1. Introduction
1. Le présent rapport se fonde sur la Directive 584
(2003), dans laquelle l’Assemblée charge notre commission de lui
présenter, à sa partie de session suivante, un rapport sur la situation
des droits de l’homme en République tchétchène. Conformément à la
directive, le présent rapport se fonde sur les informations mises à
disposition par les autorités compétentes, les organisations internationales,
les ONG et les journalistes. Je tiens à remercier toutes les personnes
qui m’ont communiqué des informations: mais je suis particulièrement reconnaissant
à Human Rights Watch. Mémorial, la Chechnya Justice Initiative et
Amnesty International pour leur aide particulièrement précieuse.
2. J’ai eu très peu de temps pour élaborer ce rapport – moins
de quatre semaines. M. Soultygov, le représentant spécial du Président
de la Fédération de Russie, a rassemblé des informations pour moi
qui sont arrivées chez M. Haller, Secrétaire général de l’Assemblée,
en langue russe, le 3 mars 2003 (et sont en cours de traduction
).
J’ajoute que je n’ai pas encore reçu la liste que l’Assemblée a,
dans la
Résolution 1315
(2003), demandé aux autorités russes de lui fournir
.
Il va sans dire que ces informations ont une importance capitale aux
tins de l’élaboration d’un rapport équilibré sur la situation des
droits de l’homme en République tchétchène. Je propose donc que
toute information utile qui n’aura pas été reçue à temps soit incluse
et évaluée dans un addendum au présent rapport, qui sera examiné
par la commission au cours de la première journée de la partie de
session d’avril. Si cette information était de nature à rendre nécessaires
des amendements au projet de résolution et au projet de recommandation,
la commission pourrait, dans le même temps, réfléchir au libellé
de ces amendements et les déposer au nom de la commission.
3. Dans le présent rapport j’évoquerai essentiellement la situation
actuelle des droits de l’homme en Tchétchénie; en principe, je n’aborderai
pas les violations qui entachent le conflit actuel (qui a commencé
à l’automne 1999). Cela ne veut pas dire que la situation des droits
de l’homme en Tchétchénie était sans problèmes avant cette date:
en fait, de graves atteintes aux droits de l’homme ont été commises
de part et d’autre depuis que le premier conflit a éclaté en hiver
1994
– beaucoup disent même avant
cette date, depuis que Dzokhar Dudaev est parvenu au pouvoir en
Tchétchénie en 1991. Toutefois, même une «commission vérité et réconciliation»
– pour laquelle le temps n’est pas encore mûr – aurait sans doute
quelque difficulté à relater toute cette souffrance; la tâche est
déjà redoutable, qui consiste à ne s’occuper «que» de trois années et
demie de violations des droits de l’homme.
4. Je commencerai par les violations des droits de l’homme qu’on
attribue généralement aux forces russes, après quoi je parlerai
des abus qu’on attribue généralement aux combattants tchétchènes.
Les premières sont souvent mieux «documentées» (notamment par les
ONG) que les secondes: c’est pourquoi nous les passerons en revue
ici de manière plus détaillée. Cela ne veut pas dire que les crimes
commis par les combattants tchétchènes soient, en quelque manière
que ce soit, moins horribles que ceux perpétrés par les forces russes
– au contraire. (De toute façon, l’identité du bourreau ne change
rien à la souffrance de la victime.) Malgré tout, il semble bien
que les abus des droits de l’homme n’aient pas la même ampleur selon qu’elles
sont commises par un camp ou par l’autre: cela peut s’expliquer
soit par les chiffres (plus de 80 000 militaires russes sont stationnés
dans la république, alors qu’il resterait, selon les estimations, 1 500 combattants
tchétchènes), soit par d’autres facteurs tels que la crainte de
représailles. Après cette analyse approfondie qui, conformément
à mon mandat tel qu’il a été défini par la
Directive 584 (2003), traitera, entre autres, des affaires individuelles
particulièrement préoccupantes, je m’efforcerai de tirer des informations actuellement
à ma disposition les conclusions appropriées et de faire quelques
recommandations constructives.
2. Les atteintes
aux droits de l’homme attribuées aux forces russes
2.1. Analyse statistique
générale
5. Au cours des trois dernières années, les autorités
russes ont communiqué à l’Assemblée et/ou à son Groupe de travail
mixte sur la Tchétchénie de nombreuses statistiques sur les violations
des droits de l’homme dans la République tchétchène, ainsi que sur
les enquêtes et les poursuites auxquelles ces violations donnent lieu.
Ces informations, de qualité variable, sont plus ou moins détaillées,
et parfois contradictoires; je tenterai néanmoins d’analyser les
plus importantes et les plus récentes d’entre elles.
6. Les renseignements les plus récents au sujet des poursuites
pénales engagées par le bureau du procureur contre les auteurs de
crimes visant la population civile en République tchétchène sont
ceux que les autorités russes ont fournis à l’Assemblée le 17 janvier
2003
. Selon ce document,
les procureurs militaires ont, depuis le début de «l’opération antiterroriste»,
ouvert 162 affaires, dont 97 (près de 60 %) ont été classées et
57 (35 %) ont été renvoyées devant les tribunaux militaires. Aucune
information n’a été fournie en ce qui concerne la nature de ces
affaires (qui concernent exclusivement des soldats) ni en ce qui
concerne le nombre de condamnations, la durée des peines, etc.
7. On trouve également, dans le même document, la liste des affaires
ouvertes par le parquet civil, concernant les crimes commis en 2002
par des membres de la police et des forces spéciales à l’encontre
de la population civile (77 affaires, dont 37 ont été suspendues
et 7 renvoyées au tribunal). En ce qui concerne les parquets militaires,
on a dénombré, en 2002, 44 affaires ouvertes (dont 15 ont été classées,
4 suspendues et 18 renvoyées devant le tribunal militaire). Au vu
de ces chiffres, il ne semble pas y avoir beaucoup de différence,
en termes d’efficacité, entre les autorités d’instruction militaires
et les autorités civiles.
8. En janvier 2001, l’Assemblée a demandé que lui soit communiquée,
avant la partie de session d’avril 2001, une liste détaillée de
toutes les enquêtes judiciaires ouvertes par les parquets militaires
et civils au sujet des crimes perpétrés dans la République tchétchène,
à l’encontre de la population civile, par des appelés et des membres
des forces de police spéciales; elle demandait en même temps que
soit précisé le sort ou le cours actuel de chacune de ces enquêtes.
La liste a été reçue en temps voulu, et elle a été portée à la connaissance
du Bureau et du Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie (GTM).
9. Toutefois, on s’est aperçu que la plupart des enquêtes n’ont
pas abouti à des résultats tangibles. Quelques cas ont conduit à
un procès; mais la plupart ont été suspendus, transférés ou rejetés.
L’ONG Human Rights Watch, après avoir procédé à une analyse détaillée
de cette liste
a
estimé que plus de 50 % des enquêtes qui avaient été ouvertes ont
été suspendues (le pourcentage atteint 79 % pour les enquêtes concernant
les «disparitions»). 12 % des enquêtes judiciaires ouvertes par
le parquet militaire concernaient des accidents de la route. A cette
époque, 3 % seulement de toutes les affaires énumérées avaient été renvoyées
au tribunal.
