Poul

Nyrup Rasmussen

Premier ministre du Danemark

Discours prononcé devant l'Assemblée

mardi, 29 juin 1993

Monsieur le Président, Madame le Secrétaire Général, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, peut-on imaginer que dans deux ans la présente Assemblée se réunisse à Sarajevo? La question peut paraître absurde, mais n’oublions pas que nous sommes à Strasbourg, dans une région pour laquelle on s’est battu pendant des siècles. Sur des champs de bataille, non loin d’ici, des milliers de jeunes Européens ont trouvé la mort en se combattant mutuellement. Qui aurait pu penser que les deux grands adversaires de l’époque, ceux-là mêmes qui luttaient pour s’arracher cette région et cette ville, se retrouveraient inextricablement engagés dans un processus de coopération qui rend désormais toute guerre entre eux impossible et impensable.

A évoquer Sarajevo et la guerre qui se déroule dans l’ancienne Yougoslavie, nous nous sentons pleins de tristesse et de colère, mais aussi de frustration, car, quoi que nous fassions ou envisagions de faire, nous savons qu’il n’existe pas de solution complète et facile. Mais le bon exemple de Strasbourg nous incite au moins à garder espoir. C’est ma première réflexion. Ma deuxième observation portera sur l’ampleur et la complexité de la tâche à laquelle l’Europe se trouve confrontée aujourd’hui. En peu de temps, nous avons assisté à l’effondrement d’un certain ordre mondial. Des structures politiques et économiques inflexiblement verrouillées ont soudain lâché, et leur débâcle a amenuisé toute possibilité de prévoir l’avenir. Nous tenons dans nos mains des possibilités d’espoir et d’ouverture, mais aussi une situation d’insécurité et surtout une responsabilité beaucoup plus difficile à assumer – politiquement, économiquement et intellectuellement – qu’elle ne l’a été depuis des décennies.

Ce n’est pas seulement le système international qui connaît des changements spectaculaires; ce sont aussi des notions fondamentales comme la sécurité, la souveraineté et la non-ingérence dans les affaires intérieures d’un pays. La sécurité, par exemple, a pris une dimension beaucoup plus vaste qu’autrefois: elle englobe désormais les risques liés au sous- développement, aux catastrophes écologiques, au terrorisme, aux vagues de réfugiés, au racisme et à de nombreux autres phénomènes. Pour faire face à ces risques, il faudrait naturellement trouver de nouveaux moyens, d’une autre nature que les moyens militaires traditionnellement associés à l’idée de sécurité. Ce qui conduit nos pays à reconsidérer leur conception de la politique étrangère.

Nous remarquons une acceptation croissante des principes de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit, et, parallèlement, une résurgence des conflits ethniques et de la xénophobie. Nous observons une tendance à une intégration accrue et, en même temps, un développement du régionalisme. La fin de la guerre froide n’a certainement pas contribué à rendre les choses plus faciles et plus prévisibles.

Ces nouvelles complexités internationales ne sont nulle part plus apparentes qu’en Europe, sur notre propre continent. De plus, nos pays traversent actuellement une récession économique prolongée qui sème dans son sillage le chômage et la désespérance sociale chez des millions d’Européens.

Comme le disait ces jours derniers un politicien européen, on peut imaginer quelle nouvelle menace pour la démocratie et la stabilité de notre système politique pourrait représenter la conjonction d’un fort chômage, de nouvelles vagues de réfugiés et d’une insécurité sociale croissante. Il n’est donc pas étonnant que des voix se soient élevées pour exprimer des doutes sur la capacité des institutions européennes à gérer cette situation entièrement nouvelle. Personnellement, je les crois capables d’assumer cette tâche, mais il faut les renforcer pour qu’elles puissent répondre convenablement au défi.

Le Conseil de l’Europe est une des plus anciennes de ces institutions européennes. Il repose sur les grands idéaux de la démocratie, des droits de l’homme et de la prééminence du droit. Ces exigences élevées, qui sont le patrimoine commun de ses membres, restent la base et la raison d’être du Conseil de l’Europe.

Mais le vent du changement a soufflé aussi sur le Conseil de l’Europe, qui, après être resté pendant quarante ans une organisation d’Europe de l’Ouest, compte aujourd’hui vingt-neuf membres et a acquis un caractère quasiment paneuropéen qui en fait un forum unique en son genre. L’Assemblée parlementaire joue un rôle particulièrement important à cet égard.

Sur cette toile de fond, il est tout à fait approprié que le Conseil de l’Europe invite les chefs d’Etat et de gouvernement à se réunir en octobre pour examiner les nouveaux défis auxquels nous sommes confrontés. Ce sera la première fois qu’un tel sommet aura lieu dans le cadre du Conseil de l’Europe, mais je pense que l’évolution radicale de la situation justifie amplement cette étape historique. Nous sommes reconnaissants au Gouvernement autrichien d’avoir proposé d’accueillir ce sommet à Vienne.

