FR17CR34ADD1

AS (2017) CR 34
Addendum 1

SESSION ORDINAIRE DE 2017

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la trente-quatrième séance

Jeudi 12 octobre 2017 à 10 heures

ADDENDUM 1

Poursuivre et punir les crimes contre l’humanité
voire l’éventuel génocide commis par Daech

Les interventions suivantes ont été communiquées au service de la séance pour publication au compte rendu par deux membres inscrits sur la liste des orateurs et présents en séance mais qui n’ont pu être appelés à les prononcer faute de temps.

Mme DURANTON (France) – Notre collègue Pieter Omtzigt nous soumet un rapport très documenté et un projet de résolution ambitieux qui poursuit de nobles objectifs.

Le rapport dresse la longue liste des crimes épouvantables commis par l’État islamique et les individus qui s’en réclament : meurtres individuels et collectifs, torture physique et psychologique, esclavage, travail forcé, viols, endoctrinement, refus de soins, utilisation de « boucliers humains », et j’en passe…

En outre, ces crimes visent surtout des minorités spécifiques – yézidis, chrétiens et musulmans non sunnites –, ce qui pourrait les faire entrer dans le champ de la définition du génocide.

Dès lors, comment réprimer ces crimes et sanctionner leurs auteurs ? Cette question est particulièrement redoutable et nous paraissons démunis. Le projet de résolution, en dépit des intentions poursuivies, rencontre ici sa principale limite.

En effet, force est de constater une certaine impuissance. Comme le reconnaît notre rapporteur, « il n’y a actuellement aucun mécanisme judiciaire international qui soit en mesure de poursuivre Daech ». Les obstacles sont nombreux et paraissent difficilement surmontables.

Les crimes sont commis dans des États faillis ou qui refusent de devenir parties à la Cour pénale internationale – on comprend pourquoi ! –, tandis que leurs protecteurs à l’Onu mettent ou menacent de mettre leur veto à des résolutions du Conseil de sécurité.

Par ailleurs, la question de l’efficacité des sanctions mérite d’être posée. Si nous sommes tous d’accord pour vouloir réprimer les crimes de Daech, quelle peut être la portée de cette répression dès lors que la mort fait partie du projet djihadiste, selon l’expression de l’islamologue français Olivier Roy ? Devant l’échec de la tentative de djihad mondial, les soutiens de Daech se replient sur une vision désespérée et apocalyptique, qui est nihiliste. Celle-ci attire des jeunes fascinés par le destin de martyr qui leur est soudain offert. Leur comportement n’est ni islamiste, ni même salafiste, mais mortifère et suicidaire. Ce nihilisme va de pair avec un narcissisme exacerbé que Daech, qui rend possible de se construire en héros négatif faisant la « une » des journaux, sait très bien exploiter.

C’est pourquoi l’impact de la sanction paraît limité sur des individus qui sont fascinés, non par l’islam, mais par la radicalité et la violence.

Pour autant, la portée politique de la résolution que nous adopterons aujourd’hui ne doit pas être sous-estimée. Le combat contre Daech, qui vit de la peur qu’il inspire, doit être permanent.

Mme ZOHRABYAN (Arménie) – Chers collègues, notre Assemblée a parlé plusieurs fois des crimes commis par l’État islamique ou Daech qui ne peuvent être caractérisés que comme génocide. De nombreux parlements nationaux, notamment des États membres du Conseil de l’Europe comme la Lituanie, le Royaume-Uni, la France et l’Autriche, ainsi que les États-Unis, le Canada et l’Australie ont qualifié les actions de Daech comme génocide, le Parlement européen et le pape François ont fait de même. Les actes commis par Daech ont été reconnus par mon pays, l’Arménie, comme des actes de génocide. Ces crimes inhumains commis par les terroristes de l’État Islamique contre les minorités yézidies, chrétiennes, musulmanes non sunnites, est un génocide d’après tous les critères internationaux. Il est impossible pour un esprit sain d’imaginer comment les terroristes de Daech ont pu décapiter, abattre, enterrer vivant et traiter de manière dégradante les yézidis et « les esclaves de la Croix », un nom donné aux chrétiens par les terroristes.

Tout génocide non reconnu et non condamné est une voie vers un nouveau génocide. Ce concept simple a été exprimé plusieurs fois, et oui, si la communauté internationale avait reconnu et condamné à temps le gnocide d’un million et demi d’Arméniens commis par la Turquie ottomane, je vous assure qu’il serait peut-être possible aujourd’hui d’éviter les autres génocides sanglants.

J’appelle l’Assemblée à examiner l’investigation du journal bulgare Troud, d’après lequel, depuis plus de trois ans, les autorités de Bakou fournissent illégalement des armes aux zones de conflit dans le monde entier en utilisant des vols diplomatiques. D’après cette investigation, la compagnie aérienne d’Azerbaïdjan Silk Way Airlines a effectué au moins 350 vols secrets sous couverture diplomatique avec des avions chargés d’armes et de munitions pour alimenter les terroristes. Les vols diplomatiques ne sont en effet pas soumis à la règlementation et aux contrôles internationaux.

Les armes ont été fournies aux groupes terroristes en Syrie, en Irak, en Afghanistan, au Pakistan et au Congo par ces vols.

Chers collègues, l’un des principaux messages de ce rapport si important est de souligner l’indifférence de la communauté internationale. Une indifférence à cause de laquelle Daech est devenue un monstre du terrorisme international, une indifférence à cause de laquelle des légionnaires de différents pays occidentaux deviennent des terroristes islamistes, une indifférence à cause de laquelle un État membre du Conseil de l’Europe, l’Azerbaïdjan, fournit des armes aux terroristes par des vols diplomatiques.