Joachim
Gauck
Président de la République fédérale d'Allemagne
Discours prononcé devant l'Assemblée
lundi, 22 avril 2013
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, monsieur le Secrétaire Général, mesdames et messieurs les ambassadeurs, mesdames et messieurs les invités, je vous remercie de cet accueil chaleureux, de votre amabilité et de cette invitation qui m’est adressée.
Je vous remercie de m’avoir donné toutes les libertés dont un orateur peut rêver: aucun protocole strict, aucun thème imposé ni aucune marge de manœuvre prédéfinie ne les entravent aujourd’hui. La liberté de parole est un grand privilège, et pour quelqu’un de mon âge et de mon origine, c’est un cadeau historique.
J’en ferai usage, tout d’abord, pour vous remercier, membres et partenaires du Conseil de l’Europe, de votre travail, et vous apporter mon soutien pour toutes les discussions politiques parfois difficiles. Je me demande comment faire sortir cette Organisation précieuse, et pourtant méconnue, de l’ombre de l’Union européenne, pour la mettre davantage en lumière.
« Nous ne devrions jamais chercher à économiser sur les droits de l’homme »
Après ces quelques mots de remerciement, j’aimerais vous dire que je suis venu en tant que défenseur du Conseil de l’Europe, parce que je pense que le Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire méritent plus d’attention et plus de soutien pour pouvoir exercer leur mandat pleinement. Je suis venu en tant qu’allié.
Ma visite à Strasbourg est placée sous le thème des droits de l’homme. Nous avons besoin du Conseil de l’Europe aujourd’hui peut‑être même plus qu’avant parce que c’est un forum important de défense des droits de l’homme. Je me tiens devant vous aujourd’hui parce que la traite des êtres humains et la prostitution forcée doivent prendre fin, parce que ceux qui sont dans l’opposition ne doivent plus craindre pour leur vie, parce qu’il ne doit plus y avoir de discrimination, quels que soient les motifs.
Permettez‑moi de vous remercier pour tous vos accomplissements. Je parle en tant que chef d’Etat allemand, devant cette assemblée de l’organisation politique européenne la plus ancienne, mais aussi créée en réaction à deux terribles guerres qui ont coûté la vie à des millions d’êtres humains et qui ont divisé ce continent pendant près de cinquante ans.
L’article 1er de ses statuts précise que le Conseil de l’Europe a pour mission de réaliser le rapprochement de ses membres. Vous le savez probablement d’expérience personnelle, en 1949, cela voulait dire beaucoup: l’envie de paix, le courage de proposer la coopération politique et l’idée, difficile à faire comprendre à l’époque, que les peuples d’Europe devaient se rapprocher sur les plans économique, social et culturel. Le Conseil de l’Europe a porté la vision d’une Europe politique, et cela bien avant que l’Union européenne prenne le chemin d’une union plus politique en passant par la coopération économique et une monnaie unique et commune.
Le Conseil de l’Europe, après la fin de la guerre mondiale et la guerre froide, a développé cette force qu’il a transmise à beaucoup d’entre nous. C’est dans cette salle, devant cette Assemblée que, l’été 1989, Mikhaïl Gorbatchev, a exposé son idée de «Maison commune européenne», qui allait devenir un espoir pour l’ensemble du continent – et cela trois mois avant que la Hongrie n’ouvre ses frontières et quatre mois à peine avant la chute du mur de Berlin. L’histoire a donné raison à Gorbatchev sur ce point, les ennemis idéologiques sont devenus des partenaires et, en l’espace d’une dizaine d’années, à deux exceptions près, tous les Etats anciennement communistes sont devenus des Etats membres du Conseil de l’Europe.
Les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit sont donc devenus aussi la référence dans les Etats d’Europe centrale et orientale. Aujourd’hui, plus de 800 millions de citoyens issus de 47 pays sont représentés au Conseil de l’Europe. Il ne fait aucun doute que le Conseil de l’Europe est la plus grande maison jamais construite sur notre continent. C’est bien ce caractère paneuropéen qui distingue cette Organisation de toutes les autres institutions européennes: le Conseil de l’Europe élargit notre horizon pour englober l’ensemble du continent. Il est le gardien de nos valeurs et de nos principes, et ce bien au‑delà des frontières de l’Union européenne. C’est donc pour moi un honneur de m’exprimer devant vous aujourd’hui.