10. La liste n’a fait l’objet que de mises à j o u r fragmentaires;
l’Assemblée attend toujours la liste actualisée détaillée qu’elle
demandait dans la
Résolution
1270 (2002) et, à nouveau, dans la
Résolution 1315 (2003). Tant qu’elle n’aura pas reçu une telle liste, l’Assemblée
devra supposer que les affaires se répartissent, aujourd’hui encore,
de la même manière qu’en avril 2001; autrement dit, il est tout
à fait possible que, même parmi les cinquante-sept affaires instruites
par les parquets militaires au cours des trois dernières années
et portées devant les tribunaux, il s’en fût trouvé quelques-unes
concernant des accidents de la circulation et autres faits du même
genre.
11. En tout cas, il y a une conclusion qui se dégage de toutes
les statistiques susvisées en matière de poursuites: c’est le faible
nombre des affaires ouvertes, et le nombre encore plus faible des
affaires renvoyées au tribunal. Les chiffres avancés par les autorités
russes, selon lesquels 121 crimes, seulement, contre la population
civile ont été commis par les forces russes, et 311, seulement,
par les combattants tchétchènes, semblent très bas pour une zone
de guerre active. Surtout si l’on songe que le bureau du représentant
spécial, M. Soultygov, a été saisi, pour la seule période comprise
entre le le rjanvier 2000 et le 1er novembre
2002, de 1 085 plaintes en matière pénale et de 1 568 plaintes pour
enlèvement – ces disparitions étant pour la plupart survenues à
Grozny, dans le district périphérique et le district de Chali
. Le nombre des
affaires pénales et celui des affaires d’enlèvement a augmenté régulièrement
dans presque tous les districts.
12. Les ONG ont montré, documents à l’appui, que le nombre des
crimes contre la population civile que les autorités de poursuite
n’ont pas instruits ou qu’elles n’ont instruit que de manière inefficace
a encore augmenté. A vrai dire, le travail des procureurs sur le
terrain s’avère difficile: les procureurs risquent d’être kidnappés
ou assassinés dans l’exercice de leurs fonctions, et ils sont gênés
dans leurs efforts par le manque de coopération de la part des forces
armées – par exemple la Directive n° 80 du général Moltenskoi
est régulièrement ignorée et
aucun rapport exact sur les opérations spéciales, pas plus que sur
l’emplacement et les activités des véhicules militaires ne semble
être détenu et/ou mis à la disposition des autorités d’enquête.
Dès lors, il n’est pas surprenant qu’un climat d’impunité règne
en République tchétchène. Je voudrais maintenant mentionner brièvement
quelques exemples des types de crimes qui restent impunis.
2.2. Tueries
13. Les forces russes auraient perpétré au moins quatre
tueries à l’encontre de civils au cours du conflit actuel: trois
pendant la phase intense du conflit (à Alkhan-Yurt en décembre 1999,
à Staropromyslovsky en décembre 1999-janvier 2000 et à Novye Aldi
en février 2000), et une alors que les opérations militaires à grande
échelle avaient déjà cessé, à Mesker-Yurt à la fin de mai 2002.
J’examinerai brièvement chacun de ces épisodes.
2.2.1. Alkltan-Yurt
14. Le 1er décembre 1999.
après des semaines de combats acharnés, les forces russes prirent
le contrôle d’Alkhan-Yurt. village situé au sud de Grozny. Selon
un récit publié par l’ONG Human Rights Watch en avril 2000
«pendant les
deux semaines qui suivirent, les forces russes écumèrent le village
et exécutèrent sommairement au moins quatorze civils. Après avoir,
provisoirement, expulsé d’Alkhan-Yurt des centaines de civils, les
militaires russes se sont mis à piller et incendier systématiquement
le village, en tuant tous ceux qu’ils rencontraient sur leur chemin».
15. Selon ce récit, Aindi Altimirov, la dernière victime civile,
fut tué et décapité par les soldats russes le 18 décembre 1999.
Le 17 décembre 1999. le Vice-Premier ministre Nikolai Kochman, qui
était alors le plus haut représentant de la Russie pour la Tchétchénie,
s’était rendu à Alkhan-Yurt en compagnie de Malik Saidulaïev, dirigeant
tchétchène prorusse bien connu; il venait enquêter sur les allégations
de graves violations commises par les forces russes dans ce village,
d’où Saidulaïev était originaire. La visite fut en grande partie filmée;
on voit les deux hommes parcourant le village dévasté, découvrant
plusieurs cachettes de marchandises qui avaient été pillées par
les soldats russes; on voit même, sur ces images, les deux hommes menacés
d’être abattus par des soldats apparemment en état d’ébriété. Il
y a eu une enquête judiciaire, mais elle a été classée sans suite,
apparemment «pour absence de preuves concernant l’existence d’un
crime». Aucune information complémentaire n’a été communiquée à
l’Assemblée sur cette affaire, malgré les nombreuses demandes effectuées
ces dernières années.
2.2.2. Staropromyslovsky
(quartier de Grozny)
16. Les tueries de civils à Staropromyslovsky se sont
étalées sur plusieurs semaines; elles ont eu lieu entre la fin décembre
1999 et la mi-janvier 2000. dans le contexte de la «bataille de
Grozny». Le 7 février 2000. Human Rights Watch rapporte le massacre
de 38 civils – selon l’ONG, essentiellement des hommes âgés et des
femmes. Des soldats russes ont apparemment tiré à bout portant sur
les victimes
. Selon la même ONG. le bilan
s’est alourdi entre-temps, pour atteindre 70 morts.
17. Malheureusement, il m’est impossible, dans le cadre de ce
rapport, d’en dire davantage sur ces 70 exécutions sommaires. Les
proches de plusieurs des victimes ont introduit des requêtes auprès
de la Cour européenne des Droits de l’Homme: deux d’entre elles
ont été déclarées recevables le 19 décembre 2002. Il s’agit des
requêtes introduites par M. A. Khachiev et R. A. Akaïev, au sujet
de la mort de cinq de leurs proches. Dans sa décision du 7 avril
2000, qui était en fait repoussée plus tard, le tribunal de Malgobek
relate les faits suivants: «Le 17 janvier 2000. des soldats russes
– le
205’ bataillon – ont
pénétré dans Staropromyslovsky, un quartier de Grozny, où résidaient
ses proches [les proches de Magomed Khachiev]. Ces soldats se sont livrés
à des violences. Le 19 janvier 2000, des soldats appartenant à ce
bataillon sont entrés dans la cour de la maison de son frère et
de sa sœur; ils ont assassiné son frère Khamid, sa sœur Lida, et
les deux fils de celle-ci, Anzor et Rizvan
.»
18. L’enquête concernant ces tueries, tout comme celle concernant
les autres meurtres commis dans ce quartier, a été lente, incomplète
et confuse. Le 10 février 2000, des proches des victimes ont présenté
les cadavres mutilés de Magomed Goigov, Khamid Khachiev et Rizvan
Taimeskhanov à des procureurs en Ingouchie: des experts légistes
ont examiné les corps; après quoi des procureurs ingouches ont interrogé
les proches des victimes au sujet des circonstances dans lesquelles
les cadavres avaient été découverts: malgré cela, le parquet de
Grozny a attendu le 3 mai 2000 pour engager des poursuites pénales.
Selon des informations qui m’ont été communiquées par le parquet
de la République tchétchène le 16 janvier 2001
, la décision d’ouvrir
l’affaire a été motivée par la publication de l’article «La liberté
ou la mort» dans le journal
Novaïa Gazeta n°
12 du 27 avril 2000. Selon le même document, les cadavres d’habitants
du cru assassinés n’ont été découverts qu’en février 2000, et l’enquête
de police n’a pas permis de retrouver de témoins oculaires des crimes
commis par des membres des forces armées russes
.
