[Documents/Docheader.htm]Respect des obligations et engagements de la Turquie
Doc. 10111
17 mars 2004Rapport
Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de lEurope
Co-rapporteurs : Mme Mady Delvaux-Stehres, Luxembourg, Groupe socialiste, et M. Luc Van den Brande, Belgique, Groupe du Parti populaire europ�en
R�sum�
Les co-rapporteurs estiment que la Turquie a r�alis� en � peine plus de deux ans plus de r�formes que pendant la d�cennie pr�c�dente. Ils se f�licitent de ladoption en octobre 2001 dimportants changements constitutionnels, des sept ensembles de r�formes approuv�s par le parlement entre f�vrier 2002 et ao�t 2003 et de nombreuses autres lois, d�crets et circulaires visant � mettre en uvre ces r�formes.
En particulier, ils f�licitent les autorit�s pour avoir aboli la peine de mort, institu� une tol�rance z�ro en ce qui concerne la torture et limpunit�, lev� de nombreuses restrictions � la libert� dexpression, dassociation et de religion, et pour avoir accord� un certain nombre de droits culturels aux citoyens turcs dorigine kurde. Ils f�licitent �galement les autorit�s pour avoir transform� le Conseil national de s�curit� en organe consultatif.
Compte tenu des progr�s accomplis depuis 2001, les co-rapporteurs consid�rent que la Turquie a clairement d�montr� sa d�termination et sa capacit� � remplir les obligations statutaires qui lui incombent en tant quEtat membre du Conseil de lEurope. Ils expriment leur confiance aux autorit�s turques pour appliquer et consolider les r�formes en question. Les co-rapporteurs proposent en cons�quence de cl�turer la proc�dure de suivi ouverte depuis 1996.
Les co-rapporteurs sugg�rent dentamer avec la Turquie un dialogue post-suivi sur les douze points figurant sur une liste des questions en suspens, notamment en ce qui concerne le refonte de la Constitution de 1982, les amendements � apporter au code �lectoral, la reconnaissance de minorit�s nationales, la poursuite des efforts pour combattre la violence contre les femmes, la lutte contre la corruption et le droit � lobjection de conscience et � un service civil alternatif.
I. Projet de r�solution [Lien vers le texte adopt�]
1. La Turquie est membre du Conseil de lEurope depuis 1949 et � ce titre sest engag�e � respecter les obligations d�coulant de larticle 3 du Statut concernant la d�mocratie pluraliste, le respect de la pr��minence du droit et la protection des droits de lHomme. Elle fait lobjet dune proc�dure de suivi depuis ladoption en 1996 de la Recommandation 1298 relative au respect par la Turquie des engagements concernant la r�forme constitutionnelle et l�gislative.
2. Le 28 juin 2001, dans sa R�solution 1256 (2001), lAssembl�e parlementaire, tout en se f�licitant des progr�s accomplis par la Turquie, d�cidait de poursuivre la proc�dure de suivi et d�valuer les progr�s jusqu� ce que lAssembl�e d�cide de clore la proc�dure.
3. LAssembl�e constate que malgr� une grave crise �conomique en 2001, linstabilit� politique � lorigine d�lections anticip�es en novembre 2002 et les pr�occupations g�n�r�es par la guerre en Irak, les autorit�s turques ont n�anmoins poursuivi sans rel�che les efforts n�cessaires pour mettre en uvre les r�formes indispensables � la modernisation de la Turquie. En � peine plus de deux ans, la Turquie a r�alis� plus de r�formes que pendant les dix ann�es pr�c�dentes.
4. LAssembl�e se f�licite de ladoption dune importante r�vision constitutionnelle, en octobre 2001, des sept ensembles de r�formes vot�s par le parlement entre f�vrier 2002 et ao�t 2003 ainsi que de nombreuses autres lois, d�crets et circulaires visant � mettre en uvre ces r�formes.
5. Elle note avec satisfaction que, malgr� les inqui�tudes suscit�es au d�part par larriv�e au pouvoir en novembre 2002 du parti de la justice et du d�veloppement, dirig� par M. Erdogan, le nouveau gouvernement a fait jusquici bon usage de la majorit� absolue dont il dispose au parlement, avec le soutien sans faille du seul parti dopposition, le Parti r�publicain du Peuple (CHP), pour acc�l�rer et intensifier les r�formes.
6. En ce qui concerne la d�mocratie pluraliste, lAssembl�e reconna�t que la Turquie est une d�mocratie qui fonctionne, avec un syst�me multipartite, des �lections libres et une s�paration des pouvoirs. La fr�quence des cas de dissolution de partis politiques est n�anmoins une r�elle source de pr�occupation et lAssembl�e esp�re que les modifications constitutionnelles doctobre 2001 ainsi que celles apport�es � la loi sur les partis politiques en mars 2002 limiteront � lavenir le recours � une mesure aussi extr�me que la dissolution. LAssembl�e estime aussi que le seuil de 10% de suffrages requis au niveau national pour quun parti entre au parlement est anormalement �lev� et quil convient de r�organiser les modalit�s de vote des citoyens turcs r�sidant � l�tranger.
