DECLARATION LIMINAIRE

DE M. MEVLÜT ÇAVUŞOĞLU

PRESIDENT DE L’ASSEMBLEE PARLEMENTAIRE

PARTIE DE SESSION DE JANVIER 2011

(Strasbourg, Lundi 24 janvier 2011, 11h30)

Chers collègues,

Je tiens tout d'abord à vous remercier de la confiance que vous m’avez témoignée en me réélisant à la présidence de l'Assemblée parlementaire. Je peux vous assurer que je ne considère pas cette réélection comme une simple formalité. J'y vois un nouvel encouragement, mais aussi le rappel que je ne peux être votre président que tant que je représente vos intérêts et ceux de cette Assemblée. Telle a été la ligne de conduite que j’ai adoptée pendant la première année de mon mandat et que j’entends maintenir.

En ce début d'année se tient une nouvelle session de l'Assemblée. Elle est pour moi l’occasion de vous souhaiter à tous la bienvenue à Strasbourg pour une nouvelle année d’efforts inlassables et de vous présenter, ainsi qu'à vos familles, tous mes vœux.

Chers collègues,

Forts de nos réalisations de l’année dernière, c’est avec confiance que nous pouvons commencer à travailler. En 2010, nous avons continué à aider, par des visites, des rapports ou l'observation d'élections, les Etats membres qui se trouvaient dans une situation délicate au niveau politique, institutionnel ou des droits de l'homme ou qui supportaient les conséquences de conflits armés. Le fait que cette aide ait largement été saluée par différentes forces politiques, au pouvoir comme dans l'opposition, dans les pays concernés, est la preuve de votre objectivité, de votre équité et de votre professionnalisme.

Nous avons aussi réussi à traiter des questions que je juge prioritaires, dont :

- la lutte contre toutes les formes d'intolérance et de discrimination, en étant particulièrement attentifs aux droits de la population rom ;

- la défense des droits fondamentaux des groupes les plus vulnérables de nos sociétés, en particulier les enfants et les femmes, mais aussi les minorités et les migrants;

- le développement du dialogue interculturel et interreligieux ;

- le soutien de la réforme du Conseil de l'Europe et le lancement du processus de réforme de l'Assemblée parlementaire ;

- la promotion de l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme et l'ouverture d'un dialogue avec le Parlement européen sur l'élection des juges ;

- le rapprochement des Etats non membres du Conseil de l'Europe et de ses normes, en particulier par le Partenariat pour la démocratie.

Ce faisant, je suis convaincu que notre Assemblée s’est attiré le respect de nombreuses parties de l'Europe. Par notre action, nous avons aussi bénéficié d'un soutien accru au sein de nos parlements, ce qui est capital dans le contexte actuel des restrictions budgétaires imposées dans de nombreux Etats membres. Convaincre les présidents des parlements de toute l'Europe de la nécessité d'appuyer les activités de notre Assemblée a été l'une de nos premières priorités lors des visites officielles et des visites de travail que nous avons effectuées en 2010. Nous en avons compté plus de 40.

Nous n’avons eu de cesse, tout au long de l'année, d’améliorer nos relations institutionnelles avec d'autres organes et instances du Conseil de l'Europe. Nos relations de travail avec le Secrétaire Général sont aujourd'hui excellentes et nous avons noué des contacts directs et personnels avec les présidences respectives du Comité des ministres.

Chers collègues,

Je dois cependant reconnaître que malgré nos efforts, certaines de nos initiatives ont eu des résultats mitigés. Je pense en particulier aux conflits gelés en Europe. Les négociations concernant le règlement de ces conflits sont essentiellement menées par des diplomates de carrière, mais la diplomatie parlementaire joue aussi un rôle important en créant un climat de confiance propice à des solutions durables. Qu'il s'agisse de l'Abkhazie, de la Transnistrie, du Haut-Karabakh, de l'Ossétie du Sud ou de l'île de Chypre, les progrès réalisés l'année dernière pour instaurer un tel climat ne sont guère significatifs. Nous devons et allons poursuivre nos efforts, tout simplement parce qu'il n'y a pas d'autre solution.

De plus, dans certains Etats membres, l’affrontement entre le gouvernement et l’opposition met gravement en danger le fonctionnement des institutions démocratiques. En Albanie, les tensions existantes ont dégénéré, provoquant la mort de plusieurs personnes la semaine dernière. De telles situations sont inacceptables – on ne doit pas mourir parce qu’on mène un combat politique. Il importe que nous soutenions activement les mutations démocratiques en favorisant une évolution pacifique. C’est pourquoi, il faut que nous soyons davantage présents en Tunisie. Le peuple qui est descendu dans la rue nous envoie un message clair : « aidez-nous à bâtir une société démocratique fondée sur davantage d’égalité et de justice ».

Chers collègues,

J'ai dit que notre Assemblée gagnait en visibilité, et la meilleure preuve en est l'ordre du jour de cette partie de session. Nous allons accueillir quatre chefs d'État et de gouvernement, les présidents de la Turquie, de la Serbie et de la Roumanie ainsi que le premier ministre albanais. Ils seront parmi nous, pas simplement en raison du respect qu'ils portent à notre vénérable institution, mais aussi en raison des sujets graves que notre Assemblée va aborder, rapports sur la réconciliation dans les Balkans, le trafic d'organes au Kosovo, la protection des sources d'information des journalistes, pour n'en citer que quelques-uns.

Nous avons aussi reçu la demande de débats d’urgence. Outre la situation en Tunisie, le Bureau recommande de tenir un débat sur la violence à l’égard des chrétiens du Moyen-Orient et sur le Belarus.

Ces deux thèmes me sont très chers. La violence religieuse, fléau de l'humanité depuis la nuit des temps, a fait des millions de victimes au fil des siècles. Les extrémistes religieux ont toujours été là pour flétrir le message humaniste fondé sur les valeurs des principales religions. Nous devons affirmer haut et fort que ceux qui tuent au nom de la religion ne sont pas des croyants, mais des fanatiques et des terroristes.

Au sujet du Bélarus, je continue de penser que des progrès sont possibles par le contact et le dialogue. Cela dit, ce dialogue ne saurait s'engager lorsque les gens sont emprisonnés pour des motifs politiques évidents. Des candidats à la présidence et des défenseurs des droits de l'homme sont toujours en prison et certains sont en mauvaise santé. Leur libération doit être immédiate, c’est à cette condition que nous maintiendrons nos relations.

Chers collègues,

Avant de céder la parole, je tiens à vous rappeler une commémoration importante, traditionnelle de la partie de session de janvier. La date de la libération du camp d'extermination d'Auschwitz n'est pas une date ordinaire. Elle nous rappelle cruellement ce que peut être le sort de populations lorsque les principes universels des droits de l'homme ne sont pas respectés et que l’on commence à subdiviser les individus, les groupes et les nations en catégories, fondées ou non à jouir des droits de l'homme.

Les droits de l'homme et les libertés doivent être les mêmes pour tous, telle est notre position et c'est à l'aune de ce critère que nous devons mesurer le niveau de démocratie dans nos sociétés.

Je souhaite que cette semaine passée à Strasbourg soit pour vous une source d’enrichissement et de succès.

Je vous remercie de votre attention.