochain, nous célèbrerons le 100e anniversaire de la première guerre mondiale, qui a eu des conséquences si graves pour toute l’Europe et qui a conduit mon pays au chaos, à la dissolution du premier parlement démocratique, aux événements de la Révolution de 1917 et à la guerre civile. Ce bouleversement qui ne s’est heurté à aucune résistance a pris sa revanche deux décennies plus tard, conduisant à un embrasement mondial qui s’est traduit en dizaines de millions de victimes. Les crimes du nazisme contre l’Humanité ont été condamnés à Nuremberg et les décisions du tribunal international revêtent un caractère indéfectible.

Certains hommes politiques contemporains ont tendance à oublier tout cela, mais ces deux guerres mondiales se sont déclenchées en raison de la complaisance et du silence qui ont régné à l’époque, menant à l’élimination de vies et de libertés dans de nombreux pays. En tant que président de la société historique de Russie et à la tête du comité national d’organisation des préparatifs pour le centenaire de la première guerre mondiale, j’estime que ces leçons ne sauraient tomber dans les oubliettes de l’Histoire. La défense de la vérité historique doit être notre tâche à tous, autant dans le cadre des programmes nationaux d’éducation qu’en matière de politique européenne de la jeunesse.

A cet égard, je propose que les documents du procès de Nuremberg soient présentés non seulement dans les universités, mais aussi dans les écoles. Ils doivent être accessibles dans toutes les langues européennes et présentés en ligne sur les sites du Conseil de l’Europe, de l’Onu, de l’OSCE et d’autres organisations internationales.

Mesdames et Messieurs, l’Europe est aujourd’hui au centre des regards de la communauté internationale, en particulier ses processus sociaux, économiques et politiques, mais aussi ses débats dans les parlements nationaux. C’est en Europe que de grandes découvertes technologiques ont eu lieu et que sont nées les grandes doctrines juridiques, sociales et politiques à l’origine de la liberté et de la dignité de l’homme d’aujourd’hui.

Sans morale, il ne saurait exister de vérité historique, et nous n’avons pas le droit de fermer les yeux sur des comportements qui ne s’inscrivent pas dans les normes juridiques et morales qui sont les nôtres. Au mois de septembre, pour la première fois, les parlementaires russes ont demandé à rencontrer leurs homologues américains pour examiner avec eux la situation en Syrie. Leur demande a été rejetée, les Etats-Unis préférant, vous le savez bien, prendre seuls les décisions.

Je suis pourtant convaincu que, dans notre monde actuel, le rôle de la diplomatie parlementaire est essentiel. La démocratie représentative née il y a mille ans en Europe a fait ses preuves. Elle est indispensable pour conserver l’architecture de la sécurité mondiale. Dans la seconde moitié du XXe siècle, le sentiment de responsabilité générale et d’unité européenne s’est élevé à des hauteurs sans précédent. Il a abouti à la création de l’ONU en 1945 et, quatre ans plus tard, à celle du Conseil de l’Europe et de son Assemblée parlementaire.

Aujourd’hui, nous sommes de nouveau confrontés à des questions cruciales pour la paix du continent. Elles font l’objet d’avis divergents au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. La Fédération de Russie considère ces débats comme un indicateur déterminant. Ils sont essentiels pour aboutir à des solutions communes pour l’ensemble des 800 millions d’Européens.

La Russie fait l’objet de critiques, c’est inévitable. Tous les parlements nationaux connaissent de vifs débats. Toutefois, le sentiment d’une certaine partialité peut saper les objectifs les plus nobles et les efforts les plus constructifs. Ce sentiment s’explique par les nombreuses tentatives d’imposer à la Russie et à d’autres pays de nouvelles obligations.

Le moment est venu aujourd’hui de passer d’un suivi par pays à un suivi thématique. La pratique actuelle, en effet, à l’égard des nouvelles démocraties notamment, est obsolète selon nous. De fait, elle conduit à une division au sein de l’Assemblée parlementaire entre les pays considérés comme « purs » sur le plan démocratique et les autres. Certains pays sont soumis à toujours plus d’obligations alors que d’autres ne le sont jamais. Le suivi des obligations d’un pays est justifié dans les premières étapes de sa participation au Conseil de l’Europe, lorsqu’il débute sur la voie démocratique. Par la suite, c’est tout à fait anachronique et injuste. Je ne craindrais pas de dire, même, qu’il s’agit alors d’une véritable discrimination politique. La procédure de suivi doit donc être profondément réformée. Cette position est partagée par plusieurs délégations du Conseil de l’Europe.

Le Conseil de l’Europe est confronté à bien d’autres problèmes objectifs, qui méritent d’être examinés par les parlementaires européens dans l’intérêt des prochaines générations. L’état du droit et de la législation au niveau mondial, leur évolution actuelle et le rôle des parlementaires, constituent l’un de ces sujets importants.

Il est important, tout d’abord, d’éviter que des manifestations illégales perturbent le débat politique et que les procédures juridiques soient politisées. Il faut garantir la pureté du droit. C’est la tâche première du législateur.

Pour que les normes internationales du droit naissent, la volonté de tous est nécessaire. Malheureusement, les efforts de quelques-uns suffisent à les détruire. Le Conseil de l’Europe est doté d’une base juridique unique et doit faire entendre sa voix. La société doit pouvoir suivre l’ensemble des procédures juridiques et participer au dialogue direct avec les législateurs à toutes les étapes des innovations juridiques. C’est précisément l’absence de transparence qui conduit à saper la légitimité des décisions des gouvernements et des tribunaux.

