FR14CR08

AS (2014) CR 08

SESSION ORDINAIRE DE 2014

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la huitième séance

Jeudi 30 janvier 2014 à 16 h 30

Dans ce compte rendu :

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 16 h 35 sous la présidence de M. Rouquet, Vice-Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Intensifier les efforts de lutte contre les inégalités au niveau mondial :
la contribution de l’Europe au processus des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD)

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Sir Alan Meale, intitulé « Intensifier les efforts de lutte contre les inégalités au niveau mondial : la contribution de l’Europe au processus des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) » (Doc. 13368), présenté au nom de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable.

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi, de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs. Vous avez la parole.

Sir Alan MEALE (Royaume-Uni), rapporteur de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – Monsieur le Président, c’est un honneur de parler dans l’hémicycle au moment où vous assurez la présidence. Nous avons longtemps fréquenté les mêmes commissions, notamment celle qui est présentement concernée. Je sais combien vous êtes engagé pour que nos travaux aboutissent et donnent des résultats fructueux.

La question des inégalités, non seulement à l’intérieur de nos pays, mais aussi entre les différentes régions du monde, reste de la plus brûlante des actualités.

Force est de constater, alors que nous arrivons à la date butoir pour la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), que des progrès importants ont été réalisés en matière d’éradication de la pauvreté et de la faim, d’amélioration de l’accès à l’eau potable ou de réduction des taux de mortalité liés à des maladies telles que la malaria ou la tuberculose. Des avancées, il y en a ; ainsi en Afrique et en Asie, où la mortalité infantile a considérablement régressé. Toutefois, il subsiste des problèmes ; de nombreuses personnes meurent encore trop jeunes dans certaines régions du monde, et plus de 280 000 femmes meurent par an à la suite de complications liées à leur grossesse. Ces décès devraient pouvoir être évités.

En outre, plus de 840 millions de personnes souffrent encore quotidiennement de la faim, alors qu’il existe ailleurs des excédents de nourriture. C’est inacceptable !

L’Europe, qui est une des régions les plus prospères, ne doit pas se voiler la face. Nous devrions être en première ligne pour tenter de changer les choses.

Dans son dernier rapport, Oxfam a publié un indice de nutrition des différents pays, en fonction de la qualité et la quantité de la nourriture. Alors que l’Europe truste bien évidemment la quasi-totalité des vingt premières places, l’Afrique se trouve en queue de classement : cela montre combien les inégalités sont importantes. Oxfam est convaincu que les dirigeants mondiaux auraient les moyens d’assurer une meilleure redistribution des ressources si seulement ils en avaient la volonté.

Je suis d’accord avec l’économiste américain Paul Krugman qui, dans un article récent du New York Times, écrivait que la question des inégalités ne devait pas être mise entre parenthèses au prétexte qu’il fallait en priorité faire redémarrer l’économie mondiale. L’Europe doit maintenir le cap. La date butoir pour la réalisation des Objectifs du millénaire est 2015 ; or nous sommes loin de les avoir atteints.

Mais même s’ils l’étaient, ce ne serait pas suffisant : il faut d’ores et déjà envisager l’après-2015 ; des négociations en ce sens ont commencé. Là encore, l’Europe devra être en première ligne et appeler l’ensemble de la communauté internationale à faire encore davantage en matière de réduction des inégalités, de lutte contre les violences faites aux femmes et de préservation l’environnement.

Pour atteindre ces objectifs, une meilleure gouvernance est nécessaire. Il faut promouvoir les structures démocratiques partout dans le monde et, surtout, endiguer ce fléau qu’est la corruption.

Bien évidemment, l’Europe ne peut fournir toutes les solutions à tous les défis du XXIsiècle, mais elle peut apporter une contribution utile : par exemple, en faisant en sorte que les ressources soient mieux utilisées, ou en promouvant des modes de consommation plus respectueux. Bref, nous devons assumer nos responsabilités et être à la hauteur des enjeux.

Dans notre planète mondialisée, nous faisons tous partie d’un même système économique global. Nous devons admettre que nos sociétés de consommation de masse, qui nécessitent une production intensive, ont créé des déséquilibres. Dans d’autres régions du monde, les gens souffrent de nos excès – et ils ont besoin de notre aide. Ainsi, récemment, plus de 1 000 personnes sont mortes dans un accident au Bangladesh. Que faisaient-elles ? Elles produisaient des vêtements pour le marché européen. Voilà un exemple de ces perversions du monde moderne. Autre exemple : les Européens polluent la Méditerranée, et tous les pays riverains en souffrent. Et les pays qui devraient bénéficier de notre tourisme paient le prix de la pollution induite.

Alors, que faut-il faire ? Il faut déjà redoubler d’efforts pour réaliser les Objectifs du millénaire, lutter contre les formes de mauvaise gouvernance et la corruption, et faire en sorte qu’un nouveau programme soit arrêté pour l’après-2015, avec des objectifs de développement durable – en la matière, l’Union interparlementaire peut jouer un rôle clé.

Nous devons également supprimer les obstacles au développement mondial. Par exemple, nous devons tout faire pour que les femmes et les jeunes filles aient plus d’autonomie ; il faut garantir leur santé, mettre un terme aux violences sexuelles, promouvoir les droits des femmes et des jeunes – qui sont parmi les catégories les plus défavorisées dans beaucoup de pays – et assurer l’accès de tous à l’emploi.

Enfin, nous devons veiller à ce que le Conseil de l’Europe soit dûment représenté à toutes les manifestations qui seront organisées dans le monde d’ici à 2015, et au-delà.

Dans mon exposé des motifs, je cite le Mahatma Gandhi, qui disait : « La différence entre ce que nous faisons et ce que nous sommes capables de faire suffirait à résoudre une grande partie des problèmes de ce monde. » C’était vrai à son époque, ce l’est encore. Chers collègues, essayons de combler cette différence !

Mes propositions ont été entérinées à l’unanimité par la commission dès le mois de novembre. Je demande aujourd’hui à l’assemblée plénière de confirmer cette décision. Nous devons tout faire pour promouvoir un développement plus équitable et plus juste, qui sera susceptible de procurer un avenir prospère et pacifique à notre planète. Je crois que c’est un objectif que nous pouvons tous partager. J’espère par conséquent que vous approuverez le projet de résolution qui vous est soumis – mais, au-delà, j’espère qu’il sera considéré avec le plus grand sérieux, de manière à insuffler un nouveau dynamisme à la réalisation de ces Objectifs, en particulier en Europe.

M. LE PRÉSIDENT – Monsieur le rapporteur, il vous restera quatre minutes pour répondre aux orateurs. Nous ouvrons maintenant la discussion générale.

M. JÓNASSON (Islande), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* - Je veux apporter mon soutien à ce rapport et au projet de résolution qui nous est présenté.

Je félicite le rapporteur, Sir Alan Meale, ainsi que tous ceux qui ont contribué à la rédaction de ce rapport très complet, qui nous donne un bon aperçu de l’état d’avancement des Objectifs du millénaire. Il identifie aussi les activités qui contribueront à la réalisation de ces Objectifs, tels que décidés par les Nations Unies. Le Conseil de l’Europe, gardien des droits de l’homme, s’est penché sur ces questions, notamment en ce qui concerne la protection des enfants.

Dans ce domaine, nous constatons des progrès ; dans beaucoup de pays, on est davantage sensible à ces questions. Je parle d’expérience, puisque mon propre pays, l’Islande a mis en œuvre les recommandations du Conseil de l’Europe.

Tout cela concerne les Objectifs du millénaire par lesquels nous nous sommes engagés à protéger les principes de dignité humaine, d’égalité et d’équité tels qu’ils figurent dans le texte décidé aux Nations Unies en septembre 2000.

Ce rapport souligne que même si plus de personnes ont accès aujourd’hui à de l’eau propre et que leurs conditions de vie sont meilleures qu’il y a quelques années, l’écart entre le riches et les pauvres est plus grand que jamais. Un milliard de personnes vivent dans une pauvreté extrême et dans l’insécurité. Quelque chose ne va pas quand un ordre social mondial permet cela. Le nom d’un des coupables – pas le seul – est le capitalisme avide et trop peu contrôlé qui, au mépris des principes que j’ai mentionnés, ne cesse de s’étendre. Et M. Meale nous a rappelé les exemples du Bangladesh.

Ce rapport contient des propositions concrètes qui s’adressent aux Etats pris individuellement. On nous demande de réaffirmer notre engagement pour transposer ces Objectifs, les évaluer, les réviser et en fixer de nouveaux pour aller au-delà de 2015. C’est donc un document militant et un rappel pour nous tous. C’est une profession de foi, une proclamation du sens des responsabilités qu’a le Conseil de l'Europe et nous ne pouvons que le soutenir.

Mme GIANNAKAKI (Grèce), porte-parole du Groupe socialiste*– Au nom de mon groupe, je voudrais à mon tour féliciter le rapporteur pour ce rapport intéressant et utile.

La Déclaration du millénaire comprend un grand spectre d’obligations pour la bonne gouvernance et la démocratie. Elle voudrait relever les défis de l’humanité au seuil du millénaire et impose des mesures d’évaluation des actions par un réseau d’obligations et d’engagements enchevêtrés en ce qui concerne le développement, la paix, la gouvernance, la sécurité et les droits de l’homme.

Sous prétexte de la crise économique mondiale, les Objectifs du millénaire sont bien loin d’être réalisés. En ce moment, nous avons un grand débat sur l’Agenda de développement après 2015. Afin d’avoir un développement durable et vert pour la première fois, des questions sont considérées comme importantes, comme la gouvernance efficace et démocratique, la transparence, l’Etat de droit, le bon fonctionnement de la justice, l’égalité des genres et la promotion de l’égalité, de la stabilité et de la sécurité.

Nous constatons une régression des droits et lorsque ces questions sont considérées comme un luxe, la réponse ne peut être que plus de démocratie, plus de droits, plus de justice et plus d’égalité. En effet, la pauvreté qui frappe une grande partie de la population, même en Europe, porte atteinte aux droits de l’homme, au droit à une vie digne et décente. L’Etat-providence, après des luttes et des revendications, est en train de s’effondrer et protège de moins en moins de personnes. Les inégalités se creusent et frappent les nouvelles générations. Il faut donc un nouvel accord sur les défis et les priorités, sur la base des besoins et des aspirations des peuples.

L’humanité doit promouvoir en même temps les questions de la sécurité, du développement et des droits de l’homme, sinon nous n’aurons aucun succès. L’expérience européenne, en ce qui concerne la bonne gouvernance et les droits de l’homme, pourrait être un guide précieux dans cet effort.

Malgré les faiblesses et les inepties, le continent qui a donné naissance aux Lumières a également les moyens et les outils pour financer les actions. Voilà donc un autre champ où nous pourrions avoir une coopération entre les deux organisations sans doublons.

M. BOCKEL (France), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen – M. Meale l’explique très bien : en dépit de progrès indéniables, les avancées sont insuffisantes et il est fort probable, hélas, que les huit objectifs de développement fixés en 2000 ne seront pas atteints en 2015. Le Secrétaire Général de l’ONU lui-même l’a reconnu.

Notre rapporteur attend beaucoup de l’Europe. Il a raison. Je rappelle qu’elle est déjà fortement engagée dans la réalisation des Objectifs, et cela dès le début du processus. L’Union européenne est le premier bailleur mondial et fournit plus de la moitié de l’aide publique au développement au niveau international. En outre, depuis 2010, en raison du bilan contrasté des Objectifs, elle a pris un certain nombre de mesures pour accélérer leur réalisation. Il est possible de citer l’initiative des OMD qui consiste à concentrer l’aide sur les objectifs les moins avancés à partir du 10e Fonds européen de développement, ainsi que le plan d’action OMD qui vise à améliorer l’efficacité de l’aide versée, ou encore le Programme pour le changement qui cherche à adapter les objectifs et les moyens de l’aide européenne aux nouvelles données du contexte international, y compris les conséquences de la crise économique.

Ne perdons pas de vue, en effet, que si la contribution de l’Europe aux Objectifs du millénaire pour le développement peut paraître décevante, le Vieux continent a été confronté à la crise. La stratégie de Lisbonne a été un échec et des interrogations existent sur la capacité à atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020 qui lui a succédé. Il en est de même pour la stratégie européenne énergie-climat. Bref, nous sommes également confrontés à ces difficultés et pour autant, vous avez eu raison de le souligner, il en va aussi de notre responsabilité, car ces pays sont nos partenaires. Parce qu’il y a là un intérêt partagé, au meilleur sens du terme, à ce que ce développement soit une réussite. Et c’est, en temps de crise, un message que l’on peut passer. Nous devons être de plus en plus dans une démarche d’égal à égal, nous ne sommes pas des donneurs des leçons, même si on insiste sur la bonne gouvernance – et on a raison –, nous devons le faire dans cet état d’esprit d’un partenariat.

Dans la perspective de 2015, il me paraît essentiel que l’Europe arrête une position forte lorsque sera défini l’Agenda international du développement qui succédera aux OMD. Les progrès constatés sont compromis par des défis mondiaux exacerbés par la croissance démographique, l’accroissement des inégalités, la détérioration des écosystèmes, la diminution des ressources naturelles limitées ou encore le changement climatique. Dans tous ces domaines, nous devons nous retrouver pour faire des propositions.

Mais surtout, il est important, au-delà de la culpabilisation, parfois nécessaire, mais surtout en évitant le misérabilisme, parce que des progrès existent aussi, que dans la stratégie européenne, et ici, au Conseil de l'Europe, les maîtres mots soient partenariat et responsabilisation partagée.

Mme KAZAKOVA (Fédération de Russie), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Je souhaite féliciter M. Alan Meale pour un excellent rapport, et au nom du Groupe démocrate européen, je voudrais souligner l’importance incontestable des thèmes abordés dans ce rapport.

En effet, ils touchent un nombre immense de personnes qui ont réellement besoin d’une attention et d’une protection particulières – je pense bien sûr, aux enfants, aux femmes, aux personnes âgées, aux malades, aux personnes pauvres. C’est la raison pour laquelle je souscris à l’avis du rapporteur quant à la nécessité d’une stratégie d’ensemble pour que la population qui croît sans cesse puisse apprendre, travailler, vivre pleinement.

