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AS (2016) CR 32

 

 

SESSION ORDINAIRE DE 2016

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la trente-deuxième séance

Mercredi 12 octobre 2016 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 10 sous la présidence de M. Agramunt, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT* – La séance est ouverte.

Avant de commencer nos travaux, je souhaite adresser mes félicitations à mon pays, l’Espagne, puisque le 12 octobre est jour de fête nationale. Je félicite également mes compatriotes présents dans cette salle et ceux qui travaillent au sein du Conseil de l’Europe. Je vous souhaite une magnifique journée.

1. Le sport pour tous: un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Mme Quintanilla, au nom de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, intitulé «Le sport pour tous: un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale» (Doc.14127).

Après avoir écouté Mme la rapporteure, nous aurons le plaisir d’entendre M. Thomas Bach, président du Comité international olympique.

Afin de pouvoir conclure à 12 heures, nous devrons interrompre la liste des orateurs vers 11 h 45. Cela nous permettra d’entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Mme QUINTANILLA (Espagne), rapporteure de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias *– Monsieur le président du Comité international olympique, je tiens, au nom de l’Assemblée parlementaire et de mon groupe, à vous remercier de votre présence dans notre enceinte. C’est, pour moi, un véritable honneur.

Chargée de rédiger ce rapport, je suis partie du principe que la pratique du sport, outre qu’elle promeut des habitudes saines de vie, a des effets très positifs sur la société, notamment en matière de solidarité, au travers du partage qu’elle induit.

Le sport est l’activité la plus populaire de nos sociétés modernes et porte de nombreuses valeurs, comme l’estime de soi, le développement personnel, la discipline, la cohésion et la fraternité. Il a des effets bénéfiques sur le bien-être, la santé, l’éducation et l’économie. Il permet de renforcer la culture du vivre-ensemble.

Malheureusement, l’image du sport fair play a souffert à de nombreuses occasions, et plus particulièrement ces derniers temps, avec des révélations de dopage, de trucage de matchs, de violences, de traite des êtres humains et de corruption. Ces excès laissent des traces dans tous les esprits, ceux des athlètes comme ceux des spectateurs, et marquent la société dans son ensemble. Les derniers Jeux olympiques de Rio ont été plus que jamais au centre de l’attention en la matière, ce qui, une fois de plus, a terni l’image de nos disciplines sportives.

Nous traitons ici du sport avec un S majuscule. Le sport favorise la culture du vivre-ensemble, quels que soient notre genre, nos capacités physiques ou intellectuelles, notre culture, notre nationalité, notre religion, notre orientation sexuelle, notre condition économique et sociale. Le sport permet un échange, une rencontre entre les êtres humains, unis autour d’une pratique. Le sport transmet des valeurs éthiques, morales, sociales. Que le match de football se tienne sur la place d’un petit village ou dans un stade olympique, il représente la passion, la lutte pour la grandeur. Le sport est censé jeter des passerelles vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale.

La pratique sportive est un droit fondamental. Toute personne doit avoir la possibilité de pratiquer un sport, sans discrimination aucune. Mais ce principe, nous le savons tous, fait rarement loi, et ce d’autant plus lorsqu’il s’agit de sport amateur ou de sport de masse. Le «sport pour tous» n’est toujours pas réalité. Trop de personnes encore n’ont pas accès à des installations sportives: les femmes, discriminées dans certaines pratiques, les personnes handicapées, les minorités, les habitants des quartiers difficiles ou encore ceux des zones rurales.

Nous, parlementaires, devons sensibiliser nos gouvernements, les associations sportives, qu’elles soient nationales ou locales, les écoles, afin de promouvoir une pratique sportive qui contribue à l’égalité entre tous et à l’éradication de toute forme de discrimination. C’est de cela que parle mon rapport.

J’ai aussi souhaité parler du rôle des Etats membres. Dans le projet de résolution, je vous demande de promouvoir les mesures de nature à briser tous les obstacles à la pratique par tous d’un sport.

Ce projet de résolution comporte trois points fondamentaux.

En premier lieu, je souhaiterais qu’au niveau politique, nous adoptions une approche bien plus intégrée afin de souligner le rôle du sport pour atteindre des objectifs d’ordre politique, qu’il s’agisse de la santé, de la cohésion sociale, de l’éducation, de la jeunesse, de la non-discrimination, de l’accueil ou de l’intégration des migrants.

Ensuite, il convient de mettre en place des mécanismes propres à assurer un suivi régulier de toutes les formes de discrimination existant encore dans ce domaine. Il faut nous concentrer sur des stratégies de prévention, afin de permettre le dépôt de recours individuels et leur étude, et faire ainsi du sport une passerelle vers l’égalité et l’inclusion sociale. Pour cela, la coopération avec les organisations sportives, les organes de promotion de l’égalité et les institutions nationales en matière de droits de l’homme doit être beaucoup plus étroite

Enfin, le sport brasse des millions, principalement des fonds publics, quand trop de familles encore, dans nos Etats membres, ne peuvent offrir à leurs enfants la possibilité de pratiquer une activité sportive. Il est évident qu’une partie des bénéfices tirés du sport doit être investie afin de promouvoir l’accès de tous à la pratique sportive.

J’aborde également dans ce rapport une dimension fondamentale du genre. Vous le savez, les femmes éprouvent beaucoup de difficultés à pratiquer un sport, et celles qui parviennent au niveau professionnel ou de la compétition subissent souvent des discriminations. Je suis préoccupée par les obstacles et les stéréotypes qui empêchent les femmes de pratiquer pleinement le sport. Malheureusement, les mêmes stéréotypes ou préjugés les empêchent de participer à égalité à la vie sociale, politique et économique des Etats membres. Si je parle aujourd’hui du sport féminin, de son manque de reconnaissance et de sa diffusion moindre par rapport au sport masculin, c’est précisément parce que les médias s’en font très peu l’écho. N’oublions pas non plus que les personnes souffrant d’un handicap physique ou mental rencontrent des graves difficultés à accéder au monde du sport et aux activités sportives.

Comment ne pas parler ici des migrants et des minorités ethniques ? Grâce au sport, toutes ces personnes installées dans nos pays pourraient être véritablement intégrées et accéder réellement à l’égalité. Nous devons pleinement favoriser le sport en tant que passerelle vers l’égalité.

Pour terminer, Monsieur le président du Comité international olympique (CIO), je vous demande d’élaborer un plan de promotion du sport visant à supprimer les discriminations de tous ordres. En effet, l’Assemblée reconnaît le rôle fondamental du CIO et les efforts quotidiens que vous faites pour que le sport soit accessible à tous. Un programme global pour la promotion du sport pour tous et la lutte contre toute forme de discrimination dans le sport doit devenir une réalité. Cela permettra que la société soit plus juste et plus égalitaire. Le vivre-ensemble et la justice sociale deviendront des réalités.

Bienvenue, Monsieur le président du Comité international olympique, et merci d’être parmi nous ce matin. J’attends avec impatience que vous vous adressiez à nous.

LE PRÉSIDENT* – Madame la rapporteure, il vous restera 3 minutes pour répondre aux orateurs.

J’ai maintenant le plaisir d’accueillir M. Bach, président du Comité international olympique. Monsieur Bach, vous allez maintenant pouvoir prononcer votre intervention, mais vous aurez également la possibilité d’intervenir de nouveau à la fin du débat.

Monsieur le président du Comité international olympique, je vous souhaite la bienvenue dans cet hémicycle au nom de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. C’est un honneur de vous accueillir ici aujourd’hui. Vous apportez avec vous l’esprit olympique et les valeurs fondatrices du sport, à savoir la solidarité, le respect et le fair play. Ce sont là des encouragements importants pour notre travail, puisque le sport permet de promouvoir et consolider les valeurs démocratiques et les droits fondamentaux.

L’Assemblée se félicite des efforts du Comité international olympique pour soutenir les réformes dans les différents mouvements sportifs, promouvoir la bonne gouvernance et faire en sorte que toutes les fédérations sportives soient attentives à la question des droits de l’homme dans le sport. Je suis sûr que vos idées contribueront à enrichir nos débats.

Notre Assemblée a lancé la campagne #NiHaineNiPeur. En effet, nous sommes confrontés au terrorisme et aux manipulations des mouvements populistes. Les problèmes de sécurité sont graves et inquiètent nos citoyens. Il est donc important que nous puissions réaffirmer les valeurs qui fondent nos sociétés. L’initiative #NiHaineNiPeur concerne tous les individus. Dans nos travaux et dans nos actions, nous devons prouver que nous sommes opposés à la haine et à la peur que les terroristes essaient de susciter. Le sport permet de véhiculer ce message, de sensibiliser un grand nombre de personnes et de les réunir autour de nos valeurs fondamentales. Je suis donc persuadé que vous soutiendrez cette initiative.

Monsieur le président, vous avez la parole.

M. BACH, président du Comité international olympique* – Monsieur le Président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, Madame la rapporteure, je vous adresse mes félicitations en ce jour de fête nationale en Espagne.

C’est un immense privilège que de pouvoir m’adresser à vous aujourd’hui au nom du Comité international olympique. Je voudrais vous exprimer notre gratitude de nous avoir offert la possibilité d’intervenir dans ce débat consacré au «sport pour tous» et à l’apport du sport à la société. Le CIO appuie pleinement le projet de résolution et le projet de recommandation qui accompagnent le rapport. Nous voulons effectivement que tout le monde ait accès au sport. Merci à l’Assemblée d’avoir reconnu le rôle fondamental du CIO dans la promotion de l’accès au sport pour tous. Nous en sommes convaincus, le monde peut devenir meilleur grâce au sport. À cet égard, le CIO a un rôle très important à jouer dans nos sociétés modernes.

Monsieur le Président Agramunt, dans votre discours d’ouverture de la session, vous avez rappelé les défis que la communauté internationale doit relever et vous avez répété que seuls le dialogue et la coopération permettront d’y parvenir. Et, à l’instant, vous avez dit avec beaucoup d’éloquence que le sport véhicule ces valeurs. Vous avez déclaré qu’il faut écouter tout le monde et tenir compte des intérêts de toutes les parties, sans néanmoins perdre de vue les objectifs principaux, à savoir surmonter les différences et les divisions et résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés.

Ce message m’a fortement touché car le CIO et le monde du sport sont rassemblés autour des mêmes principes: le sport unit les gens et promeut l’amitié entre les hommes comme peu d’autres activités humaines peuvent le faire. Le sport crée des ponts, mais ne dresse jamais de murs. Dans notre monde ébranlé par des crises et miné par la défiance, nous avons plus que jamais besoin de mettre en œuvre ces principes. Mme Quintanilla a d’ailleurs évoqué la culture de la défiance qui nous affecte toutes et tous – aussi bien les organisations politiques que les groupements émanant de la société civile, les associations sportives et les représentants du monde de l’économie. Nous devons tous lutter contre cette culture de la défiance.

Je vous remercie une fois encore, Monsieur le Président, de m’avoir donné la possibilité de m’adresser à cette Assemblée, précisément dans l’esprit de dialogue qui doit nous animer. Le sport fournit des occasions uniques de rassembler les gens, en dehors de toute différence culturelle, ethnique ou encore sexuelle. Cette année encore nous avons eu l’occasion de rappeler la capacité du sport à unir le monde.

J’en veux pour preuve le fait que, pour la première fois aux Jeux olympiques, une équipe de réfugiés a côtoyé les 11 000 meilleurs athlètes issus des quelque 200 pays membres du CIO. Ceux-ci ont participé aux compétitions non en tant que réfugiés mais en tant que véritable équipe olympique. Cette initiative du CIO a été un grand message d’espoir adressé à l’ensemble des réfugiés de la planète. Dans un formidable geste de solidarité, cette équipe a pu participer aux Jeux. Elle a été accueillie très chaleureusement par l’ensemble des participants et des spectateurs. Elle a démontré que les réfugiés, comme tous les autres êtres humains, sont une source d’enrichissement.

Cette équipe a enrichi ces derniers Jeux olympiques, et je suis particulièrement heureux qu’elle ait joui d’un soutien massif de la part de fédérations sportives, notamment européennes. Trois de ces athlètes étaient, en effet, soutenus par les comités olympiques belge, luxembourgeois et allemand, mais de nombreuses autres fédérations sportives et mouvements olympiques nationaux se sont mobilisés pour aider les réfugiés à s’exprimer par le sport. Je pense notamment à la Grèce et à la Turquie, mais aussi à d’autres pays non européens.

En tout cas, merci à toutes et à tous, merci à tous les pays qui ont contribué à cette initiative, à cette démonstration de solidarité et coopération! Nous avons vécu, grâce à la mobilisation de chacun, des moments historiques. Voilà une preuve supplémentaire du pouvoir de rassemblement du sport et de sa capacité à rendre le monde meilleur. Parce que le sport est universel, parce qu’il ne coûte pas cher, il est un puissant instrument de développement pour tous les pays. Le sport peut se pratiquer partout et il permet d’atteindre d’autres objectifs en termes d’éducation, de santé et de développement de nos sociétés.

Ce rôle social du sport a d’ailleurs été récemment reconnu par l’Onu. Lors d’une manifestation historique qui s’est déroulée l’année dernière, il a été reconnu que le sport pouvait être un catalyseur pour réaliser les objectifs de développement de l’Onu. Comme j’ai eu l’occasion de le confirmer le mois dernier à l’Assemblée générale, le CIO est déterminé à collaborer avec l’Onu et ses Etats membres pour atteindre ces objectifs essentiels pour le progrès économique et social.

Notre engagement prend plusieurs formes. Il s’agit, bien évidemment, de rendre le sport accessible à tous. C’est une priorité absolue pour nous. J’en veux pour preuve le fait que nous avions déjà décidé de créer des espaces sûrs où les jeunes du monde entier puissent faire au sport. Ces espaces sécurisés offriront un égal accès à tous les enfants. Ainsi, tous pourront s’adonner au sport dans un environnement sécurisé. Parallèlement, le sport sera un tremplin pour d’autres partenaires de la société civile qui se joindront à nous pour assurer d’autres services éducatives.

Placé au cœur de l’action publique, le sport peut contribuer à rendre le monde meilleur. C’est la raison pour laquelle je voudrais aujourd’hui renouveler nos engagements de coopérer avec tous les pays représentés ici, au sein de cette Assemblée. Le CIO est à vos côtés, aux côtés de vos Etats membres, pour promouvoir le sport et favoriser l’accès de chacun au sport.

Le CIO a son propre Agenda 2020, qui vise à mettre en œuvre d’importantes réformes en vue de favoriser le sport dans la société. Cet agenda 2020 nous a permis d’ouvrir le dialogue avec toutes les catégories de la société. Chacun, quelles que soient ses origines, doit pouvoir contribuer au développement de nos sociétés, notamment par le sport. Le sport peut être un outil efficace pour promouvoir, par exemple, l’égalité entre les hommes et les femmes, pour rendre les jeunes filles autonomes et pour briser les stéréotypes négatifs. En particulier les athlètes féminines peuvent inspirer les jeunes filles et être des modèles.

Nous encourageons le sport féminin à tous les niveaux et nous favorisons le principe d’égalité. Ces principes sont d’ailleurs ancrés dans la Charte olympique. Récemment, nous avons réinscrit à notre Agenda 2020 le principe d’égalité en fixant pour objectif d’atteindre un taux de 50 % de femmes aux Jeux olympiques et de leur donner à jouer un rôle plus important dans les mouvements sportifs.

Nous ne sommes d’ailleurs pas loin de cet objectif. Cette année, en 2016, le nombre de femmes ayant participé aux Jeux olympiques était plus élevé que jamais auparavant, avec 45 % des participants! C’est déjà un très bon résultat. Nous sommes en bonne voie pour atteindre une véritable parité dans la participation aux prochains Jeux olympiques de Tokyo en 2020.

Dès 2018, lors des Jeux olympiques de la jeunesse à Buenos Aires, nous parviendrons à cette égalité parfaite. Nous aurons autant d’athlètes de sexe féminin que de sexe masculin, toutes compétitions confondues: 50 % de femmes et 50 % d’hommes parmi les compétiteurs.

