Monsieur le Vice-Président de la Cour européenne des droits de l'homme,
Madame la Secrétaire Générale adjointe du Conseil de l'Europe,
Monsieur le Commissaire aux droits de l'homme,
Monsieur le Directeur Berger,
Chers collègues, Mesdames et Messieurs,
« N'attendez pas qu'on nous prive de l'information pour la défendre ».
Tel est l'un des slogans phare de Reporters sans frontières que nous devrions faire notre, non seulement à l'occasion du séminaire d'aujourd'hui, mais de manière bien plus générale.
Les journalistes, par leur travail acharné d'investigation sur des questions politiques et de société, sont des acteurs moteurs de la démocratie et de l'Etat de droit.
Malheureusement, trop nombreux sont les journalistes qui ont payé de leur vie, sacrifié leur sécurité ou leur liberté pour nous garantir l'accès à l'information. Et la tendance n'est pas encourageante.
Reporters sans frontières dénombre pour 2014 :
- 56 Journalistes tués
- 21 Net-citoyens et citoyens-journalistes tués
- 179 journalistes emprisonnés
- 174 net-citoyens emprisonnés
Des chiffres qui font froid dans le dos et qui témoignent de l'urgence de la situation. Parmi les journalistes tués, plusieurs l'ont été au sein d'Etats membres du Conseil de l'Europe, dont 5 en Ukraine.
Alors n'attendons pas, n'attendons plus qu'on nous prive de l'information pour la défendre et pour défendre ceux qui, en quête de l'information, s'exposent à de graves dangers.
C'est d'ailleurs en réaction à l'assassinat d'une journaliste pour le moins emblématique, Anna Politkovskaïa, que Reporters sans frontières avait remis, le 15 décembre 2006, au Président de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe une pétition signée par près de 12.000 personnes et appelant à l'ouverture d'une enquête internationale sur cet assassinat. Cette perte tragique d'une journaliste au courage exceptionnel et l'immense appel de la société civile qui s'en est suivi ont conduit à l'adoption de la Résolution 1535 (2007) de l'Assemblée parlementaire sur les menaces contre la vie et la liberté d'expression des journalistes.
La Résolution 1535, qui avait été préparée par mon regretté collègue Andrew McIntosh, mentionne la détermination de l'Assemblée « à mettre en place un dispositif spécifique de suivi pour identifier et analyser les attentats contre la vie et la liberté d'expression des journalistes en Europe ainsi que l'avancée des enquêtes des autorités judiciaires et des parlements nationaux sur ces attentats » .
L'Assemblée avait également invité, dans sa Recommandation 1783 (2007), le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe de mettre en place « un dispositif d'identification et d'analyse des agressions contre les journalistes et des autres atteintes graves à la liberté des médias en Europe, en vue de formuler des recommandations politiques à l'intention des Etats membres sur les moyens de mieux protéger les journalistes et la liberté des médias. »
En outre, le Comité des Ministres a été invité à s'assurer « de la promotion de cette question au niveau des Nations Unies »
En ouvrant ce séminaire aujourd'hui, j'ai le grand plaisir et la profonde satisfaction de voir que ces graines ont porté leurs fruits et conduit à des actions concrètes au niveau des Nations Unies et du Conseil de l'Europe.
Un Plan d'Action des Nations Unies sur la sécurité des journalistes et la question de l'impunité a été approuvé le 12 avril 2012 et une journée internationale contre l'impunité des crimes contre les journalistes a été instaurée. Hier, le 2 novembre 2014, le monde a célébré cette journée. Notre séminaire d'aujourd'hui fait partie de cette coopération ciblée entre les Nations Unies et le Conseil de l'Europe dans le cadre du Plan d'Action des Nations Unies.
Enfin, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a décidé cette année de mettre en place une plate-forme Internet pour promouvoir la protection du journalisme et la sécurité des journalistes. Je remercie Madame Battaini-Dragoni et le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe pour avoir pris l'initiative de cette action.
Cette initiative concrète découle de la détermination du Conseil de l'Europe de ne plus attendre qu'on nous prive de l'information pour la défendre.
An effective protection of the work of journalists also depends on journalists themselves and their professional associations.
International organisations can create political and diplomatic pressure as well as abstract legal frameworks; but the factual information about individual attacks on journalists, as well as about legislative or administrative obstacles to their work, must come from journalists.
Unfortunately, Europe and the world have recently seen a huge backlash on media freedom and the security of journalists. Freedom of expression in general is at risk in a number of countries.
It is shocking that journalists were victims of targeted attacks at Maidan Square in Kyiv, at Gezi Park in Istanbul, in the conflict zones in Ukraine as well as on the border of Syria and in Iraq. Attacks against the media and against freedom of expression are unfortunately not rare and let me add than I am most concerned about the situation in this respect in the Russian Federation, in Turkey, in Azerbaijan but also in Hungary. It is alarming that journalists are physically attacked on political grounds and need police protection against organised crime. It is indeed worrying that journalists must fear for their employment in many countries, if their work angers those with political or economic power over the media. It cannot be accepted that many journalists are detained or in prison because of their work.
As long as we witness such acts against journalists and thus against media freedom and democracy, we must work to improve our legal standards and their practical application. Human rights are universal and must not be compromised.
As we all know - today more than ever - information cannot wait.
So let's not wait until we are deprived of it to stand up and fight for it!
Let's not keep journalists waiting to protect them.