7. En ce qui concerne le fonctionnement des institutions, lAssembl�e f�licite la Turquie davoir r�duit le r�le du Conseil national de s�curit� � ce quil naurait jamais d� cesser d�tre, � savoir un organe purement consultatif en mati�re de d�fense et de s�curit� nationale : lamendement de larticle 118 de la Constitution ainsi que les amendements apport�s � la loi sur le Conseil national de s�curit� et son secr�tariat g�n�ral repr�sentent un progr�s fondamental quil convient de saluer. La Turquie doit parachever cette r�forme en prenant les dispositions n�cessaires pour exclure la participation des militaires dans des organismes civils, tels que le haut conseil de l�ducation (Y�K) ou le Conseil supr�me de laudiovisuel public (RT�K), et pour garantir un contr�le parlementaire, notamment en mati�re budg�taire, des activit�s de larm�e. Nonobstant la position g�ostrat�gique de la Turquie, lAssembl�e demande �galement que la Turquie reconnaisse le droit � lobjection de conscience et introduise un service civil alternatif.
8. LAssembl�e se r�jouit de voir que la proc�dure devant les cours de s�ret� de lEtat a enfin �t� align�e, notamment en ce qui concerne les droits de la d�fense, sur le droit p�nal ordinaire, que la dur�e de la garde � vue pour les infractions collectives a �t� ramen�e de 15 jours � 4 jours maximum et que le droit de tout d�tenu � un avocat d�s la premi�re heure de garde � vue a �t� reconnu y compris pour les infractions relevant des cours de s�ret� de lEtat.
9. LAssembl�e se r�jouit �galement du projet des autorit�s turques de supprimer les cours de s�ret� de lEtat, ce qui n�cessitera encore une autre r�vision de la Constitution. LAssembl�e engage vivement la Turquie, comme elle lavait d�j� fait en 2001, � recourir � lexp�rience de la Commission de Venise pour toute r�vision constitutionnelle ult�rieure. Elle est en effet davis que la Constitution de 1982, remani�e � de nombreuses reprises depuis, gagnerait en coh�rence et en clart� � faire lobjet dune refonte compl�te. LAssembl�e engage �galement les autorit�s turques � entamer la r�flexion quant � un acc�s individuel direct � la Cour constitutionnelle.
10. LAssembl�e demande �galement aux autorit�s turques de finaliser sans retard le projet de cr�ation dune institution de lOmbudsman et f�licite la Turquie pour les efforts accomplis en vue dun meilleur dialogue avec les ONG, notamment par la nouvelle composition des conseils r�gionaux des droits de lhomme et lassouplissement de la l�gislation applicable aux associations. La libert� daction Des ONG doit n�anmoins encore �tre renforc�e.
11. LAssembl�e salue la d�termination de la Turquie � lutter contre la corruption en cr�ant plusieurs commissions denqu�te parlementaire, en adoptant en janvier 2003 un plan daction urgent et en ratifiant la Convention civile contre la corruption du Conseil de lEurope. Elle souhaite que la Turquie ratifie �galement la Convention p�nale contre la corruption ainsi que la Convention relative au blanchiment, au d�pistage, � la saisie et � la confiscation des produits du crime.
12. En ce qui concerne le droit des femmes, lAssembl�e se f�licite des avanc�es consid�rables dues � la r�vision constitutionnelle doctobre 2001, lentr�e en vigueur en janvier 2002 du nouveau code civil et la loi sur la s�curit� de lemploi dao�t 2002. Elle rappelle quun Etat moderne doit garantir l�galit� entre tous ses citoyens, notamment pour ce qui est de lacc�s � lemploi, aux fonctions publiques comme �lectives, � la sant� ou � l�ducation. Elle demande aux autorit�s turques de mettre en uvre des programmes pour �radiquer lillettrisme f�minin, ce qui est un pr�alable pour permettre aux femmes dexercer leurs droits. LAssembl�e a pris note avec satisfaction que le code p�nal a �t� modifi� en juillet 2003 pour abroger toute possibilit� de circonstances att�nuantes en cas de crime dhonneur. Elle demande aux autorit�s de faire preuve de fermet� dans la lutte contre les crimes dhonneur et la violence domestique et de soutenir les femmes, notamment en augmentant le nombre de refuges.
13. En ce qui concerne les libert�s fondamentales, lAssembl�e f�licite la Turquie davoir enfin aboli la peine de mort, en ratifiant le Protocole n� 6 en novembre 2003 et en signant le Protocole n�13 en janvier 2004.
14. Elle f�licite aussi la Turquie pour sa d�termination � lutter contre la torture et limpunit� : la politique de tol�rance z�ro affich�e par les autorit�s a commenc� � porter ses fruits. Lam�lioration des conditions de garde � vue, une meilleure garantie des droits de la d�fense et le droit � un examen m�dical ont �t� salu�es par le CPT, dont les recommandations sont syst�matiquement mises en uvre, �galement en ce qui concerne les conditions de d�tention. LAssembl�e regrette que, malgr� ces efforts, des cas de traitements contraires � larticle 3 de la CEDH soient encore signal�s. Elle exhorte par cons�quent les autorit�s turques � rester vigilantes et � veiller � ce que leurs instructions soient suivies dans lensemble du pays.