Ce n’est pas la première fois que, dans l’Histoire, le caractère absolu des libertés individuelles est mis en avant, sans obligation juridique quelconque. On le voit à propos d’internet. Pourtant, Voltaire l’affirmait déjà : « La liberté consiste à ne dépendre que des lois. »

Autre sujet d’actualité, les nouveaux modes de communication ont une incidence importante sur l’ordre du jour politique. A côté des parlements et des institutions démocratiques traditionnelles, d’autres forces sont à l’œuvre, qui ont une incidence sur les opinions publiques, au-delà des frontières nationales. Des groupes d’intérêt et des plateformes de discussion se sont créés. Certains estiment que les réseaux sociaux, qui expriment la voix du peuple, entraîneront la chute du parlementarisme classique. Leur influence est très grande, en effet, mais je suis persuadé que le rôle et la responsabilité des parlementaires ne fera que croître à l’avenir, jusqu’à ce qu’apparaisse une nouvelle démocratie électronique, avec ses procédures propres, dotée d’une base juridique irréprochable et d’un système de contrôle efficace, garantissant les citoyens contre toute erreur.

Les activités citoyennes ne constituent pas des menaces, mais au contraire des possibilités nouvelles pour la démocratie. En effet, internet est utilisé par les jeunes et permet d’entrer en contact direct avec les responsables politiques, sans parler de la possibilité qu’il offre de réagir rapidement aux idées nouvelles.

La nécessité de se concentrer sur un ordre du jour réellement d’actualité est un autre sujet important pour le Conseil de l’Europe. Ainsi, l’absence de citoyenneté de masse est considérée par beaucoup comme ne posant pas de problèmes pour la démocratie. Or qu’est-ce d’autre qu’un phénomène contribuant à saper le sens même de la démocratie contemporaine en nous faisant retourner des décennies, voire des centaines d’années en arrière ?

Je n’ai mentionné qu’un des problèmes les plus criants de l’ère contemporaine, mais il y en a d’autres : le terrorisme, les conflits internationaux, le trafic des stupéfiants, la criminalité organisée, le marché noir des organes humains et, je le répète, le néonazisme, qui détruit ouvertement ou de façon clandestine la mémoire historique.

Autre sujet d’actualité, la qualité insuffisante des interactions entre parlements. Le moment est venu d’en parler à cette tribune, qui est une plateforme unique pour résoudre ensemble les problèmes internationaux. L’Assemblée parlementaire peut d’ailleurs faire figure d’exemple pour d’autres organisations intégrées. De fait, nous nous appuyons sur l’expérience européenne – un modèle que nous suivons de près – pour traiter de nombreuses questions d’intégration économique à l’échelle eurasienne.

En matière de contacts interparlementaires, nous avons non seulement besoin de nouveaux formats, mais aussi d’un contenu stratégique. Par exemple, les trois thèmes que sont la prééminence du droit, les droits de l’homme et le développement de la démocratie sont liés à de nombreuses autres priorités de développement. Mais lorsque, sous prétexte d’aborder de prétendus conflits liés à l’actualité, on finit par oublier le développement de la culture, de l’éducation ou de la santé, on en vient à réduire le champ d’activité de l’Assemblée parlementaire et on vide de leur sens des orientations pourtant importantes pour nos citoyens.

De telles questions doivent pourtant être en permanence au centre de l’attention. C’est pourquoi j’aimerais remercier les collègues de nombreux pays qui ont participé, l’an dernier à Moscou, à un forum parlementaire consacré aux questions de développement, au parlementarisme, aux menaces pesant sur la démocratie et à la législation. À la mi-novembre, un deuxième forum international se tiendra auquel je vous invite très sincèrement.

Cette année est importante pour la Russie car nous fêterons, en décembre, le vingtième anniversaire de la Constitution de notre pays et des premières élections législatives. Pour nous, il s’agit vraiment d’un jalon historique, d’un tournant. L’anniversaire de l’Assemblée fédérale de la Russie est l’occasion, pour nous, d’examiner plus avant les problèmes relatifs au parlementarisme contemporain.

Rappelons que la Russie a été membre du Conseil de l’Europe pendant la plus grande partie de ces vingt années. C’est également cette période qui a vu l’élaboration d’une nouvelle législation, notre adhésion à des dizaines de conventions du Conseil de l’Europe, l’obtention par la Russie du droit à s’adresser aux tribunaux européens, et beaucoup d’autres choses encore. L’entrée au Conseil de l’Europe de tout un continent constitue d’ailleurs un événement historique, et pas seulement pour nous, citoyens russes.

J’appuie les efforts déployés par le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, M. Jagland, et son équipe en vue de réformer l’institution. J’estime que tous les champs d’activité de l’organisation de Strasbourg doivent être passés en revue de la même façon, dans la mesure où chacun de ces champs d’activité sert le renforcement des droits de l’homme et de la démocratie pluraliste. La Russie continuera de s’appuyer, dans les affaires européennes, sur le principe : The Council of Europe first.

J’aimerais maintenant, mes chers collègues, aborder brièvement ce qui, dans la politique russe contemporaine, inquiète le plus nos partenaires étrangers.

Un premier thème est particulièrement populaire en dehors de la Russie, celui de l’interdiction des « organisations non commerciales » et de ce que l’on appelle les « agents de l’étranger ». Notre objectif était de rendre transparent le financement de leurs activités, et c’est ce que nous avons fait. Cela étant, l’application de la loi est – heureusement –, étudiée de près, et il est possible d’y apporter des corrections en fonction des résultats obtenus. L’ombudsman russe, M. Vladimir Loukine, a par ailleurs déposé une plainte contre cette loi. Or notre parlement montre toujours un grand respect pour les positions du tribunal constitutionnel.

Quant à l’expression « agent de l’étranger » qui est utilisée dans certains pays, je me dois, sans entrer dans une discussion d’ordre sémantique, de souligner son caractère péjoratif.

