Chères et chers collègues,
Mesdames et Messieurs,
Monsieur le Secrétaire Général,
Madame la Secrétaire Générale adjointe,
Monsieur le Secrétaire Général de l'Assemblée,
Je suis profondément touchée du très grand honneur que vous me faites et de la confiance que vous m'accordez en m'élisant à la présidence de notre Assemblée et je vous en remercie très sincèrement. Je ferai tout mon possible pour m'en montrer digne, dans l'exercice de cette haute responsabilité aussi exigeante que passionnante. Je remercie en particulier, pour leur précieux soutien, mes collègues du parlement et de la délégation suisses, ainsi que mon groupe politique et tous les groupes qui ont respecté les accords conclus, mais aussi toutes celles et ceux d'entre vous qui se sont engagés, ces dernières années, au service des valeurs du Conseil de l'Europe.
Vous le savez, mon élection résulte du très malheureux résultat des dernières élections italiennes qui ont vu non seulement la victoire des forces nationalistes mais aussi la non réélection de mon prédécesseur, Michele Nicoletti, auquel je veux rendre l'hommage qu'il mérite. Il a su incarner nos valeurs, dès son arrivée au sein de l'Assemblée, avec force et engagement. Il a dirigé nos travaux avec brio, en recherchant des solutions aux différents problèmes auxquels nous sommes confrontés, dans un contexte particulièrement délicat de séisme institutionnel.
Caro Michele,
Il risultato delle elezioni italiane del 4 marzo scorso è stato uno choc per noi tutti e, certamente, deve esserlo stato ancora di più per te. Esso, purtroppo, illustra in modo crudele le difficoltà che possono incontrare i membri di quest'Assemblea, che devono allo stesso tempo essere presenti nel proprio paese e circoscrizione, ed essere attivi qui a Strasburgo.
Tu sei riuscito ad affrontare questa sfida nel migliore dei modi, accedendo alla Presidenza di quest'Assemblea e portandoci tutta la tua dedizione, le tue competenze e la tua volontà di trovare delle soluzioni ai problemi che ci indeboliscono. Purtroppo, quest'impegno non è stato ricompensato.
Conoscendoti, sono certa che continuerai a impegnarti per promuovere i valori che condividiamo e che avremo l'opportunità di incontrarci di nuovo per difenderli insieme.
Caro Michele, grazie di tutto e buon proseguimento.
Ce séisme institutionnel que j'évoquais précédemment a ébranlé notre Assemblée, en menaçant de lézarder sa crédibilité, son honneur et par là, précisément, la confiance des citoyennes et des citoyens dans cette institution. Je pense bien sûr aux allégations de corruption qui ont touché, insidieusement, un organe pourtant chargé de promouvoir, entre autres, la démocratie. Preuve, soit dit en passant, que malgré son pouvoir décisionnel limité notamment à l'élection des juges de la Cour Européenne des Droits de l'Homme, notre Assemblée touche, par son travail, à l'image des Etats membres et à la vie quotidienne des peuples européens.
Avant de pouvoir prendre la mesure des dégâts, l'Assemblée a réagi au mal qui semblait la ronger, dès 2012, en se dotant d'un code de conduite. Les nouveaux événements survenus depuis l'ont incitée, l'année dernière, à renforcer la responsabilité de ses membres occupant d'importantes fonctions électives et, surtout, à adopter une véritable stratégie de lutte contre le cancer de la corruption. Un mal qui, s'il est difficile à déceler et encore plus à prouver, ne peut être toléré, même à l'état de simple soupçon.
Comme le cancer, la corruption concerne l'ensemble du corps – parlementaire en l'occurrence – et nécessite un long combat. L'Assemblée dans son ensemble, mais aussi chacun de ses Etats membres, a donc une responsabilité dans l'application et le suivi des mesures préconisées par le groupe d'enquête indépendant. Sous ma présidence, l'Assemblée va poursuivre la reconquête de son honneur et sa mue vers une transparence totale. Mais les gouvernements et les parlements nationaux doivent aussi, comme les y invite le rapport, « prendre les mesures qui s'imposent à l'égard des cas mentionnés et <…> faire rapport à l'assemblée avant fin 2018 ». Au-delà des cas concrets allégués, ils doivent œuvrer à prévenir la corruption en leur sein.
Si la crise – ou le séisme dont je parlais – permet au final de construire des fondations plus saines pour l'Assemblée elle-même et pour d'autres institutions nationales ou internationales, alors celle-ci n'aura pas été vaine et, mieux, aura contribué à renforcer les valeurs que, toutes et tous, nous partageons. Des valeurs qui ne sont pas à vendre, pas plus que le Conseil de l'Europe ne s'achète, par le biais de cadeaux ou d'autres promesses indues.