Mais l’égalité lors des Jeux olympiques ne suffit pas. Voilà pourquoi nous promouvons aussi l’égalité dans toutes les autres manifestations sportives, en joignant nos efforts à ceux d’un certain nombre de nos partenaires. Pour Rio 2016, nous avions engagé une action commune avec l’Onu intitulée: «Une victoire en appelle une autre». Cela nous a permis de faire faire du sport à 2 500 jeunes filles de la région de Rio, lesquelles doivent devenir à leur tour des modèles pour leur communauté.

L’égalité n’est pas une priorité seulement pour les femmes. C’est un principe essentiel pour l’humanité tout entière, donc pour l’ensemble du mouvement sportif et, comme je le disais, il est inscrit dans la Charte olympique. C’est la raison pour laquelle j’ai été honoré de pouvoir participer à la campagne «Lui pour Elle» de l’Onu, qui met l’accent sur le droit des femmes.

Ne perdons jamais de vue ces principes. Dans le monde actuel, nous ne pouvons pas nous permettre d’ignorer les compétences de la moitié de l’humanité, qu’il s’agisse de sport ou d’autres activités humaines. Nous vivons dans un monde de plus en plus interconnecté et le sport fait partie de la société. Il n’est pas en marge, il participe de la vie en société. Le sport a ses bons et mauvais côtés, nous ne vivons pas dans une tour d’ivoire ou sur une île. Nous ne sommes pas un refuge qui n’accueillerait que des saints. Nous, sportifs, mouvements sportifs, sommes au cœur de la société.

Voilà pourquoi nous recherchons des partenaires et voilà pourquoi nous demandons l’aide de ces partenaires, qu’il s’agisse de l’Onu, d’intervenants de l’économie privée, de la société civile, ou d’Etats membres du Conseil de l’Europe. Voilà pourquoi je suis d’autant plus heureux d’être parmi vous pour redire que le CIO est à vos côtés, déterminé à être un partenaire de vos Etats membres pour atteindre les objectifs ambitieux de l’égalité entre les hommes et les femmes et du sport pour tous.

Nous avons d’ailleurs une longue expérience de cette coopération, grâce à laquelle nous avons mis en œuvre au plan mondial de nouvelles normes pour éviter que les compétitions sportives ne soient manipulées. Dans ce contexte, je rappellerai que le CIO a toujours soutenu vos efforts pour élaborer une convention empêchant la manipulation des compétitions sportives ou des résultats. Nous avons été les premiers à nous doter d’un code sur la prévention de la manipulation des compétitions sportives, qui a été appliqué lors des Jeux de Rio. L’année dernière, nous avons également mis en place un téléphone rouge qui permet de dénoncer tout soupçon de fraude. Par ailleurs, nous avons multiplié les contacts avec Interpol afin d’empêcher la corruption et la manipulation. Ce n’est pas un hasard si je suis aujourd’hui accompagné de Mme Zappelli, notre principale responsable de la lutte contre la corruption et la manipulation du sport, donc pour le respect de l’éthique au sein du CIO. Les résultats de notre travail en commun peuvent donc être montrés en exemple.

Même si ce n’est pas la raison principale de mon intervention devant vous aujourd’hui, je me dois d’évoquer notre attachement à un sport propre et à la lutte contre le dopage, car ces sujets ont été évoqués lors de toutes les réunions préalables auxquelles j’ai pris part – et par vous-même à l’instant, Madame la rapporteure. Je vous remercie de votre soutien dans ce domaine depuis des années.

Ces deux dernières années, en particulier, nous avons constaté des dysfonctionnements dans la lutte antidopage, et l’on peut déplorer que l’Agence mondiale antidopage (AMA) ne fonctionne pas de façon parfaite. Heureusement, nous avons pris conscience du phénomène et avons mis en place des groupes de réflexion afin d’y remédier.

Cependant, les parties prenantes de l’AMA, les gouvernements et le Mouvement olympique international, qui sont partenaires à parts égales de l’Agence, doivent accroître leurs efforts pour rendre la lutte antidopage plus efficace. Les gouvernements et le CIO entendent lutter de manière plus efficace et plus transparente contre le dopage. Il s’agit donc de rendre l’AMA beaucoup plus forte. Il y a quelques jours, nous avons décidé d’adopter d’une stratégie visant à créer un système interne à l’Agence mondiale, qui soit plus indépendant des mouvements sportifs eux-mêmes. Cette stratégie prône la centralisation de la lutte antidopage au moyen d’un système unique de surveillance des athlètes du monde entier. Nous demandons aussi un renforcement de la législation afin de mieux réprimer le recours au dopage, notamment par les médecins et les entraîneurs, en en faisant un délit pénal.

J’invite les Etats membres du Conseil de l’Europe à dialoguer avec le CIO sur ces questions. S’ils parviennent à renforcer leur action commune, je pense que d’ici la prochaine réunion du comité d’administration de l’Agence mondiale antidopage qui se tiendra à Glasgow, nous aurons obtenu des résultats. Le Conseil de l’Europe sera d’ailleurs présent, en la personne de Mme la Secrétaire Générale adjointe.

Le monde est fragile et nous ne pourrons progresser qu’en unissant nos efforts. Votre initiative «Le Sport pour tous» représente une opportunité unique de nous tendre la main et de nous rassembler autour d’un objectif commun.

Le CIO considère qu’il est possible de rendre le monde meilleur grâce au sport, mais, nous n’y parviendrons pas seuls. Nous n’atteindrons notre objectif de mettre le sport au service de l’humanité, conformément à la Charte olympique, que si nous travaillons ensemble. Les Etats membres de cette Assemblée peuvent, en tout cas, compter sur le soutien indéfectible du CIO pour chercher à atteindre les objectifs de la résolution que vous examinez aujourd’hui.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le Président, je vous remercie pour votre intéressante intervention.

La discussion générale est ouverte. Nous commençons par les porte-parole des groupes.

Mme JOHNSSON FORNARVE (Suède), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Au nom de mon groupe, je remercie Mme Quintanilla pour son excellent rapport. De par le monde, des millions de personnes se livrent à un grand nombre d’activités athlétiques et sportives. Le sport améliore la santé physique et mentale, et il a également été prouvé qu’il renforçait nos capacités d’apprentissage. L’importance du sport dans nos sociétés ne saurait donc être trop soulignée.

Cela dit, des problèmes particuliers se posent. Pour ma part, je reviendrai sur l’égalité de genre, condition préalable à la démocratisation et au développement du sport dans tous les domaines, aussi bien pour ce qui est des organisations que des individus. Ni la société en général ni le sport n’ont encore atteint l’égalité de genre. Les mouvements sportifs ont été lancés par des hommes pour les hommes et reflètent encore, à bien des égards, notre société pour ce qui est des structures de pouvoir. Les jeunes filles ont moins de possibilités d’être impliquées dans le sport, souvent pour des raisons culturelles. En général, les femmes athlètes gagnent moins d’argent que leurs collègues masculins. Elles ont souvent moins de temps à consacrer à l’entraînement. Parmi les entraîneurs il y a beaucoup plus d’hommes que de femmes. Les femmes sont moins bien représentées dans les conseils d’administration des associations sportives, surtout au niveau le plus élevé.

Les filles doivent pouvoir commencer à participer à des activités sportives, mais également être en mesure de les poursuivre sur le long terme. Il faut leur donner accès aux installations sportives, améliorer le vivier d’entraîneurs femmes dans le monde et augmenter le nombre de femmes décisionnaires dans toutes les organisations sportives, notamment au sein du CIO, car, à l’heure actuelle, elles sont moins de 20 %. De ce point de vue, on a pu constater à quel point les situations peuvent se détériorer quand les hommes sont seuls au pouvoir: je me contenterai de citer les exemples de Sepp Blatter et de Michel Platini.

Il existe bien d’autres inégalités au sein du monde sportif, qu’on ne saurait passer sous silence. Ainsi, les difficultés économiques, les difficultés liées à l’orientation sexuelle, l’orientation religieuse ou les antécédents, ne devraient pas faire obstacle à l’accès aux activités sportives. Il est important d’éduquer les dirigeants comme les athlètes aux questions relatives à l’égalité, sans oublier les personnes souffrant de handicap, les LGBTI et les autres groupes vulnérables, qui doivent tous pouvoir avoir accès au sport. Les écoles, les parents, les communautés, tous doivent unir leurs efforts en ce sens, car nous avons tous besoin du sport, moyen irremplaçable de jeter des passerelles, de créer de nouvelles amitiés et de fonder de nouvelles communautés.

Les Jeux olympiques, et notamment paralympiques, sont un exemple remarquable d’inclusion. Je profite de l’occasion pour demander à M. Bach comment le CIO entend faire en sorte que davantage de personnes souffrant de handicap puissent prendre part à des activités sportives, et pour renforcer l’égalité hommes-femmes, notamment en matière de prises de décision.

M. Nikoloski, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Agramunt au fauteuil présidentiel.

LE PRÉSIDENT* – Je demande aux orateurs de bien vouloir respecter leur temps de parole.

M. FEIST (Allemagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Au sein de la commission de la culture, nous avons envisagé les moyens à mettre en œuvre pour permettre aux jeunes gens de participer à des activités sportives. Je viens de Leipzig, où le sport est très pratiqué: j’ai de nombreux exemples à votre disposition pour illustrer les différents points de ce rapport.

Il faut soutenir les activités sportives. Ceux qui sont volontaires pour devenir entraineurs ou entraineuses doivent être encouragés, car sans le sport amateur, pas de sport de compétition. Faisons plus en la matière.

La compréhension interculturelle au sein du Conseil de l’Europe est pour nous essentielle. La ville de Leipzig propose une formation qui permet à des jeunes gens du monde entier non seulement d’améliorer leur formation sportive, mais aussi de rencontrer des personnes et des cultures différentes. Bien des clichés sont ainsi surmontés.

Je voudrais évoquer une conséquence des mouvements migratoires, que l’on constate dans le monde entier comme dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Dans un quartier HLM de Leipzig, une équipe nommée Leipzig United F.C., qui a commencé à jouer dans la rue, rassemble 50 jeunes gens de 20 nationalités différentes. Ainsi, ils apprennent aussi la langue allemande et peuvent bénéficier de soutien scolaire. Le sport apporte beaucoup, et ce rapport le souligne très bien.

Je terminerai en évoquant les Jeux paralympiques. Les quatre athlètes paralympiques du 1500 mètres en relais ont été plus rapides que les quatre athlètes olympiques: il ne s’agit plus de handicap, mais de talents particuliers. Il faut promouvoir les Jeux paralympiques et cette conception du sport, comme l’a dit M. le président du CIO.

M. Mogens JENSEN (Danemark), porte-parole du Groupe socialiste* – Au nom du Groupe socialiste, mais également en tant que rapporteur sur la bonne gouvernance dans le sport, rapport que notre Assemblée étudiera prochainement, je souhaite féliciter Mme la rapporteure pour son excellent travail.

Le sport est une activité essentielle. Particulièrement populaire, elle joue aussi un rôle dans les politiques de santé; elle renforce l’appartenance à une communauté et favorise l’inclusion sociale. Mais trop de personnes – et pas seulement des jeunes, des femmes ou des jeunes filles –n’ont pas accès au sport. Discriminations, handicaps et différentes barrières, entre autres financières, en sont les causes. C’est pourquoi mon groupe se félicite des propositions du rapport pour encourager une approche plus dynamique visant à promouvoir l’accès au sport au moyen d’une plus grande coopération entre les différentes parties prenantes et par la mise en place de mécanismes de contrôle de toute forme de discrimination.

Comme nous accueillons M. Bach, je tiens à souligner le rôle important que les organisations sportives internationales peuvent jouer, entre autres le CIO, afin de promouvoir le sport auprès de tous, notamment des jeunes.

Si le mouvement sportif est clair, sans problème de gouvernance ou de corruption, les choses iront mieux. Malheureusement les exemples de mauvaise gouvernance et de corruption sont trop nombreux: je pense à la Fifa et à d’autres. Dans des pays tels que la Russie, le gouvernement lui-même était impliqué. Cela n’est pas acceptable. C’est une menace pour le sport et la démocratie à laquelle il convient de réagir avec fermeté. J’ai été déçu de constater que le CIO n’avait pas exclu la Russie. L’implication dans le dopage semble ne pas avoir de conséquences. Il ne doit pas en être ainsi. Nous voulons collaborer avec les organisations sportives et le mouvement olympique. À l’avenir, nous voulons lutter avec les gouvernements contre la corruption, la mauvaise gouvernance et le dopage. C’est ainsi que le sport pourra jouer un rôle important pour les jeunes et les adultes. Telle est bien l’intention exprimée dans le rapport.

Mme BRASSEUR (Luxembourg), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Je tiens à vous remercier, Monsieur le président du CIO, d’avoir accepté notre invitation à vous exprimer devant notre Assemblée. Je souhaite aussi vous remercier pour notre excellente coopération passée, notamment quant aux questions de manipulation des résultats sportifs. J’avais alors coopéré de façon suivie avec le CIO.

La question du sport pour tous peut être mise en parallèle avec la question des femmes, qui ont tardé à obtenir leurs droits civiques, tel que le droit de vote. Le sport a toujours été un peu à la traîne. En Angleterre, en 1917, les équipes de football féminin jouaient à guichets fermés. À la fin de la guerre, après le retour des hommes, la pratique du football féminin a alors été interdite, ce jusqu’en 1971.

Il convient donc de considérer aussi le sport par rapport à l’évolution du statut de la femme dans la société.

Bien sûr, des progrès énormes ont été réalisés, mais cela ne suffit pas tant il est vrai que des exclusions subsistent. Je pense à la question de l’homosexualité. Dans le football, des joueurs ou des arbitres homosexuels n’osent pas déclarer leur homosexualité, car ils sont alors écartés par leur fédération – ce fut le cas d’un arbitre en Turquie –, voire dénigrés par l’opinion publique. À cet égard, des progrès sensibles doivent être faits.

Le sport ne se caractérise pas uniquement par des performances, par des records, par la compétition; c’est également un état d’esprit et des valeurs, dont celles du Conseil de l’Europe. C’est pourquoi il est si important que, par l’intermédiaire du sport, nous véhiculions les valeurs de notre Organisation.

J’aurai l’occasion tout à l’heure de rencontrer en aparté M. le président Bach et de lui remettre l’insigne de notre campagne contre la haine. En effet, nous devons tous lutter ensemble contre ce fléau.

Au nom du groupe libéral, je soutiens le rapport de Mme Quintanilla.

Mme FATALIYEVA (Azerbaïdjan), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Au nom de mon groupe, je félicite Mme Quintanilla de son excellent rapport. Je crois qu’elle a marqué un but!

Le sport touche à bien des problèmes qui appellent des solutions immédiates. Le rapport soulève ainsi nombre de questions sur le rôle du sport, phénomène social important présent à tous les niveaux de la société. Il en impacte fortement tous les domaines, aussi bien les relations entre les personnes que la vie professionnelle ou le statut social. Le sport peut également créer des valeurs, des modes et des styles de vie. Sans doute, est-ce le seul facteur social qui permette de résister à l’invasion d’une culture bas de gamme et à de mauvaises habitudes. Le sport est également le moyen de détourner les jeunes de l’influence négative de la vie moderne, de la radicalisation et de violences de toutes sortes.

Le sport est le seul élément qui soit en mesure de souder toute une nation. Le sport moderne remplit bien des fonctions sociales, il est devenu multifonctionnel, multidimensionnel. Il appelle des décisions afin de renforcer la santé publique, de détourner les jeunes de l’influence nocive de la rue ou bien encore de répondre aux demandes de divertissements, de loisirs. De même, des décisions doivent être prises en matière d’incitations économiques, voire pour favoriser le patriotisme.

Le sport, j’en suis convaincue, est un outil essentiel pour intégrer les migrants et les personnes de cultures différentes dans nos sociétés multiculturelles. Il joue un rôle central de socialisation grâce à des activités faisant coïncider les valeurs du sport et celles de la société et de l’individu.

