FR17CR31

AS (2017) CR 31

SESSION ORDINAIRE DE 2017

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la trente et unième séance

Mardi 10 octobre 2017 à 15 h 30

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 35 sous la présidence de Sir Roger Gale, Président par intérim de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT* – La séance est ouverte.

1. Élection du/de la Président(e) de l’Assemblée
(Résultats du troisième tour du scrutin)

LE PRÉSIDENT* – Lorsque je me suis exprimé hier devant vous depuis cette tribune, je pensais – naïvement sans doute – que c’était la dernière fois. Il a fallu plus de temps que prévu pour que la situation se décante, mais je crois que nous sortons de ce processus plus forts, plus dignes, et avec notre honneur intact.

Comme vous le savez, j’ai décidé de ne pas présenter ma propre candidature à la présidence de notre éminente Assemblée. En effet, je suis persuadé qu’il est juste de préserver le principe de la rotation et, par conséquent, que le Groupe du Parti populaire européen était en droit de terminer son mandat à la présidence de l’Assemblée.

J’ai été heureux que non pas un, mais deux candidats du Parti populaire européen se lancent dans la course, assurant ainsi une élection démocratique. Je considère qu’il s’agit là d’une victoire pour la cause de la démocratie: cela est juste, cela est approprié, et je crois que les choses ont été menées de façon équitable.

Voici les résultats du troisième tour du scrutin pour l’élection du Président ou de la Présidente de l’Assemblée:

Nombre de votants: 217

Bulletins blancs ou nuls: 1

Suffrages exprimés: 216

Nombre de voix requis pour une majorité simple: 109

Ont obtenu:

– Mme Kyriakides: 132 voix.

– M. Zingeris: 84 voix.

Mme Kyriakides a donc obtenu une majorité substantielle, et je la proclame élue Présidente de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Madame la Présidente, je vous invite à prendre place au fauteuil présidentiel.

Mme Kyriakides, Présidente de l’Assemblée, prend place au fauteuil présidentiel.

2. Allocution de Mme Kyriakides, Présidente de l’Assemblée

LA PRÉSIDENTE* – Chers collègues, Mesdames, Messieurs, j’aimerais tout d’abord remercier tous les membres de l’Assemblée parlementaire pour leur soutien, qu’ils aient, ou non, voté pour moi. Mes remerciements vont également à mon groupe, le Parti populaire européen, et à tous les membres qui ont cru en ma candidature et en ce qu’elle représente. Je vous promets une seule chose: je ferai de mon mieux pour ne pas vous décevoir.

Cette élection intervient à un moment particulier pour notre Assemblée. Nous vivons une période dans laquelle notre crédibilité et notre intégrité ont été mises en cause, entraînant une mauvaise publicité pour les travaux de l’Assemblée et la remise en cause par certains des principes de transparence et d’intégrité de toutes les institutions du Conseil de l’Europe. Tout cela constitue autant de défis et de responsabilités que nous partageons tous, mais dont je porte un poids particulier en tant que nouvelle Présidente de cette Assemblée.

Ma décision de présenter ma candidature se fonde uniquement sur ma foi en l’Assemblée, en la démocratie, dans les droits de l’homme et l’État de droit, et sur ma passion à me consacrer sans relâche à ces sujets.

Vous m’avez donné aujourd’hui, à travers la preuve de confiance que vous m’avez adressée, l’occasion d’œuvrer à la réalisation de tous ces objectifs. Dans les mois qui viennent, ma priorité sera d’assurer le calme, le consensus, la crédibilité et l’unité. J’œuvrerai sans relâche contre la corruption, et je voudrais que nous ayons tous à cœur de respecter les mêmes principes et d’observer le même code de conduite.

Pour ce faire, j’aurai besoin du soutien de tous les groupes politiques, de celui du Secrétaire Général et du Secrétariat du Conseil de l’Europe. C’est la raison pour laquelle nous sommes tous ici.

Je ne parlerai pas plus longtemps – pour tout vous dire, les trois derniers jours ont été très fatigants.

Je garderai toujours présentes à l’esprit les priorités du Conseil de l’Europe et je ferai de mon mieux, dans le respect de tous les États membres. J’ai bien l’intention de servir, dans l’honneur et l’équité, tous les États membres, ainsi que vous tous.

En guise de conclusion, je voudrais remercier ma famille qui, j’en suis sûre, est en train de suivre mon intervention, mais aussi, une fois de plus vous tous, de me faire l’honneur de me permettre de m’asseoir à cette place.

Nous allons maintenant reprendre l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Géorgie.

Le vote a lieu dans la rotonde derrière la présidence et sera clos à 17 heures. J’invite ceux d’entre vous qui n’ont pas encore voté à le faire.

Le dépouillement aura lieu aussitôt après dans les conditions habituelles, sous le contrôle des quatre scrutateurs que nous avons désignés par tirage au sort ce matin, à savoir Mme Pashayeva, Mme D’Ambrosio, Mme Bruijn-Wezeman et M. Köck. Je leur rappelle qu’ils devront se trouver dans la rotonde à 17 heures.

Le résultat du scrutin sera annoncé si possible avant la levée de la séance de cet après-midi.

Le scrutin est de nouveau ouvert.

Nous continuons nos travaux pendant ce temps.

3. Questions à M. Thorbjørn Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

LA PRÉSIDENTE* – L’ordre du jour appelle les questions à M. Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe.

Monsieur le Secrétaire Général, je vous souhaite la bienvenue pour cette séance de questions, désormais traditionnelle. Depuis notre dernier échange de vues, un fait important s’est produit: l’un de nos États membres, la Fédération de Russie, nous a informés qu’elle allait suspendre le paiement du reste de sa contribution financière, au titre de l’année 2017, au budget de l’Organisation. Il s’agit là d’une décision qui représente un défi sans précédent pour cette dernière.

Le Comité des Ministres et l’Assemblée parlementaire partagent la responsabilité de préserver l’unité de l’Organisation et sa capacité concrète à obtenir les résultats qu’attendent de nous nos citoyens et nos gouvernements. Par conséquent, les deux organes statutaires devront coopérer pour faire face à cette situation. Je suis persuadée que les membres de l’Assemblée souhaiteront connaître votre point de vue sur cette question, ainsi que sur les mesures qui pourraient être prises pour surmonter la crise actuelle.

Je rappelle aux membres de l’Assemblée que les questions ne doivent pas dépasser 30 secondes, qu’ils doivent poser une question et non faire un discours.

Nous commençons par les porte-parole des groupes.

M. KORODI (Roumanie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Comme vous le savez, Monsieur le Secrétaire Général, le Parlement ukrainien a adopté une nouvelle loi relative à l’enseignement dans les langues minoritaires. Ce texte empêche les personnes appartenant à des minorités nationales d’étudier dans leur langue. Pendant de nombreux mois, plusieurs ONG ont appelé notre attention sur cette violation des droits des minorités.

Monsieur le Secrétaire Général, que fera le Conseil de l’Europe afin de garantir le respect des droits des personnes appartenant aux minorités nationales et de leur permettre de parler leur langue?

M. JAGLAND, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe* – Cette question touche à ce qui constitue l’un des sujets clés pour le Conseil de l’Europe, à savoir le respect des droits des minorités sur notre continent, en particulier le droit de parler sa langue maternelle.

Lors du Sommet du Conseil de l’Europe qui s’est tenu en 1993, c’est-à-dire peu de temps après la chute du mur de Berlin, la question était de savoir comment l’Organisation pouvait contribuer à stabiliser la situation sur le continent. Parmi les éléments soulignés à cette occasion figurait précisément la garantie des droits des minorités. En effet, l’Histoire nous a enseigné que, lorsque les droits des minorités sont bafoués, y compris celui d’utiliser sa propre langue, des conflits – pour ne pas dire plus – éclatent. D’où la Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales, qui a été le résultat du Sommet, sans oublier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, avec des mécanismes de suivi qui ont été créés spécialement à cet effet.

Il est toujours préoccupant de voir se poser des questions relatives aux droits des minorités, et de constater que des lois ayant des conséquences sur eux sont adoptées. C’est pour cela que, lorsque nous avons pris connaissance de la nouvelle loi ukrainienne, nous nous sommes inquiétés et sommes immédiatement entrés en contact avec les autorités ukrainiennes. La ministre ukrainienne de l’Éducation est venue ici il y a quelques jours. Elle a fourni des explications sur le texte en question. Par ailleurs, les autorités ukrainiennes ont demandé l’avis de la Commission de Venise. Nous attendons que celle-ci rende ses conclusions et, sur cette base, nous poursuivrons le dialogue avec les autorités ukrainiennes. Une fois de plus, nous faisons preuve de vigilance, car veiller au respect des droits des minorités est l’une des missions clés du Conseil de l’Europe.

Mme STRIK (Pays-Bas), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Monsieur Jagland, au cours de la dernière partie de session, mon groupe vous avait interrogé sur l’arrestation de la directrice d’Amnesty International en Turquie. Elle encourt, de même que d’autres défenseurs des droits de l’homme, une peine d’emprisonnement de seize ans. C’est là un exemple clair des violations des droits de l’homme qui ont lieu en Turquie – et la situation ne fait que s’aggraver.

Nous vous exhortons donc à adopter une position claire sur cette question en appelant à la libération immédiate des défenseurs des droits de l’homme ainsi que des autres personnes qui sont placées en détention pour des raisons politiques.

Etes-vous prêt à adopter cette position ferme et à prendre l’initiative d’une procédure de suivi au titre du Comité des Ministres?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – J’ai évoqué le cas particulier que vous mentionnez au cours d’une conversation téléphonique assez longue avec le Premier ministre de la Turquie, M. Yıldırım. J’ai été informé à cette occasion de la position des autorités turques sur le sujet et j’ai fait connaître la mienne.

S’agissant des procédures judiciaires qui sont en cours en Turquie, ce que nous pouvons faire, ce qui compte le plus aujourd’hui pour les personnes comme celle que vous évoquez, c’est d’exiger le respect sur le plan interne d’une procédure judiciaire claire et conforme à la Convention européenne des droits de l’homme, faute de quoi les justiciables concernés sont en droit de saisir la Cour européenne des droits de l’homme. La Cour de Strasbourg vérifiera s’ils ont bénéficié d’un procès équitable et si les éléments de preuve portés à charge étaient réels.

L’Europe ne dispose d’aucun autre mécanisme pour faire en sorte que toutes les personnes qui ont été visées après la tentative de coup d’État en Turquie voient leurs droits respectés.

Il est très important que nous protégions tous le mécanisme de la justice. C’est la raison pour laquelle nous sommes réunis ici. Je l’ai dit à maintes reprises dans cette Assemblée: je ne suis pas juge, je ne suis pas dans un tribunal, mais ces procédures peuvent déboucher sur une plainte devant la Cour de Strasbourg.

Je pense aussi aux journalistes emprisonnés ayant déposé une requête devant la Cour européenne des droits de l’homme. Les procédures sont donc en cours.

Nous traversons une époque très difficile et c’est pourquoi j’avais tant insisté sur la libération des prisonniers politiques en Azerbaïdjan, notamment sur celle d’un prisonnier incarcéré depuis trois ans et demi en dépit d’un arrêt très clair de la Cour demandant sa libération. Si nous ne pouvons pas faire preuve de fermeté s’agissant du droit des personnes à être libérées alors que notre Cour en a ainsi décidé, comment pourrions-nous faire appliquer les autres droits consacrés par la Convention? Nous vivons donc une époque extrêmement difficile, véritable défi pour le système conventionnel. Les procédures judiciaires doivent, bien évidemment, suivre leur cours et être respectées, mais comme nous l’avons dit à maintes reprises aux autorités turques, il convient d’être particulièrement attentif à l’égard notamment des journalistes, mais aussi des parlementaires et des défenseurs des droits de l’homme.

Je ne peux pas dire parmi les personnes de ces catégories actuellement emprisonnées lesquelles sont coupables et lesquelles ne le sont pas, mais en tout cas toutes doivent pouvoir sortir de prison pour assurer leur défense, en étant libres et pas derrière les barreaux. La Cour européenne des droits de l’homme, en tout cas, sera amenée à statuer dans ces affaires.

M. TARCZYŃSKI (Pologne), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Monsieur le Secrétaire Général, ma question portera sur la situation dans les États membres du Conseil de l’Europe, notamment en Allemagne ou en France, où règne l’état d’urgence, ou encore en Catalogne. Qu’en est-il de la Suède où des viols ont été commis par des réfugiés en situation irrégulière? Dans ce contexte, qu’en est-il de la Pologne et de la Commission de Venise? Où est le bon sens, où est la recherche d’équilibre du Conseil de l’Europe? Pouvez-vous m’expliquer la différence entre le sang qui a coulé en Catalogne et les problèmes qui se posent en Pologne?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Vous avez posé plusieurs questions en même temps et si je devais répondre à chacune d’entre elles, vous comprendrez qu’il me faudrait beaucoup de temps.

S’agissant de la Catalogne, le ministre des Affaires étrangères d’Espagne était dans mon bureau hier et, à cette occasion, j’ai pu lui dire que la Constitution espagnole devait être respectée, que tout État membre du Conseil de l’Europe doit fonctionner sur la base de sa Constitution et que toute solution aux difficultés et aux crises doit, elle aussi, se fonder sur la Constitution ou une Constitution amendée. Les solutions doivent toujours être trouvées dans le cadre constitutionnel. C’est une règle qui s’applique à tous et en tout lieu. J’ai parlé de l’expérience et des compétences du Conseil de l’Europe en la matière et je les ai mises à la disposition de l’Espagne. La question de la Catalogne doit être traitée selon les mêmes principes.

Si sur le plan idéologique vous voulez savoir si je fais partie des conservateurs, des socialistes ou des libéraux ou autres, sachez que je suis pour le constitutionnalisme. Je constate trop souvent que, lorsque la Constitution n’est plus respectée ou qu’elle est manipulée, cela engendre des difficultés, voire le chaos. Je défends toujours cette position.

C’est le cas pour la Catalogne mais aussi pour la Pologne que vous avez mentionnée. Nous avons travaillé avec les autorités polonaises. Nous avons critiqué certaines des nouvelles lois qui ont été promulguées par le Président Duda et qui concernent le pouvoir judiciaire. La Commission de Venise en examinera certaines.

Autrement dit, nous utilisons toutes nos compétences et notre savoir-faire chaque fois que des questions se posent dans les États membres, tout comme nous l’avons fait pour la Hongrie par le passé. À mon avis, mieux vaut procéder de la sorte plutôt que de se contenter de critiquer sans rien résoudre. Nous voulons être utiles aux États membres parce que nous pensons que c’est la meilleure solution.

Vos questions portaient sur bien d’autres points, mais telles sont les deux principales réponses que je pouvais vous apporter.

M. DAEMS (Belgique), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Comme l’a dit notre nouvelle Présidente, l’un de nos États membres ne verse pas ses contributions, ce qui pose un problème financier. Une institution a un coût, la démocratie aussi. Pour autant, la démocratie n’est pas à vendre, Monsieur le Secrétaire Général. J’aimerais donc savoir quelles sont les initiatives que vous allez prendre pour régler ce problème. Plus spécifiquement, pouvez-vous nous garantir que les solutions qui seront trouvées ne porteront pas atteinte aux valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe?

Encore une fois, la démocratie a un coût, mais la démocratie n’est pas à vendre!

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Ne voir les choses que sous l’angle financier, c’est avoir une vision erronée des choses. Bien sûr, nous aurons une difficulté financière à surmonter si un État membre ne verse pas la totalité de sa contribution. Mais nous ne pouvons tout simplement pas accepter qu’un de nos États membres refuse de financer le budget de l’Organisation. S’il refuse de payer sa part du budget de l’Organisation, il s’exclut de l’Organisation et ne peut plus en être membre.

Le problème financier peut être résolu. La contribution de la Fédération de Russie représente 10 % du budget. Cela signifie qu’il faudra restructurer l’Organisation et licencier 10 % du personnel. C’est faisable. Mais la question qui se pose est de savoir pourquoi nous traversons cette crise, et c’est cette question qu’il nous faut régler parce qu’elle a des répercussions politiques plus vastes. Donc, la vraie question est de savoir si nous voulons un Conseil de l’Europe avec ou sans la Fédération de Russie. Voilà la question centrale.

À cet égard, il faut réfléchir au mandat fondamental du Conseil de l’Europe, qui est de protéger les citoyens des États membres. J’aimerais que tous les États membres de l’Organisation travaillent avec nous pour que nous puissions utiliser tous les instruments dont nous disposons pour protéger les droits de l’homme, en Fédération de Russie comme dans tous les autres pays.

Tel est l’enjeu réel: quelle est notre mission et comment pouvons-nous utiliser les instruments dont nous disposons de la meilleure manière possible? Si un État membre ne souhaite plus faire partie de notre Organisation, c’est à lui d’en décider, mais nous devons faire tout notre possible pour l’y garder, cela afin de protéger les citoyens de ce pays grâce à la Convention européenne des droits de l’homme et de la Cour européenne des droits de l’homme.

Par conséquent, nous ne règlerons pas le problème en abordant les choses sous un angle purement financier. Nous devons également tenir compte des droits de l’homme, voir les choses sous un angle politique pour trouver une solution. C’est la raison pour laquelle je m’efforce, en tant que responsable de l’ensemble de l’Organisation, de faire en sorte que tous les fonctionnaires élus le soient avec les voix de tous les États membres et travaillent dans le même sens sur cette question fondamentale.

Cela étant dit, bien évidemment, un État membre ne peut pas menacer de suspendre le versement d’une partie de sa contribution s’il n’obtient pas satisfaction sur tel ou tel point; nous ne pouvons pas agir sous une pression économique. Il en est totalement hors de question.

M. BUSTINDUY (Espagne), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Monsieur le Secrétaire Général, j’ai écouté attentivement vos déclarations sur la crise politique en Espagne, un pays membre de cette Organisation depuis 40 ans et qui a ratifié la Convention européenne des droits de l’homme avant qu’il ne soit lui-même doté d’une Constitution démocratique.

Que peut faire notre honorable institution pour éviter une escalade supplémentaire et pour contribuer à faciliter le dialogue en Espagne? Une médiation internationale est-elle envisageable pour parvenir à une solution pacifique et démocratique en Catalogne?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Je n’entrevois aucune possibilité de médiation internationale dans ce conflit. Il doit être régi en vertu de la Constitution espagnole ou d’une Constitution modifiée si les parties entament un dialogue.

En revanche, le Conseil de l’Europe peut proposer aux parties prenantes de cette crise son expertise en matière constitutionnelle. Nous serons bien évidemment disponibles si le dialogue devait se nouer et nous rappellerons aux parties que toute solution doit reposer sur la Constitution.

LA PRÉSIDENTE* – M. Filipovski, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Nous prendrons désormais les questions par séries de trois.

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Le terrorisme est un fléau qui menace le monde entier aujourd’hui. L’ensemble des organisations internationales et les pays sont solidaires pour lutter contre ce fléau. Malheureusement, nous fermons les yeux sur l’Arménie qui aide les terroristes, auteurs d’attentats sanglants en Europe et ailleurs dans le monde.

En Arménie, des rues portent le nom de terroristes. Quand allons-nous entendre une déclaration solidaire de la part du Conseil de l’Europe critiquant les comportements de l’Arménie?

Lord FOULKES (Royaume-Uni)* – Monsieur le Secrétaire Général vous n’avez pas répondu à la question de M. Daems. Allons-nous réduire les dépenses de fonctionnement de 10 % ou plus? Un plan d’urgence a-t-il été établi? Si oui, le présenterez-vous à cette Assemblée?

M. KÜRKÇÜ (Turquie)* – Monsieur le Secrétaire Général, s’agissant de la Turquie, une commission a été créée selon votre recommandation. Cependant, sur les 100 000 dossiers, aucun n’a été finalisé. De nombreuses personnes ont entamé une grève de la faim, qui dure maintenant depuis 216 jours.

Que fait-on pour les aider à rester en vie et pour lutter contre la détention arbitraire de milliers de fonctionnaires?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – S’agissant du conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, nous devons nous en remettre au Groupe de Minsk, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité, responsable de la paix et de la sécurité dans le monde. Aucune des parties ne nous a demandé de l’aider.

Nous suivons de notre côté la question des droits de l’homme dans les deux pays et j’ai affirmé, à plusieurs reprises, que nous devions travailler sur les conflits gelés quelles que soient les circonstances sur le terrain. Bien entendu, nous condamnons tous les attentats, qu’ils soient commis dans cette région du monde ou ailleurs.

Pour ce qui est du budget du Conseil de l’Europe, nous sommes en train de gérer le fait que la Fédération de Russie n’ait pas versé la totalité de sa contribution, et nous tentons d’agir de manière responsable. Si elle n’est pas versée pour l’année prochaine, nous nous retrouverons dans une situation bien plus grave, y compris sur le plan politique.

Il appartient au Comité des Ministres, responsable des questions budgétaires, de gérer la question économique. Pour le moment, je me concentre sur la recherche d’une solution avec la Fédération de Russie.

La commission créée afin de traiter les affaires relatives à toutes les personnes licenciées après la tentative de coup d’État en Turquie est une voie judiciaire qui n’existait pas auparavant. En effet, ces personnes avaient été déclarées coupables dans le cadre d’un décret-loi, de sorte qu’elles ne pouvaient plus saisir un tribunal, quel qu’il soit. Cela n’était pas conforme à la Convention européenne des droits de l’homme.