Quarante‑sept Etats membres, c’est certes un nombre important, mais cela constitue aussi un groupe très divers d’Etats membres. Le Conseil de l’Europe est une communauté qui s’étend de l’Atlantique au Pacifique, du cap Nord au Bosphore mais, selon l’endroit, ce Conseil de l’Europe est aussi perçu différemment, utilisé différemment, parfois aussi respecté différemment. Ainsi, l’opinion publique en Europe de l’Ouest débat de thèmes européens en lien surtout avec les institutions de l’Union européenne, et plus rarement avec le Conseil de l’Europe. À l’est du continent et autour de la Méditerranée, en revanche, le Conseil de l’Europe revêt une plus grande importance. Je me souviens bien qu’à l’époque communiste, mis à part les Nations Unies, le Conseil de l’Europe était la référence pour tous les défenseurs des droits de l’homme et pour ceux qui appartenaient à l’opposition. Plus tard, c’est aussi le Conseil de l’Europe qui a proposé à ces pays l’assistance nécessaire pour construire leurs nouvelles démocraties.
C’est donc très naturellement que je défends cette Organisation. Mais, au‑delà d’en être le défenseur, j’en suis un participant actif, voire militant. Aussi, avant de tourner mon regard vers l’avenir, je tiens à réaffirmer ce qui est une évidence et qui continuera à en être une, à savoir les attentes que j’associe au Conseil de l’Europe et à son travail. Tout d’abord, les droits et les libertés sur papier ne suffisent pas. Les droits et libertés doivent être garantis dans la pratique, pas seulement dans les textes.
L’adhésion au Conseil de l’Europe est un acte volontaire, mais l’engagement pris au moment de l’adhésion doit être durable et fiable. Ceux qui appartiennent au Conseil de l’Europe ont épousé les valeurs et le cadre juridique du Conseil de l’Europe. À côté de la Convention européenne des droits de l’homme, l’Organisation compte 211 instruments juridiques – un nombre impressionnant. Les Etats membres sont tenus de transposer ces textes le plus rapidement possible dans leur cadre juridique national et les organes nationaux ne doivent pas vider de sens ce train de textes.
Cela concerne tout particulièrement les garanties inscrites à la Convention européenne des droits de l’homme. Pour que cette Convention soit crédible, il importe qu’elle soit considérée comme un patrimoine commun, et traitée comme telle. J’ai eu à signer des lois devenues nécessaires parce que l’Allemagne avait été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme pour violation des droits de l’homme. Elles étaient devenues nécessaires pour garantir que le droit national et l’action de l’Etat soient conformes aux principes de la Convention européenne des droits de l’homme. Les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe doivent tirer toutes les conséquences qui découlent de condamnations par la Cour européenne des droits de l’homme. Je souligne cette évidence parce qu’avant 1989, à l’Est, j’ai connu des temps où l’Etat ne se sentait pas tenu par ses propres lois ou par le droit international. J’ai connu une époque où les textes et la réalité se contredisaient cruellement.
C’est pour cela que j’apprécie particulièrement qu’à côté d’un espace juridique national existe aussi cet espace juridique paneuropéen. Il permet d’éloigner le danger qu’un jour, ces droits soient violés et que ces violations restent ignorées. C’est un espace commun dans lequel nous pouvons parler ouvertement et franchement de ce qui nous concerne. Et je me sens concerné lorsque je lis les rapports du Comité européen pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe portant sur les mauvais traitements en prison en Europe. Je me sens concerné lorsque je vois que des normes, pourtant décidées ensemble, restent lettre morte parce que l’arbitraire, la corruption, la dissimulation sont souvent bien plus fortes que les représentants courageux du Conseil de l’Europe ou de nombreuses ONG.
Les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit doivent inlassablement être exigés, faute de quoi nos valeurs et nos convictions deviendront des coquilles vides. Nous avons besoin de contrôler régulièrement nos convictions dans chaque Etat, sans en être empêchés par un gouvernement. Il est utile que les rapports de suivi du Conseil de l’Europe puissent être consultés et cités, que la Commission de Venise soit souvent sollicitée. Tout cela aide ceux qui défendent la démocratie, l’Etat de droit et les droits de l’homme.
Le Conseil de l’Europe, comme nombre d’institutions, rencontre, je le sais bien, des difficultés budgétaires, mais permettez‑moi de poser une exigence minimale: l’assistance pratique du Conseil de l’Europe pour la transposition des droits de l’homme en Europe ne saurait souffrir aucune économie.
J’en viens à mon deuxième point: toute politique est aussi une politique des droits de l’homme.
La guerre froide appartient, fort heureusement, à des temps révolus, mais c’est avec une grande surprise et avec horreur que nous voyons, même sous des formes atténuées, perdurer un vieux conflit. Dans les années 70 et même 80, l’Allemagne et d’autres pays ont eu du mal à dénoncer les violations des droits de l’homme en Europe de l’Est, pour ne pas compromettre le «changement par le rapprochement», comme on disait à l’époque.
