FR14CR04

AS (2014) CR 04

SESSION ORDINAIRE DE 2014

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la quatrième séance

Mardi 28 janvier 2014 à 15 h 30

Dans ce compte rendu :

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 35, sous la présidence de Mme Brasseur, Présidente de l’Assemblée.

LA PRÉSIDENTE – La séance est ouverte.

1. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme
au titre du Danemark (suite)

LA PRÉSIDENTE – Je vous rappelle que l’ordre du jour appelle l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre du Danemark.

La liste des candidats et leurs notices biographiques figurent dans le Doc. 13360.

Le vote a lieu dans la rotonde derrière la Présidence.

Il sera clos à 17 heures.

J’invite ceux d’entre vous qui n’ont pas encore voté à le faire.

Le dépouillement aura lieu aussitôt après dans les conditions habituelles, sous le contrôle de deux scrutateurs que nous avons désignés par tirage au sort ce matin, Mme Godskesen et M. Gražulis. Je leur rappelle qu’ils devront se trouver dans la rotonde derrière la Présidence à 17 heures.

Le résultat du scrutin sera proclamé si possible avant la fin de la présente séance.

Le scrutin est de nouveau ouvert.

Nous continuons nos travaux pendant ce temps.

2. Modifications dans la composition des commissions

LA PRÉSIDENTE – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2014) 01 Addendum 4.

En l’absence d’opposition, ces modifications sont adoptées.

3. Communication du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

LA PRÉSIDENTE – L’ordre du jour appelle maintenant la communication de M. Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, qui sera suivie de questions des membres de l’Assemblée.

(Poursuivant en anglais) Monsieur le Secrétaire Général, je vous souhaite la bienvenue à l’Assemblée où je vous accueille pour la première fois en tant que Présidente. Nous avons déjà eu la possibilité, ce matin, d’avoir un échange de vues, ce dont je me félicite. Nous avons eu une discussion ouverte, concrète et constructive. Je me réjouis par avance de la poursuite de ce dialogue afin de renforcer notre coopération. Comme je le disais hier dans mon discours de prise de fonctions, nous pouvons, ensemble, lever les obstacles qui existent entre les différentes entités du Conseil de l’Europe ; cela nous permettra d’accroître l’impact de notre action. De fait, nous avons besoin de coordination. Il faut également que nous disposions des informations nécessaires, notamment lorsque nous travaillons sur des questions sensibles en Europe et dans nos Etats membres.

Nous souhaitons en connaître davantage sur vos activités, même si vous avez déjà pris la parole lors de la réunion de la Commission permanente. Nous attendons avec impatience de vous entendre en particulier sur ce qui constitue l’un des sujets les plus difficiles en ce moment, à savoir l’Ukraine. Nos corapporteurs ont travaillé avec les différents partis afin de trouver une solution à la crise actuelle – nous aurons l’occasion d’en débattre jeudi matin, dans le cadre du débat selon la procédure d’urgence. Nous souhaitons donc vous entendre à ce propos, ainsi que sur le mécanisme de suivi.

Monsieur le Secrétaire Général, vous avez la parole.

M. JAGLAND, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe* – Madame la Présidente, permettez-moi pour commencer par vous présenter toutes mes félicitations. Je me réjouis par avance de travailler et de coopérer avec vous, et vous remercie de vos aimables paroles.

Je vais commencer par annoncer les bonnes nouvelles.

Tout d’abord, il ne manque plus que deux ratifications pour que la Convention sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique puisse entrer en vigueur. J’espère que cela pourra se concrétiser lors de la réunion ministérielle prévue en mai à Vienne. À cet égard, je souhaite remercier l’Assemblée parlementaire, et tout particulièrement M. Mendes Bota ainsi que son réseau, pour le travail considérable réalisé pour rédiger cette convention et la promouvoir au sein des différents Etats membres. C’est un exemple de la façon dont l’Assemblée parlementaire peut contribuer aux activités de l’ensemble du Conseil de l’Europe.

J’aimerais maintenant vous faire part de quelques inquiétudes, avant de revenir très rapidement à des aspects plus positifs.

Parmi ces inquiétudes, je relève un risque de désintégration de l’Europe. On note de véritables tensions au sein même de l’Union européenne, des tensions entre l’Union européenne et les autres grandes puissances, des tensions au sein des Etats membres du Conseil de l’Europe marquées par des perturbations sociales et un extrémisme croissant, et des tensions également au sein même de notre Organisation. Cela signifie que la Convention européenne des droits de l’homme est encore plus importante à l’heure actuelle que par le passé, parce qu’elle est le fondement juridique qui maintient l’Europe unie. C’était le cas après la guerre, ce sera encore plus décisif à l’avenir.

C’est la raison pour laquelle il était extrêmement important d’engager la réforme de notre Organisation. Il y a quatre ou cinq ans, celle-ci était enlisée dans des difficultés économiques importantes : elle connaissait une forte augmentation des coûts de personnel et la Cour européenne des droits de l’homme était inondée de requêtes émanant des Etats membres. Des montants de plus en plus importants devaient être transférés du Conseil de l’Europe vers la Cour. Cela ne pouvait durer, la Cour ne pouvait continuer à absorber ainsi une part croissante du budget général. Cela mettait l’Organisation elle-même en péril.

J’ai donc pris la décision de mettre un terme à ce système de transfert vers la Cour. Il fallait modifier le système. C’est ce que nous avons fait. Les Conférences d’Interlaken, d’Izmir et de Brighton ont joué un rôle essentiel en la matière et, à l’heure actuelle, la Cour fonctionne bien mieux et les requêtes en attente diminuent.

Cependant ce n’est pas suffisant car, en fait, les problèmes ne venaient pas de la Cour. Ils venaient des Etats membres desquels partaient énormément de requêtes. Nous avons donc affirmé notre volonté de fournir une assistance aux Etats membres afin que leur pratique judiciaire soit en conformité avec la convention. Pour ce faire, nous avons lancé un vaste programme de réformes, qui est encore en cours.

C’est ce que nous avons fait en Ukraine.

Ce pays avait engagé un grand programme de réformes, centré avant tout sur le judiciaire. Au vu de ce qui se passe aujourd’hui, on peut se demander si nous avons agi en vain. Je ne le pense pas car, quel que soit le parti qui prendra le pouvoir, nous devrons continuer à travailler sur l’agenda des réformes. Sur la réforme du judiciaire, il convient tout d’abord de faire approuver une loi électorale acceptable pour les différents partis, d’entrer dans un processus de réécriture de la Constitution et d’assurer une bonne répartition des pouvoirs en Ukraine. Le Conseil de l’Europe a joué un rôle essentiel de ce point de vue.

Pour ce qui est des lois controversées adoptées par le Parlement le 16 janvier, j’ai rencontré le Premier ministre ukrainien la semaine dernière et l’ai invité à nous envoyer ces textes de loi afin que nous les examinions et formulions des recommandations. Sa réponse fut positive, et dès le lendemain, des experts arrivaient à Strasbourg pour se réunir et élaborer des recommandations. La recommandation, qui en est sortie hier, est qu’il fallait annuler ces lois et, aujourd’hui, le parlement les a effectivement annulées. Vous voyez donc que le Conseil de l’Europe a un rôle extrêmement important à jouer.

Pour en revenir au processus de réforme de notre Organisation, la première étape étant passée, nous en devons en venir à la deuxième que j’avais évoquée lors de mon dernier rapport devant l’Assemblée parlementaire : il s’agit maintenant d’améliorer notre système de suivi et l’aide que nous apportons aux Etats membres. Il s’agit également de veiller à ce que tous les Etats membres soient sur un pied d’égalité. C’est un fait qu’après la chute du mur de Berlin, l’attention s’est concentrée sur les démocraties émergentes. Si cela était tout à fait justifié à l’époque, aujourd’hui, nous devons nous concentrer davantage sur le suivi et l’assistance de l’ensemble des Etats membres.

Je l’avais annoncé la dernière fois que j’ai pris la parole dans cet hémicycle. Qu’avons-nous fait depuis ?

Nous avons examiné les rapports des organismes de suivi sur la base desquels nous avons identifié trois défis majeurs pour chaque Etat membre. Nous avons ensuite établi le dialogue avec chacun d’entre eux afin de leur permettre de répondre, de réagir et qu’ils nous disent comment ils envisagent de corriger ces déficiences et quel type d’assistance le Conseil de l’Europe peut leur fournir. C’est ce que nous appelons la « matrice ». Nous ne voulons pas la rendre publique, parce qu’il ne s’agit pas de pointer quiconque du doigt, ni faire une classification des Etats membres, mais nous voulons ainsi établir une plate-forme de dialogue avec chaque Etat membre afin de corriger les déficiences.

Comme je l’ai déjà dit, je pense que c’est véritablement la seule manière pour que la Cour survive. Les Etats membres doivent prendre leurs responsabilités en matière de droits de l’homme au niveau intérieur, en mettant sur pied une législation et une réglementation pertinentes en matière de droits de l’homme. Ainsi, seules les affaires les plus importantes en matière de droits de l’homme arriveront jusqu’à la Cour et non toutes les petites affaires qui devraient être traitées au niveau national.

Nous avons recueilli des données qui sont la base de différents rapports, mais qui nous permettent également de préparer le rapport annuel. C’est la première fois que le Comité des Ministres nous demande de rédiger un rapport annuel. Il sera présenté lors de la réunion ministérielle de mai à Vienne et portera sur les droits de l’homme, l’Etat de droit et la démocratie en Europe.

Il s’agit d’identifier les menaces et les défis principaux.

Plus important encore, ce rapport permet d’identifier les déficiences de l’Organisation et met en lumière sa capacité de réagir aux différentes évolutions dans les Etats membres. J’ai l’intention de formuler des recommandations très ambitieuses afin de combler les lacunes identifiées et de renforcer notre capacité à résoudre les problèmes. Vous aurez la possibilité de discuter de ce rapport au mois d’avril. Il aura selon moi une importance historique pour l’Organisation en la faisant entrer dans une nouvelle ère, l’ère paneuropéenne.

Ce rapport n’est pas encore prêt, je ne peux donc pas entrer dans le détail de son contenu. Je peux néanmoins vous dire qu’il pointera les problèmes spécifiques de certains pays, mais aussi les problèmes communs de plusieurs Etats membres. On peut citer notamment la lutte contre l’intolérance et l’extrémisme, le blanchiment d’argent, la violence à l’égard des femmes et des enfants, et une forme de protestation qui se manifeste dans de nombreux Etats membres à l’égard des catégories les plus privilégiées. Je partage beaucoup, personnellement, les propos qu’a tenus le Pape à ce sujet. Comme cela a déjà été dit dans cette enceinte, ceux qui sont en bas de l’échelle sociale sont malheureusement de plus en plus laissés pour compte. C’est une menace réelle pour nos sociétés. Celles-ci sont confrontées à des problèmes structurels, liés à leur construction constitutionnelle : les groupes les plus fragiles ne sont pas suffisamment représentés dans les partis politiques et dans les institutions. Nous devons nous souvenir de cette vieille leçon qui veut que si l’argent peut procurer du bonheur aux individus, il ne peut suffire pour bâtir une société.

Le Conseil de l’Europe a aujourd’hui un rôle majeur à jouer, bien plus grand que par le passé. Il existe un fossé entre les droits fondamentaux du Conseil de l’Europe et les normes de la Charte sociale européenne. Nous devons surmonter cette difficulté. Par ailleurs, seuls 13 pays ont ratifié le protocole additionnel. Un sommet va être organisé à Turin avec l’Union européenne, lorsque l’Italie en assurera la présidence, afin d’accroître la pertinence des normes sociales d’un point de vue général.

Aujourd’hui, 28 janvier, c’est la Journée mondiale de la protection des données sur la vie privée. Comment sécuriser internet et garantir le respect de la vie privée ? Il s’agit d’une question essentielle. Il n’est évidemment pas facile de concilier la liberté d’expression et le respect de la vie privée. Si les données privées ne sont pas suffisamment sécurisées, on peut craindre que chaque nation soit tentée de récupérer les données relatives à sa population, ce qui signerait la mort d’internet et des possibilités nouvelles qu’offre cet outil en matière de liberté d’expression.

J’ai été nommé membre d’un « panel » mondial chargé de formuler des recommandations sur la gouvernance d’internet. Elles seront présentées lors d’un grand sommet au Brésil. Le Président de la République français a souhaité coparrainé cet événement, qui devrait nous aider à trouver les moyens d’assurer une meilleure gouvernance d’internet. Ce sommet mondial donnera la possibilité à tous les Etats, et pas seulement aux Etats-Unis, de faire entendre leur voix.

Pour le Conseil de l’Europe, le sujet est également crucial. Nous sommes les seuls au monde à posséder une convention sur la protection des données : la Convention 108, qui est en cours de modernisation. La Fédération de Russie est d’ailleurs partie prenante de ce processus. En outre, la Commission européenne a demandé aux Etats-Unis d’adhérer à cette convention. Il s’agit peut-être des prémisses d’un texte international, au niveau des Nations Unies. Une chose est certaine, nous avons besoin de règles pour protéger la vie privée, et de règles qui s’appliquent à tous. Il n’est évidemment pas suffisant de dire à un pays qu’il ne doit pas espionner ses amis. Une telle approche est simpliste, car le problème est global. Le Conseil de l’Europe est évidemment très bien placé pour contribuer à l’édification de règles globales.

En ce qui concerne le Statut, c’est bien parce que l’objectif du Conseil de l’Europe est de contribuer à l’unité européenne que l’adhésion de l’Union européenne à la Convention est si importante. Sans cette adhésion, les deux systèmes continueront d’évoluer parallèlement, créant de nouvelles tensions et nuisant à l’unité européenne.

Autrement dit, d’emblée, ma priorité a été d’établir de bonnes relations au plus haut niveau avec l’Union européenne. J’ai commencé par me rendre à Bruxelles parce que nos rapports avec l’Union européenne étaient quasi inexistants, et qu’il me fallait nouer avec elle des relations de confiance. Aujourd’hui, le dialogue politique est régulier, il a lieu au plus haut niveau et à bien d’autres niveaux. C’est un fait. Chaque fois que les commissaires européens viennent au Parlement européen, ils passent par mon bureau. J’entretiens des contacts réguliers avec M. Barroso, lorsqu’il se passe quelque chose, et d’une manière plus générale.

Plus important encore : la coopération juridique entre nos deux organisations se développe. Il existe un accord entre la Commission et nos 47 Etats membres au sujet de l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme. Le texte va être envoyé aux organes des deux parties : à l’Assemblée parlementaire et au Parlement européen, au Conseil européen et au Comité des Ministres. Nous avons donc beaucoup progressé. L’Union européenne prend part à la révision de la Convention 108 de Budapest sur la protection des données. La Commission européenne pour l’efficacité de la justice, la CEPEJ, travaille sur des données pour le compte de l’Union européenne : celle-ci n’a pas créé son propre mécanisme. En outre, l’Union européenne envisage d’adhérer à la convention GRECO, ce qui serait extrêmement important. Enfin, nous avons commencé de voir comment concilier les normes de la Charte sociale européenne et la Charte des droits fondamentaux.

La coopération entre nos deux organisations sur le terrain s’est renforcée à un degré que personne n’aurait pu imaginer il y a encore quelques années. Je signerai cet hiver un accord avec l’Union européenne en vue d’un programme de coopération de sept ans qui allouera 100 millions d’euros à notre action dans les pays de l’Est, 120 millions pour l’Europe du Sud-Est, ainsi que d’autres fonds pour financer nos activités dans les pays voisins. Pour nous, c’est essentiel.

Nous avons donc réussi à faire de grandes choses : nous avons construit un partenariat avec l’une des structures les plus puissantes du continent européen. Nous travaillons aussi avec les autres puissances du continent. Bref, nous travaillons à l’échelle paneuropéenne. L’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme n’aurait pas été possible si nous n’avions pas instauré ce partenariat et cette confiance – ni d’ailleurs si nous n’avions pas réformé notre organisation, si celle-ci s’était enlisée dans des difficultés économiques, engluée dans la bureaucratie, si la Cour était inondée de requêtes et d’affaires. Grâce à toutes les réformes que nous avons menées, grâce aux relations que nous avons su nouer, nous pouvons être beaucoup plus optimistes : la probabilité que l’Union adhère à la convention est beaucoup plus forte aujourd’hui.

En conclusion, la poursuite des réformes va de pair avec l’adhésion de l’Union. Nous ne sommes encore qu’à mi-chemin ; ne nous arrêtons pas maintenant. Il y va de l’avenir de l’Europe, de l’Europe que nous voulons. Je crois en l’Europe paneuropéenne. L’Union européenne y est essentielle, bien entendu, mais elle ne couvrira jamais tout le continent, à la différence de la Convention européenne des droits de l’homme. La convention et les mécanismes que nous avons créés pour la protéger et l’étendre sont véritablement paneuropéens. Nous disposons donc d’une occasion unique de doter l’Europe paneuropéenne d’un fondement juridique solide. Voilà pourquoi nous devons veiller à notre propre pertinence, en agissant ici même plutôt qu’en nous plaignant des autres. Nous avons beaucoup fait pour accroître notre visibilité au sein des Etats membres, auprès de l’Union européenne et d’autres acteurs majeurs. Ce que nous avons ainsi conquis, non sans peine, serait facile à perdre. Continuons donc sur cette voie constructive. J’ai confiance en l’Assemblée parlementaire pour le faire. Je vous remercie.

LA PRÉSIDENTE* – Merci beaucoup pour votre communication, Monsieur le Secrétaire Général. Les membres de notre assemblée parlementaire, qui est paneuropéenne, sont tout disposés à vous poser leurs questions.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* – Monsieur le Secrétaire Général, au nom de mon groupe, je tiens à vous féliciter et à vous exprimer notre respect pour votre travail.

C’est l’occasion pour vous de clarifier votre position sur la place de notre Assemblée dans l’Organisation. Depuis des semaines, voire des mois, nous débattons des droits des enfants et de leur intégrité physique. Je crois qu’il serait bon que vous fassiez une déclaration sur cette question.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Cette question est à l’étude au Comité des Ministres. La procédure n’est pas terminée. Il n’existe pas de norme juridique à ce jour, ni d’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme. Si c’est à la circoncision que vous pensez, il n’existe aucune législation qui l’interdise dans nos Etats membres. En revanche, il existe bien évidemment dans nos Etats membres des lois concernant d’autres aspects de l’intégrité physique, par exemple les mutilations génitales des filles. Vous avez raison, c’est une question qui doit être mise sur la table, mais je ne peux pas en dire plus pour l’instant.

M. AGRAMUNT (Espagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Madame la Présidente, c’est ma première intervention depuis votre élection ; permettez-moi de vous féliciter.

Monsieur le Secrétaire Général, la Cour européenne des droits de l’homme est une dernière instance où les requêtes s’accumulent. C’est aussi une cour qui prend parfois des décisions qui concernent la souveraineté, y compris de pays dont le caractère démocratique n’a jamais été contesté. Ne serait-il pas possible de prendre une initiative pour rendre plus efficaces les travaux de la Cour ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Comme je l’ai rappelé dans ma communication, nous avons déjà beaucoup fait. Je me suis rendu à Moscou pour demander à la Fédération de Russie de ratifier le protocole n° 14. Il s’agissait de la réforme des procédures internes de la Cour. Lorsque la Fédération de Russie a ratifié ce protocole, on a pu engager un processus sous la présidence suisse avec la Conférence d’Interlaken puis avec la Conférence de Brighton.

La Cour s’est mise en ordre. Elle peut aujourd’hui traiter les requêtes plus rapidement. Elle peut aujourd’hui beaucoup plus facilement rejeter une requête irrecevable. Je remercie la Cour pour cette réforme très importante. Ainsi, le nombre des requêtes pendantes diminue. Il faut aussi éviter l’accroissement de requêtes émanant d’Etats membres qui ne se sont pas suffisamment mis en conformité avec les exigences de la Convention. Nous allons dans la bonne direction mais il y a encore bien du pain sur la planche. D’où l’importance de poursuivre cette réforme. Les rapports de suivi de notre Organisation doivent être mieux appliqués sur le terrain et de vraies réformes doivent être engagées dans les pays membres.

M. PUSHKOV (Fédération de Russie), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Monsieur le Secrétaire Général, je suis d’accord avec vous pour dire que le Conseil de l’Europe est une organisation paneuropéenne, mais on a parfois le sentiment que les pays de l’Union européenne ont un statut spécial dans notre Organisation. On le voit dans la procédure de suivi. On l’a vu encore aujourd’hui à la commission de suivi et dans le débat sur l’Ukraine, où le point de vue de l’Union européenne a été largement exprimé. Comment notre Organisation pourrait-elle être plus soucieuse d’égalité et plus unifiée ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – C’est une question très importante. Nous devons assurer une plus grande cohérence dans notre Organisation en mettant tout le monde sur un pied d’égalité, conformément à notre charte. C’est pour cela que j’ai engagé une réforme de toute la procédure de suivi. Il est important que chacun soit ici l’égal des autres. Cela explique l’importance d’une adhésion de l’Union européenne à la Convention.

Je viens d’un pays qui n’est pas membre de l’Union européenne, institution très importante pour notre continent, mais les pays non-membres de celle-ci ont aussi toute leur importance dans une perspective paneuropéenne. Il faut continuer à considérer que nous avons, dans plusieurs domaines, un mandat plus vaste que celui de l’Union européenne. L’action de cette dernière au sein de notre Organisation doit être bien réglée : il ne serait pas normal que 28 Etats membres aient le pouvoir ici parce qu’ils auraient toujours la majorité, puisque nous sommes 47. Nous devons confronter nos idées sans nous cacher derrière un bloc.

Mme TAKTAKISHVILI (Géorgie), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Nous continuons à déplorer beaucoup de discours haineux et ce, malgré toutes les conventions et normes adoptées par le Conseil de l’Europe et l’activité de la Cour européenne. Pensez-vous que les mécanismes actuels de suivi soient suffisants pour faire face à cette situation ? Existe-t-il des plans pour améliorer la mise en œuvre des recommandations de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI)?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Cette question est très importante. Nous recevons les rapports de l’ECRI. Ils montrent des retards dans la description de situations, parfois de quatre ou cinq ans. Ce n’est plus d’actualité. C’est une question à régler. Il y en a d’autres.

Nous avons lancé une campagne contre le discours de haine sur internet. Nous avons nos législations, nos règles au niveau national et dans la Convention. Il est très important de mobiliser le public contre les crimes et les discours de haine sur internet. Nous en discuterons lors de la conférence ministérielle à Vienne et essaierons d’impliquer les jeunes.