Il fallait créer un moyen judicaire national, car saisir la Cour européenne des droits de l’homme immédiatement serait une erreur. En effet, elle ne pourrait qu’indiquer que, conformément à la Convention européenne des droits de l’homme, il faut épuiser auparavant toutes les voies de recours interne. Ce ne serait donc qu’une perte de temps.

La commission qui a été créée fonctionne avec 400 personnes, dont des experts et des juristes qui travaillent en son sein. Nous attendons les premières décisions pour la fin de l’année ou le début de l’année prochaine. Un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme sera alors possible: nous avons obtenu cette garantie. La Cour vérifiera si cette commission est une véritable voie de recours interne, au sens de la Convention européenne des droits de l’homme.

Notre action a été très importante, pour toutes ces personnes qui n’avaient pas de recours juridique existant à l’échelle nationale. Maintenant, cette possibilité de recours existe, même si certaines personnes ont déjà saisi la Cour européenne des droits de l’homme.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – L’occupation de la Transnistrie et de 20 % du territoire de la Géorgie, l’annexion de la Crimée, l’occupation de Donbass de l’Est, le non-respect des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme: que nous faut-il de plus de la part de la Fédération de Russie? Désormais, les Russes ne contribuent plus au budget de l’Organisation, ils ne respectent pas ses grands principes, ils violent leurs engagements et leurs obligations. Que répondez-vous? Qu’ils ont le droit d’être un membre à part entière de notre Organisation?

M. HUNKO (Allemagne)* – Après les changements survenus en Ukraine en 2014, je vous avais demandé si les événements de Maidan étaient anticonstitutionnels. Vous avez répondu que la Constitution, dans ce processus politique, ne constituait pas un absolu. Aujourd’hui, pour la crise entre l’Espagne et la Catalogne, vous dites le contraire: la Constitution est la règle absolue. Vous ne mentionnez même pas la Convention européenne des droits de l’homme! J’ai le sentiment qu’il y a deux poids, deux mesures. Pourquoi cette différence de traitement?

Mme ALQAWASMI (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Monsieur le Secrétaire Général, pensez-vous que la terreur ait parfois une identité ethnique? Voulez-vous, à cet égard, vous conformer à l’initiative du Conseil de l’Europe #NiHaineNiPeur?

Selon vous, par ailleurs, les droits de l’homme sont-ils défendables, même en l’absence d’une juridiction?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Monsieur Sobolev, vous m’avez demandé si la Fédération de Russie pouvait être un membre à part entière de l’Organisation. Je vous répondrai que c’est déjà le cas. La Fédération de Russie participe à toutes les activités intergouvernementales et siège à la Cour européenne des droits de l’homme.

Je sais que certains arrêts de cette dernière n’ont pas encore été appliqués. Cependant, la Fédération de Russie ne caracole pas en tête de la liste des pays qui ne les appliquent pas. Gardons à l’esprit que, dans beaucoup d’États membres, des problèmes sérieux se posent. Et n’oublions pas quel est le sens d’une participation d’un État membre à notre Organisation pour ses citoyens: les activités du CPT visent à améliorer les conditions de détention, en Fédération de Russie comme dans d’autres pays. Un nouveau Code civil et un nouveau Code pénal ont été introduits, avec l’aide du Conseil de l’Europe.

Beaucoup de défauts doivent être corrigés, notamment les points que vous soulevez: le conflit avec la Géorgie, les problèmes en Transnistrie et en Ukraine, l’annexion illégale de la Crimée, etc. Mais il ne revient pas au Conseil de l’Europe de régler de tels conflits. Leur résolution a été confiée, par le Conseil de sécurité des Nations Unies, à d’autres instances et processus.

Notre mandat, en revanche, est de protéger les droits de l’homme dans nos États membres. Nous ne devrions pas abandonner cet objectif, en dépit des conflits que vous évoquez à juste titre. Même si nous ne participons pas directement au processus de règlement des conflits, la protection des droits de l’homme constitue une contribution importante. Les Accords du Vendredi saint, pour l’Irlande du Nord, se fondaient sur le fait même que la Convention européenne des droits de l’homme s’appliquait en Irlande du Nord. Il en va de même pour les Accords de Dayton.

Plus nous pourrons appliquer nos normes et principes dans les zones de conflit, plus nous contribuerons à leur résolution. C’est ainsi que le Conseil de l’Europe doit travailler. Sinon, nous ne pourrions que constater l’existence de ces conflits et baisser les bras. Mes recommandations ne vont pas en ce sens.

Monsieur Hunko, concernant la question de Maidan, vous avez entièrement tort. Nous n’avons jamais accepté de changement de la Constitution. C’est totalement faux. Lorsque M. Ianoukovitch a changé la Constitution, grâce à la Cour constitutionnelle, nous avons été les seuls à protester. Les grandes puissances, les États-Unis, la Fédération de Russie, l’Union européenne l’avaient accepté, contrairement à nous.

Quant au Maïdan, il s’agit d’une révolution, et toute révolution est anticonstitutionnelle par définition. Et nous ne sommes pas favorables aux changements anticonstitutionnels, ce qui explique mes propos quant à la Catalogne. Nous avons soutenu la façon dont le Royaume-Uni a abordé la question écossaise: ils se sont fondés sur leurs lois. Nos propos ont été clairs, et contraires à ce que vous disiez à l’instant.

J’en viens à la troisième question relative à la terreur. Celle-ci peut être sectaire, ethnique ou religieuse. Nous sommes opposés à toute forme de terreur, dont les principales victimes sont celles qu’elle prétend aider. Combien de fois a-t-on vu les libérateurs du peuple lui faire beaucoup de tort, au point d’en devenir la première victime? La terreur ne constitue en aucun cas une solution. Qu’elle soit sectaire, ethnique ou religieuse, elle ne permet aucune amélioration des conditions de vie des peuples, nulle part dans le monde.

M. KÖCK (Autriche)* – Monsieur le Secrétaire Général, l’article 1er du Statut du Conseil de l’Europe prévoit que celui-ci œuvre au rapprochement des États qui en sont membres. Or la défense nationale ne relève pas de ses compétences. Au regard de nos relations avec la Fédération de Russie, que pensez-vous de cet état de fait? Certains ne voient-ils pas dans le Conseil de l’Europe ce qu’il n’est pas?

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – Monsieur le Secrétaire Général, la crise des réfugiés en Méditerranée est à l’ordre du jour de nos travaux depuis des années. Pourtant, nous n’avons trouvé aucune solution décente, ni pour les réfugiés ni pour les pays du sud de l’Europe. Vous avez averti l’Europe le mois dernier de l’émergence d’une nouvelle et gigantesque crise des réfugiés en Afrique subsaharienne. Comment affectera-t-elle l’Europe? Comment les pays européens peuvent-ils s’y préparer?

M. ÖZCENK (représentant de la communauté chypriote turque)* – Permettez-moi tout d’abord de vous présenter tous mes vœux de succès, Madame la Présidente.

Si nous, représentants de la communauté chypriote turque, avions pu voter, nous aurions voté pour notre collègue Kyriakides, que nous apprécions énormément. Nous sommes très heureux de la voir présider notre Assemblée.

Monsieur le Secrétaire Général, comment le Conseil de l’Europe peut-il améliorer la situation qui prévaut dans le nord de Chypre, caractérisée par de nombreuses souffrances?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – L’objectif du Conseil de l’Europe est en effet de renforcer l’unité de ses États membres et du continent européen en général. Nous y travaillons d’abord en faisant en sorte que les États membres respectent les normes de l’espace juridique commun créé par la Convention européenne des droits de l’homme. En harmonisant les législations, nous travaillons au rapprochement des États membres. C’est la raison pour laquelle je rappelle toujours la nécessité de respecter les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. Lorsqu’elle juge un contentieux, elle accorde une indemnisation aux victimes du préjudice mais formule également des propositions d’ordre général tendant à modifier les lois ou les pratiques qui en sont à l’origine.

Par conséquent, en exécutant un arrêt de la Cour, les États membres sont amenés à modifier leur législation afin de la mettre en conformité avec la Convention européenne des droits de l’homme. Grâce à ce processus, nous nous rapprochons toujours plus les uns des autres. Bien entendu, nous promouvons l’unité du continent européen par de nombreux autres moyens tels que la culture et le sport ainsi que le travail de cette Assemblée, qui permet aux uns et aux autres de se parler, mais le premier objectif du Conseil de l’Europe consiste à renforcer l’espace juridique créé par la Convention européenne des droits de l’homme.

Comment nous préparer à la crise gigantesque que nous voyons se profiler en Afrique subsaharienne, dans la corne de l’Afrique et dans la région des Grands lacs? Le président de la Croix-Rouge internationale m’a rendu visite il y a quelque temps en rentrant de cette région. Selon lui, les camps de réfugiés y comptaient alors quelque 10 millions de personnes. Il s’agit d’une crise énorme qui frappe toute une région et s’aggrave de jour en jour. Nombre de ces personnes ont déjà essayé de traverser le Sahara et en sont mortes, ce que l’on ne sait pas forcément en Europe. Certaines parviennent en Libye, et la traite semble avoir récemment faibli. En tous cas, si nous ne parvenons pas à réinstaller ces gens, cette crise nous touchera de plein fouet.

Nous pouvons faire beaucoup. Le Président de la République française a avancé une très bonne proposition dans le cadre de la nouvelle vision de l’Europe qu’il a évoquée, sous la forme d’un nouveau programme international d’assistance majeur pour cette région. Il a également indiqué comment financer un tel programme. Si nous n’y parvenons pas, je suis certain que nous serons nous-mêmes touchés par une crise bien plus grave que celle qui a suivi le conflit en Syrie et en Libye.

Nous devons à tout prix financer les agences des Nations Unies travaillant sur le terrain. Je profite une fois encore de cette occasion pour rappeler à tous comment a été traité l’afflux de réfugiés dans les camps du Liban, de Jordanie et de Turquie après l’éclatement de la guerre en Syrie. Nous avons fermé les yeux. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et les responsables du Programme alimentaire mondial n’ont obtenu le financement de leurs activités qu’à hauteur de 20 % ou 30 % de ce qu’ils demandaient. Naturellement, ils n’ont pas pu faire leur travail dans les camps : les réfugiés ont donc cherché à gagner l’Europe. Cela ne peut pas se reproduire. Il faut aussi aider ces gens là où ils vivent, ainsi que cette région en crise, sur la base des propositions du Président Macron inscrites dans sa vision de l’Europe.

S’agissant du nord de Chypre, il faut trouver une solution au problème. Je regrette profondément que les négociations soient au point mort. J’espère vivement qu’elles reprendront afin d’aboutir à une solution pour tous les habitants de Chypre, du nord comme du sud de l’île.

LA PRÉSIDENTE* – Nous en avons terminé avec les questions à M. le Secrétaire Général.

Monsieur Jagland, je vous remercie infiniment, au nom de l’Assemblée, du temps que vous nous avez accordé.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le premier tour de scrutin pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Géorgie est en cours. Il sera clos à 17 heures. J’invite ceux d’entre vous qui n’ont pas encore voté à le faire derrière la tribune présidentielle.

4. Suivi de la Résolution 1903 (2012):
la promotion et le renforcement de la transparence,
de la responsabilité et de l’intégrité des membres de l’Assemblée parlementaire

LA PRÉSIDENTE*– L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de M. Liddell-Grainger, au nom de la commission du Règlement sur le suivi de la Résolution 1903 (2012): la promotion et le renforcement de la transparence, de la responsabilité et de l’intégrité des membres de l’Assemblée parlementaire (Doc. 14407).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi matin, de limiter le temps de parole des orateurs à 3 minutes.

Je vous rappelle aussi que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 17h50. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 17h40, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. LIDDELL-GRAINGER (Royaume-Uni), rapporteur de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles* – Permettez-moi tout d’abord de vous féliciter, Madame la Présidente, pour votre élection.

J’aimerais, en premier lieu, remercier l’ensemble des personnels, les membres de l’Assemblée, les nations, les parlements et toutes les instances avec lesquelles nous avons eu des contacts dans la préparation de ce rapport. En particulier, je suis très reconnaissant à Mme Maury Pasquier pour le travail qu’elle a accompli au sein de la commission.

Ce rapport est le résultat de la situation dans laquelle nous nous sommes trouvés à l’Assemblée depuis quelques mois. Aussi, rien dans ce rapport n’a été facile à rédiger et nous espérons qu’il n’y aura plus besoin à l’avenir d’un rapport de ce genre.

À chaque étape, je me suis efforcé de recueillir les meilleurs éléments de contrôle au sein de différentes institutions. Je n’ai pas essayé de réinventer la roue, de mettre en place des mécanismes qui n’auraient jamais été essayés. Au contraire, nous avons voulu nous inspirer de ce qui a été fait de meilleur, non seulement en Europe mais dans le monde entier.

Ce rapport vise à nous protéger ainsi qu’à protéger les personnes que nous représentons dans l’Europe tout entière. Comme tous les parlementaires, nous avons le devoir d’agir au mieux pour représenter les gens dont nous sommes les élus. Dans nos relations avec les ONG ou avec les lobbyistes, ou lorsque nous nous entretenons avec des pays qui sont généreux, nous devons savoir très clairement ce que nous pouvons faire et ce que nous ne pouvons pas faire, quel est notre mandat.

En outre, j’ai fait en sorte que ce rapport ne soit pas un texte punitif. Nous sommes tous des êtres humains faillibles, moi le premier. Les personnes qui font des erreurs doivent être protégées: personne ne doit être considéré comme coupable tant qu’il n’y a pas de preuves de cette culpabilité.

Il faut avoir le plus possible d’autoréglementation, mais si nous ne pouvons pas régler un problème au sein du Conseil de l’Europe – même si j’espère qu’une telle situation ne se produira pas -, nous devons disposer d’un recours.

Vous aurez très probablement constaté que votre pays est cité dans le rapport car, comme je l’ai dit, j’ai essayé de m’inspirer d’exemples pris dans différents pays. Ainsi, nous avons proposé 9 recommandations, qui constituent l’essentiel du rapport. Cette liste n’est pas close; nous pouvons encore tenir compte d’idées nouvelles: les meilleurs rapports sont ceux qui sont discutés ouvertement.

Les paragraphes 3, 4 et 5 du projet de résolution ont pour objet d’assurer que les rapporteurs ou les présidents des commissions ne soient pas placés dans une situation qui serait embarrassante pour eux, pour un pays dans lequel ils se rendraient ou pour le Conseil de l’Europe. J’ai essayé d’atteindre un équilibre, de même que la plupart de nos pays ont des mesures qui permettent d’une manière ou d’une autre de préserver cet équilibre.

Il est également important que si l’on s’aperçoit que le président d’une commission n’a pas dit toute la vérité – là encore, j’espère que cette situation ne se produira pas –, il y ait une voie de recours – quelque chose qui soit humain. En effet, l’objectif ne doit pas être d’humilier qui que ce soit. Nous voulons simplement faire en sorte que chacun comprenne exactement ce qu’il peut faire et ce qu’il n’a pas le droit de faire.

Vous trouverez également, à la page 7 du rapport, la déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire. L’essentiel de ce texte est constitué par ces règles, jusqu’au paragraphe 6.c. Enfin, à la page 18, vous trouverez le texte sur la réglementation des activités des lobbyistes et les registres de transparence, question à laquelle nous avons très souvent à faire face en tant que parlementaires. Si vous avez des remarques sur ces points, je serai très heureux de les entendre.

Enfin, à la page 21, au titre nous abordons le rapport d’expertise du GRECO. Nous avons pris nos propres décisions, mais nous avons préféré nous entourer d’avis autorisés. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes tournés, entre autres, vers le GRECO.

Vous verrez aussi que ce rapport reflète la façon dont chacun des pays avec lesquels nous avons pris contact traite de ces questions de transparence. Si vous avez des questions sur ces passages du texte, là encore, je ferai de mon mieux pour y répondre.

Ce texte peut être révisé: rien n’est gravé dans le marbre, car il s’agit d’un travail en cours. Chaque pays, chaque nation, chaque parlement met à jour régulièrement ses règles sur la transparence, sur l’ouverture et les textes qui lui permettent de faire face à telle ou telle situation. Tous les cinq ans, probablement, il faudra revenir sur ce texte afin de s’assurer qu’il est à jour pour nous protéger et pour protéger ceux que nous représentons.

Madame la Présidente, je m’en tiendrai là afin d’entendre mes collègues et de répondre à leurs questions si je le puis.

LA PRÉSIDENTE* – Monsieur le rapporteur, il vous restera 6 minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

La discussion générale est ouverte.

Nous commençons par les porte-parole des groupes.

Mme GILLAN (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – La façon de promouvoir au mieux l’intégrité dans la vie publique continue d’être un défi pour toutes les démocraties ici représentées. Ce défi se pose également aux membres de l’Assemblée parlementaire qui devrait être l’un des organes les plus respectés à l’échelle internationale, étant donné son mandat en matière de justice. Que vous soyez responsable politique ou fonctionnaire, vous devez bénéficier de la confiance du public qui se reflète dans les résultats du scrutin. Pour cela, il est essentiel non seulement de disposer de mécanismes pour maintenir les plus hautes normes en matière d’intégrité, mais également de procédures garantissant la transparence. Il faut sanctionner tout comportement qui ne serait pas à la hauteur de ces normes.

Alors que l’environnement évolue très rapidement, le public demande de plus en plus d’informations sur les activités publiques de leurs représentants démocratiques. L’intégrité, la transparence et l’honnêteté sont inscrites dans des règles qui doivent évoluer. Sinon, nous nous trouverons dans une situation problématique, à l’échelle nationale mais aussi à l’échelle internationale.

Les membres du Groupe des conservateurs européens se félicitent de ce rapport et du projet de résolution présentés par le rapporteur, mon collègue et concitoyen. Ce rapport décrit des allégations de corruption ciblant des membres ou d’anciens membres de notre Assemblée de nature à porter atteinte à l’intégrité même des décisions prises. Il s’agit d’éléments fondamentaux.

Je souhaite chaleureusement la bienvenue à notre nouvelle Présidente. Je demande que des engagements soient pris en ce qui concerne la poursuite et la conclusion des enquêtes relatives aux allégations de corruption et autres pratiques répréhensibles concernant des membres ou d’anciens membres de l’Assemblée.

En outre, je souhaite la création d’un organisme de supervision permanent destiné à veiller à ce que le Code de conduite et les règles relatives à l’intégrité de l’Assemblée soient constamment actualisés afin de maintenir la confiance du public à l’égard de l’Organisation. Nous devons être sûrs que les sanctions applicables seront mises en œuvre en cas de violation avérée, pour éviter toute influence indue des groupes de pression.

Nous devons adopter le projet de résolution et mettre en place le plus rapidement possible un registre des lobbyistes et de leurs activités. Cette Organisation doit retrouver le bon chemin afin que tous, dans le monde, reconnaissent son rôle en matière de droits humains, de démocratie et de prééminence du droit.

Tournons définitivement la page, faisons un exemple, dans l’intérêt de tous les pays qui participent à cette Assemblée, et renforçons la réputation du Conseil de l’Europe!

M. Jordana, Vice-Président de l’Assemblée, remplace Mme Kyriakides au fauteuil présidentiel.

Mme RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Nous débattons aujourd’hui de ce rapport après des rumeurs, des scandales et différentes situations qui ont contribué à jeter le discrédit non seulement sur l’Assemblée parlementaire, mais également sur un certain nombre de parlements nationaux et internationaux. En tant que responsables politiques, nous sommes en ligne de mire, et les citoyens éprouvent une certaine défiance, ont le sentiment que nous sommes discrédités. Nous sommes tous suspects, indépendamment de ce que nous faisons. Nous devons donc œuvrer pour que tous les représentants soient propres, transparents et surtout loyaux vis-à-vis des citoyens. Sinon, nous faillirions vis-à-vis de tous les citoyens que nous représentons et défendons.

Après la crise économique qui a touché l’Europe et le monde entier, de nombreux cas de corruption ont été révélés. Ce n’est pas qu’il y en ait davantage, mais les citoyens en ont eu assez. Ils disent «ça suffit!», ces mauvaises habitudes qui étaient naguère acceptables ne le sont plus aujourd’hui. C’est un changement de culture d’ailleurs associé à l’émergence de mouvements séparatistes, nationalistes et populistes. Nous l’avons constaté dans une grande majorité de pays membres, au Parlement européen et au Conseil de l’Europe.

Le rapport nous invite à donner l’exemple, non seulement oralement et par écrit, mais en assumant nos responsabilités et en commençant à travailler sur les valeurs morales et éthiques. Nous devons promouvoir la transparence. Sans transparence, pas de crédibilité, et sans crédibilité, pas de vie politique saine. Nous devons dire aux citoyens que nous n’avons rien à cacher et que nous faisons notre travail de manière loyale et libre.