15. Pour ce qui est de la lutte contre limpunit�, lAssembl�e consid�re que la suppression de lautorisation administrative pr�alable pour poursuivre tout fonctionnaire se rendant coupable de torture ou de traitements inhumains ou d�gradants, linterdiction du sursis ou de la conversion les peines prononc�es en amende, lobligation de traiter les plaintes des victimes en priorit� et lobligation faite au procureur denqu�ter personnellement sont des avanc�es consid�rables. Elle constate �galement que des efforts importants ont �t� fournis, avec lassistance du Conseil de lEurope, pour am�liorer la formation de la police et de la gendarmerie.
16. En ce qui concerne la libert� dexpression, lAssembl�e prend acte des importants assouplissements apport�s � la l�gislation : larticle 8 de la loi anti-terreur a �t� purement et simplement abrog�, les articles 312, 159, 169 et larticle 7 de la loi anti-terreur ont �t� modifi�s dans un sens plus conforme � la jurisprudence de la Cour europ�enne des droits de lHomme et les lois r�primant les infractions par voie de presse ont �galement �t� amend�es. LAssembl�e attend cependant encore des progr�s en ce qui concerne les d�lits de diffamation, dinsulte ou doutrage aux corps constitu�s, qui ne devraient plus �tre passibles de peines demprisonnement.
17. En ce qui concerne la libert� dassociation, lAssembl�e rel�ve les progr�s importants qui ont �t� accomplis : le nouvel article 33 de la Constitution pr�voit maintenant que le refus denregistrement des statuts, la dissolution ou la suspension dactivit�s des associations ne pourront plus intervenir que par d�cision judiciaire. La loi sur les associations de 1983 a �t� consid�rablement remani�e, notamment en ce qui concerne le contr�le pr�alable des activit�s des associations. En ce qui concerne la libert� de r�union, une manifestation ne pourra plus �tre interdite que sil y a clairement danger pour lordre public.
18. Pour ce qui est de la libert� de religion et notamment le sort r�serv� aux minorit�s religieuses, lAssembl�e f�licite les autorit�s turques davoir modifi� la loi sur les fondations et la loi sur les constructions, ce qui permettra dor�navant aux associations concern�es de vendre et dacqu�rir des biens immobiliers ou de construire de nouveaux lieux de culte.
19. La Turquie est un Etat musulman la�c : il sagit l� dune sp�cificit� qui prouve son attachement aux valeurs d�mocratiques europ�ennes, fond�es sur la tol�rance et le respect mutuel. La Turquie doit veiller � ce que la neutralit� de lEtat continue d�tre respect�e et que la sph�re religieuse ninterf�re pas avec les principes de gouvernance dune soci�t� moderne.
20. LAssembl�e se r�jouit de la lev�e de l�tat durgence dans les quatre derni�res provinces du sud-est o� il �tait encore appliqu�, du vote de la loi de r�int�gration dans la soci�t� en juillet 2003, qui a permis entre autres la lib�ration de plusieurs milliers de citoyens turcs dorigine kurde et le retour � une vie normale pour les centaines dautres personnes qui se sont rendues aux autorit�s. LAssembl�e esp�re aussi que le parlement adoptera bient�t le projet de loi visant � octroyer une indemnisation � toutes les personnes victimes du terrorisme et des mesures prises par les autorit�s pour le combattre. Pr�s de cinq ans apr�s la fin des hostilit�s, lAssembl�e estime quil est temps dinvestir davantage dans la reconstruction �conomique et sociale du sud-est. Elle prend note de la volont� des autorit�s turques de d�velopper les programmes de � retour au village � avec lassistance de la banque mondiale et de lONU. LAssembl�e se r�jouit �galement de la r�cente adoption de la loi encourageant les investissements dans les provinces o� le revenu par habitant est peu �lev�.
21. LAssembl�e regrette que la Turquie nait toujours pas ratifi� la convention cadre pour la protection des minorit�s nationales ni la charte europ�enne des langues r�gionales ou minoritaires. LAssembl�e estime cependant que les premiers pas ont �t� accomplis pour reconna�tre des droits culturels aux membres de diff�rents groupes ethniques et notamment � la population dorigine kurde : la Constitution a �t� r�vis�e et ninterdit plus lusage dautres langues que le turc ; il est maintenant possible douvrir des �coles de langues pour �tudier la ou les langues kurdes et des �missions de radio ou de t�l�vision en langue kurde ont �t� autoris�es, de m�me que le droit pour les parents de choisir un pr�nom kurde pour leurs enfants. LAssembl�e encourage vivement les autorit�s turques � continuer de promouvoir la diversit� culturelle et linguistique et esp�re que les mesures qui seront prises auront un impact concret dans la vie quotidienne des populations concern�es, notamment en ce qui concerne lacc�s � la justice et � ladministration et lorganisation des soins de sant�.