Je viens d’un pays, l’Azerbaïdjan, où le sport pour tous n’est pas un simple slogan, il fait partie de la politique des pouvoirs publics. Le fait d’avoir accueilli le championnat de l’Union européenne des associations de football, UEFA, des moins de 17 ans, la Coupe mondiale de la Fédération internationale du football association (Fifa) des femmes de moins de 17 ans, les premiers Jeux européens, l’Olympiade d’échecs et un Grand Prix de formule 1, a créé un engouement pour le sport dans notre pays. Cela a également permis de développer le capital humain, non seulement sur le plan de l’économie ou de la culture, mais également sur celui même du sport, quel que soit l’âge ou le sexe.

À l’heure où la plupart des enfants dépendent fortement du numérique, promouvoir le sport est une excellente alternative. Il est préférable que des enfants regardent des compétitions sportives plutôt que des jeux vidéo violents, voire des actes terroristes mis en scène dans ces vidéos. Il est une bonne chose que les jeunes admirent des idoles sportives plutôt que des héros virtuels.

LE PRÉSIDENT* – J’invite maintenant M. Bach à répondre brièvement aux porte-parole des groupes.

LE PRÉSIDENT DU COMITÉ INTERNATIONAL OLYMPIQUE* – Merci aux représentants des groupes politiques de leurs aimables propos.

L’action du CIO en faveur des Jeux paralympiques a été évoquée. Le Comité paralympique international est une organisation indépendante du CIO. Mais il est vrai que le CIO soutient très largement ce comité. Nous avons notamment décrété que toute ville qui recevrait les Jeux olympiques devrait également recevoir les Jeux paralympiques, condition sine qua non de l’attribution de l’organisation des Jeux, sachant que la ville organisatrice doit s’engager à prendre en charge le budget de ces Jeux paralympiques. Et nous souhaitons tout faire pour assurer la stabilité financière du mouvement paralympique jusqu’en 2032.

En ce qui concerne les Jeux de Rio et l’exclusion des athlètes russes, n’oublions pas que des décisions de justice ont inversé la charge de la preuve, chaque athlète devant prouver qu’il n’avait pas été dopé. Nous voulions éviter de punir des innocents pris dans un système perverti, et, au contraire, traiter le problème humainement et individuellement. Je sais que le respect des droits de l’homme tient particulièrement à votre Assemblée, mais il doit s’appliquer à tout athlète également.

(Poursuivant en français) Je remercie Mme Brasseur de ses propos aimables. Elle sait parfaitement que le CIO se prononce toujours contre les discriminations. La non-discrimination relève de l’ADN du mouvement olympique et nous sommes toujours prêts à coopérer en ce sens.

(Concluant en anglais) Enfin, nous soutenons la campagne #NiHaineNiPeur du Conseil de l’Europe.

LE PRÉSIDENT* – Je vous remercie, Monsieur le président, de votre participation à ce débat. Ce fut un honneur que de vous recevoir au sein de notre Assemblée. Nous espérons, bien sûr, continuer à coopérer ensemble.

Nous reprenons la liste des orateurs.

Mme SCHNEIDER-SCHNEITER (Suisse)* – Le sport pour tous – que nous appelons en Suisse le sport de masse – permet de transmettre les valeurs fondamentales du vivre-ensemble: la tolérance, la camaraderie, le fair play, la serviabilité, le respect des règles, toutes conditions essentielles pour qu’une société fonctionne. Il convient donc de lutter avec fermeté contre le racisme, le sexisme, l’homophobie et d’autres formes de discrimination qui n’ont rien à voir avec le sport. C’est la raison pour laquelle je me réjouis de ce rapport.

Les discriminations dans le sport doivent faire l’objet d’une sensibilisation et tous les acteurs du monde sportif doivent agir contre le racisme et toute forme de discrimination.

C’est avec plaisir que j’entends que le CIO, à l’instar d’autres fédérations sportives internationales, s’est rendu compte de la nécessité d’agir et d’engager des réformes. La Fifa, régulièrement et sévèrement rappelée ici même à l’ordre, travaille sur le sport pour tous. Lorsqu’il s’agit de promouvoir les femmes dans le football ou de lutter contre le racisme, cette fédération élabore de bonnes pratiques.

Bien entendu, nous souhaiterions que la promotion des femmes s’étende aux instances dirigeantes de ces fédérations sportives. Si M. Bach était encore là, je lui aurais demandé ainsi son avis sur une campagne qui pourrait être appelée sur «Les femmes à la présidence».

Il ne faut pas non plus mettre l’accent uniquement sur le sport professionnel, mais également sur le sport amateur et le sport junior. C’est avec le sport pour tous, tel qu’il se pratique dans les associations et les clubs des communes; que les gens apprennent le véritable sens des valeurs telles que l’intégration, la participation, les rencontres mais aussi la démocratie, puisque le sport réunit des individus d’âge, d’origine et de sexe différents.

De plus en plus de personnes issues de l’immigration exercent une influence sur le contenu, la forme et la qualité du sport. Il est inacceptable que les femmes ne puissent participer à certaines disciplines sportives, telles que la natation ou l’éducation physique, car le sport ne connaît aucune religion. Dans le sport, chacun a voix au chapitre.

Appuyer le projet de résolution est une façon de soutenir la démocratie. Et dans un système démocratique, il est plus facile de jeter des passerelles vers l’intégration et la parité.

M. ROUQUET (France) – Ce débat sera tout d’abord pour moi l’occasion de rappeler que le Conseil de l’Europe est depuis longtemps un acteur majeur dans le domaine du sport. Qu’il me suffise de rappeler la récente convention sur une approche intégrée de la sécurité et de la sûreté lors des matchs, celles contre la manipulation des conventions sportives et contre le dopage ou celle sur la violence des spectateurs.

L’excellent rapport de Mme Quintanilla nous permet d’examiner le sport sous l’angle d’une problématique essentielle pour le Conseil de l’Europe, celui de la lutte contre toutes les discriminations afin que le sport contribue à l’intégration et à l’inclusion sociale; en d’autres termes à renforcer ce vouloir «vivre-ensemble» dont nous avons tant besoin aujourd’hui.

J’adhère pleinement aux préconisations de notre rapporteur et tout particulièrement à son souci de mieux mettre en valeur le succès des athlètes féminines. C’est également, probablement, une condition de la réduction de l’écart de rémunération entre les sexes. Le jour où le football féminin suscitera le même intérêt et le même enthousiasme que le football masculin, ce sera un immense pas vers l’égalité. En France, les spectateurs commencent à se déplacer pour assister à un match de football féminin.

Je partage aussi totalement la proposition d’engager avec les organisations sportives une discussion sur une meilleure redistribution des revenus générés par le sport professionnel de haut niveau afin qu’une partie des immenses ressources ainsi générées puisse être affectés aux projets ayant pour but d’améliorer le sport pour tous. Là aussi, plus de solidarité est indispensable si l’on veut aller vers une société plus inclusive.

Même si j’en comprends l’intention, je suis en revanche plus réservé sur l’aménagement, dans les quartiers défavorisés, d’installations sportives «adaptées aux filles», pour reprendre votre formule. Dans d’autres secteurs, nous nous efforçons de lutter contre toute ségrégation; je pense en particulier au domaine de la santé. Plus généralement, il est à craindre que l’on compromette ainsi l’effet inclusif de la pratique sportive. Il me semblerait préférable de renforcer la sécurité plutôt que d’aller vers une évolution préoccupante.

Je partage en revanche totalement les préoccupations de la rapporteure sur la nécessité de mieux intégrer les personnes handicapées dans les activités sportives et de soutenir une plus large radiodiffusion des manifestations sportives les concernant.

Mme RADOMSKI (Allemagne)* – Comme l’évoque le rapport, le sport est une plateforme permettant de diffuser un certain nombre de valeurs très utiles pour nos sociétés, telles que le fair play, le respect, l’esprit d’équipe ou la capacité à accepter la défaite. Les compétitions sportives internationales favorisent l’ouverture au monde, la tolérance et sont donc facteurs de paix. M. Bach disait d’ailleurs que le sport avait le pouvoir de rassembler les gens.

Cependant, dès le plus jeune âge, les enfants sont victimes de clivages socioéconomiques. Et à l’heure où de plus en plus de jeunes sont fascinés par les jeux vidéo, l’activité physique doit être promue au plan politique.

L’Allemagne est une grande nation sportive et fait beaucoup pour le sport de masse. Je citerai pour exemple les Jeux fédéraux de la jeunesse qui touchent 5 millions de jeunes. Ils sont organisés en liaison avec les écoles, de manière que tous les enfants scolarisés de plus de 6 ans, valides et handicapés, puissent y participer.

L’Allemagne compte 91 000 clubs sportifs, et depuis plus de 30 ans la Confédération allemande du sport, organisation indépendante, participe, par un programme défini, à l’intégration par le sport. Elle a beaucoup investi pour favoriser l’accès au sport des groupes les plus défavorisés – les filles, les femmes, les personnes d’âge moyen, les séniors. L’intégration par le sport vise également à soutenir les clubs locaux qui jouent un rôle important dans l’intégration, au sein de nos sociétés interculturelles.

Le sport a une valeur sociale, c’est un véhicule d’équité. Nous devons donc poursuivre nos efforts pour que chacun puisse y avoir un accès égal.

M. LE BORGN’ (France) – (Commençant en espagnol) Madame Quintanilla, je vous félicite pour votre rapport et profite de cette occasion pour vous souhaiter une bonne fête nationale espagnole.

(Poursuivant en français) Le développement du sport pour tous, loin d’être un sujet anecdotique, est une condition essentielle du mieux-être individuel et collectif. Le sport ne peut se résumer à des compétitions certes passionnantes, souvent globales, télévisées et lointaines. Le sport est ou doit être avant tout un art de vivre, où que nous nous trouvions, ville ou campagne, petit ou grand pays par la géographie, quels que soient notre âge et notre condition sociale, et tout simplement notre histoire à chacune et chacun. Le sport, c’est la santé, mais ce sont aussi les rencontres, les échanges, les destins partagés au-delà de toutes les différences. C’est parce que le sport est un atout considérable en faveur de la culture du vivre-ensemble qu’il doit être précisément pour tous. L’est-il aujourd’hui? Pas pour tout le monde et c’est pour cela que votre rapport, chère Madame Quintanilla, arrive à point nommé. Il appelle à raison nos Etats membres à développer une approche plus volontariste en faveur de l’accès au sport.

Je vous rejoins volontiers sur la nécessité de mieux intégrer le sport dans d’autres politiques comme la santé, la cohésion sociale, la jeunesse et la non-discrimination. Le sport contribue à la réalisation des objectifs de ces politiques. Je pense notamment à l’accueil des réfugiés. À Cologne, où se trouve ma permanence de député, j’ai pu voir in situ comment la pratique encouragée du sport par les autorités municipales et les associations aidaient les réfugiés à prendre peu à peu leur place dans la société qui les accueille.

Je soutiens aussi vos propositions sur la redistribution financière depuis le sport professionnel, souvent très riche, vers les actions de sport pour tous, aux budgets à l’inverse plutôt contraints. Il y a là un chantier à ouvrir que votre rapport identifie à très juste titre. La présence et l’écoute du Comité international olympique, en la présence ce matin de son président, Thomas Bach, est dans cette perspective un atout précieux. Enfin, je salue votre recommandation en faveur de la formation des éducateurs sportifs à l’inclusion, par la sensibilisation contre les préjugés et les discriminations, et au respect de la diversité dans nos sociétés multiculturelles.

Dans les Balkans occidentaux, j’ai rencontré une organisation formidable, qui s’appelle Pl4y International, pionnière dans le secteur de l’éducation et de l’accompagnement par le sport. Depuis 2008, Pl4y International a développé au Kosovo un programme de sport inclusif destiné aux enfants de toutes les communautés. En 2015, ce programme a réuni plus de 3 300 enfants, pour un total de près de 400 activités. Je suis allé en avril dernier à la rencontre de ces enfants. Les voir jouer ensemble, filles et garçons, encadrés par une équipe de volontaires, représentatifs eux-mêmes de la diversité du Kosovo, donne à croire en la capacité de la jeunesse, par le sport, de dépasser les haines et les atavismes séculaires. Cette expérience me conduit à souhaiter que votre projet de résolution fasse davantage référence à la dimension d’espace de rencontres entre personnes différentes. Et je suis heureux que l’amendement que j’ai présenté en ce sens ait été adopté en commission, de même que l’amendement en faveur de la création d’un label Sport pour tous visant à valoriser et à mieux faire connaître toutes ces initiatives formidables qui existent à l’échelon local et qui contribuent au vivre-ensemble si cher au cœur des Européens.

M. GOPP (Liechtenstein)* – Le sport est sain et revêt une fonction préventive. Il contribue à promouvoir la cohésion sociale et l’intégration. Dans de nombreux pays, on ne fait pas de différence, au sein des associations et des clubs sportifs, entre les nationalités et les origines ethniques et culturelles. Le sport contribue par ailleurs à la prévention en matière de santé physique et mentale, et permet de consolider le sentiment d’appartenance à un groupe social. En ce sens, il constitue une véritable école de la vie, qui permet plus tard de surmonter les défis professionnels.

Le sport enseigne la discipline, le courage et l’effort. Il invite chacun de nous à faire preuve d’engagement et d’endurance. Dans les pays pauvres, le sport de compétition représente une véritable motivation pour les jeunes, qui y voient l’opportunité d’une vie meilleure pour eux-mêmes et leur famille.

Je soutiens le projet de résolution qui nous est aujourd’hui présenté. Il rappelle que c’est aux associations sportives de promouvoir l’accès au sport pour tous dans les pays où le rôle du sport n’est pas suffisamment reconnu. Au Lichtenstein et en Suisse, au contraire, le sport occupe une grande place dans la société.

Malheureusement, au cours des dernières années, la réputation du sport de compétition a beaucoup souffert. Selon moi, le CIO et d’autres organisations du même type font trop peu pour contrecarrer cette évolution négative. La corruption et le dopage portent atteinte à l’image du sport. Désormais, les parents ne peuvent plus miser sur le sport de compétition pour leurs enfants. C’est en effet impossible lorsque l’on sait que l’on ne peut plus, dans de nombreuses disciplines sportives, arriver très haut sans dopage. Nos athlètes peuvent-ils encore être des exemples pour nos jeunes? Je ne le crois pas. Il est donc tout à fait déplorable que le CIO ne s’engage pas davantage pour condamner les pays qui ont fait du dopage un sport national. Des campagnes volontaristes sur le sujet permettraient une sensibilisation précoce des jeunes.

J’affirme, d’après ma propre expérience, que le sport est très utile. Il permet aux personnes de se rencontrer. Nous devons, dans nos pays, veiller à le promouvoir dans ses aspects positifs. Il s’agit de faciliter l’accès de tous aux activités sportives.

Mme HOFFMANN (Hongrie) – Le corps humain est fait pour le mouvement, l’esprit humain pour réfléchir et l’âme humaine pour sentir. Ces trois activités composent la totalité d’une femme ou d’un homme. Sans bouger, sans réfléchir et sans sentir, la vie humaine ne peut pas être totale ou se limite au stade végétal, ce qui n’est souhaitable pour personne.

Le sport, lorsqu’il est régulier, exerce le corps et contribue à la santé physique. Il fait réfléchir et contribue ainsi à la santé mentale, il apprend à supporter les succès et les échecs, et contribue ainsi à la santé morale, tant sur le plan personnel que sur le plan collectif. C’est pourquoi le sport est considéré comme l’activité la plus populaire dans le monde, ainsi que l’a souligné Mme Quintanilla.

Le sport se distingue du mouvement en général par sa pratique régulière et l’existence de règles spécifiques selon les disciplines. Puisque le sport est bénéfique pour la santé individuelle, et par conséquent pour la santé de la société, il est évident que tout le monde, chaque personne - femme ou homme, jeune ou âgée, handicapée ou non, quelle que soit sa nationalité ou son groupe social, vivant en ville ou à la campagne – doit y avoir droit et accès. Comment y parvenir? Il est avant tout nécessaire que chaque pays applique une bonne politique dans ce domaine, qui embrasse toutes les dimensions de cette problématique.