Le groupe politique que je représente, mon parti et moi-même, sommes non seulement convaincus que la transparence et la crédibilité doivent revenir dans la vie politique, mais que c’est aussi la seule façon de faire en sorte que les responsables politiques et leur travail soient de nouveau respectés. La confiance est essentielle pour restaurer la crédibilité, non seulement dans notre Assemblée, mais aussi dans toutes les autres assemblées que nous représentons ici.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je regrette que notre Présidente ne soit plus là, car j’aurais pu la féliciter de vive voix. Avec l’élection de Mme Kyriakides, nous mettons fin à un triste épisode de l’histoire de l’Assemblée. J’espère que l’élection de Stella marquera le début d’une phase plus positive. En tout cas, elle pourra compter sur le soutien de mon groupe.

Cette année, nous avons décidé de l’ouverture d’une enquête indépendante compte tenu des soupçons de corruption pesant sur certains. Cette enquête en cours était nécessaire parce que nous n’avons pas de structure nous permettant de faire le ménage par nous-mêmes. Avec le rapport de M. Liddell-Grainger, que je félicite pour son travail, nous disposons désormais des instruments nécessaires afin qu’en cas de problème, nous ayons la possibilité de réaliser une enquête honorable et efficace. Je le félicite pour la rédaction de son rapport et pour la méthode appliquée. Aucun amendement n’a été déposé grâce à la qualité des discussions en commission. Chacun a pu soumettre des propositions, les voir incluses dans le texte et apprécier s’il était opportun de modifier le texte ou non.

Il est ainsi proposé d’améliorer le Code de conduite. Certes, cela n’empêchera pas certains de faire ce qu’ils ne devraient pas faire, mais chacun, à l’Assemblée comme dans les parlements nationaux, doit assumer ses responsabilités. Avec ce texte, nous aurons un outil plus moderne, plus approprié à nos besoins. Tous les membres sauront qu’ils ont à répondre de leurs actes s’ils ne font pas ce qu’ils sont censés faire ici ou ailleurs, et c’est le plus important.

Le fait que cette Assemblée ait pu être la cible de forces extérieures qui ont cherché à peser sur ses décisions est source de préoccupation et devrait l’être pour nous tous. Toutefois, cela montre bien la pertinence de notre Assemblée, qui a été ciblée parce qu’elle prend des décisions fortes. N’allons pas jusqu’à le prendre pour un compliment, mais sachons que nous sommes capables de nous moderniser. Je vous félicite, Monsieur le rapporteur.

M. DIVINA (Italie), porte-parole du Groupe des démocrates libres* – Nous tenons tout d’abord à féliciter notre nouvelle Présidente. Le Groupe des démocrates libres est un nouveau groupe. Nous avons déposé tous les documents nécessaires le 29 juin et nous pouvons aujourd’hui nous exprimer officiellement pour la première fois en séance plénière. Nous attendons encore de pouvoir bénéficier de tous nos droits et nous comptons pour cela sur l’appui de notre nouvelle Présidente.

J’en viens au thème qui nous occupe. Personne ici ne peut se prononcer contre la nécessité d’assurer la transparence du comportement des politiques. Cependant, nous vivons un moment très particulier où la classe politique est sous le feu des projecteurs, pour le meilleur comme pour le pire. Il y a une sorte de désaffection générale à l’encontre de la classe politique et un climat de chasse aux sorcières. Il ne faudrait pas, avec les meilleures intentions, aboutir à un résultat contraire à celui escompté. La chasse aux sorcières crée parfois des troubles. On parle de moralisation de masse, mais il y a surtout une énorme défiance à l’égard de la classe politique en général.

Mais nous ne partons pas de zéro. Chaque État s’est doté de règles pour combattre les comportements illégaux, qui peuvent d’ailleurs constituer des infractions pénales, ne l’oublions pas.

Attention, par ailleurs, aux excès de zèle: certains cas, au sein de notre Assemblée, ont déjà fait l’objet de procédures devant des tribunaux nationaux; ne lançons pas d’enquêtes sur les affaires qui sont déjà en cours d’investigation. Un Code de conduite déontologique, d’accord, mais essayons de préserver la dignité des institutions. Tout n’est pas pourri, et il n’est peut-être pas nécessaire de tout contrôler dans les moindres détails. Il faut faire preuve d’une certaine modération.

Ainsi, nous frôlons le ridicule avec cette obligation pour chacun d’entre nous de publier sur le site internet de l’Assemblée parlementaire les dons que nous avons reçus. Cette déclaration pourrait d’ailleurs être instrumentalisée: quelqu’un pourrait vouloir ironiser sur le nombre de bouteilles de vin reçues par le Président de l’Assemblée à Noël. Il vaudrait mieux éviter cela. De même, en publiant la liste des personnes entendues lors de l’élaboration d’un rapport, on risque de jeter le doute sur le travail effectué et sur la qualité du rapport.

Certes, nous devons nous inspirer des bonnes pratiques pour assurer à notre Assemblée et à ses membres davantage de dignité, mais adopter un Code de conduite va finalement semer le doute sur les agissements de chaque homme ou femme politique: c’est peut-être un piège dans lequel il ne faut pas tomber. Ne péchons pas par excès d’esprit juridique.

Mme OOMEN-RUIJTEN (Pays-Bas), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Au nom du Groupe du Parti populaire européen, je souhaite tout d’abord féliciter la nouvelle Présidente. Je suis convaincue qu’au cours des trois prochains mois, elle procédera aux changements nécessaires pour redorer l’image ternie de notre institution.

Cette année, c’est avec une grande tristesse que nous avons vu l’intégrité et la transparence de certains membres remises en cause, touchant ainsi l’ensemble de l’Organisation. La démission forcée de notre ancien président et de plusieurs autres membres, puis l’élection d’une nouvelle présidente, pourraient nous laisser penser que nous avons franchi les obstacles les plus importants. Mais, si ces mesures devaient être prises, elles ne marquent que le début de la réflexion que nous devons mener sur notre Organisation. Pourquoi l’Assemblée existe-t-elle? Pourquoi nos parlements nationaux nous ont-ils envoyés ici?

L’ensemble des membres du Groupe du Parti populaire européen se félicitent du rapport de notre collègue M. Liddell-Grainger. Il y décrit les mesures nécessaires au renforcement de la crédibilité de notre Assemblée et met l’accent sur l’importance de l’intégrité et des obligations redditionnelles. Nous approuvons pleinement les mesures proposées. En outre, il nous appartient à tous, individuellement, de nous assurer que nous sommes en totale conformité avec les objectifs du Conseil de l’Europe.

Si l’on veut s’assurer qu’à l’avenir, tous nos citoyens puissent retirer les bénéfices du Conseil de l’Europe et de son Assemblée parlementaire, qui promeuvent la démocratie, les droits de l’homme et la prééminence du droit, nous devons réfléchir à de nouvelles normes qui mettront davantage l’accent sur le comportement et l’obligation redditionnelle de chacun de nous.

M. NICOLETTI (Italie), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – J’aimerais à mon tour, et au nom de mon groupe, féliciter la nouvelle Présidente de l’Assemblée, Mme Kyriakides. Nous avons apprécié son intervention en début de partie de session. Je lui souhaite un bon travail et l’assure de la coopération loyale de notre groupe politique.

J’aimerais remercier de tout cœur M. Liddell-Grainger ainsi que toute la commission pour leur excellent rapport. Celui-ci ne se contente pas d’émettre quelques recommandations, il contient également des décisions qui pourraient entrer immédiatement en vigueur si la résolution était adoptée. C’est très important car en adoptant ce rapport ici, aujourd’hui, nous apportons non seulement une réponse immédiate à la situation – que je qualifierais de critique – vécue par notre Assemblée, mais nous corrigeons également un défaut. En effet, en tant qu’Assemblée parlementaire, nous nous trouvions dans une situation pour le moins étrange: nous donnions des leçons de transparence et d’intégrité à nos parlements nationaux, alors que nous-mêmes ne disposions que d’instruments modestes pour garantir ces valeurs au sein même de notre Organisation. Nous aurons donc enfin un instrument sérieux à utiliser en cas de difficultés ponctuelles, comme nous avons pu en rencontrer ces derniers mois.

J’apprécie beaucoup le travail qui a été fait, car si les parlements nationaux disposent d’un règlement intérieur national, nous aurons ici un texte international, résultat d’une comparaison et d’une inspiration de nombreux textes nationaux. Nous aurons donc un véritable modèle.

Nous sommes confrontés à des phénomènes qui évoluent avec le temps, et nous savons que les mesures adoptées présenteront, par définition, un caractère expérimental. Pendant quelque temps, peut-être aurons-nous à les appliquer, peut-être pas. Nous devons être bien clairs sur les principes fondamentaux que sont la transparence, la lutte contre les conflits d’intérêts et l’impartialité.

En ce qui concerne les cadeaux, je pense que la mesure proposée est importante, ne serait-ce que d’un point de vue psychologique: beaucoup de personnes ne voient pas ou ne comprennent pas les risques qui découlent d’une situation donnée. Il s’agit ici de faire un rappel aux devoirs qui s’imposent à chacun d’entre nous: faire notre travail et nous acquitter de nos obligations politiques sans subir aucune influence, quelle qu’elle soit.

Pour conclure, je pense qu’il nous faudra réfléchir également à la question des groupes de pression. Après ce qui s’est passé, peut-être devrions-nous nous montrer encore plus rigoureux au sein de cette maison. Peut-être devrions-nous également nous rappeler cette citation latine: Leges sine morebus vanae; autrement dit, les lois sont vaines sans morale.

Avec l’excellent texte que nous approuverons aujourd’hui, nous devrions surmonter toutes les difficultés.

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, le premier tour de scrutin pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Géorgie est désormais clos. J’invite les quatre scrutateurs à se présenter dans la rotonde pour procéder au dépouillement.

J’espère pouvoir vous communiquer les résultats du scrutin à la fin du débat en cours, que nous reprenons.

Mme DURANTON (France) – Je tiens à féliciter sincèrement notre Présidente pour son élection et je suis fière qu’une femme soit à la tête de cette noble Assemblée; je connais la rigueur et l’intégrité des femmes.

Notre Assemblée doit retrouver sa noblesse, car elle a été récemment confrontée à de trop nombreuses allégations de corruption et de promotion d’intérêts. Certains de nos collègues ont été mis en cause. Cette situation porte un préjudice immense à notre Assemblée, et je le regrette.

Je rappelle que notre rôle est de promouvoir les droits de l’homme et la démocratie. Or, pour ce faire, nous ne disposons pas de moyens militaires – et nos moyens financiers sont faibles. Notre action repose uniquement sur notre capacité à convaincre nos interlocuteurs que nous travaillons à l’intérêt général. Notre force est morale et toute remise en cause de notre bonne foi contribue à saper l’autorité de notre institution. Il est donc nécessaire d’agir au plus vite pour rétablir la confiance. À cet égard, le rapport de M. Liddell-Grainger va dans le bon sens. Je le félicite pour son excellent travail.

Les conclusions du groupe d’enquête externe, dont les membres ont toute la confiance de notre Assemblée, devront permettre de faire la lumière sur les différentes allégations de corruption. Notre Assemblée devra être en mesure de réagir rapidement et de prendre les décisions qui s’imposent, dès janvier 2018 si possible.

Les préconisations contenues dans la proposition de résolution qui nous est soumise aujourd’hui doivent être mises en œuvre rapidement, pour bien montrer que notre Assemblée n’entend laisser aucune place à la corruption. Je voterai donc ce texte qui me semble aujourd’hui indispensable.

En effet, il est nécessaire de prévenir les conflits d’intérêts en renforçant la transparence. Demander aux candidats à une fonction de rapporteur de déclarer tout intérêt en rapport avec le sujet ou le pays concernés me semble très pertinent. Par ailleurs, le renforcement des sanctions qui pourront être prises au sein de notre Assemblée permettra une action plus efficace en cas d’infraction. Enfin, l’encadrement des activités des représentants d’intérêts au sein des locaux du Conseil de l’Europe devra permettre de créer un registre conduisant à identifier ces personnes.

Toutefois, il ne faut pas oublier le rôle des parlements nationaux, dont certains ont renforcé leurs règles internes – c’est le cas de la France, notamment. En effet, ce sont eux qui décident quels parlementaires siègent au sein de notre Assemblée. Il serait intéressant que notre Assemblée informe les parlements nationaux lorsqu’elle constate des violations sérieuses du Code de conduite. En outre, chacun de nous doit se sentir concerné par les agissements des membres de nos délégations respectives. Il y va de la crédibilité de notre institution et donc de son avenir. À un moment où les valeurs que nous défendons sont remises en cause, parfois au sein même de l’Union européenne, notre Assemblée ne doit faire l’objet d’aucun soupçon.

M. RUSTAMYAN (Arménie) – Tout d’abord, je veux féliciter notre rapporteur pour son excellent travail. Ce rapport est vraiment le début d’une réforme interne de notre Assemblée très importante et nécessaire.

Effectivement, les allégations de corruption se sont multipliées ces derniers temps dans notre Assemblée et ont mis en cause la crédibilité des actions et des positions de l’Organisation. Le risque est réel de voir sa réputation se dégrader d’une manière irréversible. Or notre Assemblée est appelée à promouvoir les valeurs communes des États membres par un processus parlementaire suffisamment indépendant, impartial et objectif.

Il n’est que trop évident que notre Organisation est vulnérable face à la corruption et à la promotion d’intérêts touchant certains membres ou anciens membres de l’Assemblée. Nous avons donc besoin de réformes profondes, d’une sorte d’hygiène publique de l’Organisation. Ce rapport va établir une stratégie appropriée afin de prévenir la corruption et d’éradiquer cette pratique dégradante installée dans notre Organisation.

D’ores et déjà, un groupe d’enquête externe indépendant a été créé par l’Assemblée afin de mener une enquête indépendante approfondie sur les allégations de corruption et de promotion d’intérêts portées à l’encontre de certains membres ou anciens membres de notre Assemblée. Un code d’intégrité solide et cohérent avec les normes du GRECO – le Groupe d’États contre la corruption – va être mis en place au sein de l’Assemblée, définissant de nouvelles règles de conduite et des obligations déclaratives afin de prévenir les actes de corruption, tout en révisant la liste des sanctions.

L’Assemblée va contrôler plus strictement le lobbying et la circulation des tiers dans les locaux du Conseil de l’Europe. Elle a décidé également de renforcer la cohérence des dispositions relatives aux conflits d’intérêts. Il est très important de renforcer le devoir de responsabilité et de transparence des rapporteurs de l’Assemblée. Par exemple, si un rapporteur a omis de déclarer certains intérêts en rapport avec le sujet dont il traite ou s’il a fait une fausse déclaration, la commission le démettra de ses fonctions.

Toutefois, je veux appeler votre attention sur un problème qui se pose à ce sujet: concrètement, que va-t-il se passer si le non-respect des engagements d’un rapporteur était avéré après l’adoption de son rapport par l’Assemblée? Certes, on peut le sanctionner en tant que membre de l’Assemblée, mais le rapport qu’il a préparé et défendu figurera déjà parmi les autres documents officiels de l’Assemblée, ce qui n’est en aucun cas acceptable. Je vous invite donc, chers collègues, à régler ce problème: pourquoi ne pourrait-on pas annuler ou refaire un tel rapport?

Mme HOVHANNISYAN (Arménie)* – J’aimerais d’abord féliciter Mme Kyriakides pour son élection. Je lui souhaite plein succès dans ses nouvelles fonctions.

Je voudrais exprimer toute ma reconnaissance à M. Liddell-Grainger pour son rapport détaillé et très important.

L’un des principes essentiels de notre activité est bien sûr la responsabilité publique, qui exige que les membres de l’Assemblée agissent en toute transparence, conformément aux devoirs et responsabilités liés à leur engagement. En cas d’infraction, il faut qu’il existe un certain nombre de mécanismes permettant d’assurer le respect des règles. À cet égard, les récentes allégations de corruption montrent que les dispositifs en vigueur ne suffisent pas et qu’il y a donc lieu de prendre de nouvelles mesures pour veiller au respect de nos valeurs fondamentales.

Je dois dire que je suis un peu déçue que notre Assemblée se trouve contrainte de prendre ces mesures drastiques, mais nous savons bien que, compte tenu de la situation actuelle, nous n’avons pas le choix. Des modifications du Règlement et du Code de conduite sont objectivement nécessaires. Je me félicite de l’initiative qui vise à renforcer les sanctions en cas de manquement au Code de conduite. Je suis persuadée que, si l’un ou l’autre d’entre nous enfreint ce Code, il doit être privé du droit de prendre la parole ou – ce qui est encore plus important – d’être rapporteur.

Cela dit, j’aimerais poser les questions suivantes: comment faut-il agir lorsque l’un de nos rapporteurs se trouve impliqué dans un scandale de corruption et qu’il est poursuivi par les instances judiciaires de son propre pays? Pouvons-nous faire confiance à un rapporteur, pouvons-nous considérer qu’il est impartial s’il vient d’un pays où des scandales liés au blanchiment d’argent se sont produits? Comment devons-nous envisager les rapports et projets de résolution ou de recommandation rédigés par de telles personnes?

Nous tenons compte, bien sûr, de la personnalité des rapporteurs lorsque nous adoptons un projet de résolution ou de recommandation, et nous attachons une importance particulière à sa déclaration d’absence de tout conflit d’intérêts. Nous faisons confiance au rapporteur pour qu’il soit impartial. Mais le simple fait qu’un rapporteur ait annoncé qu’il n’y avait pas de conflit d’intérêts est-il suffisant pour que nous lui fassions confiance? Par ailleurs, il faut reconnaître que, si un rapporteur a été mêlé à une violation du Code de conduite, il est très difficile de prendre au sérieux les projets de résolution et de recommandation qu’il a proposés.

Ainsi, si nous prenons le cas d’Alain Destexhe, chacun sait qu’il a des relations, des connexions particulières. Il est déjà rapporteur pour un pays particulier. Comment être sûr que les conclusions et les recommandations des projets de résolution qu’il a présentés sont admissibles? En l’occurrence, nous avons constaté le conflit d’intérêts avant le vote mais, quand un rapport a déjà été adopté, peut-être faudrait-il nous doter d’un mécanisme pour traiter de cette question? Cela me paraît indispensable pour la crédibilité de notre Assemblée.

LE PRÉSIDENT – M. Gutiérrez, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme ANTTILA (Finlande)* – Permettez-moi, avant de commencer, d’adresser toutes mes félicitations à notre nouvelle Présidente, Mme Kyriakides.

Je remercie M. Liddell-Grainger pour son excellent rapport et pour la présentation qu’il a faite sur ce sujet ô combien important. Je souhaiterais à mon tour soulever un certain nombre de points concernant ce rapport.

Le Conseil de l’Europe et ses différents organes sont exposés à l’influence de différents intérêts économiques car son mandat relatif aux droits de l’homme, à l’État de droit et à la démocratie peut avoir des conséquences économiques.

Les dernières allégations de corruption ont remis en question la crédibilité des actions de l’Assemblée. Il a donc fallu réaffirmer la transparence et l’obligation redditionnelle de déclaration. Ces allégations ont sapé l’intégrité de l’Assemblée. Il est donc essentiel de restaurer la confiance du public vis-à-vis de notre institution parlementaire.

Je crois nécessaire, comme le rapporteur, de mettre en place un registre de transparence et d’interdire aux anciens membres de participer à des activités de conseil rémunérées. Il faut œuvrer pour la transparence et prévenir les conflits d’intérêts. Pour ce faire, nous devons améliorer la gouvernance et lutter contre la corruption politique comme le recommande le GRECO, le bras anticorruption du Conseil de l’Europe.

Ces dix dernières années, l’Assemblée a adopté différentes règles relatives au comportement de ses membres. Parmi celles-ci, je citerai notamment la publication obligatoire des cadeaux reçus au titre de membre de l’Assemblée. Par ailleurs, même si une personne a joué un rôle clé dans la promotion de la réglementation, il n’en demeure pas moins que ce n’est pas suffisant pour les membres de l’Assemblée parlementaire. L’Assemblée doit sensibiliser davantage ses membres aux règles de conduite. Elle n’est pas exempte de corruption. C’est la raison pour laquelle il est extrêmement important que nous ayons aujourd’hui cette discussion ouverte sur le sujet.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – Depuis longtemps circulent des rumeurs – d’aucuns disent que ce sont même plus que des rumeurs – à propos d’actes de corruption parmi les membres de l’Assemblée. Vraies ou non, ces rumeurs portent tort au travail de notre Assemblée et de nos parlements nationaux, qui œuvrent ensemble pour tous ceux qui souffrent de violations des droits de l’homme, de l’absence de démocratie ou de violations de l’État de droit.

À plusieurs reprises, nous avons adopté des résolutions et des recommandations soulignant l’importance de la lutte contre la corruption dans nos États membres. La corruption qui peut régner parmi les élus, les juges, les médias et les hommes d’affaires, est un obstacle important pour une démocratie prospère et stable. Lutter contre la corruption est donc la seule manière de construire une véritable confiance en nos institutions, même si la tâche n’est certainement pas aisée dans les pays où la corruption fait partie intégrante du système. Mais le travail doit néanmoins être fait.