22. En ce qui concerne lex�cution des arr�ts de la Cour europ�enne des droits de lhomme, lAssembl�e note que les demandes quelle avait exprim�es dans sa R�solution 1256(2001 ont �t� satisfaites :
i. elle f�licite les autorit�s turques davoir introduit les modifications n�cessaires dans son droit interne en 2002 et 2003 pour permettre la r�vision des proc�s suite aux arr�ts de la Cour constatant une violation de la Convention, ce qui a permis notamment la r�ouverture du proc�s de Leyla Zana et de trois autres parlementaires devant la cour de s�ret� dAnkara. LAssembl�e regrette que dans lattente de lissue du proc�s, la cour de s�ret� nait pas donn� suite aux demandes de mise en libert� provisoire pr�sent�es par les quatre ex-d�put�s, qui sont d�tenus depuis plus de 10 ans ;
ii. lAssembl�e prend �galement note du fait que plus de cinq ans apr�s larr�t rendu au b�n�fice de Mme Loizidou en mati�re de satisfaction �quitable, la Turquie a enfin accept� de se conformer � lobligation de paiement inconditionnelle que fait peser sur elle larticle 46 de la Convention, comme sur tous les autres Etats parties � la Convention. Elle rappelle aux autorit�s turques quelles doivent encore ex�cuter larr�t rendu au fond en 1996 dans la m�me affaire, notamment en ce qui concerne ladoption de mesures g�n�rales visant � �viter la r�p�tition ou la continuation des violations constat�es par la Cour. Elle demande � la Turquie de continuer de coop�rer pleinement avec le Comit� des Ministres dans la difficile t�che qui lui incombe de veiller � la bonne ex�cution des arr�ts, notamment en ce qui concerne laffaire inter�tatique Chypre contre Turquie.
23. En cons�quence, et dans le cadre du processus actuel de r�formes engag� par les autorit�s turques, lAssembl�e invite la Turquie � :
i. proc�der � une refonte de la Constitution de 1982, avec lassistance de la Commission de Venise, afin dachever son adaptation aux standards europ�ens en vigueur et dans lintervalle, supprimer ou modifier les articles 131 � 1, 127 et ceux relatifs aux cours de s�ret� de l�tat ;
ii. modifier le code �lectoral pour abaisser le seuil de 10% et permettre aux citoyens turcs vivant � l�tranger de voter sans avoir � se pr�senter aux fronti�res ;
iii. reconna�tre le droit � lobjection de conscience et cr�er un service civil alternatif ;
iv. cr�er linstitution de lOmbudsman ;
v. ratifier la Convention p�nale contre la corruption, la Convention relative au blanchiment, au d�pistage, � la saisie et � la confiscation des produits du crime, la Convention cadre pour la protection des minorit�s nationales, la Charte des langues r�gionales et minoritaires, la Charte sociale r�vis�e ; accepter les dispositions de la Charte sociale qui ne le sont pas encore ;
vi. achever la r�vision du Code p�nal, avec lassistance du Conseil de lEurope, en tenant compte des observations de lAssembl�e en ce qui concerne la d�finition des d�lits dinsulte ou de diffamation, de viol, de crimes dhonneur et plus g�n�ralement, des imp�ratifs de proportionnalit� pos�s par la jurisprudence de la Cour europ�enne des droits de lhomme en mati�re de libert� dexpression et dassociation ;
vii. proc�der, avec lassistance du Conseil de lEurope, � lexamen approfondi des lois datant de l�poque de l�tat durgence, notamment la loi sur les associations, la loi sur les syndicats, la loi sur les partis politiques et la loi sur la presse, pour assurer une coh�rence maximum avec lesprit des r�formes r�centes ;
viii. mettre en uvre la r�forme de ladministration locale et r�gionale ainsi que la d�centralisation en respectant les principes de la charte de lautonomie locale ; dans le cadre de cette r�forme, mettre � disposition des autorit�s comp�tentes les moyens institutionnels et humains n�cessaires et proc�der � une p�r�quation �quitable des ressources pour pallier le sousd�veloppement de certaines r�gions, notamment le sud-est de la Turquie ;
ix. poursuivre, avec lassistance du Conseil de lEurope les efforts de formation des juges et procureurs ainsi que de la police et de la gendarmerie ;
x. lever la r�serve g�ographique � la Convention de Gen�ve relative au statut des r�fugi�s et mettre en uvre les recommandations du Commissaire aux droits de lhomme du Conseil de lEurope en ce qui concerne le traitement des r�fugi�s et demandeurs dasile ;
xi. poursuivre la politique visant � reconna�tre lexistence des minorit�s nationales vivant en Turquie et � leur accorder le droit de maintenir, d�velopper et exprimer leur identit�, et la mettre en uvre concr�tement ;
xii. poursuivre les efforts visant � lutter contre lillettrisme f�minin et contre toutes les formes de violence contre les femmes.
24. LAssembl�e estime que la Turquie a clairement d�montr� ces trois derni�res ann�es sa volont� et sa capacit� � remplir les obligations statutaires qui lui incombent en tant quEtat membre du Conseil de lEurope. Au vu des progr�s r�alis�s depuis 2001, lAssembl�e exprime sa confiance aux autorit�s turques pour appliquer et consolider les r�formes, dont la mise en oeuvre n�cessitera un important travail dadaptation r�glementaire, y compris au-del� de lhorizon 2004. LAssembl�e d�cide donc de cl�turer la proc�dure de suivi ouverte depuis 1996.