19. Le 17 janvier 2003, les autorités russes ont fourni les informations
suivantes sur les résultats actuels des enquêtes concernant les
allégations de massacres de civils: «Le 3 mai 2000, une affaire
pénale (n° 12038) a été ouverte après la découverte de cadavres
de civils à Novïa Kataïama, dans le quartier de Staropromyslovsky
de Grozny. Vingt-huit témoins ont été interrogés. Le 10 novembre
2002, l’enquête préliminaire a été suspendue, les auteurs du crime
n’ayant pas été identifiés. Entretemps, le dossier a été rouvert
et l’instruction a repris.»
2.2.3. Novye Aldi
20. Le 5 février 2000, au cours d’une «opération de ratissage»
de grande envergure, des forces russes ont sommairement exécuté
au moins soixante civils à Novye Aldi et Tchernorechie, des faubourgs
de Grozny. L’ONG Human Rights Watch a publié un rapport sur cet
incident en juin 2000
, rapport
qui relate clairement les meurtres perpétrés par des membres de
la police anti-émeutes russe (Omon) et par des mercenaires (au nombre
des victimes figuraient un bébé de 1 an et une femme enceinte de
huit mois). Selon des informations qui m’ont été communiquées par
le parquet de la République tchétchène le 16 janvier 2001
une affaire pénale
a été ouverte le 5 mars 2000 par le parquet de Grozny: «Au cours
de l’enquête, il a été établi que dans la journée du 5 février 2000
des individus non identifiés en tenue de camouflage ont tué à l’aide
d’armes à feu plus de cinquante habitants de ces cités. L’enquête
n’a pas permis de confirmer la participation de militaires aux événements
décrits.»
21. Le 17 janvier 2003, les autorités russes ont communiqué les
informations suivantes au sujet des «résultats actuels des enquêtes
concernant les allégations de massacres de civils»: «Le 5 mars 2000,
une affaire pénale (n° 12011) a été ouverte au sujet de l’exécution
(par balles) de civils à Novye Aldi, à Grozny. Plus de 100 témoins
ont été interrogés. On a procédé à une expertise médicale. Le 15
avril 2002, l’enquête préliminaire a été suspendue, les auteurs
du crime n’ayant pas été identifiés. Actuellement, le dossier a
été rouvert et l’instruction a repris.» Cependant, je tiens à ma
disposition une lettre du bureau du procureur militaire dans laquelle
il est déclaré que les troupes de lutte contre les rébellions russes
ont mené une opération-balai à Novye Aldi le jour du massacre.
22. Parmi les personnes tuées ce jour-là on comptait cinq membres
de la famille Estamirov. Avec l’aide de l’ONG Chechnya Justice Initiative
(CJI), leurs proches ont introduit une requête auprès de la Cour
européenne des Droits de l’Homme. On ne connaît pas encore la décision
sur la recevabilité. Les requérants soutiennent que l’enquête sur
l’affaire Estamirov était entachée de graves dysfonctionnements.
Les services russes concernés n’ont pas commencé l’instruction dès
qu’ils ont été saisis de la plainte (datée du 22 février 2000), et
ils ont attendu le 8 avril 2000 pour se rendre sur les lieux du
crime. Bien que les corps aient été exhumés, aucun examen médico-légal
extensif n’a été pratiqué; et aucun élément de preuve matériel n’a
été recueilli sur les lieux du crime.
2.2.4. Mesker-Yurt
23. Du 21 mai au 11 juin 2002, alors que les opérations
militaires de grande ampleur dans la République tchétchène étaient
censées être terminées depuis longtemps, les forces russes ont organisé
un coup de main sur le village de Mesker-Yurt. L’ONG russe Mémorial
a relaté cet incident
;
12 habitants du village, au moins, auraient été tués par les forces
russes; 10 autres auraient «disparu» après avoir été arrêtés le
30 mai 2002; et 10 autres encore auraient subi le même sort dans
les premiers jours de juin 2002.
24. Aslanbek Aslakhanov, député à la Douma, s’est rendu dans le
village, le 8 juin 2002; selon les ONG, il aurait à son actif d’avoir
sauvé plusieurs personnes de la détention illégale et de la torture.
Je ne dispose d’aucune information concernant une éventuelle enquête
judiciaire sur ces événements.
2.3. Charniers
25. Plusieurs charniers ont été découverts en République
tchétchène ces trois dernières années. Le plus important (51 cadavres)
a été découvert le 24 février 2002 à Zdorovie/Dachny, tout près
de la base militaire russe de Khankala. Mais des charniers plus
petits sont mis au jour régulièrement; par exemple, un charnier
de 15 cadavres a été découvert le 9 septembre 2002 près de la frontière
avec l’Ingouchie; et un autre de 10 cadavres a été découvert au
début de janvier 2003 à la périphérie de Grozny. Il est fréquent,
également, de trouver des cadavres qui ont été jetés au hasard au
bord de la route ou enterrés dans des tombes peu profondes creusées
dans les champs; c’est ainsi qu’on a découvert, en mai 2002, sur
un terrain vague à la périphérie du village, le cadavre, portant
des signes de mauvais traitements et d’exécution sommaire, de Chamil
Akhmadov, qui avait été arrêté le 12 mars 2001 à Argun, au cours
d’une opération de ratissage
et qui avait ensuite
«disparu».
26. Le traitement réservé au charnier de Zdorovie/ Dachny est
devenu une sorte de test de la capacité et de la volonté des autorités
russes de sanctionner les atteintes les plus graves aux droits de
l’homme. Toutes les ONG qui m’ont fourni des informations sur cette
question considèrent que les autorités russes ont bâclé l’enquête.
En mars 2001, le représentant spécial du Président de l’époque,
M. V. Kalamanov, a mené une mission d’enquête sur le site, à la
suite de laquelle une aide technique et une expertise ont été offertes
par les experts du Conseil de l’Europe qui travaillaient dans son
bureau, et notamment l’implication d’experts de médecine légale.
M. Kalamanov refusa l’offre. A peu près à la même époque, le procureur
général a indiqué que les organes d’enquête russes n’avaient pas
besoin d’aide.
27. Selon un rapport de Human Rights Watch de mai 2001
, «l’enquête du Gouvernement
russe concernant les circonstances dans lesquelles les personnes
dont les corps ont été découverts sur les lieux ont trouvé la mort
a été très mal conduite.» Les autorités russes n’ont pas laissé
le temps nécessaire, ni fourni les informations indispensables,
à l’identification des corps (trente-quatre corps qui n’avaient
pas encore été identifiés ont été inhumés par les autorités russes
sans avertissement préalable le 10 mars 2001), et elles n’ont pas
cru devoir préserver des éléments de preuve cruciaux qui auraient
pu permettre d’identifier les responsables des tortures et des exécutions
sommaires dont ont été victimes les personnes (il y en avait plus de
cinquante) retrouvées à cet endroit.
28. L’ONG Mémorial a recueilli des précisions sur la détention,
par les forces fédérales, puis la «disparition», de seize des corps
identifiés. Néanmoins, les autorités russes, tant fédérales que
locales, rejettent sur les combattants et les bandes armées tchétchènes
la responsabilité du décès de ces personnes – en dépit du fait que
le site de ce charnier est contigu à la base militaire russe de
Khankala et que les lieux sont sous contrôle militaire russe depuis
décembre 1999, c’est-à-dire bien avant que la grande majorité des
cadavres y aient été déposés. Je ne dispose d’aucune information
au sujet de l’état actuel de l’enquête menée par les autorités de poursuite.