Le Conseil de l’Europe dispose d’instruments susceptibles d’aider les États membres dans leurs efforts, mais uniquement si notre Organisation est digne de confiance. Si nous ne sommes pas dignes de confiance parce que les États membres cherchent à influencer le contenu de nos résolutions et recommandations en offrant de l’argent ou d’autres avantages à des membres peu scrupuleux de l’Assemblée, cela devient un problème. J’espère que nous ne comptons pas de membres malhonnêtes parmi nous, mais il serait naïf de croire que c’est impensable, d’autant que nous savons que la corruption est endémique dans certains États membres et que nous observons également des cas de corruption dans des pays qui sont, eux, plutôt connus pour leur transparence et leur intégrité.

Je suis donc très satisfaite de la création d’une instance d’investigation indépendante qui, je l’espère, révèlera tout réseau occulte. Cela devrait nous permettre de prendre un nouveau départ. Je me félicite également des mécanismes et des sanctions suggérés dans le rapport, ainsi que des restrictions à la présence de groupes de pression ici, dans ce bâtiment, surtout s’agissant d’anciens membres de l’Assemblée. Nous ne pouvons pas nous permettre que quelqu’un transforme le Conseil de l’Europe en une institution dont on retire des avantages personnels. Les Européens méritent mieux!

LE PRÉSIDENT – M. Mullen, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. SCHWABE (Allemagne)* – M. Fischer, président du Groupe du Parti populaire européen, en évoquant le fait que deux candidats du PPE se sont présentés aux élections, parlait de progrès. Je le pense aussi. L’autre candidat était un bon candidat, mais Mme Kyriakides sera certainement une excellente présidente, capable de rétablir la confiance en notre Assemblée. Je la félicite donc pour sa victoire.

Je tiens à remercier M. Liddell-Grainger et tous ceux qui ont œuvré pour l’élaboration de ce rapport. Nous devons être conscients que nous traversons une phase historique. Nous réaliserons plus tard combien elle a été importante.

Nous avons constaté que des réseaux s’activaient à protéger des régimes autoritaires, ce qui est déjà très grave, mais qu’il y avait également eu des cas de corruption. Je considère pour ma part que, si nous ne sommes pas capables de faire la clarté sur ces incidents et de nous doter des règles nécessaires, nous perdrons toute crédibilité et toute possibilité de critiquer quelque État que ce soit. Ces règles, que nous n’avions pas jusqu’ici, nous manquent cruellement aujourd’hui.

Confrontés aux allégations de corruption portées contre M. Destexhe, qui n’est plus membre de notre Assemblée, je ne sais pas très bien comment nous allons aborder cette question. Mais je pourrais également citer le cas de la parlementaire allemande, Mme Strenz, à laquelle il est aussi reproché des faits de corruption. Pourtant, lors de l’observation des élections en Azerbaïdjan en 2015, elle a dû faire une déclaration d’absence de conflit d’intérêts, du moins je l’imagine. Néanmoins, nous avons appris qu’à la fin de 2014 et au début de 2015, elle avait reçu entre 14 000 euros et 30 000 euros de l’Azerbaïdjan. Ces déclarations étaient donc un mensonge, acté et signé. Je ne sais comment nous pourrions sanctionner cela avec les textes dont nous disposons actuellement. C’est la raison pour laquelle toutes les dispositions présentées dans ce rapport sont si importantes: elles constituent une première étape.

J’aimerais nous mettre en garde également sur une question délicate. Nous devons éviter de nous renvoyer la balle sur la question de savoir qui est compétent et à quel moment entre les parlements nationaux et l’Assemblée parlementaire. Certains, en Allemagne, me disent que c’est à l’Assemblée parlementaire de le faire. D’autres – et surtout ici, à Strasbourg – pensent que c’est au Bundestag. Se renvoyer la balle n’est pas la solution, mais je suis conscient du défi que cela représente pour tout le monde.

Enfin, je dirai qu’il n’est pas ridicule de devoir déclarer avoir reçu des cadeaux. Je ne suis pas contre les groupes de pression, ils existent et existeront toujours. Mais nous avons besoin d’une pleine transparence, ne serait-ce que pour protéger nos collègues. Certains, en effet, ne savent pas s’ils peuvent accepter un cadeau et se retrouvent suspectés d’indélicatesse.

M. Vusal HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – J’aimerais à mon tour féliciter notre nouvelle Présidente, lui souhaiter un plein succès et remercier le rapporteur pour son excellent rapport qui vise à renforcer la crédibilité et l’intégrité de notre Assemblée. Il ne fait aucun doute que nous, parlementaires, devons être liés par des règles de conduite adaptées qui puissent régir et prévenir des situations indésirables.

Je voudrais aborder un passage précis du rapport qui traite des allégations provenant de sources ouvertes. Malheureusement, et nonobstant les affaires dans d’autres États membres, ce rapport n’évoque qu’un seul pays, ce qui est contraire au principe d’objectivité – surtout si l’on tient compte du thème traité.

Les allégations de sources ouvertes peuvent être un instrument très dangereux: elles peuvent être manipulées et utilisées à des fins de propagande. Les réactions à de telles informations, non seulement perturbent notre activité, mais nuisent à la réputation de notre Assemblée. Je me félicite donc des amendements proposés qui protègent la confidentialité de l’enquête dans un premier temps.

Mais nous devons également faire preuve de solidarité et nous soucier de la crédibilité de notre Organisation. Outre les différents éléments proposés dans les amendements, un système de contrepoids est nécessaire: ceux qui affirment qu’un membre de cette Assemblée s’est mal conduit ou s’est rendu coupable d’un certain nombre de faits, doivent être en mesure de le prouver et en assumer la responsabilité. Si nous voulons réformer le Règlement de l’Assemblée, nous devons avancer en ce sens.

L’Azerbaïdjan est un exemple de la façon dont ces informations en sources ouvertes peuvent être utilisées. J’invite tous les membres de cette Assemblée à se fier à des sources vérifiées.

Mme ZOHRABYAN (Arménie) – M. Liddell-Grainger traite dans son rapport d’une question très importante, qui demande des mesures d’urgence. Je déplore que nous en soyons arrivés là, que la maison de la démocratie soit contrainte d’amender son Code de conduite pour lutter contre des problèmes aussi graves que ceux posés par les pratiques des lobbyistes corrompus ou encore les atteintes morales et éthiques à nos normes.

Cette crise me fait penser à un autre scandale: celui de la mise à jour d’un réseau de blanchiment d’argent – 3 milliards de dollars – d’une étendue paneuropéenne, qui menace les valeurs et la crédibilité de notre Organisation auprès des 850 millions d’habitants de ses États membres. Le rapporteur a raison d’affirmer que les allégations de corruption concernant les anciens et actuels membres de notre Assemblée mettent en cause sa réputation, ainsi que celle du Conseil de l’Europe.

L’intégrité et les idéaux d’un certain nombre de parlementaires ont succombé devant les bakchich de plusieurs milliers, voire millions de dollars. Parmi les rapports adoptés ou rejetés au sein de cette Assemblée, certains étaient commandités, d’une façon déplorable, pour redorer l’image consternante d’un État en matière de démocratie et de droits de l’homme, au moyen de la diplomatie du caviar. Ceux qui sont accros aux pétrodollars ternissent la réputation de notre Assemblée!

Il est impératif que nous réglementions d’une façon stricte l’activité des lobbyistes ayant un statut de soi-disant «free lancers», qui bénéficient d’avantages considérables de la part des régimes autocratiques et qui gangrènent notre Assemblée par leur travail illicite.

Parmi ces mercenaires, nous comptons d’anciens membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, qui font la une des médias internationaux les plus réputés. Ces personnes ne devraient plus pouvoir accéder à cette Assemblée.

Chers collègues, les amendements proposés par le rapporteur doivent être adoptés d’urgence. L’avis du GRECO est également utile et apporte une valeur ajoutée à nos débats.

J’estime cependant, une fois le Code de conduite amendé, qu’il conviendra de rester vigilants et d’écarter les rapporteurs de mauvaise foi, et ce pour garantir la pertinence des rapports qui débouchent sur des résolutions et des recommandations.

La commission d’enquête composée d’experts indépendants qui présentera son rapport en fin d’année a elle aussi une mission importante à accomplir. Restons solidaires et vigilants pour protéger l’intégrité de notre maison!

M. HOLLIK (Hongrie)* – Je salue ce rapport relatif à la transparence, la responsabilité et l’intégrité des membres de l’Assemblée parlementaire. Il s’agit d’une réponse appropriée et opportune aux événements récents qui ont jeté une ombre sur la crédibilité de notre institution.

Nous sommes convaincus que les seuls moyens juridiques ne sont pas suffisants pour faire face à ce phénomène: il est également nécessaire d’élaborer des règles morales et éthiques pour pouvoir réagir de façon efficace et réelle aux allégations de corruption.

Le Gouvernement hongrois a adopté une politique de tolérance zéro s’agissant de toutes les formes de corruption. Nous cherchons à enquêter sur tous les cas, de sorte que personne ne soit exempt d’éventuelles conséquences. Si l’on tient compte de ce qui a déjà été fait par l’Assemblée, et notamment de la création de l’organe d’enquête externe, l’adoption d’un cadre d’intégrité solide et cohérent, l’assistance du GRECO, l’adoption de nouvelles règles de conduite et l’obligation de déclaration pour prévenir les comportements corrompus, seront de précieux instruments pour atteindre le principal objectif, à savoir l’éradication de la corruption.

Je félicite M. Liddell-Grainger pour son projet de résolution, auquel nous souscrivons pleinement.

Mme CHUGOSHVILI (Géorgie)* – Les allégations de corruption contre des membres ou d’anciens membres de l’Assemblée pèsent lourdement sur la crédibilité de celle-ci. Je représente un pays qui a beaucoup de respect pour les aspirations et les valeurs du Conseil de l’Europe. Dans mon pays, beaucoup travaillent très dur pour appliquer ses principes. La réputation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe est très importante, pour l’Assemblée elle-même, mais aussi pour les pays comme le mien et pour le travail qui est le nôtre. L’Assemblée parlementaire devrait être un phare, un exemple pour tous ceux qui partagent ses aspirations. Ces allégations de corruption mettent en péril tous nos efforts.

La proposition de résolution fixe de nouvelles règles de transparence, conformes aux meilleures pratiques internationales. La Géorgie est présidente du Partenariat pour un gouvernement ouvert et défend les parlements ouverts. Nous sommes favorables à la transparence et nous sommes heureux que les normes soient, ici aussi, renforcées grâce à la mise en œuvre des recommandations. Ce processus donnera un exemple pour de nouvelles générations. Nous espérons que l’Assemblée parlementaire en sortira renforcée et que nous continuerons à servir d’exemple moral.

M. GOLUB (Ukraine) – Le monde actuel est traversé de nouveaux défis avec les agressions venant de certains pays, du terrorisme international et de groupes de lobbyistes. La question de la transparence, de la responsabilité et de l’unité de l’Assemblée parlementaire est plus que jamais d’actualité. Nous observons la formation d’un nouvel ordre mondial. De nouvelles règles du jeu voient le jour. C’est à nous de choisir si nous voulons être des observateurs extérieurs de ce processus ou des participants actifs. La démocratie et l’unité finissent là où la corruption commence. Certains intérêts égoïstes l’emportent sur la volonté conjointe de la communauté internationale d’agir conformément aux valeurs et aux principes de la civilisation occidentale.

Aujourd’hui comme jamais auparavant, la corruption politique se distingue très nettement comme facteur de conflits entre les États, d’apathie sociale et de déstabilisation du travail des organisations internationales et régionales. Des intentions agressives et néo-impérialistes poussent certains pays à utiliser tant des armes militaires, que des armes de corruption politique. Aujourd’hui, pour les adversaires de la démocratie, les armes de corruption politique peuvent être plus efficaces encore que les armes militaires.

Je suis convaincu que, dans de telles conditions, l’Assemblée parlementaire est obligée de prendre les devants et de réagir efficacement aux menaces existantes. Nous devons, non seulement par nos paroles, mais aussi par nos actions communes, montrer notre volonté de vivre et de travailler dans un espace unique, responsable et ouvert à la démocratie.

Il est nécessaire que tous les membres de l’Assemblée parlementaire respectent parfaitement la Résolution 1903(2012) et son annexe. Par ailleurs, nous devons continuer à travailler sur de nouveaux mécanismes, pour protéger l’Assemblée parlementaire contre les manifestations de la corruption politique dans l’intérêt de certains groupes et États. Je suis profondément convaincu que de tels mécanismes doivent se baser sur les trois actions suivantes: infliger des pénalités sévères, ignorer les demandes et les besoins des politiciens corrompus, et débattre publiquement des manifestations de la corruption politique.

Notre force est dans notre ouverture et dans notre unité. Ce sont ces armes que nous devons utiliser pour lutter contre la corruption politique des pays et des groupes agressifs qui ne veulent pas défendre la démocratie. Les politiciens corrompus ne poursuivent qu’un seul but, celui de tirer profit de la démocratie et de montrer sa faiblesse. Nous devons prouver que la démocratie est une force: la force des valeurs et de la responsabilité.

Mme NAGHDALYAN (Arménie)* – Cette journée est importante dans la vie de notre Assemblée. Je tiens à féliciter Mme Kyriakides pour cette importante victoire, la victoire d’une responsable politique honnête. Le premier message de la nouvelle Présidente de l’Assemblée parlementaire a été d’affirmer qu’elle lutterait résolument contre la corruption.

Je félicite notre rapporteur pour son excellent travail: il s’agit de combattre des réalités qui ont été celles de notre Assemblée ces dernières années, en raison du manque d’honnêteté et des agissements de certaines personnes. Notre Assemblée a connu une situation extrêmement inconfortable. La légitimité de ses actes et sa fiabilité politique ont été remises en question.

Compte tenu du risque de porter atteinte à la réputation de l’Assemblée, une stratégie globale a été mise en place ces derniers mois pour nous préserver de la corruption et révéler des pratiques discutables. Maison paneuropéenne de la démocratie, elle doit avoir la force de suivre cette voie plus avant. Nous nous félicitons que les représentants de tous les groupes politiques et des délégations aient considéré qu’il était de leur devoir de contribuer à l’identification et l’éradication de ces agissements qui n’ont pas leur place au sein de la famille démocratique européenne.

L’Assemblée a souhaité mener une enquête concernant des allégations de corruption à l’encontre de certains de ses membres ou anciens membres. À cette fin, elle a créé un organisme d’enquête indépendant et externe. Il a fallu ensuite définir un cadre d’intégrité solide et cohérent, en recueillant les conseils du GRECO.

Ce rapport examine plusieurs questions importantes: le Code de conduite, les suggestions relatives aux conflits d’intérêts, les sanctions, la transparence des activités de lobbying et celles des membres honoraires, etc. Il faut aussi aborder la question des rapports rédigés par les personnes corrompues. Cette question n’est pas réglée. Nous ne devons pas oublier la façon dont ces rapports ont été préparés. J’espère que ce rapport et les mesures préconisées nous permettront de rétablir la respectabilité de notre Assemblée.

Mme SCHOU (Norvège)* – J’adresse mes félicitations à notre nouvelle Présidente. Je suis très satisfaite de son élection et je lui souhaite tout le succès possible dans sa nouvelle fonction. Le rapport ici examiné est opportun, rigoureux et nécessaire. Je souhaite féliciter M. Liddell-Grainger pour la façon dont il a su naviguer dans les eaux troubles que nous connaissons actuellement. Grâce à l’adoption de la résolution proposée, notre Assemblée sera mieux à même d’éviter les écueils.

Le travail sur ce rapport a commencé avant cette crise liée à la corruption. Le processus qui mène au vote d’aujourd’hui n’a pas été déterminé par la crise, mais par la volonté de certains membres de l’Assemblée. Ils souhaitaient en effet veiller à ce que notre sens des responsabilités et notre intégrité continuent d’être vues comme primordiales pour le travail et la crédibilité de notre Organisation.

La contribution du GRECO à la rédaction du rapport confère à celui-ci une autorité et une crédibilité supplémentaires. J’aimerais formuler quelques commentaires sur le projet de résolution. Voici près de huit ans que je participe aux parties de session de notre Assemblée à Strasbourg. Je me suis parfois interrogée sur le rôle des membres honoraires. Il faut veiller à éviter qu’il n’en résulte des abus, dans ces lieux ou ailleurs. Les changements proposés préciseront leur rôle, ainsi que le contenu de leur mandat et la façon de l’aborder.

Les dispositions permettant de vérifier si le comportement des membres de l’Assemblée est conforme au Code de conduite sont également très importantes. Savoir comment réagir aux violations de ce Code permettra de le renforcer et de mieux aborder des situations susceptibles de se présenter à l’avenir. En tant que responsables politiques, nous sommes régulièrement confrontés à des conflits d’intérêts. Les dispositions précédemment adoptées en la matière se sont avérées trop faibles. Je suis très heureuse que le rapport de M. Liddell-Grainger traite ce sujet de façon approfondie et présente des propositions concrètes d’amélioration de la transparence en matière de déclaration des intérêts des membres de l’Assemblée, mais aussi d’attribution des rapports et d’observation des élections.

Ce projet de résolution très complet renforcera notre Code de conduite. J’y suis pleinement favorable et j’espère sincèrement qu’à l’avenir notre Assemblée ne sera pas une enceinte dont la loyauté, l’intégrité et la crédibilité des membres pourront être contestées.

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Nous débattons cet après-midi d’un sujet important, dont il convient d’analyser les nombreux aspects. Il en est un qui relève directement de l’essence même du sujet. Les technologies modernes permettent de connaître en temps réel les performances d’un avion de chasse ou d’un joueur pendant un match de football. Le Conseil de l’Europe s’apparente un peu à une équipe dans laquelle chacun tire parti des avantages résultant du travail de l’Organisation au service de la démocratie et des droits de l’homme.

L’Assemblée parlementaire dispose uniquement de données statistiques indiquant la participation active de chacun aux votes lors de chaque partie de session. D’autres données statistiques et analytiques pourtant importantes ne sont pas à notre disposition. Par exemple, il serait bon que les membres de l’Assemblée parlementaire soient informés des services rendus par chacun non à un groupe d’intérêts ou à une personne, mais aux principes et aux exigences du Conseil de l’Europe.

Voici les faits. L’Assemblée compte plus de 600 membres. Si la population de l’Azerbaïdjan ignore le nom de la plupart d’entre eux, elle en connaît en revanche très bien certains, pourtant peu connus dans leur propre pays. En Azerbaïdjan, les noms de Michael Aastrup Jensen, Michael McNamara, Paul Flynn, René Rouquet, François Rochebloine, Frank Schwabe, Anne Brasseur, Tiny Kox et Pieter Omtzigt sont très connus, car les statistiques montrent qu’ils évoquent systématiquement l’Azerbaïdjan. Et qu’ont-ils à en dire? Toujours des propos très critiques.

Pourquoi ne mentionnent-ils jamais le million de réfugiés et de déplacés internes qui s’y trouvent? Pourquoi n’expriment-ils jamais aucun avis positif sur l’Azerbaïdjan? Ils critiquent systématiquement l’Azerbaïdjan, qu’ils voient à travers un prisme très noir, et n’envisagent pas de l’aborder différemment. Ils appliquent une politique hypocrite servant les intérêts de certaines puissances et de certains milieux inconnus. Pourquoi? Sur instruction de qui travaillent-ils? S’ils se laissaient guider par leur conscience, ils évoqueraient aussi les problèmes que connaît l’Azerbaïdjan, mais tel n’est jamais le cas. Ainsi s’explique la réaction qu’ils suscitent dans la population azerbaïdjanaise. Cette hypocrisie organisée mène à un désastre humanitaire pour tous.

M. SIMMS (Canada, observateur)* – Je remercie l’Assemblée de me laisser la possibilité de prendre la parole. Manifestement, je suis le seul représentant d’un pays observateur à m’exprimer dans le cadre de ce débat. Je remercie M. Liddell-Grainger de son excellent et rigoureux rapport. Il est rare que les représentants de pays observateurs prennent la parole sur des problèmes internes comme celui-ci, mais en l’espèce son importance m’incite à le faire.

Selon M. Liddell-Grainger, il en va de la transparence et de la protection des membres qui s’acquittent de leur mandat conformément aux normes les plus strictes. Ce qui importe, c’est que le projet de résolution présente un processus agrégeant toutes les mesures mises en œuvre non seulement par cette Assemblée, mais aussi dans d’autres pays, en vue de gérer ce genre de situation de la façon la plus responsable possible. Nous devons mettre au jour les agissements répréhensibles, mais aussi évoquer les mesures prises pour protéger quiconque participe à ce processus.

Plusieurs aspects du projet de résolution sont importants. On lit ainsi au paragraphe 7.3 que «la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles examine les allégations de violation du présent Code de conduite formulées à l’encontre des membres de l’Assemblée […] par au moins vingt membres de l’Assemblée représentant cinq délégations nationales au moins […]». J’apprécie qu’un processus impliquant d’autres personnes que celles directement concernées soit mis en place. À toutes les étapes de la procédure, les membres de l’Assemblée concernés pourront faire part de leurs observations, ce qui leur permettra de se défendre.

J’aimerais aussi évoquer le paragraphe 9.3 relatif aux rapporteurs de l’Assemblée parlementaire. Sur ce point, il faut être prudent et ne pas se montrer trop autoritaire sous peine de placer les parlementaires dans une situation quelque peu délicate. L’idée est bonne, mais il ne faut pas aller trop loin, sinon nous dissuaderons les membres de l’Assemblée de se porter candidats au poste de rapporteur.