25. LAssembl�e poursuivra, par le biais de sa commission de suivi, le dialogue post-suivi avec les autorit�s turques sur les questions �voqu�es au paragraphe 23 ci-dessus, ou sur toute autre question qui se poserait du fait des obligations de la Turquie en tant quEtat membre du Conseil de lEurope.
II. Projet de recommandation [Lien vers le texte adopt�]
1. LAssembl�e parlementaire estime que la Turquie a clairement d�montr� ces trois derni�res ann�es sa volont� et sa capacit� � remplir les obligations statutaires qui lui incombent en tant quEtat membre du Conseil de lEurope. Au vu des progr�s r�alis�s depuis 2001, lAssembl�e exprime sa confiance aux autorit�s turques pour appliquer et consolider les r�formes, dont la mise en oeuvre n�cessitera un important travail dadaptation r�glementaire, y compris au-del� de lhorizon 2004. LAssembl�e d�cide donc de cl�turer la proc�dure de suivi ouverte depuis 1996.
2. Se r�f�rant � sa R�solution (2004) relative au respect des obligations et engagements de la Turquie, lAssembl�e estime que la Turquie doit continuer de b�n�ficier des programmes dassistance et de coop�ration du Conseil de lEurope pour achever et mettre en uvre les r�formes entreprises pour la consolidation dun Etat de droit respectueux des droits de lhommes et des libert�s fondamentales.
3. En cons�quence, lAssembl�e recommande au Comit� des Ministres :
i. de poursuivre, en coop�ration avec les autorit�s turques, les programmes de formation des policiers, juges et procureurs ainsi que les programmes de r�forme du syst�me p�nitentiaire ;
ii. dassister les autorit�s turques dans leurs projets de r�forme constitutionnelle et de leur demander dadresser pour avis � la Commission europ�enne pour la d�mocratie par le droit (Commission de Venise) avant adoption par le parlement, tout projet de r�vision de la Constitution ;
iii. de continuer � assurer lexpertise juridique des projets de loi en pr�paration ou � venir, notamment du code p�nal et du code de proc�dure p�nale, de la loi sur les associations, de la loi sur la presse, de la loi sur les partis politiques, de la loi sur les syndicats et de la loi sur la d�centralisation ;
iv. de mettre en uvre un programme dassistance et de coop�ration en mati�re de lutte contre la corruption ;
v. d�laborer et mettre en uvre un plan daction pour l�galit� hommes/femmes en Turquie, en mettant laccent notamment sur les probl�mes de violence contre les femmes, conform�ment � la Recommandation (2002) 5 du 30 avril 2002 du Comit� des Ministres sur la protection des femmes contre la violence.
III. Expos� des motifs par les co-rapporteurs
A. INTRODUCTION
B. DEVELOPPEMENTS POLITIQUES DEPUIS JUIN 2001
ii. Les �lections anticip�es de novembre 2002
iii. Les dossiers urgents du nouveau gouvernement
a. Le sommet de Copenhague
b. La question de Chypre
c. La crise irakienneC. REFORMES REALISEES DEPUIS JUIN 2001
i. Introduction
ii. Fonctionnement des institutions d�mocratiques
a. Le r�le de larm�e
b. La dissolution de partis politiques
c. Le fonctionnement du syst�me judiciaire
d. Le r�le de la soci�t� civile
e. La d�mocratie locale et r�gionalea. La garde � vue
b. La lutte contre limpunit� et la torture
c. La situation dans les prisons
d. Labolition de la peine de mort
e. La libert� dexpression
f. La libert� dassociation et de r�union
g. La libert� de religiona. La lev�e de l�tat durgence
b. La loi sur la r�insertion
c. La situation dAbdullah ��alan
d. La r�vision des proc�s Zana et autres
e. Loctroi de droits culturels
f. Le retour des d�plac�s
g. L�tat durgence �conomiquea. Les droits de la femme
b. La lutte contre la corruption
c. Les droits sociauxA. Introduction
1. La Turquie est membre du Conseil de l'Europe depuis 1949. Elle fait lobjet dune proc�dure de suivi des obligations et engagements depuis 1996, lorsque lAssembl�e a adopt� la Recommandation 1298 (1996) relative au respect par la Turquie des engagements concernant la r�forme constitutionnelle et l�gislative. LAssembl�e a eu, depuis, loccasion d�valuer � deux reprises la situation de la Turquie au regard de ses obligations, en examinant les rapports que lui a pr�sent�s la commission de suivi en janvier 1999[1], puis en juin 2001 [2].