Une question extrêmement importante, inscrite à l’ordre du jour de ce sommet, sera celle du rôle futur du Conseil de l’Europe et de sa place dans la nouvelle architecture européenne. Depuis la création du Conseil, d’autres organisations ont vu le jour, notamment la Communauté européenne et la CSCE, toutes deux actives dans de nombreux domaines qui recoupent les compétences du Conseil de l’Europe. Nous devons donc veiller à répartir raisonnablement le travail entre ces organisations, et à leur donner à chacune une place naturelle, bien définie, dans le tissu européen que nous nous apprêtons à constituer.

L’essentiel est d’utiliser pleinement leurs compétences respectives et d’éviter les doubles emplois et les déperditions de ressources.

Mon gouvernement et moi-même sommes convaincus que le Conseil de l’Europe verra son importance croître dans l’Europe de demain. La juridiction obligatoire de la Cour européenne des Droits de l’Homme et les compétences inégalées de la Commission et d’autres organes spécialisés du Conseil en matière de droits de l’homme et d’institutions démocratiques sont certainement appelées, plus que jamais, à s’exercer. Dans ces domaines et dans quelques autres, le Conseil de l’Europe aura plus qu’assez pour s’occuper au cours des années à venir. Il conviendra certainement de concentrer les ressources de l’Organisation sur la réalisation des tâches les plus importantes. C’est une évolution que nous suivrons tous avec le plus grand intérêt. A cet égard, j’aimerais saluer et appuyer ici les efforts menés par le Secrétaire Général pour adapter la structure administrative de l’Organisation à un environnement international en mutation.

Puisque j’aborde la question de la coopération entre le Conseil de l’Europe et les autres organisations européennes, permettez-moi d’évoquer un instant la coopération avec la Communauté européenne et la CSCE.

Il est naturel que la Communauté européenne, en tant que principale force d’intégration en Europe, reste un fort pôle d’attraction pour de nombreux pays européens. Comme vous le savez, des négociations sur l’élargissement de la Communauté ont commencé en Autriche, en Suède, en Finlande et en Norvège. A la réunion du Conseil européen tenue à Copenhague la semaine dernière, nous avons pris la mesure des importants progrès réalisés dans les négociations avec ces pays, et le Conseil européen a exprimé sa détermination à voir le premier élargissement de l’Union européenne devenir réalité pour le 1er janvier 1995. Il a également confirmé la perspective d’une ouverture de l’Union européenne aux pays d’Europe centrale et orientale. Pour ces pays, l’adhésion au Conseil de l’Europe est un premier pas important sur la route vers plus d’intégration à l’Europe. La coopération entre le Conseil de l’Europe et la Commission des Communautés européennes pour favoriser le processus de démocratisation de ces pays d’Europe centrale et orientale est donc une chose très importante, qu’il convient de renforcer autant que possible. J’ai évoqué la division du travail entre le Conseil de l’Europe et la Communauté européenne: ici encore nous pourrions unifier notre action et renforcer notre coopération. Pendant tout le reste des années 90, par exemple, lorsque le Conseil de l’Europe constaterait que les droits de l’homme ne seraient pas respectés, la Communauté européenne pourrait agir en mettant en œuvre des moyens économiques et autres. J’entrevois une importante coopération, que j’espère voir renforcée, et je vous assure que le Danemark prendra des mesures énergiques pour aider à la réalisation d’une telle coopération.

Si le Conseil de l’Europe a une longue histoire en matière de défense des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la CSCE a aussi, pour sa part, énormément contribué à promouvoir ces valeurs, et un important travail se fait dans ces deux enceintes, qui ont toutes deux de grandes tâches à accomplir. Nous nous félicitons donc du rapprochement qui s’est opéré depuis quelques années entre le Conseil de l’Europe et la CSCE. Sur ce plan, je rappellerai que des représentants du Conseil de l’Europe sont invités à participer aux réunions d’experts et aux séminaires de la CSCE dans les domaines qui intéressent le Conseil. De plus, un représentant de ce dernier assiste régulièrement au Comité des hauts fonctionnaires de la CSCE. Le Conseil de l’Europe a aussi dépêché des fonctionnaires pour participer aux missions d’enquête de la CSCE. Je crois savoir enfin que la CSCE comme le Conseil de l’Europe entendent renforcer cette coopération et cette coordination de leurs efforts.

Un autre point qui figurera à l’ordre du jour du Sommet de Vienne sera – et j’insiste sur ce point – la réforme du mécanisme de contrôle de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Cette année marque le quarantième anniversaire de l’entrée en vigueur de cette Convention, qui a été signée à Rome le 4 novembre 1950. La Convention européenne des Droits de l’Homme représente l’une des réalisations les plus marquantes du Conseil de l’Europe. Par la jurisprudence de ses deux organes – la Commission et la Cour européennes des Droits de l’Homme – cette Convention a exercé une grande influence sur la législation et la pratique juridique des Etats membres. Son système unique en son genre, par lequel des particuliers peuvent déposer une plainte devant la Commission européenne des Droits de l’Homme lorsqu’ils estiment que leurs droits et libertés ont été violés, a véritablement instauré un exemple sans précédent dans le contrôle et la sauvegarde des droits fondamentaux de l’homme au niveau international.