Les régimes communistes ne sont plus. En Europe de l’Ouest et en Europe centrale et orientale, tous font référence aux mêmes valeurs démocratiques, mais la lutte contre les violations des droits de l’homme reste parfois controversée. De nouveau, certains prétendent que la protection des droits de l’homme est en contradiction avec la défense effective des intérêts politiques et économiques. Je ne dirai qu’une chose à ce propos: l’argument selon lequel la bonne coopération économique impose des compromis en matière de droits de l’homme me convainc encore moins aujourd’hui qu’auparavant. Les investissements exigent aussi sécurité et stabilité juridiques; la fiabilité est une valeur très appréciée dans le monde des affaires.
À l’heure de la mondialisation, les Etats sont de plus en plus dépendants les uns des autres. Or l’évolution actuelle des relations économiques sur le continent européen le confirme: la parole critique en matière de droits de l’homme ne s’oppose pas aux échanges commerciaux. Nous voyons bien que les Etats membres du Conseil de l’Europe se sont entendus sur un cadre clair pour leur coopération. Pour parler comme les hommes d’affaires, les droits de l’homme ne sont pas négociables. Nous ne pouvons ni ne voulons abandonner ceux qui veulent faire vivre en pratique les valeurs couchées sur le papier, et cela quel que soit le pays où ils vivent.
Pour les personnes de ma génération, les accords d’Helsinki étaient la grande référence; pour beaucoup de défenseurs des droits de l’homme, surtout dans les pays en transformation, c’est la Convention européenne des droits de l’homme. Lorsqu’un Etat membre du Conseil de l’Europe enfreint des règles qu’il a pourtant acceptées librement au moment de son adhésion, cela ne peut rester sans réaction et sans sanction. Nous avons l’obligation d’ingérence, et cela pour deux raisons: d’une part, parce que nous sommes européens et que nous nous fondons sur la Convention européenne des droits de l’homme; d’autre part, parce que nous sommes citoyens du monde et que nous nous appuyons sur la Déclaration universelle des droits de l’homme. En effet, les droits de l’homme sont universels et indivisibles, ce qui s’accompagne d’une grande responsabilité.
En février, j’ai été invité par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies à Genève. Je me suis trouvé face à des délégués venus du monde entier, formant un public dont les profils et les expériences étaient très divers. Une fois de plus, j’ai pu mesurer les progrès extraordinaires qu’a permis de réaliser le catalogue des droits de l’homme élaboré après la seconde guerre mondiale. La vision de l’horreur humaine nous a ouvert les yeux sur l’essentiel. La communauté internationale de ceux qui ont accepté les droits de l’homme est née, non pas de luttes idéologiques, mais de crises existentielles. Nous avons compris que, là où les êtres humains perdent leurs droits, ils finissent par perdre tout: le respect mutuel, la dignité et jusqu’à la vie, ainsi que l’avenir.
Même si les droits de l’homme sont perçus comme étant occidentaux et même si, de fait, ils ont été formulés sous cette forme par l’Occident, ils prennent leur source un peu partout dans le monde; ils sont notre patrimoine universel le plus précieux. Nous les recevons à la naissance, ils sont inaliénables et se fondent sur l’idée incontournable selon laquelle c’est la condition humaine qui nous rend égaux – peu importent les différences culturelles, religieuses ou encore sociales. Celui qui renforce les droits de l’homme renforce l’humanité dans son ensemble.
Cela m’amène à mon troisième point: la concrétisation des droits de l’homme est un travail de longue haleine. Je sais que les changements sociétaux prennent du temps, surtout dans les pays en transformation. Ces Etats ont une histoire politique très différente de celle des pays européens qui sont devenus des démocraties au fil des décennies, voire des siècles. Pourtant, le faible intervalle de temps nécessaire crée parfois la surprise, comme nous l’avons vu en Europe: le changement prend forme parfois beaucoup plus rapidement qu’on ne l’espérait. Je me suis entretenu de cette question avec le Président polonais, Bronislaw Komorowski. Lorsque l’on confronte ce que nous espérions pour l’Europe il y a 25 ans à la réalité actuelle, nous avons toutes les raisons d’avoir beaucoup plus confiance en l’aptitude au changement que ne l’ont certains.
Mais il est vrai également que l’on ne saurait accepter en Europe deux poids, deux mesures en matière de droits de l’homme. Le Conseil de l’Europe veille au respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit, à l’Est comme à l’Ouest et selon les mêmes critères. Certes, il tient compte des différentes situations, ce qui est nécessaire, mais les mêmes normes s’appliquent pour tous – et je vous en remercie.
L’une des nombreuses tâches qui nous occupent actuellement est la lutte contre le racisme et l’intolérance. Le Conseil de l’Europe a même créé, en 1993, une commission chargée de ces questions. À la même époque, l’Allemagne a été ébranlée par des actes racistes, notamment dans ma ville, Rostock, ce qui a été un grand choc pour moi. Un peu plus tard a commencé une série d’assassinats commis par un groupe d’extrême droite. Les faits n’ont pas encore été tout à fait élucidés; nous attendons avec impatience les résultats de l’enquête.