Autre sujet de préoccupation, la législation russe applicable aux meetings et réunions. Nous avons fait ce qu’il fallait pour que les manifestations, réunions et piquets de grève puissent avoir lieu dans des conditions adéquates. La législation adoptée dans ce domaine n’a pas eu d’incidence sur le militantisme citoyen, mais j’espère qu’elle en a eu sur les provocateurs et les voyous.

S’agissant des sites internet, je dirai sans ambages qu’ils ne font l’objet d’aucune liste noire dans notre pays. Internet est et demeurera un territoire de liberté, dont l’accès est garanti à tous, y compris aux enfants. Cela étant, si les Etats disposent de services secrets capables de bloquer les menaces à la sécurité que représentent par exemple les terroristes, les parents, eux ne disposent d’aucun moyen de cet ordre. Comment, dès lors, protéger les enfants contre la pornographie ou la propagande en faveur des stupéfiants ou du suicide ? Nous estimons, comme beaucoup d’autres pays, qu’il s’agit là d’une responsabilité de l’Etat.

Des normes ouvertes et compréhensibles, conformes aux valeurs européennes, doivent s’appliquer aux comportements sur internet. On ne saurait déclarer la liberté d’accès au réseau sans s’appuyer sur une loi permettant de contrôler les communications électroniques tout en garantissant la liberté de penser. Les mécanismes juridiques peuvent faire l’objet de perfectionnements, contrairement à des technologies qui s’exerceraient sans le moindre contrôle social.

On a beaucoup parlé de l’affaire Snowden dans le monde ; il me semble que la décision prise à son sujet par la Russie est tout à fait justifiée. En effet, s’il avait été remis aux autorités américaines, il n’aurait peut-être pas été traité correctement sur le plan juridique. On ne saurait trouver de fondement moral à son expulsion : cet homme a en effet informé le monde entier d’une violation totale des droits de l’homme exercée à l’encontre de centaines de milliers de personnes.

Une autre loi faisant l’objet d’attaques à l’étranger est celle qui réprime la propagande favorable aux comportements sexuels non traditionnels à l’adresse des mineurs. Mais le contenu de cette loi et les motifs de son adoption ont été déformés. Nous ne posons aucune limite aux comportements sexuels : chacun construit sa vie en toute liberté et conformément à ses préférences. Toutefois, il ne faut rien imposer aux enfants et encore moins faire de la propagande auprès d’eux.

J’en viens pour finir à la loi instituant une responsabilité pénale pour les offenses aux sentiments religieux. En Russie on n’a pas oublié les poursuites et les chasses contre les personnes à cause de leur foi ou de leurs convictions religieuses, à l’époque soviétique. Beaucoup de citoyens attendent d’un Etat démocratique non seulement la reconnaissance mais la défense réelle de leurs convictions.

Est-ce que l’égalité devant la loi n’est pas une valeur paneuropéenne ? Si les habitants d’autres pays ne sont pas croyants, cela ne les indigne donc pas si on profane des lieux de culte, des droits et valeurs ? J’estime inadmissible de se battre pour les droits de certains, en ignorant ceux des autres. Même si les premiers sont très actifs et les seconds silencieux. Dans un Etat de droit, dans une société civilisée, cela ne peut se passer ainsi.

Nous estimons que l’Assemblée parlementaire a une grande influence dans le dialogue interculturel et le domaine religieux.

Je n’ai pu évoquer toutes les questions sur les résolutions. Mes collègues de la Douma de la Fédération de Russie ont avancé ici des arguments à maintes reprises.

Je veux être entendu non seulement par vous, membres de l’Assemblée parlementaire, que j’estime si profondément, mais aussi par les citoyens des pays européens qui sont moins familiarisés avec la législation. Mes paroles simples et directes leur seront peut-être plus compréhensibles pour les convaincre.

Entre le noir et le blanc, se trouve toute la palette du peintre. Mais le noir restera toujours noir et le blanc toujours blanc. C’est comme le bien et le mal. Les gens savent toujours ce qui vient en premier. Pour nous élus de nos peuples, les valeurs morales ne peuvent être abstraites, distinctes du droit. Comme porte-parole du Parlement russe, je ne cesserai de le répéter.

Je parle avec mon cœur et avec sincérité. Aujourd’hui nous avons tous la responsabilité du développement futur. Pour les peuples d’Europe, il existe beaucoup plus d’éléments communs que d’éléments nous séparant. Les idéaux humanistes et européens sont notre plate-forme commune. Le conflit conduit à la défaite de tous. Ce n’est pas notre voie.

Je vous remercie de votre attention et je vous invite tous en Russie.

LE PRÉSIDENT – Nous en arrivons aux questions. Mes chers collègues, je vous rappelle que vous disposez de trente secondes pour poser une question. Il ne s’agit pas de faire une déclaration de politique générale.

M. AGRAMUNT (Espagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Monsieur Narychkine, les pays voisins de l’Est de l’Europe dont la République de Moldova, la Géorgie, l’Arménie, l’Ukraine, l’Azerbaïdjan etc. qui participeront au prochain sommet de l’Alliance de l’Est en novembre à Vilnius ont dénoncé différentes pressions de la Fédération de Russie pour qu’il n’y ait pas plus d’intégration dans la société européenne. Il y a également l’occupation de territoires en Géorgie et la situation de l’Arménie. Que pouvez-vous déclarer sur ces points ?

Concernant l’accord pour l’abolition des armes chimiques en Syrie, allons-nous arriver à la paix entre les parties au conflit ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ETAT* – Vous avez en réalité posé deux questions : les relations de la Russie avec les pays de la CEI et le conflit en Syrie.