29. L’ONG Chechnya Justice Initiative (CJI) a introduit des requêtes
auprès de la Cour européenne des Droits de l’Homme au nom des proches
de plusieurs personnes dont les corps ont été identifiés après avoir été
découverts dans ce charnier. Par exemple, le 3 juin 2000, des hommes
masqués et armés circulant à bord d’un véhicule blindé ont arrêté
Nura Lulueva, ainsi que ses cousines et plusieurs autres personnes,
sur le marché nord de Grozny, où elles vendaient des fraises. Le
cadavre de Lulueva et ceux de ses cousines figuraient parmi les
corps récupérés dans le charnier en question. Aucun examen médico-légal
complet n’a été pratiqué sur le cadavre de Lulueva, et les preuves
matérielles, y compris les vêtements et les bandeaux pour les yeux,
n’ont pas été sauvegardés aux fins d’un examen médico-légal. Alors
que près de deux ans se sont écoulés depuis la découverte du corps,
l’enquête n’a donné aucun résultat. On attend de connaître la décision sur
la recevabilité de cette requête
.
2.4. Tueries illégales
30. Un nombre élevé de tueries illégales individuelles
a été signalé au cours des trois dernières années, tant par la presse
que par les organisations qui défendent les droits de l’homme. Mais
il est souvent difficile de déterminer si les responsables étaient
les forces russes ou les combattants tchétchènes. Je me contenterai donc
de décrire brièvement trois cas particulièrement préoccupants, à
propos desquels je puis affirmer avec une certitude raisonnable
qu’ils mettent enjeu la responsabilité des forces russes.
31. Le 27 octobre 2001, Amkhad Gekaïev ramenait chez elle Madina
Mejieva en voiture: elle avait quitté son champ de navets à Komsomolskoïe
pour aller allaiter son bébé. Des hélicoptères militaires russes
prirent la voiture pour cible. Madina et Amkhak étaient vivants,
quoique blessés, lorsqu’ils furent capturés par les soldats, lesquels
devaient ensuite endommager la voiture pour faire croire qu’elle
avait sauté sur une mine. Au bout de plusieurs jours, le commandement
militaire de Goudermes rendit à leurs familles les cadavres de ces deux
personnes (l’un et l’autre présentant des amputations). Les autorités
ne firent procéder à aucun examen médico-légal complet des corps.
Une instruction fut ouverte, qui fut transférée au parquet militaire:
elle fit apparaître que, d’après l’enquête préliminaire, les auteurs
de ces meurtres étaient des soldats: cependant, aucun suspect dans
cette affaire ne fut nommément désigné, et les familles s’entendirent
affirmer qu’aucun acte répréhensible n’avait eu lieu lors de l’opération
du 27 octobre 2001. L’ONG CJI a introduit une requête préliminaire
auprès de la Cour européenne des Droits de l’Homme en avril 2002:
la requête en bonne et due forme sera introduite prochainement.
32. J’en viens maintenant au meurtre de Malika Ouma-jeva, commis
le 29 novembre 2002. Selon Human Rights Watch il s’agit là du «premier
meurtre commis manifestement à titre de représailles en Tchétchénie
». Mme Oumajeva
travaillait comme chef de l’administration à Alkhan-Kala, village
des environs de Grozny. Contrairement à beaucoup d’autres administrateurs
de village, elle ne mâchait pas ses mots au sujet des exactions
commises par les forces russes dans son village; elle coopérait
avec les organisations s’occupant des droits de l’homme et elle
était constamment en conflit avec les militaires russes à ce propos.
Des témoins oculaires ont raconté que des soldats masqués se sont
présentés, tard dans la soirée, au domicile des Oumajev, qu’ils
ont emmené Mme Oumajeva dans la remise
et qu’ils ont déchargé leurs armes sur elle: elle a été touchée
dans le dos, au cœur et à la tête. Sa famille est convaincue que
les coupables sont des militaires russes; en effet, elle avait reçu
auparavant des menaces de mort émanant de soldats russes; en outre,
les soldats qui se sont présentés à son domicile parlaient russe
sans accent, et ils sont repartis dans des véhicules militaires
russes. L’enquête officielle ouverte dans cette affaire se poursuit,
paraît-il.
33. Un autre épisode choquant est celui qui concerne Khadjimurat
Yandiev. Il se trouvait détenu (blessé) le 2 février 2000 dans un
hôpital d’Alkhan-Kala. Sur des séquences filmées par des caméras
de télévision on voit un officier russe qui ordonne à ses subordonnés
d’abattre M. Yandiev. On ne l’a jamais revu. La séquence a été soumise
au bureau du procureur, lequel a refusé d’ouvrir une enquête judiciaire
à propos de la disparition de Yandiev et n’a pas révélé l’identité
de l’officier, clairement visible sur la séquence. Mme Fatima
Bazor-kina. sa mère, a introduit une requête auprès de la Cour européenne
des Droits de l’Homme, avec l’aide de la CJI. On attend la décision
sur la recevabilité.
2.5. Les disparitions
34. Nul ne sait vraiment combien de personnes ont «disparu»
en République tchétchène depuis le début du conflit actuel
;
on sait encore moins combien ont disparu depuis le début du premier
conflit, en décembre 1994. Tout dépend de la manière dont on définit
une «disparition». Il paraît que le Bureau du représentant spécial
du Président de la Fédération de Russie inclut dans ce terme toutes
les personnes manquant à l’appel (y compris celles qui ont. par
exemple, quitté la République tchétchène sans informer leurs proches,
ou celles qui ont quitté leur foyer pour chercher du bois de chauffage
mais ont marché sur une mine et dont les corps n’ont jamais été
retrouvés).
35. Aux fins du présent rapport j’utiliserai la définition donnée
par la Cour pénale internationale: dans son Statut, la Cour définit
les «disparitions forcées de personnes» comme suit: «les cas où
des personnes sont arrêtées, détenues ou enlevées par un Etat ou
une organisation politique ou avec l’autorisation, l’appui ou l’assentiment
de cet Etat ou de cette organisation, qui refuse ensuite d’admettre
que ces personnes sont privées de liberté ou de révéler le sort
qui leur est réservé ou l’endroit où elles se trouvent, dans l’intention
de les soustraire à la protection de la loi pendant une période
prolongée».
36. Pour l’année 2002, l’O NG russe Mémorial m’a fait parvenir
une liste détaillée de 173 personnes qui, après avoir été arrêtées
par des représentants des services répressifs fédéraux, ont «disparu»;
certaines d’entre elles ont été retrouvées mortes
. La
lecture de cette liste donne la chair de poule: des gens sont arrêtés
au cours d’opérations de «ratissage», à des postes de contrôle ou
à leur domicile; ils sont emmenés par des membres de la police russe
(souvent à bord de véhicules blindés) et on ne les revoit jamais
vivants. Beaucoup d’entre eux sont retrouvés plus tard dans des
charniers, lorsque leur cadavre n’a pas été simplement «balancé»
au bord de la route. En réponse à une demande du Groupe d’aide en
Tchétchénie de l’OSCE, le parquet de la République tchétchène a
fait parvenir au groupe une liste qui indique les efforts entrepris
pour enquêter sur plusieurs disparitions. Malheureusement, la plupart
des affaires ont été suspendues dans les deux mois qui ont suivi
leur ouverture (c’est-à-dire dès la fin de la période correspondant à
la durée minimale légale d’une enquête).