Nous voyons, partout en Europe, des discriminations et des violences qui prennent des formes très différentes. Elles peuvent être exercées par la majorité contre des minorités, mais l’inverse peut se produire; certaines minorités peuvent aussi attaquer une majorité ou d’autres minorités. Au nombre des problèmes particulièrement graves, je compte l’exclusion des Roms. Je me félicite à cet égard que le Conseil de l’Europe ait choisi de faire sien ce sujet et qu’il souhaite apporter une réponse à toute forme de discrimination contre les Roms avec la campagne: «Dosta!», «Assez!».
Nous avons besoin qu’il y ait davantage de campagnes de ce type. En Allemagne, par exemple, nous avons engagé une campagne d’affichage. Sur l’une des affiches, on peut voir une actrice très connue, avec comme texte: «Je suis musulmane dès lors que tu as quelque chose contre les musulmans.» Sur une autre, on voit un homme politique célèbre qui dit: «Je suis homosexuel dès lors que tu as quelque chose contre les homosexuels.» Il faut mener des actions coordonnées dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe. La faculté de progresser dépend certes de chacun, mais aussi de l’histoire des sociétés dans leur ensemble.
Le fait de constater que la jeune génération, en Europe centrale et orientale, a confiance en elle‑même et pose des exigences politiques me donne confiance à moi aussi. Certains jeunes défenseurs des droits de l’homme sont présents pour nous écouter; ils savent ce qu’ils veulent et qui peut les aider dans leur tâche – en l’occurrence, le Conseil de l’Europe. La société civile a besoin de cette référence. Elle sait qu’elle y sera entendue et qu’elle y trouvera du soutien.
Les intérêts de la société civile devraient aussi nous intéresser dans les deux pays qui, sur ce continent, sont les seuls à ne pas être membres du Conseil de l’Europe. Je formule le souhait que la situation au Bélarus change au point que son adhésion puisse être envisagée sérieusement. Cela suppose que la peine de mort soit abolie, que les détenus politiques soient libérés et que des réformes démocratiques soient engagées. Ce serait une chose formidable.
Au Kosovo, la situation politique est différente. Qu’un accord ait été trouvé entre le Kosovo et la Serbie est tout à fait positif. Nous savons que l’Assemblée a agi en ce sens au début l’année. Nous savons aussi que le Kosovo doit encore lutter contre la corruption et la criminalité organisée. Pour le développement de ce pays, l’intégration dans la communauté internationale est importante. C’est la raison pour laquelle j’espère que tous les Etats membres du Conseil de l'Europe se diront disposés à reconnaître le Kosovo comme Etat. Les habitants du Kosovo et du Bélarus ont le droit aussi de bénéficier des valeurs du Conseil de l'Europe. Leurs droits doivent être eux aussi protégés par la Cour européenne des droits de l’homme. Cette Cour qui très souvent est le dernier espoir des désespérés, ceux qui ont tout perdu et dont les droits ont été violés.
Le nombre de procédures ne cesse d’augmenter. Ensemble nous devons faire en sorte que la Cour européenne des droits de l’homme soit réformée, afin qu’elle ne meure pas de son succès. Elle doit continuer à travailler pour défendre les droits de ceux qui risquent beaucoup, parfois jusqu’à leur vie, pour exiger que leurs droits soient respectés. Certains d’entre eux sont dans le public aujourd’hui.
Chers défenseurs des droits de l’homme, chers représentants d’ONG européennes, j’aimerais vous exprimer ma grande reconnaissance. Je m’entretiendrai avec certains d’entre vous tout à l’heure, mais à tous les autres, présents ou non dans cet hémicycle, j’adresse mes remerciements. Sans votre courage, certaines des promesses du Conseil de l'Europe resteraient lettre morte. Sans votre parole, la démocratie ne pourrait survivre et sans votre solidarité, notre corps commun des valeurs universelles et indivisibles ne sauraient devenir une réalité pour tous.
C’est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, il faut défendre l’humanité et transformer le Conseil de l'Europe en une Organisation la meilleure possible, en une communauté interne très soudée en Europe qui, en dépit des différences, favorise la cohésion. Et vers l’extérieur, en un exemple convaincant de démocratie vécue, de l’État de droit et du respect des droits universels.
LE PRÉSIDENT
Merci beaucoup, Monsieur le Président, pour ce beau et grand discours. Un discours qui a touché profondément les membres de cette Assemblée, leurs applaudissements répétés en sont la preuve. Un grand discours qui fera date, je n’en doute pas un seul instant, au Conseil de l'Europe. Un grand discours qui sera, j’en suis sûr, une référence pour nos travaux futurs.