Je remercie M. Liddell-Grainger de ses propos sur l’existence au Canada d’un commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, qui non seulement mène des enquêtes à la demande des parlementaires mais peut aussi décider de son propre chef d’ouvrir une enquête.

M. SEYIDOV (Azerbaïdjan)* – J’aimerais en premier lieu exprimer ma gratitude au rapporteur. Il s’agit là d’un rapport de la plus haute importance, qui survient opportunément. Comme je l’ai dit hier, l’Assemblée est en crise. Le problème principal réside dans la perte de la confiance entre nous. Telle est la malheureuse réalité: plus personne ne fait confiance à ses partenaires ni à ses amis. J’espère que la nouvelle présidence de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, que je félicite, pourra accomplir la tâche plus importante que toute consistant à définir des attitudes communes et à travailler à la convergence des attitudes au sein de cette Assemblée.

Monsieur le rapporteur, j’ai dit combien ce rapport est essentiel. Cependant, nous devrions tous tenir compte d’une chose: parfois, comme l’on dit, l’enfer est pavé de bonnes intentions. En effet, j’ai entendu dire au cours de ce débat que, si une personne d’un pays donné va en prison pour ses opinions et si ce pays est acceptable pour nous, cette personne ne serait pas acceptable pour l’Assemblée. C’est là la voie qui mène en enfer! Comme vous le savez, je suis musulman et je sais que dans cette Assemblée, certains membres ont des soupçons a priori à l’égard de ma religion. Alors, je pourrais commencer moi aussi à avoir des soupçons à leur égard. Ou encore, j’ai les cheveux noirs, d’autres ont les cheveux blonds, cela pourrait me rendre soupçonneux… Où cela va-t-il nous mener? Nous avons vu où cela a mené l’Allemagne au siècle dernier, lorsqu’un génocide a été commis contre les Juifs en raison d’attitudes basées sur l’appartenance à tel ou tel groupe. Voilà ce qui me préoccupe et voilà pourquoi je dis que les bonnes intentions risquent d’ouvrir la boîte de Pandore.

Quant à moi, je crois que la démocratie est beaucoup plus forte dans cette maison que ceux qui luttent pour le séparatisme, la xénophobie, l’islamophobie. Encore une fois, Monsieur le rapporteur, je vous félicite pour la qualité de ce rapport en faveur duquel nous voterons.

LE PRÉSIDENT* – La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle la réplique de la commission.

M. LIDDELL-GRAINGER (Royaume-Uni), rapporteur* – Permettez-moi d’abord de remercier M. Seyidov qui, comme toujours, a dit des choses très fortes. Je ne suis en désaccord avec lui sur aucun point. Beaucoup d’entre vous, à juste titre, ont parlé de ce qui s’est passé jusqu’ici. Il faut effectivement en parler. Cependant, sur la base de ce rapport, il faut regarder vers l’avenir et comprendre pourquoi nous devons nous protéger. Il faut avancer!

Certaines idées, certains sentiments que vous avez exprimés sont extrêmement précieux pour le faire. Permettez-moi de reprendre quelques éléments. Mme Gillan a parlé d’un organe permanent, or c’est précisément ce qui est envisagé à la commission du Règlement ; les discussions continuent. Ensuite, M. Divina a fait quelques remarques intéressantes; cependant il a parlé d’une chasse aux sorcières. Ce n’est certainement pas ce que nous cherchons à faire! Tous les pays contrôlent les dons d’une manière ou d’une autre; je suis certain que l’Italie le fait aussi. Ici, il s’agit d’exposer de façon ouverte et transparente de quoi nous avons besoin pour nous protéger et pour protéger cette Organisation.

M. Nicoletti a fait lui aussi une très bonne remarque sur notre attitude vis-à-vis des groupes de pression. Il faut en effet être plus ferme. Évidemment, il est difficile de réguler; il serait plus facile de tout interdire! Aux États-Unis, vous devez ainsi déclarer la moindre chose que vous acceptez d’un groupe de pression, même une tasse de café. De même, nombre des membres de cette Assemblée portent aujourd’hui de belles écharpes roses dans le cadre de la lutte contre le cancer du sein, ce qu’ils ne pourraient pas faire aux États-Unis. Ce n’est pas ce que nous voulons! Nous voulons établir une régulation qui ne nous empêche pas de faire notre travail mais qui nous permette de prendre de bonnes informations et d’en faire quelque chose. Il faut trouver la bonne mesure.

Mme Duranton a également fait une excellente remarque concernant la mise en œuvre de ces mesures. La commission du Règlement continue d’y réfléchir.

M. Rustamyan et Mme Hovhannisyan se sont exprimés ensuite de manière très pertinente. Je précise cependant que sur ces points aussi la commission du Règlement continue son travail et le sujet que vous évoquez sera examiné. En outre, je me félicite de constater que la délégation arménienne a beaucoup contribué à nos débats.

M. Schwabe a parlé de la façon dont les cadeaux sont gérés. Tous les parlementaires britanniques reçoivent des cadeaux; j’en ai reçu moi-même, tout comme notre Premier ministre. Cependant, nous avons un plafond qui est le même pour tous. Dans cette Assemblée également, il faudrait prévoir un système similaire: que l’on soit rapporteur ou non, les règles doivent être identiques.

Madame Chugoshvili, vous avez très bien parlé du rôle du Conseil de l’Europe. Vous avez raison: c’est bien l’intégrité du Conseil de l’Europe que nous défendons. C’est la plus ancienne organisation démocratique qui ait émergé après la Seconde Guerre mondiale, et nous devons la protéger.

L’intervention de Mme Schou était également très puissante, en particulier lorsqu’elle a évoqué les abus du système. Je sais, Madame, le travail que vous faites à la commission du Règlement.

Je voudrais également remercier M. Simms. Nous avons tiré des enseignements de l’excellent système qui est en place au Canada. Il y a eu un débat très important qui opposait une approche interne et une approche externe. Je n’ai pas de religion en la matière: je pense que les deux peuvent très bien fonctionner. Nous voulons ici prendre le meilleur de tous les systèmes, car il serait faux de penser qu’une seule approche est juste et les autres erronées; il faut rassembler ce qui marche et le faire ensemble.

En conclusion, je rappellerai que ce rapport ne vise pas à réinventer la roue. Cependant, si nous ne l’adoptons pas, nous aurons failli. Enfin, j’espère vivement que nous n’aurons jamais à l’appliquer.

Mme MAURY PASQUIER (Suisse), présidente de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles – J’aimerais simplement résumer encore une fois l’essentiel de notre débat et des décisions que nous allons prendre.

La révision du Code de conduite des parlementaires et les autres mesures proposées répondent aux recommandations adoptées le 19 juin dernier par le GRECO, qui a lui-même été invité à conseiller la commission du Règlement. Cette invitation faisait partie de la stratégie globale approuvée en janvier par le Bureau pour faire face aux allégations de corruption portées ces derniers temps à l’encontre de certains de nos membres ou anciens membres, allégations qui entachent la crédibilité et la réputation de l’Assemblée tout entière. De telles allégations doivent désormais faire l’objet d’un examen impartial qui ne repose pas entièrement sur le Président ou la Présidente, et le cas échéant, de sanctions clairement établies, proportionnelles aux violations constatées. Pour prévenir ces violations, il faut renforcer le devoir d’intégrité, de responsabilité et de transparence des membres par le biais de nouvelles règles de conduite et d’obligations déclaratives. La même transparence doit régner sur les relations avec les acteurs externes ainsi que sur le rôle des anciens membres.

Suivant la recommandation du GRECO, la commission s’attachera en outre à promouvoir les bonnes pratiques dans des domaines tels que les cadeaux et autres avantages.

Les groupes politiques ont aussi un rôle à jouer. Ils sont, quant à eux, notamment invités à soumettre leurs comptes annuels à un audit externe.

Mes chers collègues, un cadre d’intégrité solide et cohérent doit être mis en place au sein de l’Assemblée, qui soit à la hauteur de sa mission. Le fonctionnement de l’Assemblée ne peut être que démocratique, donc nécessairement transparent, si elle entend garder sa crédibilité dans le renforcement de la démocratie en Europe et ne pas échouer dans l’impasse du «faites ce que je dis mais pas ce que je fais».

C’est forte de cette conviction que je vous remercie, vous tous et toutes qui avez collaboré à l’élaboration de ce rapport, et que je vous invite à adopter le projet de résolution aussi largement que possible et, pourquoi pas, à l’unanimité, comme l’a fait notre commission.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close.

La commission du Règlement a présenté un projet de résolution sur lequel aucun amendement n’a été déposé.

Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14407.

Le projet de résolution est adopté (82 voix pour, 0 voix contre et 1 abstention).

Mme Kyriakides, Présidente de l’Assemblée, reprend place au fauteuil présidentiel.

5. Élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme
au titre de la Géorgie (Résultats du scrutin)

LA PRÉSIDENTE* – Mes chers collègues, voici les résultats du scrutin pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Géorgie.

Nombre de votants: 218

Bulletins blancs ou nuls: 39

Suffrages exprimés: 179

Majorité absolue: 90

Ont obtenu:

M. Chanturia: 120

Mme Papiashvili: 54

M. Sichinava: 5

M. Chanturia, ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, est élu juge à la Cour européenne des droits de l’homme. Son mandat de 9 ans commence au plus tard trois mois après son élection. Félicitations!

6. Évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement de Jordanie

LA PRÉSIDENTE* – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport sur «l’évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement de Jordanie», présenté par Mme Durrieu, au nom de la commission des questions politiques (Doc. 14399 et Addendum), ainsi que de l’avis présenté par M. Rigoni, au nom de la commission des questions juridiques (Doc. 14412).

Je vous rappelle que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 20 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 19 h 15, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Comme vous le savez tous, Mme Durrieu ne s’est pas présentée aux dernières élections sénatoriales en France. Cela signifie que, dès qu’une nouvelle délégation française sera approuvée, elle ne sera plus membre de cette Assemblée.

Mme Durrieu a siégé dans cette Assemblée durant 25 ans, période pendant laquelle elle a préparé un nombre impressionnant de rapports: plus de 20!

Chère Josette, c’est le dernier rapport que vous allez présenter devant notre chambre. Je profite de cette occasion pour vous exprimer nos remerciements pour tout le travail que vous avez accompli pendant votre période d’activité à l’Assemblée, et également pour être la personne que vous êtes: une européenne convaincue, une ardente défenseure des droits de l’homme et de l’Etat de droit et, pour un grand nombre d’entre nous, une véritable amie.

Chère Madame Durrieu, c’est avec un grand plaisir mais aussi avec une certaine tristesse, que je vous donne la parole.

Mme DURRIEU (France), rapporteure de la commission des questions politiques et de la démocratie – Madame la Présidente, permettez-moi d’abord de vous féliciter chaleureusement.

Aujourd’hui, au terme d’une vie politique trop longue, il arrive un moment où il faut s’excuser. Je pars sereine, notamment du Conseil de l’Europe. J’aime bien tous les signaux qui sont actuellement envoyés, notamment cette semaine. Ce n’est pas parce qu’on traverse une crise que l’on ne peut pas en sortir; ce n’est pas parce qu’on traverse une crise qu’on n’en sort pas plus fort.

Madame la Présidente, vous êtes aussi le symbole de cette situation nouvelle. Je suis vraiment heureuse de vous exprimer chaleureusement toutes mes félicitations. En peu de temps, puisque vous aurez une présidence courte, on peut faire tellement de choses! Tous mes vœux de réussite pour ce mandat court mais qui doit être dense.

Nous allons parler de la Jordanie, qui est, ici, partenaire pour la démocratie, depuis janvier 2016. Je voudrais saluer la délégation jordanienne et la remercier vivement pour le travail que nous avons fait ensemble dans les meilleures des conditions. Merci à vous, chers amis Jordaniens.

Je voudrais saluer la délégation de la Cour constitutionnelle jordanienne, qui est présente aujourd’hui. Elle est venue travailler avec des juges de la Cour européenne, c’est un très bon signe.

Membre partenaire pour la démocratie depuis janvier 2016, ce petit pays – cela a déjà été dit, mais je le répète – porte une très lourde charge historique, et ce depuis des années. Six millions d’habitants, deux millions de réfugiés, entre 650 000 et un million de Syriens: il est évident que nous ne l’aidons pas assez. Cela est vrai pour d’autres pays pauvres du Moyen-Orient, comme le Liban, dont nous parlions ce matin.

N’oublions pas que la Jordanie est un pays pivot au Moyen-Orient. C’est le premier message que je vous envoie, et je le répéterai. Or, ce pays est en guerre, ne l’oublions pas non plus.

Petit, pauvre, en guerre et pivot: la Jordanie est un pays que nous devons accompagner.

La Jordanie est une monarchie parlementaire, une monarchie éclairée, dont les deux problèmes majeurs sont la sécurité et la stabilité. C’est pour cette raison qu’elle est partenaire pour la démocratie. J’en profite pour saluer les autres partenaires pour la démocratie – statut que le Conseil de l’Europe a su créer – le Maroc, la Palestine et le Kirghizistan.

Lorsque la Jordanie a obtenu ce statut, l’État jordanien a pris des engagements, et notamment celui  d’engager des réformes. Le roi avait alors déclaré: ce n’est pas parce que nous avons des difficultés, parce que nous sommes en guerre, que nous n’entreprendrons pas les réformes nécessaires.

La première question qui se pose est donc la suivante: la dynamique a-t-elle été engagée? Oui, ma réponse est catégorique. Les réformes adoptées à ce jour sont-elles suffisantes? Non. Mais je crois qu’il nous revient de dégager une tendance: celle d’un mouvement sur la bonne voie.

Des réformes institutionnelles et relatives à l’organisation du territoire avaient été envisagées pour faire de la Jordanie – et je trouve que c’est une formule forte – un État de droit et un État citoyen. Deux séries d’élections devaient être organisées, et, au vu des conditions, nous ne pensions pas qu’elles le seraient dans le calendrier prévu.

Pourtant, elles ont eu lieu. En 2016, les élections législatives se sont déroulées selon un nouveau mode de scrutin: celui de la proportionnelle ouverte. Personne n’y croyait, c’était très aventureux. Sur les 130 députés que compte le parlement, 70 ont été nouvellement élus lors de ces élections; 40 ont moins de 40 ans. Il n’y a pas encore assez de femmes, mais le parlement a changé. Un peu. Car les tribus, le système tribal restent forts, et l’argent circule encore trop: le dire, c’est le dénoncer. En 2017, pour la première fois, les élections locales ont permis l’émergence d’assemblées municipales et régionales. Pour la première fois également, 85 % des membres de ces assemblées locales sont élus – même si l’on peut déplorer qu’encore 15 % soient nommés. C’est une nouveauté, et c’est une véritable ouverture du monde politique à la société civile. C’est effectivement par là qu’il faut commencer! C’est le deuxième message que je souhaite envoyer: il faut commencer par la base. Il faut donc poursuivre ce mouvement.

Ces élections locales ont également permis aux femmes, majoritairement jeunes, d’entrer massivement dans les assemblées locales, celles de tout en bas. C’est un signal très fort. Mais, en Jordanie comme ailleurs – car, ne le cachons pas, c’est toujours pareil! – quand il s’agit d’être maire, zéro. Pas de femmes. Quand il s’agit d’être président de la région, zéro. Pas de femmes. Cependant, le mouvement est engagé; elles feront leur chemin et elles y arriveront, comme nous y sommes arrivées avec, je le rappelle, tellement de difficultés, que notre combat n’est jamais terminé. Mes chères amies et collègues, je suis obligée de le répéter, nous devons continuer de le mener, il est toujours recommencé.

La décentralisation? Oui, elle existe, même si elle est légère. Il faudra cependant que nous définissions mieux les compétences et les ressources affectées au pouvoir décentralisé. En effet, il ne peut y avoir de vraie décentralisation que si l’on donne aux collectivités locales les moyens financiers de leur autonomie. Aujourd’hui, 40 % de leurs ressources proviennent des taxes prélevées localement, et 60 % de dotations de l’État. C’est un bon début, la dynamique est engagée, mais il faut faire mieux.

Il reste néanmoins trois points noirs.

Tout d’abord, les violences faites aux femmes. Cela me rappelle que j’ai oublié de mentionner la grande réforme de l’éducation qui a été engagée, c’est un point très important. L’article 308 du Code pénal jordanien, qui prévoyait qu’un homme était dispensé de peine s’il épousait la femme qu’il avait violée, a été supprimé. Mais je crois que la Jordanie peut, et doit, signer la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

Ensuite, la détention administrative. Mettre un citoyen en prison sur une simple décision administrative, alors même qu’elle n’est pas prise par un juge, n’est pas acceptable. Nous critiquons cette pratique et demandons que les détentions administratives soient abolies.

Enfin, la peine de mort. Oui, un moratoire avait été signé en 2006; oui, on a pourtant exécuté des personnes en 2014, 2015 et 2017. Certes, la Jordanie est un pays en guerre; certes, les mentalités ont besoin d’évoluer – mais je suis en train de vous montrer que les choses évoluent incontestablement –; certes, on est au Moyen-Orient: mais rien de tout cela n’est suffisant pour accepter que l’on pratique la peine de mort. Nous demandons donc clairement et catégoriquement que la Jordanie respecte le moratoire et s’achemine vers l’abolition de la peine de mort.

Aidons la Jordanie. Accompagnons-la. Nous en avons la volonté, nous le ferons. Soyons compréhensifs, mais vigilants. Soyons bienveillants, mais exigeants. Et faisons leur confiance. Moi, je leur fais confiance.

LA PRÉSIDENTE* – Je vous remercie, Madame Durrieu. Il vous restera cinq minutes pour répondre aux intervenants.

M. RIGONI (Italie), rapporteur de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, saisie pour avis* – La commission dont je suis le rapporteur se félicite du travail effectué par la commission des questions politiques, et remercie Mme Durrieu pour son rapport complet. Notre commission souscrit pleinement au projet de résolution.

Permettez-moi tout de même de vous donner mon avis: je crois qu’il faut soutenir la Jordanie, qui vit une période difficile. Il faut l’aider et il faut maintenir, si ce n’est élargir, notre soutien à ce long parcours, fait de progrès et de confiance, vers la démocratie et davantage de droits. La Jordanie comme l’Europe ont tout à y gagner. La Jordanie est sur la bonne voie, il faut l’accompagner, l’aider et soutenir ses réformes. Je salue moi aussi nos amis de la délégation jordanienne ici présents.

Cependant, la commission des questions juridiques regrette la régression observée sur le sujet de la peine de mort. Notre Assemblée a toujours été leader dans la lutte contre la peine de mort, en Europe mais aussi au niveau mondial. Nous sommes une véritable référence en la matière. Il nous faut donc adopter des positions fermes sur ce principe: notre position ne peut pas être modifiée, et aujourd’hui encore moins qu’hier, puisque, en ce mardi 10 octobre, nous célébrons la Journée mondiale pour la lutte contre la peine de mort. Notre Assemblée ne peut pas faire de concessions sur ce point, et c’est la raison pour laquelle notre commission a présenté deux amendements au projet de résolution.

J’espère sincèrement que l’Assemblée adoptera ces amendements. Je regrette que la commission des questions politiques les ait rejetés. Du reste, je ne comprends pas les raisons de ce rejet. Nous voulons tout simplement affirmer nos principes et nos valeurs, lesquels ne sont pas négociables: on ne saurait revenir dessus. On peut négocier pour obtenir des délais, mais certainement pas négocier sur les valeurs elles-mêmes: nos valeurs ne peuvent être achetées. C’est bien là la chance de la démocratie: il ne s’agit pas d’une marchandise. Si c’en était une, les valeurs auraient un prix et quelqu’un pourrait les acheter. Mais elles ne seraient plus alors les valeurs européennes, les valeurs du Conseil de l’Europe.

Voilà pourquoi, chers collègues, j’espère sincèrement que, tout en soutenant le parcours de réforme qui a lieu en Jordanie, nous serons forts et que nous n’hésiterons pas à rappeler que nous demandons avec conviction un moratoire de jure et non de facto sur la peine de mort. Nous l’avons fait pour le Bélarus et pour d’autres pays; ce n’est pas comme si nous ne le faisions que pour la Jordanie.

Pour conclure, je redirai que notre commission a présenté deux amendements qui ont pour seul objectif de préciser la position de l’Assemblée au regard de la peine de mort. Je n’ai pas l’impression de vous demander la lune: il ne s’agit pas d’arrêter le processus de réformes qui est en cours en Jordanie. Il s’agit de respecter nos valeurs et de demander qu’elles soient respectées par tous les pays, y compris par ceux qui jouissent du statut de partenaire pour la démocratie.

LA PRÉSIDENTE* – Dans la discussion générale, nous commençons par les porte-parole des groupes.

Mme FIALA (Suisse), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Chère Josette Durrieu, je vous le dis de tout cœur: vous allez me manquer, vous allez nous manquer. Lors de plusieurs missions d’observation d’élections, j’ai pu constater à quel point vous êtes une personne incroyable.