En Hongrie, dans les écoles, depuis la loi sur l’éducation de 2011, chaque jour une heure obligatoire est consacrée à la pratique sportive. De plus, depuis 2014, le secrétaire d’Etat au sport est une femme, une ancienne nageuse professionnelle. Il n’y a chez nous aucune discrimination entre les femmes et hommes, entre les handicapés et les autres. Aux Jeux olympiques de Rio, nous avons reçu huit médailles d’or, parmi lesquelles sept ont été remportées par des femmes. Aux Jeux paralympiques de septembre, l’équipe hongroise a obtenu dix-huit médailles. Toute la Hongrie en a été très heureuse et fière.

Je tiens pour terminer, à rappeler l’attention des parlementaires sur les personnes âgées et sur ceux qui vivent en province. Ils doivent eux aussi avoir la possibilité de faire du sport, ce qui n’est pas encore le cas partout.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – J’ai modifié le discours que j’avais préparé, car je viens de rencontrer, hélas trop brièvement, la représentante britannique du réseau international United Network of Young Peacebuilders (UNYP), une jeune femme remarquable. Je regrette que le Président du CIO ne soit plus parmi nous. Au début de son intervention, il a souligné que le sport permet de jeter des passerelles entre les gens et d’éviter les guerres - peut-être M. Trump pourrait-il y réfléchir!

Je me félicite de la création d’une équipe de réfugiés aux Jeux olympiques, mais j’aimerais conseiller au Président du CIO – j’espère qu’il lira mes observations – de se mettre en rapport avec le réseau UNYP dans le cadre de l’organisation des prochains Jeux olympiques. UNYP est en contact avec un réseau de jeunes réfugiés qui reçoivent des fonds du CIO et d’autres organisations et qui pourraient être les prochains participants des Jeux olympiques de Tokyo. Si le président du CIO pouvait favoriser ce rapprochement, alors la visite de la jeune femme que j’ai rencontrée ce matin ne serait pas restée vaine.

Les propos de la rapporteure selon lesquels les manifestations parallèles de Rio ont détourné les projecteurs de l’essentiel, m’ont quelque peu attristé. Le Président Poutine n’a pas seulement à son actif des crimes de guerre, mais des crimes de paix. Le dopage parrainé par un Etat n’a pas, en effet, sa place dans le monde du sport. Je partage donc entièrement la position de mon ami M. Jensen.

Mais il ne faut pas que cela nous détourne des exploits réalisés par les athlètes, qui ont fait ce qu’ils devaient faire à Rio.

Bénéficiaires de l’initiative lancée par John Major, ancien Premier ministre, les femmes membres de l’équipe du Royaume-Uni – rameuses, nageuses, coureuses de sprint ou de fond, cavalières et cyclistes – ont rapporté à la maison des médailles d’or, d’argent et de bronze. Elles sont nos ambassadrices, les modèles d’émulation que nous souhaitons donner aux jeunes d’aujourd’hui.

À cet égard, je ne saurais songer à plus bel exemple que celui de l’athlète paralympique britannique Dame Sarah Storey, qui a surpassé encore les exploits accomplis par la Baroness Tanni Grey-Thompson et a ainsi prouvé qu’avec ou sans fauteuil roulant, la détermination, le courage et l’abnégation peuvent mener loin. Ce sont ces personnes, et non les tricheurs, que les athlètes de demain devront prendre pour modèle.

Mme QUÉRÉ (France) – Madame la rapporteure, je voudrais vous féliciter pour votre excellent travail. Vos propositions sur le sport et les femmes me semblent particulièrement importantes.

En effet, le sport est à l’image de notre démocratie, il porte ses valeurs de respect, d’égalité et de solidarité. Mais le sport est aussi le reflet de notre société et de ses faiblesses. Cela est particulièrement vrai pour la situation des femmes dans le sport.

Ainsi, il est notable que seuls 12,5 % des présidents de fédérations sportives soient des présidentes. De même, les hommes accèdent beaucoup plus souvent au statut de joueurs professionnels que les femmes.

Et que dire des inégalités de salaire entre hommes et femmes qui persistent dans le sport comme dans les entreprises? En France, les 103 footballeuses professionnelles touchent en moyenne 3 500 euros brut par mois, hors primes. Ce qui est peu, comparé aux 1 100 joueurs professionnels de Ligue 1 et Ligue 2, et leur 12 000 euros de salaire en moyenne – et je ne parle pas des salaires des stars masculines du football! Mais cela est vrai dans d’autres sports, même si les écarts sont moins importants.

Par ailleurs, pour illustrer toute la pertinence de votre proposition 4.5.2, le Conseil de l’audiovisuel français collabore avec l’association Femix’Sports afin d’assurer une meilleure représentativité du sport féminin dans les médias. Grace à ce travail et à un attrait réel pour de grandes compétitions féminines, la part du sport féminin à la télévision est passée de 7 % en 2012 à 15 % en 2015. C’est encore peu, mais cela prouve que comme dans bien des domaines, seule une politique volontariste permet des progrès pour les femmes!

Puisque le président du CIO nous a fait l’honneur de sa présence, j’aimerais rappeler que parce que le sport porte des valeurs fortes, il est important que le mouvement olympique fasse un rempart contre les intégrismes et se batte pour que toutes les femmes puissent faire du sport, n’importe quel sport. Après la première participation d’athlètes féminines du Brunei, d’Arabie saoudite et du Qatar aux Jeux de 2012 à Londres, les 204 pays ont désormais intégré des femmes dans leurs équipes. Il était temps!

Enfin, la pratique féminine du sport est le miroir des inégalités sociales. Les trois quarts des femmes ne pratiquant aucune activité physique sont employées ou ouvrières. Et cette sous-représentation des milieux populaires est vraie aussi chez les adolescentes. Dans certains quartiers, la pratique de certains sports par les filles est difficile. C’est pourquoi le sport et l’éducation physique doivent constituer des occasions de mise en évidence des inégalités et d’apprentissage de l’égalité. Les enseignants dans le primaire doivent proposer du rugby et de la gymnastique pour toute la classe, les éducateurs doivent être capables dans les clubs ou les associations d’imposer les filles, ou les garçons.

Nos médaillées olympiques françaises en boxe, mères de famille, féminines et fières de leur sport sont un modèle de ce sport démocratique, reflet de nos valeurs dont nous avons tant besoin pour les jeunes générations.

LE PRÉSIDENT – Mme Grécéa, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

Baroness MASSEY (Royaume-Uni)* – Je pense comme la rapporteure que nous avons besoin d’une politique mondiale du sport pour tous. À cet égard, ce débat prend place de façon tout à fait opportune après les Jeux olympiques et paralympiques, qui sont toujours l’occasion pour les nations de dresser le bilan de leur organisation, de leurs structures et de leur financement en matière sportive et d’évaluer la façon dont le sport de haut niveau peut encourager la pratique sportive.

Au Royaume-Uni, une stratégie interministérielle s’est mise en place depuis 2015 en ce sens et plus d’attention est portée au sport. Nous profitons bien sûr du fait que nous avons accueilli les Jeux olympiques à Londres en 2012. La participation associative est plus importante, les questions parlementaires sur le sport sont plus nombreuses, le sport paralympique est favorisé.

Le sport peut aussi, et tout simplement, représenter une activité, sans qu’elle débouche sur la compétition. On sait que bien certains jeunes, notamment des filles, ne tiennent pas à faire du sport en compétition et préfèrent des activités comme la danse, le yoga ou le pilates. Les personnes plus âgées peuvent aussi être encouragées à pratiquer des exercices tels que la marche ou le vélo.

Au Royaume-Uni, la pratique sportive chute après l’âge de 13 ans. Nous avons donc mis en place un certain nombre d’initiatives pour encourager la pratique, notamment celle des filles. Nous nous efforçons également d’accroître le nombre de femmes membres des conseils d’administration, car elles ne sont pas assez nombreuses dans les fédérations sportives. Il ne fait pas de doute que le succès des femmes athlètes et leur soutien à la pratique du sport chez les filles, lors des derniers Jeux olympiques, ont été très positifs.

On peut dire la même chose des athlètes de handisport, qui ont été salués pour leurs exploits et qui ont mené une campagne active pour un meilleur financement au niveau national et local, pas seulement du handisport, mais du sport en général.

C’est par les parents, les écoles et les communautés que naissent l’intérêt et le goût de l’enfant pour le sport. Le sport à l’école doit être financé de façon appropriée, bénéficier de bons entraîneurs, issus de clubs, et d’installations de qualité. Il doit être inclusif, sans barrières de classe, de race ou de genre. J’ai à l’esprit d’excellents exemples, mais il y a encore beaucoup à faire.

Je me rappelle avoir rencontré des mineurs migrants isolés et leur avoir demandé ce qui les avait aidés à s’intégrer à notre société. Un jeune afghan m’a répondu, avec beaucoup de fierté: «Le cricket!». Depuis, j’ai appris, à ma grande surprise, que ce jeu – fort mystérieux pour beaucoup – est pratiqué en Afghanistan. Ce jeune garçon avait donc mis pleinement à profit son talent pour ce sport.

M. FISCHER (Allemagne)* – J’adresse toutes mes félicitations à Mme la rapporteure; c’est un excellent travail qui a été effectué.

Permettez-moi d’évoquer l’exemple de mes enfants, qui jouent tous au hand-ball, afin de monter combien le sport permet de jeter des ponts. Cela commence chez les tout jeunes enfants, lorsque garçons et filles jouent dans la même équipe: personne n’est exclu, on discute, on joue franchement. Un esprit d’équipe se bâtit, car c’est ensemble que l’on veut gagner. Dans le même temps, le respect de l’adversaire s’apprend, surtout lorsqu’il joue particulièrement bien… À la fin du match, que l’on ait gagné ou perdu la partie, on se tape dans le dos et on se réjouit de s’être amusé ensemble. Cela permet de créer des ponts entre garçons et filles, mais aussi entre des équipes qui viennent d’horizons différents.

Pour prendre l’exemple du Parlement allemand, lorsque l’équipe de football du Bundestag joue contre les équipes de certaines entreprises ou contre des équipes composées de personnes handicapées – nous le faisons une fois par an –, on voit le plaisir que l’on prend à jouer. Là aussi, on jette des ponts entre les différents joueurs. Qui plus est, des femmes jouent dans notre équipe; c’est pour nous une évidence. L’équipe du Bundestag est également composée de joueurs appartenant à différents groupes politiques. On s’invective dans les débats parlementaires, mais sur le terrain on joue ensemble. Le fait de jouer contre les équipes d’autres parlements permet aussi de se rapprocher. Je souhaitais insister sur ces aspects qui ne sont pas mentionnés dans le rapport.

En ce qui concerne maintenant le sport de haut niveau, un grand nombre d’exemples ont déjà été cités, notamment celui, aux Jeux olympiques, d’une équipe de sportifs réfugiés. Tout cela montre à quel point le sport est important quand il est propre – donc sans dopage –, quand prévaut le fair-play, quand on joue et que l’on prend plaisir à faire du sport. C’est la raison pour laquelle ce rapport est si bon, et j’espère que nous l’adopterons tout à l’heure.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – À l’occasion de ce débat consacré au sport pour tous, je souhaite appeler votre attention sur le discours prononcé par notre Président lors de l’ouverture de la présente partie de session: lundi matin, il a souligné les menaces sérieuses qui pèsent sur nos sociétés, telles que les formes extrêmes de nationalisme, la xénophobie et le discours de haine. Il nous a incités à penser que nous faisons partie d’un groupe, que nous ne sommes en rien exclus. Or le sport est une excellente façon de jeter des ponts entre les personnes. C’est l’une des activités les plus populaires dans tous les pays – auprès des athlètes comme des spectateurs. Il peut jouer un rôle essentiel dans la cohésion sociale.

En Norvège, le mouvement sportif est le plus ancien, mais aussi le plus populaire et le plus démocratique des mouvements. Nous comptons 2,2 millions d’adhérents pour une population de 5,2 millions; 60 % des pratiquants sont des garçons ou des hommes, 40 % des jeunes filles ou des femmes. La vision du Comité olympique et paralympique norvégien et celle de la Confédération des sports est celle d’un sport pour tous. Récemment, ces instances se sont fixé des objectifs pour les Jeux olympiques spéciaux. Il s’agit, plus généralement, de refléter la diversité de la société, de réduire les barrières financières à la participation des enfants et des jeunes et d’encourager les femmes et les jeunes à entraîner et diriger.

Les activités sportives se caractérisent par le bénévolat, la démocratie, la loyauté et l’égalité. Toutes les activités sportives doivent s’appuyer sur des valeurs fondamentales telles que la joie, l’esprit de groupe, la santé et un comportement honnête.

Le médiateur norvégien pour l’égalité et la non-discrimination a récemment rédigé un rapport sur l’égalité en matière de genre, d’origine ethnique et de handicap. Ce rapport examine également les mesures qui ont été prises afin d’éviter le harcèlement sexuel, le racisme et l’homophobie. L’impression générale que l’on en retire est que ces thèmes ont tous été pris au sérieux. Toutefois, le médiateur a relevé un grand nombre de différences en matière de représentation des genres, mais aussi concernant les personnes atteintes de handicap et celles appartenant à certains groupes ethniques, que ce soit pour la participation aux activités sportives elles-mêmes ou à leur organisation, et cela aussi bien dans les sports individuels que dans les sports d’équipe. Le rapport insiste également sur l’importance des projets visant à atteindre l’objectif de pratiques sportives ouvertes et inclusives. En voici un exemple récent: depuis le mois de septembre dernier, 400 associations sportives locales organisent des activités pour les enfants réfugiés et leurs parents.

Quoi qu’il en soit, tous les Etats membres et leurs différentes fédérations sportives, ainsi naturellement que le CIO, devraient prendre au sérieux le rapport qui nous est présenté aujourd’hui, afin d’atteindre l’objectif commun que représente l’accès de tous au sport.

Mme KERESTECİOĞLU DEMİR (Turquie)* – Pour commencer, je vous remercie, Madame Quintanilla, pour votre excellent rapport qui dénonce les inégalités touchant les femmes dans le sport. Je voudrais également rendre hommage à ma professeure de sport au lycée, qui m’a encouragée à pratiquer le sport.

Les discriminations sont tout aussi répandues dans le monde sportif qu’ailleurs – dans les usines ou au bureau –, sans toutefois déclencher autant de réactions scandalisées. Aujourd’hui, de nombreuses femmes et jeunes filles renoncent à faire du sport en raison des discriminations, du harcèlement sexuel et des inégalités, notamment en matière salariale. De ce fait, il y a très peu de sportives et de femmes entraîneurs. Chaque fois que l’une d’entre elles dénonce ces discriminations, nous faisons un pas vers un monde meilleur. Les gouvernements devraient donc reprendre cette lutte à leur compte. Les femmes et les jeunes filles devraient être encouragées à mener une vie active. Les Etats membres devraient favoriser leur accès à toutes sortes de sport, et ce dans un environnement sûr. En effet, pour que chacun puisse faire du sport, il faut aussi créer des infrastructures, et faire en sorte qu’elles soient librement accessibles.

L’exclusion par les hommes commence très tôt: les jeunes filles sont découragées par les garçons de faire du sport avec eux. Il convient donc de favoriser le sport des filles à l’école. Les médias jouent également un rôle: si les athlètes de sexe féminin étaient érigées en modèle, les familles seraient plus enclines à laisser leurs filles faire du sport.

Les codes culturels sont souvent construits et reproduits par l’industrie du sport. Voilà une raison supplémentaire de mettre l’accent sur l’égalité entre les hommes et les femmes dans le sport. En Turquie, il n’est pas rare d’entendre un homme demander à une femme si elle connaît les règles du hors-jeu. C’est une façon d’intimider les femmes en laissant entendre que, de toute façon, elles n’ont rien à faire dans le sport et ne doivent même pas savoir de quoi il retourne. Ces codes très stricts se retrouvent évidemment dans le sport professionnel. Qui plus est, dans celui-ci, les valeurs telles que l’esprit d’équipe et la solidarité sont supplantées par l’appât du gain et les ambitions. Tout cela est très décevant et frustrant pour les jeunes femmes.

Pour conclure, je voudrais dire une nouvelle fois mon admiration pour le combat des athlètes féminines. Je voterai pour ce rapport.

LE PRÉSIDENT* – Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs.

Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent transmettre, dans les 4 heures, leur intervention dactylographiée au service de la Séance, pour publication au compte rendu. Cette transmission doit être effectuée, dans la mesure du possible, par voie électronique.