37. Il est malheureusement impossible, dans le cadre du présent
rapport, de décrire chacune de ces affaires
; je
dois donc me limiter à deux exemples, parmi les plus terribles:
depuis le tout début du conflit, l’Assemblée s’inquiète de la disparition,
le 17 mai 2000, de l’ancien président du Parlement tchétchène, M. Alikhadjiïev.
Selon des informations qui m’ont été communiquées par le parquet
de la République tchétchène le 16 janvier 2001
, «l’enquête a permis
d’établir que le 17 mai 2000, dans la ville de Chali, des individus
non identifiés, portant des tenues de camouflage et se déplaçant
à bord de véhicules blindés de transport de troupes, ont fait irruption
au n° 97 de la rue Souvorov, où habitait R. Ch. Alikhadjiïev, et
l’ont emmené vers une destination inconnue. D’après les informations
données par le responsable du Vovd de Chali, Alikhadjiïev n’avait
pas été arrêté par des collaborateurs de ce service et ne se trouvait
pas dans les locaux de détention provisoire du département». Je
n’ai reçu, depuis lors, aucune information concernant l’instruction
de cette affaire.
38. Un autre cas terrible est celui de M. Said-Magomed Imakaïev,
requérant auprès de la Cour européenne des Droits de l’Homme, et
de son fils. Le 1er décembre 2000, Said-Khusein
Imakaïev, revenant du marché, était en train de rentrer chez lui
lorsque sa voiture fut arrêtée par un groupe d’hommes armés. Il
devait alors disparaître. L’enquête ouverte par le parquet au sujet
de cette disparition a consisté à interroger deux personnes et à
adresser aux services d’application de la loi quatre lettres demandant
qu’on essaie de localiser M. Imakaïev. Lorsqu’il apparut que les
lettres ne donnaient aucun résultat, le parquet suspendit l’enquête. Marzet
Imakaïeva et Said-Magomed Imakaïev, les parents de Said-Khusein,
convaincus qu’il n’y avait en Russie aucune volonté de poursuivre
les coupables, introduisirent une requête auprès de la Cour européenne des
Droits de l’Homme en février 2002.
39. Quatre mois plus tard, le 2 juin 2002, au cours d’une opération
de ratissage conduite à Novye Atagi, le village a"Imakaïev, les
forces fédérales russes arrêtèrent Said-Magomed Imakaïev à son domicile.
Malgré des éléments de preuve concrets pouvant permettre d’identifier
l’officier qui a procédé à l’arrestation d’Imakaïev (sa femme s’est
vu remettre un reçu signé pour la confiscation de disquettes informatiques),
les autorités russes ont nié l’avoir jamais détenu, et les tentatives
renouvelées de Marzet Imakaïeva pour obtenir des informations permettant
de le localiser ont été vaines. La Chechnya Justice Initiative a
introduit une requête, au nom de Marzet Imakaïeva, en juin 2002.
Le même mois, la Cour européenne a entamé une correspondance préliminaire
avec le Gouvernement russe au sujet de cette affaire; et en septembre
2002 la Chechnya Justice Initiative a déposé une réponse au premier
mémoire du gouvernement, dans lequel celui-ci expliquait la version
probable des événements, à savoir que ce sont des combattants rebelles,
déguisés en soldats des forces fédérales, qui auraient arrêté Said-Magomed
Imakaïev. On attend la décision sur la recevabilité de cette requête.
2.6. La torture et le
viol
40. La torture et le viol constituent deux atteintes
très graves aux droits de l’homme; selon les ONG, il s’agit là de
violations courantes dans la République tchétchène, mais qu’il est
extrêmement difficile d’établir. Les victimes de la torture ont
le plus souvent si peur des représailles qu’elles renoncent à se
plaindre, en particulier aux autorités officielles, du traitement
qu’elles ont subi. Il n’empêche que beaucoup de cadavres découverts en
Tchétchénie portent des traces irréfutables de formes de torture
parmi les plus horribles qui soient – des gens à qui l’on a coupé
les oreilles, les doigts, ou même un bras ou une jambe. Le Comité
pour la prévention de la torture (CPT) du Conseil de l’Europe s’est
plaint du manque de coopération de la Russie. Celle-ci n’a pas encore
autorisé la publication des rapports du comité, ce qui s’explique
peut-être par le fait que le CPT, au cours des nombreuses visites
qu’il a effectuées dans la région, a été amené à constater des cas
de torture.
41. Alaudin Sadykov est l’une des rares victimes de la torture
qui a eu le courage d’élever une protestation officielle. La police
a arrêté Alaudin Sadykov le 5 mars 2000 et l’a détenu pendant plus
de deux mois dans les locaux de police provisoires du quartier d’Octobre
de Grozny. Pendant sa détention, la police lui a coupé une oreille,
lui a fracturé plusieurs côtes et lui a infligé beaucoup d’autres
blessures corporelles. M. Sadykov a fini par être libéré en mai
2000.
42. En juin 2000, il a dénoncé ces mauvais traitements et a pris
contact avec les autorités; mais ce n’est qu’en janvier 2002 que
le parquet l’a informé de l’ouverture d’une enquête judiciaire.
Bien qu’il puisse reconnaître au moins l’un des policiers qui l’ont
torturé, et qu’il connaisse son nom, et bien que de nombreux codétenus
et gardiens aient été témoins de ces tortures, l’enquête n’a pas
permis d’identifier des suspects. En juillet 2002, l’équipe de la
Chechnya Justice Initiative a introduit une requête auprès de la
Cour européenne des Droits de l’Homme au nom de M. Sadykov. On ne
connaît pas encore la décision sur la recevabilité. M. Sadykov a
décrit en détail à Amnesty International les instruments utilisés
pour torturer les détenus: pics à glace, marteaux, instruments chirurgicaux
et dentaires, instruments pour arracher les ongles, bêches et scies.
43. Les victimes de viol sont tout aussi peu enclines à porter
plainte, parce qu’il existe dans la société tchétchène des tabous
puissants qui interdisent d’évoquer des cas d’agression sexuelle.
Néanmoins, des ONG comme Mémorial et Human Rights Watch ont réussi
à établir des constats de viols, y compris de viols collectifs,
commis par des militaires russes, par exemple pendant l’opération
de «ratissage» du 5 février 2000 à Novye Aldi (voir
supra), ou pendant les opérations
à Sernovodsk et Assinovskaïa, menées respectivement les 3 et 4 juillet
2001 et les 4 et 5 juillet 2001
.
44. Le colonel Boudanov est l’un des rares auteurs de viols (et
de meurtres) à avoir été déféré à la justice. Le 31 décembre 2002,
il a été acquitté, pour cause de «folie passagère», du meurtre commis
le 26 mars 2000 sur la personne de la jeune Tchétchène Elza Koungaïeva;
cependant, il semble que le parquet s’apprête à faire appel de ce
verdict. Quant à l’accusation de viol, elle a été retirée avant
le procès, bien que l’examen médico-légal ait révélé que la victime
avait subi une pénétration anale et vaginale peu avant son décès.
Finalement, c’est l’un des subordonnés du colonel Boudanov qui a
été accusé de «profanation de cadavre»; mais l’affaire a été classée,
dans le cadre de l’amnistie prononcée en 2000.