La Jordanie est l’un de nos partenaires pour la démocratie. Toute une série d’obligations découlent de ce statut, et ces obligations ont été respectées. Nous partageons les mêmes valeurs, comme le montre clairement le rapport. La Jordanie a beaucoup appris et nous suivons avec le plus grand intérêt les réformes d’ordre constitutionnel, juridique et parlementaire qui sont en cours. Le roi Abdallah II, malgré l’instabilité, a fait avancer ces réformes. On trouve en Jordanie des camps, et même des villes de réfugiés, avec jusqu’à 1,3 million de réfugiés rassemblés en un seul endroit. C’est dire si les choses sont parfois extrêmement difficiles pour le pays.

La rapporteure a effectué un travail excellent, ce dont nous la félicitons. Elle rappelle que les élections du 20 septembre 2016 ont été libres et équitables. Les femmes sont désormais bien mieux représentées au parlement. C’est un soulagement de savoir que désormais l’auteur d’un viol ne peut plus épouser la victime pour échapper aux poursuites. Plus généralement, beaucoup a été fait pour protéger davantage les femmes. Notre partenaire pour la démocratie doit aller plus loin encore afin de parvenir à l’élimination totale de la peine de mort.

Les choses avancent donc lentement mais sûrement. Dans deux ans, nous procéderons à une nouvelle évaluation du partenariat pour la démocratie avec le Parlement jordanien. Entre-temps, ce pays mérite tout notre respect et notre soutien, ne serait-ce que parce qu’il a surmonté le terrible problème que constituent les réfugiés. Des progrès restent à accomplir en matière de sécurité juridique, d’État de droit et de respect des droits de l’homme et de la démocratie, mais ce n’est que justice que de dire que nous devons soutenir la Jordanie.

Mme Oomen-Ruijten, Vice-Présidente de l’Assemblée, remplace Mme Kyriakides au fauteuil présidentiel.

M. LOUCAIDES (Chypre), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – J’aimerais saisir cette occasion pour remercier vivement Mme Durrieu non seulement pour ce rapport, mais pour sa contribution phénoménale aux travaux de la commission des questions politiques et de notre Assemblée: son dévouement, sa passion et son impartialité sont des qualités dont nous nous souviendrons longtemps et qui devraient caractériser tous les membres de notre Assemblée.

La Jordanie est sur la bonne voie et doit être soutenue dans ses efforts pour consolider la démocratie, établir l’État de droit et promouvoir les droits de l’homme. Bien sûr, de nombreux défis et obstacles demeurent – ils se trouvent bien décrits dans le rapport dont nous sommes saisis.

J’ai eu moi-même l’occasion de me rendre en Jordanie en 2014, dans le cadre d’une mission sur le terrain. J’ai pu constater, au nombre de ces défis, l’immense fardeau que fait peser sur le pays le problème des réfugiés. Malgré les difficultés qu’elle rencontre, la Jordanie reste un pôle de stabilité dans l’une des régions du monde les plus troublées. Néanmoins, ce qui se passe pourrait détourner la Jordanie d’un avenir meilleur.

Appuyer la Jordanie, son parlement et son peuple: voilà ce que nous pouvons faire, tout en reconnaissant que, jusque-là, la Jordanie n’a pas pu tirer parti de tous les instruments disponibles dans le cadre du partenariat pour la démocratie. Nous devons aider le pays à mieux utiliser le Conseil de l’Europe et les outils qu’il offre, en particulier l’immense expertise de ses organes de suivi tels que le GRECO, le Comité européen pour la prévention de la torture, la Commission de Venise et le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, sans oublier l’ensemble de l’acquis du Conseil de l’Europe, qui pourrait aider la Jordanie à modifier sa législation.

Il faut évoquer avec les autorités jordaniennes les difficultés qu’elles ont à respecter leurs engagements s’agissant de l’abolition de la peine de mort ou encore des droits des femmes. En même temps, il convient de respecter les spécificités culturelles et les traditions de ce pays. Il faut essayer, par le dialogue démocratique, de parvenir à effectuer des réformes. Notre soutien ne doit pas être considéré comme une tentative d’imposer notre modèle.

Mme PASHAYEVA (Azerbaïdjan), porte-parole du Groupe des démocrates libres* – Je voudrais vous féliciter à mon tour, Madame Durrieu, pour ce rapport très précieux.

Je me trouvais récemment en Jordanie. J’y ai rencontré des responsables politiques et des représentants de la société civile. Grâce à ces échanges, j’ai pu constater le chemin qu’a parcouru la Jordanie, ainsi que les problèmes qu’elle rencontre.

Je félicite nos amis jordaniens pour tous les progrès qu’ils ont accomplis en matière démocratique. Le fait que la Jordanie ait noué un dialogue étroit avec notre Assemblée parlementaire et qu’elle ait accompli des progrès importants dans les domaines de la démocratie et des droits de l’homme est très important et mérite notre soutien. Les évolutions en Jordanie ont des effets positifs dans toute la région. C’est la raison pour laquelle nous devons réaffirmer avec détermination notre soutien à la Jordanie: il est important d’envoyer ce message.

Ces dernières années, au Moyen-Orient, nous voyons se dérouler l’un des plus graves drames de l’histoire de l’humanité: la guerre civile en Syrie, la tragédie que vivent les gens de la région, les mouvements migratoires ont bien entendu un effet néfaste sur la Jordanie, qui est très proche de la zone des combats. Aujourd’hui, des dizaines de milliers de réfugiés syriens vivent en Jordanie. Après la Turquie, c’est le pays qui accueille le plus grand nombre de réfugiés syriens. C’est la raison pour laquelle nous avons le devoir de remercier les gouvernements turc et jordanien pour l’aide qu’ils apportent aux réfugiés.

Je viens moi-même d’un pays qui accueille un million de réfugiés en raison du fait qu’un tiers de son territoire est occupé. Je connais donc de très près le problème des pays qui sont soumis à un flux migratoire important.

Des millions de réfugiés se retrouvent confrontés à des problèmes tels que les gouvernements qui les accueillent voient leurs priorités totalement chamboulées. Face aux difficultés supplémentaires occasionnées, ce problème de réfugiés devient le premier en termes de priorité. Lorsque j’étais en Jordanie, j’ai rencontré des réfugiés syriens. Pour les aider, la Jordanie consent de lourds sacrifices. C’est la raison pour laquelle les pays européens et les ONG doivent accroître leur soutien à ce pays.

La Jordanie joue également un rôle actif dans le dialogue interculturel. De ce point de vue, les représentants du Parlement jordanien qui sont parmi nous jouent un rôle très important. C’est important pour eux, mais cela l’est tout autant pour notre Assemblée. En tant que Groupe des démocrates libres, nous voulons développer et apporter tout notre soutien à la coopération entre notre Assemblée et le Parlement jordanien. Nous souhaitons plein succès à la Jordanie pour toutes les réformes qu’elle souhaite accomplir dans ce domaine.

M. VAREIKIS (Lituanie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Permettez-moi de vous rappeler qu’il y a deux ans, nous avons accordé au Parlement de Jordanie le statut de partenaire pour la démocratie. Nous avons cherché les pays proches de l’Europe qui pouvaient devenir nos partenaires pas seulement pour les soutenir, mais également pour nous aider à défendre les valeurs qui sont les nôtres. Je pense que notre histoire avec la Jordanie est véritablement couronnée de succès. Après deux ans, un certain nombre de projets ont vu le jour et des progrès ont été enregistrés.

J’ai n’ai pu voir cela que de très loin puisque je n’ai pas eu l’occasion de me rendre dans le pays. Pour moi, il s’agit d’un pays étrange à plus d’un titre.

Tout d’abord, la Jordanie n’a pas connu le Printemps arabe. Peut-être cela signifie-t-il qu’il n’y avait pas grand-chose à modifier, contrairement à d’autres pays qui ont connu le Printemps arabe. La Jordanie est un pays stable, cela été souligné à différentes reprises. C’est également ce que je pense. Elle connaît une certaine stabilité dans une zone touchée par la situation que nous savons.

Ensuite, c’est un pays de 5 millions d’habitants qui arrive à accueillir 2 millions de réfugiés. Il les accueille, je pense, assez correctement. Cela mérite notre admiration. Nous, pays européens, avons promis de soutenir la Jordanie dans cette épreuve. Malheureusement, nous l’avons aidée bien moins que ce que nous l’avions promis. Nous devons l’avouer: nous n’avons pas tenu toutes nos promesses à son égard.

Alors, certes, la Jordanie n’est pas une démocratie comme nous l’entendons. Certes, il y a des problèmes concernant la législation en Jordanie. Mais nous devons encourager ce pays à mettre en place différents projets et à poursuivre ce partenariat démocratique. Je souhaite donc le meilleur à notre partenaire!

M. CORLĂŢEAN (Roumanie), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Madame la Présidente, permettez-moi tout d’abord de féliciter notre rapporteure pour son excellent travail. Nous partageons entièrement les conclusions du rapport et appuyons les recommandations contenues dans le projet de résolution.

La Jordanie va effectivement dans la bonne direction. Elle engage de nombreux efforts, guidée par la sagesse politique remarquable de son monarque, peut-être cela ne se fait-il pas toujours au rythme espéré et en déployant tous les efforts nécessaires, mais le contexte régional complexe doit aussi être pris en considération. La solidarité avec ce pays s’agissant des modalités de gestion de l’afflux sans précédent des réfugiés s’impose.

Le rapport a réussi à trouver le juste équilibre entre, d’une part, l’importance de la stabilité et de la sécurité de ce pays au vu du rôle essentiel qu’il joue au Moyen-Orient et, d’autre part, la nécessité d’avancer dans les réformes démocratiques nécessaires liées au statut de partenaire pour la démocratie. À cet égard, nous avons pris bonne note des dernières réformes législatives positives concernant le processus de décentralisation. Les élections locales, municipales et régionales se sont déroulées de manière appropriée le 15 août 2017. Des réformes législatives essentielles dans le domaine pénal ont amélioré le statut et la protection de la femme dans la société.

En même temps, il reste toujours des problèmes essentiels, délicats et urgents à régler, à savoir la peine capitale et, pour commencer, le moratoire d’application, ainsi que la détention administrative et l’abolition de l’article 340 du Code pénal.

Je voudrais donc saluer la bonne avancée du processus démocratique dans un pays ayant un autre modèle culturel que le nôtre, le modèle européen. Les mesures adoptées pourraient déjà constituer un modèle des bonnes pratiques dans la région. Je tiens à souligner la nécessité de persister dans cet élan de réforme en s’appuyant sur une volonté politique claire et en coopérant avec le Conseil de l’Europe afin d’avancer de façon décisive.

Enfin, en conclusion, permettez-moi de m’adresser à notre rapporteure pour le remarquable travail qu’elle a accompli au fil des années en tant que distinguée membre de cette Assemblée. C’est une collègue exceptionnelle, une professionnelle de la politique nationale et européenne, présente en tant que rapporteure sur des territoires connaissant des conflits armés et des tensions, une femme courageuse et une personne que nous aimons beaucoup.

Chère Josette, à la fin de ton mandat dans notre Assemblée, je tiens à te faire part de notre respect et de notre amitié. Je t’adresse un grand merci et, j’espère, à bientôt!

LA PRÉSIDENTE* – De très jolies paroles de conclusion, dont je vous remercie.

Lord BLENCATHRA (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Madame la Présidente, je voudrais être le premier membre du Groupe des conservateurs européens à vous féliciter pour votre victoire, et je félicite également Mme Durrieu de son excellent rapport, critique mais équilibré.

À notre sens, la Jordanie avance vers la démocratie, mais à son rythme. Il ne faut pas imposer notre modèle trop rapidement en Jordanie, car nous risquons de nous retrouver avec une autre catastrophe au Moyen-Orient. Rappelez-vous comme nous nous sommes réjouis naïvement de la chute de Kadhafi ou de Saddam Hussein avant de nous retrouver devant l’État islamique. Nous avons cru à la démocratie en Syrie et, à la place, nous avons l’État islamique et nous allons finir par appuyer Bachar el-Assad.

Nous ne pouvons pas imposer notre conception de la démocratie à des pays qui n’ont pas la culture de cette forme de gouvernement. Churchill disait que la démocratie était la pire forme de gouvernement à l’exception de toutes les autres. Certaines cultures ont besoin de s’adapter à leur rythme au concept de cette pire forme de gouvernement. Mon pays est la démocratie la plus ancienne d’Europe et la reine joue un véritable rôle de renforcement de cette démocratie.

Abdallah II a plus de pouvoir que nos rois et reines d’Europe, mais il l’utilise de bonne manière. J’ai un immense respect pour le roi. Il a été éduqué à Oxford et à Georgetown, et a été sous le commandement des Britanniques en Allemagne. Il est également un stratège militaire habile. Or pour diriger la Jordanie, c’est exactement ce qu’il faut: une excellente stratégie!

Tout le monde s’accorde à dire qu’il a donné à la Jordanie une stabilité remarquable. Nous devons lui faire confiance, il introduira les modifications et les changements nécessaires, à son rythme. N’insistons pas pour que la peine de mort soit abolie de façon définitive et que les femmes aient les mêmes droits qu’en France ou aux Pays-Bas, dès aujourd’hui. Faisons confiance au roi Abdallah et ne changeons en rien l’excellent rapport de Mme Durrieu.

Mme BARTOS (Hongrie)* – Madame Durrieu, permettez-moi de vous féliciter pour cet excellent rapport, fort bien équilibré.

J’ai eu la possibilité de constater par moi-même les développements dont fait mention le rapport dans le domaine de l’autonomisation des femmes et du renforcement du rôle des femmes dans le pays. En effet, en mai 2016, j’ai participé à une conférence intitulée «Les femmes au Parlement», organisée au Parlement jordanien. Des centaines de députées de 70 à 80 pays se sont rencontrées pour échanger leurs points de vue et réfléchir à la façon d’améliorer la visibilité et les possibilités d’action des femmes dans la vie publique.

Je voudrais remercier nos amis jordaniens pour leur accueil et leur hospitalité. Durant ces deux jours, j’ai pu brièvement approcher la culture riche et ancienne de la Jordanie, admirer de magnifiques paysages et côtoyer la population. Bien entendu, ce n’est pas assez, mais j’ai ainsi pu constater que des efforts avaient été réalisés; le rapport en fait d’ailleurs mention.

La Jordanie a un statut géopolitique particulier, elle joue un rôle important pour la stabilité au Moyen-Orient. Nous apprécions les efforts qu’elle réalise pour lutter contre l’extrémisme et le terrorisme dans la région. Nous pouvons également citer les actions qu’elle a menées en faveur de la construction de la démocratie, de la liberté de la presse et de la décentralisation de l’administration.

Sachant que les défis sont importants, nous devons tenir compte des résultats déjà atteints: la Jordanie offre un foyer à plus de 2 millions de réfugiés, essentiellement syriens et palestiniens. Mais ses ressources vont bientôt se tarir, il convient donc que la communauté internationale la soutienne de façon efficace.

Nous devons par ailleurs faire face à un certain nombre de problèmes et envisager l’avenir côte à côte. Par exemple, le Gouvernement hongrois a accordé 400 bourses d’étude à de jeunes Jordaniens, considérant que ceux-ci peuvent faire le pont entre nos pays. Je félicite la Jordanie pour les résultats qu’elle a déjà obtenus.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni) – Je commencerai mon propos en français pour féliciter mon amie Josette Durrieu, avec qui j’ai travaillé un certain temps. Josette, cela a été un privilège et un honneur de travailler avec vous et nous sommes tous tristes de votre départ. Je vous adresse mes meilleurs vœux pour le nouveau chapitre que vous allez écrire lors de votre retraite.

(Poursuivant en anglais)

*S’agissant du sujet qui nous intéresse, je vous ferai part de deux réflexions.

Tout d’abord, avec le processus de partenariat que nous avons commencé en janvier 2016, nous avons entamé un voyage avec nos amis Jordaniens visant à améliorer, ensemble, l’État de droit et la démocratie. Nous sommes tous des responsables politiques, nous sommes donc conscients des imperfections de nos propres pays; alors n’exigeons pas la perfection de nos partenaires.

Ensuite, des progrès immenses ont été réalisés par la Jordanie, même s’il est vrai que, comme souvent, il n’y a pas deux pas en avant sans un pas en arrière. Mais si nous voulons être critiques, nous devons aussi faire preuve de compréhension. En mars 2016, la Jordanie a lancé un plan global national pour la protection des droits de l’homme qui doit s’étaler sur 10 ans et qui entraîne une modification de la législation. Par exemple, il donne aux suspects davantage de droits au moment de leur arrestation et ceux-ci peuvent être traduits devant des tribunaux normaux. Par ailleurs, l’article 308 du Code pénal a été récemment abrogé.

Des difficultés sont également à dénoncer, telles que les exécutions qui ont eu lieu au mois de mars dernier et les obstacles à la liberté d’expression. Mais nous étions conscients, dès le début du processus, du défi que représentait ce partenariat pour la Jordanie. Les pas en avant sont encourageants.

Enfin, nous ne pouvons apprécier les progrès réalisés que si nous replaçons la Jordanie dans son contexte: le nombre de réfugiés qui y sont accueillis – plus de 600 000 cette année – et la menace terroriste, notamment. N’oublions pas que la Jordanie est un pilier de la stabilité dans la région, un modèle.

Je vous propose deux bravos pour la Jordanie et trois pour Josette Durrieu.

M. SCHENNACH (Autriche)* – Ce rapport est le dernier que Josette Durrieu nous présentera, je tenais donc à prendre la parole ce soir. Josette l’ignore peut-être, mais elle a eu un rôle professeur pour moi. À mon arrivée au sein de cette Assemblée, je n’ai eu qu’à ouvrir grand mes yeux et mes oreilles. Vous m’avez beaucoup appris. Josette, j’ai énormément de respect pour votre travail.

J’ai présidé l’Union pour la Méditerranée durant 8 ans et me suis rendu en Jordanie une douzaine de fois; je connais bien le pays et partage la majorité des remarques faites par Josette dans son rapport. Ce partenariat est important.

Cependant, il faut parfois, entre partenaires, se parler franchement. Tout d’abord, il n’est pas possible de dire que la peine de mort est juste un «problème»; elle est inacceptable pour le Conseil de l’Europe. Ensuite, lors des dernières élections, le vol d’urnes, puis leur retour, ainsi que le retrait de noms de femmes des listes ont été des éléments inadmissibles; il n’y a là aucun respect du droit.

Je sais que la Jordanie se trouve dans une situation très particulière, avec un accueil massif de réfugiés, notamment Palestiniens, Irakiens – un demi-million – et Syriens. Palestiniens et Irakiens ont acquis la citoyenneté jordanienne. Beaucoup a été fait par le gouvernement, en particulier en matière de droit électoral. Mais nous souhaiterions plus de continuité dans l’action, et non seulement des expérimentations. Changer de gouvernement à peine a-t-il pris ses fonctions, ou modifier le Code électoral du jour au lendemain, ce n’est pas possible. Un partenaire pour la démocratie doit pouvoir entendre cela. J’ai été étonné de constater qu’un ministre arrivait parfois à conserver ses fonctions pendant un ou deux ans tant les changements de gouvernement sont incessants. Une certaine stabilité est pourtant nécessaire.

La sécurité l’est aussi, mais nous souhaitons moins d’exceptions pour les membres de la maison princière. L’égalité devrait s’appliquer à tous, et dans tous les domaines. Un bon système électoral doit être établi, même si trouver le bon équilibre entre toutes les composantes de la société est difficile. Mais ce qui est certain, c’est que ce partenariat nous tient à cœur.

M. ALBAKKAR (Jordanie, partenaire pour la démocratie)* – Au nom du Parlement jordanien, permettez-moi de remercier le Conseil de l’Europe de nous avoir accordé le statut de partenaire pour la démocratie. Je remercie aussi Mme Durrieu pour ce rapport, qui affirme encore une fois que le Parlement jordanien partage les mêmes valeurs que les membres du Conseil de l’Europe. Je souhaite enfin remercier l’Union européenne, pour le soutien technique et financier qu’elle accorde à la Jordanie.

La Jordanie est un petit pays, d’environ 9,5 millions d’habitants. Les défis politiques, sociaux et économiques sont nombreux. La situation régionale est liée au sort de la Syrie, de l’Irak et des pays voisins. Nous sommes soumis à des vagues de terrorisme. L’arrivée de réfugiés est un véritable défi. Cependant, la Jordanie est déterminée à se réformer. Nos liens avec le Conseil de l’Europe, ces deux dernières années, ont montré notre volonté dans cette voie. Nous avons, par exemple, mis en place des réformes pour le Code pénal ou l’organisation des élections locales et des instances décentralisées. Nous avons obtenu un certain nombre de résultats: par exemple, les femmes sont mieux représentées au Parlement. La Jordanie met en place des réformes et s’y tient.

Le gouvernement et le parlement ont instauré de nouvelles commissions: l’une est responsable de la réforme judiciaire et législative, une autre des ressources humaines; une sous-commission s’intéresse aux réformes en cours, en particulier dans le domaine des droits de l’homme, de l’État de droit, de la peine de mort et de la détention administrative. Le Parlement encourage une représentation équitable entre hommes et femmes, et a amendé un certain nombre d’articles. Il a, en particulier, supprimé l’article 308 du Code pénal qui permettait au violeur d’une femme de l’épouser pour échapper aux poursuites.