Un certain nombre d’orateurs se sont inscrits. Je vous propose, Monsieur le Président, qu’ils posent leur question par groupe de trois ou quatre. Je rappelle qu’ils disposent de 30 secondes.
La parole est à M. Volontè, pour le Groupe du Parti populaire européen.
M. VOLONTÈ (Italie) (interprétation)
J’aimerais tout d’abord remercier de tout cœur le Président Gauck pour la teneur de son discours qui m’a beaucoup frappé. Il a dit à juste titre que les droits de l’homme sont pour tous les citoyens et que le Conseil de l'Europe doit être la maison qui nous accueille tous. Nous sommes face à un esprit anti-européen, notamment dans l’Europe à 27, mais qui concerne toute l’Europe. L’esprit européen a été pendant longtemps fort en Allemagne. Comment pensez‑vous le revitaliser?
Lord ANDERSON (Royaume‑Uni) (interprétation)
Je vous salue, Monsieur le Président, ainsi que votre parcours personnel. Vous êtes un exemple, un modèle de ce qu’il y a de bien en Allemagne. Malheureusement, dans de nombreux pays de l’Europe, la perception de l’Allemagne est négative. Cela vous préoccupe‑t‑il? Et comment lutter contre cette perception?
Mme BRASSEUR (Luxembourg) (interprétation)
Monsieur le Président, j’aimerais vous remercier de tout cœur au nom de mon groupe pour votre engagement pour le Conseil de l'Europe. Ma question concerne la liberté religieuse, la liberté de conscience. Nous appartenons tous à des confessions différentes, certains parlementaires ne sont pas croyants. Comment voyez‑vous le «vivre ensemble» des diverses confessions en Europe?
M. Gauck, Président de la République fédérale d'Allemagne (interprétation)
Monsieur Volontè, cet esprit anti-européen est pour moi particulièrement effrayant, comme il l’est pour d’autres Européens de ma génération qui considèrent que c’est un recul. Cela est bien entendu lié dans une grande mesure à la crise économique et financière que connaît l’Union européenne. Certes il y a des motifs rationnels, des explications économiques, mais la situation est négative pour tout le monde.
Mais nous devons avant tout chercher à mieux cohabiter en Europe. L’Allemagne est parfois présentée comme un pays cherchant à être le maître en Europe; ce qui est totalement faux! Il n’en est rien, ce n’est pas ce que veut l’Allemagne! Mais il est tout de même nécessaire qu’un pays fasse mieux comprendre par les autres Etats ses propres principes directeurs. Et à cette fin il nous faut une plus grande sensibilité à la situation de toutes les régions d’Europe. Nous devons pouvoir parler de nos différences de manière à renforcer ce qui nous est commun. Or cela est impossible si nous ne nous mettons pas d’accord sur l’ordre du jour européen! Vous‑mêmes, en tant que parlementaires, vous défendez ces valeurs comme je le fais moi‑même en tant que Président. Lord Anderson, l’Allemagne est effectivement perçue comme le sont parfois les Etats‑Unis de manière négative. En tant que l’un des pays les plus actifs, il prête souvent le flanc à la critique.
Parfois, nous sommes perçus comme une Allemagne du passé qui n’existe plus: nous ne sommes plus au temps du Kaiser Wilhelm pour ne pas citer des personnages pires encore. Nous sommes une Allemagne européenne. Au fil des décennies, une continuité de l’idée européenne s’est instaurée. Il est nécessaire de le rappeler sans cesse à nos partenaires européens. C’est pourquoi je suis préoccupé que d’anciens préjugés viennent démentir ce qui est une réalité et une actualité tant il est vrai que l’Allemagne veut soutenir et promouvoir l’idée européenne. À cet égard, nous devons tous lutter contre de tels phénomènes. Vous le faites dans votre pays. Quant à moi, je placerai beaucoup d’énergie dans la lutte contre ces préjugés. C’est pourquoi j’estime qu’un large travail doit être engagé pour que les messages entre le Nord et le Sud soient mieux compris, car les concepts ne sont pas interprétés de la même manière, notamment en matière économique, selon que l’on parle de l’Autriche, de l’Allemagne ou de la Scandinavie. La volonté de réforme qui s’est instaurée serait utile à l’ensemble du continent, mais pour cela il faut trouver des modalités communes et parler un langage commun, non celui qu’emploie l’enseignant face à ses élèves. Je suis prêt à avoir cette démarche.