J’appelle la réplique de la commission.

Madame la rapporteure, il vous reste 3 minutes pour répondre aux orateurs.

Mme QUINTANILLA (Espagne), rapporteure* – Chers collègues, permettez-moi tout d’abord de vous remercier pour vos brillantes interventions. Chacun d’entre vous a permis d’enrichir ce rapport. En participant à ce débat, vous avez fait en sorte que ce rapport nous permette d’être en lien, avec notre société, une société qui doit croire par-dessus tout que le sport est un pont vers la cohabitation et la culture.

Ce rapport ne veut, en aucun cas, séparer les jeunes filles et les jeunes hommes dans leurs activités sportives. Nous souhaitons au contraire que davantage de jeunes filles pratiquent une activité sportive et que davantage de femmes participent aux prises de décision aux plus hauts niveaux du sport. Et il faut qu’il en soit ainsi également dans le sport amateur.

Ce rapport veut rompre toute forme de discrimination, car les discriminations existent, qu’on le veuille ou non. Le président du Comité international olympique l’a dit. Nous n’avons pas encore atteint une égalité de représentation. Mais s’il est évident que les femmes doivent faire du sport, elles doivent également participer à la prise de décision. C’est essentiel pour rompre ces barrières qui existent et empêchent les femmes d’être représentées dans le monde sportif. Mais les femmes ne sont pas seules en cause: il en va également des personnes souffrant de handicap et des minorités ethniques, mais aussi de cette société rurale qui est, parfois, si éloignée des centres urbains.

Se pose aussi la question de tous ces financements, de tous ces millions que brasse le sport et qui, malheureusement, ne permettent pas aux activités sportives d’être pratiquées en milieu rural, dans les petits villages, ou encore dans les quartiers défavorisés que comptent les 47 Etats membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Par ce rapport, mes chers collègues, nous souhaitons transmettre un message d’ouverture et de liberté et réaffirmer qu’à partir de la notion du sport pour tous, nous pourrons mettre un terme à toutes les discriminations auxquelles nous assistons malheureusement encore.

Chers collègues, vos interventions ont été brillantes, et je vous remercie de tout cœur. Vous avez tous été particulièrement aimables à propos de ce rapport qui traite, avant tout, de justice de sociale, de liberté et de non-discrimination et dont l’objet est de faire en sorte que, dans tous nos Etats membres, nous parvenions par le biais du sport à une meilleure cohabitation, à plus de paix et de culture.

M. ARIEV (Ukraine), président de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias* – Le sport pour tous n’est pas seulement un slogan, mais un engagement de tous nos Etats afin que chacun puisse avoir accès aux activités sportives dans la paix.

Le rapport présenté par Mme Quintanilla expose cela de façon tout à fait remarquable. Il y est souligné que le sport est plus qu’une activité de loisir. Les jeunes y apprennent l’interaction sociale. Ils apprennent à travailler selon des règles communes, ils canalisent leur énergie vers quelque chose d’utile pour leur développement social.

Les athlètes de toutes origines ou handicapés doivent pouvoir accès à tout sport sans discrimination aucune. En portant la bannière olympique lors des Jeux de Rio, l’équipe de sportifs réfugiés a attiré l’attention du public sur la crise des réfugiés.

Le sport doit respecter des règles et, par la Convention contre le dopage, le Conseil de l’Europe a fixé des normes qui doivent éviter que les athlètes ne soient exposés à des substances dangereuses et interdites dans le but de gagner quelques médailles. Il est très important que l’Agence mondiale antidopage ait recommandé d’interdire la participation des athlètes russes du fait de leur recours systématique, protégé par l’Etat, au dopage.

Il faut donner un modèle sain du sport à toute la société et à nos enfants. À cet égard, je tiens à dire que l’on ne peut considérer comme normales des manifestations comme celle qui s’est déroulée en Tchétchénie la semaine dernière où l’on a pu voir de jeunes garçons de 9 à 11 ans participer à une violente compétition d’arts martiaux mixtes lors de la célébration de l’anniversaire de M. Kadyrov, président de cette république. Cela a été retransmis en direct à la télévision.

Pour conclure, permettez-moi de féliciter à nouveau Mme Quintanilla de son excellent rapport.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias a présenté un projet de résolution sur lequel 4 amendements et 1 sous-amendement ont été déposés.

J’ai cru comprendre que le président de la commission souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les amendements 3, 1 et 4, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

L’amendement 2 avait aussi été adopté à l’unanimité mais, comme il fait l’objet d’un sous-amendement, il sera examiné selon les modalités habituelles.

Les amendements 3, 1, 4 sur le projet de résolution sont déclarés adoptés définitivement.

LE PRÉSIDENT* – Nous abordons l’examen de l’amendement 2.

Mme JOHNSSON FORNARVE (Suède)* – Cet amendement est essentiel.

LE PRÉSIDENT* – Nous en venons au sous-amendement, déposé au nom de la commission.

Mme QUINTANILLA (Espagne), rapporteure* – Il est défendu.

Mme JOHNSSON FORNARVE (Suède)* – Nous sommes favorables à ce sous-amendement.

Le sous-amendement est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous revenons à l’amendement 2 ainsi modifié.

L’avis de la commission est naturellement favorable.

L’amendement 2, ainsi modifié, est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14127, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (120 voix pour, 0 voix contre et 4 abstentions).

LE PRÉSIDENT* – Je félicite la rapporteure, la commission et toutes les personnes ayant participé aux travaux.

M. Agramunt, Président de l’Assemblée, reprend place au fauteuil présidentiel.

2. Discours de M.   Çavuşoğlu, ministre des Affaires étrangères de la Turquie

LE PRÉSIDENT* – Mes chers collègues, nous avons le plaisir d’accueillir M. Mevlüt Çavuşoğlu, ministre des Affaires étrangères de la Turquie, qui va s’exprimer devant notre Assemblée avant de répondre à vos questions.

Monsieur le Ministre, c’est un honneur et un privilège que de vous souhaiter la bienvenue dans cet hémicycle aujourd’hui en votre qualité de ministre des Affaires étrangères de la Turquie. Vous avez également été président de cette Assemblée, ainsi que de sa commission des migrations, et des réfugiés. Le 15 juillet dernier, votre pays a vécu un véritable cauchemar lors de l’attaque menée contre ses citoyens et ses institutions par les personnes mêmes qui étaient censées les protéger. Nous sommes fiers de la façon dont le peuple turc est descendu dans la rue pour défendre la démocratie et ses institutions et je vous assure, au nom de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, que nous sommes aux côtés du peuple turc pour défendre la démocratie, les droits de l’homme et l’Etat de droit.

Aujourd’hui, la Turquie ne doit pas seulement gérer les conséquences de cette tentative de coup d’Etat. Il y a également trois millions de réfugiés qui, venant de Syrie et d’ailleurs, se trouvent sur son territoire. Votre pays a été la cible de nombreux attentats terroristes et connaît la guerre à ses frontières. Monsieur le Ministre, je ne pense pas que vous vous soyez douté, à l’époque où vous présidiez la commission des migrations et des réfugiés, que nous connaîtrions un jour une telle crise migratoire en Europe et que la démocratie, l’Etat de droit et les droits de l’homme seraient remis en question par une tentative de coup d’Etat.

C’est avec une grande impatience que nous attendons de prendre connaissance de ce que vous allez nous dire sur la façon dont vous gérez cette situation, et c’est un honneur de vous donner la parole.

M. ÇAVUŞOĞLU, ministre des Affaires étrangères de la Turquie* – Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, Mesdames, Messieurs les membres de l’Assemblée parlementaire, c’est pour moi un immense plaisir que d’être parmi vous aujourd’hui.

Monsieur le Président, je vous remercie beaucoup pour votre invitation. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, dont je suis président honoraire, m’a donné l’occasion d’apprendre beaucoup de choses – sans doute estimez-vous qu’il en est de même en ce qui vous concerne. Ensemble, nous avons appris à nous connaître, nous avons souvent partagé un thé ou un café – un moment de convivialité qui, en Turquie, revêt une grande importance et scelle des amitiés durables.

Comment agir ensemble pour améliorer le sort de nos concitoyens? Nous nous y sommes efforcés durant des années, et je suis très heureux de retrouver nombre de visages familiers au sein de cet hémicycle. Le Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire sont restés chers à mon cœur, y compris depuis que je suis ministre des Affaires étrangères de mon pays. À l’époque où je présidais cette Assemblée, l’un des problèmes récurrents était le budget de l’Organisation. Depuis que je suis ministre des Affaires étrangères de mon pays, je me suis attelé à essayer d’améliorer la situation financière de l’Organisation. La Turquie est ainsi devenue grand contributeur au budget du Conseil et le turc est désormais l’une des langues de travail – ce dont je profite aujourd’hui.

Cela dit, je ne suis évidemment pas le seul à avoir profité du Conseil de l’Europe: mon pays, la Turquie, en a beaucoup profité également, et l’on peut considérer que l’essentiel des progrès réalisés depuis quinze ans l’ont aussi été grâce au Conseil de l’Europe.

Je suis entré au Conseil de l’Europe en tant que député en 2003. La Turquie était alors soumise à un suivi, le pays connaissait de nombreux disfonctionnements. Mais déterminés à améliorer les choses, et grâce au Conseil de l’Europe, grâce à son aide nous avons pu sortir rapidement de la procédure de suivi en accomplissant les progrès nécessaires.

Pendant longtemps, certains ont douté de la capacité de la Turquie à se réformer. Le rythme des réformes a démenti leurs critiques et a eu raison de leur perplexité. Nous avons introduit de nombreux mécanismes de protection des droits, ceux incarnés par le Conseil de l’Europe: aujourd’hui, chacun peut, en Turquie, faire valoir ses droits, devant la justice ou le médiateur, instance que nous avons créée. Nous avons aussi facilité l’expansion des partis politiques, et ouvert l’enseignement à d’autres langues, dans des écoles privées. Nous avons multiplié les initiatives pour lutter contre les discriminations et ratifié la Charte sociale européenne révisée. Nous sommes aujourd’hui Etat partie à toute une série de conventions et protocoles du Conseil de l’Europe; c’était l’un des objets de notre programme de réformes, et, en tant que ministre des Affaires étrangères, j’ai suivi tout cela de très près. La Turquie est en fait l’un des pays qui a ratifié le plus grand nombre de conventions du Conseil de l’Europe. Nous avons ainsi renforcé la démocratie et l’Etat de droit. En mettant en œuvre les recommandations de l’Assemblée parlementaire, nous avons pu ouvrir un certain nombre de chapitres de négociation avec l’Union européenne.

Nous sommes aujourd’hui face à des menaces, tels que le racisme, la xénophobie, l’antichristianisme, et plus généralement l’intolérance religieuse, qui progresse un peu partout dans le monde. Nos valeurs communes sont aujourd’hui remises en cause et menacées. Nous devons pouvoir compter, encore davantage que par le passé, sur l’expertise et le savoir-faire du Conseil de l’Europe. Nous devons prôner, plus que jamais, le vivre-ensemble. Lorsque j’étais président de l’Assemblée parlementaire, je mettais beaucoup l’accent sur le dialogue interculturel et interreligieux. Je me souviens de l’intervention de quatre grandes personnalités religieuses, ici, en 2011; malheureusement leur message n’a pas été suffisamment entendu. Nos valeurs sont souvent bafouées. Certaines couches de la population se sentent mises à l’écart, ce qui favorise le radicalisme, l’extrémisme et la montée du terrorisme.

En Turquie, hélas, nous savons ce qu’est le terrorisme. La nuit du 14 au 15 juillet s’apprêtait à être agréable, une belle nuit d’été. Malheureusement, le mouvement Gülen a décidé, cette nuit-là, de s’attaquer à la démocratie et aux institutions turques. Le mouvement a tenté de renverser le Président, des chasseurs ont bombardé le parlement. Si le coup d’Etat avait réussi, vos collègues turcs ne siègeraient pas parmi vous aujourd’hui. Ces bombardements et cette tentative pour massacrer les institutions ont échoué. Heureusement, les Turcs se sont mobilisés et sont descendus dans la rue pour s’opposer aux putschistes; et je voudrais ici rendre hommage à ceux qui sont morts, ce jour-là. Nous étions déterminés à faire échouer le coup d’Etat, et nous le sommes toujours. Un grand nombre de gens restent très mobilisés, aujourd’hui, pour faire vivre la démocratie. Au moment du putsch l’ensemble des partis politiques a fait bloc, majorité et opposition se sont élevées pour condamner les putschistes et pour rappeler leur attachement à la démocratie.

Depuis ce coup d’Etat nous avons instauré un état d’urgence, dans le respect de nos dispositions constitutionnelles, tout cela pour éliminer la menace qui pesait sur notre pays et sur nos institutions, sur nos citoyens et sur les valeurs que nous partageons. Avant la tentative de coup d’Etat, nous avions déjà été victimes de nombreux attentats, de la part du PKK, de Daech et d’autres. Malgré les attentats, nous n’avions pas déclaré l’état d’urgence. Nous l’avons fait face au putsch, événement d’une gravité absolument inouïe. Nous étions contraints de le faire, et 80 % des Turcs y sont favorables. Nous l’avons fait pour essayer de nous débarrasser de cette organisation qui est à la base de cette tentative, et qui s’est infiltrée dans tous les rouages de l’Etat.

Cela dit, nous n’avons pas cessé, pour autant, de collaborer avec le Conseil de l’Europe. Le premier responsable à s’être rendu en Turquie, après l’échec du putsch, fut M. Jagland. Mme Kaljurand et M. Agramunt l’ont suivi. Je remercie chacun d’entre eux d’avoir fait le voyage en Turquie pour exprimer leur solidarité avec mon pays.

Je comprends bien que certains puissent être inquiets, que vous soyez inquiets. Mais, encore une fois, nous avons essayé de répondre à toutes les questions qui nous étaient posées. Après l’échec du putsch, la première organisation internationale que j’ai visitée était le Conseil de l’Europe. Je me suis adressé au Comité des Ministres le 7 octobre dernier. Depuis, nous avons encore renforcé nos liens avec l’institution. Le commissaire aux droits de l’homme s’est rendu en Turquie, ainsi que le Comité contre la torture, le CPT. La Commission de Venise travaille en étroite liaison avec nous, et nous maintenons le dialogue technique avec tous les experts du Conseil de l’Europe. Nombre d’entre eux sont venus à Ankara, et de nombreux experts turcs sont venus à Strasbourg.

Nous agissons dans la transparence et en liaison avec nos partenaires internationaux, et avec les organisations internationales, dont le Conseil de l’Europe. Nous tenons compte des recommandations qui nous sont adressées. Nous sommes toujours ouverts au dialogue et à la coopération. La Turquie n’a pas renoncé à son programme de réformes, réforme constitutionnelle, réforme institutionnelle et autres, ce en collaboration avec tous les partis politiques. Nous voulons renforcer toutes les institutions, mais aussi la société civile. Nous poursuivrons donc les réformes, et nous continuerons à tenir le plus grand compte des recommandations du Conseil de l’Europe.

Mesdames et Messieurs, chers amis parlementaires, nous comptons sur vous dans cette phase difficile. Malheureusement, certaines personnes n’ont pas compris quelle était l’ampleur du problème, ou alors n’ont pas voulu le comprendre. Ceux qui sont venus à Ankara se sont rendu compte de la gravité des faits. Venez, venez à Ankara, venez à Istanbul pour vous rendre compte de la situation. Les terroristes ont massacré 240 personnes, comprenez-le bien. Comprenez les souffrances du peuple turc. De nombreuses personnes ont été blessées, écrasées par les chars ou autres, ou mutilées. Au lendemain du putsch, la menace n’a pas totalement disparu. La Turquie est toujours menacée, menacée par le PKK, par différents mouvements extrémistes musulmans, par l’Etat islamique notamment. Tous ces terroristes, tous ces mouvements veulent remettre en cause notre civilisation, notre démocratie, nos valeurs, et nous continuerons donc de lutter. On ne peut pas dire comprendre l’idéologie du PKK et non celle de Daech.