2.7. Autres atteintes
aux droits de l’homme
45. Mentionnons brièvement d’autres violations des droits
de l’homme
, trop nombreuses
pour être décrites en détail: les abus les plus fréquents sont le
vol, le pillage et le harcèlement. Les postes de contrôle continuent
d’avoir mauvaise réputation: non seulement il faut souvent, pour
les franchir, «graisser la patte» aux militaires russes en faction,
mais il n’est pas rare que ceux-ci harcèlent les civils de passage,
allant même jusqu’à les arrêter sans motif apparent. Les experts
du Conseil de l’Europe qui travaillent au bureau du représentant
spécial ont signalé avoir été informés «qu’un ordre du quartier
général militaire de Khankala exige que les contrôles de sécurité
aux postes de contrôle durent entre 15 et 30 minutes
». Etant donné
le nombre très élevé des postes de conuôle en Tchétchénie (j’en
ai compté 28 sur une portion de route de 40 kilomètres entre Grozny
et la frontière ingouche), entreprendre un déplacement en Tchétchénie
est une entreprise non seulement périlleuse, mais aussi de longue
haleine.
3. Les atteintes aux
droits de l’homme imputées aux combattants tchétchènes
46. Il est connu que les violations des droits de l’homme
perpétrées par les combattants tchétchènes sont difficiles à mettre
en évidence. Les ONG attestent qu’il est déjà malaisé de recueillir
les dépositions de témoins lorsque les coupables sont des militaires
russes, mais que c’est pratiquement impossible en cas d’atrocités commises
par des combattants tchétchènes – la crainte de représailles est
trop forte. Ainsi, les développements qui suivent peuvent fort bien
ne représenter que «la partie émergée de l’iceberg».
47. Les dernières informations communiquées à l’Assemblée par
les autorités russes au sujet d’affaires pénales ouvertes par le
parquet à la suite de crimes commis contre la population civile
dans la République tchétchène datent du 17 janvier 2003: elles concernaient
également les crimes commis par «les membres de formations armées
illégales». En 2002. le parquet de la République tchétchène a ouvert
311 affaires pénales, dont 120 concernaient des crimes commis contre
des policiers, 81 des crimes contre des chefs d’administration et
12 des crimes contre des ecclésiastiques. Sur ce total. 213 affaires
ont été suspendues et 29 renvoyées au tribunal. Ce sont là des chiffres
très modestes, surtout si l’on songe qu’ils sont probablement gonflés
par des crimes que les autorités de poursuite attribuent à «des
individus non identifiés en tenue de camouflage», qui peuvent tout
aussi bien être des appelés russes que des combattants tchétchènes.
3.1. Actes de terrorisme
ci grande échelle
48. L’Assemblée a toujours condamné, et condamnera toujours,
en les termes les plus sévères, tous les actes terroristes. La prise
d’otages réalisée par des combattants tchétchènes dans un théâtre
moscovite à la fin d’octobre 2002 ne s’est pas déroulée sur le territoire
tchétchène. Elle n’en a pas moins constitué un acte terroriste terrible
qui, précisément, appelle la condamnation la plus sévère. Certes,
la libération des otages par les forces spéciales russes n’a pas
été sans poser de problèmes et n’a pas été exempte de violations
des droits de l’homme. Plus de 117 otages ont péri sous l’effet
du gaz non identifié utilisé au cours de l’opération; et il est permis
de penser que certains d’entre eux auraient pu être sauvés s’ils
avaient reçu une aide médicale appropriée.
49. Le 27 décembre 2002, un attentat suicide à l’explosif a été
commis contre le bâtiment de l’administration et du Gouvernement
tchétchènes à Grozny, tuant 82 personnes et en blessant 210 autres.
Selon le ministre russe de la Défense, M. Serguei lvanov, les organisateurs
de cette attaque ont été identifiés. Je n’ai pas d’autres informations
au sujet de l’enquête concernant cet acte terroriste barbare.
3.2. Tueries illégales
et enlèvements individuels
50. Des chefs de l’administration locale et des membres
des organes de poursuite continuent d’être la cible d’actions violentes
menées par des combattants tchétchènes. Beaucoup de Tchétchènes
prorusses (et des membres de leurs familles) ont été assassinés:
d’autres ont été kidnappés, et on ne les a jamais revus. Récemment,
les chefs de l’administration du village de Tsotsin-Yurt (district
de Kourchaloy) et du district de Charoy ont été tués par des individus
non identifiés: quant aux procureurs adjoints des districts de Chali
et de Chatoy, ils ont été enlevés. D’après les derniers chiffres
du bureau du procureur tchétchène. 94 fonctionnaires des administrations
locales sont morts depuis octobre 1999, 139 ont été blessés et 34
kidnappés. 139 policiers tchétchènes ont été tués, 149 ont été blessés
et 29 sont portés manquants. Au cours des derniers mois de 2002,
les combattants tchétchènes sont supposés être les responsables
de sept assassinats, de plusieurs tentatives d’assassinats et de
neuf enlèvements depuis le 15 novembre 2002
.
51. Il est souvent très difficile de déterminer si les innombrables
enlèvements qui ont lieu en Tchétchénie et dans les républiques
voisines sont imputables à des renégats issus des rangs des forces
russes ou à combattants tchétchènes, voire à des bandes de criminels
de droit commun. Toutefois, lorsque les victimes sont des chefs
d’administration ou des procureurs, on voit se reproduire une configuration
qui autorise à soupçonner les combattants tchétchènes.
52. Un cas particulièrement inquiétant est celui de M. Arjan Erkel,
chef de mission pour la section suisse de l’ONG Médecins sans frontières
(MSF) dans le Caucase du Nord. M. Erkel, âgé de 32 ans, a été enlevé
par trois hommes armés non identifiés le 12 août 2002 à Makhatchkala,
la capitale de la République fédérale du Daghestan. Après plus de
cinq mois d’efforts méthodiques déployés à de nombreux niveaux,
MSF n’a encore reçu aucune information concrète sur le sort de M. Erkel,
ni sur l’endroit où il se trouve, ni sur les motifs ou les auteurs
de son enlèvement. Cela a conduit MSF à conclure que ce kidnapping
a peut-être été dicté par des mobiles politiques. Les autorités
compétentes de la Fédération de Russie devraient accorder un plus
haut degré de priorité politique à la libération de M. Erkel, car
des enlèvements de ce genre constituent un obstacle supplémentaire
aux efforts d’aide humanitaire dans le Caucase du Nord – au détriment
d’une population qui souffre.
4. Conclusions
53. Les conclusions à tirer des affaires évoquées plus
haut sont d’une clarté déprimante: cela fait maintenant près de
dix ans que les habitants de la République tchétchène vivent dans
la peur – ils ont peur des forces russes, ils ont peur des combattants
tchétchènes. Voici comment on peut décrire brièvement la chronologie
des événements depuis le 1er décembre
1994: tout d’abord, la population de la République tchétchène (notamment
à Grozny) a dû subir les bombardements intensifs effectués par les
forces russes, qui ont fait plus de 20 000 morts
. A peine ces bombardements aveugles
avaient-ils cessé que commença une campagne de terreur effrénée
de la part de certains de ces militaires russes – avec, pour ordre
du jour, des meurtres, des viols, des tortures, des pillages et
des extorsions
.
54. Dès lors, les Tchétchènes ont dû se sentir trahis par leurs
compatriotes et ont perdu confiance en un gouvernement qui ne pouvait
pas ou ne voulait pas les protéger vis-à-vis des groupes d’extrémistes
religieux ou de bandes criminelles qui, à leur tour, prirent la
république en otage en pratiquant des enlèvements, en faisant de
la contrebande de stupéfiants et en se livrant à d’autres violences.