Madame Brasseur a évoqué le vivre‑ensemble qui pourrait être mieux mis en œuvre si les valeurs qu’il sous‑tend sont mieux défendues. J’ai l’impression que ceux qui cèdent à l’intolérance sont ceux qui ne sont pas convaincus au fond d’eux‑mêmes de leur propre identité. C’est ainsi qu’ils pointent du doigt la différence de l’autre pour ne plus être eux‑mêmes au centre de l’attention. Les personnes très croyantes sont prêtes à dire que ce qui leur tient à cœur est très différent de ce qui tient au cœur de l’autre. Selon moi, nous devons instaurer une relation pacifique avec l’autre et des droits identiques pour tous, car même si nous ne sommes pas animés des mêmes convictions, nous avons les mêmes droits engendrant des stratégies de respect et de tolérance à l’égard de la religion de l’autre. Il s’agit par conséquent de défendre ces valeurs dans le respect de la diversité. La diversité est un patrimoine, une ressource; il ne faut donc pas opérer de discriminations ni jeter l’opprobre sur l’autre.
Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie) (interprétation)
Une fondation de recherche a comptabilisé 187 morts liés à des violences extrémistes entre 1990 et 2005 en Allemagne. Nous sommes très préoccupés par les actes néo‑nazis qui ont tué plusieurs petits commerçants Turcs et un Grec. Quelles sont les stratégies que compte mettre en œuvre l’Allemagne pour protéger ces minorités contre le racisme, la xénophobie et l’islamophobie et pour combattre efficacement des partis politiques racistes et les idéologies d’extrême droite?
M. DRAGASAKIS (Grèce) (interprétation)
Monsieur le Président, je vous remercie pour votre déclaration dans laquelle vous avez indiqué que les droits de l’homme n’étaient ni négociables ni discutables. Au mois de juin, un rapport de l’Assemblée parlementaire soulignait que l’extrémisme était un danger pour la démocratie et les droits de l’homme. Pensez‑vous que nous pouvons agir tout en continuant comme avant, avec un euro fort, sans changer notre politique et alors que tant d’inégalités prévalent au sein de l’Union européenne?
M. REIMANN (Suisse) (interprétation)
Ma question est semblable à celle de M. Volontè. En tant que voisin de l’Allemagne, je suis également préoccupé par ces manifestations d’antigermanisme. Nous pensions que cela faisait partie d’une époque révolue. Vous avez déjà répondu à cette question, Monsieur le Président, ce dont je vous remercie.
M. Gauck, Président de la République fédérale d'Allemagne (interprétation)
Dans mon intervention, j’ai rappelé que l’Allemagne avait une expérience abominable de l’extrême droite. Voilà une dizaine d’années, pour des motifs racistes inacceptables, un groupe d’extrême droite a assassiné des personnes dont une policière. Une commission d’enquête, dont j’ai reçu les membres au Bundestag, a conclu qu’il ne s’agissait pas là d’une lacune législative, mais d’un manque de coopération entre le Bund et les Länder, dont les mandats sont différents, la police, en effet, relevant des Länder. Par ailleurs, les Länder comptent des offices de protection de la Constitution. C’est ainsi qu’en la matière, nos parlementaires considèrent que le fédéralisme est négatif. La mise en place d’une commission commune entre le Bund et les Länder s’est imposée afin de permettre une collecte de données communes. Une enquête subséquente a posé la question de savoir si les autorités avaient porté une attention suffisante à cet extrémisme. Le débat est vif et très controversé, et ne trouve pas de réponse. Je vous en livrerai une qui sans doute ne vous tranquillisera pas, mais il faut savoir que nous, Allemands, qui avons connu ce terrorisme national‑socialiste sommes horrifiés, à tel point que nous n’autoriserons plus jamais qu’un tel mouvement politique ait du poids.
Quant à savoir si le parti d’extrême droite allemand devrait être ou non interdit, d’aucuns sont pour, d’autres sont contre. J’ai créé une association contre l’oubli et pour la démocratie. Des associations de citoyens en Allemagne mènent une action active, des citoyens démocrates manifestent massivement contre cet extrémisme de droite et les institutions luttent en se fondant sur la base de la primauté du droit. Cette action pourrait‑elle se situer sur le plan électoral? La question reste controversée; en effet, dès lors que l’on interdit un parti d’extrême droite fort et qu’il se divise en groupuscules, il devient encore plus difficile de lutter contre lui.
L’extrémisme est une question menaçante. En tant que membre du Conseil de l'Europe et de l’Union européenne, ce cadre commun à nous tous, nous luttons contre ces ennemis avec les armes qui sont les nôtres dans un système démocratique. Nous ne nous déplacerons pas dans un autre champ d’action que celui‑là en interdisant à ces partis d’extrême droite d’exister et en les déclarant illégaux.
Votre dernière question, quant à elle, ne concerne pas le problème de l’extrémisme et je ne pourrai rien dire à ce sujet. Je vous invite toutefois à me faire part de ses tenants et aboutissants par écrit afin que je puisse y répondre.