La Russie est importante politiquement et économiquement. Elle coopère avec les pays de la CEI, y compris avec l’Ukraine. La Russie est intéressée par un espace plus large pour l’union douanière, avec l’Ukraine et d’autres pays.

Les pays que vous avez cités sont souverains. Ce sont leurs peuples qui doivent dire quoi faire à leurs autorités. La Russie n’exerce aucune pression. Nous présentons à nos partenaires les avantages qu’ils pourraient obtenir en adhérant à l’union douanière, à l’espace économique unique. Nous indiquons les conséquences s’ils s’associaient à l’Europe. Mais tous ces pays sont démocratiques et souverains.

Quel que soit l’accord signé par l’Ukraine, l’adhésion qu’elle choisit, nos frères de sang et de foi continueront de vivre et de souffrir dans ce pays.

Notre position sur la Syrie est connue. Depuis le début, la Russie a défendu la voie pacifique du règlement du conflit en Syrie. Nous ne voulons pas que l’on frappe avec des bombes un pays souverain. Le potentiel de règlement pacifique est confirmé par l’initiative de la Russie, de son Président notamment au sujet des armes chimiques syriennes. Elles seront soumises au contrôle des organisations qui s’en occupent, et cela commence à se faire. On nous a reproché d’avoir, par trois fois, bloqué l’adoption, aux Nations Unies, d’une résolution qui autoriserait une action militaire et des frappes en Syrie. Nous ne pouvions pas être d’accord, et nous ne pouvons pas rester silencieux, car nous ne pouvons pas rester silencieux lorsqu’une injustice est commise ou lorsqu’un faible est l’objet d’une menace d’agression.

A cet égard, je rappellerai les paroles d’un humaniste allemand, d’un écrivain, Martin Niemöller. Il écrit à peu près ceci dans un poème : lorsque les nazis sont venus poursuivre les communistes, je me suis tu, parce que je ne suis pas communiste. Après, ils ont commencé à poursuivre les sociaux-démocrates et, là aussi, je me suis tu, parce que je ne suis pas social-démocrate. Puis, ensuite, ils ont poursuivi les militants syndicaux. Là aussi, je me suis tu, parce que je n’étais pas syndicaliste. Ensuite, ils ont poursuivi les Juifs ; je me suis tu, parce que je n’étais pas juif. Ensuite, ils m’ont poursuivi, moi. Alors, là, il n’y avait plus personne qui puisse protester.

Je vous remercie de votre excellente question.

M. M. JENSEN (Danemark), porte-parole du Groupe socialiste* – La Russie a adopté une loi sur la propagande. Elle a été condamnée par le monde. On a prétendu que cette loi visait à protéger les enfants, mais la Commission de Venise a rejeté cette argumentation. Citant différentes institutions qui s’occupent des droits de l’homme, on a conclu, au fond, que l’expression d’une orientation sexuelle particulière n’a pas forcément d’incidence sur les mineurs.

Monsieur le président, quels éléments avez-vous utilisés pour adopter cette loi qui viole les obligations internationales de la Russie en matière de droits de l’homme ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ETAT – Merci beaucoup de votre question, merci de vous intéresser à ce thème. J’y ai répondu partiellement dans mon intervention mais, bien sûr, c’est avec plaisir que je complèterai ce que j’ai déjà dit.

En fait, l’objectif de cette loi se lit dans son titre : «…en vue de protéger les enfants d’informations de propagande sur le renoncement aux valeurs traditionnelles de la famille ». Oui, la Russie a des convictions, peut-être conservatrices : elle conserve ses valeurs morales, chrétiennes, orthodoxes, y compris les valeurs traditionnelles de la famille. C’est conforme aux documents internationaux fondamentaux. Par exemple, la Convention européenne pour la sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales autorise, en son article 10, une limitation de la propagande ; c’est la première chose. Deuxième chose, la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant proclame la nécessité de tenir compte des valeurs traditionnelles et de la culture de chaque Etat pour la garantie du développement harmonieux de l’enfant. Troisièmement, la Cour européenne a jugé qu’il n’existait pas de concept unique de morale généralement reconnu et approuvé par l’ensemble des Etats.

C’est la raison pour laquelle la loi que nous avons adoptée est conforme à toutes nos obligations internationales et, je le répète, elle correspond aux traditions de notre culture et de nos valeurs morales.

Je puis vous assurer une fois de plus que les personnes qui constituent un groupe à orientation non traditionnelle jouissent des mêmes droits, en Russie, que les citoyens qui pratiquent et appuient les relations sexuelles traditionnelles. Comme je vous l’ai dit dans mon intervention, nous avons beaucoup de ces personnes qui réussissent dans la vie, dans les affaires, dans les branches artistiques, dans n’importe quelle activité. Elles ont le droit de vivre en toute tranquillité ; à Moscou et dans toutes les villes de Russie, il y a beaucoup de clubs gays. Moi, je n’y suis pas allé, mais, enfin, apparemment, ils sont très contents, ils y passent du très bon temps, on me l’a dit. Je suis sérieux, je ne veux pas du tout faire de l’humour. Si vous voulez vous en convaincre, je vous assure : venez à Moscou, je vous y invite. Malheureusement, je ne pourrai pas vous accompagner dans ces clubs, mais je prendrai soin de vous. Venez, et vous serez tout à fait convaincus par mes propos.

Mme BRASSEUR (Luxembourg), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Monsieur le président, au nom de l’ALDE, je tiens à vous remercier d’avoir accepté de prendre la parole ici, à notre tribune, dans la maison de la démocratie, car ce n’est que par le contact et par le dialogue que nous pourrons progresser.