Ces dernières années, les institutions des droits de l’homme de Strasbourg ont toutefois été surchargées de travail, en raison du nombre croissant de requêtes déposées devant la Commission. Il en est résulté une prolongation excessive du temps nécessaire pour traiter ces requêtes. On a pu dire à juste titre que les institutions des droits de l’homme étaient victimes de leur propre succès et tous se sont accordés à reconnaître qu’une réforme du mécanisme de contrôle de la Convention européenne des Droits de l’Homme s’imposait d’urgence. Après des délibérations prolongées et approfondies – auxquelles l’Assemblée parlementaire a apporté une importante contribution – il est satisfaisant de constater qu’il a été décidé de procéder à l’élaboration d’un protocole d’amendement à la Convention européenne des Droits de l’Homme visant à instaurer un nouveau système de contrôle qui, peut-on espérer, résoudra les problèmes existants. Même si quelques mois seulement nous séparent du sommet qui se tiendra à Vienne, j’espère que le projet de nouveau protocole sera prêt à temps pour cette réunion.

Pour en revenir à la question de l’élargissement du Conseil de l’Europe, il s’agit peut-être là de la question la plus cruciale à laquelle le Conseil ait à faire face dans l’avenir. J’ai déjà dit que le Conseil était presque paneuropéen. J’aimerais certes qu’il le devînt véritablement. Je serais donc heureux que tous les pays d’Europe qui remplissent les conditions requises adhèrent au Conseil de l’Europe. Nous devrions faire tout notre possible, individuellement en tant qu’Etats et collectivement au sein du Conseil, pour aider les pays candidats dans les efforts qu’ils déploient pour remplir ces conditions. Je pense en particulier à deux candidats d’Europe centrale et orientale. Je n’ignore pas et j’apprécie les efforts considérables du Conseil de l’Europe pour élaborer et mettre en œuvre des programmes de coopération à cette fin. Je tiens également à remercier les membres de votre Assemblée pour le concours précieux qu’ils apportent à l’évaluation des pays candidats, tâche extrêmement difficile et délicate, mais combien nécessaire. Je me félicite de la coopération étroite entre l’Assemblée et le Comité des Ministres à cet égard.

A propos de la question de l’adhésion, il ne faut pas oublier que non seulement le processus préparatoire, mais aussi l’adhésion elle-même, une fois acquise, soutiendront la démocratie et les droits de l’homme dans les pays candidats.

L’élargissement du Conseil de l’Europe n’est pas seulement une question de taille, mais aussi une question de substance et de tradition. Beaucoup de nouveaux pays membres ont une histoire politique différente de celle des pays fondateurs d’Europe occidentale. Le Conseil de l’Europe est actuellement engagé dans une vaste opération qui vise à aider les pays d’Europe centrale et orientale dans leur processus de démocratisation. Mais il faut peut-être aussi s’attendre à voir une plus grande diversité historique des pays membres du Conseil de l’Europe entraîner une transformation progressive de l’Organisation pendant les années à venir. C’est là aussi un aspect qui mérite réflexion.

Notre souci justifié de voir les futurs Etats membres respecter les normes du Conseil de l’Europe ne doit aller de pair avec le laxisme quant au respect de ces mêmes normes par les membres actuels. Il ne doit pas y avoir deux poids, deux mesures.

Pour terminer, j’évoquerai deux problèmes importants dans l’Europe d’aujourd’hui: la protection des minorités et la lutte contre le racisme et la xénophobie. Ces deux sujets sont débattus dans diverses enceintes et seront également abordés au Sommet de Vienne. Je suis sûr que le débat consacré à ces questions par votre Assemblée apportera une contribution utile au Sommet.

Nous avons tous été choqués et profondément attristés de voir de nouveaux conflits éclater dans diverses parties de l’Europe, en particulier dans l’ancienne Yougoslavie. Ces événements ont mis en évidence la nécessité d’apporter des solutions durables aux problèmes auxquels se heurtent les minorités nationales et ethniques dans notre région du monde. A cet égard, il est naturel que le Conseil de l’Europe, avec sa longue tradition et sa grande pratique dans le domaine des droits de l’homme, apporte une sérieuse contribution à la résolution des problèmes auxquels se heurtent les minorités nationales, ethniques et autres. J’espère vivement prendre part au débat sur la répartition des tâches entre Parlement européen et Conseil de l’Europe. Je suis convaincu que le travail entrepris au sein du Conseil de l’Europe en vue d’élaborer éventuellement de nouveaux instruments juridiques internationaux pour la protection des droits des minorités nationales pourrait être utile en la matière. J’espère que des progrès suffisants seront réalisés dans ce sens à temps pour le Sommet de Vienne.

Les bouleversements qui se sont produits en Europe ont également entraîné un nouvel afflux de réfugiés en provenance de l’ancienne Yougoslavie et d’autres contrées. De nombreux pays d’Europe occidentale ont fermé leurs frontières. Nous n’avons pas encore trouvé l’attitude appropriée vis-à-vis de la nouvelle vague de réfugiés. Dans certains de nos Etats membres, ces faits ont provoqué la réapparition de réactions de racisme et de xénophobie, phénomènes détestables, contraires aux idéaux mêmes sur lesquels notre Organisation est fondée. Nous devons condamner avec vigueur les violences exercées récemment à l’encontre d’immigrés. Nous avons l’obligation, aux niveaux national et international, de faire tout notre possible pour mettre un terme à ces comportements agressifs et aux actes de violence qu’ils engendrent – inacceptables dans nos sociétés démocratiques. Nous devons apprendre à accepter les autres tels qu’ils sont et apprécier la diversité des traditions et des cultures. Ce n’est que par la tolérance et la compréhension que nous pourrons faire face aux problèmes et aux grands défis de notre époque, et les résoudre. Une action concertée de la part du Conseil de l’Europe dans ce domaine s’impose assurément.