Les terroristes sont des terroristes, quel que soit leur nom, quelle que soit leur organisation. Aussi, nous ne devons pas accepter que les terroristes prennent le contrôle de nos vies. Daech ne représente pas l’islam, Daech est une organisation terroriste. Ceux qui composent cette organisation ne sont pas des musulmans, ils ne peuvent se prétendre musulmans. Telle est notre thèse que nous continuerons de défendre. Nous lutterons contre cette idéologie délétère, car aucun pays ne sera à l’abri tant que tout le monde ne sera pas à l’abri.

Nous sommes confrontés aujourd’hui au défi des migrations. Votre Assemblée, je le sais, y consacre beaucoup d’attention. La Turquie, quant à elle, joue plus que son rôle dans cette crise. En effet, elle est le pays qui a accueilli le plus grand nombre de réfugiés. Nous partageons notre quotidien avec 2,7 millions de personnes qui ont fui les hostilités. Nous les avons accueillies et faisons tout notre possible pour subvenir à leurs besoins et assurer un minimum de services, sur le plan de l’éducation et de la santé également. Il nous appartient de tout faire pour améliorer le sort de ces personnes et tout le monde doit se mobiliser et partager le fardeau. Des milliers de personnes ont quitté leur foyer et nous devons résoudre les causes de ces problèmes, notamment en Syrie.

En Europe, se posent bien d’autres difficultés et des menaces pèsent sur la stabilité et la démocratie. Je pense à la Crimée, au Haut-Karabakh, à l’Abkhazie et à l’Ossétie du sud ainsi qu’à la Transnistrie, sans compter que des risques subsistent dans les Balkans. Il est par conséquent nécessaire que nous poursuivions nos efforts pour renforcer la paix et assurer la stabilité du continent.

Nous espérons également, d’ici à la fin de l’année, parvenir à un accord au sujet de Chypre, et à un statut de l’île, qui soit partagé par tous.

Bien entendu, dans ce contexte, le Conseil de l’Europe doit jouer rôle sans cesse plus important et ses valeurs s’imposer partout. Elles devraient inspirer la poursuite des réformes chez nous, mais aussi ailleurs. Nous devons nous mobiliser, surmonter nos problèmes budgétaires pour donner un nouvel avenir à l’Europe. Dans ce contexte, j’insiste sur la nécessité d’un futur sommet que vous appelez de vos vœux. J’ai eu l’occasion de le dire hier soir, je suis favorable à l’organisation d’un tel sommet.

Je voudrais également souligner l’importance du partenariat pour la démocratie que vous avez mis en place, qui vous a permis, par exemple, de suivre le déroulement des élections au Maroc. Je profite d’ailleurs de l’occasion qui m’est offerte pour féliciter les Marocains de la réussite du scrutin.

Ensemble, nous pouvons trouver des solutions à nos problèmes communs en nous inspirant de nos valeurs communes. Sachez-le, la Turquie ne renoncera jamais à jouer son rôle dans ce contexte, elle fera ce qu’elle doit faire.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le Ministre, je vous remercie infiniment de votre intervention et d’avoir accepté de répondre à des questions. Vous pouvez constater l’importance que nous accordons à vos propos.

Je rappelle à mes collègues que les questions ne doivent pas dépasser 30 secondes, qu’ils doivent poser une question et non faire un discours.

Mme BAKOYANNIS (Grèce), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Monsieur Çavuşoğlu, soyez le bienvenu de retour au Conseil de l’Europe.

Après le 15 juillet, lorsque le peuple turc a protégé la démocratie, nous avons entendu un certain nombre de déclarations du Président Erdoğan qui semblaient remettre en question des traités signés de longue date, tels que le Traité de Lausanne ou l’accord signé avec l’Union européenne sur les migrants. La Turquie honorera-elle les accords signés en la matière?

M. LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA TURQUIE* – C’est un plaisir de retrouver ma chère collègue, Mme Bakoyannis.

Tous les pays, que cela leur plaise ou non, se doivent d’honorer les engagements et les traités internationaux. Il n’en demeure pas moins que tout un chacun peut exprimer ses opinions sur le point de savoir si ces conventions se justifient toujours.

Le Président Erdoğan a exprimé son opinion sur certaines conventions qui peuvent se révéler plus ou moins avantageuses pour la Turquie. Cela relève de la liberté d’expression, il ne s’agit nullement d’une menace portée à l’encontre de la Grèce ou de tout autre pays.

Pour ce qui est de l’accord sur les réfugiés, la Turquie a assumé une grande partie de la charge. Nous avons toujours indiqué que nous partagerions ce fardeau avec d’autres pays. La Turquie a déjà dépensé 12 millions de dollars sur son budget propre pour faire face aux besoins des réfugiés. Or, elle n’a reçu de l’Union européenne que 535 millions de dollars. Au plan international, 134 pays appartenant à diverses organisations internationales n’ont réuni que cette somme. Si l’on ajoute les sommes dépensées par les ONG turques, les dépenses totales avoisinent les 24 milliards de dollars. La somme est énorme pour la Turquie, pour la Grèce ou pour tout autre pays. Mais nous sommes confrontés à des personnes qui quittent leur foyer dans des conditions terribles de guerre. C’est pourquoi nous devons maintenir la politique des portes ouvertes et apporter notre contribution pour subvenir à leurs besoins.

À l’heure actuelle, nous accueillons 3 millions de réfugiés, auxquels nous nous efforçons de fournir les meilleures conditions d’accueil. Nous voudrions faire davantage encore. Nous envisageons de bâtir 10 000 unités de résidence afin que les réfugiés ne restent pas dans des camps. En matière d’enseignement, nous voudrions subvenir à l’éducation de plus de 800 000 enfants en âge scolaire alors que seulement 300 000 sont scolarisés à ce jour. Nous nous demandons comment nous allons pouvoir offrir ces services d’enseignement à ces enfants réfugiés en âge scolaire. Bien sûr, nous sommes en contact direct avec l’Union européenne qui avait promis une aide de 3 milliards de dollars. Or, pour l’heure, elle n’a envoyé que 179 millions d’euros, sans doute pour des raisons bureaucratiques. Des procédures de l’Union européenne s’appliquent, que cela nous plaise ou non, mais, pour l’heure, nous devons faire face à une situation «extraordinaire». Il faut bien subvenir dans l’immédiat aux besoins des réfugiés et chacun doit assumer sa part. Nous avons signé un accord avec l’Union européenne pour rendre légale l’immigration illégale.

La Turquie a signé cet accord, car des centaines de bébés sont morts noyés dans la mer Egée, quantité d’enfants ont été rejetés sur les rivages. Il est impératif de mettre un terme à une telle situation. À cette fin, un accord a donc été signé avec l’Union européenne. Nous l’avons respecté et mis en œuvre avec succès.

La Grèce a décidé de renvoyer en Turquie des Pakistanais, des Africains et des Syriens que la Turquie a reçus. L’Allemagne et Mme la chancelière Merkel sont impliqués directement dans ce processus.

L’ensemble de ces procédures ont été mises en œuvre avec succès. Nous avons signé des accords avec l’Union européenne qui ont abouti à l’accord du 18 mars sur les migrations et à l’Accord de réadmission. Nous avons, par ailleurs, signé des accords bilatéraux, lesquels nous ont permis d’accueillir 100 000 migrants illégaux venant de Grèce.

Un autre accord a été signé avec l’Union européenne, nous avons engagé des pourparlers pour l’octroi des visas et nous nous sommes mis d’accord sur les critères, sauf sur le terrorisme. Nous sommes parvenus à un accord sur la plupart des 72 critères.

Nous devons mettre en œuvre toutes ces conventions pour le bien de tous, et pas uniquement pour celui de l’Union européenne; ce ne serait pas équitable. Toutes les parties aux accords doivent retirer des avantages. Il ne s’agit pas là d’une menace, mais d’une préoccupation dont nous faisons état auprès de l’Union européenne, en toute franchise. Malheureusement, M. Erdoğan est peut-être trop franc, trop sincère et personne n’aime entendre ce genre de propos. Mais il dit la vérité. N’oubliez pas que ce sont les Turcs qui assument la majeure partie de cette charge et que nous prenons de grands risques, notamment sur le plan de la sécurité.

Alors, bien sûr, il faut mettre un terme aux comportements inhumains. Mais nous aussi avons des attentes et elles n’ont pas été satisfaites. Et maintenant, quand nous protestons, vous dites que la Turquie vous menace. Non, nous ne menaçons personne. Nous souhaitons simplement que chacun respecte ses engagements.

Nous souhaitons continuer à coopérer avec l’Europe et pour ce faire, nous avons discuté avec MM. Juncker, Tsípras, Hollande et Mmes Merkel et May, avec tous les dirigeants. Et nous pensons que nous arriverons à définir une feuille de route et à poursuivre ainsi la coopération avec l’Union européenne dans ce processus difficile.

Mme DURRIEU (France), porte-parole du Groupe socialiste – La Turquie a fait face à un coup d’Etat militaire, et nous saluons le peuple turc. Monsieur le Ministre, vous venez d’accuser M. Gülen comme étant le responsable de ce coup d’état, ma première question est donc la suivante: avez-vous des preuves?

N’oublions pas que, avant le putsch, la levée de l’immunité parlementaire avait frappé environ un tiers de l’Assemblée turque, touchant le cœur même de la démocratie. À l’instant, me semble-t-il, le Premier ministre turc a annoncé un référendum pour l’instauration d’un régime présidentiel, soulignant l’incapacité du Parlement. Quelle est votre position à ce sujet?

M. LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA TURQUIE – Le mouvement Gülen est une organisation terroriste et Fethullah Gülen en est le leader. Il a déjà été à l’origine de différentes attaques en Turquie par le passé, et avant ce dernier coup d’Etat une tentative a eu lieu au mois de décembre. En 2012, il également été à l’origine de la fuite de certains entretiens qu’il avait enregistrés à Oslo, pour les utiliser contre le Gouvernement turc.

Fethullah Gülen est à l’origine de ce coup d’Etat, nous disposons de milliers de preuves. Par exemple, quand le chef d’état-major, pris en otage pendant le coup d’Etat – pour qu’il appuie celui-ci –, a demandé aux preneurs d’otage qui était leur leader, ils ont répondu Fethullah Gülen. De même, tous les officiers de police qui ont été arrêtés ont confirmé que Fethullah Gülen était derrière ce coup d’Etat.

Fethullah Gülen vit aux Etats-Unis et nous souhaitons qu’il soit extradé vers la Turquie. Nous leur avons donc fourni toutes les preuves nécessaires et leurs experts sont venus à Ankara pour rencontrer des juges, des procureurs, des experts. Aujourd’hui encore, de nouvelles preuves s’accumulent au quotidien. Voulez-vous remettre tout cela en question? Tout le monde, aux Etats-Unis, est convaincu que Fethullah Gülen est à l’origine de cette tentative de coup d’Etat.

Cette organisation terroriste a régulièrement porté atteinte aux intérêts de la Turquie. Il y a encore deux jours, un journaliste de télévision a fait une déclaration publique, racontant qu’il y a 6 ou 7 ans Fethullah Gülen l’avait fait emprisonner avec d’autres de ses collègues. Mais à l’époque, beaucoup de personnes avaient préféré montrer du doigt le Président.

Mme Durrieu se rend régulièrement en Turquie et sait tout cela. Aujourd’hui, tout le monde sait que les juges qui avaient arrêté, à une époque, de nombreux journalistes faisaient partie du mouvement Gülen. Nous essayons donc de réparer tous les dommages qui ont été causés par cette organisation. Nous n’avons aucun doute: le mouvement Gülen est derrière cette tentative de coup d’Etat.

Madame Durrieu, vous êtes rapporteure pour la Turquie, vous vous rendez souvent dans notre pays et nous coopérons étroitement. Nous avons bénéficié des rapports que vous avez élaborés, et même si nous n’étions pas d’accord sur tout, nous en avons tiré de grands avantages.

S’agissant de la levée de l’immunité parlementaire, certaines choses ont été mal perçues et mal comprises. Les parlementaires bénéficient de l’immunité lorsqu’ils s’expriment devant le Parlement, quelle que soit leur appartenance politique. La levée de cette immunité concerne les parlementaires soupçonnés d’infractions dans certaines affaires. Or, par exemple, fournir des armes à des organisations est une raison de la levée de cette immunité. Nous œuvrons pour la démocratie, pour l’Etat de droit et ceux qui servent le terrorisme doivent être traduits en justice, sans aucune discrimination. La Commission de Venise a été consultée sur cette question et nous tiendrons compte de son avis, quand elle le rendra.

J’en viens à votre question concernant le référendum sur le régime présidentiel. En France, votre régime est semi-présidentiel avec un parlement qui remplit sa fonction, aux Etats-Unis, il s’agit d’un régime présidentiel et dans d’autres pays, c’est une monarchie. Mais quel que soit le régime ou le système en place, ce qui est important, c’est le bon fonctionnement de la démocratie, l’Etat de droit et la séparation des pouvoirs entre le judiciaire, le législatif et l’exécutif. Les parlementaires doivent jouer un rôle clé dans la démocratie, l’exécutif doit être contrôlé. Or à l’heure actuelle, la séparation de l’exécutif et du législatif n’est pas nette – les partis de l’opposition seront, j’en suis sûr, d’accord avec moi sur ce point.

Le président de la Commission de Venise a insisté sur l’importance de mettre en place un système fonctionnel: la démocratie doit pouvoir fonctionner quel que soit le régime. Chaque pays a le choix du régime qui lui convient à condition de respecter les règles de la démocratie. C’est pourquoi nous allons à présent consulter le peuple par voie de référendum comme nous en avons l’habitude.

M. XUCLÀ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Cher ministre, votre pays a affronté récemment une tentative de coup d’Etat, qui portait atteinte à la démocratie que vous représentez. La Turquie envisage de réinstaurer la peine de mort, mais celle-ci est incompatible avec les normes du Conseil de l’Europe. Par ailleurs, vous avez invoqué l’article 15 de la Convention européenne des droits de l’homme en vue d’une suspension partielle de celle-ci, mais l’état d’urgence a été reconduit. À quel moment pensez-vous pouvoir à nouveau respecter intégralement la Convention européenne des droits de l’homme?

M. LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA TURQUIE* – J’accorde beaucoup d’importance à cet échange avec l’Assemblée. C’est pourquoi j’ai consacré seulement quinze minutes à mon discours afin de nous laisser suffisamment de temps pour les questions.

En effet, une tentative de coup d’Etat a eu lieu et un grand nombre de personnes ont été massacrées. Imaginez que vos propres soldats utilisent les armes financées par l’argent des contribuables pour les tourner précisément contre eux et bombarder le parlement. Imaginez des soldats qui bombardent les locaux de la police ou le palais présidentiel. Sur les ponts, à Istanbul, il y avait des chars qui tiraient au hasard sur les gens. C’est un véritable traumatisme, qu’il est difficile de surmonter. L’émotion a été forte et nos citoyens demandent que les coupables soient punis.

Monsieur Jagland, nous n’avons pas voulu discuter en détail du problème de la peine de mort lorsque vous nous y avez invités, car nous étions alors conscients que l’émotion était encore trop forte. Nous devons toutefois en parler maintenant de manière plus calme. Nous ne pouvons pas fermer les yeux face aux demandes de la population, mais nous devons lui expliquer la meilleure manière de réagir, même si c’est difficile. Certaines organisations internationales ont menacé la Turquie d’exclusion si elle réinstaurait la peine de mort. Ce n’est pas le cas du Conseil de l’Europe, mais cela a engendré une forte réaction au sein du peuple turc. Vous devez comprendre les circonstances compliquées dans lesquelles nous nous trouvons actuellement. Nous avons expliqué notre position à nos partenaires.

À titre personnel, je suis contre la peine de mort. Je l’ai d’ailleurs affirmé à plusieurs reprises lorsque je siégeais ici. Je me rappelle même avoir sollicité une entrevue avec les autorités chinoises pour aborder le sujet, entrevue que je n’ai pas obtenue. Pendant le coup d’Etat, ma fille se trouvait à Strasbourg. Elle devait revenir en Turquie pour deux jours et mon épouse m’a menacé de se fâcher avec moi si je ne changeais pas de position sur la peine de mort. Je suis marié depuis vingt-trois ans et c’est la toute première fois que j’ai vu ma femme si menaçante. Pourquoi est-ce que je vous raconte cela? Pour vous montrer que mon épouse elle-même a vécu un véritable traumatisme. Elle était, lors du coup d’Etat, dans le logement que nous a attribué le ministère des Affaires étrangères. Deux jours après les événements, j’ai pu la convaincre, elle et notre fille, qu’il y avait une autre voie à suivre. Il faut du temps pour réfléchir. C’est ce que je veux vous faire comprendre. Les membres du Parlement turc discuteront de la question avec calme et prendront le temps d’évaluer la situation.