Ma question concerne les ONG et les agents étrangers, problème auquel vous avez fait référence dans votre discours. J’ai entendu que le Président Poutine avait annoncé que cette loi pourrait être changée. Je veux donc vous demander si la Douma l’envisage. Le cas échéant, dans quel sens la loi serait-elle modifiée, et dans quel délai ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ETAT* – Je vous remercie, Madame, de manifester votre intérêt et de suivre de près la façon dont on applique la législation que vous avez mentionnée.

Je puis vous rappeler que cette loi a été adoptée en vue de parvenir à la transparence dans les activités des organisations non commerciales, et cela touche toute notre société : il s’agit de parvenir à la transparence des organes gouvernementaux, municipaux, locaux, et aussi dans les activités des organisations non commerciales. C’est le but de cette loi. Bien sûr, nous en faisons le suivi ; c’est un bon instrument pour comprendre quelles inexactitudes des textes législatifs il faudrait corriger. Oui, effectivement, des débats ont lieu aujourd’hui, ce dont a parlé le Président Poutine, vous l’avez remarqué à fort juste titre. On en parle à la Douma aussi.

Le débat porte sur le fait que, de toute évidence, il faut préciser l’expression « activités politiques » ; c’est tout à fait critique du point de vue de l’application de cette loi. Je n’exclus pas que ces travaux soient effectués. Je n’exclus pas non plus qu’une modification soit opérée, mais, pour cela, il faut un accord des députés. Je le dis cependant : cette loi est tout à fait soutenue par la population de notre pays, les sondages le montrent. Elle s’appuie sur des principes fondamentaux, à savoir que la source du pouvoir, dans un Etat de droit, est le peuple. Nous, en tant que législateurs, nous ne faisons qu’exécuter la volonté du peuple, l’exprimer dans les lois que nous adoptons.

M. ALIGRUDIĆ (Serbie), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Je vous poserai une question brève et générale : qu’a fait la Douma d’Etat, depuis que vous en êtes le président, s’agissant du développement des institutions démocratiques et du respect des principes démocratiques en Russie ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ÉTAT* – Je vous remercie pour cette question qui m’intéresse beaucoup.

Je commencerai par rappeler que nous allons célébrer les 20 ans de notre Constitution et les 20 ans du Parlement russe. Au cours de ces vingt années, l’Etat et la société ont beaucoup progressé sur la voie de la démocratisation.

Nous avons adopté une législation qui réglemente toutes nos activités, y compris celles des institutions démocratiques. Au cours des 18 derniers mois, la Douma a adopté une série de lois fondamentales concernant la réforme du système politique de notre société.

Tout d’abord, nous avons adopté une loi qui a considérablement simplifié la création et l’enregistrement des partis politiques. En très peu de temps, le nombre des partis politiques a ainsi énormément augmenté ; aujourd’hui, il y en a plus de 70.

Aux récentes élections municipales, comparées aux élections fédérales de décembre 2011 où les représentants de quatre partis ont été élus pour siéger à la Douma, 54 partis étaient représentés et 31 partis ont eu des représentants élus.

Ensuite, nous avons adopté une loi relative aux régimes électoraux des régions. Ces dernières peuvent maintenant choisir leur modèle : le gouverneur est élu soit au scrutin universel direct soit par le parlement régional.

Par ailleurs, en première lecture, une loi a été adoptée sur l’élection des députés de la Douma. Nous allons revenir à un système mixte où une partie des députés seront élus en fonction de leur appartenance à un parti et avec un mandat unique. Ces modifications visent à donner la possibilité aux petits partis d’accéder au parlement.

Autre nouveauté : l’augmentation considérable du rôle des experts dans le processus législatif. Nous sommes parvenus, me semble-t-il, à de bons résultats, notamment en intégrant l’électronique. Hier, nous avons eu justement une présentation de nos travaux et cette technologie est, je crois, tout à fait unique en Europe – nous pourrons, si vous le souhaitez, vous la présenter.

Enfin, pour répondre directement à la question que vous m’avez posée, Monsieur Aligrudić, nous avons créé le Conseil des partis non représentés au parlement. Nous les avons associés au processus électoral. Environ 35 partis ont ainsi pu examiner les questions d’actualité comme la réforme des retraites et le projet de loi relatif à la planification.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Monsieur le président, j’ai eu l’occasion de suivre les élections de 2011 et 2012 en Russie, nous en avions parlé ensemble et étions d’accord sur le fait que pour garantir des élections libres et justes il faut que la Commission électorale centrale fonctionne correctement, qu’elle soit un juge impartial.

Avez-vous pris des mesures pour améliorer le fonctionnement de la Commission électorale centrale?

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ÉTAT* – Nous écoutons l’avis de nos collègues européens sur ce sujet. Nous avons eu d’ailleurs une réunion très instructive avec vous et j’aimerais que ce type de contact se poursuive. Nous sommes prêts à entendre votre proposition en la matière : comment faudrait-il réformer le système électoral ? Comment pourrions-nous organiser de façon plus efficace les activités de la Commission électorale centrale ?

Nous sommes ouverts à ce dialogue qui est absolument nécessaire.

Mme KARLSSON (Suède)* – S’agissant de la liberté d’association et de la liberté d’expression, en particulier en ce qui concerne les droits des LGBT, je vous demande, Monsieur le président, ce que va faire la Fédération de Russie pour éviter cette augmentation inquiétante de l’intolérance à l’égard des LGBT – et pour éviter de façon plus large la discrimination, notamment à l’égard de l’orientation sexuelle de certaines personnes. Je rappelle que cela a fait l’objet de critiques de la part des Etats-Unis, de la Suède et d’organisations internationales telles que le Conseil de l’Europe, ainsi que de commentaires de la Cour européenne des droits de l’homme.