M. HUNKO (Allemagne), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne * – Monsieur le Secrétaire Général vous avez parlé dans votre communication des tensions à surveiller de près, en Ukraine par exemple. Le Conseil de l’Europe peut jouer un rôle très important en tant qu’instance paneuropéenne. Certaines tensions, qui viennent des intérêts respectifs de l’Union européenne et de la Russie, en Ukraine, risquent de déboucher sur une situation plus grave encore. Comment y faire face ? Peut-on avoir une position de neutralité sans tomber dans un des deux blocs stratégiques ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Nous ne participons pas à cette bataille géopolitique entre l’Union européenne et la Fédération de Russie, si elle existe. Nous n’avons pas mandat pour ce faire et il est important que nous soyons considérés comme une instance impartiale. Ce qui est d’ailleurs bien le cas en Ukraine. Toutes les parties reconnaissent notre compétence, la qualité de nos conseils. J’étais avant Noël à Kiev, où l’on a accepté notre proposition de mise en place d’un panel d’observateurs pour surveiller les manifestations. Les Ukrainiens ont accepté que nous soyons l’un des trois représentants de la communauté internationale.

On discute actuellement à l’Assemblée nationale d’Ukraine des recommandations que nous avons élaborées sur certaines lois. J’ai rencontré vendredi dernier Mme Catherine Ashton et je me suis entretenu avec le Premier ministre d’Ukraine. Tous deux ont reconnu que ce que nous avons présenté pour améliorer la législation de l’Ukraine, notamment pour ce qui concerne la loi électorale et la Constitution, est acceptable. Nos propositions sont considérées comme une contribution impartiale. Si nous ne pouvions pas jouer notre rôle en toute impartialité, nous serions considérés comme n’importe quel autre acteur. Or nous travaillons sur la base de conventions, et c’est pour cela que nous pouvons apporter des réponses à ce genre de situations.

Le quotidien allemand Die Welt a présenté aujourd’hui le Conseil de l’Europe comme l’instrument qui permettra peut-être de favoriser le dialogue national en Ukraine. On ne saurait mieux dire !

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* – Monsieur le Secrétaire Général, je suis d’accord avec vous : notre spécificité, ce sont les conventions, en particulier bien sûr la Convention européenne des droits de l’homme, et la Cour européenne des droits de l’homme. Il y a un sujet qui revient dans les discussions européennes, au Conseil de l’Europe comme au Parlement européen : il s’agit du fossé entre le Nord et le Sud, entre les pays développés et les pays émergents.

Le problème, c’est qu’il y a quelque temps, le Parlement européen a décidé de faire la même chose que nous dans bien des domaines ; un corps de fonctionnaires a ainsi été constitué pour examiner les systèmes judiciaires. La seule chose que l’Union européenne ne copie pas encore, c’est la Cour européenne des droits de l’homme ! Ne serait-il pas possible, entre gens intelligents et égaux, de se répartir le travail afin d’éviter tout double emploi ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – J’ai évoqué ce sujet à plusieurs reprises avec le président Barroso, et je crois pouvoir vous donner l’assurance qu’il ne s’agit pas d’un processus de duplication de nos efforts. Au contraire, l’Union européenne utilise nos instruments, notamment pour ce qui concerne les questions judiciaires. L’Union européenne a ainsi été autorisée à utiliser les informations de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice. Elle voudrait également accéder au Groupe d’Etats contre la corruption, à la Convention européenne des droits de l’homme, et aussi harmoniser les normes sociales. Nous allons bien sûr veiller à ce qu’il n’y ait pas de cas de duplication – comme ceux que vous avez cités. Mais c’est à nous d’agir : on ne peut pas rester là, les bras croisés, en se plaignant de ce qui se passe ! Il faut que nous soyons pertinents. Alors, on nous écoutera.

Le Parlement européen a dit qu’il voulait s’appuyer sur les normes et les instruments élaborés par le Conseil de l’Europe. Soyons fiers de notre institution, car nous avons beaucoup à apporter !

M. FOURNIER (France) – Depuis plusieurs années, les droits des journalistes font l’objet de violations, y compris dans des Etats membres de notre Organisation, et cela en toute impunité.

L’idée a été émise qu’une unité spécialisée à l’effectif réduit soit créée sous l’autorité du Secrétaire Général, afin de définir et de conduire une stratégie axée sur le suivi des attaques contre les journalistes dans les Etats membres, accompagnée d’un mécanisme de réponse rapide et d’un programme de lutte contre l’impunité. Quel accueil réservez-vous à cette proposition et comment pourrait-elle se concrétiser ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Le Comité des Ministres a traité récemment de cette question dans le cadre d’un débat thématique, et il m’a invité à lui soumettre un plan d’action concret – ce que j’ai fait. La balle est désormais dans son camp.

Nous souhaitons que chacun participe à l’examen de cette question importante, liée aux droits et libertés prévus par notre Convention. Pour les défendre, nous devons, comme vous l’avez souligné, mettre en place des mécanismes de réponse rapide.

Mme ZOHRABYAN (Arménie)* – C’est aujourd’hui l’anniversaire du soldat arménien Hagop Injighulian, qui est prisonnier de guerre en Azerbaïdjan. La Croix-Rouge fait son possible pour que Hagop soit renvoyé chez lui ou accueilli dans un pays tiers, mais jusqu’à présent sans résultat. La moindre hésitation peut lui être fatale. Que peut faire notre Assemblée pour que l’Azerbaïdjan respecte ses obligations internationales et ne garde pas ce soldat arménien comme otage ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Il m’est difficile de commenter ce cas particulier. Je l’ai déjà dit, nous appuyons les actions humanitaires de la Croix-Rouge, ici comme ailleurs, mais ce n’est pas nous qui détenons les clefs de la résolution de ce conflit ; ce serait plutôt le Groupe de Minsk. Aucune des parties ne nous a invités à apporter notre contribution. Il est toutefois important que ces Etats membres soient dans notre famille et que nous puissions travailler avec eux.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – Depuis quelque temps, on note une tendance inquiétante à une division entre anciens et nouveaux Etats membres, en particulier s’agissant des procédures de suivi de l’Assemblée. Si l’on ne trouve pas rapidement une solution satisfaisante, je crains que le mécontentement croissant que cela suscite ne mine notre objectif d’une Europe unie dans la défense des droits de l’homme. Comment vous, le Secrétaire Général, et l’Assemblée parlementaire pourriez-vous unir vos forces afin d’éviter que ces tensions ne s’aggravent ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Je note avec satisfaction que le problème est évoqué à l’Assemblée parlementaire ; comme je l’ai dit, nous avons également mis en place un processus au niveau intergouvernemental. Je pense que mon rapport nous donnera l’occasion de creuser la question. Il montrera en effet clairement que s’il y a certes des problèmes spécifiques à certains Etats membres, on en rencontre aussi partout ailleurs. Penser que cela ne concerne qu’une partie de l’Europe serait une erreur grave.

Il faudra s’en souvenir pour refonder notre système de suivi. Il ne s’agit pas de l’étendre, mais nous devons nous demander comment il fonctionne et comment il est coordonné au sein de notre propre maison. En la matière, l’Assemblée parlementaire a un rôle très important à jouer.

M. HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Monsieur Jagland, vous avez, en tant que Secrétaire Général, toujours prouvé que vous vouliez respecter les uns et les autres. Votre personnalité est très importante pour le Conseil de l’Europe. Or l’Azerbaïdjan a toujours une partie de son territoire occupée par un autre Etat membre, et vous n’avez pas agi pour résoudre ce problème. Vous rendez-vous compte de votre responsabilité devant l’Histoire ?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Il s’agit là d’un des conflits non résolus en Europe.

Au Conseil de l'Europe, nous devons nous appuyer sur les processus mis en place pour essayer de résoudre ce conflit. Devenir partie prenante à ce conflit risquerait de créer davantage de confusion et de nous éloigner d’une solution. Cette affaire est entre les mains du Groupe de Minsk ; aucune partie au conflit ne nous a jamais invités à faire quelque chose en particulier.

Nous sommes dans un dilemme. Il y a ces trous noirs en Europe où nous ne pouvons pas déployer nos instruments de suivi et où la Convention ne fonctionne pas. C’est un grand dilemme, mais nous ne pouvons pas nous imposer ; nous ne pouvons travailler que si les parties en présence et les autres grands acteurs européens le demandent.

LA PRÉSIDENTE – M. Binley, inscrit dans le débat, est absent de l’hémicycle.

M. VILLUMSEN (Danemark)* – Je suis très préoccupé par ces lois contre l’homosexualité qui sont actuellement discutées dans différents pays membres du Conseil de l'Europe et parfois de l’Union européenne. Le Conseil de l'Europe, à tous les niveaux, y compris celui du Secrétaire Général, s’est exprimé contre de telles lois, mais j’aimerais que vous nous disiez comment, selon vous, nous pouvons continuer à lutter contre ces lois discriminatoires.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – J’ai effectivement réagi face à ces tentatives de discrimination. Il est important que nous agissions sur le terrain juridique, qui est celui du Conseil de l'Europe.

L’Europe compte diverses législations, différents types de droits pour les personnes LGBT, certains pays sont plus avancés que d’autres, mais il est important pour nous de bien camper sur notre position juridique, à savoir que les personnes LGBT ont exactement les mêmes droits au regard de la Convention que tous les autres citoyens, le droit de s’exprimer librement, le droit de se réunir…. Pour garantir ces droits, nous avons la Convention et une recommandation du Comité des Ministres.

LA PRÉSIDENTE* – Je vous remercie, Monsieur le Secrétaire Général, pour votre communication et pour avoir répondu à nos questions. J’aurais souhaité que nous ayons plus de temps, malheureusement ce n’est pas le cas. Nous allons, lors de nos prochaines réunions de Bureau et de la Commission permanente, poursuivre notre dialogue. Nous continuerons à travailler ensemble.

(Poursuivant en français) Mes chers collègues, je vous rappelle que le scrutin pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre du Danemark est en cours. Il sera clos à 17 heures.

J’invite ceux d’entre vous qui n’ont pas encore voté à le faire.

M. Rouquet, Vice-Président de l’Assemblée, remplace Mme Brasseur au fauteuil présidentiel

4. Une stratégie pour la prévention du racisme et de l’intolérance en Europe

La lutte contre le racisme dans la police

(Débat conjoint)

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle maintenant notre débat conjoint sur le thème du racisme.

Nous entendrons d’abord la présentation par M. Gunnarsson, de son rapport intitulé « Une stratégie pour la prévention du racisme et de l’intolérance en Europe », présenté au nom de la commission sur l’égalité et la non-discrimination (Doc. 13385).

À cette discussion sera jointe celle du rapport de M. David Davies, relatif à « la lutte contre le racisme dans la police », et également présenté au nom de la commission sur l’égalité et la non-discrimination (Doc. 13384).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi, de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

Je vous rappelle que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 18 h 45. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 18 h 25, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Je rappelle que les rapporteurs disposent chacun d’un temps de parole total de 13 minutes, qu’ils peuvent répartir à leur convenance entre la présentation de leur rapport et la réponse aux orateurs.

M. GUNNARSSON (Suède), rapporteur de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – Toutes les questions relatives au racisme et à l’intolérance suscitent des réactions émotionnelles. Depuis la publication de ce rapport sur le site de l’Assemblée ainsi que sur le site internet de mon Parlement, j’ai reçu de nombreuses réactions – des membres du Gouvernement, des médias, etc. –concernant la demande d’asile, la sexualité, l’identité… On nous a même dit que nous étions « la mafia du politiquement correct ».

J’aimerais donc dire pour commencer que ce rapport ne traite pas de l’immigration mais de l’incapacité de l’Europe à réprimer des attitudes négatives de groupes particuliers. Et il s’agit de voir comment nous, nous pouvons lutter contre de telles manifestations.

La haine n’est pas uniquement un problème pour les victimes, il se pose à l’ensemble de la société, car il vient éroder la primauté du droit, voire de la démocratie. Le racisme, l’intolérance, la haine ne sont pas des phénomènes nouveaux pour l’Europe. Bien au contraire, nous avons une longue histoire de victimisation de certains groupes pour des raisons d’appartenance ethnique, de sexualité, et autres. Mais ces dernières décennies, ces phénomènes se sont accrus. Les conséquences de la crise économique sur la cohésion de nos sociétés ont provoqué cette évolution. Une évolution amplifiée par l’utilisation accrue des médias sociaux.

Nous suggérons, dans le rapport, d’adopter une approche plus stratégique et de ne pas réagir de façon ad hoc ou cloisonnée. Nous devons veiller à ce qu’un cadre juridique de lutte contre le discours de haine inclue le plus grand nombre d’aspects possibles afin que les autorités des Etats membres puissent avoir les moyens de lutter contre ces crimes.

Le Conseil de l'Europe fait déjà beaucoup de bonnes choses pour lutter contre le racisme et l’intolérance. Je citerai le Mouvement de lutte contre le discours de haine, l’une des actions les plus visibles. Il en est d’autres moins visibles, tels que le mécanisme de suivi, « la boîte à outils » du Conseil de l'Europe, toutes ressources qu’il convient d’exploiter le plus efficacement possible et de manière plus coordonnée que nous ne l’avons fait jusqu’à présent.

Nous espérons que l’Assemblée sera d’accord pour que nous demandions au Comité des Ministres de mandater le Secrétaire Général afin qu’il élabore une stratégie de lutte contre le racisme et l’intolérance. Dans la mesure où le racisme et l’intolérance sévissent à l’échelle de l’Europe, il est essentiel que le Conseil de l'Europe joue un rôle de chef de file en la matière.

En tant que parlementaires, nous devons également reconnaître nos responsabilités. En plus du travail législatif quotidien qui est le nôtre, il nous appartient d’agir lorsque des personnes sont victimes de la haine, quelle que soit la forme que celle-ci revêt. Nous sommes des représentants élus et à ce titre nous ne pouvons rester silencieux, car cela reviendrait à dire que nous aurions abandonné la lutte. À la haine qui est une question politique, il faut trouver une solution politique.

Tous ceux qui luttent contre le racisme et l’intolérance sont pris pour cible par les groupes qui cherchent à diviser nos sociétés. On nous reproche parfois de tenir un discours politiquement correct ou on prétend que nous sommes déconnectés de la réalité. Il ne s’agit pas d’une confrontation des valeurs, la question n’est pas là, nous devons montrer qu’une société exempte de haine et d’intolérance est possible. Tel est l’objectif que nous devons nous fixer : nous devons lutter contre les racines de la haine et faire notre possible pour édifier des sociétés où tous se sentiront en sécurité et respectés, quelles que soient leur race, leur religion, leur appartenance ethnique, leur orientation sexuelle ou leur identité de genre.

J’espère que nous aurons un débat constructif sur le sujet.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le rapporteur, il vous restera 7 minutes 30 pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

Nous en venons à la présentation du second rapport.

M. D. DAVIES (Royaume-Uni), rapporteur de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – Contrairement à M. Gunnarsson, je n’ai jamais été accusé de faire partie de la mafia du politiquement correct ! Nos deux rapports bénéficient du soutien de nombreux responsables politiques qui ont pourtant des points de vue assez différents. Je me félicite de l’appui apporté par la commission et de l’excellent travail réalisé.

Le racisme dans la police est-il un problème ? Oui. Est-ce un problème répandu ? Oui. La police est confrontée à cette difficulté dans tous les Etats membres, voire dans tous les pays du monde. Ce problème est-il profondément enraciné ? Je ne le crois pas, car, dans leur grande majorité, les forces de police s’acquittent fort bien de leurs tâches et cela alors même qu’elles travaillent parfois dans des conditions dangereuses. Si ce rapport expose certains problèmes, il n’en faut pas moins garder à l’esprit que la police effectue le plus souvent un excellent travail.

Je me suis rendu dans un bureau de police à Londres. J’ai moi-même travaillé huit ans dans les forces de police britanniques à Londres. Une très forte proportion des policiers était issue de groupes ethniques différents et je me suis toujours félicité de l’excellente atmosphère qui régnait dans ce commissariat.

Nous nous sommes également rendus en Allemagne, où nous avons assisté à une séance de formation dans un lieu construit sur les vestiges d’un camp de concentration. Les stagiaires sont emmenés dans ce lieu, où on leur rappelle les événements qui s’y sont déroulés. Tout le monde en garde une impression forte et l’idée qu’il ne faut plus jamais que cela se reproduise. À ce titre, il faut rendre justice au gouvernement allemand pour tout ce qu’il réalise en ce sens et pour toutes les actions de lutte contre le racisme et l’intolérance qu’il entreprend.

En Grèce, j’ai vu des personnes détenues dans des conditions qui m’ont semblé inacceptables. Elles étaient dans des centres de détention, entassées dans des cellules qui auraient au maximum accueilli six ou sept personnes au Royaume-Uni. Les forces de police déploraient la situation et nombre de fonctionnaires apportaient des cigarettes et des boissons aux détenus. Comme vous le constatez, les situations diffèrent beaucoup d’un pays à l’autre.

Mon rapport porte sur les solutions susceptibles d’être mises en œuvre. Lorsque je rencontre des officiers de police, je leur dis que j’ai fait le même travail qu’eux et que donc il ne s’agit pas pour moi de les critiquer, mais de leur expliquer que lutter contre le racisme est positif aussi pour la police et pour leur travail.

Disposant de peu de temps, je me limiterai à présenter quelques points saillants de mon rapport.

J’aimerais qu’il y ait davantage de représentants des minorités ethniques parmi les forces de police européennes. De nombreux efforts ont été réalisés au Royaume-Uni, mais beaucoup reste à faire. Il est nécessaire que les forces de police et que les communautés elles-mêmes comprennent qu’il serait tout à leur avantage mutuel que les forces de police comptent plus de gens issus issues des minorités ethniques. Il est par ailleurs essentiel que les communautés minoritaires apportent leur soutien à la police.

La formation à la diversité est centrale, mais il faut qu’elle soit réalisée efficacement. Je me suis rendu compte que certaines formations à la diversité étaient totalement contre-productives. Or, elles ne sont utiles que si elles sont réalisées de manière appropriée. Les officiers de police doivent comprendre que la fouille d’une personne peut constituer une atteinte aux droits de celle-ci. Ils doivent s’adresser respectueusement à elle et lui présenter leurs excuses avant de commencer à la fouiller.

En Allemagne, les officiers de police devraient être identifiables, non pas nécessairement par leur nom, mais il conviendrait pour le moins que les autorités disposent des moyens de mener une enquête sur les officiers de police. Ceux-ci m’ont indiqué qu’une telle mesure serait susceptible de poser des problèmes de sécurité. En Irlande du Nord, les policiers ont des numéros d’identification. C’est donc possible.

Le rapport préconise un plus grand nombre d’officiers de liaison afin d’impliquer davantage les communautés minoritaires.

Il s’agit ici de voir ce qui peut être entrepris afin de permettre à la police de s’acquitter au mieux de sa tâche. Ce serait utile tant pour les officiers de police que pour les communautés.

J’espère recevoir le soutien des différents groupes politiques ; je pourrais ainsi expliquer aux officiers de police en quoi la résolution que nous aurions votée serait susceptible de les aider, entre autres, à obtenir le soutien du public.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le rapporteur, il vous restera 6 minutes 30 pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

La discussion générale est ouverte.

Mme LUNDGREN (Suède), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Permettez-moi tout d’abord de remercier, au nom de mon groupe, les deux rapporteurs pour ces deux textes très intéressants ; les sujets qui y sont abordés me semblent extrêmement importants pour nous tous dans cette institution.

Hier, nous avons commémoré l’Holocauste. Le Conseil de l’Europe a été créé en réaction aux événements qui ont eu lieu à cette époque. Notre institution a pour but de faire en sorte que ces choses ne se reproduisent jamais. Cela passe par la préservation de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme dans nos différents pays. En effet, c’est ainsi que nous avons pu nous débarrasser des menaces historiques que sont l’intolérance et le racisme – menaces qui auraient pu conduire à un nouvel Holocauste. Aujourd’hui, les crimes contre l’humanité peuvent être condamnés. Néanmoins, soyons certains que, si nous ne restons pas vigilants, des horreurs comparables pourraient se produire de nouveau.

Nous savons tous que, si nous voulons défendre les valeurs communes auxquelles nous avons tous souscrit, nous devons en discuter en profondeur entre nous, car il semble qu’elles reçoivent différentes interprétations. Il nous faut donc continuer à approfondir les choses afin d’enraciner ces valeurs dans nos sociétés, de façon à ce qu’elles ne restent pas lettre morte.

Les rapports montrent fort bien que, dans nos différents pays, on a pu constater l’augmentation du racisme et de l’intolérance. J’ai moi-même, avant Noël, été témoin de différents incidents. Cependant, j’ai également observé la réaction de la société : des centaines de milliers de personnes se sont levées pour s’opposer au racisme et à l’intolérance. C’est de cette manière que nos sociétés disent : « Non, plus jamais ; nous avons tiré les leçons de l’Histoire et nous ne voulons pas que cela se reproduise. » Il faut répondre aux actes d’intolérance et de racisme qui se font jour un peu partout en Europe. Cela dit, comme le précise le rapport, il faut aussi adopter une approche plus stratégique.

Pour ces raisons, j’espère que nous appuierons tous les deux rapports qui nous sont soumis et que nous changerons les choses avant que ce ne soient les tendances que j’ai évoquées qui ne nous changent.

Mme RENNER (Allemagne), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je souhaite moi aussi, au nom de mon groupe, adresser des remerciements à M. Davies pour son rapport très pertinent sur la lutte contre le racisme dans la police et à M. Gunnarsson pour son rapport proposant une stratégie pour la prévention du racisme et de l’intolérance en Europe. Se confronter à la question du racisme dans la société européenne, en particulier au sein de la police, est une démarche qui est plus d’actualité que jamais. J’en veux pour preuve la situation des Roms en Hongrie, ou encore celle des demandeurs d’asile en Grèce qui font l’objet de violences de la part des néonazis. N’oublions pas non plus que les mouvements extrémistes ont causé des morts en Allemagne, ce qui a suscité de nombreuses questions dans mon pays. En effet, il apparaît que la police a manqué à ses devoirs.

Il faut s’attacher, en particulier, à la définition du racisme institutionnel, dans la mesure où un certain nombre de responsables politiques ne semblent toujours pas savoir de quoi il s’agit. À cet égard, je voudrais non pas tant insister sur ce qui se trouve dans les deux documents qui nous sont présentés qu’ajouter quelques éléments. Pour ce faire, je citerai une recommandation de la commission d’enquête du Bundestag portant sur le travail des policiers. Cette commission a conclu que le groupe d’extrême droite NSU (Mouvement clandestin national-socialiste) a pu, pendant dix ans, préparer et réaliser des attentats contre les demandeurs d’asile malgré des investigations de la police. Cet exemple montre qu’il faut toujours se demander si le racisme n’est pas à l’origine des attaques contre les demandeurs d’asile et les étrangers.