Mme LĪBIŅA‑EGNERE (Lettonie) (interprétation)
L’Allemagne a joué un rôle moteur en impulsant la création de l’Union européenne et votre pays est également un modèle en matière de droits de l’homme. Lors de votre intervention au Château de Bellevue, vous avez lancé un appel à la défense des valeurs et, en particulier, de la tolérance. Quels sont les défis auxquels le Conseil de l’Europe sera confronté, notamment dans l’Union européenne et plus spécialement dans la zone euro?
Mme ZIMMERMANN (France)
Le 22 février dernier, lors de votre discours sur l’Europe au Schloss Bellevue, vous avez plaidé pour que notre continent se dote d’une langue véhiculaire commune, l’anglais, afin de créer une agora européenne. Or, en tant que députée mosellane et membre de cette Assemblée, je considère que cette proposition va à l’encontre des efforts menés au sein de l’Europe pour préserver l’enseignement d’autres langues et favoriser la diversité linguistique mais aussi culturelle. Pouvez‑vous préciser la position de l’Allemagne sur ce sujet important?
M. TOSHEV (Bulgarie) (interprétation)
Vous comptez, Monsieur le Président, parmi ceux qui ont une conscience vive de la division des sociétés d’Europe centrale et orientale faute que la justice ait été rendue s’agissant des crimes du communisme en raison des règles de prescription. Êtes‑vous prêt à vous engager afin que des mesures législatives soient prises sur un plan européen pour mettre un terme aux délais de prescription en la matière?
M. Gauck, Président de la République fédérale d'Allemagne (interprétation)
Dans mon intervention, j’ai insisté sur la question des droits de l’homme et sur le fait que le Conseil de l’Europe ainsi que la Cour européenne des droits de l’homme ont une grande importance pour les pays en voie de transformation. Lorsque ces derniers mettront en place des normes – d’ailleurs susceptibles de recours – le Conseil de l’Europe aura véritablement accompli sa mission.
J’ai évoqué la maison commune européenne, car la Convention européenne et la Convention universelle des droits de l’homme constituent une voie d’avenir. Il faut agir avec patience mais de façon collégiale avec des pays très divers qui ont parfois besoin de temps afin de s’adapter aux normes et aux principes de l’Etat de droit auxquels j’attache une grande importance.
Je tiens évidemment à ma chère langue allemande et je serais ravi que chacun puisse l’utiliser! Néanmoins, je suis assez réaliste pour savoir que tel ne sera pas le cas dans les 250 prochaines années au moins! Nous restons donc bien évidemment attachés à nos racines et à notre culture mais nous voulons aussi faciliter les échanges entre les hommes.
Même les habitants de l’ancien bloc de l’Est – Pologne, ex‑Tchécoslovaquie, Roumanie, Bulgarie etc. – qui ont été forcés à apprendre la langue russe ont finalement choisi d’user de l’anglais tant cette langue est commune dans bien des domaines. Je n’y ai pas fait référence pour demander aux Britanniques d’être plus proches de l’Europe mais pour des raisons pragmatiques.
Les crimes du communisme sont en effet prescrits, mais la définition de la culpabilité ne se limite pas au seul domaine juridique. Le grand philosophe allemand Karl Jaspers a rappelé que cette notion peut se décliner sur plusieurs modes: juridique, moral, religieux, etc.
La prescription, quant à elle, constitue un important acquis juridique qui ne saurait être remis en cause mais cela ne signifie pas que la responsabilité politique ne puisse être formulée publiquement, médiatiquement et civiquement: un dictateur reste un dictateur même s’il n’est plus possible de le traduire en justice. Il importe donc de nourrir un débat public.
M. DÍAZ TEJERA (Espagne) (interprétation)
J’ai confiance en votre discours, Monsieur le Président, mais aussi en votre parcours, lequel atteste de vos convictions. Il n’en reste pas moins que des décisions politiques européennes bafouent les droits économiques, sociaux et culturels de milliers de personnes. Comme par hasard, elles répondent aux exigences des banquiers. Que faire pour que la politique, notamment budgétaire, soit indépendante de la tyrannie des financiers et tienne compte des droits de tous les êtres humains?
Mme PASHAYEVA (Azerbaïdjan) (interprétation)
De nombreux citoyens allemands d’origine turque sont victimes d’agressions. Vous sentez‑vous concerné par leur sort? Quelle mesures le Gouvernement allemand envisage‑t‑il de prendre afin d’empêcher de tels phénomènes? Quid des organisations politiques extrémistes clandestines?
Mme BULAJIĆ (Serbie) (interprétation)
La crise économique menace les droits sociaux et politiques. Or la méfiance entre les citoyens et les dirigeants étant importante partout en Europe, ne conviendrait‑il pas de promouvoir une approche plus éthique de la crise et de donner la parole aux citoyens? En particulier, étant donné votre rôle politique et votre parcours professionnel, quel type de réponse politique pouvez‑vous proposer pour renforcer la voix des citoyens dans le processus actuel de décision?