2. A cette occasion, lAssembl�e a adopt� la R�solution 1256 dans laquelle elle � se f�licite des progr�s r�alis�s par la Turquie en ce qui concerne le respect de ses obligations en tant quEtat membre du Conseil de lEurope depuis le d�but de la proc�dure de suivi et, notamment, du dialogue ouvert et sinc�re qui sest instaur� quant aux questions encore en suspens. LAssembl�e encourage donc les autorit�s turques � mettre en uvre le Programme national et � poursuivre ladoption des mesures l�gislatives et administratives n�cessaires pour se conformer aux obligations dont elle doit encore sacquitter ( ). �
3. Au cours de lann�e 2002, la Commission de suivi d�signait deux nouveaux rapporteurs. Ceux-ci ont entrepris leur premi�re visite dinformation dans le pays les 17-21 f�vrier 2003. Leur seconde visite sest d�roul�e du 25 au 28 mai 2003.
4. Les rapporteurs expriment leur gratitude � la d�l�gation parlementaire turque pour lexcellente organisation de leurs visites. Ils tiennent � t�moigner �galement leur reconnaissance � lensemble de leurs interlocuteurs, pour la cordialit� et la franchise de leurs �changes de vues.
5. Les �v�nements qui se sont produits dans le pays depuis ladoption par lAssembl�e de la R�solution 1256, il y a plus de deux ans, m�ritent que lon y consacre en premier lieu quelques d�veloppements dans le pr�sent rapport.
B. D�veloppements politiques depuis juin 2001
6. Quatre �v�nements majeurs ont marqu� la vie politique en Turquie depuis juin 2001 : la grave crise �conomique qui a frapp� le pays en 2001, les �lections anticip�es de novembre 2002, la d�cision de lUnion europ�enne, prise lors du sommet de Copenhague en d�cembre 2002, de nexaminer que fin 2004 les suites � donner � la demande dadh�sion de la Turquie, et la crise irakienne.
7. Deux graves crises financi�res ont frapp� la Turquie en novembre 2000 puis en f�vrier 2001 : chute de plus de 50 % de la livre turque, recul de plus de 9,4 % du PIB, inflation � plus de 80 %, perte de 2 millions demplois en lespace de 2 ans. En 2002, le taux de ch�mage officiel de la population �tait de 9,9%, avec 2,37 millions de sans-emploi. Si la situation sest l�g�rement am�lior�e en 2002, notamment avec une inflation r�duite � 32 % par an et une croissance de 7,8 %, le FMI a d� pr�ter environ 19 milliards de dollars sur trois ans pour maintenir la Turquie � flot, dont 16 milliards ont d�j� �t� tir�s. Pour 2003, lobjectif du Gouvernement �tait de ramener linflation � 20 %, darriver � une croissance de 5 % et de renflouer les caisses de lEtat par des privatisations pour un montant de 4 milliards USD. Si la situation �conomique sest nettement am�lior�e en 2003, notamment avec une inflation r�duite � 19,3%, le service de la dette, continue de poser un probl�me important et les privatisations nont rapport� que 893 millions USD. Le budget adopt� pour 2004 table sur une pr�vision de croissance de 5% et sur une inflation r�duite � 12% mais il sera de nouveau d�ficitaire de 32 milliards USD : en effet 42% des d�penses devront encore �tre consacr�es au remboursement de la dette, qui a atteint 187 milliards USD.
8. Avec un PIB par t�te de 2 584 USD en 2002, la Turquie est tr�s en dessous de la moyenne de celui des habitants de lUnion. En outre, dans 21 provinces sur les 81 que compte le pays, le revenu par habitant est inf�rieur � 1 500 USD[3]. Les provinces de lest et du sud-est surtout souffrent dune mis�re chronique. La Gr�ce consid�r�e pourtant comme lun des pays les plus pauvres de lUnion, dispose dun PIB par t�te de 12 700 . En revanche, compar�e � dautres pays candidats � ladh�sion � lhorizon 2007, la situation turque est plut�t plus favorable : ainsi, la Roumanie dispose dun PIB par t�te de 1 870 seulement et la Bulgarie de 1 960 .
ii. Les �lections anticip�es de novembre 2002
9. La crise �conomique, � lorigine de la plus grave r�cession quait connu la Turquie depuis 1945, a sans aucun doute contribu� � d�stabiliser le pouvoir politique, contraint dinfliger � la population une cure daust�rit� sans pr�c�dent. Mais la coalition au pouvoir, compos�e de lANAP (Parti de la m�re patrie) et du MHP (Parti de laction nationaliste) et dirig�e par B�lent Ecevit (DSP, Parti de la gauche d�mocratique), 77 ans et malade depuis le mois de mai, se d�lita aussi progressivement au courant de lann�e 2002. Une crise gouvernementale �clata en juillet 2002, le MHP sopposant farouchement[4] � un certain nombre de r�formes voulues par le gouvernement en vue de remplir les crit�res dits de Copenhague impos�s par lUnion avant toute discussion sur une �ventuelle date douverture des n�gociations dadh�sion.
10. Finalement, la Grande Assembl�e nationale turque (TBMM) se r�solut, le 31 juillet, � avancer les �lections l�gislatives, initialement pr�vues pour avril 2004. La date en fut fix�e au 3 novembre.
11. Le 20 septembre 2002, le Haut Conseil �lectoral d�clara in�ligible Recep Tayyip Erdogan, ancien maire dIstanbul entre 1994 et 1998 et lun des hommes politiques les plus populaires de Turquie, en raison dune condamnation p�nale � 10 mois de prison en 1998, fond�e sur larticle 312 du Code p�nal, pour incitation � la haine religieuse, pour laquelle il purgea 4 mois de prison en 1999 avant d�tre lib�r� � la faveur dune amnistie.