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ÉTAT* – A ce sujet, la Fédération de la Russie s’acquitte de toutes les obligations qu’elle a contractées au plan international. La législation russe, dans le domaine de la protection des enfants contre toute propagande en faveur du renoncement aux valeurs traditionnelles de la famille, répond à la législation internationale.

Tout en tenant compte des documents juridiques fondamentaux sur le plan international, il convient de respecter les particularités nationales, les valeurs morales de notre société. Je vous l’ai dit tout à l’heure, les personnes à orientation sexuelle non traditionnelle ont les mêmes droits que les citoyens qui ont une orientation sexuelle dite traditionnelle.

M. VILLUMSEN (Danemark)* – Monsieur le président, vous n’avez pas répondu à la question pertinente de M. Jensen : quels éléments avez-vous utilisés en ce concerne la loi anti-homosexuels ? Vous savez que la Commission de Venise précise que les enfants ont besoin d’informations pertinentes et concrètes en ce qui concerne la sexualité.

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ÉTAT* – Si vous insistez, je suis prêt à me répéter une troisième fois !

LE PRÉSIDENT – Je suis désolé, Monsieur Villumsen, mais nous sommes pris par le temps.

M. REIMANN (Suisse)* – Dans quatre mois, aura lieu l’ouverture des Jeux olympiques de Sotchi. Il s'agit d’un événement positif, mais il est d’autres éléments qui le sont moins tels que le coût faramineux de la construction des stades ou les phénomènes de corruption. Par ailleurs, M. Kasyanov a appelé au boycott de ces jeux en raison de la violation des droits de l’homme. Qu’en dit le président de la Douma ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ÉTAT* – Si je ne sais pas qui a parlé de boycott, je sais que cette idée flotte dans quelques esprits embrumés.

Je remonterai dans le temps et évoquerai le boycott qui a été exercé contre les Jeux olympiques de Moscou en 1980 suite à l’invasion de l’Afghanistan par les troupes soviétiques. Ce boycott avait été lancé par un pays. Pour finir, ce sont les sportifs de ce pays comme des sportifs des pays qui l’avaient rejoint qui ont été punis. Les sportifs russes ont également été sanctionnés, puisqu’ils n’ont pas pu se rendre aux Jeux olympiques suivants. Trente ans ont passés. Que je sache lorsque des décennies plus tard les Soviétiques ont retiré leurs troupes, le boycott s’est poursuivi. Vous voyez bien la stupidité et le cynisme de la situation.

Mme GUZENINA-RICHARDSON (Finlande)* – Quand on évoque le problème de la Syrie, on ne peut passer sous silence le problème des réfugiés. Comment la Fédération de Russie envisage-t-elle de participer et que conseillez-vous au Conseil de l'Europe ? Quelle est la mesure la plus urgente à prendre ?

Vous avez évoqué une nouvelle loi réprimant les offenses aux sentiments religieux. Est-elle susceptible de porter atteinte à la liberté d’expression ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA DOUMA D’ÉTAT* – La question des réfugiés syriens est tout aussi aiguë que les autres problèmes liés à la Syrie. Le nombre élevé de réfugiés syriens – 2 millions – suppose que ce soit la communauté internationale qui règle le problème, dont la résolution devra s’ancrer dans le règlement interne et pacifique du conflit syrien. A cet égard, nous sommes heureux que nos efforts conduisent à la représentation des autorités syriennes et de l’opposition syrienne à la conférence de Genève 2.

Dans le droit-fil du processus de règlement intérieur du conflit de la Syrie, il faudra également résoudre le problème des réfugiés syriens qui ont besoin d’un appui et d’une aide humanitaire d’urgence. A ce titre, la Fédération de Russie a déjà prêté assistance aux réfugiés syriens ; elle continue et continuera de le faire.

Quant à l’adoption de la loi réprimant les offenses aux sentiments religieux, je ne connais pas les éléments précis qui ont conduit à son adoption, mais elle est conforme aux normes internationales.

LE PRÉSIDENT – Il est 13 h 15. Nous devons interrompre le débat.

Monsieur le président, je vous remercie de votre intervention et des réponses que vous avez apportées.

4. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance aura lieu cet après-midi à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

L’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme se poursuivra cet après-midi.

La séance est levée.

(La séance est levée à 13 h 20).

S O M M A I R E

1. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie

2. Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2012-2013

Présentation par M. Van der Maelen du rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc.13301)

Présentation par M. Ghiletchi du rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, saisie pour avis (Doc.13313)

Intervention de M. Gurrίa, Secrétaire général de l’OCDE

Orateurs : MM. Kennedy, Binley, Hunko, Sasi, MM. M.Jensen, Schwaller, Mme Guzenina-Richardson, MM. Bockel, Dίaz Tejera, Hawn, Reimann, Timchenko, Beneyto, Recordon, Mme Santo, MM. Mendes Bota, Jáuregui, Fritz, Gándara Camou

Réponse de M. le Secrétaire général de l’OCDE

Vote sur un projet de résolution amendé

3. Discours de M. Narychkine, président de la Douma d’Etat de la Fédération de Russie

Questions : MM. Agramunt, M. Jensen, Mme Brasseur, MM. Aligrudić, Kox, Mme Karlsson, MM. Villumsen, Reimann, Mme Guzenina-Richardson

4. Prochaine séance publique

ANNEXE I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Pedro AGRAMUNT

Miloš ALIGRUDIĆ

Jean-Charles ALLAVENA/Christian Barilaro

Karin ANDERSEN/Ingjerd Schou

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI/Brigitte Allain

Daniel BACQUELAINE/Dirk Van Der Maelen

Theodora BAKOYANNIS

David BAKRADZE*

Taulant BALLA*

Gérard BAPT/Pierre-Yves Le Borgn'