Il faut également aborder la question du racisme dans la police. De fait, les forces de l’ordre peuvent avoir tendance à considérer que le racisme est un phénomène quotidien et qu’il en quelque sorte naturel que la police soit elle aussi touchée. Il faut donc s’assurer qu’on lutte contre la violence – et même la terreur – raciste au sein de la police. La commission d’enquête allemande sur les agissements de la NSU s’est penchée sur les pratiques existant en Grande-Bretagne s’agissant de la formation des policiers. Il s’agit de s’assurer que la police joue vraiment son rôle dans la lutte contre la violence raciste. Enfin, il faut un suivi, au niveau européen, s’agissant des comportements racistes au sein de la police. L’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne a mené une enquête sur les discriminations racistes et l’antisémitisme ; il serait bon que, sur le terrain, les policiers et leur hiérarchie puissent en bénéficier.

M. G. DAVIES (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe socialiste* – Lorsque la crise économique sévit et que les tensions augmentent, il ne faut pas se payer de mots : la sécurité de chacun doit prévaloir et il faut lutter contre les préjugés.

Le rapport MacPherson avait conclu que la police britannique était raciste. Or on s’aperçoit aujourd’hui que la mentalité des policiers n’a pas changé : la plupart d’entre eux restent racistes. À l’époque de l’affaire Stephen Lawrence, on comptait neuf officiers de police de haut niveau issus de minorités ethniques ; aujourd’hui, il n’y en a plus que sept. Les minorités ethniques non blanches représentent 14 % de la population, mais seulement 4 % des policiers. Par ailleurs, 126 officiers ont quitté les forces de police au motif qu’ils appartenaient à des minorités ethniques. Les plaintes déposées contre la police pour cause de racisme sont en général écartées d’un revers de main et une enquête a montré qu’il n’y avait aucune volonté de la part des forces de police de traiter de ces questions. En Allemagne aussi, on s’est aperçu que certains officiers de police étaient racistes. Il faut donc une formation spécifique des forces de police en la matière.

Certes, je me félicite de ces deux rapports, mais je crains que l’on considère qu’ils sont trop généraux. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement.

Au Royaume-Uni, un syndicat de policiers noirs a été accusé de racisme anti-blancs. Mais j’ai vu aussi dans ma circonscription des vicaires et des prêtres obligés de se soumettre à des prélèvements d’ADN tout simplement parce qu’ils étaient noirs. Il faut mettre un terme à cette intolérance raciale. Il est de notre devoir de garantir le changement et de ne pas laisser cela au hasard. Je vous demande donc d’appuyer mon amendement.

LE PRÉSIDENT – Je vous rappelle que le scrutin pour l’élection d’un juge à la CEDH au titre du Danemark est en cours. Il ne vous reste que trois minutes pour voter.

Mme QUINTANILLA (Espagne), porte-parole du groupe du Parti populaire européen* – A l’instar de mes collègues porte-parole des autres groupes, je félicite au nom de mon groupe les deux rapporteurs.

Vous avez en effet, Messieurs, rédigé chacun un excellent rapport, illustrant clairement la situation prévalant dans les pays européens. Le racisme et l’intolérance existent hélas dans nos pays, et c’est une forte préoccupation pour tous les membres de notre Assemblée, car ce sont des phénomènes qui portent profondément atteinte aux droits de l’homme et qui font des victimes.

Les traités internationaux parlent d’égalité et de lutte contre toutes formes de discriminations basées sur la race, le sexe ou la religion. Mais cette égalité est loin d’être une réalité dans la vie quotidienne de nombre de nos concitoyens. Nous avons beaucoup avancé dans l’intégration au cours des dernières années, dans un monde plus divers, plus interculturel, mais il nous faut continuer à travailler si l’on veut que le racisme et l’intolérance disparaissent de la vie de nos concitoyens dans tous les pays membres du Conseil de l’Europe.

C’est la raison pour laquelle ces deux rapports sont essentiels. Tous deux nous parlent d’abord de prévention, de changer les mentalités, de mettre en place des codes déontologiques et de prendre des mesures pour que nos concitoyens puissent véritablement vivre en paix et en sécurité, afin que disparaissent le racisme et l’intolérance.

C’est en cela, Messieurs Davies et Gunnarsson, qu’il importe plus que jamais aujourd’hui, dans cette Assemblée parlementaire, de parler de l’intolérance et du racisme qui sévissent un peu partout. Mais il est bon aussi que ces rapports parlent de la contribution des forces de sécurité et de police au bien de tous. Je voudrais dire très clairement, au nom de mon groupe, qu’il faut être reconnaissant à l’égard des forces de police, qui réalisent souvent un travail très difficile dans chacun des pays du Conseil de l’Europe, car c’est grâce à leurs efforts que les citoyennes et les citoyens peuvent vivre en paix et en sécurité.

En conclusion, permettez-moi de vous féliciter à nouveau, car toute marque d’intolérance et de racisme doit cesser et nous devons hausser le ton pour les empêcher.

LE PRÉSIDENT – Il est maintenant 17 heures.

D’autres membres de l’Assemblée désirent-ils encore voter pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme ?...

Il n’y en a point. Le scrutin est donc clos.

J’invite les scrutateurs, Mme Godskesen et M. Gražulis, à bien vouloir aller procéder immédiatement au dépouillement du scrutin au service de la séance.

Le résultat du scrutin sera proclamé, si possible, avant la fin de la présente séance ou, à défaut, à l’ouverture de la prochaine séance.

Nous reprenons maintenant notre débat.

M. MARIAS (Grèce), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Permettez-moi, au nom de mon groupe politique, de féliciter nos deux rapporteurs, MM. Davies et Gunnarsson, pour leurs rapports.

Hier, Monsieur le Président, c’était la Journée mondiale à la mémoire de l’Holocauste, une journée de mémoire pour les millions de victimes exterminées dans les camps de concentrations. Nous savons tous que le racisme est un phénomène social, culturel, politique et économique qui traverse le temps et mène les sociétés à des impasses. Nous savons également que les crises économiques, les difficultés, la récession qui dure et l’augmentation du chômage conduisent les jeunes, qui se sentent privés de toute possibilité de travail, à épouser ces phénomènes de racisme, de xénophobie et d’intolérance. De même, nous constatons que les pays d’Europe soumis à des flux d’immigration massifs sont particulièrement enclins à développer ce type de phénomènes, surtout lorsqu’il s’agit d’immigrés clandestins.

Notre époque ressemble beaucoup à la décennie 1930 et nous devons de toutes les façons possibles combattre cette violence raciste et ces crimes, avec une grande détermination et en utilisant tous les moyens légaux, afin de renforcer la démocratie. La démocratie parlementaire est un système de gouvernance qui n’est pas parfait, mais nous devons prendre les mesures nécessaires pour éradiquer ces pratiques racistes.

Je me réfère aux phénomènes que mentionne M. Davies dans son rapport. Il parle du parti extrémiste Aube dorée en Grèce et de son infiltration dans la police, ainsi que de la NSU en Allemagne, qui parfois opère sous couverture des forces de police. Nous devons combattre ces phénomènes criminels, car l’Aube dorée en Grèce et la NSU en Allemagne imposent aux pays membres de réagir de manière forte et responsable avant qu’il ne soit trop tard.

Nous devons réagir au niveau politique et institutionnel, mais nous devons surtout le faire en adoptant des mesures globales et en investissant bien plus massivement dans le système éducatif et dans les droits de l’homme.

LE PRÉSIDENT – Messieurs les rapporteurs, vous avez la possibilité de répondre immédiatement aux porte-parole des groupes qui viennent de s’exprimer. Souhaitez-vous le faire ?

M. GUNNARSSON (Suède), rapporteur* – Nous répondrons après avoir entendu tous les orateurs.

LE PRÉSIDENT – Nous poursuivons donc la discussion.

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* – Les Espagnols sont égaux face à la loi sans discriminations liées à la naissance, au sexe, à la religion, à l’origine sociale ou raciale. C’est là l’expression d’un principe posé à l’article 14 de notre Constitution. Mais ce principe, ce désir, ce devoir se traduisent-ils dans la réalité ? C’est le cas dans une grande mesure mais parfois aussi cela ne l’est pas. Est-ce particulièrement vrai parmi les policiers espagnols ? Non, il serait injuste de le dire.

Vous savez, j’ai été torturé dans les commissariats de police lorsque je luttais contre Franco et j’ai été emprisonné. Puis, en tant que juge d’instruction, j’ai assisté à des gardes à vue dans des commissariats espagnols et j’ai pu constater qu’au sein de notre police nationale, la Guardia Civil, un véritable changement de mentalité et d’état d’esprit s’était opéré depuis l’arrivée de la démocratie dans notre pays.

Mais que se passe-t-il depuis que la politique perd de sa légitimité, depuis que les citoyens croient de moins en moins en la démocratie parlementaire ?

En même temps que se développent ces tendances, un fascisme silencieux ne cesse de se répandre dans nos sociétés, selon lequel les dirigeants politiques seraient responsables de la crise économique et sociale. En temps de crise, les discours populistes font toujours recette. Ils véhiculent une propagande de méfiance à l’égard de l’autre, différent et donc forcément à l’origine de tous les problèmes de la société. À une époque, les juifs étaient la cible de ces discours de haine. Aujourd’hui, ce sont les musulmans, les noirs, les homosexuels, en somme tous ceux qui ne font pas partie de la majorité.

On ne peut lutter contre le racisme et l’intolérance sans intelligence et sensibilité. Je remercie les rapporteurs d’en avoir fait si bien la preuve. Le racisme et l’intolérance s’enracinent dans l’ignorance. L’éducation et la culture sont donc les meilleurs moyens de mettre un terme aux idées stéréotypées sur l’homme et la femme, le blanc et le noir, le juif et le musulman, le catholique et l’athée.

Certains fonctionnaires de l’Etat ont des comportements inacceptables. Les techniques de détection précoce des fonctionnaires racistes, avant l’entrée à l’école de police, ne sont certainement pas suffisamment efficaces. Néanmoins, nous devons rendre hommage à tous ceux qui luttent contre le racisme, y compris au sein des forces de police.

LE PRÉSIDENT – M. Conde, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme BLONDIN (France) – Le projet de résolution que nous soumet notre collègue M. Gunnarsson constitue un instrument important pour lutter contre la propagation des discours de haine. Je partage son point de vue selon lequel il convient de mettre l’accent sur la prévention et l’éducation. Ces deux rapports seront comme des lanceurs d’alerte dans les Etats membres du Conseil de l’Europe mais, il faut le souligner, la situation est variable selon les pays.

En France, différentes enquêtes d’opinion montrent que seuls 8 % des Français croiraient en l’inégalité des races. Mais le racisme n’a pas disparu, il s’est transformé en un racisme sociétal et culturel. Dans le contexte de crise financière, économique et sociale, l’individualisme et le repli sur soi, sur ses semblables, sur ses frontières, se renforcent ; le rejet de l’autre, de l’étranger, augmente ; et les extrémismes se durcissent. Tout cela est facilité par les nouvelles technologies et les réseaux sociaux, ce fameux cyberespace, dont on peut mesurer l’efficacité de la circulation de tous types d’informations et dont on voit les ravages qu’il fait chez les jeunes.

Le Conseil de l’Europe doit absolument défendre ses valeurs et ses objectifs. Des paroles c’est bien, mais des actes et le renforcement de nos cadres juridiques, c’est mieux.

Je voudrais rappeler à notre Assemblée le discours de la ministre française Najat Vallaud-Belkacem, ici même, l’an dernier, qui a mis en place un plan d’action et un cadre juridique certes, me direz-vous, pour l’égalité entre les femmes et les hommes et pour lutter contre les discriminations, mais lutter contre les discriminations, c’est lutter contre l’intolérance, contre le rejet de l’autre, contre le racisme.

Le ministre de l’Education nationale français, Vincent Peillon, déclarait lundi dernier dans un journal français : « Le meilleur rempart contre tous les préjugés qui conduisent au racisme et à l’antisémitisme, c’est l’instruction, la réflexion et le dialogue. »

Le Conseil de l’Europe est reconnu pour sa contribution à la lutte contre toutes les discriminations. Il est du devoir de notre Assemblée que de faire reculer cette poussée du racisme. C’est une tâche de longue haleine et il ne faut pas baisser la garde, car c’est le sommeil de la raison qui engendre des monstres.

Mme SCHOU (Norvège)* – Le racisme et l’intolérance perdurent malheureusement au sein de la société européenne. Pourtant, compte tenu de notre histoire, on aurait pu croire que l’on avait définitivement mis fin à la haine, en tant que discours, en tant que crime, mais aussi comme moyen de discriminer les minorités. En ce sens, les rapports qui nous sont aujourd’hui présentés sont d’une grande importance. J’encourage tous les membres de l’Assemblée à voter en faveur des projets de résolution et de recommandation.

La crise économique et les problèmes sociaux constituent un terreau fertile pour la haine. Lorsqu’une personne cherche désespérément un emploi ou lorsqu’un jeune s’inquiète pour son avenir, le réflexe est souvent de chercher un coupable à son malheur. Pointer du doigt les immigrés est évidemment bien trop simple ! C’est dans ce type de comportement que naissent la haine et la discrimination.

Dans son rapport, M. Gunnarsson met l’accent sur l’importance d’une législation contre les discours et les crimes de haine. Il rappelle l’importance de la prévention pour sensibiliser et éduquer la population. Je soutiens l’appel de M. Gunnarsson au Secrétaire Général en vue d’élaborer une stratégie du Conseil de l’Europe contre le racisme, la haine et l’intolérance en Europe. Néanmoins, il me paraît dans le même temps nécessaire de réfléchir à la manière dont nous pouvons améliorer la situation économique de l’Europe. Les difficultés économiques de l’Europe expliquent en partie pourquoi tant de personnes soutiennent des partis politiques qui diffusent des discours de haine. Les responsables politiques doivent être exemplaires afin que le racisme et l’intolérance ne contaminent pas le débat politique.

M. SIDYAKIN (Fédération de Russie)* – Pendant la Seconde guerre mondiale, le discours nazi a entraîné des milliers de personnes vers la haine. Le néonazisme que connaît aujourd’hui l’Europe et les tentatives de justifier des crimes pourtant traduits en justice par le tribunal de Nuremberg sont particulièrement inquiétants. Le racisme et la xénophobie sont au cœur des discours quotidiens de certains responsables politiques européens.

On oublie souvent que ce sont le malheur et la pauvreté qui ont conduit au nazisme et à la perte de liberté. Les marches de légionnaires qui ont lieu en Estonie en mémoire de la 20e division de la Waffen SS sont injustifiables, elles sont une honte pour l’Europe, elles salissent la mémoire de ceux qui ont défendu le continent contre le nazisme.

Le projet de recommandation inclut un appel au Secrétaire Général en vue d’élaborer notamment des programmes scolaires prévenant le racisme, la haine et l’intolérance. Rappelons que le président de la Douma avait lui-même mis en avant dans cette enceinte la nécessité de parler du procès de Nuremberg et de montrer aux écoliers des images des millions de Polonais, de Russes et de Juifs éliminés dans les camps allemands.

En Lettonie, les non-citoyens ont l’interdiction d’exercer quelque 70 métiers, de participer à des mouvements ou partis politiques et à l’action municipale ; dans les prisons d’Estonie, on établit même des distinctions entre prisonniers en fonction de la maîtrise de la langue nationale ; les non-citoyens n’ont pas le droit de vote. Le Parlement européen a déjà signalé ces faits. Pourtant, lorsque l’on vous interpelle sur cette grave situation, vous répondez que c’est à l’Union européenne de se charger du suivi de ses Etats membres. Mais il s’agit aussi d’un Etat membre du Conseil de l’Europe, donc éligible à la procédure de suivi. En Lettonie, des personnes sont victimes de terribles discriminations pour des raisons linguistiques ; il n’en est question ni dans le projet de recommandation, ni dans le projet de résolution, ce qui est très regrettable.

Mme ZOHRABYAN (Arménie) – L’alerte donnée par le rapport appelle d’urgence une action concrète, sans quoi le jour n’est pas loin où, en Europe, l’intolérance, le racisme et la xénophobie seront considérés comme faisant partie du mode de vie. Les partis extrémistes parviennent à entrer dans bien des parlements européens grâce au soutien de la société.

Je suis d’accord avec le rapporteur : pour lutter contre le racisme et l’intolérance, c’est d’abord aux hommes politiques, dont ceux de notre Assemblée, d’agir. D’autant que différentes institutions du Conseil de l’Europe recommandent clairement d’exclure des parlements nationaux les discours exprimant racisme et intolérance. Mais est-ce ainsi que les choses se passent en réalité ?

Il y a deux ans, membre de la délégation auprès de l’Assemblée parlementaire Euronest, j’ai participé à la session régulière à Bakou. Eh bien, mes chers collègues, le président d’Azerbaïdjan, dans l’enceinte du parlement azerbaïdjanais, en présence de toute la délégation des parlements européens, donc arménien, a prononcé un discours qui peut être considéré comme un véritable chef-d’œuvre d’intolérance et de racisme. Il a qualifié de fascistes et de profanateurs tous les députés arméniens présents et le peuple arménien en les accusant faussement de péchés absurdes. Que s’est-il alors passé ? Quelqu’un d’autre que les membres de la délégation arménienne a-t-il expliqué à Aliyev qu’il ne convient pas au Président d’un pays membre du Conseil de l’Europe de prononcer des discours qui rappellent l’Inquisition ? Non, bien sûr !

Cher rapporteur, vous dites dans votre rapport que la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance, l’ECRI, propose de criminaliser les discours racistes. J’approuve pleinement cette proposition, et je propose donc de lancer des poursuites pénales contre le Président azerbaïdjanais, dont tous les discours où il est question de l’Arménie, ou même d’un seul Arménien, constituent des manifestations exceptionnelles de racisme, de xénophobie, d’arménophobie. Pourquoi l’assassin Ramil Safarov est-il considéré comme un héros dans son pays, sinon à cause de la honteuse atmosphère anti-arménienne qui domine en Azerbaïdjan, où l’on enseigne aux enfants dès le plus jeune âge que les Arméniens sont leurs ennemis ? Le journaliste azerbaïdjanais Oulquer Ismayilgzi a écrit à propos de l’arménophobie dans les manuels scolaires azerbaïdjanais : « Nous éduquons toute une génération dans la haine envers les Arméniens. Ce n’est pas admissible. »

Il est temps de passer des paroles aux actes. Ce rapport nous fournit l’occasion d’entreprendre des actions concrètes : ne la manquons pas !

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – Ce rapport touche au cœur même de la mission du Conseil de l’Europe. Nous le savons tous, le racisme et l’intolérance fleurissent dans de nombreux Etats membres de notre Organisation. Sans entrer dans les détails, il importe de déterminer ce qu’il faut faire.

De ce point de vue, j’approuve le projet de recommandation, qui propose une stratégie de prévention, de sensibilisation et de conseil juridique auprès des Etats membres pour légiférer sur les discours de haine et les crimes haineux. Voilà qui pourrait servir de suivi de notre propre rapport « Vivre ensemble au xxie siècle ». En outre, nous devons agir dans nos propres pays et parlements pour y faire progresser la lutte contre le racisme et l’intolérance.

Nous avons récemment débattu des procédures de suivi, que certains pays membres désirent remplacer par des suivis thématiques portant sur les 47 Etats membres. Je partage en partie leur point de vue, mais je ne pense pas qu’il faille remplacer les procédures de suivi. Tous les Etats membres doivent satisfaire à leurs obligations de respect de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit. Aucun compromis n’est possible en la matière. Certaines violations des droits de l’homme doivent faire l’objet d’un suivi dans tous les pays ; le racisme et l’intolérance en font partie.

Nous disposons déjà d’un système de suivi de ces questions grâce à l’ECRI, qui publie des rapports par pays et par thème. Depuis un certain temps, l’ECRI sonne l’alarme à propos de l’augmentation des propos racistes, antisémites et xénophobes, y compris, dans plusieurs Etats membres, au sein des partis dominants. Mais ses rapports ne suscitent guère l’attention de notre Assemblée et de nos parlements. En 2014, l’ECRI se rendra en Grèce, en Hongrie, en Norvège et en Pologne et publiera des rapports sur l’Allemagne et la Belgique. Elle a conclu que les recommandations doivent être prioritairement mises en œuvre en Arménie, en Bosnie-Herzégovine, en Espagne et en Turquie. Pour nous, le plan d’action ici proposé fournit un bon point de départ.

Mme FABER-VAN DE KLASHORST (Pays-Bas)* – Pendant des décennies, les femmes aux Pays-Bas se sont battues pour l’égalité des droits. Aujourd’hui ils sont inscrits dans la législation mais ils s’effondrent dans la pratique. Par exemple, la ville d’Utrecht a ouvert deux bureaux d’information dans la mosquée Omar Al Faroek, un pour les hommes et un pour les femmes. C’est une forme de ségrégation. La municipalité d’Amsterdam enregistre des mariages polygames, bien que la polygamie soit répréhensible aux Pays-Bas. Par conséquent, la législation n’est pas appliquée.

En Europe, l’antisémitisme croît. L’an dernier à Toulouse, en France, le djihadiste Mohammed Merah a abattu un rabbin et trois enfants, un crime gratuit, simplement parce qu’ils étaient juifs. L’augmentation de la violence contre les juifs est à ce point inquiétante que le gouvernement israélien va sans doute adopter un plan pour inviter les juifs français à se rendre par dizaines de milliers en Israël. L’Europe n’est pas prête à assurer la sécurité aux juifs européens. Ne veut-elle pas le faire ?

Pendant les années 70, au moment du choc pétrolier, l’Europe a assuré ses réserves en lançant le dialogue euro-arabe. L’une des conditions imposées à l’Europe était la reconnaissance de l’OLP, qui signifiait l’acceptation tacite de sa charte appelant à la destruction de l’Etat d’Israël. L’Europe a été obligée d’ouvrir ses frontières aux émigrants non occidentaux et à leur culture qui a dû être reconnue égale à la culture occidentale. Les émigrants ont eu des droits égaux pour la culture et la religion. C’est ainsi que l’islam s’est ancré fermement en Europe.

L’islam idéologique est lié au Coran, à la charia. La législation que cette idéologie implique ne donne pas les mêmes droits aux femmes, aux homosexuels et aux non-croyants. L’élite l’accepte au nom de la liberté de religion, mais cela ne permet aucune critique de l’islam. Ce rapport est une promotion du dialogue euro-arabe, alors que l’islam est source d’intolérance en Europe. La démocratie fait l’objet d’abus pour que l’islam puisse s’ancrer fermement en Europe.