Les punitions cruelles qui furent alors infligées en vertu de la
charia procédaient d’une justice pervertie. Mais la «libération»
de la Tchétchénie, entreprise sous la forme de la deuxième campagne
russe, n’apporta aucune amélioration: le plus souvent, les forces
russes, implacables, ne semblent faire aucune différence entre les
combattants et les civils
.
A ce jour, la population civile de la république vit sous la menace
de la détention illégale, de la «disparition», voire du viol, de
la torture et de l’assassinat, tels qu’ils sont pratiqués par une
partie des forces russes; elle n’est pas pour autant à l’abri des
enlèvements, des assassinats et des actes terroristes perpétrés
par une partie des combattants tchétchènes.
55. La réaction des autorités russes n’a pas été très constructive.
On a vraiment l’impression qu’elles font tout ce qu’elles peuvent
pour occulter la réalité de la situation qui existe en Tchétchénie.
La République tchétchène est pratiquement coupée du monde; elle
est presque inaccessible pour les journalistes et les ONG.
56. Je l’ai déjà indiqué clairement dans mon dernier rapport,
en janvier 2003 (
Doc.
9688): lorsque, au bout de plusieurs années, on vous dit
que telle enquête judiciaire se poursuit sans aboutir à des résultats
tangibles, on ne peut que considérer – telle est en tout cas ma
conclusion – que les organes de poursuite ne veulent pas ou ne peuvent
pas trouver les responsables et les déférer à la justice (ou alors,
il faut admettre qu’on leur met systématiquement des bâtons dans
les roues). Au stade où nous en sommes, j’ai personnellement le sentiment
que les trois facteurs jouent un rôle dans l’inefficacité des poursuites
lorsqu’il s’agit de crimes commis à l’encontre de civils tchétchènes.
C’est dire que la recommandation formulée par le commissaire aux droits
de l’homme, M. Gil-Robles, à la suite de sa récente visite en Tchétchénie,
selon laquelle il faut mettre davantage de moyens à la disposition
du bureau du procureur, ne peut être, dans le meilleur des cas,
qu’une solution partielle.
57. Je voudrais aussi faire référence à la jurisprudence de la
Commission européenne des Droits de l’Homme à cet égard, qui a dit
par le passé que des enquêtes à propos d’une violation d’un droit
fondamental (comme le droit à la vie ou l’interdiction de la torture)
qui n’ont pas été terminées deux ans après que le prétendu crime
a été produit et pour lesquelles les autorités n’ont pas fourni
d’explications en ce qui concerne les causes du report ne pouvaient
être considérées comme valables
.
58. Les mécanismes de recours non judiciaires institués par les
autorités russes, tels que le bureau du représentant spécial du
Président de la Fédération de Russie chargé de veiller au respect
des droits de l’homme et des libertés civiles en République tchétchène,
ne font guère que recenser les plaintes individuelles. L’Assemblée
se doit de rendre hommage au courage des experts du Conseil de l’Europe
qui travaillent auprès de ce bureau: mais des questions se posent
concernant l’efficacité de leur mandat actuel. Des mesures devraient
être prises pour accroître leur possibilité d’influer sur la situation
des droits de l’homme en République tchétchène.
59. Le Gouvernement russe n’a pas reconduit le mandat du Groupe
d’aide à la Tchétchénie de l’OSCE. Lorsqu’elle donne suite aux recommandations
du commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, la
Russie ne le fait qu’avec un retard considérable. Ainsi, ces excellentes
et nécessaires recommandations faites en mai 2002 «sur certains
droits qui doivent être garantis au moment de l’arrestation et pendant
la détention de personnes après les opérations de "nettoyage" en
République tchétchène. Fédération de Russie» viennent seulement
de commencer à être mises en œuvre au cours de sa visite dans la
région en février 2003.
60. Le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT)
s’est plaint du manque de coopération de la Fédération de Russie.
Il a publié une déclaration publique le 10 juillet 2001 (disponible
auprès du secrétariat) motivée par l’absence de coopération des
autorités russes avec le CPT sur deux points: i. la conduite d’une enquête
approfondie et indépendante sur les événements qui ont eu lieu dans
un centre de détention à Tchernokosovo pour la période allant de
décembre 1999 à début février 2000; ii. l’action entreprise pour découvrir
et poursuivre les coupables dans des affaires de mauvais traitements
de personnes privées de leur liberté en République tchétchène au
cours de ce conflit. Les rapports sur ces visites sont encore confidentiels, les
autorités russes n’ayant pas autorisé leur publication.
61. Quant à la Cour européenne des Droits de l’Homme, qui a pour
vocation de traiter des violations individuelles des droits de l’homme,
elle ne peut espérer être en mesure de traiter par la voie du recours individuel
les atteintes systématiques aux droits de l’homme qui se produisent
à une telle échelle en Tchétchénie de manière efficace. Il est regrettable
qu’aucun Etat membre ou groupe d’Etats membres n’ait encore trouvé
le courage d’introduire une requête interétatique devant la Cour.
62. Tout cela génère un climat d’impunité qui encourage de nouvelles
violations des droits de l’homme, de part et d’autre, et qui constitue
un déni de justice pour les milliers de victimes; la population
est à ce point excédée par le fait que la République tchétchène
pourrait devenir véritablement ingouvernable. La situation actuelle
des droits de l’homme dans la République tchétchène est inacceptable.
Si l’on veut qu’un processus politique positif se développe dans
la république, il faut que les violations des droits de l’homme
cessent, et que ceux qui ont commis des exactions soient déférés
à la justice. Les habitants de la République tchétchène ont droit
non seulement à notre compassion, mais aussi à notre protection.
63. Bien entendu, cela ne pourra se faire qu’avec la coopération
active des autorités russes. Notre collègue russe à la Douma, Sergueï
Kovalev, militant des droits de l’homme respecté, a déclaré la semaine
dernière que des «escadrons de la mort russes» opèrent en Tchétchénie
.
Il a estimé que ces escadrons de la mort, responsables des enlèvements
et de l’assassinat de civils tchétchènes, sont sans doute organisés
au niveau central par les forces fédérales, dans le cadre d’une
«politique générale coordonnée». A l’appui de cette affirmation,
il a fait observer que les cadavres qu’on trouve dans les charniers
sont ceux de personnes qui ont été détenues dans différentes parties
de la Tchétchénie, à des moments et à des endroits différents: si
ces atrocités avaient été commises par des soldats indisciplinés,
les cadavres proviendraient d’une zone déterminée, et ils se trouveraient
à proximité de ces soldats.
64. Je ne puis écarter d’un revers de main les allégations de
M. Kovalev: mais j’espère vraiment qu’il se trompe. Quoi qu’il en
soit, il a raison de dire que la protection de la population civile
dans la République tchétchène et la punition des auteurs des exactions
commises sur ce territoire sont des tâches que l’on ne peut plus
confier à la seule Russie, compte tenu des échecs qu’elle a enregistrés.
Si la Russie ne veut pas ou ne peut pas s’acquitter de ses obligations,
il faut que la communauté internationale intervienne.