Il y a quelques années, le Président Mitterrand a dit que l’Europe se trouve placée devant un choix: faire un pas en avant et entrer dans le XXIe siècle, ou faire un pas en arrière, et revenir au XIXe siècle. Nous savons tous ce que nous préférons. Mais poursuivre un objectif n’est pas suffisant – les moyens ont aussi leur importance. L’un de ces moyens est sans nul doute le Conseil de l’Europe.

Monsieur le Président, Madame le Secrétaire Général, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, je suis heureux d’avoir eu l’occasion de m’adresser à vous et je forme les meilleurs vœux pour l’œuvre si fondamentale qui vous incombe encore.

M. LE PRÉSIDENT (traduction)

Merci beaucoup, Monsieur le Premier ministre, de cette allocution propre à nourrir nos réflexions. Nous trouvons évidemment en vous un ami et un partisan. J’espère que vous appuierez nos propositions de révision du Statut du Conseil de l’Europe, afin que nous puissions conférer le poids qui convient à l’Assemblée parlementaire.

Vous avez bien voulu accepter de répondre aux questions de plusieurs membres de l’Assemblée. J’ai déjà une liste de treize membres qui souhaitent vous interroger. Je rappelle à mes collègues qu’ils ont trente secondes pour formuler leur question et trente autres secondes pour poser une question supplémentaire, après quoi je devrai leur couper la parole. Autrement nous manquerions de temps pour toutes les questions. Le temps est court, en effet, mais j’espère que nous pourrons placer nos treize question. Monsieur Rehn, vous avez la parole.

M. REHN (Finlande) (traduction)

La Communauté européenne souffre d’un déficit démocratique imposant du fait que l’on confère des pouvoirs accrus à des institutions communautaires telles que le Parlement européen. Mais nous sommes aux prises avec un profond dilemme, car les peuples des petits pays craignent avec raison la perte de leur influence politique dans le cas où les structures de la Communauté viendraient à être changées. En tant que Premier ministre d’un petit Etat membre dont la population est résolue, qu’avez-vous l’intention de faire pour préserver l’influence politique des petits Etats dans le processus de décision de la Communauté?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Je suis heureux de répondre à votre question en disant que vous avez raison de souligner qu’il y a théoriquement conflit entre le déficit démocratique et la nécessité de renforcer le Parlement européen, tout en assurant l’influence des petits pays de la Communauté.

Je vous ferai une réponse pragmatique. Nous avons tous reconnu, à la réunion du Conseil européen de Copenhague, que la base de l’adhésion à la Communauté européenne des quatre membres de l’Association européenne de libre-échange doit être le Traité de Maastricht et l’équilibre des questions institutionnelles entre petits et grands pays. Je puis assurer l’Assemblée que les demandes de petits pays bénéficieront de l’équilibre institutionnel fondamental.

Pour le long terme, nous devons réexaminer certaines demandes d’adhésion des pays d’Europe centrale et orientale. La base de l’adhésion des quatre pays candidats est le Traité de Maastricht, et les conclusions de Lisbonne de juin de l’an dernier fourniront un schéma institutionnel équilibré.

M. COLUMBERG (Suisse) (traduction)

J’estime que la construction de l’Europe ne peut se faire qu’avec l’assentiment de ses peuples.

Ainsi deux référendums ont dû être organisés au Danemark à propos du Traité de Maastricht. Quelles conclusions M. le Premier ministre peut-il tirer de ces référendums et de leur résultat pour l’organisation future de la politique européenne.

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Je note avec plaisir votre grand intérêt pour la Communauté européenne. Je ferai d’abord une remarque générale. Dans les affaires européennes, les politiques ne doivent pas sous-estimer le travail capital que nous accomplissons ici et au sein de la Communauté.

Il existe deux mouvements dans les affaires mondiales et européennes. Le premier, la tendance ou le mouvement international nous montre que les gens aiment vivre leur vie quotidienne dans leur propre milieu régional. Les politiques doivent donc diriger leur attention beaucoup plus sur la vie des gens ordinaires qu’ils n’ont coutume de le faire.

Pour ce qui est des référendums, mes collègues du Parlement danois et moi-même en avons une grande expérience. Cette expérience, qui a été bonne et constructive, a révélé la nécessité, pour la Communauté européenne, de recourir à des processus de décision transparents et d’éviter la propagation de mythes dans nos institutions européennes. Il importe que chacun suive les débats et y participe. Les gens doivent comprendre en outre que les décisions ont une importance immédiate pour l’existence des gens ordinaires.