Ainsi, M. Erdogan, Premier ministre de la Turquie a déclaré : « La démocratie c’est comme un train : arrivé à destination vous descendez. » Pendant ce temps, l’élite européenne continue de ramper devant les pays islamistes et de donner à manger au crocodile. Comme l’a dit Winston Churchill : « Espérons que le crocodile les mangera en dernier. » Acceptez l’islam signifie la fin de l’Etat de droit dans les démocraties occidentales.

Je remercie les rapporteurs pour leur travail.

Mme STRIK (Pays-Bas) * – Les rapporteurs ont mis en avant deux éléments importants de nos sociétés, le racisme et l’intolérance, dangereux si on en nie l’existence. Dans les pays du Conseil de l’Europe, on lutte contre cela, mais la crise économique a multiplié les manifestations de racisme.

Si les citoyens doivent se regarder dans un miroir, les politiques encore plus. L’égalité des droits doit être respectée pour tous dans la société, ce qui implique des mesures d’éducation et des politiques actives. La participation des migrants à la société est essentielle. Tout crime de discrimination doit être sanctionné. Contre les actes racistes, on doit pouvoir déposer des plaintes entrainant de véritables poursuites.

J’en viens au second rapport. S’il existe un racisme institutionnel dans la police, on ne pourra pas le combattre dans la société. La police britannique et allemande connaissent ce racisme. L’an dernier Amnesty International a accusé la police néerlandaise de profilage raciste. Il faut garantir le droit à un traitement égal pour tous. Des crimes peuvent être inspirés par le racisme. Des migrants innocents peuvent être accusés du fait de préjugés. Le profilage ethnique augmente ce risque. Aux Pays-Bas une base de données avec empreintes digitales a été mise en place pour tous les migrants, que la police a le droit d’utiliser même en l’absence de suspicion concrète. Les données sur les migrants sont recherchées plus souvent que pour les autres citoyens. Ce seul fait crée un risque de stigmatisation.

Le travail du Conseil de l’Europe dans la lutte contre la discrimination est important. La publication du rapport de l’ECRI au Pays-Bas, qui conclut que le gouvernement néerlandais doit agir davantage en ce sens, a provoqué un large débat. C’est très bien car une prise de conscience est nécessaire, mais c’est insuffisant. Il faut suivre les recommandations de l’ECRI. Nous devons obliger nos gouvernements à les respecter. Il ne faut pas nous gargariser de mots mais faire le nécessaire dans nos pays.

5. Élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre du Danemark
(résultats du scrutin)

M. LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, j’interromps un moment le débat pour vous donner les résultats de l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme, au titre du Danemark.

Nombre de votants : 159

Bulletins blancs ou nuls : 2

Suffrages exprimés : 157

Majorité absolue : 79

Les suffrages ont été exprimés comme suit :

- Mme Karsten Hagel-Sorensen, 26 voix

- Mme Nina Holst-Christensen, 48 voix

- M. Jon Fridrik Kjolbro, 83 voix

M. Kjolbro ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, je le proclame juge à la Cour européenne des droits de l’homme, au titre du Danemark. Son mandat de neuf ans commence au plus tard trois mois à compter de son élection.

6. Débat conjoint (suite)

M. LE PRÉSIDENT – Nous reprenons le débat conjoint.

M. KALMAR (Hongrie) * – Ces derniers temps, la commission sur l’égalité et la non-discrimination a préparé des rapports très importants pour l’Europe. Ils reposent les uns sur les autres. Aujourd’hui, nous parlons de racisme et d’intolérance, plus tard ce sera la migration et les migrants. Au mois d’avril, j’espère que nous pourrons débattre de la tradition et des minorités nationales. Ces questions sont liées. Les solutions doivent reposer sur la tolérance et la démocratie.

Je félicite les rapporteurs et la commission dans son ensemble pour leur travail bien organisé et bien planifié.

Au chapitre 7, le rapporteur évoque le développement des partis radicaux. Il cite comme exemple le parti Aube dorée, en Grèce. M. Gunnarsson pose une question importante et juste : pourquoi les électeurs ont-ils voté pour ce parti ? Il faut une réponse ouverte et honnête, sinon la situation s’aggravera.

Je suis d’accord avec M. Diaz Tejera. Nous ne devons pas laisser nos nations perdre leur confiance dans les institutions démocratiques. Il existe des outils démocratiques pour résoudre les problèmes de nos sociétés européennes. Le grand atelier pour forger ces outils, c’est le Conseil de l’Europe. Si nous échouons, la politique de la force risque d’être de retour.

Je suis pour la classification des crimes et leur enregistrement. Malheureusement, au Conseil de l’Europe il y a une mauvaise compréhension des droits personnels. Tous les pays n’enregistrent pas les crimes raciaux ou ethniques. On ne peut donc pas tirer les conclusions qui s’imposent.

En 2005, dans mon pays, la Hongrie, l’autorité pour l’égalité de traitement a été créée. En 2009, elle a établi un réseau de rapporteurs qui apportent gratuitement leur concours à ceux qui sollicitent leur aide. Grâce à des fonds européens et hongrois, cette autorité a pu commencer des études sur la discrimination des Roms et des personnes handicapées et retraitées.

Mme VIROLAINEN (Finlande)* – Je veux à mon tour remercier les deux rapporteurs pour leur excellente contribution à la lutte contre le racisme et l’intolérance en Europe.

Je soulèverai cinq points qui pourraient faire l’objet d’autant de messages lancés par les parlementaires en vue de promouvoir la tolérance en Europe.

Premièrement, nous avons, nous autres parlementaires, le devoir de montrer la voie à nos peuples, sans nous contenter de les suivre. Nous devons avoir le courage d’élever la voix contre les discours d’intolérance. En novembre dernier, après que je me suis exprimée à la conférence de Prague, j’ai reçu plusieurs courriels haineux. Cela montre l’urgence du problème ; nous ne devons pas nous laisser réduire au silence.

Deuxièmement, en tant que législateurs, nous avons la responsabilité de mettre en œuvre efficacement des législations antiracistes. Or, malgré les progrès importants qui ont été accomplis en la matière, force est de reconnaître qu’il existe encore du racisme institutionnel.

Troisièmement, nous avons la responsabilité de nous attaquer aux racines mêmes de la haine. Pour ce faire, les politiques d’intégration devraient impliquer davantage à la fois les migrants et les populations d’accueil. Il convient d’adopter en la matière une approche constructive et d’utiliser des arguments rationnels.

Quatrièmement, nous devons être particulièrement vigilants durant les campagnes électorales. Malheureusement, certains candidats et partis politiques présentent les migrants et les réfugiés comme une menace ou un poids pour la société, ce qui accroît les réactions négatives à leur encontre. Je lance donc un appel solennel aux responsables politiques afin qu’ils prennent leurs responsabilités durant les débats sur les questions migratoires et qu’ils luttent contre la rhétorique xénophobe. Les médias ont quant à eux l’immense responsabilité de ne surtout pas déformer les faits.

Enfin, nous avons besoin de nouvelles solutions pour faire face aux migrants irréguliers, aux demandeurs d’asile et aux réfugiés. La tragédie de Lampedusa, l’année dernière, a servi d’avertissement aux responsables politiques de toute l’Europe : les politiques européennes visant à faire du continent une forteresse ne fonctionnent pas et sont inhumaines. La défense des droits de l’homme doit s’attacher en priorité au sort des plus faibles.

Aucun enfant ne nait raciste : les points de vue intolérants viennent des adultes et des discours publics. Il convient de mettre un terme à cette atmosphère de haine. Faisons-le ensemble !

M. TIMCHENKO (Fédération de Russie)* – Nous examinons un thème vraiment d’actualité et les rapporteurs méritent tous nos remerciements pour leur travail d’une très grande qualité.

Dans notre monde interconnecté, le « chacun pour soi » n’est plus de mise. Il existe aujourd’hui de forts mouvements migratoires ; les races, les peuples sont mélangés. Dans ces conditions, le racisme et l’intolérance non seulement gênent le fonctionnement normal de l’Etat et de la société, mais ils le rendent tout à fait impossible. À la base des manifestations d’intolérance et de racisme, il y a l’« étranger », « l’autre », sur lequel on rejette la faute, en particulier dans des situations de crise économique et sociale. Cela est très préoccupant.

Avons-nous raison de vouloir une stratégie unique de lutte contre le racisme et l’intolérance pour l’Europe ? La réponse à cette question ne peut être univoque. Bien entendu un certain nombre de bonnes pratiques ont été adoptées par nombre de pays européens : par exemple, l’éducation à la citoyenneté des jeunes, afin de les rendre tolérants, ouverts et qu’ils acceptent les autres visions du monde, les croyances et les convictions de chacun ; le repérage des cas de discrimination raciale et d’intolérance, ou encore l’adoption d’une législation pour interdire ce type de manifestations.

Qu’en est-il de la mise en œuvre de ces principes sur le terrain ? Dans mon pays, à la fin de l’année dernière, la Douma a pris une série de mesures visant à transférer aux autorités locales – régions et municipalités – la responsabilité en cas de manifestations racistes sur leur territoire. Mais il n’existe pas de solution unique ; chaque pays doit tenir compte de ses spécificités. La Russie étant depuis l’origine un pays plurinational, nous nous basons sur la cohabitation entre les cultures pour lutter contre l’intolérance.

Un grand philosophe russe, Ivan Illich, a dit que le sang qui n’est pas le nôtre ne devait être ni dénaturé ni transformé ; il ne s’agit pas d’étouffer la vie qui nous est étrangère, celle des autres clans, des autres horizons, mais au contraire de permettre à chacun de respirer, de travailler, de prier à sa manière, et de prendre le meilleur de chacun. Cette recette n’est peut-être pas une panacée, mais elle est utile à tous.

Mme TAKTAKISHVILI (Géorgie)* – J’aimerais aborder ce débat du point de vue de l’est de l’Europe et, en particulier, de mon pays : la Géorgie.

Je remercie les deux rapporteurs et la commission sur l’égalité et la non-discrimination d’avoir donné la priorité à ce sujet ; nous avons le devoir d’en discuter au sein de cette Assemblée, car, tous les jours, dans nos pays, des personnes sont victimes d’actes racistes et de crimes haineux.

La Géorgie a été victime à plusieurs reprises, en tant que pays, de tels actes ; les citoyens géorgiens ont été confrontés au nettoyage ethnique à deux reprises dans les vingt dernières années : d’abord dans les années 1990, puis en 2008, lors de l’invasion russe. Nous avons à cette époque subi une campagne de haine orchestrée par la Russie ; des milliers de Géorgiens ont été déportés et nous avons eu à déplorer de nombreuses victimes. La Cour européenne des droits de l’homme a été saisie, mais les remèdes ne pourront intervenir qu’à long terme. C’est pourquoi il faut prendre des mesures à l’échelon national.

Or la situation en Géorgie elle-même s’est détériorée. Des citoyens géorgiens ont été arrêtés du fait de leurs croyances religieuses, des immigrés africains ont été injuriés, des actes de vandalisme ont eu lieu au moment des célébrations de Hanouka ; la réponse policière n’a jamais été à la hauteur.

Je voudrais également insister sur la dimension politique de la rhétorique xénophobe qui, à l’est de l’Europe, est utilisée pour diaboliser les valeurs européennes. J’ai reçu un jour un jeune garçon de 19 ans qui disait ne pas vouloir appartenir à l’Europe parce qu’il avait peur qu’on l’oblige à se marier avec un autre garçon ! La propagande contre les lesbiennes, les gays, les bi et transsexuels vise ainsi non seulement à harceler les représentants de la communauté LGBT, mais aussi à attiser les sentiments anti-européens dans notre pays. C’est inadmissible ! Il convient de prendre des initiatives pour encourager non seulement la prévention, mais aussi la sanction du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance.

M. GOZI (Italie)* – Un spectre est revenu en Europe aujourd’hui. Malgré tout ce que nous avons réalisé après la seconde guerre mondiale, tout ce que nous avons commémoré hier, ce spectre- là – celui du racisme, de la xénophobie – dévore nos vies, se nourrit de la crise sociale et économique et cherche des symboles contre lesquels se déchaîner. Les partis néonazis et fascistes les réutilisent. Il faut donc agir aujourd’hui comme autrefois, et même encore plus fortement.

C’est la raison pour laquelle j’encourage vivement l’élaboration d’une nouvelle stratégie contre le racisme au sein du Conseil de l'Europe, comme le propose M. Gunnarsson. Je pense que le Comité des Ministres doit s’en charger, appuyé par le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe.

Le rapport Gunnarsson rappelle les incidents qui se sont produits dans plusieurs pays en Europe, y compris en Italie. Cela fut pour nous tous un choc de voir, dans le cadre de ses fonctions, notre ministre de l’intégration, Cécile Kyenge, être victime d’insultes et d’attaques verbales, y compris de la part de politiques représentés au Parlement, qui devraient être des modèles de tolérance et non pas des instigateurs de la haine. Les ministres de l’Union européenne ont réagi et ont adopté à Rome une déclaration sur la responsabilité des politiques dans la lutte contre le racisme. Il faut soutenir cette déclaration, et des codes de conduite doivent être appliqués dans tous les parlements.

La réponse est toujours la même : éducation, éducation, éducation. À laquelle j’ajouterai : information, information, information. Il faut promouvoir des campagnes de sensibilisation dans nos Etats membres, en lien avec la campagne « No Hate Speech » sur les réseaux sociaux. Il faut aussi, fin 2014, lancer une campagne d’information et de formation contre l’instigation à la haine et au racisme, afin de modifier les mentalités. Le racisme est en train de se diffuser dans notre continent, il faut donc prévoir des ressources spécifiques pour mettre en œuvre des campagnes dans les écoles, parce que c’est à l’école que nous pourrons gagner la bataille pour nos valeurs, des valeurs qui ne sont pas négociables.

M. LOUKAIDES (Chypre)* – Je suis entièrement d’accord avec M. Gunnarsson pour dire que la stratégie de lutte contre le racisme et l’intolérance doit mettre l’accent sur la prévention. Cela ne peut être réalisé de manière effective qu’en éliminant les racines profondes qui conduisent à ce phénomène et à sa propagation.

Tout d’abord, nous devons nous concentrer sur les graves inégalités socioéconomiques qui caractérisent le monde, l’Europe et ses sociétés. Ces inégalités, malheureusement, ont augmenté, exacerbant l’immigration et, en conséquence, le racisme. L’immigration de masse n’est pas seulement le résultat de la pauvreté et des conditions sociales tragiques que connaissent les sociétés à cause du vol de leurs ressources économiques par les monopoles nationaux et multinationaux, elle est également la conséquence de guerres injustes, d’interventions militaires étrangères qui conduisent à des crises humanitaires et à de nouvelles vagues de migration.

Par ailleurs, pour ce qui est des principaux pays d’accueil de l’Europe, en particulier sur les rives sud de la Méditerranée, des politiques d’austérité néolibérales ont été mises en place, créant les conditions d’une marginalisation et d’un appauvrissement de vastes pans de la population.

Ces différentes réalités, en plus du dumping social et de l’exploitation brutale des immigrants par les employeurs, ont créé un terreau fertile pour le populisme, le racisme et les groupes d’extrême droite. Il faut y ajouter une perte d’intérêt général des populations envers les institutions, tant nationales qu’européennes, qui ont été incapables de redresser la situation et de trouver des solutions au problème. En conséquence, une stratégie de prévention devrait viser à l’élimination des inégalités, de la pauvreté, de la marginalisation sociale, pour assurer une réelle justice sociale, l’égalité, la solidarité.

Parallèlement, il faut une approche stratégique de lutte contre le racisme mettant l’accent sur la prévention dans le plein respect des principes du droit international, des droits de l’homme et de la Charte des Nations Unies.

Comme l’indique le rapporteur, une législation antidiscriminatoire doit être adoptée, mais également mise en œuvre. La société civile a elle aussi un rôle essentiel à jouer. Elle doit se montrer active et demander des comptes aux Etats sur leurs actions et leurs lacunes.

Les autorités indépendantes responsables de la lutte contre la discrimination, tous les groupes de défense des droits de l’homme doivent être soutenus sur le plan financier et juridique pour être efficaces.

Il est nécessaire de combattre les stéréotypes qui lient les minorités à la pauvreté et au crime. Il faut des mesures éducatives pour renforcer la confiance entre minorités et majorité. Les médias, y compris les médias sociaux, ont un rôle crucial à jouer dans la lutte contre le racisme et l’intolérance pour créer une véritable culture de tolérance et de respect de la diversité.

M. CASEY (Canada, observateur)* – Le Canada est souvent cité comme modèle de l’inclusion, de la tolérance, du respect des autres. Nous le reconnaissons, mais nous ne devons pas oublier qu’il reste encore beaucoup à faire pour traiter des torts dont ont souffert dans le passé certaines minorités.

En 1982, le Canada a adopté le Charte des droits et libertés, un document clé qui a notamment été inspiré par la Convention européenne des droits de l’homme. La Charte a bien servi le Canada dans la protection de ses minorités, qu’elles soient raciales, ethniques, religieuses ou linguistiques. Néanmoins, certains groupes continuent de faire face à des inégalités.

Les peuples aborigènes de notre pays ont connu des discriminations systémiques. D’abord, par les colons venus d’Europe, puis par les différents gouvernements canadiens de quelque bord politique qu’ils fussent. Ces aborigènes continuent de faire l’objet de marginalisation. De nombreuses communautés aborigènes sont confrontées à la pauvreté et à l’inégalité socioéconomique.

La relation du Canada avec ces groupes aborigènes en matière de police n’est pas nécessairement un objet de fierté. Le monde en a pris conscience en 1989 lorsqu’une commission d’enquête a publié un rapport concernant l’arrestation et les poursuites de Donald Marshall, un aborigène qui avait été condamné à tort pour meurtre. La commission avait relevé que dans la province où M. Marshall avait été arrêté, le racisme était fort et avait contribué à son arrestation. Je citerai également l’affaire des Mohawks de Kanesetake qui a conduit à de vastes réformes policières dans notre pays.

Avec le soutien de notre gouvernement national et de nos gouvernements de province, plus de 162 accords ont pu être signés pour respecter les peuples natifs. Ce sont les communautés aborigènes qui gèrent elles-mêmes leur propre service de police, y compris le recrutement des officiers de police.

En 2006, peu de temps après avoir pris ses fonctions, le Premier ministre du canada, Stephen Harper, est venu devant notre Chambre pour demander pardon aux peuples aborigènes au nom des Canadiens. Tous les partis politiques se sont félicités de ces excuses qui doivent maintenant être transformées en actions concrètes. Il s’agit de résoudre tous les problèmes que connaissent aujourd’hui les peuples aborigènes car nombreuses sont les communautés aborigènes qui vivent dans une pauvreté grave. En outre, les aborigènes sont largement surreprésentés dans notre population pénitentiaire. Il convient donc d’adopter une politique de la police dans ces communautés qui soit respectueuse de la dignité des aborigènes et de leur culture. Il est important aussi d’avoir une justice réparatrice et une justice pénale réformée et respectueuse.

Il s’agit, comme cela a été dit, de tenir compte de la position des Etats membres. Il faut lutter contre le racisme et être inclusif.

Je vous remercie de m’avoir permis de partager avec vous un point de vue canadien.

LE PRÉSIDENT – M. Badea, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme SANTERINI (Italie)* – Le racisme et l’antisémitisme n’ont pas disparu en Europe. Il est triste de devoir le reconnaître alors que nous avons célébré hier, le 27 janvier, la mémoire des victimes de l'Holocauste.

Je remercie les deux rapporteurs d’avoir proposé une stratégie globale et d’avoir mis l’accent sur les aspects institutionnels, les forces de police et les partis politiques. Toutefois, j’appellerai votre attention sur la prévention, c’est-à-dire ce qui précède les actes de racisme, avant que ne s’exprime le racisme de façon violente à l’encontre des migrants, tels que les Roms, qui sont les boucs émissaires de la crise économique.

En amont, on assiste à des formes de néo-racisme, souvent entre jeunes, dont nous n’avons pas encore clairement pris la mesure ni vraiment calculé les effets. Le néo-racisme ne s’appuie pas simplement sur l’idée d’une hiérarchie entre les races ou sur l’idée que des races seraient inférieures. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, on cache le racisme derrière le politiquement correct : nous sommes confrontés à un racisme quotidien, banal, qui s’exprime facilement et qui n’en est pas moins dangereux. L’internet est, à cet égard, un espace public où se diffuse ce langage, notamment entre jeunes. Ce néo-racisme est voué à devenir une intolérance, un antisémitisme, un mouvement antimusulman. Il ne se fonde pas sur la race, mais sur la religion ou sur bien d’autres aspects. Il est dangereux parce qu’il finit par se traduire par des actions ouvertes de racisme.

Le Conseil de l'Europe, qui lutte contre l’intolérance depuis toujours, doit identifier ces nouvelles formes de racisme des jeunes pour les contrer par des politiques éducatives et culturelles, en analysant ce racisme ordinaire qui, un jour ou l’autre, risque de se transformer en racisme violent. Parce que l’entité européenne est un antidote contre l’intolérance, il nous faut lutter ensemble. C’est ainsi que nous comprendrons mieux ces changements qui sont en train de naître dans la tête des jeunes.

M. CHAOUKI (Italie)* – Il nous est impossible de parler de lutte contre le racisme sans évoquer un certain contexte politique en Europe. Aujourd’hui, des mouvements et des partis politiques s’affichent en tant que xénophobes et racistes, ont droit de cité et s’imposent toujours plus. Aucune loi ne peut à elle seule endiguer un tel phénomène. Il convient de lancer une véritable campagne pour provoquer une réaction citoyenne, faute de quoi nous assisterons à des vagues considérables de racisme et d’antisémitisme au cours des prochains mois.

On laisse accroire que les musulmans, qui sont pourtant présents en Europe depuis longtemps, intriguent, complotent, menacent l’Europe. Pourtant, cette minorité devrait être reconnue comme partie intégrante de la collectivité, de la communauté, de la population européennes.

Je comprends les objectifs poursuivis qui préconisent d’appliquer la Convention européenne contre la cybercriminalité. Certes, il faut permettre la liberté des échanges sur les réseaux sociaux, mais il est nécessaire de responsabiliser des prestataires comme Facebook et d’autres hébergeurs qui doivent prendre conscience de la responsabilité qui leur incombe lorsqu’ils diffusent des messages racistes.