12. Interdit dactivit�s politiques suite � cette condamnation, M. Erdogan avait n�anmoins fond� en ao�t 2001 le Parti de la justice et du d�veloppement[5] (AKP), nettement plus mod�r�[6] que le Refah (Parti de la prosp�rit�), dirig� par Necmettin Erbakan et dissous en 1998 et que les deux partis cr��s par la suite, le Parti de la Vertu (Fazilet, dissous en juin 2001) et le parti du Bonheur[7] (Saadet). En octobre, suite � une injonction de la Cour constitutionnelle, M. Erdogan d�missionna du conseil dadministration o� il si�geait en tant que membre fondateur du parti mais resta pr�sident de celui-ci.
13. M. Erdogan ne pouvant se pr�senter aux �lections, perdait de ce fait toute chance d�tre nomm� premier ministre en cas de victoire de son parti, la Constitution exigeant quun ministre soit aussi d�put�. Par ailleurs, le 24 octobre 2002, soit � peine 15 jours avant les �lections, le Procureur g�n�ral demanda � la Cour constitutionnelle de dissoudre le Parti de la justice et du d�veloppement (AKP) [8], notamment parce que, malgr� linjonction davril 2002, M. Erdogan �tait rest� pr�sident du parti.
14. Malgr� cela lAKP r�alisa une perc�e massive lors des �lections du 3 novembre, remportant 34,2% des suffrages exprim�s et la majorit� absolue[9] au parlement avec 363 si�ges sur 550. Tous les autres partis traditionnels furent balay�s.
15. Deuxi�me formation du scrutin, le Parti r�publicain du peuple (CHP, social d�mocrate), qui n�tait plus repr�sent� au parlement depuis 1999, recueillit 19,3% des voix et obtint 178 si�ges. Les neuf autres si�ges sont occup�s par des ind�pendants. Le CHP est la seule formation dopposition de la Grande Assembl�e nationale de Turquie, chambre unique du parlement turc, qui compte 550 d�put�s, dont 500 si�geront pour la premi�re fois. Aucune des seize autres formations, qui se pr�sentaient devant les �lecteurs, ne recueillit les 10% des suffrages n�cessaires pour �tre repr�sent�e au parlement. Le DSP du premier ministre sortant nobtint m�me pas 2 % des voix.
16. Les �lections ont �t� observ�es par le Bureau des Institutions D�mocratiques et des Droits de lHomme (BIDDH) de lOSCE, ce qui constituait une premi�re. Suite � une d�cision du Bureau de lAssembl�e, une petite d�l�gation dobservateurs au nombre desquels Mme Durrieu, Pr�sidente de la commission de suivi et Mme Delvaux-Stehres, rapporteur - s�tait �galement rendue en Turquie lors de ces �lections, qui se sont d�roul�es dans des conditions tout � fait satisfaisantes[10].
17. Les co-rapporteurs constatent que le nouveau gouvernement issu des �lections a fait jusquici bon usage de la majorit� absolue dont il dispose au parlement, notamment pour faire passer rapidement les r�formes qui simposent. Ils ont pris note avec satisfaction, lors de leur rencontre en f�vrier 2003 avec le vice-pr�sident du CHP, de la volont� de celui-ci de faire de lopposition constructive et de soutenir la volont� de r�formes du nouveau gouvernement et notent que ce soutien na pour lheure pas fait d�faut au gouvernement.
18. En raison de la loi �lectorale actuelle (qui fixe � 10% au niveau national le pourcentage de suffrages requis pour quun parti entre au parlement), il faut cependant observer que 45% des 31 millions d�lecteurs ne seront pas repr�sent�s dans la Grande Assembl�e nationale de Turquie, alors quavec moins de 35 % des voix, le parti vainqueur d�tient 2/3 des si�ges.
19. Ce seuil de 10% semble anormalement �lev� aux co-rapporteurs par rapport � ce qui se pratique dans dautres pays europ�ens. Certes, ce seuil vise � contribuer � une stabilit� politique mais il convient dobserver que les �lections de 2002 sont les quatri�mes �lections cons�cutives � avoir �t� convoqu�es de mani�re anticip�e. En outre, ainsi que le note lOSCE dans son rapport sur les �lections[11], les cinq partis qui pass�rent la barri�re des 10% lors des �lections l�gislatives de 1999 se fragment�rent par la suite, de sorte qu� la veille des �lections de 2002, il y avait 11 partis au parlement.
20. Les co-rapporteurs esp�rent que le processus de r�flexion amorc� par les autorit�s pour ce qui est dune r�vision de la loi �lectorale aboutira � une plus juste repr�sentation de la volont� populaire au sein de la Grande Assembl�e Nationale de Turquie.
21. Les co-rapporteurs recommandent vivement aux autorit�s turques de prendre en compte les recommandations de lOSCE, notamment celle dabaisser le seuil des 10% ou dassouplir la r�gle selon laquelle, pour pouvoir participer aux �lections, tout parti doit �tre organis� dans au moins la moiti� des 81 provinces du pays et dans au moins un tiers des districts de chaque province, ces deux r�gles visant manifestement � �viter que n�mergent des partis � base uniquement r�gionale.