Je conseillerais à l’Autriche, le moment venu, d’avancer des arguments concrets soulignant la nécessité de l’ouverture, de la transparence et de la décision démocratique. Les problèmes qui ne peuvent être résolus à l’échelon national doivent l’être – qu’il s’agisse du chômage ou des relations avec l’Europe centrale et orientale – par une coopération européenne comme celle que pratique le Conseil de l’Europe.

M. GÜNER (Turquie) (traduction)

A l’égard des récentes actions xénophobes tragiques perpétrées contre des migrants turcs, je vous demande quelle action européenne concertée pourrait être prise pour combattre le racisme, qui constitue une menace majeure pour la société européenne à la veille du XXIe siècle. Les migrants turcs qui ont vécu trente ans dans certains pays membres n’y ont même pas le droit de voter aux élections locales. Pensez-vous que les droits politiques et la double nationalité apporteraient une solution?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Lors du Conseil européen réuni à Copenhague, nous avons décidé, comme l’indique notre document final, de faire de la xénophobie l’objet d’une action de la Communauté européenne. Nous savons que le processus exigera du temps, mais le document final ne manquait pas de clarté: nous étions certains que les pays membres devaient agir pour combattre le racisme et assurer un traitement égal et juste aux citoyens arrivant dans nos pays. Le Conseil européen s’est fermement engagé à accélérer le processus, mais il faudra du temps et nous ne devons pas relâcher notre action à cet égard.

M. FRANCK (Suède) (traduction)

J’ai apprécié ce qu’a dit le Premier ministre du racisme et d’autres questions, mais je voudrais savoir ce qu’il entend faire à brève échéance et dans l’avenir d’une façon générale. Quelle action concrète suggéreriez- vous ou soutiendriez-vous à la prochaine réunion de Vienne? Que comptez-vous faire en particulier à l’égard du racisme organisé et criminel?

J’ai aussi apprécié ce que vous avez dit des réfugiés, mais que ferez-vous pour défendre le droit d’asile et pour renverser la tendance à multiplier les restrictions imposées aux réfugiés et aux demandeurs d’asile, notamment à ceux de l’ancienne Yougoslavie?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Il n’y a pas de solution simple au problème du racisme. Il a beaucoup de visages et se présente sous de nombreux déguisements; il nous faut donc être sur nos gardes chaque fois que nous en apercevons l’affreux visage.

La lutte contre le racisme doit être intégrée à tout le travail que nous accomplissons au sein du Conseil de l’Europe. Le thème doit aussi imprégner tout l’ordre du jour de Vienne. Chaque fois que nous examinons une demande d’adhésion, ici ou au sein de la Communauté européenne, la question du racisme doit faire partie de l’évaluation politique.

M. Franck pensait peut-être à l’Allemagne. Mes contacts avec tout ce que la tradition politique humaniste allemande compte de mieux m’ont maintes et maintes fois révélé la colère et l’horreur politique exprimées par les Allemands à propos de ces outrages et leur détermination à combattre le racisme en Allemagne.

Nous devons garder présente à l’esprit la conjonction dangereuse, en Allemagne, d’un fort chômage et de l’afflux des réfugiés, propre à créer l’incertitude sociale. Il faut aussi dire que Faction de la Communauté européenne pour la lutte contre le chômage contribue indirectement à la lutte contre le racisme.

Enfin, nous pouvons recourir à notre système d’éducation et de formation. Chacune des générations qui entrent dans le système d’enseignement doit apprendre l’histoire tragique du racisme et ce qui peut être fait pour lutter contre ce phénomène. Ce ne sont là que quelques-uns des thèmes que nous devons serrer de plus près.

M. ROKOFYLLOS (Grèce)

Monsieur le Premier ministre, l’optimisme serein et le volontarisme raisonnable qui émergent de votre discours m’incitent à vous poser une question concernant le douloureux problème de Chypre.

Comme vous le savez, les récentes négociations qui ont eu lieu au siège des Nations Unies à New York, dans le cadre de la mission de bons offices menée par le Secrétaire général de l’ONU, sont au point mort à cause de l’intransigeance de M. Denktash, qui ne veut même pas discuter de la question de confiance.

En tant que chef du gouvernement de votre pays, sensible aux droits de l’homme, en tant que président en exercice de la Communauté européenne et en tant qu’Européen convaincu, quelles mesures pensez- vous qu’il conviendrait de prendre pour surmonter les difficultés créées par l’intransigeance de M. Denktash?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Comme vous le savez sans doute, mon pays est représenté depuis vingt-huit ans, à ses frais, dans les troupes de l’ONU à Chypre. Vous avez posé la question: «Que pouvons-nous faire?» Il faut soutenir le plan du Secrétaire général des Nations Unies pour Chypre. Telle est la base sur laquelle nous pouvons travailler.

M. ROKOFYLLOS

Je vous remercie de votre réponse, Monsieur le Premier ministre, mais je voudrais connaître votre sentiment sur l’adhésion, immédiate ou non, de Chypre et de Malte à la Communauté européenne.

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Comme la chose a été confirmée à la réunion du Conseil de Copenhague, la Commission des Communautés européennes travaille actuellement sur l’acquis communautaire et sur un avis concernant Chypre et Malte. Nous attendons la proposition de la Commission qui sera, nous l’espérons, la base de l’attitude de la Communauté européenne quant à de nouvelles décisions au sein du Conseil.