La période actuelle est cruciale. Maintenir la stabilité est nécessaire, mais il nous faut aussi mener les réformes à bien, et ainsi partager les valeurs universelles de l’État de droit, du respect des droits de l’homme et de la démocratie.

M. ÖNAL (Turquie)* – Récemment, la Jordanie a connu un grand nombre de réformes. Les autorités jordaniennes doivent recevoir tout notre soutien. Malgré l’instabilité de la région, le Parlement jordanien a fait tous les efforts nécessaires pour mériter ce titre de partenaire pour la démocratie. La Jordanie se distingue, dans la région, en termes de démocratisation. Elle joue par ailleurs un rôle important pour la stabilité et la sécurité de la région.

La Jordanie a une frontière commune avec l’Irak et la Syrie; son sort est donc similaire à celui de la Turquie. Ces deux pays, dans un souci d’humanité, assument tout le poids de la crise actuelle. Pour ces pays frontaliers, le prix économique et social est lourd. Il en va de même en matière de sécurité. L’aide économique doit augmenter. Je dois malheureusement dire que, comme dans les rapports de la commission de suivi sur la Turquie, ce rapport sur la Jordanie ne tient pas vraiment compte des effets de la crise des réfugiés. Deux petits paragraphes seulement y sont consacrés.

Le rapport ne parle pas assez des conséquences sociales et économiques très importantes de la crise, des tâches qui incombent au Conseil de l’Europe en la matière, et de la nécessité d’augmenter l’aide de la communauté internationale. L’Union européenne a été félicitée pour les maigres 700 millions d’euros d’aide qu’elle a accordés! Les pays qui accueillent les réfugiés ne sont pas assez aidés par l’Union européenne. Quel manque d’humanité! Ces questions ne devraient pas être passées sous silence dans les rapports concernant les pays qui accueillent les réfugiés. Nous voulons des propositions concrètes pour les aider.

Pour conclure, le dialogue entre le Parlement jordanien et notre Assemblée est très utile, et je félicite la Jordanie pour sa démocratisation. Je l’encourage à améliorer le statut des femmes et à ratifier les Conventions du Conseil de l’Europe relatives à cette question.

Mme FINCKH-KRÄMER (Allemagne)* – Je souhaite féliciter la Jordanie pour un point particulier, qui s’éloigne du thème des droits de l’homme, thème central de notre Organisation. Un lien existe cependant; je m’en explique.

La Jordanie est un pays qui, dans cette région, travaille bien avec les organisations internationales: avec les Nations Unies, qui a un bureau à Amman, ainsi qu’avec l’Organisation du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, le CTBTO, qui vise à éliminer à l’échelle mondiale les essais nucléaires. Cette dernière organisation est essentielle, surtout face aux développements actuels en Asie, et au programme de bombe atomique de la Corée du Nord. La Jordanie se distingue dans le cadre de cette coopération.

En effet, les autorités jordaniennes ont participé aux efforts d’élucidation des pratiques de pays suspectés de tester des armes nucléaires. Il est essentiel en effet qu’un État accueille sur son sol une équipe internationale d’enquêteurs afin qu’elle élucide certains faits.

Par ailleurs, si l’abolition de la peine de mort est une disposition essentielle pour tout État membre du Conseil de l’Europe, elle l’est aussi pour tout pays observateur ou associé. Le Conseil de l’Europe doit faire en sorte que les pays dont les valeurs sont proches de celles de ses membres cessent d’appliquer la peine capitale. Il est donc indispensable d’influer, dans un cadre bilatéral comme multilatéral, sur le Japon et les États-Unis, afin d’améliorer notre action auprès d’autres États ayant recours à la peine de mort tels que la Biélorussie et la Jordanie. Si nous commençons par le Japon et les États-Unis, nous pourrons mieux faire comprendre à d’autres États pourquoi les valeurs européennes de respect des droits de l’homme et de primauté du droit nous tiennent à cœur. La peine de mort n’est pas compatible avec l’État de droit.

Enfin, je remercie Josette Durieux de son travail. Elle a été pour moi aussi un modèle et je lui souhaite tout le meilleur pour la suite de sa carrière politique comme de sa vie personnelle.

M. HOWELL (Royaume-Uni)* – J’ai pour la Jordanie une grande sympathie. Je suis particulièrement d’accord avec les conclusions du rapport selon lesquelles notre Assemblée «ne devrait surtout pas abandonner la Jordanie en ces moments difficiles», notamment en raison de l’immense problème que lui posent les camps de réfugiés. Peuplés de Syriens, ils constituent un risque d’instabilité pour la région. Nous savons que l’État islamique a déjà infiltré un camp. Un autre, Zaatari, est dorénavant la quatrième plus grande ville de Jordanie, ce qui est tout de même incroyable si l’on se souvient que ce camp n’a été ouvert qu’en 2012.

Comme l’a rappelé le roi, le pays est à un tournant. Nous devons lui fournir une aide conséquente consistant à lui offrir un accès aux soins, à l’éducation et à l’alimentation et à se concentrer sur les individus en évaluant les efforts déployés pour les aider.

Par ailleurs, nous ne pouvons pas ignorer l’importance géopolitique de la Jordanie. Allié dans la lutte contre le terrorisme, ce pays participe à un réseau de renseignement à l’échelle de la région. Les renseignements obtenus transforment notre vision des événements et de ce que nous pouvons faire pour lutter contre le terrorisme.

Le rapport encourage le Parlement jordanien à progresser sur la voie de la démocratie. Nous encourageons tous la Jordanie à le faire. Des progrès ont été réalisés, notamment en matière de place des femmes. J’approuve les propos tenus par notre collègue Lord Blencathra selon lesquels il faut laisser la Jordanie progresser à son rythme en tenant compte de son contexte culturel, sous peine de voir ce pays, qui constitue un pôle de stabilité pour toute la région, y compris pour son voisin Israël, confronté à un problème pire encore.

M. ZAYADIN (Jordanie, partenaire pour la démocratie)* – Mesdames et Messieurs, je me présente aujourd’hui devant vous avec de bonnes nouvelles au sujet de nos aspirations à une véritable société civile démocratique en Jordanie ainsi qu’avec la promesse que nous continuerons à lutter afin d’atteindre nos objectifs. Il n’a pas été facile d’abolir l’article 308 du Code pénal exonérant de toute poursuite un violeur épousant la jeune fille qu’il a violée, mais nous y sommes parvenus contre les forces ultra-conservatrices de notre société.

De même, nous avons amendé l’article 98 réduisant la peine de quiconque tue une femme. À l’issue de grandes discussions dans tout le pays, nous avons promu l’idée selon laquelle le meurtre ne ressortit nullement à l’honneur. Nous avons également lutté pour modifier l’article confiant aux seuls pères la décision de faire opérer un enfant, dorénavant partagée avec les mères. Nous avons également initié un processus de décentralisation qui a permis l’élection de conseils locaux ainsi qu’une participation accrue des citoyens à la vie politique, afin qu’ils s’occupent eux-mêmes de ce qui les concerne au premier chef.

Au cours des dernières élections législatives, les jeunes ont demandé la mise en œuvre d’une véritable démocratie. Cette évolution a été soutenue par plusieurs documents signés du roi Abdullah II. Notre pays veut appliquer les principes universels d’une véritable démocratie. Depuis les élections, nous avons travaillé en vue d’organiser la jeunesse sous forme d’un mouvement susceptible de devenir une force de changement. Nous avons également discuté avec les partis politiques progressistes afin de promouvoir un processus d’unification visant à créer des partis plus grands susceptibles d’obtenir de meilleurs résultats aux élections et de former au sein du parlement de grands blocs favorables à des changements positifs. Nous travaillons d’arrache-pied à ces évolutions.

Je tiens à dire combien nous apprécions le partenariat pour la démocratie qui nous lie au Conseil de l’Europe. Nous réalisons des progrès et mettons en œuvre des réformes. Nous faisons la preuve de notre engagement à améliorer l’avenir de notre population comme de notre pays. Ce partenariat nous donne les connaissances nécessaires à la mise en œuvre de changements positifs et nous permet de garder le cap tout en nous concentrant sur les points essentiels. Nous voulons qu’il se poursuive. Nous en tirons profit et le Conseil de l’Europe aussi. Nous voulons vraiment améliorer la coopération entre la Jordanie, le Conseil de l’Europe et les commissions qui le composent.

Mme KALMARI (Finlande)* – J’ai lu avec grand plaisir le rapport d’évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement de Jordanie. J’ai moi aussi participé à la supervision des élections sur place. Tout s’est bien déroulé en général, même si nous avons mentionné certaines mesures nécessaires au renforcement de la démocratie, de la primauté du droit, du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales en Jordanie. Les droits civiques et politiques, en Jordanie, appartiennent à tous sauf aux ressortissants étrangers, fussent-ils établis depuis des décennies. Par exemple, une personne née en Jordanie d’une mère jordanienne et d’un père palestinien ne peut pas voter. J’espère que cette situation changera, et que, de même, une personne de moins de trente ans pourra un jour être élue au parlement.

La Jordanie a réalisé de nombreuses réformes: la représentation des femmes au parlement a connu une accélération, des mesures ont été prises afin de favoriser l’égalité entre les sexes, un niveau relativement bon a été atteint en ce qui concerne la liberté d’expression ainsi que l’indépendance et la pluralité des médias.

En outre, le peuple jordanien est extrêmement hospitalier. Il accueillait déjà des réfugiés avant la crise syrienne. L’Union européenne a versé à la Jordanie 700 millions d’euros; cette somme n’est pas élevée au vu du nombre de réfugiés accueillis. Il faut donc que nous poursuivions notre aide à la relocalisation des réfugiés dans les pays voisins. L’Irak, la Syrie, Israël, l’Arabie Saoudite sont des voisins de la Jordanie. Dans ce contexte, il est vraiment remarquable que ce pays relativement pauvre, dépourvu de ressources pétrolières, maintienne la démocratie. Ses valeurs sont très proches des nôtres.

Il me semble que les progrès sont suffisamment bons pour permettre d’envisager que peut-être, la Jordanie fasse un jour partie de notre Assemblée. Cependant, une exigence doit être remplie à cette fin: la Jordanie doit abolir la peine de mort.

Mme AHMED-SHEIKH (Royaume-Uni)* – Je voudrais ajouter quelques mots à propos des femmes parlementaires. Je suis gouverneure de la fondation de Westminster. Dans ce cadre, j’ai eu la chance d’être à la tête d’un projet pour autonomiser les femmes au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, en permettant à des femmes parlementaires au Caire de participer à une formation avec le docteur Rula Alhroob, que nombre d’entre vous connaissent.

Il ne faut pas sous-estimer l’importance du rôle des femmes dans le débat politique. En effet, l’entrée des femmes au parlement n’est pas une avancée seulement pour les femmes, mais aussi pour le pays qu’elles servent.

Aussi, au-delà de ce rapport, nous devons réfléchir à ce que nous pouvons faire pour aider ces femmes, en particulier lorsque nous leur fournissons une formation, par exemple pour écrire des articles ou des discours, répondre aux journalistes, communiquer sur les réseaux sociaux et à la télévision. La Première ministre d’Écosse a parlé du travail qui a été fait pour l’autonomisation des femmes en Jordanie, lorsque le roi est venu nous rendre visite. L’action des femmes sur la scène publique peut être très importante.

Je vous invite donc tous à travailler afin d’encourager les femmes, en particulier dans les parlements à travers le monde, à entrer en politique le plus possible. C’est ainsi que nous créerons un monde meilleur et un meilleur environnement pour nos enfants.

M. FOURNIER (France) – Madame la Présidente, mes chers collègues, je veux d’abord saluer le rapport préparé par ma collègue et amie Josette Durrieu, qui illustre sa grande connaissance des réalités jordaniennes.

Lorsque nous avions débattu de l’octroi au Parlement jordanien du statut de partenaire pour la démocratie, en janvier 2016, j’avais estimé que cette décision était un pari, mais que ce pari méritait d’être tenté à condition de se montrer attentif et exigeant.

Au moment de dresser un premier bilan, je me félicite que le rapport remplisse cette condition: il est à la fois très complet et équilibré, et réaliste sur l’avancée des réformes et leurs perspectives.

La volonté réformatrice des autorités, et du roi en premier lieu, est intacte et c’est tant mieux! La société jordanienne reste en effet conservatrice et il est nécessaire de faire évoluer les mentalités, ce qui prendra du temps. De même, des progrès doivent être relevés, en particulier en matière institutionnelle et judiciaire, mais ils sont longs à se concrétiser et relèvent encore trop souvent de velléités plus que d’actions, notamment dans le domaine de l’éducation qui constitue un terrain de réformes structurelles à venir.

Certains engagements n’ont guère été tenus, en particulier en matière de droits des femmes ou de réforme de la détention administrative. Parfois même, la Jordanie a régressé. Je pense bien sûr à la peine de mort. Les exécutions ont repris cette année, alors qu’il existait un moratoire. Ce n’est pas acceptable! Il est urgent d’obtenir, non pas des promesses, mais des actes sur cette question qui est pour nous fondamentale et qui doit aussi le devenir pour les autorités jordaniennes.

Naturellement, je n’ignore rien des difficultés considérables auxquelles la Jordanie demeure confrontée, qu’il s’agisse de défis intérieurs, à commencer par le développement économique, comme de sa situation géopolitique délicate, entre les conséquences de la guerre en Syrie, le terrorisme et le conflit interminable au Proche-Orient. Réformer dans ce contexte est une gageure et traduit la détermination courageuse des Jordaniens.

Pour autant, des avancées sont indispensables. L’état de l’opinion publique ne saurait constituer un prétexte à l’immobilisme. Il existe des marges de manœuvre non négligeables, par exemple en matière de coopération avec le Conseil de l’Europe, laquelle reste insuffisante d’après ce qu’affirme le rapport.

Surtout, je considère que la fin de la peine capitale, ou à tout le moins un retour au moratoire sur les exécutions, doit constituer une condition sine qua non de la poursuite du partenariat pour la démocratie. Notre prochain réexamen de ce partenariat, dans deux ans, devrait être l’occasion, pour notre Assemblée, de se prononcer en considérant ce critère.

M. ABUSHAHLA (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Nous apprécions beaucoup le rapport de Mme Durrieu et nous souhaitons lui exprimer toute notre gratitude pour cette vision très globale. En effet, c’est un rapport vraiment exhaustif et réaliste qui montre son expérience ainsi que son savoir. Nous sommes désolés d’entendre qu’elle nous quitte, car elle nous a beaucoup appris.

Permettez-moi de saisir cette occasion pour parler de la Jordanie, notre frère jumeau. Nous sommes fiers de l’amélioration de la situation en Jordanie, qui a fait des progrès malgré l’instabilité qui l’entoure, à commencer, il y a de longues années de cela, par la guerre civile au Liban, puis la guerre d’Irak, la situation en Syrie. La Jordanie partage des frontières avec la Palestine, et vous savez combien l’instabilité y est importante. C’est l’un des pays qui fait le mieux face à la modernisation, qui tâche de promouvoir des valeurs universelles.

Les dirigeants jordaniens ont vraiment adopté les valeurs du Conseil de l’Europe et veulent vraiment les mettre en œuvre. Cela a été clairement exprimé par la volonté de la Jordanie de devenir partenaire pour la démocratie. Quand on ne s’y intéresse pas, on ne demande pas ce statut. La seule demande d’adhésion à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe est un témoignage du fait que les dirigeants, la société et le pays voulaient prendre le train de la modernisation et des valeurs universelles.

Toutefois, je vous prie de tenir compte du fait que nous connaissons l’instabilité et que notre culture est encore très éloignée de la vôtre. Il faut des siècles pour parcourir un tel chemin. Sur nos sociétés très conservatrices pèsent beaucoup de restrictions qui empêchent d’accélérer le rythme de la modernisation, mais nous faisons de notre mieux pour nous rapprocher des valeurs modernes. On ne peut le faire par un grand choc, mais par un mouvement sûr. Pousser trop fort, c’est risquer l’explosion. Ne l’oubliez pas, tenez compte de notre société!

Mme ALHEISAH (Jordanie, partenaire pour la démocratie)* – Mes chers collègues, merci beaucoup d’avoir octroyé à la Jordanie l’honneur de jouir du statut de partenaire pour la démocratie au sein du Conseil de l’Europe.

En tant que jeune politique et députée, je crois pouvoir dire que mon pays évolue dans la bonne direction en matière de démocratie, d’Etat de droit, de respect des droits de l’homme et de primauté du droit. Je ne répéterai pas ce que mes collègues de la délégation jordanienne ont déjà dit. J’appellerai plutôt votre attention sur la situation actuelle.

L’intégration et la forte participation des jeunes incitent à répondre rapidement aux appels régionaux et internationaux en faveur de l’instauration d’un pays démocratique encore plus sensible à la primauté du droit. Malgré tous les défis auxquels nous sommes confrontés à tous les niveaux, la Jordanie a échappé aux printemps arabes, qui ont eu les résultats que l’on connaît. Parallèlement, la sécurité et la stabilité ont été maintenues de façon diplomatique, grâce à notre roi Abdallah II. Nous ne souhaitons que vivre dans un pays sûr et démocratique.

Au cours des quatre dernières années, nous avons réalisé des efforts importants afin de rester attentifs à ce qui se passe au niveau régional et de faire de la Jordanie un pays plus civilisé, tout en luttant dans toutes les institutions contre la corruption. Le nouveau parlement a déjà aboli un certain nombre de lois et d’autres changements sont prévus. Les femmes, y compris celles vivant dans les villages, participent dans tous les domaines. Grâce à leur niveau élevé d’éducation, les femmes prennent conscience du rôle qu’elles peuvent jouer dans notre société.

Permettez-moi de souligner un autre point. Si les restrictions tribales persistent en Jordanie, la plupart des personnes qui appartiennent aux tribus ont évolué. Celles qui ont eu la chance de pouvoir aller vivre ailleurs sont revenues avec une vision différente. Beaucoup ont en effet décidé de revenir dans leur village d’origine, ce qui a eu un effet positif sur leur entourage, car ils ont pu échanger des idées et des points de vue.

La dernière réforme électorale prouve que nous avons commencé à nous libérer des décisions tribales. Je suis une vivante illustration de mes propos, puisque je jouis du soutien d’un certain nombre de familles issues de différentes tribus et religions. En outre, je suis jeune, et ma génération réclame le changement. Je suis convaincue que nos efforts en tant que jeunes parlementaires enthousiastes produiront des résultats tangibles, respectés par des personnes telles que vous-mêmes.

LA PRÉSIDENTE* – M. Elalouf, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme ALQAWASMI (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Mme Durrieu, dont le rapport est extrêmement objectif, est une femme dont nous partageons les valeurs. Elle a toujours su les défendre dans sa vie politique et dans sa vie personnelle. Au nom de ma délégation, merci de tous vos efforts, Madame.

En tant que Palestiniens, la Jordanie est notre voisin. Grâce à la volonté de son peuple et de ses dirigeants, elle a recueilli les réfugiés palestiniens après les guerres de 1948 et 1967. La plupart des réfugiés en provenance de pays arabes voisins, d’Irak et de Syrie, y sont accueillis malgré le manque de ressources. Ce pays fort, aux institutions transparentes, progresse en direction de la démocratie, de l’égalité et de la promotion des droits de l’homme.

On ne peut changer les choses qu’à partir de la racine. La Jordanie est sur de bons rails et a besoin de votre soutien pour continuer sa route.

LA PRÉSIDENTE* – La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle la réplique de la commission.

Mme DURRIEU (France), rapporteure – D’abord un immense merci à João Ary et à Despina Chatzivassiliou – elle n’est pas là mais elle est présente par l’esprit –, sans qui les rapporteurs ne seraient pas ce qu’ils sont. Merci à toute l’équipe, ainsi qu’à la présidence de la commission des questions politiques.

Je remercierai aussi pour leurs témoignages nos amis jordaniens et palestiniens, Khaled Albakkar, Kais Zayadin et Marram Alheisah. Les témoignages de ces deux jeunes Jordaniens résument mieux que quiconque leur situation nouvelle dans ce pays. Merci aux témoignages des orateurs palestiniens.

Je dirai un immense merci à tous mes compagnons de route, qui m’ont témoigné leur affection: Doris, George, Titus, Stefan, Ute, Bernard, ainsi qu’à tous les autres.

Amis Jordaniens, dans deux ans, aura lieu une nouvelle évaluation. Ce pays étrange et stable, comme l’a dit notre collègue Vareikis, vous le mesurez ici, bénéficie d’un capital de sympathie immense. Vous devrez être à la hauteur de ce témoignage. Mme Fiala et M. Loucaides l’ont traduit par les mots: soutien et respect à son parlement et à son peuple.

M. Corlăţean – il est parti, c’est dommage – a également souligné que votre pays était sur la bonne voie. Je le crois, je le dis, et je n’ai pas l’habitude de brader les valeurs du Conseil de l’Europe ni d’avoir un vocabulaire mercantile.