Il convient d’ailleurs de souligner que certains pays tentent de transformer l’Agenda mondial du développement en y introduisant des questions qui ne sont pas liées, mettant l’accent par exemple sur les valeurs relatives aux droits de l’homme. Ils essaient par ailleurs, peu à peu, de transférer sur les pays qui se développent très rapidement une partie de la charge qui incombe aux donneurs de fonds. Or nous pensons qu’il ne faut pas diluer les aspects socioéconomiques.

En l’occurrence, il est particulièrement important d’améliorer la gouvernance macro-économique en garantissant aux populations l’accès à des services fondamentaux : énergie, transports, éducation, santé, protection sociale. Il faut également prendre en compte la lutte contre le chômage, garantir des conditions de travail décentes, assurer la sécurité routière, et bien d’autres choses encore.

Le fait d’atteindre peu à peu ces OMD ne constitue finalement qu’un progrès mitigé. Quand bien même nous avons réussi à réduire de moitié la population qui vit avec moins de 1,25 dollar par jour, un milliard de personnes continuent de souffrir de la faim, deux milliards ne reçoivent pas la quantité suffisante de micronutriments. Il est vrai que l’enseignement primaire obligatoire touche plus d’enfants. Nous avons, par ailleurs, réussi à abaisser de 30 % la mortalité des enfants de moins de cinq ans, mais nous constatons peu de progrès sur le plan de la mortalité maternelle.

Sur le plan écologique, nous enregistrons des succès contradictoires, tant il est vrai que si nous constatons une baisse de la déforestation, un accès à l’eau potable deux fois meilleur, dans le même temps, nous assistons à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre et à la perte de la diversité biologique. Une fois de plus, il est nécessaire de conjuguer nos efforts pour résoudre l’ensemble de ces problèmes.

Mme FIALA (Suisse), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Monsieur le rapporteur, au nom l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe, je vous remercie de votre engagement.

Celui qui a vu la misère des plus pauvres perd son innocence. Depuis l’an 2000, nous avons fait des progrès dans la lutte contre la pauvreté et contre la faim. L’accès à l’eau potable a été amélioré, la mortalité liée à certaines maladies, comme la tuberculose, la malaria, a régressé. Mais les problèmes n’en restent pas moins considérables. En effet, la mortalité infantile reste forte, le taux de scolarisation est toujours faible, les programmes de vaccination souffrent de lacunes, le fléau du sida continue d’affecter des régions entières de la planète. La population mondiale devrait atteindre 9 milliards d’habitants en 2050. Nous sommes loin d’avoir trouvé les solutions aptes à résoudre la misère. Les pauvres de ce monde attendent de nous des programmes innovants et des actions adaptées à la réalité. En tout cas, nous n’accéderons pas aux objectifs fixés si nous ne nous mobilisons pas davantage.

En Europe, nous ne pourrons gérer l’afflux des migrants dans des conditions satisfaisantes. Pour des raisons humanitaires, mais aussi pour des raisons d’intérêt bien compris, nous devons absolument faire en sorte que le reste de la planète se développe. Les plus pauvres des Etats doivent être soutenus et ce ne sont donc pas quelques crédits parcimonieux accordés au développement qui permettront de régler le problème. Nous devons nous sentir responsables, tout autant que les entreprises. La responsabilité sociale de l’entreprise ne doit pas rester un vain mot. Il faut également lutter de manière déterminée contre la corruption si nous voulons faire évoluer la situation. Peut-être est-ce même l’objectif central.

Nous avons tous intérêt à ce que le Sud se développe.

Il nous faut aussi lutter contre le fléau que constituent les violences à l’encontre les femmes et les enfants. Il faut absolument garantir la paix partout, sans quoi le développement durable restera une utopie.

Mme MAURY-PASQUIER (Suisse) – Dans le discours médiatique comme dans les débats politiques sur l'avenir de notre monde, seule la pointe de l'iceberg est, bien souvent, visible. Je veux parler de ce qui correspond au septième des Objectifs du millénaire pour le développement, à savoir la préservation de l'environnement. On parle, précisément, d'icebergs, de banquise en diminution et de réchauffement climatique, de déforestation et de perte de la biodiversité. Et cela, bien sûr, à juste titre. Mais l'on peut avoir souvent l'impression que le développement humain, au cœur des autres OMD, est laissé de côté.

De fait, comme le montre Alan Meale dans le présent rapport, les Objectifs du millénaire sont interconnectés : par exemple, la promotion de l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes, consacrées par l'OMD 3, sont nécessaires pour que les pays luttent efficacement contre la pauvreté, conformément à l'OMD 1, en mettant à profit le potentiel économique et productif des femmes. De même, la santé sexuelle et reproductive, qui est au centre de plusieurs OMD, a un impact majeur sur l'éducation des femmes et des filles ainsi que sur leurs possibilités d'obtenir un travail décent.

Pourtant, l'OMD 5, visant à « Améliorer la santé maternelle », est le plus inachevé. Certes, le taux de mortalité maternelle a diminué de 47 % au cours des 20 dernières années, mais l'on est encore loin de la cible de 75 % et, chaque jour dans le monde, 800 femmes ou adolescentes meurent de complications évitables liées à la grossesse ou à l'accouchement. Or, chaque année aussi, les décès de femmes en lien avec la grossesse et les décès de nouveau-nés après la mort de leur mère entraînent une perte de productivité estimée à 15 milliards de dollars. Je ne m’attarderai pas sur la mortalité infantile, évoquée par les précédentes oratrices, même si elle est très choquante. Et l'accès à la contraception n'est pas encore universel, pas plus que ne l'est l’accès aux traitements contre le VIH/sida.

Dans les pays européens aussi, l'accès aux soins en général et aux soins de santé sexuelle et reproductive en particulier s'avère parfois inégal, comme nous avons eu l'occasion de l'évoquer en séance plénière de cette Assemblée. Dans mon pays, la Suisse, une votation populaire a lieu prochainement sur un texte qui demande la fin du remboursement de l'interruption volontaire de grossesse. Le discours des auteurs de ce texte est marqué par une absence alarmante de respect du droit des femmes à la santé sexuelle et reproductive.

Ce droit et l'ensemble des droits humains doivent pourtant former le socle de la vision défendue par le Conseil de l'Europe et par ses partenaires: la vision d'un monde plus équitable, où les besoins de base sont satisfaits et où le développement humain est au centre des préoccupations, tout comme le respect de l'environnement. Ce monde, la Grande Europe doit, pour faire face à ses responsabilités et à ses engagements, contribuer à le construire, sur son territoire et ailleurs, jusqu'en 2015 et au-delà, et surtout à s’en donner les moyens.

Mme SCHNEIDER-SCHNEITER (Suisse)* – Je remercie le rapporteur pour son excellent rapport. Il met en avant les actions à engager dans les domaines les plus importants. Le rapport se montre très progressiste dans ses exigences. En revanche, il espère trop de la prorogation des objectifs du Millénaire. Le nouveau cadre du développement durable post-2015 et ses caractéristiques restent donc trop floues.

La Suisse ne se limite pas à proroger les OMD, mais s’attache à compléter le cadre des nouveaux objectifs post-2015, que nous définissons comme suit.

La définition de ces nouveaux objectifs doit s’appuyer sur l’expérience des OMD, sur la Déclaration du millénaire et sur la Déclaration finale de Rio + 20. Il faut aussi englober un certain nombre d’objectifs dans le domaine de l’environnement et, pour ce faire, tenir compte de tout document reposant sur des bases scientifiques. Ces objectifs doivent être fondés sur les principes des droits de l’homme, du respect des frontières, de la justice sociale, sur l’universalité et la cohérence politique. Outre le développement durable, ils doivent prendre en compte l’économie, l’environnement, les questions sociales et se fixer pour conditions la paix, la sécurité et l’Etat de droit. Ces objectifs doivent pouvoir être appliqués de façon universelle, tout en proposant des approches différenciées. Ils doivent reposer sur des buts clairs et des indicateurs. Ils doivent être concrets, limités en nombre et dans le temps et on doit pouvoir les exposer clairement.

Bref, il faudrait exiger la création d’un nouveau cadre élargi pour le développement durable, qui ne serait pas en tous points identique aux OMD. L’agenda fixé devra tenir compte de manière équilibrée des trois dimensions du développement durable – sociale, économique et environnementale - alors qu’avec les OMD on s’est surtout intéressé au développement social. Cet agenda doit aussi avoir une validité universelle : il doit définir des obligations valables pour tous les pays et non seulement, comme c’était le cas avec les OMD, pour les pays en développement.

En ce qui concerne le point 8.1.3 du projet de résolution, je peux soutenir l’appel adressé aux Etats membres de consacrer, à terme, 0,7 % de leur PIB au développement, tout en précisant que le Parlement suisse s’est fixé, pour 2015, l’objectif de 0,5 %, ce qui le place dans la moyenne des pays donateurs. La Suisse est d’ailleurs l’un des rares pays à avoir augmenté la part de son PIB consacrée à l’aide au développement. Sur ce point, j’aimerais donc une formulation plus ouverte. Pour conclure, je vous remercie pour ce rapport auquel j’apporte mon soutien.

Mme MAGHRADZE (Géorgie)* – Je souhaite tout d’abord remercier le rapporteur pour avoir insisté sur ces problèmes ; il a bien évalué les points positifs comme les échecs qui résultent de nos efforts.

Dans le projet de résolution, on lit que l’Assemblée est préoccupée du haut niveau d’inégalités dans le monde et des entraves persistantes à un développement plus équilibré, lesquelles, d’ailleurs, affectent également l’Europe. En outre, l’écart qui demeure entre les pays développés et les pays prétendument sous-développés est un problème, notamment pour les pays européens, du fait de ses conséquences – je pense au terrorisme et à l’immigration illégale.

Quels sont les défis pour réduire ces inégalités ? Il faut plus de temps et de ressources. S’agissant d’ailleurs de ressources, celles-ci ne sont pas toujours concentrées au bon endroit. Par ailleurs, je ne dis pas nécessairement qu’il faut augmenter l’aide fournie aux pays en développement pour la promotion de la transparence et la lutte contre la corruption. En effet, si un gouvernement est corrompu, cet effort financier ne fera en réalité que le renforcer.

Les nouveaux objectifs en matière de développement durable doivent inclure l’éducation. L’histoire – tout comme des exemples récents – prouve que des changements réels ne sont possibles que lorsque le nombre de personnes éduquées atteint une certaine masse critique. La dialectique montre en effet que les changements quantitatifs entraînent des changements qualitatifs. Pour une personne instruite, il est difficile de supporter les violations des droits de l’homme et la corruption et, lorsque les personnes instruites sont une minorité, elles ont peu de chances d’induire des changements. Lorsque l’on atteint un certain seuil, en revanche, les changements deviennent possibles. Ils sont d’ailleurs intervenus dans les pays arabes.

Il faut souligner l’importance de l’éducation dans tous les programmes et toutes les activités liées aux OMD. Les programmes traditionnels concernant l’aide médicale, la nourriture ou encore l’eau potable doivent bien sûr être développés, mais le plus important est d’éduquer les populations locales : des populations éduquées sont plus à même d’utiliser à bon escient l’aide internationale. Surtout, elles rendent possibles des changements démocratiques. Il faut donc renforcer le nombre d’étudiants, d’élèves, de chercheurs et de formateurs dans ces pays ; il faut proposer des programmes d’éducation et de formation professionnelle. La contribution de l’Europe, dans le cadre des OMD, doit donc accorder une part plus importante à l’éducation.

Mme BONET PEROT (Andorre)* – Je remercie avant tout M. Meale pour ce rapport. L’Europe est pleinement engagée pour la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Toutefois, en dépit de cet engagement, de l’aide financière et des contributions de toute sorte, il reste encore beaucoup à faire avant 2015.

Des millions de personnes ont besoin de notre aide pour vivre dans la dignité. Nous devons évidemment être solidaires. En 2015, lors de la réunion de l’Assemblée générale des Nations Unies, on évaluera les progrès réalisés au regard des différents objectifs. Grâce au travail de chacun, on a pu améliorer les choses dans certains domaines, notamment en ce qui concerne la réduction de la pauvreté et le développement de l’enseignement primaire. Dans d’autres domaines, cependant, on est bien loin des objectifs – je pense à ce qui concerne la lutte contre la malnutrition, la mortalité maternelle, les inégalités entre hommes et femmes, les conditions de vie à la suite des conflits armés, ou encore la dégradation de l’environnement à la suite de la surexploitation des ressources naturelles. Le plus important est d’atteindre ces objectifs au sein de chaque pays : on ne doit pas se contenter d’observer la situation dans son ensemble, au niveau mondial. Les pays d’Afrique subsaharienne et d’Asie, en particulier, sont encore loin d’avoir atteint la majorité des objectifs.

Le changement climatique risque de rendre encore plus difficile l’accès à l’alimentation et de propager davantage de maladies contagieuses. Bref, il aura des conséquences dévastatrices. En ce qui concerne l’égalité des genres, de nombreux pays sont encore très en retard en matière d’accès des filles à l’éducation. A cela s’ajoutent les difficultés que rencontrent les femmes à entrer dans le monde du travail sur un pied d’égalité avec les hommes, mais aussi le faible nombre de femmes exerçant des fonctions politiques de haut niveau. Tout cela ne fait que créer davantage d’inégalités et entretenir la violence.

En 2015, on analysera la façon dont il est possible de renouveler les engagements pris par les différents pays. On verra également quel rôle incombe aux pays les plus développés. De même, on analysera les difficultés auxquelles se heurtent les autres pays pour atteindre ces objectifs. Sans entrer dans le détail, on constate qu’un certain nombre de pays, y compris en Europe, ont du mal à atteindre un grand nombre de ces objectifs en raison de la crise économique qui a accru la pauvreté et la faim. Un nombre toujours plus important de citoyens européens n’ont pas un travail décent. On voit aussi augmenter le nombre d’enfants qui ne peuvent pas terminer leur scolarité. Les inégalités entre les hommes et les femmes s’accroissent également, ainsi que la violence. Il y a encore en Europe des zones où le taux de mortalité maternelle reste élevé. La gouvernance multilatérale doit donc être l’axe essentiel de l’action de tout pays européen. L’Europe doit faire preuve de détermination pour conserver son rôle de chef de file, en coopération avec les pays en développement. Ainsi, le cap pourra être maintenu, ce qui permettra d’œuvrer à la réalisation des différents objectifs, au niveau national, européen et mondial.