M. IWINSKI (Pologne) (traduction)

Je voudrais dire un mot sur le dilemme de la plus grande île du monde. Depuis 1953, le Groenland est partie intégrante du Danemark et a deux représentants au Folketing. Vu les problèmes croissants que nous constatons en Europe et ailleurs à propos d’autonomie territoriale et de minorités nationales, auriez- vous l’amabilité de nous livrer quelques brèves observations sur la réalité du mouvement pour l’autonomie au Groenland, la situation des populations inuit et le processus d’adaptation du mode de vie des Groenlandais à la réalité moderne?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Comme vous le savez sans doute, nous encourageons la participation des Inuit aux conférences internationales. En ce qui concerne le Groenland et sa population indigène, nous devons viser un équilibre entre notre volonté politique commune d’assurer l’avenir des baleines et de parvenir à une entente satisfaisant aux aspirations des Inuit, et je répète que nous appuyons ce que les représentants inuit du Groenland ont dit dans des enceintes internationales.

M. IWINSKI (traduction)

Dans quelle mesure l’association des territoires d’outre-mer avec la Communauté européenne, instituée en 1985, influe- t-elle sur la vie quotidienne des Groenlandais, dont la situation est si différente de celle du reste de la population du Danemark?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Le Groenland et la Communauté européenne sont liés par un accord de coopération donnant accès aux marchés de la Communauté. Il me semble que le Groenland est pleinement satisfait de cet accord. Celui-ci sera en tout cas renégocié en 1995 et, conformément aux souhaits du Groenland, le Gouvernement danois aidera à la conclusion d’un accord à long terme correspondant au désir du Groenland d’accéder à la Communauté européenne et au Marché commun.

M. AKARCALI (Turquie)

Monsieur le Premier ministre, l’Azerbaïdjan est l’un des premiers pays à avoir, dans la région du Caucase, établi un régime démocratique avec l’élection d’un président. Or, aujourd’hui, ce régime démocratique est mis en péril par des partisans de l’ancien régime.

Ce fait ne constitue-t-il pas un pas en arrière dans la démocratisation des ex-républiques soviétiques et un facteur de déstabilisation de la région?

Quelle est la réaction de la Communauté européenne et du Gouvernement danois face à cette situation paradoxale? Quelles actions communes pourrait-on mener dans le cadre de la CSCE pour préserver le régime démocratique en Azerbaïdjan?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Le Danemark et la Communauté européenne soutiennent pleinement le plan de la CSCE en vue d’un règlement négocié du conflit du Nagorny-Karabakh. Nous exhortons certains éléments du Nagorny-Karabakh à ne pas exploiter les difficultés internes de l’Azerbaïdjan; toute opération offensive, de quelque côté qu’elle vienne, peut compromettre le plan de paix. Je confirme que tant mon pays que la Communauté européenne dans son ensemble soutiennent pleinement ce plan.

M. AKARCALI

Monsieur le Premier ministre, votre réponse a été mal préparée. Ma question n’avait rien à voir avec le conflit du Nargomy-Karabakh. Elle portait sur l’action de déstabilisation menée en Azerbaïdjan par les partisans de l’ancien régime, pour renverser un président démocratiquement élu. De plus, j’avais demandé quelles actions communes pouvaient être menées dans le cadre de la CSCE pour préserver le régime démocratique en place. C’est sur ce plan-là que je souhaite connaître votre position en tant que Premier ministre du Danemark et Président en exercice de la Communauté.

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

La réponse que je puis donner dans l’immédiat est que, lorsque nous examinons les demandes d’adhésion de tels pays dans des institutions internationales comme celle-ci, nous ne devons pas oublier que des principes fondamentaux sont en jeu et qu’il se pose des questions essentielles de la démocratie.

M. Akarcali a posé une question relative au conflit politique en Azerbaïdjan. A n’en pas douter, ce conflit doit mener à une réévaluation des principes démocratiques du pays. Je limiterai à cela mes observations pour l’instant.

M. BANKS (Royaume-Uni) (traduction)

Avez-vous eu connaissance, Monsieur le Premier ministre, de la grande colère de nombreux Européens à propos de l’abattage cruel et barbare de baleines globicéphales aux îles Féroé? Le Gouvernement danois suivait la loi et la justice des îles Féroé. Pourquoi est-il si tolérant envers ceux qui violent ouvertement les règles relatives aux globicéphales, et en particulier ceux qui ont été mêlés aux épouvantables atrocités de l’abattage de ces baleines à Funningsfjordur le 2 juillet 1992? Pourriez-vous nous faire part de vos observations sur l’intention des Féroens de se retirer de la Commission baleinière internationale et sur les raisons pour lesquelles le Danemark soutient les efforts de la Norvège pour reprendre la chasse commerciale à la baleine, contrairement à la politique de la Communauté européenne?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Ce problème soulève à la fois une grande émotion et, c’est peut-être le plus important, des questions sur les chances de survie des baleines. Qu’on me comprenne bien: je pense que chacun des membres de mon gouvernement veut la survie des baleines, et c’est également mon cas. Il reste que certaines régions dépendent beaucoup de la pêche traditionnelle.