M. Gauck, Président de la République fédérale d'Allemagne (interprétation)
Partout en Europe, surtout dans les pays durement frappés par la crise, on pose de plus en plus la question de la légitimité de ces marchés financiers devenus fous. Je me suis entretenu avec des économistes de ces questions. Peut‑on parler d’une dictature des marchés? C’est une formule que l’on utilise régulièrement dans différents pays, dans certaines familles politiques plus que d’autres. Lorsqu’on regarde la réalité européenne, on ne peut valablement employer cette notion. C’est une formule politique utile mais elle ne décrit pas fidèlement la réalité. Parler de dictature des marchés ne correspond pas à la situation. Ces marchés constituent une menace, mais il est important que la politique garde la maîtrise des choses.
Comme ancien citoyen de l’Est, je ne suis pas entièrement convaincu que plus d’intervention de l’Etat dans la vie économique engendrerait plus d’équité et plus de richesses. L’Etat a aussi causé beaucoup de problèmes. Des institutions publiques ont aussi participé à des transactions téméraires. La liberté économique est importante et les cadres juridiques sont nécessaires avec suffisamment de marge pour le déploiement de l’économie, sans saper nos valeurs sociales.
J’en viens à la question sur les Turcs en Allemagne. Ils sont bien organisés et bien intégrés. Un groupuscule d’assassins, ce n’est pas une grande organisation nationale‑socialiste. Ce groupuscule compte peu de personnes. Certaines organisées dans un parti, d’autres en dehors des groupements de type associatif. C’est une préoccupation en Allemagne, mais la menace n’est pas si importante que la population turque risque sa vie.
L’Etat de droit en Allemagne est suffisamment équipé pour lutter contre le terrorisme et une idéologie qui préconise la haine. Il est très proche de toutes les normes internationales. Ces organisations nationales‑socialistes constitueraient, disent certains, une menace pour l’ensemble de la population; ce n’est pas vraiment ce que nous vivons aujourd’hui. L’Allemagne débat régulièrement du thème de l’intégration. Je participe à ces débats. Lorsque mon prédécesseur a quitté ses fonctions, je lui ai promis, ainsi qu’à l’opinion publique allemande, que le thème de l’intégration, notamment des Turcs, serait prépondérant durant mon mandat.
On m’a demandé s’il y avait un modèle éthique à opposer à la domination des marchés financiers. Je me rangerai toujours du côté de ceux qui cherchent des références pour définir au mieux ce cadre que j’ai évoqué. Je deviens sceptique lorsque j’entends des slogans anticapitalistes surannés. Je ne pense pas que ça soit très porteur pour l’avenir. Ce n’est pas parce que certains abusent des libertés données par l’économie, qu’il faut condamner et supprimer l’ensemble de la liberté économique. Nous en avons besoin mais il faut aussi que chacun respecte les règles. C’est ce cadre qui fait l’objet de débats en Europe et ailleurs.
Il est évidemment très utile de réfléchir à une approche éthique nouvelle. C’est le cas dans certaines universités aux Etats Unis. Beaucoup d’articles publiés parlent de cette confiance perdue ou mise à mal dans l’économie. Les questions qui se posent sont de plus en plus de nature éthique. C’est impressionnant de voir le nombre de publications sur ce sujet. Cela prouve qu’il y a un éveil des citoyens face à cette économie et aux principes qui la sous‑tendent.
Il ne faut pas s’en tenir à un discours anticapitaliste. Ceux qui représentent les salariés, les syndicats et tous les autres groupements pourraient être davantage impliqués dans ces discussions. Il faut renforcer les syndicats au lieu de les affaiblir. Or la tendance en Europe c’est de minorer l’importance de l’activité syndicale, car peu d’ouvriers sont syndiqués.
Il n’y a pas que l’approche morale. Il faut aussi tenir compte des intérêts économiques des uns et des autres, notamment des travailleurs, des salariés. Tous ces intérêts doivent être respectés par la politique. Nous devons engager le dialogue avec nos citoyens pour être tous des acteurs et non des victimes des grands «méchants» de l’économie.
LE PRÉSIDENT
Je vous remercie, Monsieur le Président, pour votre intervention tout à fait remarquable qui fera date dans l’histoire du Conseil de l’Europe et de notre Assemblée. Vous avez eu des paroles encourageantes pour notre travail depuis 1949 et cela nous incite à le poursuivre. Nous avons été très honorés de votre présence et de vos réponses à nos questions.
Nous avons terminé avec les questions. Il y avait encore beaucoup d’intervenants. Il faudra revenir pour donner satisfaction à tous nos collègues!