Comme l’a dit Lord Blencathra, il est important de prendre en considération le rôle du souverain. Celui-ci est un monarque éclairé, j’en suis chaque jour un peu plus convaincue. Il insuffle des réformes et cherche à faire évoluer le régime et son pays vers un État citoyen. Le mouvement est bien engagé, même si, comme l’a relevé Lord Blencathra, le rythme moyen-oriental n’est pas forcément le nôtre, tributaire qu’il est des mentalités. Celles-ci évoluent néanmoins, le précieux témoignage de Marram à l’instant le prouve. Les jeunes sont sortis du système tribal, même s’ils le respecteront toujours car il s’agit de leur culture et qu’ils y restent attachés; ils veulent autre chose. Respectons ce rythme, même si – je l’ai dit tout à l’heure sans concession et Stefan l’a évoqué également dans son intervention – nous préférerions une évolution moins chaotique.

Pour terminer, je rappellerai ce que, les uns et les autres, vous avez dit: la Jordanie est un pays pivot. Il est essentiel pour la stabilité et la paix d’un Moyen-Orient compliqué; il est essentiel pour le Moyen-Orient et pour l’Europe, et même au-delà. Ce pays doit être un pays de référence, et il est en train de le devenir.

Certes, il faut encore que le sort des femmes évolue, tout comme le statut des enfants issus de mariages mixtes entre des femmes jordaniennes et des hommes d’autres nationalités. Messieurs les juges de la Cour constitutionnelle, il faut aboutir à la suppression de la détention administrative. En tant que juges, vous savez mieux que quiconque qu’une telle décision ne peut relever que de la justice. Enfin, il est évident que nous vous demandons de respecter le moratoire de 2006; nous vous demandons de cheminer vers l’abolition de la peine de mort. Personne ne pourra le dire plus fort que moi.

Je remercie Ute pour son témoignage sur les organisations non gouvernementales et sur l’espace qu’est devenu la Jordanie s’agissant de la question nucléaire. Autant de témoignages qui vont dans le même sens.

Je terminerai sur ces trois mots: exigence, confiance, amitié.

LA PRÉSIDENTE – Je vous remercie à nouveau, Madame Durrieu. Vous avez fourni un travail considérable, celui d’une grande dame. Merci beaucoup.

M. KORODI (Roumanie), vice-président de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Tout d’abord, je pense que grâce à la discussion qui s’est tenue aujourd’hui au sein de notre hémicycle, nous avons prouvé que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et le partenariat pour la démocratie sont respectivement une institution et un instrument qui permettent de changer la société. C’est essentiel.

Je tiens à remercier Mme Durrieu pour l’excellent travail qu’elle a effectué, et pas uniquement au cours de ces derniers jours. Très impliquée, elle a su mener à bien le dialogue, organiser le débat avec nos partenaires jordaniens, identifier les mesures à prendre et les décisions à adopter au sein de notre Assemblée pour avancer encore.

À mon sens, notre partenariat pour la démocratie avec la Jordanie est un excellent exemple pour d’autres pays. Cet instrument, utilisé par les partenaires actuels, peut également être une source d’inspiration pour d’autres partenaires à venir. Je pense essentiel de maintenir ce dialogue. En tant qu’Assemblée, nous devons être actifs, et même proactifs, dans ces partenariats.

Je souhaite également remercier le secrétariat pour son travail. Le dialogue a été excellent au sein de la commission, et les débats que nous avons eus le mois dernier ont été fort intéressants.

En résumé, je remercie à nouveau Mme Durrieu pour l’excellent travail qu’elle a mené. Madame Durrieu, c’était merveilleux de vous voir siéger au sein de notre commission, et vous allez nous manquer. Mais, qui sait, peut-être nous reverrons-nous?

LA PRÉSIDENTE* – La discussion générale est close.

La commission des questions politiques a présenté un projet de résolution sur lequel neuf amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que le président de la commission proposait de considérer les amendements 7, 8, 1, 9, 3, 4 et 5, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Monsieur le vice-président?

M. KORODI (Roumanie), vice-président de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, ces amendements sont déclarés définitivement adoptés.

Nous en venons à la discussion des autres amendements. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention sur chaque amendement est limité à 30 secondes.

Je suis saisie de l’amendement 2.

M. RIGONI (Italie), rapporteur pour avis* – La commission des questions juridiques et des droits de l’homme, qui a présenté cet amendement, ne demande pas la lune. Nous souhaitons que les autorités jordaniennes, d’une part, démontrent leur véritable volonté politique, et, d’autre part, mettent en place un certain nombre d’initiatives afin de convaincre l’opinion publique de l’importance de l’abolition de la peine de mort.

En tant qu’Assemblée parlementaire, nous sommes prêts à soutenir ces initiatives en affichant notre conviction sur ce sujet, afin que non seulement les autorités et le Parlement jordaniens, mais également la société, soient eux aussi pleinement convaincus de la nécessité de cette abolition, que nous appelons de nos vœux.

Mme DURRIEU (France), rapporteure – Je regrette le dépôt de cet amendement car le chapitre sur la peine de mort figure dans le texte du projet de résolution. J’avais simplement proposé de dire autrement les choses, pour que l’effet soit moins brutal. Le rythme des mots est important, leur sens également.

Nous n’avons pas pu nous mettre d’accord sur le sous-amendement que je proposais. En conséquence, je propose d’en rester au texte initial. Croyez-moi, il est sans concession sur la demande d’abolition de la peine de mort.

M. KORODI (Roumanie), vice-président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 2 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Je suis saisie de l’amendement 6.

M. RIGONI (Italie), rapporteur pour avis* – Il s’agit du second amendement concernant la peine de mort que présente la commission des questions juridiques – laquelle l’a d’ailleurs adopté à l’unanimité. Nous ne faisons que demander que l’Assemblée accorde «une attention particulière au respect d’un moratoire effectif sur la peine de mort et à des avancées concrètes vers son abolition». Nous voulons donc que l’Assemblée soit attentive à cette question, rien de plus, mais il me semble qu’il faut tout de même le préciser dans le texte. À mon sens, il n’est jamais bon de cacher la poussière sous le tapis. Cela ne sert à personne et, en l’espèce, cela ne sert pas notre Assemblée. Cela n’est pas non plus de nature à encourager le parcours de réformes entamé par la Jordanie, et que nous soutenons d’ailleurs.

Mme DURRIEU (France), rapporteure – Je regrette que notre débat se termine de cette manière.

Monsieur Rigoni, c’est un problème de forme, pas de fond. Du reste, nous avons accepté sans aucun problème tous les autres amendements de la commission des questions juridiques, car les mots proposés convenaient, de même que leur ordre. Là, en revanche, ce n’est pas pareil. C’est une question de rythme: il s’agit du paragraphe 12, le dernier du projet de résolution. Il est difficile, après avoir conclu en disant que «l’Assemblée décide de continuer à suivre de très près la mise en œuvre des réformes», de revenir sur les points négatifs, d’ailleurs déjà longuement développés. On reprend, dans le dernier paragraphe, ce qu’il y a de positif, pour dire: continuons, nous serons vigilants, mais nous sommes sur la bonne voie. C’est uniquement un problème de forme: sur la peine de mort, tout ce qui devait être dit l’a été ; sur la détention administrative, j’ai repris intégralement votre proposition.

Pourquoi faut-il en permanence revenir sur ce qui a déjà été dit? Le paragraphe 12 est un paragraphe d’ouverture. Nous disons qu’il y a des réformes, que nous faisons confiance, même si nous restons vigilants. Voilà le sens de mon opposition à cet amendement. Nous pouvons casser le rythme si vous le jugez bon, mais je trouve que ce serait dommage.

M. KORODI (Roumanie), vice-président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 6 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14399, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté à l’unanimité des 45 votants.

LA PRÉSIDENTE* – Je vous adresse à mon tour mes remerciements, Madame Durrieu, de même qu’à toute l’équipe du secrétariat de la commission qui a travaillé sur ce rapport.

7. Prochaine séance publique

LA PRÉSIDENTE* – La prochaine séance publique aura lieu demain à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 19 h 45.

SOMMAIRE

1. Élection du/de la Président(e) de l’Assemblée (Résultats du troisième tour du scrutin)

2. Allocution de Mme Kyriakides, Présidente de l’Assemblée

3. Questions au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

M. Korodi, Mme Strik, MM. Tarczyński, Daems, Bustinduy, Rafael Huseynov, Lord Foulkes, MM. Kürkçü, Sobolev, Hunko, Mme Alqawasmi, M. Köck, Mme Christoffersen, M. Özcenk

4. Suivi de la Résolution 1903 (2012): la promotion et le renforcement de la transparence, de la responsabilité et de l’intégrité des membres de l’Assemblée parlementaire

Présentation par M. Liddell-Grainger, du rapport de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles (Doc. 14407)

Orateurs: Mmes Gillan, Rodríguez Hernández, MM. Kox, Divina, Mme Oomen-Ruijtenn, M. Nicoletti, Mme Duranton, M. Rustamyan, Mmes Hovhannisyan, Anttila, Christoffersen, MM. Schwabe, Vusal Huseynov, Mme Zohrabyan, M. Hollik, Mme Chugoshvili, M. Golub, Mmes Naghdalyan, Schou, MM. Rafael Huseynov, Simms, Seyidov

Réponses de M. le rapporteur et de Mme la présidente de la commission

Vote sur un projet de résolution

5. Élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Géorgie (Résultats du scrutin)

6. Evaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement de Jordanie

Présentation par Mme Durrieu du rapport de la commission des questions politiques (Doc. 14399 et Addendum)

Présentation par M. Rigoni de l’avis de la commission des questions juridiques (Doc. 14412)

Orateurs: Mme Fiala, M. Loucaides, Mme Pashayeva, MM. Vareikis, Corlăţean, Lord Blencathra, Mme Bartos, Lord Anderson, MM. Schennach, Albakkar, Önal, Mme Finckh-Krämer, MM. Howell, Zayadin, Mmes Kalmari, Ahmed-Sheikh, MM. Fournier, Abushahla, Mmes Alheisah, Alqawasmi

Réponses de Mme la rapporteure et de M. le président de la commission

Vote sur un projet de résolution amendé

7. Prochaine séance publique

Annexe I

Representatives or Substitutes who signed the register of attendance in accordance with Rule 12.2 of the Rules of Procedure. The names of members substituted follow (in brackets) the names of participating members.

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l’article 12.2 du Règlement. Le nom des personnes remplacées suit celui des Membres remplaçant, entre parenthèses.

ABAD, Damien [M.]

ÅBERG, Boriana [Ms]

AHMED-SHEIKH, Tasmina [Ms]

AMON, Werner [Mr]

ANDERSON, Donald [Lord]

ANTTILA, Sirkka-Liisa [Ms]

ARIEV, Volodymyr [Mr]

ARNAUT, Damir [Mr]

BALFE, Richard [Lord] (DONALDSON, Jeffrey [Sir])

BARTOS, Mónika [Ms] (CSENGER-ZALÁN, Zsolt [Mr])

BAYKAL, Deniz [Mr]

BEREZA, Boryslav [Mr]

BERNACKI, Włodzimierz [Mr]

BĒRZINŠ, Andris [M.]

BILDARRATZ, Jokin [Mr]

BİLGEHAN, Gülsün [Mme]

BÎZGAN-GAYRAL, Oana-Mioara [Ms] (PRUNĂ, Cristina-Mădălina [Ms])

BLENCATHRA, David [Lord] (EVANS, Nigel [Mr])

BLONDIN, Maryvonne [Mme]

BOUYX, Bertrand [M.] (SORRE, Bertrand [M.])

BÜCHEL, Roland Rino [Mr] (HEER, Alfred [Mr])

BUDNER, Margareta [Ms]

BUSHATI, Ervin [Mr]

BUSTINDUY, Pablo [Mr] (BALLESTER, Ángela [Ms])

BUTKEVIČIUS, Algirdas [Mr]

CHRISTOFFERSEN, Lise [Ms]

CHUGOSHVILI, Tamar [Ms]

CILEVIČS, Boriss [Mr] (LAIZĀNE, Inese [Ms])

CORLĂŢEAN, Titus [Mr]

CORSINI, Paolo [Mr]

CSÖBÖR, Katalin [Mme]

D’AMBROSIO, Vanessa [Ms]

DI STEFANO, Manlio [Mr]

DİŞLİ, Şaban [Mr]

DIVINA, Sergio [Mr]

DURANTON, Nicole [Mme]

EBERLE-STRUB, Susanne [Ms]

ESTRELA, Edite [Mme] (ROSETA, Helena [Mme])

FABRITIUS, Bernd [Mr] (OBERMEIER, Julia [Ms])

FAZZONE, Claudio [Mr] (BERNINI, Anna Maria [Ms])

FIALA, Doris [Mme]

FINCKH-KRÄMER, Ute [Ms]

FISCHER, Axel [Mr]

FOULKES, George [Lord] (CRAUSBY, David [Mr])

FOURNIER, Bernard [M.]

FRIDEZ, Pierre-Alain [M.]

GAFAROVA, Sahiba [Ms]

GAILLOT, Albane [Mme]

GALE, Roger [Sir]

GAMBARO, Adele [Ms]

GATTI, Marco [M.]

GERASHCHENKO, Iryna [Mme]

GHILETCHI, Valeriu [Mr]

GILLAN, Cheryl [Ms]

GIRO, Francesco Maria [Mr]

GODSKESEN, Ingebjørg [Ms] (WOLD, Morten [Mr])

GOLUB, Vladyslav [Mr] (LABAZIUK, Serhiy [Mr])

GONÇALVES, Carlos Alberto [M.]

GOUTTEFARDE, Fabien [M.]

GRECH, Etienne [Mr] (CUTAJAR, Rosianne [Ms])

GROTH, Annette [Ms] (WERNER, Katrin [Ms])

GROZDANOVA, Dzhema [Ms]

GÜNAY, Emine Nur [Ms]

GUZENINA, Maria [Ms]

HAGEBAKKEN, Tore [Mr] (VALEN, Snorre Serigstad [Mr])

HAJDUKOVIĆ, Domagoj [Mr]

HAJIYEV, Sabir [Mr]

HARANGOZÓ, Gábor [Mr] (MESTERHÁZY, Attila [Mr])

HEINRICH, Gabriela [Ms]

HERKEL, Andres [Mr] (NOVIKOV, Andrei [Mr])

HIGGINS, Alice-Mary [Ms] (CROWE, Seán [Mr])

HOLÍK, Pavel [Mr] (BENEŠIK, Ondřej [Mr])

HOLLIK, István [Mr] (GULYÁS, Gergely [Mr])

HOPKINS, Maura [Ms]

HOVHANNISYAN, Arpine [Ms]

HOWELL, John [Mr]

HUNKO, Andrej [Mr]

HUSEYNOV, Rafael [Mr]

HUSEYNOV, Vusal [Mr] (MAMMADOV, Muslum [M.])

JABLIANOV, Valeri [Mr]

JANSSON, Eva-Lena [Ms] (KARLSSON, Niklas [Mr])

KALMARI, Anne [Ms]

KERESTECİOĞLU DEMİR, Filiz [Ms]

KESİCİ, İlhan [Mr]

KOÇ, Haluk [M.]

KÖCK, Eduard [Mr] (ESSL, Franz Leonhard [Mr])

KORODI, Attila [Mr]

KOX, Tiny [Mr]

KRIŠTO, Borjana [Ms]

KROSS, Eerik-Niiles [Mr]

KÜÇÜKCAN, Talip [Mr]

KÜRKÇÜ, Ertuğrul [Mr]

LANGBALLE, Christian [Mr] (HENRIKSEN, Martin [Mr])

LEITE RAMOS, Luís [M.]

LĪBIŅA-EGNERE, Inese [Ms]

LIDDELL-GRAINGER, Ian [Mr]

LOGVYNSKYI, Georgii [Mr]

LOMBARDI, Filippo [M.]

LOUCAIDES, George [Mr]

LOUHELAINEN, Anne [Ms] (PACKALÉN, Tom [Mr])

LOUIS, Alexandra [Mme]

LUCHERINI, Carlo [Mr] (BERTUZZI, Maria Teresa [Ms])

LUPU, Marian [Mr] (BULIGA, Valentina [Mme])

MALLIA, Emanuel [Mr]

MAURY PASQUIER, Liliane [Mme]

MEALE, Alan [Sir]

MÜLLER, Thomas [Mr]

MUNYAMA, Killion [Mr] (HALICKI, Andrzej [Mr])

NAGHDALYAN, Hermine [Ms] (FARMANYAN, Samvel [Mr])

NĚMCOVÁ, Miroslava [Ms] (ZELIENKOVÁ, Kristýna [Ms])

NICOLETTI, Michele [Mr]

OBRADOVIĆ, Marija [Ms]

OHLSSON, Carina [Ms]

ÖNAL, Suat [Mr]

OOMEN-RUIJTEN, Ria [Ms]

O’REILLY, Joseph [Mr]

ORELLANA, Luis Alberto [Mr] (SANTERINI, Milena [Mme])

PALLARÉS, Judith [Ms]

PASHAYEVA, Ganira [Ms]

PECKOVÁ, Gabriela [Ms] (KOSTŘICA, Rom [Mr])

POCIEJ, Aleksander [M.] (KLICH, Bogdan [Mr])

POMASKA, Agnieszka [Ms]

POSTOICO, Maria [Mme] (VORONIN, Vladimir [M.])

PREDA, Cezar Florin [M.]

PSYCHOGIOS, Georgios [Mr] (KAVVADIA, Ioanneta [Ms])

RIBERAYGUA, Patrícia [Mme] (JORDANA, Carles [M.])

RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ, Melisa [Ms]

ROJHAN GUSTAFSSON, Azadeh [Ms] (GUNNARSSON, Jonas [Mr])

RUSTAMYAN, Armen [M.]

ŞAHİN USTA, Leyla [Ms]

SALMOND, Alex [Mr]

SANTANGELO, Vincenzo [Mr]

SCHENNACH, Stefan [Mr]

SCHOU, Ingjerd [Ms]

SCHWABE, Frank [Mr]

SEYIDOV, Samad [Mr]

SHARMA, Virendra [Mr]

SILVA, Adão [M.]

SMITH, Angela [Ms] (PRESCOTT, John [Mr])

SOBOLEV, Serhiy [Mr]

SOTNYK, Olena [Ms]

STELLINI, David [Mr]

STRIK, Tineke [Ms]

TAQUET, Adrien [M.] (MAIRE, Jacques [M.])

TARCZYŃSKI, Dominik [Mr]

TILKI, Attila [Mr] (GYÖNGYÖSI, Márton [Mr])

TOPCU, Zühal [Ms]

TRUSKOLASKI, Krzysztof [Mr]

TZAVARAS, Konstantinos [M.]

VÁHALOVÁ, Dana [Ms]

VAREIKIS, Egidijus [Mr]

VARVITSIOTIS, Miltiadis [Mr] (BAKOYANNIS, Theodora [Ms])

VEN, Mart van de [Mr]

VENIZELOS, Evangelos [M.] (CHRISTODOULOPOULOU, Anastasia [Ms])

VERCAMER, Stefaan [M.]

WALLINHEIMO, Sinuhe [Mr] (PELKONEN, Jaana Maarit [Ms])

WASERMAN, Sylvain [M.]

WENAWESER, Christoph [Mr]

WIECHEL, Markus [Mr] (NISSINEN, Johan [Mr])

WILK, Jacek [Mr]

WILSON, Phil [Mr] (PRITCHARD, Mark [Mr])

WOJTYŁA, Andrzej [Mr]

WURM, Gisela [Ms]

YAŞAR, Serap [Mme]

ZECH, Tobias [Mr]

ZINGERIS, Emanuelis [Mr]

ZOHRABYAN, Naira [Mme]

Also signed the register / Ont également signé le registre

Representatives or Substitutes not authorised to vote / Représentants ou suppléants non autorisés à voter

CORREIA, Telmo [M.]

DAEMS, Hendrik [Mr]

DEMETER, Márta [Ms]

EFSTATHIOU, Constantinos [M.]

NAUDI ZAMORA, Víctor [M.]

ZAVOLI, Roger [Mr]

Observers / Observateurs

ELALOUF, Elie [M.]

SIMMS, Scott [Mr]

TILSON, David [Mr]

WELLS, David M. [Mr]

WHALEN, Nick [Mr]

Partners for democracy / Partenaires pour la démocratie

ABU DALBOUH, Reem [Ms]

ABUSHAHLA, Mohammedfaisal [Mr]

ALBAKKAR, Khaled [Mr]

ALHEISAH, Marram [Ms]

ALQAWASMI, Sahar [Ms]

AMRAOUI, Allal [M.]

BOUANOU, Abdellah [M.]

CHAGAF, Aziza [Mme]

EL FILALI, Hassan [M.]

EL MOKRIE EL IDRISSI, Abouzaid [M.]

HAMIDINE, Abdelali [M.]

LABLAK, Aicha [Mme]

ZAYADIN, Kais [Mr]

Representatives of the Turkish Cypriot Community (In accordance to Resolution 1376 (2004) of

the Parliamentary Assembly)/ Représentants de la communauté chypriote turque

(Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

Erdal ÖZCENK

Annexe II

Representatives or Substitutes who took part in the ballot for the election of a Judge to the European Court of Human Rights in respect of Georgia / Représentants ou suppléants qui ont participé au vote pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Géorgie 

KARLSSON, Niklas [Mr] / JOHNSSON FORNARVE, Lotta [Ms]

KOÇ, Haluk [M.]