Mme SPADONI (Italie)* – En commission comme en séance plénière, j’ai entendu ces derniers jours des discours extraordinaires. On a parlé de lutter contre la xénophobie, contre les discriminations, contre la violence envers les femmes ; aujourd’hui, il est question des Objectifs du millénaire pour le développement. Mais ce que je constate, moi, ne me plaît pas. Selon le rapport de la Banque nationale d’Italie, entre 2010 et 2012, la pauvreté a augmenté dans mon pays. La moitié des femmes italiennes n’ont pas de revenus suffisants pour vivre correctement. Les revenus ne sont plus suffisants pour mener une véritable vie de citoyen.

On veut réduire la mortalité infantile, tout en commerçant avec des gens qui ne font aucun cas des droits de l’homme : en Chine ou en Inde, on ne peut pas avoir autant d’enfants qu’on le veut et l’on élimine les fœtus qui sont du mauvais sexe.

On continue aussi à faire la guerre – sans même se rendre compte que l’on a perdu en Afghanistan ! On exploite des terres et des ressources, notamment en eau, qui appartiennent à d’autres – et l’on préfère ignorer en Italie un référendum demandant que l’eau soit un bien public. On dit qu’il faut promouvoir l’égalité et donner plus d’autonomie aux femmes – mais ceux-là même qui tiennent ces discours font, parfois, tout le contraire et, pas plus tard qu’hier, une députée de notre Mouvement 5 étoiles, Loredana Lupo, a été giflée et bousculée par un collègue.

Et c’est nous, le Mouvement 5 étoiles, que l’on présente comme un mouvement violent et antidémocratique ! Pourtant, qui a bâillonné l’opposition hier au Parlement italien, si ce n’est sa présidente qui a empêché les débats prévus ? Le Conseil de l’Europe n’a-t-il pas, parmi ses principes essentiels, la promotion d’une démocratie parlementaire ? Eh bien, il n’existe plus de démocratie parlementaire en Italie ! Le Parlement a été privé de ses fonctions, l’Italie est aux mains d’une dictature, la dictature de l’exécutif !

Ces derniers jours, on parle beaucoup de populisme en associant ce mot à xénophobie, violence et risque pour la démocratie. Mais si populisme signifie venir ici hurler la vérité telle que la voient les Européens et les Italiens, si populisme signifie affirmer que l’on ne peut plus se contenter de bavarder mais qu’il faut agir, que le chômage est devenu intolérable, que les Européens n’en peuvent plus et que l’article 1er de la Charte européenne des droits fondamentaux n’est plus qu’un vieux souvenir, si populisme signifie voir les conditions dans lesquelles travaillent les gens – du moins, les veinards qui ont encore un travail en Europe aujourd’hui ! -, si populisme signifie dénoncer la course à la rentabilité à outrance, si c’est dire que notre système politique a fait faillite, alors, nous, du Mouvement 5 étoiles, sommes fiers d’être des pacifistes, des démocrates, des anti-xénophobes et… des populistes !

Mme BLANCO (Espagne)* – Avant tout, je souhaiterais féliciter Sir Alan Meale de ce rapport extrêmement important. Voilà bien des années que je travaille en faveur de la coopération pour le développement et je suis extrêmement préoccupée du devenir des OMD et de l’Agenda post-2015.

A l’inverse de Mme Spadoni qui m’a précédée, j’ai encore foi, et beaucoup, en la politique. Je dirai même plus, je pense que la politique est aujourd’hui plus que jamais nécessaire pour de multiples raisons, mais je reviendrai plus particulièrement sur trois des objectifs du millénaire.

Tout d’abord, l’objectif d’éradication de la pauvreté et de la faim.

A ce propos, il faut savoir que les ressources économiques se trouvent concentrées entre les mains de quelques-uns. Pour reprendre des chiffres donnés par les Nations Unies, les richesses des 85 personnes les plus riches de la planète représentent autant que le montant des ressources des 3 milliards d’êtres humains les plus pauvres, la moitié des revenus du monde se trouve aux mains de 1 % de la population et, en outre, la majeure partie de ces richesses est cachée dans des paradis fiscaux ! C’est là justement qu’intervient la politique, car la première chose à éradiquer, ce sont ces paradis fiscaux. Cela ne dépend que de nous. Les élites économiques et les marchés prennent en otage le pouvoir politique pour manipuler les règles du jeu économique et saper la démocratie. Ce ne sont pas là mes propres mots, mais ceux prononcés par le secrétaire général des Nations Unies.

Sur le troisième objectif – promouvoir l’égalité et l’autonomie des femmes –, les progrès sont très faibles. La violence contre les femmes, uniquement parce qu’elles sont nées femmes, demeure un problème de très grande ampleur dans le monde. Nos collègues suisses, nous disent que la Suisse consacre une part croissante de son PIB à l’aide au développement. L’Espagne y consacre 0,5 % du sien, mais il est vrai que l’Espagne compte aussi 2,5 millions d’enfants qui n’ont pas trois repas par jour. L’Europe traverse une crise, mais celle-ci est extrêmement liée à ce qui se passe dans le Sud.

Enfin, à propos du cinquième objectif – l’accès universel à la santé sexuelle et reproductive – qui a déjà été évoqué au sein de cette Assemblée, il est vrai qu’il est des pays comme le mien, l’Espagne, dans lesquels le gouvernement de droite est prêt à abroger la loi sur l’avortement.

M. SUDARENKOV (Fédération de Russie)* – Nous sommes au seuil d’une nouvelle période. Les quinze dernières années se sont écoulées très rapidement et nous avons centré notre attention sur les OMD. Nous avons certes le sentiment d’avoir progressé, mais nous voyons bien dans nos pays respectifs que si, sur certains objectifs, des tendances positives se sont manifestées, sur d’autres, c’est l’inverse. C’est ce que dit Sir Alan Meale dans son projet de résolution, et c’est notamment le cas en ce qui concerne l’environnement.

J’aimerais aussi appeler votre attention sur le fait que onze des quinze intervenants inscrits sur la liste sont des femmes. Cela nous montre bien que la partie la plus vulnérable de la population nous donne un signal et que ces quinze années n’auront pas suffi. C’est le baromètre de notre opinion publique et de notre situation sociale.

Concernant la contribution de l’Europe à ces OMD dont nous parle le rapporteur, il nous faut, c’est évident, avancer sur la Convention européenne du paysage. Ces OMD doivent aller vers le développement durable. Nous devons tous y être prêts. Ces objectifs de développement durable, ces ODD, vont, à la différence des OMD, mettre l’accent sur une approche fondée sur les paysages et il nous faudra enseigner ces éléments importants de l’environnement pour notre développement durable.

La Russie est prête à aller dans le sens d’une sécurité et d’une efficience énergétiques, prête à essayer d’abolir le chômage car ce sont là des éléments cruciaux, mais je pense que d’ici le rapport qui sera présenté en 2015, nous saurons – et peut-être Sir Alan Meale pourra-t-il nous le dire – si l’on envisage que le Conseil de l’Europe fasse des propositions qui viennent s’inscrire dans cet Agenda post- 2015.

Mme KARAMANLI (France) – Je souhaite remercier Sir Alan Meale, qui nous livre dans son rapport des chiffres qui peuvent paraitre arides mais qui nous aident à comprendre les trop grandes différences qui minent notre monde.

Aujourd’hui, les 85 personnes les plus riches du monde possèdent autant que les 3,5 milliards d’êtres humains les plus pauvres. Manger à sa faim, bénéficier des soins que justifie son état de santé, aller à l’école, accéder à des conditions de travail et à un salaire décents, ne plus avoir peur des hommes quand on est une femme sont autant de droits qui paraissent à bon nombre d’entre nous vivant dans cette partie du monde comme acquis, ou du moins largement partagés. Ils ne le sont pourtant pas pour la majorité des femmes et des hommes de ce monde.

L’Europe est triplement concernée par l’insuffisante réalisation des Objectifs du millénaire. Tout d’abord, elle doit rester exemplaire. Dans bon nombre de nos pays, les objectifs d'un développement humain de base sont pour une large part atteints, et ce même si les problèmes les plus cruciaux n'ont pas tous été résolus. La crise et les tensions nées d'un partage des richesses qui n’augmente plus, laissent le champ à des mouvements politiques populistes, qui contestent l'idée même que la pauvreté puisse être limitée ou éradiquée.

Des réponses économiques adaptées aux besoins des populations qui souffrent de la crise doivent être envisagées au bon endroit, à savoir au niveau du continent européen. En sauvant le modèle social européen, nous sauverons aussi l'aide aux pays en voie de développement. Dans les pays de l'OCDE, l'aide au développement a reculé de 4 % en valeur réelle en 2012, après avoir baissé de 2 % en 2011. Certains en Europe réclament la fin de cette aide au motif de sa prétendue inefficacité. Nous ne pouvons et nous ne devons pas laisser passer cette affirmation qui mélange la mesure principale et des inconvénients qui sont minoritaires.

Enfin, l'Europe doit être plus visible et plus lisible. Je ferai trois suggestions pour retrouver une dynamique forte de lutte contre les inégalités extrêmes. Nos Etats doivent réexaminer comment l'idée, chère au grand économiste Paul Davidson et inspirée de John Maynard Keynes, d'une chambre de compensation internationale, peut progresser. Un tel mécanisme a pour objectif d'utiliser les excédents financiers d'une partie du monde au financement du développement de l'autre partie. Nos Etats doivent aussi envisager de lutter plus efficacement contre les pratiques qui visent à faire échapper les activités économiques internationalisées à l'impôt. Enfin, nos Etats doivent donner l'exemple : quand tous les membres d'une collectivité peuvent se réaliser et réussir, c'est toute la collectivité qui se réalise et réussit.

Pour paraphraser le Président Obama, quand les femmes et tous ceux qui sont habituellement loin du pouvoir réussissent, c'est toute une communauté qui réussit. Et comme l'a noté le rapporteur, notre Assemblée, par sa diversité et ses valeurs, peut et doit contribuer au processus international de négociation et de coopération visant à améliorer l’efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour atteindre les Objectifs du millénaire. Une action sur le partage de la richesse et garantissant l’efficacité de l’impôt et le respect dû à chacun, serait de nature à soutenir avec efficacité la réalisation des Objectifs du millénaire.

LE PRÉSIDENT – M. Likhachev et Mme Al-Astal, inscrits dans le débat, ne sont pas présents dans l’hémicycle.

La liste des orateurs est épuisée. J’appelle la réplique de la commission.

Monsieur le rapporteur, il vous reste quatre minutes pour répondre aux orateurs.

Sir Alan MEALE (Royaume-Uni), rapporteur * – Je voudrais commencer par rendre hommage au secrétariat de la commission des affaires sociales qui a fait un travail remarquable, en particulier à Mme Lambrecht, dont l’aide m’a été précieuse pour la rédaction de ce rapport. Mes remerciements vont aussi à Mme Davidashvili, du Forum parlementaire européen, basé à Bruxelles, pour sa contribution très utile.

De nombreuses idées intéressantes ont été exprimées au cours de ce débat. Il ne s’agit ni plus ni moins que de parvenir à un monde qui fonctionne où l’on aurait résolu les questions de la pauvreté, de la faim et de la désespérance ! M. Sudarenkov a eu raison d’attirer notre attention sur les femmes, majoritaires sur la planète et qui restent encore très vulnérables. J’ai rappelé que 800 femmes mouraient chaque jour – près de 300 000 par an – en raison de complications lors d’une grossesse ou d’une naissance. On pourrait éviter facilement ces drames à condition de prendre les mesures nécessaires. Pour créer un monde meilleur, c’est par là que nous devons commencer, et sans tarder !

Tant que nous ne mettons pas un terme aux inégalités dans le monde, notre avenir restera compromis. Tant que les femmes ne seront pas respectées comme les hommes, la planète se portera mal. Réveillons-nous et voyons la vérité en face ! Le changement seul permettra d’espérer en un monde meilleur.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le président de la commission, vous disposez de deux minutes pour répondre aux orateurs.

M. GHILETCHI (République de Moldova), président de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – Je me félicite du large soutien recueilli par ce texte et je remercie le rapporteur pour son travail, qui met l’accent sur la pauvreté et les inégalités dans le monde. Originaire moi-même de l’un des pays les plus pauvres d’Europe, je suis particulièrement sensible aux questions traitées par Sir Alan Meale. Aujourd’hui moins que jamais, nous ne devons relâcher nos efforts. Notre engagement devra perdurer au-delà de 2015.

Il est inacceptable, comme l’ont souligné plusieurs intervenants, qu’autant de pays dans le monde continuent de priver les femmes de leurs droits fondamentaux, au premier rang desquels leur droit à l’instruction. Le Conseil de l’Europe a pour mission de garantir l’égalité des droits entre tous les êtres humains et la commission des questions sociales continuera à l’avenir d’explorer les différents problèmes traités par ce rapport.

Pour finir, j’invite l’Assemblée à adopter ce projet de résolution. Ensemble, nous pourrons rendre notre monde meilleur.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close.

La commission des questions sociales, de la santé et du développement durable a présenté un projet de résolution sur lequel un amendement a été déposé.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à trente secondes.

L’amendement 1, déposé par M. Donaldson, Sir Edward Leigh, MM. Clappison, Neill, Liddell-Grainger, Pintado, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 8.3.2, à remplacer les mots « des droits et la santé » par les mots « de la santé ».

M. Donaldson n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. GHILETCHI (République de Moldova), président de la commission* – Cet amendement a été examiné en commission, mais il n’y avait personne pour le présenter. Le rapporteur a toutefois indiqué qu’il y était opposé. La commission a donc rejeté l’amendement.

Sir Alan MEALE (Royaume-Uni), rapporteur* – Il est malencontreux que cette situation se produise. Alors qu’il est ici question des droits et de la santé des femmes en matière de procréation en général, il s’agit d’une tentative pour introduire dans le texte le problème de l’avortement, qui n’y a pas sa place.

L’amendement 1 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13368.

Le projet de résolution est adopté (58 voix pour, 0 contre et 4 abstentions).