Nous sommes actuellement en plein état d’urgence en Turquie. Comme la France, nous avons demandé une dérogation à l’application de la Convention européenne des droits de l’homme en vertu de l’article 15. Nous n’avons pas choisi de déclarer l’état d’urgence, nous y avons été contraints, pour la première fois, par des circonstances particulièrement difficiles. Nous souhaiterions y mettre fin d’ici trois mois mais, malheureusement, la situation est de plus en plus compliquée. Malgré toutes les dispositions que nous avons adoptées jusqu’à présent, la population ne pense pas que la menace ait totalement disparu. Voilà pourquoi nous en sommes à la situation actuelle. Une organisation terroriste a infiltré toutes les institutions étatiques depuis une quinzaine d’années. Ce n’est pas en un jour que nous allons régler le problème. Nous n’avons jamais été confrontés à une situation aussi compliquée. Nous avons informé le Conseil de l’Europe des différentes dispositions que nous avons prises. Nous travaillons avec prudence, en nous efforçant de tenir compte de toutes les recommandations du Conseil de l’Europe. S’il nous est possible d’agir d’ici trois mois, bien entendu, nous mettrons un terme à l’état d’urgence. Nous ne souhaitons pas le maintenir de manière permanente. Pour l’heure, l’état d’urgence n’a porté atteinte ni aux vies de citoyens turcs ni aux libertés fondamentales. Il a pour seul objectif de lutter contre les organisations terroristes. Comme je l’ai dit dans mon intervention, la population soutient à plus de 80 % l’état d’urgence. C’est dire l’importance des préoccupations sécuritaires chez les Turcs à l’heure actuelle. Dans des circonstances différentes, ils préféreraient bien entendu ne pas vivre dans l’état d’urgence. Il y a eu deux attaques terroristes sur le sol français. En Turquie, nous en avons subi plus de dix en une année et c’est seulement maintenant que nous déclarons l’état d’urgence.

M. SEYIDOV (Azerbaïdjan), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Cher ami, je vous souhaite la bienvenue au Conseil de l’Europe. Au nom de mon groupe, je veux vous exprimer nos condoléances à vous et à votre pays, mais aussi notre gratitude, parce que vous luttez contre le terrorisme et pour des valeurs que nous partageons.

Que pensez-vous que nous devrions faire, ici, au Conseil de l’Europe, pour apporter notre soutien à la Turquie?

M. LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA TURQUIE* – Je vous remercie pour votre soutien, Monsieur Seyidov. L’Azerbaïdjan est un pays frère. Son peuple et son président nous ont soutenus dans cette période difficile, où nous avions justement besoin de sentir la présence d’amis autour de nous. Nous n’attendons pas de nos amis qu’ils soient d’accord avec tout ce que nous faisons, mais qu’ils nous fassent des suggestions et des propositions constructives, nous permettant de surmonter l’épreuve que nous vivons.

Ici, au sein de cette Assemblée, il ne faut pas qu’il y ait des intérêts cachés; il ne faut pas que l’on applique une politique du deux poids deux mesures. Je dois dire que le Secrétaire Général, le Comité des Ministres et de nombreux membres de l’Assemblée agissent précisément en ce sens.

Il est vrai que nous souhaitons davantage de dialogue et de coopération avec le Conseil de l’Europe et nos amis qui y siègent. Lorsque les délégations du Conseil de l’Europe se rendent en Turquie, nous apportons toute l’assistance nécessaire à leur mission. Nous continuerons de coopérer étroitement avec vous, car nous voulons rester des partenaires.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* –Monsieur le Ministre, cher Mevlüt, je suis heureux de vous retrouver, avec votre fille, en bonne santé, après les événements terribles que vous avez vécus, cette tentative de coup d’Etat. Je dois avouer cependant ma tristesse devant la réaction, disproportionnée, de l’Etat: des dizaines de milliers de personnes ont été évincées, enfermées; des personnes, qui auraient dû être considérées comme des individus ordinaires, voire des victimes, ont été tenues pour des traîtres; des médias ont été fermés; la Convention européenne des droits de l’homme a été mise entre parenthèses.

J’espère un retour rapide à la normalité. Ma question est la suivante: votre gouvernement autorisera-t-il la publication du rapport du Comité européen pour la prévention de la torture, le CPT?

M. LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA TURQUIE* – Moi aussi, je suis ravi de vous revoir, Tiny. Lorsqu’un Etat est confronté à une menace telle que celle d’un coup d’Etat, il est de sa responsabilité de prendre des mesures. Il lui faut évidemment le faire dans le cadre constitutionnel.

Ceux qui ont tenté, ou soutenu, ce coup d’Etat font l’objet de procédures, et c’est normal. D’autres n’étaient pas partie au complot mais se trouvaient quand même en liaison avec l’organisation terroriste. Nous avons donc pris des mesures visant à les évincer des rouages de l’Etat. On ne peut à la fois faire allégeance à une organisation terroriste et à un Etat. Si ces personnes étaient armées, elles pourraient commettre le pire. Il faut mettre un terme au complot.

Je ne pourrais pas avoir confiance en des fonctionnaires de mon ministère qui seraient inféodés à une organisation terroriste. Cette organisation a tout fait pour noyauter l’Etat et tenter de placer ses pions dans la fonction publique, et ailleurs. Les individus ont été préparés pour réussir les concours de la fonction publique et travailler ensuite au service de l’organisation güleniste. Certains ont même sacrifié leur carrière pour occuper les postes clés que leur avait assignés cette organisation, pilotée depuis la Pennsylvanie. Ces personnes n’ont pas fait allégeance à l’Etat, mais à une organisation terroriste, dont le but était de renverser l’Etat – et cela, aux frais du contribuable. Ailleurs, on ne tolérerait pas que des agents étrangers ou des personnes à l’allégeance douteuse occupent des postes clés!

En fait, seule une proportion infime de fonctionnaires ont été mutés, évincés ou suspendus. Certains d’entre eux avaient d’ailleurs une certaine ancienneté. Ces personnes doivent pouvoir exercer des recours, dans le respect des règles. Mais nous devions agir. Nous ne pouvons pas travailler avec des personnes qui ont prêté allégeance à une organisation terroriste qui vise à renverser l’Etat.

Nous étudions chaque dossier avec grande attention, une commission ayant été chargée de réexaminer chaque cas! Ainsi, 3 000 personnes ont déjà été réintégrées. Des erreurs ont été commises, je le reconnais – c’est fatal, malheureusement. Mais notre responsabilité est précisément de corriger les erreurs et de respecter le droit. Je crois aussi en la justice, qui doit pouvoir jouer son rôle.

La Turquie coopère depuis longtemps avec le CPT. Pour ma part, je prône une tolérance zéro en matière de torture et je dois dire que cette politique a porté ses fruits dans mon pays. D’ailleurs, les rapports successifs du CPT, dont nous avons toujours autorisé la publication, reflètent les progrès accomplis par la Turquie. Le ministre de la Justice viendra certainement à Strasbourg pour discuter du prochain rapport. Une fois les délibérations closes, ce rapport sera évidemment publié. Car la transparence est essentielle à nos yeux. Nous avons pleine confiance dans le Conseil de l’Europe: il saura, nous n’en doutons pas, faire preuve d’objectivité.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le Ministre, mes chers collègues, je vous propose à présent de regrouper les trois prochaines questions.

M. ROUQUET (France) – Monsieur le Ministre, pour la première fois depuis longtemps, un espoir existe de voir Chypre réunifiée. L’un des obstacles au règlement de ce conflit semble être la difficulté de pouvoir garantir la sécurité des deux communautés de manière acceptable par les deux parties. Quelle est votre approche de cette question?

Mme PASHAYEVA (Azerbaïdjan)* – Monsieur le Ministre, les forces armées turques s’efforcent de mettre un terme à la menace que représente Daech. Pouvez-vous nous donner des informations quant à leurs objectifs et à leurs actions?

Que fait la Turquie, membre du Groupe de Minsk, pour aider au règlement du conflit du Haut-Karabakh?

Enfin, nous exprimons toute notre solidarité envers le peuple turc.

M. Michael Aastrup JENSEN (Danemark)* – Monsieur le Ministre, nous sommes tous contre cette tentative de coup d’Etat. Mais nous sommes tous inquiets, aussi, à l’idée que la situation de la démocratie dans certains pays puisse empirer. De nombreuses personnes ont été arrêtées en Turquie. Comprenez-vous qu’un certain nombre d’entre nous, ici présents, souhaitent voir votre pays – certes une démocratie – faire à nouveau l’objet d’une procédure de suivi, afin qu’il devienne encore plus démocratique?

M. LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA TURQUIE *– Comme je l’ai dit en introduction, nous espérons régler le problème de Chypre et sommes, en la matière, plus optimistes que jamais. Mais nous sommes aussi réalistes, car il reste à régler des points difficiles, concernant la sécurité, les garanties sur la propriété et le territoire. Les menaces ont beaucoup changé et il faut compter désormais avec de nouveaux éléments, comme les réserves potentielles de gaz naturel et de pétrole, le voisinage immédiat de la Syrie, la crise des migrants, les flux migratoires en Méditerranée, et l’existence d’organisations terroristes, qui pèsent sur ce qui se passe sur l’île.

Depuis le tout début, nous disons qu’il faut prendre en compte les attentes en matière de sécurité des deux parties, pas seulement celles de la communauté turque. Nous avons soutenu les actions de l’Otan en mer Egée et n’avons jamais demandé à l’Organisation de soutenir la position de la Turquie concernant la région, car la Grèce a sa propre position. Nous n’avons jamais rien demandé qui puisse heurter d’autres sensibilités. À Chypre, les besoins et les requêtes de chacune des communautés doivent être respectés. Bien sûr, la Turquie, en tant qu’Etat garant, a des droits et des obligations, et nous poursuivons les discussions dans ce domaine. J’espère que nous y arriverons car c’est certainement la dernière chance que nous aurons de régler le problème.

Je remercie Mme Pashayeva pour son soutien. Nous participons à la coalition qui lutte contre Daech. Dès le début, nous avons dit que les attaques aériennes ne seraient pas suffisantes. Voilà pourquoi nous avons considéré qu’il fallait engager également des opérations au sol. Les forces d’opposition en Syrie sont particulièrement importantes à cet égard, et elles ont besoin de notre soutien. Dès le début nous avons dit que c’était ainsi qu’il fallait procéder.

Nous sommes ciblés par Daech. Pourquoi? Tout simplement parce que les mesures que nous avons prises pour lutter contre cette organisation, y compris les combattants étrangers, ont été couronnées de succès. L’échange de renseignements entre différents pays a d’ailleurs joué un rôle dans ces succès. Nous avons arrêté un nombre important de personnes dans les aéroports et certains des auteurs des attentats commis en Belgique et en France ont été renvoyés dans ces pays. La Turquie s’inscrit donc pleinement dans la coalition qui lutte contre Daech, et nous travaillons avec nos alliés pour poursuivre dans ce sens.

L’étape suivante consiste à éliminer l’idéologie de Daech. Notre Président, M. Erdoğan, explique que Daech ne saurait représenter l’islam. Voilà pourquoi il est considéré par Daech comme l’ennemi numéro un. Si nous ne luttons pas contre cette idéologie, nous ne parviendrons pas à éradiquer l’organisation elle-même et le problème ne sera jamais réglé.

Daech lutte contre nous, tuant un certain nombre de personnes, dont des enfants. Nous avons donc déclenché un certain nombre d’opérations. À Kilis, près de la frontière avec la Syrie, 23 personnes ont perdu la vie à cause de tirs de roquette. Dans cette ville, on compte d’ailleurs plus de Syriens que de Turcs: près de 120 000 personnes y ont trouvé refuge. Les opérations au sol ont, pour le moment, été couronnées de succès et nous avons constaté leur efficacité.

Bien entendu, ces opérations ont d’autres conséquences: une fois que Daech a quitté une ville, des milliers de Syriens y retournent. Par exemple, nous voyons des femmes et des enfants revenir dans la zone de Manbij, qui est redevenue sûre. Les Syriens, qu’ils vivent dans d’autres régions du pays ou en Turquie, peuvent désormais s’y installer. Nous discutons de ce sujet avec un certain nombre de pays, y compris ceux du Moyen-Orient.

En ce qui concerne le Haut-Karabakh, nous avons travaillé d’arrache-pied pour régler le problème. Nous voulons également normaliser nos relations avec les Arméniens, même si le travail que nous avons mené – en Suisse, notamment – n’a pas été suffisant. Le Groupe de Minsk a fait des suggestions constructives. Nous essayons de trouver une solution pour cette région occupée. Les discussions se poursuivent et nous pensons que, si des mesures adéquates sont adoptées, nous parviendrons à résoudre tous les problèmes auxquels l’Azerbaïdjan est confronté.

Nous voulons bien entendu normaliser les rapports avec l’Arménie et, si la question du Haut-Karabakh était réglée, nous n’aurions plus à vivre avec cette menace qui pèse sur le Caucase du Sud. Pourquoi ne serait-il pas possible d’y parvenir? Le Groupe de Minsk doit travailler encore plus dur, et de manière peut-être plus sincère, pour régler ce conflit, de même que les autres conflits gelés.

Je vous remercie, Monsieur Jensen, pour votre question. En Turquie, la démocratie est en train de se renforcer: c’est exactement l’inverse de ce que vous dites. La police, la justice et l’armée se renforcent car les personnes qui, en leur sein, avaient prêté allégeance à un mouvement terroriste ont été écartées.

Certains journalistes d’autres chaînes de télévision ont été emprisonnés. Le journal Zaman, qui appartient au mouvement terroriste en question, a titré sur le fait qu’être journaliste n’est pas synonyme d’immunité et ne vous empêche pas d’être arrêté. Certaines des personnes qui ont été arrêtées ont participé à la tentative de coup d’Etat mais, dans le passé, il est également arrivé que des journalistes soient arrêtés. Nous ne les arrêtons pas parce que ce sont des journalistes. D’ailleurs, il existe un grand nombre de journaux et de télévisions d’opposition en Turquie. Elles expriment leurs vues et M. Erdoğan a renoncé à engager des procès pour les nombreuses insultes qui le visent. La nuit où a eu lieu la tentative de coup d’Etat, les putschistes ont occupé les locaux de CNN en Turquie et ceux qui nous soutenaient les en ont délogé. Je le répète, nous n’avons pas emprisonné les gens au motif qu’ils étaient journalistes.

La Turquie est très heureuse de sa situation géographique: nous sommes un pays du Moyen-Orient, mais aussi un pays européen, un pays de la Mer noire, un pays asiatique, un pays méditerranéen. Nous souhaitons continuer à développer nos relations avec le Moyen-Orient, mais nous ne ferons jamais de concessions quand l’Etat de droit et la démocratie sont en jeu.

Monsieur Jensen, vous regardez la Turquie de l’extérieur; vous n’y vivez pas. Si j’ai bien compris, vous avez déposé une motion. C’est votre droit, et je le respecte, mais un dialogue existe déjà entre la Turquie et le Conseil de l’Europe dans le cadre du processus de postsuivi. En vous entendant parler, la population turque a l’impression que vous vous placez du côté des putschistes. Venez donc en Turquie – deux rapporteurs sont chargés de suivre notre pays –, continuons à dialoguer sur tous ces points. Ce sera profitable à l’Assemblée nationale turque, à la Turquie et à sa population, mais aussi à l’Europe. Nous préférerions vous avoir à nos côtés plutôt que contre nous.

LE PRÉSIDENT* – Il nous faut maintenant interrompre les questions à M. Çavuşoğlu.