Quant au racisme dans la police, il faut assurer une plus grande diversification des forces de l’ordre et inclure dans leurs effectifs des personnes issues de l’immigration, des personnes différentes de la majorité de la population. J’évoquerai l’exemple de Lampedusa où deux militaires italiens, l’un d’origine érythréenne, l’autre d’origine marocaine, jouent un rôle considérable et très efficace de médiation entre les réfugiés hébergés à Lampedusa et les autorités italiennes. Lampedusa n’est pas que mort et drame, c’est aussi une population et sa mairesse qui sont un exemple d’accueil, d’hospitalité et d’humanité. Il faut reconnaître les efforts considérables que cette ville et ses citoyens ont réalisés depuis plusieurs mois.

Mme PIPILI (Grèce)* – Mon intervention portera principalement sur le rapport de M. Davies. Ce rapport et l’action parlementaire nous aideront certainement à éradiquer la montée du racisme dans la police.

Nous pensons que les hommes politiques doivent condamner publiquement toutes formes de discriminations raciales, car ces condamnations publiques aident grandement les officiers de police à mener leurs enquêtes et à punir de façon exemplaire tous ceux qui s’adonnent à des violences raciales. Ces condamnations démontrent également à toutes les victimes potentielles que les actes ne restent pas impunis et que l’action de la police est renforcée. La police retrouve ainsi sa place et sa dignité dans la société, elle joue un rôle de protection et non plus un rôle répressif. Elle est la gardienne de notre société.

La situation au sein des forces de police s’améliore, notamment grâce aux décisions du Conseil de l'Europe, de la Cour de justice de l’Union européenne, de la Cour européenne des droits de l’homme et de l’action des ONG.

Nous pensons que cette amélioration est également due au fait que l’on embauche des policiers ayant un niveau d’études supérieur. Ils sont évalués et ont eu l’expérience de sociétés multiraciales. J’en veux pour preuve mon pays, la Grèce : désormais, les policiers issus du monde rural sont minoritaires. Dans nos forces de police, nous avons des jeunes, garçons et filles, ayant grandi en milieu urbain, qui sont allés à l’école avec des enfants d’immigrés ; ils connaissent, pour les avoir côtoyées, des personnes d’une autre race ou ayant une autre religion que la leur.

L’augmentation de la violence que décrit M. Davies est due principalement à la crise redoutable que nous avons connue, laquelle a conduit des membres de la police grecque, mal payés, à se reconnaître dans les idées d’un parti assassin, Aube dorée. Cette situation est inquiétante, mais il faut aussi se souvenir qu’actuellement, en Grèce, des députés de ce parti se trouvent en prison, de même que des policiers qui étaient leurs complices. La Grèce ne peut pas faire grand-chose financièrement pour soutenir de façon efficace la police, mais nous pouvons mettre l’accent sur la formation des policiers et sur la punition exemplaire infligée à tous ceux qui ne respectent pas les lois grecques et européennes.

Pour finir, je félicite M. Davies pour son rapport équilibré.

M. Flego, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Rouquet au fauteuil présidentiel.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan)* – Je souhaite avant tout remercier les rapporteurs pour leur travail sur la lutte contre le racisme dans la police et sur la stratégie pour la prévention du racisme et de l’intolérance en Europe. Il est certain que ces questions sont particulièrement importantes sur notre continent. Ces dernières années, l’Europe a été confrontée à un certain nombre de défis en raison de la crise économique et financière qui a affecté sa stabilité politique et démocratique. L’un de ces défis est justement la discrimination raciale, laquelle touche tous les niveaux de la société ; aucune institution n’en paraît exempte. L’Assemblée se doit donc de traiter de ces questions, notamment pour ce qui est des forces de police. Pour ce faire, il faut bien cibler le phénomène.

À cet égard, il y a quelques instants, des informations erronées ont été fournies sur le peuple azerbaïdjanais. On a en effet prétendu que notre pays connaissait des pratiques comme celles qui ont dénoncées. Je vais donc maintenant rétablir la vérité.

Dans notre pays, il n’y a pas seulement des Azéris : nous sommes une société multiculturelle. Les églises, les synagogues et les mosquées cohabitent de façon tout à fait pacifique. Les différents groupes ethniques de notre pays – Russes, Géorgiens, Juifs, Arméniens et bien d’autres – vivent en harmonie depuis des centaines d’années et bénéficient tous des mêmes droits. Toutefois, aujourd’hui, 20 % de notre territoire sont sous occupation arménienne et l’Azerbaïdjan accueille un million de réfugiés venant des zones occupées. Je voudrais donc inviter ma collègue arménienne à relire les interviews données par le président Sargsian qui évoque lui-même des massacres de centaines d’Azerbaïdjanais, parmi lesquels des femmes et des enfants, assassinés au seul motif qu’ils étaient Azéris. Cela, c’est bien du racisme.

En conclusion, je voudrais dire de nouveau combien les problèmes dont nous traitons aujourd’hui sont importants ; il importe de les résoudre. Nous devons faire de notre mieux, dans nos parlements nationaux, pour appeler l’attention de toutes les composantes de la société sur ces questions.

M. KOLMAN (Croatie)* – Je félicite nos deux rapporteurs. Pour ma part, je parlerai surtout du rapport de M. Gunnarsson sur la prévention du racisme et de l’intolérance en Europe. Malheureusement – on l’a dit et répété –, il s’agit là, en effet, d’un problème qui n’est toujours pas réglé. Plusieurs facteurs ont récemment aggravé la situation : la crise économique est toujours un terreau fertile pour ceux qui prônent l’intolérance et le racisme. Il faut également invoquer les aspects pervers de la liberté absolue qui prévaut sur les réseaux sociaux qui permettent la diffusion d’idées racistes. Les jeunes, en particulier, sont des êtres influençables ; ils peuvent se montrer réceptifs à certains discours de haine et se laisser entraîner à tenir des discours racistes, ce qui est fort regrettable. Le rapport dénonce très bien ce risque.

J’insisterai pour ma part sur l’importance de la prévention et de l’éducation. À cet égard, il est clair que notre cadre juridique actuel ne suffit pas. Il est tragique de voir que de nombreux jeunes ne sont pas, aujourd’hui, en Europe, suffisamment sensibilisés à la tolérance, en particulier au sein de leur propre famille – c’est même parfois tout le contraire qui se produit. C’est un problème auquel le Conseil de l’Europe doit s’attaquer.

Nous produisons des résolutions et des recommandations, ce qui est une bonne chose, mais cela doit se traduire par des campagnes concrètes et efficaces conduisant à des réformes de l’éducation, de manière à ce que, dès leur plus jeune âge, les enfants apprennent la tolérance, le respect d’autrui et la manière de vivre avec les différences. Ce n’est que si nous réussissons à défendre les libertés d’autrui que nos propres libertés seront protégées. Si l’on ne comprend pas les causes de la résurgence des discours de haine, si l’on n’arrive pas à convaincre que de telles idées n’ont pas lieu d’être, on n’arrivera à rien.

Malheureusement, trop de personnes font encore l’objet de persécutions au motif de leur couleur ou de leurs orientations – quelles qu’elles soient. On observe aussi une tendance à opposer riches et pauvres et à montrer du doigt les personnes qui ne sont pas comme nous. Tout cela doit être combattu sans relâche. Personnellement, je pense qu’il ne peut y avoir de liberté pour les ennemis de la liberté et de tolérance pour les ennemis de la tolérance.

LE PRÉSIDENT* – M. Mogens Jensen, inscrit dans le débat, est absent de l’hémicycle.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Je souhaite appeler une fois encore notre attention sur les pays partenaires du Conseil de l’Europe, à l’Est, qui s’efforcent de se rapprocher de l’Union européenne et de construire des démocraties pluralistes qui fonctionnent. Il se trouve que certaines forces, dans ces pays, s’opposent à ce projet et essaient de diaboliser l’Europe et le mode de vie européen. C’est là la cause des discours de haine et des attaques contre les minorités. Il s’agit, pour les personnes qui s’en rendent coupables, de propager l’intolérance. Cela se produit notamment dans mon propre pays.

Depuis l’arrivée au pouvoir du millionnaire Ivanichvili, à la tête de la coalition Rêve géorgien, nous avons, en effet, connu un recul de la démocratie. Cela s’explique par le fait qu’ont été mobilisées des forces anti-occidentales discriminant les minorités. Il y a plus d’un an de cela, le Parlement géorgien nouvellement élu a inversé, de façon tout à fait inconstitutionnelle, des décisions judicaires, libérant 190 individus qui, pour beaucoup, avaient été condamnés pour actes de violence contre des minorités. Ces personnes ont été considérées comme des prisonniers politiques, bien qu’elles n’aient été reconnues comme telles par aucun organisme.

Ces personnes se sont regroupées dans diverses organisations et se sont livrées à maintes reprises à des attaques violentes contre différentes minorités.

Sur un peu plus d’un an, ces groupes dont les discours s’apparentent beaucoup aux discours et aux activités d’autres groupes semblables en Moldova et en Ukraine où, là aussi, les idées occidentales sont en butte aux critiques, se sont rendus coupables de douzaines de pogroms et d’attaques contre des minorités. De façon assez alarmante, ils bénéficient d’une grande impunité. Même en cas de récidive, ils ne reçoivent en général que des amendes purement symboliques.

Il est alarmant de constater que les leaders sont parfois cautionnés par certains dirigeants, dont des premiers ministres, et semblent avoir un accès illimité aux membres du gouvernement. L’ancien premier ministre avait même avalisé le leader d’un de ces groupes dans le cadre de l’opposition. On a même entendu la Vice-Présidente du Parlement dire : « Si je suis obligé de devenir lesbienne à cause de l’Union européenne, je résisterai. » Tout gouvernement qui flirte avec ces groupes ou qui essaie de les utiliser contre leur opposants politiques, comme ce fut le cas contre l’opposition démocratique en Géorgie, doivent recevoir un avertissement très net.

Les rapports qui nous sont présentés aujourd’hui sont des signes qui vont dans le bon sens. J’en remercie leurs auteurs.

M. CHITI (Italie)* – Je pense qu’il était opportun d’inscrire à notre ordre du jour les problèmes du racisme, de l’antisémitisme et de l’intolérance, car nous constatons que les agressions et les intolérances augmentent partout en Europe.

Il est vrai que la crise économique et l’austérité qui a été imposée aux peuples ont ouvert un nouvel espace aux extrémistes racistes, mais on assiste surtout aujourd’hui en Europe à une résurgence de partis antidémocratiques qui ont, pour certains, voix au chapitre et occupent des positions importantes au sein des exécutifs ou des parlements de nos pays. Ce sont vraiment des mouvements xénophobes, anti-européens, de type fasciste ou nazi.

Notre ministre Mme Kyenge a été contestée dans son entrée en fonctions pour deux raisons : c’est une femme de couleur et c’est une femme !

M. Chaouki a eu raison de dire qu’il fallait aussi dénoncer tous ceux qui parlaient d’« invasion islamique ». S’il y a bien vingt millions de musulmans, ce sont des personnes parfaitement paisibles, et il ne faut pas oublier que les jeunes Norvégiens assassinés ne l’ont pas été par des étrangers, pas plus que les deux Sénégalais tués dernièrement à Florence.

La semaine dernière, à Rome, ont également eu lieu des provocations honteuses : des slogans hostiles ont été tagués sur une synagogue ainsi que sur l’ambassade d’Israël, à quelques jours du souvenir de la Shoah. Une tête de porc a également été envoyée à l’ambassade.

Il faut absolument parvenir à une mobilisation de tous, en particulier des forces de police. Celles-ci doivent incarner le pluralisme de nos sociétés. Nous avons besoin que tous nos citoyens soient formés. Dès l’école, il faut les inciter à se montrer tolérants. Il faut une véritable mobilisation politique et citoyenne. Sans droits de l’homme, nos démocraties ne peuvent vivre. Nous avons donc vraiment besoin d’un engagement de tous en faveur de cette solidarité et de ce vivre-ensemble.

M. MAYER (Autriche)* – J’aimerais parler de la lutte contre le racisme dans la police et je remercie le rapporteur d’avoir traité ce sujet. C’est une profession qu’il connaît bien, moi aussi pour l’avoir exercée. Je parle donc d’une expérience concrète.

Il est vrai que le racisme et la xénophobie se rencontrent au sein de la police. Peut-être parce- que les minorités ethniques composées de personnes étrangères sont parfois plus difficiles à gérer par la police dans la mesure où elles génèrent des problèmes différents que la population autochtone.

Il faudrait aussi étudier comment les flux migratoires, les craintes de l’islamisation, les problèmes sociaux et les tensions internes aux pays y contribuent. Ces populations immigrées sont souvent déconsidérées par la population, mais aussi parfois par les officiers de police. Des étrangers en situation irrégulière se trouvent souvent mêlés à des crimes graves et à la prostitution. Cela suscite plus facilement des réactions de la police, du fait du stress qu’engendre la violence à laquelle d’autres répondent à leur tour par la violence.

Il faudra donc faire évoluer les mentalités et apprendre aux uns et aux autres à vivre ensemble. Il est bon que le Conseil de l’Europe se penche sur ces questions et je remercie le rapporteur de nous présenter des propositions pour la lutte contre l’intolérance et les discriminations du fait des services de police. C’est un rapport très important, au contenu déterminant.

De nombreux policiers réalisent un excellent travail. Il convient de le dire très clairement et de leur adresser les remerciements qui leur sont dus, car ils risquent parfois leur vie pour garantir notre sécurité. Mais nous avons aussi besoin d’une police moderne, qui tienne compte de l’état de nos sociétés modernes. Le profilage racial ne peut avoir sa place dans le travail policier. Vous serez nombreux à être d’accord avec moi pour dire qu’il n’y a pas de tolérance possible pour de tels comportements.

Mme PASHAYEVA (Azerbaïdjan)* – Je félicite les rapporteurs pour leur très importante contribution. Comme le dit M. Gunnarsson, le phénomène du racisme et de l’intolérance doit nous interpeler, nous ne pouvons pas l’ignorer. Les jeunes générations doivent être éduquées dans le respect d’autrui, quels que soient ses origines ethniques, sa religion et son statut social. Malheureusement, les déclarations des politiciens se fondent parfois sur des sentiments négatifs, et je viens d’un pays où c’est le cas.

Pour mieux comprendre l’implication du racisme et de l’intolérance, j’aimerais appeler votre attention sur l’histoire récente de mon pays. Du fait de l’intolérance et de la haine générée par le gouvernement arménien, son système éducatif et les médias, des centaines de milliers d’Azerbaïdjanais ont été déportés de force en 1988. Après l’occupation d’une partie de notre territoire par l’Arménie, il y a eu un véritable génocide et, aujourd’hui, un million d’Azerbaïdjanais mènent une vie de personnes déplacées de l’intérieur, puisqu’en dépit de la Résolution de L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, ils ne peuvent rentrer chez eux. Au lieu d’assurer la mise en œuvre de ce document, les membres de la délégation parlementaire arménienne et Mme Zohrabyan donnent à l’Assemblée de fausses informations sur notre Président. Mais si vous venez en Azerbaïdjan, vous pourrez parler avec notre population et rencontrer ceux qui sont victimes de cette tragédie.

Qu’en est-il de la situation en Arménie aujourd’hui ? Il n’y a plus d’Azerbaïdjanais dans ce pays, car tous ont été expulsés d’Arménie. Je regrette que nos collègues arméniens n’aient pas fourni cette information à l’Assemblée.

Pour conclure, je soutiendrai les deux rapports et j’appelle les Etats membres à s’intéresser davantage à ces questions essentielles.

LE PRÉSIDENT* – Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs. Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent déposer, dans les 24 heures, leur intervention dactylographiée au service de la séance pour publication au compte rendu.

J’appelle la réplique de la commission.

Monsieur Davies, il vous reste six minutes.

M. D. DAVIES (Royaume-Uni), rapporteur* – J’ai eu un grand plaisir à écouter les différentes contributions au débat. Elles ont été trop nombreuses pour que je puisse répondre à toutes, mais je voudrais dire à mon ami et collègue Geraint Davies, qui a évoqué l’Association des policiers noirs britannique, que celle-ci gagnerait à encourager les minorités ethniques à rejoindre les forces de police plutôt que de les décourager par un discours alarmiste sur le racisme des policiers.

Monsieur Díaz Tejera a évoqué les années du franquisme en Espagne. C’était il y a longtemps et je suis certain que la situation est bien différente aujourd’hui dans les forces de police espagnoles.

Madame Blondin a souligné pour sa part que nos travaux auront un écho salutaire dans les parlements nationaux. C’est la raison pour laquelle il est si important que nous obtenions un vote unanime de l’ensemble des courants politiques représentés au sein de notre Assemblée. En effet, un rapport voté à l’unanimité est pris beaucoup plus au sérieux.

Peut-être certaines informations du rapport ont-elles dérangé quelques-uns parmi vous ; peut-être d’autres au contraire ont-ils trouvé qu’il manquait certains éléments. Mon objectif, en tant que rapporteur, a été de présenter un rapport équilibré, capable d’emporter l’unanimité des membres de l’Assemblée et de peser ainsi sur les Etats membres.

Comme l’a souligné M. Mayer, la grande majorité des policiers effectuent un excellent travail. Ils sont souvent discrédités par le comportement inacceptable d’une minorité. Je souhaite que les forces de police elles-mêmes appuient les recommandations du rapport car elles vont dans le sens de leurs intérêts. S’il y avait davantage de policiers issus des minorités ethniques parmi les forces de police londoniennes, je suis certain que cela contribuerait à établir un lien de confiance avec la population de certains quartiers. Les minorités ethniques doivent être plus visibles dans les forces de police. Il faut aussi une meilleure supervision des plaintes qui sont déposées.

La formation doit être également adaptée, en évitant de stigmatiser certains policiers. Les recommandations du rapport visent à les aider dans leur travail. La formation a pour but d’apprendre aux policiers à interpeller les individus sans violence. L’immatriculation individuelle des policiers ne doit pas poser de problèmes de sécurité. Les ONG elles-mêmes doivent évoluer. Bien souvent, elles ne comprennent pas ce qu’est la vie d’un officier de police. Celui-ci doit prendre des décisions rapides, dans des circonstances très difficiles, sous pression. Il ne s’agit pas d’excuser certains comportements, mais de saisir la réalité du métier de policier. Le rapport suggère donc aux représentants d’ONG d’effectuer des rondes avec des fonctionnaires de police pour se rendre compte de la vie qu’ils mènent sur le terrain.

Certains policiers ont été très durement critiqués par des représentants élus en Allemagne, qui ont laissé entendre qu’ils agissaient comme des nazis. Des exemples de critiques de cette nature ont également été constatés au Royaume-Uni. C’est tout à fait scandaleux. L’Allemagne s’est réconciliée avec son passé. Elle a fait des efforts considérables pour se libérer de la stigmatisation liée à la seconde guerre mondiale.

Je remercie tous les membres de la commission pour leur soutien et tous les policiers et représentants d’ONG avec lesquels nous avons travaillé. J’espère vivement que ce rapport aura des conséquences bénéfiques pour tous, sans exception.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur Gunnarsson, il vous reste sept minutes et demie pour répondre aux orateurs.

M. GUNNARSSON (Suède), rapporteur* – Je me félicite du large soutien recueilli par le rapport. Tous les groupes politiques approuvent les propositions de la commission et j’en suis très fier. Les orateurs intervenus dans le débat ont partagé leur expérience du racisme dans leur pays. Cela prouve qu’il est partout et que nous devons prendre le problème au sérieux.

Vous avez été nombreux à évoquer l’Holocauste et les périodes sombres de l’histoire européenne avec ses atrocités racistes. L’histoire collective de l’Europe semble parfois, c’est vrai, marquée par une certaine folie. À chaque instant, nous devons nous souvenir de notre histoire. Lorsque l’on permet à la haine de pénétrer les esprits, cela cause beaucoup de souffrances et de morts.

Comme l’a dit M. Gozi, personne ne naît raciste. Nous avons la responsabilité des valeurs que nous transmettons aux jeunes générations. Voilà pourquoi un cadre juridique ne suffit pas : il faut un travail éducatif pour faire évoluer les mentalités.

Madame Faber-Van De Klashorst, j’espère avoir mal compris vos propos sur l’islam et les musulmans. Peut-être ma connaissance insuffisante de l’anglais en est-elle la cause. Mais c’est précisément ce type de discours que mon rapport tend à éradiquer. Il faut au contraire jeter des passerelles entre les personnes pour qu’elles surmontent leurs différences, car c’est en acceptant la différence de l’autre que nous progresserons vers plus d’harmonie.

Je remercie tous ceux qui ont participé à ce débat, ainsi que le secrétariat pour son très bon travail et notre commission elle-même, qui s’est beaucoup intéressée à cette question.

Mme DERVOZ (Bosnie-Herzégovine), vice-présidente de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – Les rapports que nous examinons aujourd’hui témoignent de l’importance que notre commission accorde à la lutte contre toutes les formes de racisme et d’intolérance. J’ai le plaisir de vous annoncer que lors de notre réunion de lundi, nous avons désigné un rapporteur général chargé de ces questions, dont notre débat a confirmé l’actualité.

Il est urgent, en effet, de lutter contre le racisme, la haine et l’intolérance en Europe, et ce de manière globale. Des groupes entiers sont victimes de cette grave violation des droits de l’homme qui affecte la cohésion sociale et nourrit la méfiance envers les autorités de nos pays, l’Etat de droit et la démocratie.

En la matière, les politiques détiennent une responsabilité particulière : ils doivent être en première ligne pour dénoncer les actes de racisme et d’intolérance. Trop souvent, on constate le contraire. Ces problèmes ont pris une telle ampleur que nous ne pouvons les passer sous silence. Nous nous sommes efforcés de mettre en évidence la situation dans plusieurs Etats membres du Conseil de l’Europe, en cherchant à offrir une vue d’ensemble du contexte.

Présent dans nos sociétés, le racisme l’est donc également au sein des forces de police. Aucun pays n’est hélas épargné. Le rapport sur le racisme dans la police éclaire les problèmes de racisme institutionnel dans plusieurs Etats membres. Reconnaître l’existence d’un problème est une première étape sur le chemin qui mène à sa solution ; le projet de résolution nous invite tous à nous y intéresser.

Je félicite à nouveau nos deux rapporteurs et je remercie nos collègues d’avoir soutenu ces deux rapports dans leurs grandes lignes.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

Sur le premier rapport, intitulé « Une stratégie pour la prévention du racisme et de l’intolérance en Europe » (Doc. 13385), la commission sur l’égalité et la non-discrimination a présenté un projet de résolution sur lequel deux amendements ont été déposés et un projet de recommandation sur lequel aucun amendement n’a été déposé.

Le président de la commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement sur les amendements 1 et 2 au projet de résolution, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien le cas, Madame la vice-présidente ?

Mme DERVOZ (Bosnie-Herzégovine), vice-présidente de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT* – Je donne lecture de ces amendements.