65. La communauté internationale peut intervenir de deux façons
qui se renforcent mutuellement. La première consiste à inviter les
Etats membres du Conseil de l’Europe à explorer sans plus attendre
toutes les voies permettant de mettre la Fédération de Russie face
à ses responsabilités, y compris par l’introduction de requêtes
interétatiques devant la Cour européenne des Droits de l’Homme et
par l’exercice de la compétence universelle pour les crimes les
plus graves commis dans la République tchétchène. La deuxième consiste,
au cas où les efforts pour livrer à la justice ceux qui se sont
rendus coupables de violations des droits de l’homme n’étaient pas
intensifiés et au cas où le climat d’impunité en République tchétchène
continuait de prévaloir, d’envisager de proposer à la communauté
internationale la création d’un tribunal ad
hoc chargé déjuger les crimes de guerre et les crimes
contre l’humanité dans la République tchétchène: cette juridiction
serait habilitée à juger tous les crimes de ce genre qui ont été
commis dans cette république. Il est irréaliste de penser, bien sûr,
qu’un tel tribunal puisse être mis en place sans le consentement
de la Fédération russe, que ce soit par le Conseil de sécurité des
Nations Unies ou le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe.
En l’absence de coopération active de la Russie, les crimes commis
en République tchétchène resteront impunis.
5. Recommandations
66. J’ai décidé de faire uniquement des recommandations
précises, détaillées et constructives. J’estime que l’Assemblée
devrait faire les recommandations suivantes.
67. Pour obtenir que les droits de l’homme soient dorénavant respectés
dans la République tchétchène, l’Assemblée devrait recommander:
i. que les combattants tchétchènes
mettent immédiatement un terme à leurs activités terroristes et renoncent
à toute forme de crime à rencontre des civils. Toute forme de soutien
aux combattants tchétchènes devrait cesser immédiatement;
ii. que les forces russes soient mieux contrôlées et que la
discipline soit effectivement assurée: tous les règlements civils
et militaires pertinents et toutes les garanties constitutionnelles,
le droit international et humanitaire, et en particulier les Conventions
de Genève et les protocoles y afférents, doivent être intégralement
observés au cours de toutes les opérations; la coopération avec
les services du procureur doit s’exercer sans réserve avant, pendant
et après les opérations;
iii. pour autant que la situation sur le plan de la sécurité
le permet, que les troupes soient consignées dans leurs casernes
ou carrément retirées de la République tchétchène;
iv. que les membres des forces russes soupçonnés d’avoir commis
des exactions fassent l;objet d’une enquête
approfondie et, si leur culpabilité est établie, qu’ils soient sévèrement
punis conformément à la loi, quels que soient leur grade et leurs
fonctions;
v. que les recommandations du commissaire aux droits de l’homme
du Conseil de l’Europe doivent être immédiatement mises en œuvre
par la Fédération russe.
68. Afin d’obtenir que les personnes responsables poulies exactions
soient traduites en justice, l’Assemblée devrait:
i. exiger des autorités russes qu’elles
coopèrent davantage avec les mécanismes de réparation nationaux et
internationaux, tant judiciaires que non judiciaires;
ii. inviter les Etats membres du Conseil de l’Europe à explorer
sans plus attendre toutes les voies permettant de mettre la Fédération
de Russie face à ses responsabilités, y compris par l’introduction
de requêtes interétatiques devant la Cour européenne des Droits
de l’Homme et par l’exercice de la compétence universelle pour les
crimes les plus graves commis dans la République tchétchène;
iii. estimer que, si les efforts pour livrer à la justice ceux
qui se sont rendus responsables pour les violations des droits de
l’homme n’étaient pas intensifiés et si le climat d’impunité en
République tchétchène continuait de prévaloir, la communauté internationale
devrait envisager la mise en place d’un tribunal ad hoc pour juger les crimes de
guerre et les crimes contre l’humanité dans la République tchétchène;
cette juridiction connaîtrait de tous les crimes de ce genre qui
ont été commis dans la République tchétchène;
iv. inviter instamment la Fédération de Russie à ratifier
sans délai le Statut de la Cour pénale internationale.
69. En outre, l’Assemblée devrait recommander au Comité des Ministres:
i. de réorienter ses programmes d’assistance
concernant le Caucase du Nord vers l’objectif prioritaire consistant
à améliorer la situation en matière de droits de l’homme dans la
République tchétchène, et de doter ces programmes de fonds suffisants
pour que des progrès réels soient enregistrés;
ii. de veiller à associer aux-dits programmes d’assistance
les organisations non gouvernementales qui s’occupent de prévenir
et de mettre en évidence les atteintes aux droits de l’homme en
République tchétchène, ainsi que les organisations qui viennent
en aide de diverses manières aux victimes de ces violations;
iii. d’inviter instamment le Gouvernement russe à se conformer
intégralement aux recommandations qui lui sont adressées dans les
paragraphes 9 et 10 de la Résolution... (2003), relative à la situation
en matière de droits de l’homme dans la République tchétchène;
iv. si les efforts pour livrer à la justice ceux qui se sont
rendus coupables de violations des droits de l’homme n’étaient pas
intensifiés et si le climat d’impunité en République tchétchène
continuait de prévaloir, d’envisager de proposer à la communauté
internationale la création d’un tribunal ad
hoc chargé déjuger les crimes de guerre et les crimes
contre l’humanité dans la République tchétchène; cette juridiction serait
habilitée à juger tous les crimes de ce genre qui ont été commis
dans la République tchétchène.
__________
Commission chargée du rapport: commission des questions juridiques
et des droits de l’homme.
Renvoi en commission: Directive n° 584 (2003).
Projet de résolution adopté avec 30 voix pour, 1 voix contre
et 2 abstentions; projet de recommandation adopté avec 31 voix pour,
1 voix contre et 2 abstentions; et projet de directive adopté à
l’unanimité par la commission le 3 mars 2003.
Membres de la commission: Lintner (Président), Marty, Jaskiernia, Jurgens (Vice-Présidents),
Ahlqvist, Akçam, G. Aliyev (remplaçant:
R. Huseynov), Arifl, Arzilli, Attard Montalto, Barquero Vazquez, Berisha, Bindig, Brejc, Bruce, Chaklein, Christmas-M0eller
(remplaçante: Auken), Cilevics, Clerfayt, Contestabile, Daly, Davis, Dees
(remplaçant: Janssen van Raaij), Dimas, Domingues, Engeset, Err, Fedorov, Fico,
Frimannsdóttir, Frunda, Galchenko
(remplaçant: Shishlov), Guardans, Gùndûz, Hajiyeva, Hakl, Holovaty (remplaçant: Shybko), Jansson, Kelber,
Kelemen (remplaçant: Németh), Kontogiannopoulos, S. Kovalev, Kroll, Kroupa, Kucheida, Leutheusser-Schnarrenberger,
Livaneli, Manzella, Martins,
Mas Torres, Masson (remplaçant: Hunault), McNamara, Meelak, Nabholz-Haidegger, Nachbar, Olteanu, Pasternak, Pehrson, Pellicini (remplaçant: Ianuzzi), Pentchev (remplaçant: Arabadjiev), Piscitello, Poroshenko, Postoico, Pourgourides, Raguz, Ransdorf, Rochebloine, Rustamyan, Skrabalo, Sole Tura (remplaçante: Lopez Gonzalez), Spindelegger,
Stankevic (remplaçant: Lydeka),
Stoica (remplaçant: Coifan),
Symonenko, Tabajdi, Tevdoradze, Toshev, Vanoost,
Wilkinson, Wohlwend.
N.B. Les noms des membres qui ont participé à la réunion sont
indiqués en italique.
Voir 13e séance, 2 avril 2003 (adoption
des projets de résolution, de recommandation et de directive amendés);
et Résolution 1323, Recommandation
1600 et Directive
n° 586.