Au nom de l’Assemblée, je vous remercie, Monsieur le Ministre, pour votre intervention et pour les réponses que vous avez apportées. Vous avez pu constater l’importance de votre intervention pour les membres de l’Assemblée. Nous ne devons pas sous-estimer les défis auxquels la Turquie est confrontée; nous devons vous aider à les surmonter.

Chers collègues, je vous invite tous à nous rejoindre, M. Çavuşoğlu et moi-même, à l’inauguration de l’exposition sur la tentative avortée de coup d’Etat et de l’exposition consacrée au 20e anniversaire de l’indépendance de l’Ukraine.

3. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance publique aura lieu cet après-midi à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 h 10.

SOMMAIRE

1. Le sport pour tous: un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale

Présentation par Mme Quintanilla du rapport de la commission de la culture (Doc. 14127)

Intervention de M. Bach, président du Comité international olympique

Orateurs: Mme Johnsson Fornarve, MM. Feist, Mogens Jensen, Mmes Brasseur, Fataliyeva

Réponse de M. le président du Comité international olympique

Orateurs: Mme Schneider-Schneiter, M. Rouquet, Mme Radomski, MM. Le Borgn’, Gopp, Mme Hoffmann, Sir Roger Gale, Mme Quéré, Baroness Massey, M. Fischer, Mmes Christoffersen, Kerestecioğlu Demir

Réponses de Mme la rapporteure et de M. le président de la commission de la culture

Vote sur un projet de résolution amendé

2. Discours de M. Çavuşoğlu, ministre des Affaires étrangères de la Turquie

Questions: Mmes Bakoyannis, Durrieu, MM. Xuclà, Seyidov, Kox, Rouquet, Mme Pashayeva, M. Michael Aastrup Jensen

3. Prochaine séance publique

Appendix/Annexe

Representatives or Substitutes who signed the register of attendance in accordance with Rule 12.2 of the Rules of Procedure. The names of members substituted follow (in brackets) the names of participating members.

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l’article 12.2 du Règlement Les noms des titulaires remplacés figurent (entre parenthèses) après les noms des membres participants.

ÅBERG, Boriana [Ms] (BILLSTRÖM, Tobias [Mr])

ALIU, Imer [Mr] (MEHMETI DEVAJA, Ermira [Ms])

ALLAVENA, Jean-Charles [M.]

AMTSBERG, Luise [Ms]

ANDERSON, Donald [Lord]

ANTTILA, Sirkka-Liisa [Ms]

ARDELEAN, Ben-Oni [Mr]

ARENT, Iwona [Ms]

ARIEV, Volodymyr [Mr]

ARNAUT, Damir [Mr]

BAKOYANNIS, Theodora [Ms]

BALFE, Richard [Lord] (BEBB, Guto [Mr])

BARNETT, Doris [Ms]

BARTOS, Mónika [Ms] (CSÖBÖR, Katalin [Mme])

BAYKAL, Deniz [Mr]

BECK, Marieluise [Ms]

BERGAMINI, Deborah [Ms]

BERNACKI, Włodzimierz [Mr]

BILDARRATZ, Jokin [Mr]

BİLGEHAN, Gülsün [Mme]

BILOVOL, Oleksandr [Mr]

BLANCHART, Philippe [M.]

BLONDIN, Maryvonne [Mme]

BOJIĆ, Milovan [Mr]

BOSIĆ, Mladen [Mr]

BRASSEUR, Anne [Mme]

BRUYN, Piet De [Mr]

BÜCHEL, Roland Rino [Mr] (MÜLLER, Thomas [Mr])

BUDNER, Margareta [Ms]

BULIGA, Valentina [Mme]

CATALFO, Nunzia [Ms]

CENTEMERO, Elena [Ms]

CEPEDA, José [Mr]

ČERNOCH, Marek [Mr] (BENEŠIK, Ondřej [Mr])

CHRISTOFFERSEN, Lise [Ms]

CILEVIČS, Boriss [Mr] (BĒRZINŠ, Andris [M.])

CIMOSZEWICZ, Tomasz [Mr] (POMASKA, Agnieszka [Ms])

CORLĂŢEAN, Titus [Mr] (NEACȘU, Marian [Mr])

CROZON, Pascale [Mme] (BAPT, Gérard [M.])

CRUCHTEN, Yves [M.]

CSENGER-ZALÁN, Zsolt [Mr]

DAEMS, Hendrik [Mr] (MAHOUX, Philippe [M.])

DESKOSKA, Renata [Ms]

DESTEXHE, Alain [M.]

DI STEFANO, Manlio [Mr]

DİŞLİ, Şaban [Mr]

DIVINA, Sergio [Mr]

DJUROVIĆ, Aleksandra [Ms]

DOKLE, Namik [M.]

DURRIEU, Josette [Mme]

DZHEMILIEV, Mustafa [Mr]

ECCLES, Diana [Lady]

ESEYAN, Markar [Mr]

EVANS, Nigel [Mr]

FABRITIUS, Bernd [Mr] (HENNRICH, Michael [Mr])

FARMANYAN, Samvel [Mr]

FATALIYEVA, Sevinj [Ms] (HAJIYEV, Sabir [Mr])

FAZZONE, Claudio [Mr] (BERNINI, Anna Maria [Ms])

FEIST, Thomas [Mr] (WELLMANN, Karl-Georg [Mr])

FENECH ADAMI, Joseph [Mr]

FENECHIU, Cătălin Daniel [Mr]

FERNANDES, Suella [Ms] (HOWELL, John [Mr])

FINCKH-KRÄMER, Ute [Ms]

FISCHER, Axel E. [Mr]

FOURNIER, Bernard [M.]

FRÉCON, Jean-Claude [M.] (DURANTON, Nicole [Mme])

FRESKO-ROLFO, Béatrice [Mme]

FRIDEZ, Pierre-Alain [M.]

GAFAROVA, Sahiba [Ms]

GALATI, Giuseppe [Mr] (QUARTAPELLE PROCOPIO, Lia [Ms])

GALE, Roger [Sir]

GAMBARO, Adele [Ms]

GERASHCHENKO, Iryna [Mme]

GHASEMI, Tina [Ms]

GIRO, Francesco Maria [Mr]

GONÇALVES, Carlos Alberto [M.]

GONCHARENKO, Oleksii [Mr]

GOPP, Rainer [Mr]

GORROTXATEGUI, Miren Edurne [Mme] (DOMENECH, Francesc Xavier [Mr])

GOSSELIN-FLEURY, Geneviève [Mme] (LONCLE, François [M.])

GOY-CHAVENT, Sylvie [Mme]

GÜNAY, Emine Nur [Ms]

GUTIÉRREZ, Antonio [Mr]

GYÖNGYÖSI, Márton [Mr]

HAMID, Hamid [Mr]

HANŽEK, Matjaž [Mr] (KORENJAK KRAMAR, Ksenija [Ms])

HEER, Alfred [Mr]

HEINRICH, Gabriela [Ms]

HERKEL, Andres [Mr] (KROSS, Eerik-Niiles [Mr])

HETTO-GAASCH, Françoise [Mme]

HIGGINS, Alice-Mary [Ms] (CROWE, Seán [Mr])

HOFFMANN, Rózsa [Mme] (VEJKEY, Imre [Mr])

HOLÍK, Pavel [Mr] (MARKOVÁ, Soňa [Ms])

HOPKINS, Maura [Ms]

HÜBINGER, Anette [Ms]

HUNKO, Andrej [Mr]

HUOVINEN, Susanna [Ms] (GUZENINA, Maria [Ms])

HUSEYNOV, Rafael [Mr]

JAKAVONIS, Gediminas [M.]

JENSEN, Michael Aastrup [Mr]

JENSEN, Mogens [Mr]

JIPA, Florina-Ruxandra [Mme]

JOHNSEN, Kristin Ørmen [Ms] (JENSSEN, Frank J. [Mr])

JOHNSSON FORNARVE, Lotta [Ms] (GUNNARSSON, Jonas [Mr])

JÓNASSON, Ögmundur [Mr]

JONICA, Snežana [Ms] (TUPONJA, Goran [Mr])

JORDANA, Carles [M.]

JOVANOVIĆ, Jovan [Mr]

KALMARI, Anne [Ms]

KANDEMIR, Erkan [Mr]

KARAMANLI, Marietta [Mme]

KARAPETYAN, Naira [Ms] (ZOURABIAN, Levon [Mr])

KARLSSON, Niklas [Mr]

KASIMATI, Nina [Ms]

KERESTECİOĞLU DEMİR, Filiz [Ms]

KESİCİ, İlhan [Mr]

KIRAL, Serhii [Mr] (SOTNYK, Olena [Ms])

KLEINBERGA, Nellija [Ms] (LAIZĀNE, Inese [Ms])

KOBAKHIDZE, Manana [Ms]

KOÇ, Haluk [Mr]

KÖCK, Eduard [Mr] (AMON, Werner [Mr])

KORODI, Attila [Mr]

KOSTŘICA, Rom [Mr]

KOVÁCS, Elvira [Ms]

KOX, Tiny [Mr]

KRIŠTO, Borjana [Ms]

KÜÇÜKCAN, Talip [Mr]

KÜRKÇÜ, Ertuğrul [Mr]

KYRIAKIDES, Stella [Ms]

LE BORGN’, Pierre-Yves [M.]

LE DÉAUT, Jean-Yves [M.]

LEITE RAMOS, Luís [M.]

LEYDEN, Terry [Mr] (COWEN, Barry [Mr])

LĪBIŅA-EGNERE, Inese [Ms]

LOMBARDI, Filippo [M.]

LOUCAIDES, George [Mr]

LOUHELAINEN, Anne [Ms] (PACKALÉN, Tom [Mr])

LUIS, Teófilo de [Mr] (BARREIRO, José Manuel [Mr])

MAGRADZE, Guguli [Ms] (JAPARIDZE, Tedo [Mr])

MAMMADOV, Muslum [M.]

MARKOVIĆ, Milica [Mme]

MARQUES, Duarte [Mr]

MARTINS, Alberto [M.]

MASSEY, Doreen [Baroness] (SHERRIFF, Paula [Ms])

MAURY PASQUIER, Liliane [Mme]

MEALE, Alan [Sir]

MEIMARAKIS, Evangelos [Mr]

MENDES, Ana Catarina [Mme]

MIGNON, Jean-Claude [M.]

MIKKO, Marianne [Ms]

MILEWSKI, Daniel [Mr]

MILTENBURG, Anouchka van [Ms]

MULARCZYK, Arkadiusz [Mr]

MUNYAMA, Killion [Mr] (HALICKI, Andrzej [Mr])

NÉMETH, Zsolt [Mr]

NENUTIL, Miroslav [Mr]

NIKOLOSKI, Aleksandar [Mr]

OBRADOVIĆ, Marija [Ms]

OBRADOVIĆ, Žarko [Mr]

OEHRI, Judith [Ms]

OHLSSON, Carina [Ms]

ÖNAL, Suat [Mr]

O’REILLY, Joseph [Mr]

PALIHOVICI, Liliana [Ms] (NEGUTA, Andrei [M.])

PALLARÉS, Judith [Ms]

PANTIĆ PILJA, Biljana [Ms]

PASHAYEVA, Ganira [Ms]

PELKONEN, Jaana [Ms]

POPA, Ion [Mr] (GORGHIU, Alina Ștefania [Ms])

POSTOICO, Maria [Mme] (VORONIN, Vladimir [M.])

PREDA, Cezar Florin [M.]

PRITCHARD, Mark [Mr]

PSYCHOGIOS, Georgios [Mr] (KAVVADIA, Ioanneta [Ms])

QUÉRÉ, Catherine [Mme] (ALLAIN, Brigitte [Mme])

QUINTANILLA, Carmen [Mme]

RADOMSKI, Kerstin [Ms]

RAWERT, Mechthild [Ms] (DROBINSKI-WEIß, Elvira [Ms])

REPS, Mailis [Ms]

RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ, Melisa [Ms]

RODRÍGUEZ RAMOS, Soraya [Mme] (BATET, Meritxell [Ms])

ROUQUET, René [M.]

SANDBÆK, Ulla [Ms] (BORK, Tilde [Ms])

SANTANGELO, Vincenzo [Mr]

SAVCHENKO, Nadiia [Ms]

SCHENNACH, Stefan [Mr]

SCHNEIDER-SCHNEITER, Elisabeth [Mme] (FIALA, Doris [Mme])

SCHOU, Ingjerd [Ms]

SCHRIJVER, Nico [Mr]

SCHWABE, Frank [Mr]

ŠEPIĆ, Senad [Mr]

SEYIDOV, Samad [Mr]

SHAHGELDYAN, Mher [M.] (NAGHDALYAN, Hermine [Ms])

SHARMA, Virendra [Mr] (BUTLER, Dawn [Ms])

SILVA, Adão [M.]

SOBOLEV, Serhiy [Mr]

SPADONI, Maria Edera [Ms] (ASCANI, Anna [Ms])

STOILOV, Yanaki [Mr]

SUTTER, Petra De [Ms] (VERCAMER, Stefaan [M.])

THIÉRY, Damien [M.]

TILKI, Attila [Mr] (GULYÁS, Gergely [Mr])

TORUN, Cemalettin Kani [Mr]

TRENCHEV, Antoni [Mr]

TRUSKOLASKI, Krzysztof [Mr]

TZAVARAS, Konstantinos [M.]

USTA, Leyla Şahin [Ms]

UYSAL, Burhanettin [Mr] (BABAOĞLU, Mehmet [Mr])

VÁHALOVÁ, Dana [Ms]

VALEN, Snorre Serigstad [Mr]

VAREIKIS, Egidijus [Mr] (SKARDŽIUS, Arturas [Mr])

VEN, Mart van de [Mr]

VILLUMSEN, Nikolaj [Mr]

VLASENKO, Sergiy [Mr] (LOGVYNSKYI, Georgii [Mr])

WIECHEL, Markus [Mr] (NISSINEN, Johan [Mr])

WILK, Jacek [Mr]

WURM, Gisela [Ms]

XUCLÀ, Jordi [Mr]

YEMETS, Leonid [Mr]

ZINGERIS, Emanuelis [Mr]

ZOHRABYAN, Naira [Mme]Vacant Seat, Andorra/Siège vacant, Andorre (JORDANA, Carles [M.])

Vacant Seat, Croatia/Siège vacant, Croatie*

Vacant Seat,Cyprus/Siège vacant, Chypre

Also present/Egalement présents

Représentants et Suppléants non autorisés à voter/

Representatives or Substitutes not authorised to vote

BYRNE, Liam [Mr]

CORREIA, Telmo [M.]

EFSTATHIOU, Constantinos [M.]

EROTOKRITOU, Christiana [Ms]

GJORCHEV, Vladimir [Mr]

GUNNARSSON, Jonas [Mr]

HAJIYEV, Sabir [Mr]

HUSEYNOV, Vusal [Mr]

JANIK, Grzegorz [Mr]

MAELEN, Dirk Van der [Mr]

MELKUMYAN, Mikayel [M.]

NAGHDALYAN, Hermine [Ms]

OSUCH, Jacek [Mr]

ÖZSOY, Hişyar [Mr]

PACKALÉN, Tom [Mr]

RUSTAMYAN, Armen [M.]

SITARSKI, Krzysztof [Mr]

VARVITSIOTIS, Miltiadis [Mr]

Observers/Observateurs

DAVIES, Don [Mr]

DOWNE, Percy [Mr]

GASTÉLUM BAJO, Diva Hadamira [Ms]

LARIOS CÓRDOVA, Héctor [Mr]

LOZANO ALARCÓN, Javier [Mr]

LUNA CANALES, Armando [Mr]

RAMÍREZ NÚÑEZ, Ulises [Mr]

SIMMS, Scott [Mr]

TILSON, David [Mr]

WELLS, David M. [Mr]

WHALEN, Nick [Mr]

Representatives of the Turkish Cypriot Community (In accordance to Resolution 1376 (2004) of the Parliamentary Assembly)/ Représentants de la communauté chypriote turque (Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

Partners for democracy/Partenaires pour la démocratie

ABOULFATH, Hanane [Mme]

ABUSHAHLA, Mohammedfaisal [Mr]

BENSAID, Mohammed Mehdi [M.]

LEBBAR, Abdesselam [M.]

SABELLA, Bernard]