L’amendement 1, déposé par MM. Mahoux, Blanchart, Henry, Mme Saïdi, M. Van der Maelen, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 2, à insérer le paragraphe suivant : « Un rapport du Réseau européen contre le racisme a souligné la responsabilité des décideurs politiques qui sous couvert de ne pas taire les vrais problèmes, diffusent des discours dangereux et stigmatisants à l’encontre de certaines populations. La montée de l’extrême droite et sa rhétorique peuvent également influencer les discours politiques traditionnels. »

L’amendement 2, déposé par MM. Mahoux, Blanchart, Henry, Mme Saïdi, M. Van der Maelen, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 2, à insérer le paragraphe suivant : « Le fait que certaines législations nationales ne considèrent pas l’insulte raciste et la discrimination comme un délit envoie de facto un signal négatif aux populations européennes puisqu’aucune sanction formelle n’est prévue. »

En l’absence d’objection, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

LE PRÉSIDENT* – Nous en venons au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13385, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (79 voix pour, 2 voix contre et 0 abstention).

LE PRÉSIDENT* – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc. 13385.

Je vous rappelle que la majorité des deux tiers est requise.

Le projet de recommandation est adopté (84 voix pour, 2 voix contre et 0 abstention).

LE PRÉSIDENT* – Sur le second rapport, « La lutte contre le racisme dans la police » (Doc. 13384), la commission sur l’égalité et la non-discrimination a présenté un projet de résolution sur lequel 2 amendements et un sous-amendement oral ont été déposés.

Le président de la commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement, l’amendement 2 ayant été adopté à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien cela, Madame la vice-présidente ?

Mme DERVOZ (Bosnie-Herzégovine), vice-présidente de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT* –  L’amendement 2, déposé par M. G. Davies, Sir Alan Meale, MM. Crausby, Sheridan, Lord Donald Anderson, M. Dobbin, Mme Osborne, M. Connarty, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 7.1.7 par les alinéas suivants : « à doter la police de ressources suffisantes lui permettant de travailler dans des conditions satisfaisantes ; à prendre des mesures spécifiques pour veiller à ce que la police accorde un respect absolu aux droits des personnes dont elle s’occupe ; »

En l’absence d’objection, cet amendement est déclaré adopté définitivement.

LE PRÉSIDENT* – Nous en venons à la discussion de l’amendement 1, déposé par M. G. Davies, Sir Alan Meale, MM. Crausby, Sheridan, Lord Donald Anderson, M. Dobbin, Mme Osborne, M. Connarty, et qui tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 7.1.3, à ajouter les mots suivants : « incluant des objectifs et des quotas, y compris pour les grades élevés. »

M. G. DAVIES (Royaume-Uni)* – Alors que la moitié de la population londonienne est noire ou appartient à une communauté ethnique, elle ne fournit qu’un policier sur dix. Ailleurs, la distorsion est également considérable. Il faut remédier à ce problème.

LE PRÉSIDENT* – La présidence a été saisie par M. David Davies, rapporteur, du sous-amendement oral suivant : « À l’amendement 1, supprimer les mots “et des quotas” ».

Je considère ce sous-amendement recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

En l’absence d’objection, nous prenons en compte ce sous-amendement.

M. D. DAVIES (Royaume-Uni), rapporteur * – Je suis tout à fait d’accord avec ce qui vient d’être dit. On a besoin de plus de ressortissants des minorités dans les forces de police. C’est dans mon rapport. Fixer des objectifs c’est bien, mais un quota c’est quasiment impossible. On ne pourrait plus avoir des forces de police opérationnelles. C’est pourquoi je suis contre. Il faut dire que nous avons des objectifs ambitieux car cela est possible.

LE PRÉSIDENT* – Quel est l’avis de l’auteur de l’amendement ?

M. G. DAVIES (Royaume-Uni) * – Comme le rapporteur, je suis favorable à ces objectifs, mais il faut des quotas. David Davies n’est pas d’accord. Je demande que l’on vote.

LE PRÉSIDENT* – La commission est évidemment favorable au sous-amendement oral.

Mme DERVOZ (Bosnie-Herzégovine), vice-présidente de la commission – Oui.

Le sous-amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous en revenons à l’amendement sous-amendé.

Mme DERVOZ (Bosnie Herzégovine), vice-présidente de la commission* – Avis favorable

L’amendement 1, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous en arrivons donc au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13384, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (87 voix pour, 2 contre et 0 abstention)

7. Évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Conseil national palestinien

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle maintenant notre débat relatif à l’évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Conseil national palestinien.

Nous entendrons d’abord la présentation du rapport de M. Kox, au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc. 13382). Nous entendrons ensuite l’avis oral de M. Dişli, présenté au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme saisie pour avis, puis la présentation du rapport de Mme Bilgehan, au nom de la commission sur l’égalité et la non-discrimination également saisie pour avis. (Doc. 13398)

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi matin, de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 20 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 19 h 45, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. KOX (Pays-Bas), rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Le statut de partenaire pour la démocratie a été accordé au Conseil national palestinien (CNP) le 4 octobre 2011. Il a été le deuxième parlement à l’obtenir après celui du Maroc. Ce statut a été introduit en 2009 par l’Assemblée pour développer la coopération institutionnelle avec les parlements d’Etats voisins du Conseil de l’Europe.

Le Conseil national palestinien a déclaré partager les mêmes valeurs que le Conseil de l’Europe, dans une série d’engagements, conformément à l’article 62 du règlement de l’Assemblée. Ils visent à renforcer la démocratie, la prééminence du droit et les droits de l’homme dans les territoires palestiniens.

Nous procédons aujourd’hui au premier bilan au bout de deux ans de partenariat. Dans mon exposé des motifs, j’ai détaillé ces questions. J’espère que le projet de résolution vous conviendra. En décembre, il a recueilli l’assentiment de la commission des questions politiques. J’espère que mon rapport deviendra, ce soir, notre rapport.

Je souhaite faire quelques remarques sur ce partenariat. Je veux louer la délégation parlementaire palestinienne pour ses contributions très actives à nos travaux, en particulier M. Sabella qui dirige cette délégation. Je les remercie tous, ainsi que Ibrahim Khreisheh, Secrétaire général du CNP pour leur aide très utile et très aimable durant mes travaux, notamment lors de mes deux missions en Palestine.

J’ai rencontré toutes les autorités des territoires ainsi que le commissaire aux droits de l’homme, des syndicalistes, de nombreux citoyens, des jeunes, des entrepreneurs. À chaque fois, j’ai constaté à quel point les Palestiniens tenaient à cette relation spéciale avec notre Assemblée.

Une fois le statut accordé, nous avons appuyé la demande des Palestiniens pour obtenir le statut de membre de l’ONU. Malheureusement, le Conseil de sécurité n’a pu se prononcer. Cette adhésion à part entière n’a pas été accordée, mais 130 Etats membres des Nations Unies, dont 18 Etats membres du Conseil de l’Europe, ont déjà reconnu l’Etat de Palestine.

L’Assemblée a pris note de la résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies accordant le statut d’Etat non-membre à la Palestine, ce qui renforce la possibilité d’adhérer à certaines organisations internationales, à des traités et conventions internationaux. À la suite de cette résolution, l’Assemblée parlementaire a décidé d’employer le nom de Palestine dans l’annuaire de l’Assemblée et les documents y afférents.

Au cours des deux dernières années, il y a eu cet accord de réconciliation entre les autorités palestiniennes et les dirigeants de facto de Gaza. Malheureusement sur le terrain, rien n’a encore bougé. Nous le regrettons. Il n’y a pas de gouvernement d’unité nationale à ce jour. Il n’y a pas eu d’élections parlementaires et présidentielle. Aucune date n’a été fixée. Nous demandons que cet accord de réconciliation soit appliqué le plus rapidement possible. L’absence de séparation des pouvoirs, puisqu’il n’y a pas de pouvoir législatif dans les territoires, est un handicap majeur.

Nous nous félicitons que M. Azzam Al-Ahmad, le principal négociateur de la réconciliation, soit membre de la délégation palestinienne et participe à nos travaux.

De nouveaux contacts ont eu lieu entre les autorités palestiniennes et israéliennes grâce à la médiation américaine ; un délai de neuf mois a été fixé pour les discussions. M. Kerry, le secrétaire d’Etat américain, a fait il y a un mois une visite dans la région, en se rendant dans les deux pays. Il est certain que les progrès sont lents, mais je demande à l’Assemblée d’exhorter toutes les parties à soutenir les négociations et de rester optimiste quant à la possibilité d’aboutir à un accord.

Le projet de résolution a donc été approuvé à l’unanimité par la commission des questions politiques et de la démocratie au mois de décembre dernier et je demande aujourd’hui à l’Assemblée de réaffirmer son soutien à une solution à deux Etats, d’appeler à mettre un terme à l’occupation illégale des territoires palestiniens par Israël et de regretter la multiplication des colonies dans ces territoires. Il faut impérativement que les deux parties respectent le droit international si l’on veut parvenir à une solution équitable, qui serait bénéfique au monde entier, et d’abord aux citoyens israéliens et palestiniens.

C’est avec grand plaisir que j’ai noté que la Knesset continuait à soutenir le partenariat ; elle l’avait chaudement appuyé il y a deux ans. Évidemment, certains aspects de mon rapport risquent de déplaire à la partie israélienne, mais j’ai essayé de le rédiger à la lumière de ce que j’ai moi-même constaté en Palestine. J’invite nos partenaires de la Knesset à tout faire pour que les membres du Conseil national palestinien incarcérés en Israël soient libérés, car il est dans l’intérêt des deux parties que le CNP puisse fonctionner normalement. Chers amis israéliens, faites de votre mieux !

À ce stade, la Palestine n’est pas membre à part entière de l’ONU, ce qui entrave toute coopération pleine et entière avec ses mécanismes spéciaux, dont l’examen périodique universel. Cette situation ne l’empêche toutefois pas d’adhérer aux conventions et autres instruments juridiques du Conseil de l’Europe, sous réserve d’un accord à la majorité des deux tiers au sein du Conseil des Ministres et d’un accord à l’unanimité des Etats parties aux instruments concernés. Je vous engage donc à aider les Palestiniens à saisir, s’ils le souhaitent, cette possibilité et j’incite notre Secrétaire Général à utiliser toute l’expérience de notre organisation afin de soutenir les progrès des droits de l’homme, de la primauté du droit et de la démocratie en Palestine et à étudier comment mobiliser davantage les instruments du Conseil de l’Europe à cette fin. J’espère que nous pourrons dans les prochaines années non seulement prolonger ce partenariat, mais approfondir encore nos relations. J’invite nos amis palestiniens à nous faire de nouvelles propositions en ce sens.

En conclusion, je vous propose de déclarer que l’Assemblée se félicite des progrès accomplis et décide de continuer à suivre la mise en œuvre des réformes politiques en Palestine et d’offrir son assistance au Conseil national palestinien, ainsi que d’annoncer qu’elle procédera dans un délai de deux ans à une nouvelle évaluation du partenariat.

Pour finir, je remercie le secrétariat de la commission en général, et tout particulièrement M. João Ary, pour l’aide apportée dans l’évaluation de ce partenariat crucial non seulement pour notre Assemblée et pour le Conseil national palestinien, mais également pour les citoyens palestiniens, à qui nous devons manifester notre solidarité et notre soutien.

Je vous invite, chers collègues, à adopter ce projet de résolution.

LE PRÉSIDENT* – Il vous restera quatre minutes trente pour répondre tout à l’heure aux orateurs, Monsieur le rapporteur.

M. DİŞLİ (Turquie), rapporteur pour avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme* – Mes chers collègues, je remercie le rapporteur, M. Kox, pour l’excellent travail qu’il a accompli. Son rapport souligne tant les évolutions positives que les obstacles. C’est pourquoi la commission des questions juridiques et des droits de l’homme souscrit pleinement au projet de résolution qui a été présenté et aux encouragements donnés aux membres du Conseil national palestinien, afin que ceux-ci accélèrent la mise en œuvre des réformes juridiques.

Nous espérons que le Conseil de Sécurité des Nations Unies parviendra à une décision unanime pour recommander que soit acceptée la demande de la Palestine d’être membre à part entière des Nations Unies.

Nous recommandons également au Hamas et au Conseil national palestinien de s’unir dans le cadre du partenariat pour la démocratie, ce qui permettrait de renforcer les efforts déployés par la Palestine en vue d’affermir sa démocratie et de faciliter les pourparlers avec Israël.

Comme M. Kox, nous sommes enfin heureux de constater la participation très active de la délégation palestinienne aux travaux de notre Assemblée.

Mme BİLGEHAN (Turquie), rapporteure pour avis de la commission sur l’égalité et la non-discrimination – Je veux tout d’abord féliciter M. Kox pour son rapport détaillé sur la mise en œuvre des engagements pris par le Conseil national palestinien dans le cadre de sa demande de partenariat pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire. Je me félicite que le rapport aborde à plusieurs reprises la question des droits des femmes, lesquels figurent parmi les engagements pris par le Conseil national palestinien en octobre 2011.

Je tiens à souligner, à l’instar de M. Kox, que l’occupation israélienne et le refus du Hamas de respecter les accords de réconciliation successifs constituent des obstacles importants à la mise en œuvre des engagements pris par le Conseil national palestinien. Toutefois, malgré les circonstances difficiles, des améliorations peuvent et doivent être apportées, en particulier s’agissant de la situation des femmes. Le présent avis s’attachera ainsi à apporter des éclairages supplémentaires sur les aspects les plus critiques de la situation des femmes en Palestine.

En l’absence d’élections législatives depuis 2006, la représentation des femmes au Parlement n’a pas évolué depuis octobre 2011 ; le Gouvernement comprend quant à lui trois femmes, ce qui n’est pas si mal. Des élections locales se sont tenues à l’automne 2012 en Cisjordanie, à l’issue desquelles 21,1 % des élus furent des femmes ; une femme a été élue maire de la ville de Bethlehem.

Les femmes palestiniennes ont un rôle crucial à jouer dans les négociations de paix et la construction d’un Etat palestinien. Pourtant, leur représentation reste marginale dans les postes clefs – mais c’est presque partout la même chose. Le statut personnel des femmes demeure une source de grave préoccupation ; aucune amélioration significative n’est intervenue depuis octobre 2011. Ainsi que M. Kox le constate dans son rapport, un pouvoir législatif effectif est à l’heure actuelle inexistant en Palestine. Cette situation empêche l’harmonisation du droit de la famille et sa mise en conformité avec les normes internationales.

Pour finir, je tiens à saluer les efforts des autorités palestiniennes qui continuent de démontrer leur attachement à défendre l’égalité entre les femmes et les hommes et à améliorer la condition de la femme en Palestine. La situation politique et juridique rend difficile l’accomplissement de réels progrès, mais il est clair que la volonté d’avancer sur la voie d’une société démocratique et inclusive demeure. Pour cette raison, je partage la recommandation de M. Kox de poursuivre le partenariat pour la démocratie avec le Conseil national palestinien et de procéder à une nouvelle évaluation dans deux ans.

M. VILLUMSEN (Danemark), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Permettez-moi tout d’abord de remercier le rapporteur ; son rapport est excellent, très factuel.

Au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne, j’apporte mon soutien à une poursuite du partenariat avec la Palestine. Je demande aussi au rapporteur d’étudier les possibilités de renforcer la coopération entre le Conseil de l’Europe et la Palestine. A-t-il des idées sur la manière de procéder ?

Il serait en outre utile qu’en adoptant ce rapport, nous prenions clairement position en faveur d’une solution à deux Etats et que nous appelions à mettre un terme à l’occupation illégale des territoires palestiniens par Israël et à la construction incessante de colonies sur ces territoires. Les droits de l’homme des Palestiniens sont violés quotidiennement du fait de l’occupation illégale par Israël. Je considère que c’est inacceptable.

J’aimerais aussi saisir cette occasion pour remercier la Palestine de la bonne coopération avec l’Assemblée ; au sein de mon groupe, nous nous félicitons de pouvoir poursuivre cette coopération.

À titre personnel et au nom de mon groupe, j’aimerais dire que je suis fier de pouvoir m’exprimer ici aujourd’hui. En adoptant ce rapport, cette Assemblée adressera un message clair, à savoir que les Palestiniens ont droit à la dignité, à l’autodétermination et à un Etat libre, à une Palestine libre.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste * – J’aimerais à mon tour, au nom de mon groupe, féliciter Tiny Kox pour un rapport très réussi qui aborde toutes les questions, même les plus sensibles.

En tant que président de l’Assemblée parlementaire Euro-Méditerranée, je dirai que cette initiative du partenariat est très importante, surtout en ce qui concerne le partenariat avec la Palestine. Comme M. Villumsen vient de le dire, la situation est tout à fait impossible. Il faut placer très haut notre solidarité avec la Palestine.

Comment, en revanche, espérer voir la démocratie en Palestine alors que l’on a des territoires qui ressemblent à Guantanamo, où la liberté de circulation est sérieusement entravée ?

L’Europe doit aussi accepter une certaine responsabilité. Lorsque le résultat des élections en Palestine ne nous convient pas, nous réagissons en refusant de le reconnaître. Or nous devons reconnaître les interlocuteurs légitimes.

La tragédie de la région, comme le soulignait la Déclaration Balfour en 1917, c’est l’eau. L’eau a été à l’origine des guerres régionales. La Cisjordanie détient les seules trois nappes phréatiques de la région et le Golan a les seules sources de la région, il est donc important de dialoguer avec la Palestine, que ce soit avec le Fatah ou le Hamas.

Après les « printemps arabes », il nous faut saisir les opportunités qui se présentent. Beaucoup de potentats dans la région n’ont pas mené de réforme. Bien qu’ils proclament leur solidarité, ils tiennent en otage la Palestine et exigent un développement démocratique.

Une opportunité extraordinaire s’offre à nous, mais les deux parties doivent faire un effort. Et Israël doit libérer les 100 députés emprisonnés qui sont sous le coup de la loi sur la sécurité.

M. SASI (Finlande), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen *– Le partenariat pour la démocratie a été octroyé à la Palestine il y a deux ans, c’est une excellente chose. La coopération avec les Etats voisins est essentielle si nous voulons renforcer la démocratie dans notre voisinage proche. Cela est nécessaire pour garantir la paix, la démocratie et pour assurer notre avenir.

C’est très bien que la Palestine participe à ce processus, cela démontre que les Palestiniens eux-mêmes veulent créer un Etat démocratique et partagent nos valeurs. Et une Palestine démocratique sera synonyme de plus de stabilité dans l’ensemble de la région. Cela offre aussi de meilleures perspectives au processus de paix, car quand on est en démocratie chacun participe, donne son point de vue et l’on peut espérer de meilleurs résultats lors du processus de paix.

Que s’est-il passé depuis deux ans ? Nous avions beaucoup parlé de Gilad Shalit ; il a été libéré. Il a été échangé contre de nombreux prisonniers palestiniens. Mais pour le reste, les choses ont peu avancé, hélas. Je comprends bien que la situation soit très difficile, toutefois il faut multiplier les efforts.

En ce qui concerne la démocratie, je crois que la Palestine a vraiment besoin d’un organe représentatif élu dans des conditions démocratiques. Il faut donc prendre date pour des élections présidentielle et législatives le plus rapidement possible.

La situation du territoire de Gaza est déplorable ; un contrôle démocratique est nécessaire. Il conviendrait de réformer la justice, et là nous avons certainement une contribution à apporter. Nous devons faire pression sur la Palestine pour qu’elle mette en place son propre système de justice. Dans ce domaine, le problème de la peine de mort est prioritaire. Il y a un moratoire de facto, sauf à Gaza où l’administration du Hamas continue à prononcer des peines de mort et à pratiquer des exécutions. Il faut changer la loi et faire cesser ces exécutions.

Ce rapport, comme le précédent, trace la voie, c’est une feuille de route pour les Palestiniens, et chacun tirerait profit de l’application de ses recommandations. J’espère que dans deux ans notre bilan sera plus positif, que nous constaterons des progrès. En tout cas j’espère que notre rapporteur continuera à inciter les Palestiniens à faire le bon choix, celui de la démocratie, de la prééminence du droit et des droits de l’homme. Sur ce chemin, nous pourrons les accompagner, car nous avons une certaine expérience.

M. MAKHMUTOV (Fédération de Russie), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Notre groupe apprécie également le rapport élaboré par M. Kox qui a accompli un immense travail. Ce rapport mérite d’être adopté puisqu’il présente objectivement les problèmes qui peuvent se présenter sur la voie des réformes et de la démocratie et l’aspiration du Conseil national palestinien en ce sens.

Afin de mieux résoudre les questions relatives au conflit israélo-palestinien, nous pourrions mettre en valeur le rôle du Quartet, or cela n’est guère mentionné dans le projet de résolution. Bien entendu, cela ne porte nullement atteinte au rôle qui est celui du Conseil de l'Europe et de l’Union européenne qui participent très activement au règlement de ce conflit.

La réunion ministérielle du Quartet a eu lieu en septembre à New York, puis des réunions de représentants spéciaux se sont tenues en janvier de cette année à Paris. Nous espérons que ces rencontres accéléreront la résolution du conflit. Le projet de résolution qui est soumis à l’Assemblée peut être adopté car c’est un document pondéré, mûrement réfléchi, qui reflète la situation. Bien entendu, il convient de contribuer de la façon la plus efficace qui soit au règlement du conflit et je crois que nous sommes sur la bonne voie, ce qui permettrait d’ailleurs de régler un grand nombre des questions qui se posent au Proche-Orient.

M. REIMANN (Suisse), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Le partenariat pour la démocratie entre le Conseil de l'Europe et le Conseil national palestinien témoigne d’une grande bonne volonté. Nous souhaitons transmettre des valeurs à nos collègues palestiniens qui les renforceront au fil du temps afin d’évoluer vers un Etat démocratique. En revanche, les deux premières années de partenariat ont été marquées de difficultés.

En Palestine, nous avons face à nous deux parties ennemies : le Fatah qui souhaite être notre partenaire et le Hamas à Gaza qui nous ignore. Elles rivalisent, se réconcilient de temps à autre, mais nous ne voyons pas de parlement unique, nous ne voyons transparaître aucune unité. C’est bien une tragédie, dont souffre le partenariat. Bien sûr, je suis ravi que ce partenariat soit instauré avec l’une des parties et que ses représentants viennent au Conseil de l'Europe, mais ce n’est pas suffisant. Nous voulons, en effet, un partenariat démocratique avec toute la Palestine, mais nous ne pouvons l’imposer. Le Hamas doit avoir la volonté de participer. Or, il ne l’a pas ni ne crée les conditions factuelles pour ce faire. C’est bien ce que souligne le rapporteur. Si, ainsi qu’écrit dans le rapport, la peine de mort est exécutée dans la bande de Gaza, si la liberté de la presse à Gaza est bafouée, si les élections ne sont pas libres, si tout cela est vrai, alors, le partenariat ne peut pas évoluer. Aux Nations Unies, la solution de deux Etats s’éloigne chaque jour un peu plus en raison de cet état de fait, ce que je regrette, d’autant que j’ai été délégué du Comité international de la Croix-Rouge il y a des années et que je connais bien la région.