2. Le changement climatique : un cadre pour un accord mondial en 2015

La diversification de l’énergie en tant que contribution fondamentale au développement durable

(Débat conjoint)

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle le débat conjoint sur deux rapports présentés au nom de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable : le premier par M. Prescott, sur « Le changement climatique : un cadre pour un accord mondial en 2015 » (Doc. 13362), le second par Mme Barnett, sur « La diversification de l’énergie en tant que contribution fondamentale au développement durable » (Doc. 13366).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi, de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

Les rapporteurs disposent chacun d’un temps de parole total de treize minutes, qu’ils peuvent répartir à leur convenance entre la présentation de leur rapport et la réponse aux orateurs.

M. PRESCOTT (Royaume-Uni), rapporteur de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – C’est pour moi un grand plaisir de vous présenter ce rapport. Je me suis impliqué dans ce domaine depuis le protocole de Kyoto, lors duquel j’étais le principal négociateur européen. Nous avons alors eu bien des échanges sur la gravité du changement climatique et sur l’implication humaine dans ce changement. Aujourd’hui, il ne fait pas de doute que le changement climatique s’est aggravé ; les scientifiques le disent clairement. La pauvreté, les inégalités se sont également aggravées. Je ne chercherai donc pas à vous montrer qu’il faut faire quelque chose, mais plutôt ce que nous pourrions faire.

Je veux surtout insister ici sur la manière de passer à la seconde étape. Comment maintenir les principes essentiels énoncés dans le cadre de Kyoto ? À l’origine, le protocole ne s’appliquait qu’à 46 pays industrialisés, les pays riches en somme. On avait alors décidé que les taux d’émission seraient fixés dans un cadre juridique. Aujourd’hui, 190 nations sont impliquées et il nous faut absolument trouver un accord sur la manière de passer à la phase suivante, ce que j’appellerai l’accord de Kyoto 2.

Ce n’est pas sans difficultés que nous nous sommes mis d’accord sur Kyoto 1. À l’origine, le processus devait s’achever en 2012. Un certain nombre de pays étaient opposés à l’accord et espéraient qu’il disparaîtrait dans les oubliettes de l’Histoire. Mais notre Assemblée est intervenue en publiant un document intitulé « Arrêter le compte à rebours – Sauver notre planète » ; plusieurs pays ont souscrit à notre proposition de proroger l’accord de Kyoto jusqu’en 2015. Il nous faut donc absolument trouver un accord avant cette date.

Pourquoi a-t-il été si difficile de se mettre d’accord ? Plusieurs grands pays, dont les Etats-Unis, souhaitaient un cadre juridique. Mais il n’est pas possible que 190 nations souscrivent un tel accord, en tout cas pas en quatre ans ! Il faut donc proroger les principes incarnés par Kyoto 1 et tenter de parvenir sur ce fondement à un accord juridique, que l’on ne saurait imposer au niveau mondial. Cela suppose d’obtenir l’accord d’une majorité de nations dont le niveau de développement et le taux de pauvreté diffèrent considérablement. Pour cela, il convient de trouver un cadre général qui permette de concilier ces différences tout en progressant au niveau mondial.

C’est indispensable car, les scientifiques nous le disent, nous courons à la catastrophe si les émissions se poursuivent au même rythme. Nous ne sommes pas loin du niveau limite. Le cadre doit donc absolument être en place d’ici à 2015. Tel est le sens de notre rapport, comme du document « Arrêter le compte à rebours ».

Le texte auquel nous parviendrons doit pouvoir être signé par tous tout en se faisant l’écho des dangers à propos desquels les scientifiques nous avertissent. Or les Japonais eux-mêmes nous disent qu’ils ne veulent plus de Kyoto ; quant aux Américains, ils n’ont jamais pu en faire adopter les principes au Congrès. Cette semaine, Obama a annoncé qu’il prendrait des mesures fermes ; c’est très bien, mais nombre de pays ne le feront pas. L’Australie en fournit un autre exemple.

Il faut donc agir dans chaque pays pour aller vers un consensus. Dans certains d’entre eux, la législation tient compte du problème et l’on ne peut revenir en arrière, quoi qu’en dise M. Cameron. Je vous renvoie au corpus de 33 législations publié par GLOBE International. Il serait bon que les législateurs nous disent ce qu’il en est. Car, comme on l’a vu à Copenhague, il ne suffit pas que les grands dirigeants du monde se réunissent pour que l’on parvienne à un accord.

Les législateurs doivent avoir plus voix au chapitre. Il faut parvenir à une sorte de compromis. Or, comme je le dis dans le rapport, 33 pays ont mis en place des législations sur l’environnement. Parmi eux, la Chine, les Etats-Unis, l’Europe… Il n’y aurait d’ailleurs jamais eu l’accord de Kyoto sans l’Europe, qui a donc un rôle éminent à jouer.

Les Etats-Unis ne peuvent utiliser le Congrès. Ils doivent passer par des mesures prises par l’exécutif. La Chine a un Livre blanc et une législation. Nous en avons une en Europe. Avec des législations nationales, on peut se fixer un certain nombre d’objectifs. Promettre c’est bien, mais pourra-t-on atteindre les objectifs ? Il faut mettre toutes les législations nationales sur un même plan, bout à bout, et voir si cela peut nous donner satisfaction.

Tous les pays devraient avoir une législation sur le changement climatique. Telle doit être la première étape, qui devrait recueillir le plus grand soutien. Ensuite, il faut un organe international indépendant - dont nous parlerons tout à l’heure dans un amendement -, pour vérifier si les pays respectent leurs engagements. Il faudra de la crédibilité et de la transparence pour parvenir à un Kyoto 2.

Au début avec Kyoto, on était très fier. Mais aujourd’hui, ce nom japonais n’a plus le même sens pour les Japonais. Et le prochain accord devrait se signer à Paris en 2015. L’Europe sera alors au centre. Je ne sais pas ce que les diplomates français diront. Il faudrait avancer sur tous les problèmes évoqués en matière d’environnement ainsi que sur la disparité croissante entre les riches et les pauvres.

Dans la conférence des riches qui se tient à Davos, en Suisse, on évoque les inégalités. Mais pour y remédier, on propose plus de croissance, plus de richesses… Et les banquises qui fondent ? Il faudrait davantage se préoccuper des zones polaires et du changement climatique.

Le Conseil de l’Europe a une chance à saisir. Alors que tout était en train de s’écrouler, nous avons fait entendre notre voix pour qu’on arrête le compte à rebours et pour sauver la planète, en pensant à nos arrière-arrière petits-enfants. Je suis très fier que le Conseil de l’Europe soit au cœur de ces propositions.

Il faut continuer d’arrêter le compte à rebours. C‘est ce que nous faisons avec ce rapport qui propose un cadre mondial s’appuyant sur des législations nationales pour aller jusqu’en 2020. Ceux qui ne veulent pas entendre devront tout de même nous écouter et nous ne pourrons qu’être fiers d’avoir réalisé cela.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le rapporteur, il vous restera quatre minutes pour répondre aux orateurs.

Nous passons au rapport intitulé « La diversification de l’énergie en tant que contribution fondamentale au développement durable ».

Mme  BARNETT (Allemagne), rapporteure de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – Je veux d’abord remercier le secrétariat, tout particulièrement Mme Ramanauskaite pour son excellente coopération. On ne dira jamais assez combien nos collaborateurs du secrétariat sont enthousiastes. Sans eux nous ne pourrions pas faire tout ce travail, car nous sommes pris par beaucoup d’autres tâches chez nous.

Un approvisionnement en énergie sûr, durable et pas trop coûteux constitue évidemment un objectif important dans tous nos pays. Mais les décisions prises par les politiques sont soumises à divers intérêts, notamment ceux des citoyens de l’industrie et de l’environnement. On veut aussi trouver des solutions équitables. C’est presque la quadrature du cercle.

L’énergie n’est pas statique, de nouveaux développements apparaissent sans cesse. Autrefois on était fier d’un rendement à 40 % pour le charbon, aujourd’hui ce taux a doublé.

Je viens de Ludwigshafen, ville de la chimie. La BASF y a son siège ainsi que d’autres sociétés. A la base de toute la chimie, vous trouvez le gaz et le pétrole. Il est donc de plus en plus important de ne pas les utiliser pour produire de l’électricité ou de la chaleur, mais différemment pour plus de valeur ajoutée. Le gaz et le pétrole sont trop précieux pour aller dans l’énergie. C’est une question importante que j’ai étudiée avec plaisir.

Ce rapport vous donne une idée des productions d’énergie qui tiennent compte de plus en plus du changement climatique dans nos Etats membres. Nous sommes en période de transition. Nous nous efforçons de passer de procédés nuisibles à l’environnement, à des méthodes qui ne libèrent pas de CO2 ou qui sont neutres à cet égard. Dans cette recherche, nous sommes en concurrence les uns avec les autres, mais aussi avec d’autres régions du monde.

Un bon développement est dans l’intérêt de la planète ; il s’agit de lutter contre l’exploitation incontrôlée de la nature et d’éviter que les différentes étapes de production de l’énergie soient nuisibles. Il faudrait utiliser de plus en plus d’énergies renouvelables. Il me semble que nous devons être justes les uns avec les autres lorsque nous évaluons la production d’énergie. Tous les pays n’ont pas les mêmes potentiels d’investissement, les mêmes sources d’énergie. Ce qui est important, c’est que tous participent à une production propre.

Je sais qu’il faut très longtemps avant qu’un pays change d’option. En 1998, l’Allemagne a décidé de tourner le dos au nucléaire. Mais nous n’avons vraiment commencé qu’après la catastrophe de Fukushima en 2011. Huit centrales ont ainsi été mises hors service et nous produisons désormais 25 % de nos besoins grâce à des énergies renouvelables. Mais ce changement n’est pas gratuit et nos citoyens ne sont pas toujours contents.

Nous commençons seulement maintenant à créer des installations propres mais qui génèrent de nouveaux problèmes avec la nature. L’éolien a besoin de place et présente un danger pour les oiseaux et les chauves-souris. De plus, il fait beaucoup de bruit. Les installations offshore, quant à elles, perturbent bateaux et poissons. D’autres installations ont besoin de plus d’espace. La production d’énergie a une incidence sur l’environnement, mais aussi sociale et économique.

Avant de pouvoir investir dans de nouvelles installations, souvent grâce à des investisseurs privés plutôt que par l’Etat, il faut en amont avoir réglé des procédures d’autorisation très longues. Il faut ainsi prévoir des incitations qui permettent de créer de nouvelles entreprises, donc de nouveaux emplois. C’est le côté positif. Mais qui paye ? L’électricité propre peut être achetée à un prix garanti, bien au-dessus, en Allemagne, du prix du marché. C’est donc le consommateur final qui paye, soit par les tarifs de l’électricité, soit par les impôts.

Sur ce sujet, nous devons échanger davantage et apprendre plus les uns des autres.

La coopération transfrontalière va devenir de plus en plus importante, car il sera nécessaire de s’assurer un approvisionnement énergétique sûr. Personne ne peut courir le risque d’un black-out, même pour une seconde, car les conséquences sur l’économie seraient désastreuses. C’est pourquoi il importe d’investir dans des infrastructures de réseau, dans ce que l’on appelle les « réseaux intelligents », qui permettent de gérer des grandes comme des petites quantités – pour cela, nous aurons besoin d’investir de plus en plus dans des systèmes transfrontaliers. Une fois encore, les coûts seront supportés par le consommateur.

Les besoins en énergie vont augmenter si nous voulons aller vers plus de mobilité électrique – ce qui sera une chance pour certains pays. Les pays de la Méditerranée, avec leur soleil et leur vent, deviendront des fournisseurs d’énergie. Mais là aussi, il faudra investir si nous voulons disposer de bonnes infrastructures de réseau.

Pour que tout cela devienne réalité, il reste beaucoup à faire. La solution la plus intelligente, et la moins coûteuse, est évidemment de consommer moins d’énergie. Tous les équipements que nous utilisons aujourd’hui proposent des consommations bien inférieures que par le passé, pour une meilleure performance. Nos bâtiments sont construits de manière intelligente, ou équipés de façon à réduire leur consommation énergétique. Mais il ne faut pas oublier tous ceux qui, dans nos pays, ne peuvent pas financer ces équipements – en tout cas, pas seuls. Ils auront encore, pour plusieurs années, d’importantes dépenses d’énergie à supporter. Les politiques doivent trouver des solutions pour empêcher l’émergence d’une pauvreté énergétique.

Il revient aux élus d’empêcher le gaspillage d’énergie et la production de gaz à effet de serre. On peut aussi influencer les gens par leur portefeuille, et c’est pourquoi le mot « impôt » ne doit pas être honteux. Les échanges d’émissions de gaz à effet de serre au sein de l’Union européenne pourraient également être rendus plus efficaces.

Au-delà des énergies renouvelables classiques, comme les éoliennes on- et offshore ou les marémotrices, nous recherchons sans cesse de nouvelles sources d’énergie, y compris dans le sol. L’utilisation de la géothermie est déjà ancienne en Italie ; dans d’autres pays, on reste très sceptique sur cette technologie en raison des risques qu’elle présenterait. Il en va de même pour le gaz de schiste ; en Allemagne, nous l’utilisons depuis 1960, sans que cela ne dérange personne. C’est devenu un problème parce qu’aux Etats-Unis, on a utilisé avec beaucoup d’imprudence des produits chimiques. Or nous sommes en Europe, et ici on évalue les risques en amont, en vue de les exclure – dans la limite du possible. En Autriche, un produit à partir de maïs a été développé afin de réduire la nocivité des produits. Certes, nous savons que les forages profonds créent d’autres risques ; toutefois, des pays fondés sur la science et la technologie ne devraient-ils pas saisir les occasions qui se présentent à eux, et considérer autre chose que les risques ?

Les Etats membres de notre Organisation sont tous en transition énergétique, à des rythmes différents. Ce changement est nécessaire pour la planète. N’oublions pas toutefois qu’il a un coût économique, social et politique. Nous devrons accepter durant un certain temps encore d’avoir dans nos réseaux des centrales traditionnelles ; même au-delà de 2020, date à laquelle nous avons prévu de mettre en service la dernière centrale nucléaire, il existera encore une production nucléaire – étant entendu que nous ne disposons pas de solution définitive pour les déchets nucléaires. J’espère que nous continuerons à chercher ensemble des sources d’énergie de plus en plus propres.

Le défi réside aussi dans les technologies de stockage de l’énergie, pour qu’à terme, les énergies renouvelables deviennent moins chères – ce qui est dans l’intérêt de nos pays.