Gerard BARCIA DUEDRA/Silvia Eloïsa Bonet Perot

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

José María BENEYTO

Levan BERDZENISHVILI/Tinatin Khidasheli

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA/Oerd Bylykbashi

Anna Maria BERNINI*

Teresa BERTUZZI*

Robert BIEDROŃ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Philippe BLANCHART*

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL

Eric BOCQUET/Jacques Legendre

Mladen BOJANIĆ/Snežana Jonica

Olga BORZOVA

Mladen BOSIĆ*

António BRAGA*

Anne BRASSEUR

Alessandro BRATTI*

Márton BRAUN

Gerold BÜCHEL/Rainer Gopp

André BUGNON

Natalia BURYKINA

Sylvia CANEL*

Nunzia CATALFO*

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU*

Mikael CEDERBRATT

Özlem CEKIC*

Elena CENTEMERO*

Lorenzo CESA*

Otto CHALOUPKA/Pavel Lebeda

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI*

Tudor-Alexandru CHIUARIU/Viorel Riceard Badea

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH

James CLAPPISON

Deirdre CLUNE

Agustín CONDE*

Telmo CORREIA

Paolo CORSINI*

Carlos COSTA NEVES

Celeste COSTANTINO*

Jonny CROSIO*

Katalin CSÖBÖR*

Milena DAMYANOVA

Joseph DEBONO GRECH

Armand De DECKER/Fatiha Saïdi

Roel DESEYN*

Manlio DI STEFANO*

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ

Jim DOBBIN*

Karl DONABAUER/Edgar Mayer

Ioannis DRAGASAKIS

Damian DRĂGHICI

Daphné DUMERY/Sabine Vermeulen

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA

Baroness Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA

Joseph FENECH ADAMI

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV

Doris FIALA/Maximilian Reimann

Daniela FILIPIOVÁ

Axel E. FISCHER

Jana FISCHEROVÁ*

Gvozden Srećko FLEGO

Bernard FOURNIER

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON*

Béatrice FRESKO-ROLFO

Erich Georg FRITZ

Martin FRONC

Sir Roger GALE

Adele GAMBARO*

Karl GARÐARSON

Ruslan GATTAROV*

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO*

Michael GLOS*

Pavol GOGA

Jarosław GÓRCZYŃSKI/Iwona Guzowska

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA

Sandro GOZI

Fred de GRAAF*

Martin GRAF*

Sylvi GRAHAM*

Patrick De GROOTE

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST*

Dzhema GROZDANOVA

Attila GRUBER*

Gergely GULYÁS*

Pelin GÜNDEŞ BAKIR*

Antonio GUTIÉRREZ

Ana GUŢU

Maria GUZENINA-RICHARDSON

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI*

Hamid HAMID

Mike HANCOCK*

Margus HANSON/Ester Tuiksoo

Davit HARUTYUNYAN

Håkon HAUGLI*

Norbert HAUPERT

Alfred HEER/Luc Recordon

Martin HENRIKSEN*

Andres HERKEL

Adam HOFMAN*

Jim HOOD

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER

Andrej HUNKO

Ali HUSEYNLI

Rafael HUSEYNOV/Sahiba Gafarova

Vladimir ILIĆ*

Florin IORDACHE

Igor IVANOVSKI

Tadeusz IWIŃSKI/Zbigniew Girzyński

Denis JACQUAT/Frédéric Reiss

Gediminas JAKAVONIS

Stella JANTUAN

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI

Michael Aastrup JENSEN

Mogens JENSEN

Jadranka JOKSIMOVIĆ*

Ögmundur JÓNASSON

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Antti KAIKKONEN/Sirkka-Liisa Anttila