Je souligne que la question ne peut être débattue que si nous admettons une certaine exploitation des baleines dans des conditions acceptables. J’insiste sur le mot «acceptable». Qu’on me permette de me montrer pratique. Nous avions compté sur l’effet de règles administratives lors de la réunion annuelle de la Commission baleinière internationale, il y a quelques semaines. Celle-ci n’a alors malheureusement pris aucune décision. J’espère que la prochaine réunion sera décisive. Nous avons entamé un processus qui devrait mener à des décisions concrètes sur les règles administratives.

M. BANKS (traduction)

Vous avez mentionné la dernière réunion de la Commission baleinière internationale. Le Gouvernement danois a-t-il approché le Gouvernement des îles Féroé pour obtenir des informations sur la chasse au globicéphale pratiquée par ce pays? Compte tenu de la résolution adoptée à la 45e réunion de la Commission baleinière internationale le Gouvernement des îles Féroé fournira-t-il à la Commission toutes les informations relatives à cette chasse lors de sa 46e réunion en 1994?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Je participerai dans quelques jours à une réunion des Premiers ministres des pays nordiques, et nous aborderons certainement ce sujet. A la fin de la semaine ou au début de la suivante, je me ferai un plaisir de répondre à votre question, peut-être par écrit.

M. LE PRÉSIDENT (traduction)

Merci, Monsieur le Premier ministre. Nous attendrons ces informations, peut-être par l’intermédiaire de votre ambassadeur. La parole est à M. Talay.

M. TALAY (Turquie) (traduction)

Les attaques contre les ambassades, les bombardements d’objectifs civils et le meurtre de civils sont de plus en plus des instruments de la propagande terroriste. Quelles seraient à votre avis les mesures à prendre pour contenir cette violence croissante?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

La question étant assez générale, je me permettrai d’y répondre de façon générale. Je vous dirai que le terrorisme, quelle qu’en soit la forme, doit être combattu vigoureusement, qu’il soit perpétré à l’échelle de l’Etat, des groupes ou de l’individu. Ici, comme au sein de la Communauté européenne, nous devons continuer à affirmer que le terrorisme ne saurait être un moyen de régler les conflits et qu’il faut préférer la manière démocratique et respectable.

M. TALAY (traduction)

Certains pays prennent des mesures strictes, tandis que d’autres sont plus tolérants. Estimez-vous que les activités des organismes terroristes devraient alors être interdites?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

La coopération s’est affermie dans la lutte contre le terrorisme grâce à l’action internationale de la police. Je ne puis entrer dans le détail, mais il n’y a pas de doute que, dans les prochaines années, les efforts accomplis en Europe et au sein de la Communauté pour renforcer la coopération et lutter contre le terrorisme seront de plus en plus efficaces.

Sur les attitudes et réactions politiques, comme je l’ai dit, nous partageons tous votre façon de voir. Nous ne devons pas tolérer le terrorisme, quels qu’en soient les arguments. De tels actes sont inacceptables dans les institutions et les pays démocratiques. Nous devons sans cesse le souligner: c’est le but même du Conseil de l’Europe et de la Communauté européenne. La démocratie est l’instrument par lequel nous devons obtenir le respect des minorités et prendre des décisions politiques.

M. KÖNIG (Autriche) (traduction)

En qualité de représentant autrichien, Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de l’appui de votre gouvernement dans les négociations touchant la demande d’adhésion à la Communauté européenne, en particulier pour les décisions prises au Sommet de Copenhague quant au calendrier d’adhésion, au plus tard pour le 1er janvier 1995. Etes-vous partisan de négociations parallèles mais séparées pour les pays candidats? Cela signifierait que les pays capables de respecter le calendrier et de conclure les négociations à la fin de l’année prochaine ou au début de la suivante ne seraient pas retardés par les pays qui ne pourraient pas respecter les délais.

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

En principe, oui. Je pense d’autre part que l’expérience générale, nationale ou internationale, veut que les négociations, pour produire des résultats, se fassent toujours entre deux parties. Je dis aussi cela pour mes collègues danois.

Ma réponse à votre question relative aux négociations parallèles mais séparées est affirmative. Je pense néanmoins qu’il importe de fixer la date limite au 1er janvier 1995 pour la réponse aux documents d’appui. Si vous ne parveniez pas à conclure vos négociations avant cette limite, la demande serait placée sur la même base que celle qui a servi pour le Traité de Maastricht et les décisions de Lisbonne de juin de l’an dernier.

M. KÖNIG (traduction)

Je retiens donc que, si nous sommes tous en faveur de la simultanéité pour la conclusion des négociations et l’entrée au sein de la Communauté, les postulants ne seraient pas empêchés de procéder conformément aux délais, même si des difficultés s’accumulaient pour l’un des demandeurs.

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Vous avez un an et demi pour conclure les négociations et ratifier. Je vous conseille de poursuivre vos efforts, de concert avec vos trois amis nordiques. J’espère que les quatre nouveaux candidats pourront devenir membres en même temps: il en va de votre intérêt à tous.