Un long chemin nous attend, mais les premiers pas ont déjà été faits. Pour que nous puissions atteindre cet objectif ensemble, nous vous invitons à lire nos recommandations ; j’espère que vous les jugerez utiles à votre travail dans vos pays.

M. Seyidov, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Rouquet au fauteuil présidentiel.

LE PRÉSIDENT* – Il restera trois minutes aux rapporteurs pour répondre aux orateurs.

La discussion générale est ouverte.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* – Au nom de mon groupe, je veux féliciter les auteurs de ces deux rapports très importants.

Étant président de la sous-commission de l’environnement et de l’énergie et représentant du Conseil de l’Europe à la Conférence sur le changement climatique et au Conseil de l’Arctique, je sais que M. Prescott a abordé un sujet d’une importance considérable. La communauté des Etats se comporte comme sur le Titanic : on fait la fête alors que le bateau coule. La fonte des calottes polaires s’accélère, dans certaines îles le niveau de la mer monte dangereusement : voilà où nous en sommes. Si l’on limitait les émissions de COaujourd’hui, il faudrait 80 ans pour que le mouvement engagé s’arrête ! C’est une véritable catastrophe qui s’annonce.

Vouloir aller chercher des énergies fossiles dans le sous-sol de l’Arctique est extrêmement dangereux – pourtant, c’est là que se trouvent quelque 30 % de nos réserves mondiales d’énergies fossiles. Le Nord brûle l’énergie, et c’est le Sud qui subit les calamités : ce que nous avons fait est inouï !

Le deuxième rapport, consacré à la diversification de l’énergie, est lui aussi très important. La meilleure centrale, c’est l’économie d’énergie. L’atome n’est une énergie ni propre, ni sûre – on le sait depuis les catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima –, et la fracturation hydraulique pour extraire le gaz de schiste est interdite dans bien des pays. Nous sommes en réalité toujours dépendants du gaz et du pétrole.

L’avenir, ce sont les énergies renouvelables. En décembre dernier, nous avons discuté de l’adoption du Plan solaire méditerranéen. Tous les riverains, les pays arabes, la Turquie et les pays des Balkans – une seule exception, l’Espagne - se sont associés à ce projet ambitieux qui permettrait de développer les échanges propres d’énergie entre les deux hémisphères.

Le Chancelier autrichien a souligné ce matin l’importance de créer des emplois pour les jeunes générations. Je suis sûr que l’énergie sera à l’avenir une source d’emplois, et plus important encore d’emplois durables !

M. SCHNEIDER (France), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – En février 2013, le Conseil économique et social européen affirmait avec justesse : « L’énergie est un bien commun essentiel qui permet à chacun d’avoir une vie digne ».

Pourtant, la précarité énergétique est le quotidien de plus de 50 millions d’Européens. La difficulté pour ces personnes de payer leur facture énergétique, voire leur accès limité à une énergie suffisante représente un drame quotidien. Elle constitue un facteur supplémentaire de fragilisation pour des ménages déjà durement touchés par la crise économique.

Pour lutter contre cette précarité, il convient d’agir sur deux facteurs.

Le premier est le prix de l’énergie – qu’il s’agisse du chauffage ou du carburant nécessaire à la mobilité des ménages. Ce prix dépend bien sûr de choix énergétiques et budgétaires propres à chaque pays, mais il est aussi trop souvent soumis à des intérêts géostratégiques. Si les droits des fournisseurs doivent être respectés, l’accès à l’énergie ne devrait jamais servir des intérêts politiques tant l’absence d’énergie est en soi une atteinte aux droits de l’homme.

Deuxième facteur : les mesures d’efficacité énergétique. L’isolation des logements est fondamentale pour faire baisser la facture énergétique. Or, les ménages modestes n’ont souvent pas les moyens de faire les travaux de rénovation nécessaires. Pour remédier à cela, nous devons réfléchir ensemble au niveau européen à des mécanismes de financement innovants. Cependant, fort heureusement, la plupart des Etats européens prévoient des dispositifs spécifiques, comme des « tarifs sociaux », pour protéger les plus faibles.

Dans le monde, la réalité de la pauvreté énergétique montre malheureusement un autre visage : plus d’un milliard d’individus n’ont pas accès à l’électricité ! L’absence de services énergétiques modernes représente une entrave au développement de ces pays du Sud et se traduit par des situations dramatiques pour leurs citoyens.

À cette vulnérabilité s’ajoute celle induite par les changements climatiques. Qu’il s’agisse de la montée des eaux ou des catastrophes naturelles comme la sécheresse ou les inondations, malgré l’actualité récente, force est de constater qu’elles touchent et toucheront principalement des pays pauvres, entraînant des migrations forcées. Si la disparition de certaines îles du Pacifique ou de l’Océan indien est souvent citée en exemple pour évoquer la notion de réfugiés climatiques, nous ne devons pas oublier que le changement climatique aura un impact fort sur les régions agricoles d’Afrique sub-saharienne par exemple. Nous devons aussi avoir conscience du fait que la grande majorité des migrations environnementales seront vraisemblablement internes, nous obligeant à réexaminer nos dispositifs relatifs aux personnes déplacées.

Sans existence juridique, quel statut sera celui de ces réfugiés climatiques ? La communauté internationale devra repenser ces instruments institutionnels pour que la solidarité internationale s’adapte à cette nouvelle forme de migration.

Nous avons aujourd’hui une double responsabilité : celle de modifier nos comportements pour ralentir le changement climatique et éviter le pire, et celle de promouvoir la solidarité énergétique en Europe et au-delà pour une énergie durable et sûre. C’est notre devoir envers les générations futures.

Bien entendu, j’approuve les rapports de nos deux rapporteurs.

M. BÜCHEL (Liechtenstein), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – L’accès à une énergie qui soit payable et propre est l’un des plus grands défis du XXIe siècle. A la lecture du rapport, nous comprenons qu’un tournant énergétique est nécessaire, certains pays l’ont déjà compris et c’est avec succès qu’ils ont lancé des incitations à se tourner vers d’autres énergies pour un bouquet énergétique plus durable. C’est une étape importante également pour réduire les émissions de CO2.

L’objectif « 20-20-20 » de l’Union européenne est aussi l’un des objectifs du Liechtenstein. Ce sont des étapes qui valent la peine d’être suivies pour un avenir propre, durable, pour nous et nos enfants. Les incitations étatiques ont déjà permis d’atteindre un objectif intermédiaire, à savoir un cocktail d’énergies plus durables.

Les Etats qui se tournent vers ces transformations doivent être soutenus. Et il faudrait que les autres pays prennent exemple sur ces Etats modèles. Les coûts énergétiques sont extrêmement élevés et ont des répercussions sur la compétitivité économique. Il est donc essentiel que nous agissions ensemble et que ces transformations énergétiques ne se fassent pas aux frais de ceux qui s’y lancent.

L’objectif que nous devons nous fixer est de trouver de nouvelles sources énergétiques renouvelables, et de nous assurer de la réduction en parallèle de la consommation énergétique, qu’il s’agisse d’énergies fossiles ou renouvelables. Nous devons réduire la consommation pour assurer la durabilité, ce qui ne saurait être l’objectif d’un marché libre. Il convient donc de trouver de nouveaux principes fondateurs pour une telle politique.

Une nouvelle réforme énergétique est nécessaire, des techniques nouvelles doivent être mises en place. Mais ne soyons pas trop optimistes, avançons avec prudence, mes chers collègues, car s’il s’agit, comme le rappelle le rapport, de se lancer dans une nouvelle politique, celle-ci ne suffit pas à elle seule. Il faut de nouvelles technologies sans conséquence pour les régions directement concernées. Il convient en particulier de s’assurer que l’eau potable ne sera pas atteinte par les gaz de schiste.

En conclusion, je trouve les rapports excellents et j’en remercie les rapporteurs.

M. JÓNASSON (Islande), porte-parole du Groupe démocrate européen* – J’aimerais commencer par dire que je suis d’accord avec John Prescott et le remercier de son travail précieux.

Dans l’exposé des motifs, il est dit que le changement climatique est l’une des pires menaces auxquelles nos sociétés sont confrontées au XXIe siècle. La lutte contre le changement climatique et la dégradation des ressources naturelles nous obligent à penser et à agir ensemble, au-delà de nos frontières. Cette lutte est aussi cruciale que nos efforts pour nous mettre d’accord sur un nouveau cadre d’actions pour les Objectifs du millénaire pour le développement après 2015. Notre succès ou notre échec déterminera le monde que nous laisserons en héritage aux futures générations.

Cette discussion est prise très au sérieux dans les partis de gauche, et nous sommes très reconnaissants au rapporteur, et d’accord avec les propositions qui nous sont faites dans le projet de résolution.

J’aimerais également remercier Doris Barnett pour son rapport extrêmement complet qui a été discuté dans notre groupe politique. Un certain nombre de réserves avaient été faites, mais il y a des points sur lesquels nous pouvons tomber d’accord.

Certains d’entre nous ont souhaité être plus ambitieux que ce qui est proposé dans le document en ce qui concerne les normes et les objectifs en matière d’émissions de gaz à effet de serre. D’autres sont sceptiques quant à certains termes employés, tels que « énergies propres », cette expression incluant l’énergie nucléaire alors qu’elle n’est pas durable pour des raisons de sécurité – sans oublier la question du traitement des déchets nucléaires.

En ce qui concerne les gaz à effet de serre, certains dans notre groupe politique sont sceptiques quant à l’idée de « commercialiser l’atmosphère » et de se servir de cette commercialisation comme d’un instrument pour lutter contre le changement climatique. Et je fais partie de ces sceptiques. Par ailleurs d’autres soulignent que le système d’échange de droits à émission de gaz à effet de serre, à l’heure actuelle, n’incite guère à investir dans les énergies propres et ne doit pas être étendu au reste du monde tant qu’il n’aura pas fait ses preuves.

M. ILIĆ (Serbie)* – Mon propos sur le sujet vaut pour la Serbie comme pour d’autres pays des Balkans.

La Serbie bénéficie de multiples ressources, tels que le charbon et les richesses hydrauliques. Elle a, au surplus, de larges perspectives en matière de ressources renouvelables. La Serbie participe à l’ambitieux projet russe de pipeline de gaz, le South Stream International. En effet, cette ressource est pour la Serbie riche en avantages, car ce gazoduc lui permettrait de ne plus importer du gaz via le réseau de gaz hongrois, extrêmement coûteux. Certes, la Serbie continuera d’acheter du gaz, mais le gaz russe est bien moins onéreux. Cela lui permettra, en outre, de tirer des revenus du transit de gaz, qui pourront être investis dans le développement.

La Serbie consent un effort important, y compris financier, pour développer ses propres ressources énergétiques, essentiellement l’hydraulique, la biomasse, le charbon et les énergies renouvelables. La plupart de ces projets sont développés avec le soutien d’investisseurs internationaux, des fonds de l’Union européenne, des entreprises chinoises étant intéressées financièrement.

Parallèlement à la biomasse qui présente un fort potentiel, la Serbie dispose des ressources nécessaires pour construire des centrales solaires et des fermes éoliennes. Mais les subventions représentent un lourd fardeau pour l’économie et pour les normes sociales. C’est pourquoi ces grands projets dépendent à l’heure actuelle de financements étrangers. Pour qu’un gouvernement reste au pouvoir dans les Balkans, il doit trouver le bon équilibre entre développement économique et normes sociales. Le bénéfice économique se réalise en général à long terme alors que les conséquences au plan social se font sentir immédiatement.

Rappelons-nous l’action en matière d’électricité du gouvernement bulgare, il y a un an, qui a dû trouver le juste équilibre entre sécurité énergétique et normes sociales tout en répondant aux exigences du développement durable. C’est toujours un problème pour un gouvernement. Trouver le juste milieu nécessite d’investir dans la diversification énergétique en vue d’un développement durable. Cela peut paraître du luxe pour un gouvernement qui a déjà du mal à joindre les deux bouts, qui doit faire face à une dette extérieure, à un déficit budgétaire et à des normes sociales en-deçà des attentes. Les ressources n’en restent pas moins bien présentes, à l’instar des idées, des projets et de la volonté politique de créer le cadre juridique nécessaire.

Comme il arrive souvent, il nous faut plus de temps, plus d’argent. Or il nous manque l’un et l’autre.

Mme GKEREKOU (Grèce)* – Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, c’est pour moi un grand honneur que d’être parmi vous en tant que nouvelle déléguée de la Grèce à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

Mon intervention portera principalement sur les possibilités de diversification en Grèce conformément aux engagements européens sur la politique énergétique. La planification mise en œuvre vise à réduire la dépendance à l’énergie importée et à développer des énergies renouvelables. Trois scénarios ont été envisagés. Le premier, consistant dans le maintien des politiques existantes en matière d’énergie et d’environnement conduirait à une très faible réduction des émissions de COjusqu’en 2050 et à de piètres résultats en termes d’utilisation des énergies renouvelables et d’économie. Nous avons donc retenu les deux autres scénarios, prévoyant une large utilisation des énergies renouvelables. Nous réduirons ainsi les émissions de COde 60 à 70 % par rapport à 2005, le volume des énergies importées et la dépendance énergétique de la Grèce à l’importation de combustibles fossiles.

Une telle planification suppose des investissements technologiques. Nous aurons ainsi l’occasion de développer des secteurs comme le commerce, la construction. En outre, le consommateur sera protégé des fluctuations de prix, économisera l’énergie et réduira ses dépenses.

Le gouvernement grec s’efforce de faire face à la pauvreté énergétique qui s’est récemment aggravée à la suite d’ajustements budgétaires drastiques. Des ménages peinent à payer leurs factures d’électricité. Aussi la Grèce a-t-elle décidé de réduire de 15 à 20% la facture des habitants ayant les plus faibles revenus. Nous faisons ainsi face à la pauvreté.

LE PRÉSIDENT* – Madame, je vous félicite, de votre présence ici et vous souhaite la bienvenue.

Mme Cigāne, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

M. JAKAVONIS (Lituanie)* – Je voudrais exprimer ma reconnaissance à M. Prescott et Mme Barnett pour le travail qu’ils ont réalisé. J’invite mes collègues à voter en faveur des deux projets de résolutions.