Je note que des progrès ont été réalisés, notamment en Cisjordanie, même si cette partie de la Palestine souffre de la politique de colonisation d’Israël. J’espère toutefois que le prochain rapport d’évaluation constatera des progrès et j’espère qu’ils concerneront l’ensemble de l’Etat palestinien.

Mme OSBORNE (Royaume-Uni)* – Moi aussi, je me réjouis que ce partenariat pour la démocratie existe. J’ai été heureuse que le Conseil de l'Europe accueille le Président Abbas.

Nous pouvons parler des obligations souscrites par les Palestiniens, mais l’on ne peut le faire sans évoquer l’occupation, et cela pour deux raisons. Aucun pays ne peut jouir de tous ses droits et être pleinement responsable de ses actes en matière de démocratie, de prééminence du droit et de droits de l’homme tant qu’il subit une occupation illégale de la part d’un autre Etat et tant qu’il n’est pas reconnu par l’Onu. Les Palestiniens mènent une lutte quotidienne et nous espérons évidemment pour eux qu’un avenir sûr et pacifique est possible.

Se pose également le problème de Gaza qui connaît une situation dramatique. Gaza souffre au surplus de l’évolution de la situation en Egypte. Les tunnels qui approvisionnaient Gaza ont été détruits par les militaires égyptiens. Si cette destruction a interrompu le trafic d’armes, cela empêche aujourd’hui d’acheminer les denrées de première nécessité qui ne peuvent l’être autrement que par ces tunnels en raison du blocus de Gaza par les Israéliens. Des dizaines de milliers de personnes ont dû fuir car la situation à Gaza est inhumaine. Pour s’y être rendu la semaine dernière, notre collègue Alan Duncan a constaté que Gaza sera prochainement invivable, il n’y aura plus ni nourriture ni eau potable.

J’en viens aux amendements de la commission sur l’égalité et de la non-discrimination qui sont relatifs aux femmes. Effectivement, les droits de l’homme et la démocratie ne devraient pas varier selon le lieu où l’on se trouve : Gaza, la Cisjordanie, Jérusalem. Il faudrait enrayer l’insécurité. En tout cas, il faut assurer un avenir aux femmes. Si les femmes atteignaient un pourcentage de 30 % aux élections générales, leur situation en Palestine serait bien meilleure que dans bien de nos pays, y compris au Royaume-Uni.

Il faut demander que la Palestine soit pleinement reconnue en tant qu’Etat, faute de quoi les Palestiniens continueront à avancer avec une main ligotée dans le dos.

M. ROCHEBLOINE (France) – En accordant au Conseil national palestinien le statut de partenaire pour la démocratie, notre Assemblée accomplissait, il y a un peu plus de trois ans, un geste doublement significatif : elle offrait à la réalité politique de la Palestine un nouveau lieu de dialogue avec l’Europe ; elle affirmait sa foi dans la capacité de contagion des valeurs communes qui fondent la vie démocratique en Europe. Notre rapporteur indique clairement que son intention a bien été de nous proposer un bilan de cette initiative, et donc d’évaluer dans quelle mesure les objectifs du partenariat pour la démocratie ont été atteints, ou du moins approchés.

Il rappelle les engagements pris par le Conseil national palestinien, qui constituent autant de reprises de principes depuis longtemps formulés par le Conseil de l’Europe. On constate, en lisant son rapport, que les autorités qu’il a rencontrées se sont employées à faire référence à ces engagements et à mettre en valeur les efforts accomplis pour y faire face.

Il indique que ses interlocuteurs palestiniens ont souvent mis en avant le conflit avec Israël pour justifier les retards pris ou les manquements constatés dans l’application des réformes souhaitées par le Conseil de l’Europe. Sans doute y a-t-il quelque chose d’automatique et de convenu dans une telle justification. Mais on ne peut nier que l’évolution actuelle des relations entre Israël et la Palestine, dans le contexte troublé que connaît généralement le monde arabe, n’est pas de nature à faciliter la réalisation concrète de réformes dont la progression nécessite, dans des zones plus « calmes », un minimum de stabilité.

La poursuite du partenariat pour la démocratie n’est pas facile à envisager dans une conjoncture caractérisée, selon le rapporteur lui-même, par « l’inexistence actuelle d’un pouvoir législatif effectif à l’origine d’un grave déséquilibre dans les structures étatiques palestiniennes ». On sait aussi que les relations entre le Président de l’Autorité nationale palestinienne et son Premier ministre ne sont pas excellentes. Enfin, la dissociation de l’assiette territoriale de l’Autorité nationale palestinienne entre deux zones séparées à la fois par la géographie et par les dissensions internes au sein des forces politiques palestiniennes n’est pas de nature à faciliter l’édification d’une société politique au sens où nous entendons ce terme en Occident.

D’ailleurs, les négociations entre le Hamas et le Fatah ne semblent pas devoir déboucher, à une échéance très proche, sur la constitution d’un gouvernement d’union nationale, lequel permettrait pourtant de renforcer la cohésion de la société palestinienne et la capacité de l’Autorité nationale palestinienne à se faire entendre sur la scène internationale comme dans les négociations bilatérales.

Le rapporteur a certainement présents à l’esprit tous ces faits quand il conclut à l’impossibilité pratique pour les Palestiniens de conduire un certain nombre des réformes auxquelles ils ont donné leur assentiment de principe. Cependant, il affirme la nécessité de poursuivre la coopération déjà engagée, notamment le partenariat pour la démocratie mis en œuvre par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Il a raison : il ne faut rompre aucun des liens qui peuvent permettre, à une échéance plus ou moins rapprochée, la mise en place progressive d’institutions véritablement démocratiques en Palestine, même si, pour le moment, les possibilités concrètes de voir des développements positifs demeurent, hélas ! très limitées.

M. SABELLA (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Je remercie infiniment M. Tiny Kox pour le travail qu’il a accompli et pour son rapport concernant l’évaluation du partenariat pour la démocratie. Plus généralement, je remercie l’Assemblée pour ces deux années de partenariat. Nous sommes également très sensibles au travail et au soutien du secrétariat de l’Assemblée parlementaire – je salue notamment Mme Despina Chatzivassiliou et M.João Ary. Nous sommes aussi reconnaissants à M. Dişli et à Mme Bilgehan pour leurs rapports pour avis.

Nous sommes extrêmement fiers de ce partenariat. Il prend acte des aspirations de notre peuple, lequel veut mettre un terme à l’occupation et pouvoir exercer ses droits, à l’instar d’autres peuples. Il renforce également notre détermination à être un peuple prêt à servir les valeurs de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit. Sans une telle détermination, nous ne pourrions aller de l’avant, qu’il s’agisse des relations au sein de notre société ou de nos rapports avec nos voisins. Comme j’ai eu l’occasion de le dire ici même en d’autres occasions, ce partenariat a été pour nous un modèle : nous espérons pouvoir reproduire l’exemple fourni par vos expériences, aussi approfondies que variées, qui ont permis de parvenir à un consensus entre des vues parfois conflictuelles. Cela nous a encouragés à affronter dans le même esprit le défi qui se présente à nous. Nous nous sentons raffermis par ce partenariat, tout en étant parfaitement conscients des défaillances qui peuvent être les nôtres – mais l’heure n’est pas aux mea culpa.

Nous sommes également conscients du fait que nous devons être à l’écoute des autres, mais en étant avec eux sur un pied d’égalité. Nous avons pris bonne note des remarques de la délégation israélienne qui figurent dans le rapport de M. Kox ; nous avons apporté nos propres éclaircissements. Nous sommes avides d’un avenir dans lequel les relations ne seraient pas simplement marquées par la condescendance ou par les jugements de valeur, mais où nous serions tous sur un pied d’égalité et où l’on reconnaîtrait les droits de notre peuple, dans les circonstances très difficiles découlant de l’occupation qui se poursuit, sans oublier toutes les mesures qui repoussent sans cesse les pourparlers de paix et, par conséquent, la paix elle-même.

Le renouvellement du partenariat est un message très fort envoyé par votre Assemblée aux Palestiniens comme aux Israéliens. Nos relations doivent se fonder sur le respect mutuel. Il faut mettre un terme à l’occupation et à ses répercussions négatives, car elle demeure la pierre d’achoppement pour l’avenir de la paix, de la reconnaissance mutuelle et de la réconciliation qui, je l’espère, interviendra en définitive entre nos deux peuples. Merci encore à l’Assemblée parlementaire de nous avoir fait confiance et d’avoir accordé ce partenariat à notre peuple, représenté ici par le Conseil national palestinien.

Mme ALLAIN (France) – Monsieur le rapporteur, vous évoquez dans votre projet de résolution le fait que l’occupation israélienne n’a pas permis au Conseil national palestinien de respecter tous ses engagements. Il convient de rappeler avec force que ce contexte crée des difficultés qui sont incompatibles avec l’émergence d’une démocratie.

Le mur qui sépare depuis plus de dix ans Israël et les territoires occupés en est le symbole le plus insolent. Déclaré illégal par la Cour internationale de justice de La Haye le 9 juillet 2004, il constitue une violation inacceptable du droit international. Il représente 60 000 hectares de terres fertiles et une centaine de puits, auxquels s’ajoutent des sites de forage importants. Fait accompli pour l’avenir, le mur aggrave considérablement les conditions de vie et de travail des Palestiniens. Ses principales victimes sont les paysans expropriés, souvent séparés d’une partie de leur exploitation ; les commerçants situés de l’autre côté d’al-Ram déplorent une baisse de 30 % à 50 % de leur chiffre d’affaires ; les médecins et infirmiers ne peuvent plus travailler à Jérusalem. Certains habitants risquent de perdre leur logement. De nombreux étudiants et travailleurs doivent faire preuve d’une grande patience chaque jour pour passer les checkpoints et autres obstacles improbables. Cette situation humanitaire déjà difficile a été aggravée par la crise politique en Égypte, avec la fermeture de tunnels qui permettaient à la population de survivre.

Alors, comment espérer la mise en place d’une réelle démocratie sur ces terres où les droits humains sont bafoués ? Tout à l’heure, à propos du racisme, on a parlé de crime contre l’humanité. Comment accepter les crimes perpétrés par l’Etat d’Israël à l’encontre de peuples vivant dans un état de guerre perpétuelle ? L’implication de l’Union européenne par l’intermédiaire du soutien des entreprises d’armement doit être dénoncée.

Heureusement, des espoirs nous sont permis ; ils émanent d’actes courageux des peuples en résistance qui s’expriment chaque automne lorsque des boucliers humains venant du monde entier – parmi lesquels on compte des centaines de volontaires israéliens – permettent aux paysans palestiniens de récolter leurs olives ou de replanter des arbres. Ils agissent ainsi pour un changement possible et pour l’émergence d’un vivre ensemble indispensable pour que la démocratie se développe sur ces terres. L’exemple de la nation arc-en-ciel qui a émergé en Afrique du Sud à la fin de l’Apartheid nous prouve que les murs peuvent tomber – pourquoi n’en serait-il pas de même en Palestine ?

Sir Edward LEIGH (Royaume-Uni)* – On voit ce qu’Israël a obtenu ces dernières années dans le débat qui nous occupe : depuis le Groupe pour la gauche unitaire européenne jusqu’aux conservateurs britanniques – dont je suis – partisans de l’Etat d’Israël, nous sommes tous unis, au-delà de nos différences, pour défendre le partenariat entre le Conseil de l’Europe et le Conseil national palestinien. Certes, le rapport relève certaines carences de la direction du Fatah et certaines insuffisances ; il existe ainsi des manques en ce qui concerne les droits de femmes et il y a des choses critiquables s’agissant du traitement des journalistes, mais toutes ces points négatifs sont finalement bien peu de choses, voire insignifiantes, face au refus patent de liberté opposé aux Palestiniens, lesquels vivent sous un statut d’occupation.

Tout récemment, je me suis rendu à Bethléem. J’ai vu un pays dont les habitants sont des prisonniers. Même les observateurs neutres sont horrifiés par la poursuite de l’expansion des colonies de peuplement dans des territoires historiquement palestiniens ; même les gens qui se rendent là-bas sans parti-pris ou préjugés ne peuvent que constater la situation.

Ce que vient de dire M. Sabella, qui illustre le point de vue palestinien, démontre très bien aussi ce que cherche à obtenir ce rapport, à savoir l’unanimité de notre Assemblée pour redire que les Palestiniens, comme tous les autres peuples, ont le droit de vivre dans la paix, la liberté et la démocratie.

M. SHAI (Israël, observateur)* – Israël et les Palestiniens sont en train de négocier, passant par des hauts et des bas, et nous ne devons pas préjuger des négociations avant leur issue. Les deux parties elles pourront peut-être s’écarter des positions dures qu’elles ont adoptées au départ.

Du point de vue d’Israël, l’essentiel est la sécurité : nous devons avoir des conditions de sécurité maximales pour éviter que les territoires ne tombent entre les mains des terroristes, comme à Gaza, et n’accepterons le retrait des territoires que si notre sécurité au quotidien n’est pas menacée. Cette semaine, nous commémorons la Shoah : nous n’avons pas peur d’un autre holocauste, nous savons que le monde s’y opposerait ; pas plus que nous n’avons peur de l’ombre de l’Holocauste, car on ne peut pas nous enlever la mémoire de ceux qui ont été assassinés il y a 70 ans.

L’Europe a un rôle à jouer dans le processus de paix. Son implication doit être constructive et non destructive. Avec votre soutien, nous pourrions parvenir une vision partagée pour les Palestiniens et les Israéliens. Les offres venues d’Europe sont attrayantes et intéressantes. J’en appelle à vous en tant que représentants d’Etats et de parlements pour que ce message soit transmis, car ce n’est qu’ainsi, par la persuasion, que les Israéliens et les Palestiniens auront une chance de parvenir à la fin de ce conflit.

Au bout du processus, les Israéliens prendront les mesures nécessaires pour motiver leur gouvernement et l’inciter à bouger. Mais j’ajouterai aussi qu’il faut être deux pour négocier. L’Europe a différentes manières d’encourager les Palestiniens à se montrer plus souples, à s’adapter et à adopter une approche réaliste qui, seule, peut nous aider. Les Palestiniens accusent Israël d’être coupable de leur défaut de démocratisation, mais ce n’est pas exact : nous avons soutenu l’extension du statut de la Palestine sous monitoring.

M. MOTA AMARAL (Portugal)* – Notre Assemblée a décidé d’accorder le partenariat pour la démocratie au Conseil national palestinien sur la base de la requête et de l’engagement affirmé de ses dirigeants vis-à-vis des valeurs essentielles du Conseil de l’Europe.

Nous avons également pris note des promesses officielles visant à mettre en œuvre des réformes administratives et législatives dans les territoires relevant de la responsabilité des autorités nationales palestiniennes afin de permettre au peuple palestinien de jouir des bienfaits du plein respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit. La situation en Palestine est sous observation de notre Assemblée, notamment sous celle de la sous-commission au Proche-Orient, dont la longue visite dans ses territoires, ainsi qu’en Israël, nous a permis d’avoir des échanges fructueux avec les principaux dirigeants palestiniens.

Dès le début de ce dialogue et de cette coopération, il a très clairement été indiqué que le statut du partenariat pour la démocratie impliquait des obligations mutuelles, à l’égard de notre Assemblée mais aussi de chacun des parlements impliqués. Pour notre part, nous avons fourni assistance et expertise, outre un forum, en plénière et lors de réunions de commission où nos partenaires peuvent faire entendre leurs voix, et nos amis palestiniens ont mis à profit cette possibilité en ayant une participation forte et effective, tout à fait louable. Mais nous attendons des progrès sur la mise en œuvre des institutions démocratiques et le renforcement des droits de l’homme sur le terrain, comme le demande à juste titre Tiny Kox dans son rapport, dont je tiens à le remercier et le féliciter.

L’évaluation à laquelle nous procédons actuellement exprime la pleine compréhension de la situation très spécifique qui est celle de la Palestine, du peuple palestinien et de ses autorités, tout en remarquant les importantes failles qui perdurent. Nous espérons que l’actuel cycle de négociations connaîtra le succès, ouvrant enfin la voie à une réelle avancée dans le conflit israélo-palestinien, dans le cadre d’une solution à deux Etats.

Nous encourageons nos collègues palestiniens à déployer tous les efforts possibles pour organiser des élections législatives libres et équitables et à former un gouvernement d’unité nationale, car ce sont là des tâches très urgentes, et poursuivrons en ce sens le partenariat pour la démocratie entre notre Assemblée et le Conseil national palestinien.

Mme MATEU PI (Andorre)* – L’excellent rapport que nous présente aujourd’hui Tiny Kox est, de mon point de vue, pondéré, mesuré et objectif, tout comme les avis de M. Dişli et de Mme Bílgehan.

Il faut reconnaître que c’est loin d’être facile tant cette région est soumise, au quotidien, à des convulsions et des controverses depuis des décennies. Or, force est de constater que ce rapport nous offre un regard ouvert et inclusif sur la manière dont notre institution peut accompagner un territoire pour adopter pleinement nos standards en matière de droits de l’homme, de respect du droit et de la démocratie.

Ce n’est pas un rapport complaisant pour les parties. Il met tout en avant, et sur un même pied d’égalité, aussi bien ce qui marche que ce qui ne fonctionne pas, ou mal. Il signale, côte à côte, les perceptions, les sentiments et les actions des différents acteurs politiques et de la vie civile ou économique, qu’ils soient positifs, négatifs ou attentistes. Mais tout cela en faisant preuve d’un grand tact. C’est la voie à suivre, car c’est en adoptant une telle démarche que le Conseil national palestinien pourra avancer, pas à pas, en tissant les lois adéquates, vers la démocratie, l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme.

Certes, comme le souligne notre rapporteur, le chemin pour remplir les objectifs fixés par notre Assemblée est encore long et épineux, et les progrès bien lents. Mais, grâce à ce partenariat et aux outils d’accompagnement que notre Organisation peut offrir aux autorités palestiniennes, je suis convaincue qu’il sera moins aride à parcourir et que la Palestine deviendra, de plein droit, un Etat de droit reconnu internationalement.

M. SALHI (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – En tant que délégation palestinienne, nous voulons tout d’abord souligner la nécessité d’utiliser les valeurs de votre Assemblée pour obtenir la libération des membres palestiniens du parlement, détenus dans les prisons israéliennes, et mettre fin au harcèlement de nos collègues qui sont interdits de voyager, comme cela s’est produit pour un membre de notre délégation, M. Qais Khader, que vous connaissez bien, ainsi qu’à Mme Khalida Jarrar.

Outre l’occupation, le comportement des Israéliens est une violation patente des valeurs que sont la démocratie, les droits à l’autodétermination et les droits de l’homme. Le moment est venu de mettre fin à l’occupation, à la politique de colonisation et de construction, et d’entrer dans une nouvelle ère qui permettra la paix. Nous comprenons les problèmes, notamment celui que pose le fait de n’avoir pas fixé de date pour les élections. Nous essayons de le résoudre en favorisant la réconciliation entre tous les groupes, y compris avec le Hamas. Nous comprenons que nous sommes coupables de certaines violations de la démocratie. Mais nous vivons aussi sous l’occupation.

En réalité, les partis politiques palestiniens et les ONG de défense des droits de l’homme dénoncent eux-mêmes les violations citées par M. Shai. Nous sommes conscients des problèmes et nous essayons de les résoudre, mais nous avons besoin de l’aide de la communauté internationale pour mettre fin à l’occupation israélienne, qui viole les droits fondamentaux, les valeurs démocratiques et le principe de l’autodétermination des peuples.

Mme DURRIEU (France) – Je remercie Tiny Kox pour ce rapport et je salue nos collègues palestiniens, et parmi eux le président du Conseil législatif palestinien, ou du moins ce qu’il reste de ce dernier.

Monsieur Schennach a eu raison de rappeler que les élections de 2006 ont été observées par la communauté internationale et que leurs résultats n’ont pas été reconnus. Nous portons par conséquent un peu la responsabilité des divisions qui existent aujourd’hui et nous sommes excessifs quand nous appelons à la réconciliation, à des élections et à la formation d’un gouvernement d’unité nationale. Certes, ce sont les objectifs qu’il faut atteindre, mais nous ne devons pas oublier le contexte dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui.

L’ONU a donné un nom à la Palestine et le statut d’Etat non membre, mais la Palestine reste un Etat virtuel, celui d’un peuple hors sol et occupé. La Cour internationale de justice a déclaré illégal le blocus israélien. Il y a en Cisjordanie 60 check-points permanents, 410 check-points volants, 436 obstacles physiques, 100 types de permis de circuler différents, 250 colonies, 500 000 colons, et des murs, des murs… Ajoutons l’annexion de Jérusalem Est et la volonté, affirmée au mois de décembre, d’annexer la vallée du Jourdain – c’est-à-dire 9 à 15 kilomètres de terres agricoles, un espace touristique, une zone où le foncier a un prix, 80 000 Palestiniens et 950 colons...

Je voudrais dire à nos amis israéliens que je reconnais leur existence et leur besoin de sécurité, mais celui-ci ne légitime pas tout. J’éprouve donc une certaine gêne, Monsieur le rapporteur, devant la disproportion entre la situation dramatique du peuple palestinien et nos exigences légitimes, lesquelles doivent être adaptées à la nature de la situation.

J’ai lu le courrier de nos amis palestiniens : non, nos exigences ne sont pas injustes, elles sont légitimes. Je souhaite et je pense que les Palestiniens arriveront au bout du processus engagé avec le partenariat pour la démocratie. Mais, de notre côté, faisons preuve de davantage de bienveillance !

Mme STRIK (Pays-Bas)* – Je soutiens ce rapport très équilibré sur la première étape de la collaboration entre le Conseil de l’Europe et la Palestine. M. Kox présente les domaines dans lesquels des améliorations ont été constatées et ceux dans lesquels elles restent attendues. J’espère que chacun continuera à déployer des efforts afin de renforcer le partenariat qui nous unit avec la Palestine. Nous ne pouvons pas nous pencher sur le processus de réforme de cet Etat sans tenir compte du contexte dans lequel le Conseil national palestinien doit fonctionner. Il reste très vulnérable et sa politique dépend dans une très large mesure de celle menée par le gouvernement israélien.