M. JANSSON (Finlande) (traduction)

Comme on le sait, il y a un an, le Danemark avait dit non au Traité de Maastricht; le mois dernier, le peuple danois a dit oui après modifications. Vous-même et votre gouvernement êtes-vous prêts à favoriser, voire à soutenir, des solutions permettant aux pays nordiques et aux autres pays de l’AELE candidats à l’adhésion à la Communauté d’exprimer les mêmes réserves que votre pays et le Royaume-Uni?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Permettez-moi de me reporter un instant au détail du débat que nous avons eu avant le référendum danois du 18 mai, car M. Jansson m’a posé une question souvent entendue. Je suis heureux d’avoir l’occasion d’y répondre.

La Finlande, la Suède, la Norvège et l’Autriche ont posé leur candidature, et chacun de ces pays a sollicité des négociations et des dérogations. La Suède tient à la solution suédoise, la Finlande à la finlandaise, l’Autriche à l’autrichienne et la Norvège à la norvégienne. Toutes négocient sur la même base de l’acquis communautaire et sur le Traité de Maastricht. Il appartient aux candidats de définir les conditions de leur adhésion. Tous ont confirmé l’acquis communautaire et la base du Traité de Maastricht, de sorte qu’il ne serait pas juste de ma part de modifier la position finlandaise. Vous êtes plus compétent pour cela que moi.

M. RATHBONE (Royaume-Uni) (traduction)

Les droits de l’homme et les droits sociaux sont indivisibles. Comme ce sera le cas pour la Convention européenne des Droits de l’Homme, le Conseil de l’Europe revoit sa Charte sociale et les moyens de la faire respecter. Le Premier ministre veut-il nous dire comment il conçoit le fonctionnement parallèle de la Charte sociale du Conseil de l’Europe et du Volet social de la Communauté européenne?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

J’ai le regret de dire, encore une fois, que le pragmatisme Scandinave saura régler cette question. La Charte sociale du Conseil de l’Europe et les conditions sociales minimales sur lesquelles nous œuvrons au sein de la Communauté européenne reflètent une bonne structure de coopération. La Communauté tente de réaliser des normes minimales pour régler les problèmes du marché du travail: une meilleure protection des travailleurs contre le «dumping social», un meilleur milieu de travail, un meilleur contrôle du travail des enfants et ainsi de suite. M. Rathbone a défini les principes. La Communauté européenne définit les normes minimales à préserver. Comme je l’ai dit dans mon allocution, j’aspire à une coopération pragmatique mais importante entre Communauté et Conseil de l’Europe sur ces points.

M. RATHBONE (traduction)

J’ajouterai un mot bref. Il y a désaccord et même conflit entre ceux qui s’occupent de la Charte sociale du Conseil de l’Europe et ceux qui s’occupent du Volet social de la Communauté. Le Premier ministre veut-il nous parler de ses efforts pour surmonter ces frictions?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

La meilleure manière de résoudre les conflits entre institutions démocratiques est de prendre contact, de débattre point par point et de trouver une solution. Je suis sûr que nous pourrons en trouver une. Je connais les conflits, mais le mieux que nous puissions faire est de sauvegarder nous-mêmes nos institutions. J’ai été heureux de pouvoir examiner de plus près aujourd’hui avec Mme le Secrétaire Général la manière dont nous pourrons renforcer la coopération entre la Communauté européenne et le Conseil de l’Europe, notamment pour les questions soulevées ici aujourd’hui. Je confirme mes efforts et ceux des gouvernements pour contribuer à une solution à ce sujet.

M. GALANOS (Chypre) (traduction)

Vous avez parlé, Monsieur le Premier ministre, de l’élargissement de l’Europe à l’ensemble des pays d’Europe centrale et orientale, et nous espérons que les quatre pays nordiques entreront dans la Communauté ou du moins engageront les négociations finales le 1er janvier prochain. Mais on n’a pas mentionné Malte et Chypre, bien que vous ayez répondu à une question du délégué grec, M. Rokofyllos. Nous pensons pouvoir prendre connaissance dans quelques semaines de l’avis de la Commission, peut-être même la semaine prochaine. Croyez-vous que l’occupation partielle de Chypre par un autre pays fera obstacle à une demande d’adhésion? Si l’on n’y voit pas d’obstacle, n’encourage-t-on pas la persistante intransigeance et le défaut de progrès en vue d’une solution?

M. Nyrup Rasmussen, Premier ministre du Danemark (traduction)

Permettez-moi de m’en tenir, dans ma réponse, à deux observations. Premièrement, chaque candidat sera apprécié et traité individuellement. Deuxièmement, je puis confirmer que la Commission communiquera bientôt son avis concernant Chypre et Malte. Le Conseil européen examinera le cas des pays demandeurs et prendra part au processus qui s’imposera après réception de l’avis. Chacun des candidats sera traité individuellement, comme cela a toujours été le cas.

M. LE PRÉSIDENT (traduction)

Puis-je vous exprimer, Monsieur le Premier ministre, la chaleureuse gratitude de l’Assemblée, tant pour votre allocution que pour la manière patiente et pleine d’humour avec laquelle vous avez répondu à nos questions. Vos réponses ont été brèves et beaucoup plus utiles qu’aucune de ces longues réponses dont nous ont gratifié d’autres orateurs invités. Merci beaucoup. Nous avons grandement apprécié cela.