Je voudrais souligner l’importance de la question énergétique. Tous les ans, mon pays consacre un dixième de son budget à sa consommation énergétique, soit l’équivalent de plus de un milliard d’euros pour l’électricité, plus de 4 milliards pour le gaz, et 5 milliards pour le pétrole. Vous comprendrez à quel point la sécurité énergétique est essentielle. Aujourd’hui déjà, les pays de la CEI rappellent l’urgence de la question, il faut la reconnaître et ne pas se leurrer soi-même.

Autre problème : le réchauffement climatique. Utiliser des ressources non renouvelables n’est pas compréhensible. La raison en est économique, tant il est vrai que le renouvelable coûte cher. En Europe, la concurrence sur le marché international est grande. Il est donc nécessaire de rester compétitif. Il doit être possible de suivre les préconisations exprimées, mais cela exigera volonté et travail.

Mme MATTILA (Finlande)* – Je remercie nos rapporteurs, M. Prescott et Mme Barnett, pour leurs excellents rapports.

Mon propos portera sur la politique climatique de l’Union européenne. Je regrette de le dire mais je dois le dire : le changement climatique est à l’œuvre, c’est vrai. Preuve en est la multiplication des catastrophes naturelles, liées au changement climatique et aux émissions de gaz à effet de serre. Mais la politique climatique de l’Union européenne est totalement absurde. Nous avons un système d’échange de droit à polluer. Faire brûler des combustibles fossiles augmente les émissions de gaz à effet de serre et nous ouvrons de nouvelles mines de charbon. Je ne comprends pas.

La politique climatique doit être élaborée au niveau mondial. Il est temps, à cet égard, d’écrire une nouvelle page. L’énergie est bien sûr un élément essentiel pour l’économie, et cela d’autant plus que la crise économique est devenue une crise démocratique. L’industrie, en Europe, est une grande consommatrice d’énergie. Il en va de même, d’ailleurs, pour le chauffage domestique – or on sait bien que la chaleur n’est pas, à strictement parler, produite par les radiateurs. Les citoyens doivent être alertés sur le coût réel de l’énergie.

Les politiques en matière d’énergie et de climat doivent aller de pair. À cet égard, je suis préoccupée par le manque de coordination entre ces deux dimensions au niveau de l’Union européenne. Nous sommes trop dépendants de l’énergie nucléaire, laquelle est d’ailleurs encouragée. Certes, plusieurs pays agissent en faveur des énergies renouvelables. En Autriche, par exemple, les énergies vertes créent de l’emploi ; les encourager est beaucoup plus sain que d’ouvrir de nouvelles mines de charbon. Il faut développer les technologies permettant de rendre moins chères les énergies vertes, car les bioénergies sont l’avenir de l’Europe. Il faut développer des systèmes de production de l’énergie décentralisés, fondés sur l’utilisation de la biomasse. Le pétrole, quant à lui – ne l’oublions pas –, doit parfois être cherché dans des lieux improbables comme les fonds marins. N’oublions pas, à cet égard, la catastrophe du Golfe du Mexique. Le prix du pétrole ne baissera pas dans le futur.

M. CONNARTY (Royaume-Uni)* – J’ai passé 21 ans dans des groupes d’étude sur l’énergie au Parlement britannique, y compris un groupe sur les énergies alternatives. J’ai été secrétaire du groupe d’étude sur le nucléaire et du groupe d’étude sur les industries pétrolière et gazière anglaises offshore. Depuis 1996, je suis membre du bureau de l’office parlementaire sur la science et l’énergie.

Je me félicite donc du rapport sur le changement climatique présenté, au nom de la commission des affaires sociales, par mon excellent ami travailliste John Prescott. Je soutiens également les amendements présentés par la commission afin de sortir de l’impasse et de passer à une autre étape s’agissant de la préservation de notre planète.

Je me concentrerai sur la diversification de l’énergie dont traite le rapport de Mme Barnett. Pour faire face à la crise, il est important de tenir compte des aspects financiers et économiques, en prenant garde d’éviter les diktats comme celui que mon pays a subi. Dans certains pays, on a mis en place des politiques fondées sur l’énergie nucléaire, en refusant de voir les faits scientifiques. On a construit des centrales mettant en œuvre des technologies potentiellement dangereuses. Dans d’autres pays, on a construit des centrales au charbon, soit la source d’énergie la plus sale et la plus dangereuse.

La demande en matière d’énergies fossiles restera très forte tout au long du siècle. Dans mon pays, nous utilisons 47 % de charbon, source d’énergie peu coûteuse. Les projets pilotes menés en France – à Pau, par exemple – pour trouver de nouvelles sources d’énergie sont en réalité une voie d’avenir pour continuer à produire des énergies fossiles. En outre, le nucléaire, si on y regarde de près et si l’on prend tout en compte – de la construction des centrales jusqu’à leur démantèlement –, est l’énergie dont l’empreinte carbone est la plus désastreuse et, s’agissant de la sécurité, je partage le point de vue de M. Schennach. En France, on peut utiliser le plutonium produit dans le cadre de programmes d’armements nucléaires et le recycler indéfiniment.

En conclusion, la diversification de l’énergie doit être poursuivie, mais sur la base d’une véritable rigueur scientifique.

M. SUDARENKOV (Fédération de Russie)* – Les deux rapporteurs ont évoqué l’importance du facteur humain dans le changement climatique. Personne ne peut le nier aujourd’hui : le changement climatique est là et il est établi que l’activité humaine l’aggrave.

L’un et l’autre souhaitent que nous léguions à la génération suivante un monde propre. Cela dépend de ce que nous ferons ; j’espère que nous réussirons. Cela dit, nous avons d’ores et déjà connu des échecs. L’un des rapports nous rappelle la catastrophe qui nous attend à partir du moment où la température aura augmenté de deux degrés par rapport à l’ère préindustrielle.

Si les principes sont d’ordre général, les réactions peuvent être différenciées : chaque pays pourrait adapter sa législation de façon différente en vue d’atteindre les objectifs 2020. Peut-être cela exigerait-il d’ailleurs que nous engagions une procédure de suivi – non plus sur un pays, mais sur un thème.

Dans son point 3, le projet de résolution fait allusion au fait qu’un certain nombre de pays – on pense au Canada, à la Nouvelle-Zélande, ou encore à la Russie – ne respectent pas le Protocole de Kyoto. Il est vrai que nous avons rejeté des obligations chiffrées en matière d’émissions de gaz à effet de serre jusqu’en 2020. Néanmoins, notre pays partage les objectifs du Protocole de Kyoto. Au début du xxie siècle, la consommation moyenne par habitant s’est stabilisée aux alentours de 2,5 ou 2,6 tonnes d’équivalent charbon. Selon nos scientifiques, il serait possible de parvenir à stabiliser la situation dès lors que trois conditions seraient réunies : il faudrait que la consommation des pays industrialisés tombe de 6,9 à 4 tonnes équivalent charbon, que la consommation des pays en voie de développement augmente tout au plus de 1 à 2,5 tonnes équivalent charbon et que, dans le même temps, l’on augmente l’efficacité énergétique. Il faut donc une combinaison de facteurs et une collaboration entre pays industrialisés et pays en développement. Personnellement, je ne suis pas convaincu par ce système de commercialisation des gaz à effet de serre. Plutôt que de commercer, voire de spéculer sur l’air propre, il faudrait tenter de réduire les émissions.

LE PRÉSIDENT – M. Mendes Bota, inscrit dans le débat, est absent de l’hémicycle.

M. RECORDON (Suisse) – Je remercie mes collègues Prescott et Barnett pour les excellents rapports qu’ils ont rédigés avec l’aide précieuse du secrétariat de la commission.

Je vous inviterai donc à approuver sans réserve les propositions qui vous seront soumises tout à l’heure, mais je voudrais toutefois émettre quelques observations en prenant un certain recul.

Tout d’abord, il est très bien d’avoir lié les deux sujets, tant il est vrai que l’on peut difficilement ne pas traiter ensemble la régulation climatique et la diversification énergétique, sous peine de faire de grosses erreurs. Il est évidemment déterminant pour l’avenir de nos conditions climatiques d’avoir un mélange d’énergies qui soit le plus propre possible, mais je vais sans doute vous décevoir : à mon avis, l’énergie propre n’existe ! Comme on dit chez nous, la seule énergie propre ne se calcule pas en mégawatt mais en « négawatt », c’est-à-dire en énergie que l’on économise. Ce qu’il convient de mettre en avant, c’est bien la lutte contre le gaspillage.

Ensuite, bien entendu, il existe des degrés. Il est clair que les énergies renouvelables posent moins de problèmes mais, même pour réaliser des capteurs solaires, il faut du lithium. Le lithium est relativement abondant, mais n’est pas disponible jusqu’à plus soif. À l’autre bout de la chaîne, il y a la renonciation nécessaire, et la plus rapide possible, au charbon, à cette illusion que peut représenter le gaz de schiste compte tenu des dégâts qu’il provoque sur l’environnement et, de manière générale, à tous les hydrocarbures et les gaz qui produisent de l’effet de serre.

Une place particulière est à réserver au nucléaire. On a eu beaucoup d’illusions quant au nucléaire. Quand je faisais mes études d’ingénieur dans les années 70, beaucoup pensaient que c’était la panacée, mais on sait aujourd’hui que ce n’est pas seulement dans les pays qui contrôlaient mal le processus industriel mais aussi dans un pays comme le Japon que l’on est arrivé à une catastrophe. C’est sans doute la seule critique que je peux adresser au rapport sur la diversification de l’énergie, qui affirme, à la page 11, que l’énergie nucléaire a pour avantage la sécurité de l’approvisionnement. Ce n’est pas exact, si l’on considère la possibilité d’une interruption brutale quand se produit une catastrophe et le fait que les pays européens ne disposent d’aucune ressource en uranium.

La fusion offre certes des perspectives intéressantes, mais sa faisabilité recule tous les ans. Du temps de mes études, on parlait de trente ans. Aujourd’hui, nous en sommes à quarante ans. On ne sait si l’on y parviendra un jour.

Je vous invite donc à vraiment mettre en avant, chers collègues, dans vos têtes et vos déclarations, la lutte contre le gaspillage énergétique.

M. REISS (France) – Madame et Monsieur les rapporteurs, je vous félicite pour la qualité de votre travail dont l’enjeu n’est ni plus ni moins que l’avenir de notre belle planète.

Comme vous le savez, mon pays accueillera la prochaine conférence Climat de l’Onu, en 2015. Les problèmes du changement climatique ne pourront être résolus sans y associer la grande majorité des émetteurs de gaz à effet de serre, les GES. La Chine en représente 29 %, les Etats-Unis 17 % et l’Europe 11 %. Cet accord associant les principaux émetteurs de gaz à effet de serre devra, pour être une réussite, être contraignant et soumis à un contrôle avec la possibilité de sanctions.

Depuis les Sommets de Doha et de Durban, sous l’effet de la prospérité économique des pays émergents et de leur niveau croissant de développement, on assiste à une prise de conscience progressive des opinions publiques concernant la menace climatique. C’est le cas en Chine, en l’Inde, au Brésil et, dans une moindre mesure, en Afrique du Sud. Par ailleurs, le Président Obama s’est montré disposé à avancer sur ce sujet. Ces évolutions sont importantes pour qu’un tel accord puisse enfin voir le jour.

Au titre du Protocole de Kyoto, les pays industrialisés se sont engagés à respecter des quotas de réduction ou de limitation de leurs émissions de gaz à effet de serre. L’Union européenne a été en pointe sur ce sujet et, le 22 janvier, la Commission européenne a proposé que les 28 Etats membres se fixent pour objectif de réduire de 40 % leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport à 1990. Fin 2012, l’Europe avait réduit ses émissions de 18 % par rapport à 1990. C’est un objectif ambitieux qui nécessite un engagement de tous les Etats, en particulier les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre par habitant.

Madame la rapporteure, vous avez évoqué la sortie du nucléaire par l’Allemagne, mais je voudrais rappeler que l’essor des énergies vertes est freiné par des coûts trop élevés et que le retour au charbon n’est pas idéal. Bien au contraire ! Ce retour au charbon semble favorisé également dans certains pays des Balkans – avec le soutien de l’Union européenne ! – sous le prétexte, assumé par le commissaire à l’énergie, d’une priorité à « l’indépendance énergétique » de l’Union européenne et de ses partenaires, quitte à sacrifier les critères environnementaux.

Où sont les priorités ? Je n’évoquerai pas l’énergie nucléaire, mais j’affirme que la diversification des énergies sera indispensable pour permettre à la fois de réduire les émissions, mais également de favoriser une plus grande indépendance énergétique. C’est pourquoi nous devons tout mettre en œuvre pour réussir la transition énergétique. Celle-ci demande à la fois du courage et de la volonté, elle demande surtout que l’Europe accorde les violons de son avenir énergétique. C’est pour toutes ces raisons et bien d’autres que la Conférence de Paris devra réussir.

Mme BOUTIN-SWEET (Canada, observateur)* – La demande d’énergie des économies en plein essor est insatiable. Selon l’Agence internationale de l’énergie, la demande d’énergie globale pourrait croître d’un tiers de 2011 à 2035.

L’Agence ajoute qu’il est possible de répondre à la demande mondiale au moyen de différentes sources d’énergie, en particulier l’énergie renouvelable. Nous pouvons aussi continuer à favoriser l’industrie des combustibles fossiles, à coup de subventions d’un montant de 544 milliards de dollars comme en 2012, soit cinq fois plus que les 101 milliards de dollars de subventions accordées à l’industrie des énergies renouvelables.

Soyons réalistes, cependant : nous ne pouvons pas nous défaire de notre dépendance au pétrole du jour au lendemain. En revanche, l’argument selon lequel il est nécessaire de continuer de compter fortement sur les combustibles fossiles et d’augmenter la consommation d’énergie pour assurer la croissance économique ne repose sur aucune donnée probante, comme il l’a été démontré à maintes reprises.

Comme l’a indiqué la rapporteure en s’appuyant sur nombre d’études internationales, l’énergie renouvelable et l’efficacité énergétique sont des éléments essentiels qui permettent d’assurer la croissance économique et la compétitivité économique, le respect de l’environnement ainsi que l’égalité et l’équité économiques. En réduisant la dépendance à l’égard de combustibles fossiles coûteux, nos entreprises peuvent devenir plus concurrentielles et les énergies de remplacement peuvent être étendues à des régions qui ne disposent pas des infrastructures nécessaires aux combustibles fossiles. Ceux d’entre nous qui habitent dans des pays où l’énergie abonde oublient parfois qu’une grande partie de la population mondiale doit vivre sans électricité ou mazout.