Les citoyens palestiniens souffrent de graves restrictions dans leur liberté de déplacement. Les responsables politiques sont ainsi empêchés de participer à des conférences importantes. Je lance un appel à Israël, pays observateur, afin qu’il mette un terme à ces restrictions et laisse les hommes politiques palestiniens faire leur travail.

Les violations de l’Etat de droit en Palestine doivent être dénoncées. C’est d’ailleurs ce à quoi s’emploie le Conseil national palestinien, tout en faisant face aux conséquences de l’occupation illégale d’Israël. Nous espérons qu’au mois d’avril, John Kerry parviendra à mettre en place un cadre provisoire pour les négociations. Néanmoins, nous ne pouvons dépendre uniquement de ses efforts. L’Europe doit également s’efforcer de mettre un terme à l’occupation illégale d’Israël et à la construction de nouvelles colonies. L’Union européenne dispose d’un outil concret avec l’accord d’association économique, qui inclut une clause sur les droits de l’homme. En raison du non-respect des arrêts de la Cour internationale de justice, cette clause n’a pas été appliquée. Poursuivre le dialogue est d’une importance vitale, mais les paroles doivent être suivies par des actes, faute de quoi elles perdent tout leur poids.

Le Conseil de l’Europe est dans une situation unique puisqu’il entretient des relations avec les parlements des deux pays. J’invite instamment l’Assemblée, mais aussi le Comité des Ministres, à réfléchir à une stratégie qui mettrait à profit ces contacts pour rapprocher les deux pays. Ce serait une excellente chose que le processus soit alimenté par des parlementaires, qui sont la base de la démocratie. Les droits de l’homme doivent être respectés dans les deux pays. La situation a assez duré !

LE PRÉSIDENT* – Mme Kanelli, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

M. CHISU (Canada, observateur)* – La Canada est favorable, comme l’Assemblée du Conseil de l’Europe, à la reconnaissance de deux Etats comme solution au conflit israélo-palestinien. Il faut un règlement du conflit négocié, qui garantisse le droit d’Israël à vivre en paix et en sécurité avec ses voisins, et l’établissement d’un Etat palestinien viable et indépendant. Toute mesure prise par le Conseil national palestinien pour démocratiser le pays, protéger les droits de l’homme et respecter la prééminence du droit, est un signe encourageant.

Le Canada n’a pas reconnu la Palestine. Il attend pour cela qu’un accord de paix soit signé avec Israël. Tout doit être fait pour faciliter le retour des Palestiniens à la table des négociations. Le statut qui leur a été accordé n’est pas nécessairement favorable, selon nous, au processus de paix. Il a sans doute constitué un atout psychologique pour les Palestiniens, mais il a accru les tensions avec Israël.

Les autorités palestiniennes connaissent une situation précaire. L’économie de la région est également très fragile. Le Fatah et le Hamas se disputent en permanence. Au total, de nombreux problèmes pèsent sur les Palestiniens. Nous regrettons que l’accord de réconciliation n’ait pas pu être mis en place et qu’un gouvernement unitaire n’ait pas été constitué. Le Conseil national palestinien ne fonctionne pas de manière satisfaisante et malgré la création d’une agence anticorruption, ce fléau demeure. Les leaders palestiniens sont sans doute les mieux placés pour y mettre un terme. Enfin, la peine de mort n’a pas été abolie à Gaza. Des réformes dans tous ces domaines, non seulement faciliteraient la vie des Palestiniens, mais renforceraient la confiance des négociateurs de paix.

Le Canada a annoncé qu’il fournirait des aides financières supplémentaires aux Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza pour favoriser le développement du processus de paix, promouvoir la sécurité et l’Etat de droit, favoriser une économie durable et permettre le déploiement d’une assistance humanitaire.

M. CHITI (Italie)* – Nous avons eu raison d’accorder en 2011 le statut de partenaire pour la démocratie au Maroc et au Conseil national palestinien. Par cette coopération institutionnelle, nous entendons apporter notre contribution à la démocratie. Ce choix a produit des résultats positifs. Les objectifs initialement fixés font ensuite l’objet d’une vérification régulière. En ce qui concerne le Conseil national palestinien, des progrès, mais aussi des difficultés, ont pu être identifiés. Le Conseil national palestinien travaille dans un certain contexte : les négociations de paix avec Israël ne sont pas terminées. Nous devons lancer un appel très clair pour qu’elles se poursuivent et s’achèvent.

Il n’existe malheureusement pas de gouvernement palestinien d’unité nationale. Le rapport pointe le comportement répréhensible du gouvernement du Hamas – exécutions, absence de liberté d’expression, etc.

Le projet de résolution fixe des objectifs concrets dont il est possible d’apprécier ensuite s’ils ont été atteints. Il souligne la nécessité de revoir la coopération dans des domaines clés dont la réforme du système judiciaire, la promotion de la bonne gouvernance, la prévention de la traite des êtres humains. Plus important encore, sans doute, il rappelle que la structure même du Conseil national palestinien n’a pas encore été réformée pour en faire un organe démocratiquement élu. Ce déficit démocratique est source de déséquilibre.

En identifiant ainsi des objectifs concrets, nous nous donnons les moyens de faire valoir l’utilité de ce partenariat et la nécessité de le confirmer.

LE PRÉSIDENT* – Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs. Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent déposer, dans les 24 heures, leur intervention dactylographiée au service de la séance pour publication au compte rendu.

J’appelle la réplique du rapporteur. Monsieur Kox, il vous reste quatre minutes et demie.

M. KOX (Pays-Bas), rapporteur* – En principe, le rapporteur doit répondre aux questions des orateurs, mais peu de questions m’ont été posées. On a plutôt exprimé le souhait de renforcer ce partenariat pour la démocratie ; personne ne s’est opposé à son renouvellement, ce qui est une très bonne chose.

Comment construire une démocratie sous occupation ? Pour un grand nombre d’entre vous, dont M. Schennach, Mme Allain et Mme Strik, c’est mission impossible. Néanmoins, les Palestiniens ont souscrit cet engagement ; ils ont voulu au moins essayer, afin de préparer la Palestine à devenir un jour un Etat indépendant, démocratique et un Etat de droit. C’est peut-être impossible, mais nous nous devons de soutenir les efforts de nos amis palestiniens en ce sens. C’est vrai, Madame Durrieu, les exigences que nous adressons aux Palestiniens semblent disproportionnées ; c’est l’occupation dont nous devrions exiger qu’elle prenne fin de telle sorte que les Palestiniens puissent développer leur pays. Mais l’occupation existe, et pourtant, les Palestiniens ont délibérément conclu ce partenariat. Peut-être s’agit-il donc ici de nous rappeler, comme à eux, que ce partenariat n’est pas abstrait, qu’il comporte des obligations, qu’il repose sur des engagements concrets.

On le voit quand on s’y rend : en Palestine, tout est difficile, voire impossible. S’il s’y produit néanmoins certaines choses, les Palestiniens ont des raisons d’en être fiers. Nous leur en demandons encore plus, voilà pourquoi nous souhaitons proroger ce partenariat pour la démocratie. De notre côté, que pourrions-nous faire de plus pour la Palestine ? C’est ce qu’a demandé M. Villumsen. D’abord, aider les Palestiniens à adhérer à plusieurs conventions du Conseil de l’Europe ; c’est difficile, mais ce n’est pas impossible. Ensuite, leur obtenir davantage de soutiens pour qu’ils puissent développer leur nation avec l’aide de notre Assemblée.

Pour le dire très clairement, il s’agit de construire une démocratie durable ; sous occupation, je l’avoue humblement, je ne vois pas comment cela serait possible. On ne peut édifier une démocratie que dans un pays libre et indépendant.

Monsieur Shai, vous ne vous êtes pas opposé à ce partenariat pour la démocratie et je vous en remercie. Israël est favorable à une évolution démocratique en Palestine. Vous nous dites que l’on ne peut pas demander à un pays d’oublier sa propre histoire. Voilà justement pourquoi je vous dis, à vous et au gouvernement israélien : « laisse partir les Palestiniens ! » Donnez-leur ce droit que vous avez obtenu, laissez-leur la possibilité de construire leur propre démocratie. Et, pour cela, commencez par libérer les députés palestiniens qui sont en détention afin qu’ils puissent prendre part à nos travaux. Comment la démocratie pourrait-elle fonctionner si vous emprisonnez les parlementaires ? Je vous en prie, essayez de nous aider ; efforçons-nous de nous unir, non sans vous, mais avec vous. Ce serait un premier pas.

Je remercie mes collègues du soutien qu’ils m’ont apporté et je leur demande de voter pour le projet de résolution.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution sur lequel trois amendements ont été déposés.

La présidente de la commission des questions politiques et de la démocratie demande l’application de l’article 33-11 du Règlement, les trois amendements au projet de résolution ayant été adoptés à l’unanimité par la commission.

J’en donne lecture.

L’amendement 1, déposé par MM. Selvi, Denemeç, Çonkar, Türkeş, Türkeş, tend, dans le projet de résolution, avant le paragraphe 9.1, à insérer le paragraphe suivant : « se félicite des efforts déployés par le Conseil national palestinien pour chercher à respecter les engagements politiques pris en tant que partenaire pour la démocratie, malgré toutes les difficultés et obstacles liés à la poursuite de l’occupation et aux mesures illégales telles que les arrestations arbitraires et les restrictions à la liberté de circulation. »

L’amendement 2, déposé par la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 9.2., dans la deuxième phrase, à remplacer les mots « ces exécutions » par le texte suivant : « toute forme de peine capitale. Elle invite instamment le CNP à intervenir auprès des autorités du Hamas pour mettre un terme aux exécutions à Gaza et à abolir la peine de mort dans le Code pénal palestinien, conformément à l’engagement pris dans le cadre du partenariat ; ».

L’amendement 3, déposé par la commission sur l’égalité et la non-discrimination, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 9.4 par le paragraphe suivant : « reconnaît les efforts entrepris, notamment par le ministère de la Condition féminine et les organisations de femmes, pour promouvoir la participation des femmes dans la vie politique et la vie publique ; lutter contre la discrimination fondée sur le genre ; assurer une égalité effective entre les femmes et les hommes ; et lutter contre la violence sexiste. Elle s’inquiète cependant du regain de violence à l’égard des femmes et appelle les autorités palestiniennes à agir de manière résolue contre ce fléau, en coopération avec la société civile et plus spécifiquement les organisations de femmes ; ».

En l’absence d’objection, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

LE PRÉSIDENT* – Nous en venons au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13382, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (57 voix pour, 2 voix contre et 3 abstentions).

8. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance publique aura lieu demain matin, à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

(La séance est levée à 20 h 10.)

S O M M A I R E

1. Élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre du Danemark (suite)

2. Modifications dans la composition des commissions

3. Communication du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

M. Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

Questions : MM. Schennach, Agramunt, Pushkov, Mme Taktakishvili, MM. Hunko, Díaz Tejera, Fournier, Mmes Zohrabyan, Christoffersen, MM. Huseynov, Villumsen

4. Une stratégie pour la prévention du racisme et de l’intolérance en Europe – La lutte contre le racisme dans la police (Débat conjoint)

Présentation par M. Gunnarsson du rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination sur « Une stratégie pour la prévention du racisme et de l’intolérance en Europe » (Doc. 13385)

Présentation par M. D. Davies du rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination sur « La lutte contre le racisme dans la police » (Doc. 13384)

Orateurs : Mmes Lundgren, Renner, M. G. Davies, Mme Quintanilla, MM. Marias, Díaz Tejera, Mmes Blondin, Schou, M. Sidyakin, Mmes Zohrabyan, Christoffersen, Faber-Van de Klashorst, Strik

5. Élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre du Danemark (Résultats du scrutin)

6. Débat conjoint (suite)

Orateurs : M. Kalmar, Mme Virolainen, M. Timchenko, Mme Taktakishvili, MM. Gozi, Loukaides, Casey, Mme Santerini, M. Chaouki, Mmes Pipili, Gafarova, MM. Kolman, Kandelaki, Chiti, Mayer, Mme Pashayeva

Réponses de MM. les rapporteurs et de Mme Dervoz vice-présidente de la commission sur l’égalité et la non-discrimination

Vote sur un projet de résolution amendé

Vote sur un projet de recommandation

Vote sur un projet de résolution amendé

7. Évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Conseil national palestinien

Présentation par M. Kox du rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc. 13382)

Présentation par M. Dişli du rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, saisie pour avis

Présentation par Mme Bilgehan du rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, saisie pour avis

Orateurs : MM. Villumsen, Schennach, Sasi, Makhmutov, Reimann, Mme Osborne, MM.  Rochebloine, Sabella, Mme Allain, Sir Edward Leigh, MM. Shai, Mota Amaral, Mme Mateu Pi, M. Salhi, Mmes Durrieu, Strik, MM. Chisu, Chiti

Réponse de M. le rapporteur

Vote sur un projet de résolution amendé

8. Prochaine séance publique

Annexe I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque

Pedro AGRAMUNT

Alexey Ivanovich ALEKSANDROV*

Miloš ALIGRUDIĆ

Jean-Charles ALLAVENA*

Werner AMON

Luise AMTSBERG*

Lord Donald ANDERSON*

Paride ANDREOLI

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV*

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI/Brigitte Allain

Daniel BACQUELAINE*

Egemen BAĞIŞ*

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE/Giorgi Kandelaki

Taulant BALLA*

Gérard BAPT*

Gerard BARCIA DUEDRA/Sílvia Eloïsa Bonet Perot

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK

Ondřej BENEŠIK/Pavel Holík

José María BENEYTO*

Levan BERDZENISHVILI/Guguli Maghradze

Deborah BERGAMINI/Milena Santerini

Sali BERISHA/Oerd Bylykbashi

Anna Maria BERNINI/Claudio Fazzone

Teresa BERTUZZI

Robert BIEDROŃ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY*

Ľuboš BLAHA*

Philippe BLANCHART*

Delia BLANCO*

Jean-Marie BOCKEL*

Eric BOCQUET/Maryvonne Blondin

Mladen BOJANIĆ

Olga BORZOVA

Mladen BOSIĆ/Ismeta Dervoz

António BRAGA

Anne BRASSEUR/Claude Adam

Alessandro BRATTI/Khalid Chaouki

Márton BRAUN*

Gerold BÜCHEL

André BUGNON/Maximilian Reimann

Natalia BURYKINA*

Nunzia CATALFO

Mikael CEDERBRATT

Elena CENTEMERO/Giuseppe Galati

Lorenzo CESA

Irakli CHIKOVANI*

Vannino CHITI

Tudor-Alexandru CHIUARIU/Viorel Riceard Badea

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE*

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH

James CLAPPISON

Deirdre CLUNE

Agustín CONDE*

Telmo CORREIA

Paolo CORSINI

Carlos COSTA NEVES

Celeste COSTANTINO

Jonny CROSIO

Yves CRUCHTEN

Katalin CSÖBÖR

Milena DAMYANOVA*

Joseph DEBONO GRECH*

Armand De DECKER*

Reha DENEMEÇ

Roel DESEYN*

Manlio DI STEFANO

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK/Marjolein Faber-Van De Klashorst

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ*

Jim DOBBIN/Joe Benton

Ioannis DRAGASAKIS

Damian DRĂGHICI

Elvira DROBINSKI-WEIß*

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE/David Davies

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA*

Lady Diana ECCLES/Cheryl Gillan

Tülin ERKAL KARA*

Franz Leonhard EßL/Edgar Mayer

Bernd FABRITIUS*

Joseph FENECH ADAMI

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV/Alexander Sidyakin

Doris FIALA

Daniela FILIPIOVÁ/Ivana Dobešová

Ute FINCKH-KRÄMER*

Axel E. FISCHER

Gvozden Srećko FLEGO*

Bernard FOURNIER

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON/Bernadette Bourzai

Béatrice FRESKO-ROLFO*

Martin FRONC*

Sir Roger GALE*

Adele GAMBARO*

Karl GARÐARSSON

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO

Pavol GOGA*

Jarosław GÓRCZYŃSKI

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA*

Sandro GOZI

Fred de GRAAF/Tineke Strik

Patrick De GROOTE*

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST

Dzhema GROZDANOVA*

Attila GRUBER*

Mehmet Kasim GÜLPINAR/Ahmet Berat Çonkar

Gergely GULYÁS*

Nazmi GÜR*

Antonio GUTIÉRREZ*

Ana GUŢU

Maria GUZENINA-RICHARDSON

Carina HÄGG/Jonas Gunnarsson

Sabir HAJIYEV*

Andrzej HALICKI

Hamid HAMID*

Mike HANCOCK

Margus HANSON

Davit HARUTYUNYAN/Armen Rustamyan

Alfred HEER

Michael HENNRICH*

Martin HENRIKSEN

Andres HERKEL

Françoise HETTO-GAASCH

Adam HOFMAN*

Jim HOOD*

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER

Johannes HÜBNER*

Andrej HUNKO

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV

Vitaly IGNATENKO/Olga Kazakova

Vladimir ILIĆ*

Florin IORDACHE/Daniel Florea

Igor IVANOVSKI

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT*

Gediminas JAKAVONIS

Stella JANTUAN

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI*

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN*

Frank J. JENSSEN

Jadranka JOKSIMOVIĆ*

Ögmundur JÓNASSON

Čedomir JOVANOVIĆ*

Antti KAIKKONEN

Ferenc KALMÁR

Mariusz KAMIŃSKI/Zbigniew Girzyński

Deniza KARADJOVA*

Marietta KARAMANLI/Pascale Crozon

Ulrika KARLSSON/Tina Acketoft

Jan KAŹMIERCZAK

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH/Marek Borowski

Serhiy KLYUEV*

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN

Kateřina KONEČNÁ

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR*

Attila KORODI/Corneliu Mugurel Cozmanciuc

Alev KORUN*

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO

Dmitry KRYVITSKY*

Athina KYRIAKIDOU

Jean-Yves LE DÉAUT*

Igor LEBEDEV/ Sergey Kalashnikov

Christophe LÉONARD*

Valentina LESKAJ*

Terry LEYDEN/Katherine Zappone

Inese LĪBIŅA-EGNERE*

Lone LOKLINDT

François LONCLE*

George LOUKAIDES

Yuliya L'OVOCHKINA*

Trine Pertou MACH/Nikolaj Villumsen

Saša MAGAZINOVIĆ*

Philippe MAHOUX/Olivier Henry

Thierry MARIANI*

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA

Ivan MELNIKOV*

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Jacques Legendre

Djordje MILIĆEVIĆ*

Philipp MIßFELDER*

Rubén MORENO PALANQUES

Igor MOROZOV*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK

Melita MULIĆ

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR*

Oľga NACHTMANNOVÁ*

Marian NEACŞU*

Baroness Emma NICHOLSON*

Michele NICOLETTI

Elena NIKOLAEVA/Robert Shlegel

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL/Tomasz Lenz

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY*

Lesia OROBETS*

Sandra OSBORNE

José Ignacio PALACIOS*

Liliana PALIHOVICI

Dimitrios PAPADIMOULIS/Maria Giannakaki

Ganira PASHAYEVA

Foteini PIPILI

Stanislav POLČÁK/Gabriela Pecková

Ivan POPESCU*

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT*

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE/Carmen Quintanilla

Alexey PUSHKOV

Mailis REPS*

Eva RICHTROVÁ/Marek Černoch

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE

Maria de Belém ROSEIRA

René ROUQUET

Pavlo RYABIKIN*

Rovshan RZAYEV

Vincenzo SANTANGELO/Maria Edera Spadoni

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI*

Stefan SCHENNACH

Ingjerd SCHOU

Frank SCHWABE*

Urs SCHWALLER/Elisabeth Schneider-Schneiter

Ömer SELVİ

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO

Bernd SIEBERT*

Arturas SKARDŽIUS/Algis Kašėta

Leonid SLUTSKY

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV

Christoph STRÄSSER*

Karin STRENZ*

Ionuţ-Marian STROE

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ*

Chiora TAKTAKISHVILI

Vyacheslav TIMCHENKO

Romana TOMC*

Lord John E. TOMLINSON*

Konstantinos TRIANTAFYLLOS

Mihai TUDOSE*

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ

Konstantinos TZAVARAS/Liana Kanelli

Ilyas UMAKHANOV*

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN*

Petrit VASILI*

Volodymyr VECHERKO

Mark VERHEIJEN*

Birutė VĖSAITĖ

Anne-Mari VIROLAINEN

Vladimir VORONIN/Grigore Petrenco

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ*

Zoran VUKČEVIĆ*

Draginja VUKSANOVIĆ*

Piotr WACH

Robert WALTER/Sir Edward Leigh

Dame Angela WATKINSON

Karl-Georg WELLMANN*

Katrin WERNER/Martina Renner

Morten WOLD

Gisela WURM

Jordi XUCLÀ

Tobias ZECH*

Kristýna ZELIENKOVÁ

Barbara ŽGAJNER TAVŠ*

Emanuelis ZINGERIS/Petras Gražulis

Guennady ZIUGANOV/Vassiliy Likhachev

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Croatie/ Ivan Račan

Siège vacant, Chypre*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Geraint DAVIES

Angeliki GKEREKOU

Kerstin LUNDGREN

Anvar MAKHMUTOV

André REICHARDT

Spyridon TALIADOUROS

Observateurs

Stella AMBLER

Marjolaine BOUTIN-SWEET

Sean CASEY

Corneliu CHISU

Héctor LARIOS CÓRDOVA

Jorge Iván VILLALOBOS SEÁÑEZ

Partenaires pour la démocratie

Azzam AL-AHMAD

Najat AL-ASTAL

Mohammed AMEUR

Mohammed Mehdi BENSAID

Nezha EL OUAFI

Bernard SABELLA

Mohamed YATIM

Annexe II

Liste des représentants ou suppléants qui ont participé au vote pour l’élection d’un juges à la Cour européenne des droits de l’homme au titre du Danemark

Werner AMON

Sali BERISHA/Oerd Bylykbashi

Anna Maria BERNINI/Claudio Fazzone

Robert BIEDROŃ

Alessandro BRATTI/Khalid Chaouki

James CLAPPISON

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK/Marjolein Faber-Van De Klashorst

Jim DOBBIN/Joe Benton

Franz Leonhard EßL/Edgar Mayer

Francesco Maria GIRO

Sandro GOZI

Andreas GROSS

Tiny KOX

Athina KYRIAKIDOU

Epameinondas MARIAS

Sir Alan MEALE

Michele NICOLETTI

Elena NIKOLAEVA/Robert Shlegel

Aleksandar NIKOLOSKI

Ingjerd SCHOU

Ömer SELVİ

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO

Emanuelis ZINGERIS/Petras Gražulis

Naira ZOHRABYAN