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA/Ivan Račan

Mariusz KAMIŃSKI*

Deniza KARADJOVA

Marietta KARAMANLI/Maryvonne Blondin

Ulrika KARLSSON

Burhan KAYATÜRK*

Jan KAŹMIERCZAK*

Serhii KIVALOV

Bogdan KLICH

Serhiy KLYUEV/Volodymyr Pylypenko

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN

Attila KORODI

Alev KORUN*

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO

Dmitry KRYVITSKY/Yury Shamkov

Václav KUBATA/Miroslav Krejča

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU/Stella Kyriakides

Jean-Yves LE DÉAUT

Igor LEBEDEV

Harald LEIBRECHT*

Orinta LEIPUTĖ

Christophe LÉONARD*

Valentina LESKAJ

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE/Jānis Dombrava

Lone LOKLINDT/Nikolaj Villumsen

François LONCLE*

George LOUKAIDES

Yuliya L'OVOCHKINA*

Saša MAGAZINOVIĆ*

Philippe MAHOUX

Thierry MARIANI

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE/Geraint Davies

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Ivan MELNIKOV

Nursuna MEMECAN

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Marie-Jo Zimmermann

Djordje MILIĆEVIĆ/Vesna Marjanović

Jerzy MONTAG/Viola Von Cramon-Taubadel

Rubén MORENO PALANQUES*

Igor MOROZOV

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK

Melita MULIĆ

Lydia MUTSCH/Fernand Boden

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR*

Oľga NACHTMANNOVÁ

Marian NEACŞU

Fritz NEUGEBAUER

Baroness Emma NICHOLSON/Charles Kennedy

Michele NICOLETTI*

Brynjar NÍELSSON*

Elena NIKOLAEVA

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL/Grzegorz Czelej

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE/Michael Connarty

José Ignacio PALACIOS

Liliana PALIHOVICI*

Dimitrios PAPADIMOULIS

Eva PARERA/Jordi Xuclà

Ganira PASHAYEVA*

Johannes PFLUG*

Foteini PIPILI*

Ivan POPESCU

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE*

Alexey PUSHKOV*

Mailis REPS

Eva RICHTROVÁ

Andrea RIGONI*

François ROCHEBLOINE*

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET/Pascale Crozon

Marlene RUPPRECHT*

Pavlo RYABIKIN

Rovshan RZAYEV/Mustafa Dzhemiliev

Vincenzo SANTANGELO*

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER

Senad ŠEPIĆ/Ismeta Dervoz

Samad SEYIDOV

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO

Boris SHPIGEL/Alexey Ivanovich Aleksandrov

Arturas SKARDŽIUS/Algis Kašėta

Ladislav SKOPAL*

Leonid SLUTSKY

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV

Christoph STRÄSSER

Karin STRENZ

Ionuţ-Marian STROE

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ*

Chiora TAKTAKISHVILI

Vyacheslav TIMCHENKO

Romana TOMC*

Lord John E. TOMLINSON

Mihai TUDOSE/Daniel Florea

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI

Konstantinos TZAVARAS

Tomáš ÚLEHLA*

Ilyas UMAKHANOV/Alexander Ter-Avanesov

Petrit VASILI

Volodymyr VECHERKO/Larysa Melnychuk

Mark VERHEIJEN/Marjolein Faber-Van De Klashorst

Anne-Mari VIROLAINEN

Vladimir VORONIN*

Klaas de VRIES

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ

Piotr WACH

Johann WADEPHUL

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON*

Katrin WERNER

Karin S. WOLDSETH*

Gisela WURM*

Barbara ŽGAJNER TAVŠ*

Emanuelis ZINGERIS*

Guennady ZIUGANOV

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Kerstin LUNDGREN

Martina SCHENK

Eduard SHALSI

Spyridon TALIADOUROS

Observateurs

Eloy CANTU SEGOVIA

Ernesto GÁNDARA CAMOU

Javier LOZANO ALARCÓN

Michel RIVARD

Miguel ROMO MEDINA

Partenaires pour la démocratie

Najat AL-ASTAL

Mohammed AMEUR

Mohammed Mehdi BENSAID

Nezha EL OUAFI

Omar HEJIRA

Bernard SABELLA

Mohamed YATIM

Annexe II

Liste des représentants ou suppléants qui ont participé au vote pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre la Roumanie

Jean-Charles ALLAVENA/Christian Barilaro

Paride ANDREOLI

Volodymyr ARIEV

Daniel BACQUELAINE/Dirk Van Der Maelen

Deniz BAYKAL

José María BENEYTO

Levan BERDZENISHVILI/Tinatin Khidasheli

Sali BERISHA/Oerd Bylykbashi

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY

Márton BRAUN

Gerold BÜCHEL/Rainer Gopp

André BUGNON

Mikael CEDERBRATT

Otto CHALOUPKA/Pavel Lebeda

Irakli CHIKOVANI

Tudor-Alexandru CHIUARIU/Viorel Riceard Badea

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Boriss CILEVIČS

Milena DAMYANOVA

Joseph DEBONO GRECH

Arcadio DÍAZ TEJERA

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ

Karl DONABAUER/Edgar Mayer

Josette DURRIEU

Tülin ERKAL KARA

Joseph FENECH ADAMI

Cătălin Daniel FENECHIU

Doris FIALA/Maximilian Reimann

Daniela FILIPIOVÁ

Axel E. FISCHER

Gvozden Srećko FLEGO

Bernard FOURNIER

Erich Georg FRITZ

Martin FRONC

Tamás GAUDI NAGY

Alina Ştefania GORGHIU

Andreas GROSS

Antonio GUTIÉRREZ

Ana GUŢU

Sabir HAJIYEV

Norbert HAUPERT

Andres HERKEL

Jim HOOD

Joachim HÖRSTER

Anette HÜBINGER

Andrej HUNKO

Ali HUSEYNLI

Rafael HUSEYNOV/Sahiba Gafarova

Florin IORDACHE

Igor IVANOVSKI

Denis JACQUAT/Frédéric Reiss

Stella JANTUAN

Ramón JÁUREGUI

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Marietta KARAMANLI/Maryvonne Blondin

Serhii KIVALOV

Haluk KOÇ

Attila KORODI

Tiny KOX

Václav KUBATA/Miroslav Krejča

Jean-Yves LE DÉAUT

Valentina LESKAJ

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE/Jānis Dombrava

George LOUKAIDES

Philippe MAHOUX

Thierry MARIANI

Meritxell MATEU PI

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Ivan MELNIKOV

Nursuna MEMECAN

Jean-Claude MIGNON/Marie-Jo Zimmermann

Djordje MILIĆEVIĆ/Vesna Marjanović

Igor MOROZOV

João Bosco MOTA AMARAL

Lydia MUTSCH/Fernand Boden

Marian NEACŞU

Baroness Emma NICHOLSON/Charles Kennedy

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE/Michael Connarty

Eva PARERA/Jordi Xuclà

Ivan POPESCU

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

Jakob PRESEČNIK

René ROUQUET/Pascale Crozon

Pavlo RYABIKIN

Rovshan RZAYEV/Mustafa Dzhemiliev

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER

Senad ŠEPIĆ/Ismeta Dervoz

Samad SEYIDOV

Oleksandr SHEVCHENKO

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV

Ionuţ-Marian STROE

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW

Chiora TAKTAKISHVILI

Lord John E. TOMLINSON

Mihai TUDOSE/Daniel Florea

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Petrit VASILI

Volodymyr VECHERKO/Larysa Melnychuk

Klaas de VRIES

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ

Piotr WACH

Robert WALTER

Katrin WERNER