Il faut aussi voir la conservation d’énergie et le développement d’autres formes d’énergie et des technologies qui le permettent comme des secteurs d’avenir et un moteur de développement économique en soi. Le secteur mondial de l’énergie propre devrait atteindre 3 milliards de dollars en 2020.

Quant aux avantages pour l’environnement, ils sont désormais indéniables.

Comme l’a indiqué la société PricewaterhouseCoopers, pour avoir même 50 % des chances de limiter le réchauffement climatique à deux degrés Celsius, conformément aux engagements pris par le Canada et d’autres pays dans le cadre de l’Accord de Copenhague, l’économie mondiale doit réduire l’intensité carbonique de 5,1 % par année jusqu’en 2050.

Dans son édition de 2013 des Perspectives énergétiques mondiales, l’Agence internationale de l’énergie signale que, malgré les efforts déployés actuellement à l’échelle mondiale pour respecter l’objectif de limiter le réchauffement à deux degrés – en misant notamment sur l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, en réduisant les subventions pour les combustibles fossiles et en fixant un prix pour le carbone – le monde est en voie de faire face à une hausse moyenne, à long terme, de 3,6 degrés Celsius.

Pour citer la rapporteure, il faut « un développement plus écologique, plus intelligent et plus équilibré ». Ce sont ces principes qui devraient orienter nos politiques en matière d’énergie. Mais c’est aussi notre affaire à tous en tant que citoyens. Chacun d’entre nous doit joindre l’action à ses paroles. Dès aujourd’hui. Il est moins une.

M. SHAHGELDYAN (Arménie)* – Chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier nos rapporteurs pour leur travail de qualité, très intéressant, car la problématique de la diversification de l’énergie est très actuelle et essentielle, surtout pour les pays en développement sans ressources énergétiques.

Ce rapport montre combien le développement humain et économique de ces cent cinquante dernières années a rendu le monde esclave de la consommation d’énergie. Cette idée est très juste et bien réelle. Nous devons donc nous efforcer de sortir de cet esclavage et de gagner, pour notre avenir, la liberté et l’autonomie énergétiques, non seulement pour les différents pays et régions du monde, mais aussi pour les organisations et les individus. À cet effet, je souhaiterais vous soumettre trois approches qui m’apparaissent comme stratégiques.

II est important de créer des synergies entre la diversification de l’énergie, la sécurité énergétique, le développement économique, la sécurité sociale et environnementale, et le développement durable.

Au cours des dernières années, la proportion des voitures fonctionnant au gaz naturel a augmenté rapidement en Arménie, pour le bien de l’environnement et de la santé publique. La recherche de nouvelles technologies en matière d’énergies renouvelables a également connu d’importants progrès. Toutefois, nous manquons de financements et de moyens efficaces de commercialisation et de production de masse.

Une stratégie commune aux trois étapes de la chaîne – création, commercialisation et production – serait nécessaire dans le secteur des énergies renouvelables dans les pays membres du Conseil de l’Europe. La baisse des prix est par ailleurs un principe clé de la diversification de l’énergie et du développement durable. Une approche stratégique est également nécessaire pour la favoriser.

Enfin, les sources énergétiques doivent servir au développement économique et social. Conformément aux valeurs européennes, nous devons combattre la course aux armements financées par l’argent du pétrole. En particulier, nous dénonçons la militarisation de la société en cours chez notre voisin.

M. RIVARD (Canada, observateur) – C’est un plaisir pour moi que de pouvoir m’adresser de nouveau à cette Assemblée.

Dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, la communauté internationale s’est engagée à conclure, d’ici 2015, un nouvel accord dont l’objectif consiste à prévenir les changements climatiques dangereux. Pour cette raison, j’applaudis les efforts que déploient différents acteurs, y compris cette Assemblée, pour réaliser la tâche difficile que représente la conclusion d’un accord.

Le Canada prend très au sérieux le problème des changements climatiques. Le nord du pays est particulièrement touché : il se réchauffe plus de deux fois plus vite que le reste de la planète. Cependant, malgré les bonnes intentions qui sous-tendent le projet de résolution, celui-ci ne saurait constituer, pour le Canada, un instrument législatif imposant une cible en matière de réduction des émissions qui stimulera l’action. Le Canada a déjà accepté, par le biais de l’Accord de Copenhague, de réduire ses émissions de 17 % d’ici à 2020 par rapport au niveau de 2005. Il ne sera pas facile d’atteindre cette cible, mais on observe du moins une intention et une volonté commune d’y parvenir.

Au Canada, une loi confère au gouvernement fédéral des pouvoirs concernant la réduction des émissions, et le gouvernement les exerce. Ces pouvoirs découlent de la décision du Canada de désigner les gaz à effet de serre comme étant toxiques, en vertu de la loi canadienne sur la protection de l’environnement de 1999, étant donné que ces gaz peuvent mettre en danger l’environnement essentiel pour la vie.

Le Canada comprend donc la gravité de la situation ; il agit à l’échelle nationale et travaille à l’échelle internationale afin de favoriser la conclusion d’un accord équitable et efficace sur les changements climatiques. Depuis 2005, le Canada a diminué ses émissions de gaz à effet de serre de 4,8 %, dans un contexte où l’économie a connu une expansion de 8,4 %. Ce résultat est le fruit des efforts du gouvernement fédéral, des provinces, ainsi que des entreprises et des particuliers.

Sur le plan international, il est nécessaire d’intensifier le travail avant qu’un accord multilatéral puisse être finalisé et mis en œuvre. Le Canada est un chef de file à cet égard : il soutient des initiatives complémentaires, souples et novatrices en dehors de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, par exemple les efforts déployés par le Conseil de l’Arctique et la Coalition pour le climat et l’air pur pour réduire les polluants climatiques à courte durée de vie.

La logique mathématique exige que, pour être efficace, tout accord multilatéral doive s’appliquer à ce qu’il est convenu d’appeler les « grands émetteurs ». Mais en même temps, tout accord ne peut réussir que s’il est équitable. Selon les présidents du groupe de travail responsable de rédiger un accord en vertu de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, l’accord de 2015 devrait être axé sur la science, l’équité, les réalités nationales, la souplesse, l’efficacité et la participation.

Réunir ces éléments dans un accord multilatéral efficace représente une tâche colossale, et je remercie l’Assemblée de contribuer à ce travail et de mettre en lumière le rôle important que les parlementaires doivent jouer à cet égard.

M. HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Les ressources énergétiques sont un facteur majeur du développement durable, mais aussi le moteur de la vie humaine. En ce XXIe siècle, alors que le monde connaît une explosion démographique, les problèmes énergétiques prennent une importance cruciale. Ils ne soulèvent plus seulement des questions économiques, mais aussi de graves questions politiques, car ils sont source d’instabilité géopolitique. La coopération internationale est désormais indispensable dans ce secteur.

Le succès de l’Azerbaïdjan en matière de diversification énergétique illustre parfaitement ce phénomène. Après avoir recouvré son indépendance, il y a 23 ans, mon pays a conquis peu à peu le droit de posséder ses propres ressources énergétiques. En 1994, nous avons signé un contrat sur l’exploitation des ressources énergétiques de la mer Caspienne qui a attiré les investissements étrangers de plusieurs grands pays du monde. Ce contrat, que nous appelons « Contrat du siècle », a permis de faire apparaître un nouveau panorama de l’énergie en Europe et a accéléré le développement économique de l’Azerbaïdjan. L'Accord de Shahdaniz 2, signé en 2013, sera probablement le contrat du XXIe siècle : c’est l’un des plus grands projets énergétiques du monde.

Il montrera qu’il est possible de garantir la sécurité énergétique en Europe, ainsi que la diversification de l’énergie, par une véritable coopération internationale. Le Président de l’Azerbaïdjan a réaffirmé sa position au sujet de cette coopération énergétique. Notre pays fait bénéficier les autres pays de ses ressources énergétiques. Son rôle essentiel a été réaffirmé récemment à la suite de la découverte de nouvelles ressources en gaz.

Au-delà de ses ressources en hydrocarbures, ce qui rend l’Azerbaïdjan attrayant, c’est que le transport de ces matières de l’Asie centrale vers l’Europe est sans risque. L’Azerbaïdjan entretient un véritable dialogue énergétique dans l’espoir d’aboutir à un partage des bénéfices, pour un monde plus pacifique.

LE PRÉSIDENT* – Nous avons épuisé la liste des orateurs.

J’appelle la réponse des rapporteurs, qui disposent chacun de trois minutes.

Mme BARNETT (Allemagne), rapporteure* – Le débat nous l’a rappelé, l’approvisionnement en énergie est essentiel à l’avenir de nos pays. Il ne doit pas dépendre d’un jeu de pouvoir mais procéder plutôt de ce que chaque Etat est tenu de mettre en place pour assurer à ses citoyens subsistance et bien-être.

Tous ensemble, nous devons réduire nos émissions de CO2, car il s’agit là d’une responsabilité commune. Quant aux nouvelles technologies, nous devons nous aider mutuellement à les développer. L’argent manque dans beaucoup de pays pour investir comme il conviendrait. Comme cela a été rappelé, certains pays aimeraient se doter d’énergies nouvelles, mais n’ont pas les moyens de les acquérir. Il faudrait les aider, tout en évitant l’arrivée d’investisseurs qui les rendraient dépendants.

Au sujet du point 9.1.1, relatif au commerce européen d’émissions, qui a été mentionné à plusieurs reprises au cours du débat, il ne s’agit pas de créer une égalité parfaite avec les autres pays, mais il faut nous efforcer de corriger les erreurs commises dans divers pays.

En conclusion, nous avons tous déjà pris beaucoup de décisions au niveau national et international. Or si le papier est patient, ce n’est pas le cas de la nature, qui voudra nous reprendre ce que nous essayons de lui voler. Prendre des résolutions, c’est très bien, mais agir, c’est mieux ! Ce sera difficile dans beaucoup de pays, dont le mien, l’Allemagne, car cela coûtera très cher. Nous devrons faire preuve d’inventivité pour aider ceux qui auront du mal à passer aux énergies nouvelles. Si nous le voulons, nous le pourrons. Comme politiques, nous devons adopter des résolutions mais surtout veiller à leur mise en œuvre. Je vous propose donc que nous fassions le point à ce sujet dans cinq ans.

M. PRESCOTT (Royaume-Uni), rapporteur* – Merci beaucoup au secrétariat de la commission qui a fait l’essentiel du travail. Merci aussi et dans l’hémicycle. Cette discussion utile doit se poursuivre.

On cherche maintenant du pétrole dans l’Arctique, a-t-on rappelé : c’est la bulle de carbone. Mais toutes les réserves de pétrole ne peuvent être exploitées qu’à 20 % si nous ne voulons pas dépasser le niveau d’émission requis. L’approvisionnement en énergie et l’environnement sont indissociablement liés.

Ce sont les pays riches, dont nous faisons partie, qui empoisonnent le monde. Pourquoi ? Parce que notre croissance est fondée sur le charbon et sur le pétrole. Si nous accroissons ainsi notre richesse, ce n’est pas au profit des pays en voie de développement, qui essaient d’investir dans des économies à faible usage de charbon mais sont obligés d’utiliser le charbon et le pétrole.

Comment trouver un accord ? À Copenhague, j’ai entendu les Américains affirmer que la Chine avait le même niveau d’émissions de gaz qu’eux. En effet, elle en produit autant voire davantage, mais si l’on rapporte ce chiffre à la population, ses émissions sont cinq à six fois moindres. Les Nations Unies parlent de responsabilités communes mais différenciées. Tout le monde veut la croissance de ces pays, et il y a beaucoup à faire pour réduire la pauvreté. Les pays riches détiennent une responsabilité en la matière. Peut-être pourrait-on employer des fonds pour séquestrer le charbon et empêcher les riches d’empoisonner le monde. Car il existe vraiment une bulle.

Cette bulle, c’est nous qui l’avons conçue à Kyoto, pour la croissance de quinze Etats membres de l’Union européenne. Certains, dont mon pays, ont dû réduire leurs émissions ; d’autres, comme l’Espagne et le Portugal, ont été autorisés, dans un premier temps, à les accroître. Tel est le principe que nous allons devoir appliquer au niveau mondial. C’est une question d’équité, de justice, au-delà du calcul mathématique. Comme pays riches, nous devons nous développer en émettant peu de carbone, et aider les autres, qui se développent plus rapidement, à réduire leurs émissions. Il sera difficile de relever ce défi, mais nous le devons. Car sans équité, il n’y aura pas d’accord ; notre collègue français l’a dit clairement. C’est d’ailleurs essentiellement en France qu’un tel cadre se dessine.

Il faut une initiative européenne qui montre la voie. La Commission européenne doit changer de méthode, car nous n’avons toujours pas progressé sur ce point.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le président de la commission, vous disposez de deux minutes.

M. GHILETCHI (République de Moldova), président de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – Le nombre de membres présents dans l’hémicycle à cette heure tardive témoigne de l’intérêt que suscite le débat. Il est vrai que la passion de nos rapporteurs est communicative.

Nous avons discuté cette semaine de deux rapports qui concernaient la pauvreté avant d’aborder aujourd’hui le changement climatique et la diversification de l’énergie, deux sujets fondamentaux pour nos pays. Comme l’a dit à juste titre M. Prescott, nous devons en passer par le consensus, par le compromis, pour faire comprendre à tous nos pays la nécessité d’une législation permettant de faire face à ces problèmes.

La diversification de l’énergie est essentielle au développement durable, mais aussi pour éviter des crises politiques. Car la dépendance énergétique est une entrave à la fondation d’une société développée et prospère.

Les rapports que nous examinons aujourd’hui sont des briques importantes dans la construction à laquelle notre assemblée pourrait s’atteler, pour l’avenir de nos enfants.

Je remercie le secrétariat pour son aide précieuse et les rapporteurs. Je vous invite à adopter les deux rapports présentés.

LE PRÉSIDENT* – Le débat est clos.