Ces valeurs, celles du Conseil de l'Europe, ont plus que jamais besoin d'être promues, portées, vécues, sur le continent européen et au-delà. Car les vents contraires ne soufflent pas qu'à l'interne de cette institution. La montée des extrémismes, des violences et de la répression, dans un contexte migratoire et sécuritaire très tendu, requièrent que nous réaffirmions haut et fort, sans relâche, ce qui nous unit. Les évolutions inquiétantes, voire les attaques majeures observées dans un certain nombre de pays européens contre la liberté d'expression, la liberté des médias, la liberté de réunion, l'égalité et la protection des minorités l'exigent. Les droits de l'homme, la démocratie et l'Etat de droit doivent faire reculer la souffrance, l'exploitation et la misère. À l'exclusion, la haine et le chacun pour soi, nous devons opposer la justice, la solidarité et la cohésion.
Cette force de paix ne sera possible qu'avec l'implication active de chacune et chacun de nous et des Etats que nous représentons. L'esprit d'échange, de dialogue et de respect mutuel de nos différences – l'unité dans la diversité – doit nous permettre de travailler ensemble. Malgré une situation financière difficile, le Conseil de l'Europe et notre Assemblée en particulier ne se laisseront pas affaiblir, quitte à redéfinir nos priorités et nos méthodes de travail. Si le Conseil de l'Europe ne s'achète pas, il ne se laissera en aucun cas brader. En tant qu'Assemblée, je nous invite à voir ce qui, justement, nous assemble et à résister ensemble aux coups de boutoir qui menacent directement cette institution.
Ces coups de boutoir souverainistes sont portés, parfois, par des membres fondateurs de ce puissant instrument de protection des droits fondamentaux sur le continent européen qu'est le Conseil de l'Europe. De la simple méfiance à la suspension de l'application de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, en passant par les tentatives de limiter le champ de son application, ces remises en question n'épargnent pas mon pays, la Suisse, qui devra voter prochainement sur un texte visant à consacrer la primauté du droit constitutionnel national sur le droit international. En attaquant le Conseil de l'Europe et ses instruments de base – la Convention et la Cour -, ce sont les citoyennes et citoyens d'Europe qu'on attaque, en fragilisant leurs droits, en affaiblissant leur protection dans leur relation à l'Etat.
Pour rester un instant en Suisse, la culture de ce pays qui est le mien et qui pratique depuis longtemps la démocratie directe imprégnera forcément ma présidence. J'aimerais, durant mon mandat, faciliter les échanges et contribuer à nous rassembler autour de solutions constructives. Et, de même que j'apporterai un peu de Suisse à Strasbourg, j'amènerai un peu de Strasbourg en Suisse. Je compte profiter de ma présidence pour faire mieux rayonner dans mon pays le Conseil de l'Europe, souvent méconnu, et renforcer les liens qui unissent historiquement, culturellement, profondément mon pays à cette institution. La Suisse n'est-elle pas, après tout, le berceau des Conventions de Genève, de la Croix-Rouge et du Conseil des droits de l'homme ?
Switzerland is also multilingual, as is the Council of Europe. As you will have noticed, I speak here mainly in French – one of the official languages of the institution – and this is not unintentional. Language is more than a simple means of communication; it is the very reflection of a culture. The defence of minorities and respect for our cultural diversity, all of which are part of the rich tapestry of Europe, therefore necessitate the use of multiple languages and resistance to the predominance of a single language. That is why, even though I can speak and understand English, I now speak mainly in French, my own language, despite some forays from time to time into the language of Shakespeare, and I hope that it will remain possible for us all to continue to speak as much as possible in our own languages in this Chamber.
I would also like to say that I am particularly proud to be a female President, since so far only three women have presided over this assembly, and they did so wonderfully. They are Leni Fischer, Anne Brasseur and Stella Kyriakides. I had the chance to see Anne and Stella in this role and to appreciate their qualities. In keeping with our values of equity, equality and representativeness, I believe it is important to apply to ourselves the parity that we demand in other forums and in other contexts such as, for example, for lists of judges. Although women are not a minority in society, when it comes to climbing the political, economic or academic ladder, they remain mostly on the bottom rungs and, like oxygen, they become scarcer the higher up one goes. It is also this conviction that a true democracy cannot forget half of humanity and that women must be represented with dignity, including in high office, which I will embody during my Presidency. The promotion of equality in this Assembly, its integration in all political fields, in all measures and in the functioning of this Parliament will be one of my priorities, in line with the Council of Europe's Gender Equality Strategy 2018-2023.
J'ai souvent trouvé que les discours duraient trop longtemps et je ne voudrais pas abuser de l'attention exceptionnelle que vous me prêtez aujourd'hui. J'aimerais simplement encore souligner toute l'importance que j'accorde à notre activité de parlementaires et à la dignité d'un Parlement qui réunit des représentantes et des représentants de 47 pays différents, autour de valeurs si proches et si cruciales. Le terme d' « assemblée » prend ici tout son sens : c'est, plus qu'une réunion, une union, riche de ses pluralités, autour de l'Europe que nous aspirons à construire ensemble, de concert avec nos concitoyennes et nos concitoyens. Une Europe unie, où le respect de la dignité humaine est le pilier de la société.