Sur le premier rapport intitulé « Le changement climatique : un cadre pour un accord mondial en 2015 » (Doc. 13362) la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable a présenté un projet de résolution.

Un seul amendement a été déposé sur ce projet de résolution et il a été adopté à l’unanimité par la commission. S’il n’y a pas d’objection, conformément à l’article 33 11 du Règlement, je le déclarerai définitivement adopté par l’Assemblée.

L’amendement 1, déposé par M. Prescott, Sir Alan Meale, MM. de Vries, Cilevičs, Kox, Connarty, Sheridan, Pâslaru, Florea, Mmes Birchall, Giannakaki, MM. Triantafyllos, Magazinović, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 9, à insérer le paragraphe suivant : « Il faudrait créer un organisme international dans le cadre de tout accord sur le changement climatique visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Cet organisme devrait être tenu d’élaborer des rapports annuels à remettre à l’instance internationale établie en vertu de l’accord sur le changement climatique. Il doit refléter la grande minutie et la transparence indispensables à la crédibilité d’un nouvel accord sur le changement climatique ».

En l’absence d’objection, cet amendement est déclaré adopté définitivement.

Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13662, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (56 voix pour, 1 voix contre et 1 abstention).

LE PRÉSIDENT* – Nous en venons au deuxième rapport intitulé « La diversification de l’énergie en tant que contribution fondamentale au développement durable ». (Doc. 13366)

La commission des questions sociales, de la santé et du développement durable a présenté un projet de résolution sur lequel trois amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que le président de ladite commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement, les amendements 3 et 2 sur le projet de résolution ayant été adoptés à l’unanimité par la commission.

L’amendement 3, déposé par M. Büchel, Mme Oehri, MM. Bugnon, Voruz, Mme Mateu Pi, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 4, après le mot « refroidissement », à insérer les mots «, la mobilité ».

L’amendement 2, déposé par M. A.K. Türkeş, Mme Erkal Kara, MM. T. Türkeş, Çonkar, Dişli, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 9.2.7, à remplacer les mots « supprimer les subventions aux combustibles fossiles, mais envisager » par les mots suivants : « rationaliser et abandonner progressivement les subventions inefficaces aux combustibles fossiles à moyen terme et envisager ».

En l’absence d’objection, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

L’amendement 1 a également été adopté à l’unanimité par la commission. Toutefois, la présidence ayant été saisie d’une demande de sous-amendement oral sur cet amendement, il sera discuté selon les modalités habituelles.

Cet amendement, déposé par M. A. K.Türkeş, Mme Erkal Kara, MM. T. Türkeş, Çonkar, Dişli, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 9.2.6, à remplacer les mots « pénaliser les gaspilleurs et les pollueurs énergétiques » par les mots suivants : « induire progressivement l'abandon des modes de consommation d’énergie qui sont des sources de gaspillage et de pollution ».

M. A.K. TÜRKEŞ (Turquie)* – Les pays devraient être encouragés à développer des stratégies selon un calendrier, pour mettre en œuvre des politiques nationales, plutôt qu’à pénaliser les gaspilleurs et les pollueurs énergétiques. Tel est le sens de notre amendement.

LE PRÉSIDENT* – La présidence a été saisie par la rapporteure, Mme Barnett, au nom de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, du sous-amendement oral suivant : « À l’amendement n°1, remplacer les mots "induire progressivement l’abandon des" par les mots "décourager les" ».

L’amendement n°1 ainsi sous-amendé se lirait donc comme suit :

« Dans le projet de résolution, au paragraphe 9.2.6, remplacer les mots "pénaliser les gaspilleurs et les pollueurs énergétiques" par les mots suivants : "décourager les modes de consommation d’énergie qui sont des sources de gaspillage et de pollution". »

Mme  BARNETT (Allemagne), rapporteure * – En commission nous avons adopté ce sous-amendement à l’unanimité. M. Türkeş nous a fait part de son accord.

LE PRÉSIDENT* – Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent. Ce n’est pas le cas.

Le sous-amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous en revenons à l’amendement ainsi modifié. L’avis de la commission est naturellement favorable.

L’amendement 1, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous en venons au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13366, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (54 voix pour, 2 voix contre et 3 abstentions).

LE PRÉSIDENT* – Je félicite nos rapporteurs et tous les membres de l’Assemblée. C’était un grand honneur pour moi, représentant d’un pays pétrolier, de présider ces débats très importants sur l’énergie.

3. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance publique aura lieu demain matin, à 10 heures, conformément à l’ordre du jour de la présente partie de session.

La séance est levée.

(La séance est levée à 19 h 15)

S O M M A I R E

1. Intensifier les efforts de lutte contre les inégalités au niveau mondial : la contribution de l’Europe au processus des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD)

Présentation par Sir Alan Meale du rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable (Doc. 13368)

Orateurs : M. Jónasson, Mme Giannakaki, M. Bockel, Mmes Kazakova, Fiala, Maury Pasquier, Schneider-Schneiter, Maghradze, Bonet Perot, Spadoni, Blanco, M. Sudarenkov, Mme Karamanli

Réponses de M. le rapporteur et de M. le président de la commission des questions sociales

Vote sur un projet de résolution

2. Le changement climatique : un cadre pour un accord mondial en 2015

La diversification de l’énergie en tant que contribution fondamentale au développement durable (Débat conjoint)

Présentation par M. Prescott du rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable (Doc. 13362)

Présentation par Mme Barnett du rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable (Doc. 13366)

Orateurs : MM. Schennach, Schneider, Büchel, Jónasson, Ilić, Mmes Gkerekou, M. Jakavonis,

Mme Mattila, MM.Connarty, Sudarenkov, Recordon, Reiss, Mme Boutin-Sweet, MM. Shahgeldyan, Rivard, Huseynov

Réponses de Mme la rapporteure, de M. le rapporteur et de M. le président de la commission des questions sociales.

Vote sur un projet de résolution amendé

Vote sur un projet de résolution amendé

3. Prochaine séance publique

Annexe

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque

Pedro AGRAMUNT

Alexey Ivanovich ALEKSANDROV*

Miloš ALIGRUDIĆ*

Jean-Charles ALLAVENA

Werner AMON*

Luise AMTSBERG*

Lord Donald ANDERSON*

Paride ANDREOLI/Gerardo Giovagnoli

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV*

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI*

Daniel BACQUELAINE*

Egemen BAĞIŞ*

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE*

Taulant BALLA*

Gérard BAPT*

Gerard BARCIA DUEDRA/Sílvia Eloïsa Bonet Perot

Doris BARNETT

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

Ondřej BENEŠIK/Pavel Holík

José María BENEYTO*

Levan BERDZENISHVILI/Guguli Maghradze

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA*

Anna Maria BERNINI*

Teresa BERTUZZI*

Robert BIEDROŃ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY*

Ľuboš BLAHA*

Philippe BLANCHART*

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL

Eric BOCQUET*

Mladen BOJANIĆ*

Olga BORZOVA*

Mladen BOSIĆ*

António BRAGA*

Anne BRASSEUR/Claude Adam

Alessandro BRATTI*

Márton BRAUN*

Gerold BÜCHEL

André BUGNON/Luc Recordon

Natalia BURYKINA*

Nunzia CATALFO

Mikael CEDERBRATT*

Elena CENTEMERO*

Lorenzo CESA*

Irakli CHIKOVANI*

Vannino CHITI*

Tudor-Alexandru CHIUARIU/Viorel Riceard Badea

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE*

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH*

James CLAPPISON*

Deirdre CLUNE*

Agustín CONDE*

Telmo CORREIA

Paolo CORSINI*

Carlos COSTA NEVES

Celeste COSTANTINO*

Jonny CROSIO*

Yves CRUCHTEN

Katalin CSÖBÖR*

Milena DAMYANOVA*

Joseph DEBONO GRECH*

Armand De DECKER*

Reha DENEMEÇ

Roel DESEYN*

Manlio DI STEFANO

Arcadio DÍAZ TEJERA*

Peter van DIJK*

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ

Jim DOBBIN*

Ioannis DRAGASAKIS/Maria Giannakaki

Damian DRĂGHICI*

Elvira DROBINSKI-WEIß*

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU*

Mikuláš DZURINDA/József Nagy

Lady Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA*

Franz Leonhard EßL*

Bernd FABRITIUS

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU*

Vyacheslav FETISOV/Yury Shamkov

Doris FIALA

Daniela FILIPIOVÁ/Miroslav Krejča

Ute FINCKH-KRÄMER*

Axel E. FISCHER*

Gvozden Srećko FLEGO*

Bernard FOURNIER*

Hans FRANKEN*

Jean-Claude FRÉCON*

Béatrice FRESKO-ROLFO*

Martin FRONC*

Sir Roger GALE*

Adele GAMBARO*

Karl GARÐARSSON

Tamás GAUDI NAGY*

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO*

Pavol GOGA*

Jarosław GÓRCZYŃSKI

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA*

Sandro GOZI*

Fred de GRAAF*

Patrick De GROOTE*

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST*

Dzhema GROZDANOVA*

Attila GRUBER*

Mehmet Kasim GÜLPINAR/Ahmet Berat Çonkar

Gergely GULYÁS*

Nazmi GÜR

Antonio GUTIÉRREZ*

Ana GUŢU

Maria GUZENINA-RICHARDSON

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV*

Andrzej HALICKI*

Hamid HAMID*

Mike HANCOCK*

Margus HANSON

Davit HARUTYUNYAN/Mher Shahgeldyan

Alfred HEER/Eric Voruz

Michael HENNRICH*

Martin HENRIKSEN*

Andres HERKEL*

Françoise HETTO-GAASCH/Marcel Oberweis

Adam HOFMAN*

Jim HOOD/David Crausby

Arpine HOVHANNISYAN*

Anette HÜBINGER*

Johannes HÜBNER*

Andrej HUNKO*

Ali HUSEYNLI*

Rafael HUSEYNOV

Vitaly IGNATENKO/Olga Kazakova

Vladimir ILIĆ

Florin IORDACHE*

Igor IVANOVSKI*

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT/ Frédéric Reiss

Gediminas JAKAVONIS

Stella JANTUAN

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI/Laura Seara

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN*

Frank J. JENSSEN

Jadranka JOKSIMOVIĆ/Vesna Marjanović

Ögmundur JÓNASSON

Čedomir JOVANOVIĆ*

Antti KAIKKONEN*

Ferenc KALMÁR*

Mariusz KAMIŃSKI*

Deniza KARADJOVA*

Marietta KARAMANLI

Ulrika KARLSSON*

Jan KAŹMIERCZAK*

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH*

Serhiy KLYUEV*

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN*

Kateřina KONEČNÁ/ Marek Černoch

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR*

Attila KORODI*

Alev KORUN/Christine Muttonen

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO*

Dmitry KRYVITSKY*

Athina KYRIAKIDOU*

Jean-Yves LE DÉAUT

Igor LEBEDEV*

Christophe LÉONARD*

Valentina LESKAJ*

Terry LEYDEN*

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Lone LOKLINDT*

François LONCLE*

George LOUKAIDES*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Trine Pertou MACH*

Saša MAGAZINOVIĆ

Philippe MAHOUX*

Thierry MARIANI*

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Ivan MELNIKOV*

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON

Djordje MILIĆEVIĆ*

Philipp MIßFELDER*

Rubén MORENO PALANQUES

Igor MOROZOV*

João Bosco MOTA AMARAL*

Arkadiusz MULARCZYK*

Melita MULIĆ

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR*

Oľga NACHTMANNOVÁ*

Marian NEACŞU*

Baroness Emma NICHOLSON*

Michele NICOLETTI

Elena NIKOLAEVA*

Aleksandar NIKOLOSKI*

Mirosława NYKIEL/Tomasz Lenz

Judith OEHRI

Carina OHLSSON/Jonas Gunnarsson

Joseph O'REILLY*

Lesia OROBETS*

Sandra OSBORNE*

José Ignacio PALACIOS*

Liliana PALIHOVICI

Dimitrios PAPADIMOULIS*

Ganira PASHAYEVA*

Foteini PIPILI*

Stanislav POLČÁK

Ivan POPESCU

Marietta de POURBAIX-LUNDIN*

Cezar Florin PREDA*

John PRESCOTT

Jakob PRESEČNIK*

Gabino PUCHE*

Alexey PUSHKOV*

Mailis REPS*

Eva RICHTROVÁ*

Andrea RIGONI*

François ROCHEBLOINE/André Schneider

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET*

Pavlo RYABIKIN*

Rovshan RZAYEV*

Vincenzo SANTANGELO/Maria Edera Spadoni

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI*

Stefan SCHENNACH

Ingjerd SCHOU*

Frank SCHWABE*

Urs SCHWALLER/Elisabeth Schneider-Schneiter

Ömer SELVİ

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN/Michael Connarty

Oleksandr SHEVCHENKO

Bernd SIEBERT*

Arturas SKARDŽIUS/Petras Gražulis

Leonid SLUTSKY*

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI/Luca Lazzari

Yanaki STOILOV*

Christoph STRÄSSER*

Karin STRENZ*

Ionuţ-Marian STROE

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ*

Chiora TAKTAKISHVILI*

Vyacheslav TIMCHENKO*

Romana TOMC*

Lord John E. TOMLINSON*

Konstantinos TRIANTAFYLLOS

Mihai TUDOSE*

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Konstantinos TZAVARAS/Angeliki Gkerekou

Ilyas UMAKHANOV*

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN*

Petrit VASILI*

Volodymyr VECHERKO*

Mark VERHEIJEN*

Birutė VĖSAITĖ*

Anne-Mari VIROLAINEN*

Vladimir VORONIN*

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ*

Draginja VUKSANOVIĆ*

Piotr WACH*

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON*

Karl-Georg WELLMANN*

Katrin WERNER

Morten WOLD*

Gisela WURM

Jordi XUCLÀ

Tobias ZECH*

Kristýna ZELIENKOVÁ*

Barbara ŽGAJNER TAVŠ*

Emanuelis ZINGERIS

Guennady ZIUGANOV*

Naira ZOHRABYAN*

Levon ZOURABIAN*

Siège vacant, Croatie/ Ivan Račan

Siège vacant, Chypre*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Maria GIANNAKAKI

Observateurs

Stella AMBLER

Marjolaine BOUTIN-SWEET

Corneliu CHISU

Michel RIVARD

Partenaires pour la démocratie

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