22. Ainsi, par exemple, le parti pro-kurde HADEP, qui faisait lobjet dune proc�dure de dissolution pendante devant la Cour constitutionnelle depuis 1999[12], ne pr�senta pas de candidats sous sa banni�re et pr�f�ra rejoindre le DEHAP (Parti d�mocratique du peuple), cr�� en 1999 en pr�vision de la dissolution �ventuelle du HADEP, lequel recueillit 6,5% des suffrages au niveau national et ne sera donc pas repr�sent� au parlement, alors quil avait obtenu plus de 40% des voix dans les principales villes du Sud-Est anatolien.
23. Les co-rapporteurs estiment que la proportionnelle en vigueur en Turquie doit pouvoir �tre am�nag�e pour �viter que pr�s de la moiti� des votants ne se sentent exclus et ne puissent faire valoir leurs points de vue au parlement, ce qui nest pas sain dans une d�mocratie.
24. Les co-rapporteurs recommandent �galement aux autorit�s turques de revoir les modalit�s de lexercice du droit de vote des citoyens turcs vivant � l�tranger : 3,5 millions de Turcs vivent en dehors de la Turquie et ne peuvent exercer leur droit de vote quen se pr�sentant aux fronti�res : il nest pas possible de voter par correspondance ni dans les consulats.
iii. Les dossiers urgents du nouveau gouvernement
25. A peine form� fin novembre 2002, le 58�me gouvernement turc, compos� de 23 ministres[13], tous membres de lAKP, sous la direction dAbdullah G�l, bras droit de M. Erdogan, dut faire face � trois dossiers urgents : le sommet de Copenhague des 12-13 d�cembre, la n�gociation du plan Annan pour lavenir de Chypre et la crise irakienne.
26. Par ailleurs, suite � lentr�e en vigueur le 31 d�cembre 2002 dune mini-r�vision constitutionnelle visant � am�nager les conditions d�ligibilit� des d�put�s[14], M. Erdogan fut autoris� le 23 f�vrier 2003 par le Haut Conseil Electoral � pr�senter sa candidature aux l�gislatives partielles de Siirt (sud-est). Le 9 mars 2003, M. Erdogan fut triomphalement �lu, suite � quoi le gouvernement pr�senta sa d�mission. M. Erdogan fut alors nomm� Premier ministre le 14 mars[15] et le 59�me gouvernement, dans lequel M. G�l occupe maintenant le poste de ministre des Affaires �trang�res, obtint la confiance du parlement le 23 mars.
a. Le sommet de Copenhague de d�cembre 2002
27. Le pr�c�dent gouvernement avait tent� de mettre les bouch�es doubles pour satisfaire aux crit�res de Copenhague en vue darracher une date ferme pour louverture des n�gociations dadh�sion. Apr�s la r�vision constitutionnelle doctobre 2001, ladoption du nouveau code civil en novembre, il y eut encore trois paquets l�gislatifs respectivement adopt�s en f�vrier, mars et ao�t 2002. Le rapport annuel de la Commission sur l�tat des progr�s accomplis par la Turquie en vue de ladh�sion, publi� le 9 octobre 2002, fit toutefois leffet dune douche froide : malgr� limportance des progr�s accomplis, la Commission conclut que la Turquie ne remplissait toujours pas compl�tement les crit�res politiques dits de Copenhague.
28. Au lendemain des �lections du 3 novembre, M. Erdogan, le nouvel homme fort du pays, bien que noccupant aucune fonction minist�rielle ou parlementaire, accomplit un v�ritable marathon en faisant le tour de la quasi-totalit� des capitales europ�ennes, dune part pour les rassurer sur la vocation europ�enne de son parti et sa volont� de poursuivre les r�formes et, dautre part, pour plaider la cause de la Turquie en vue du sommet de Copenhague, pr�vu en d�cembre.
29. Malgr� les efforts d�ploy�s en ce sens, le Conseil des Ministres de lUnion europ�enne d�cida les 12 et 13 d�cembre 2002 de ne pas fixer de date � la Turquie pour louverture des n�gociations dadh�sion et de revoir la question � lautomne 2004, sur la base dun rapport de la Commission. Par contre le feu vert fut donn� pour les dix autres pays candidats, y compris Chypre, qui deviendront membres le 1er mai 2004.
30. Lors de leur premi�re visite en f�vrier 2003, les co-rapporteurs ont �t� frapp�s de voir � quel point la d�cision prise au sommet de Copenhague avait �t� ressentie comme une injustice, tant par les autorit�s que par la soci�t� civile. Plusieurs interlocuteurs ont exprim� un sentiment de d�couragement en soutenant que, quels que soient les efforts fournis par la Turquie en mati�re de d�mocratisation et droits de lhomme, on lui en demanderait toujours plus, sans jamais lui d�cerner enfin un satisfecit. Il a �galement �t� rappel� aux co-rapporteurs que la Turquie avait le statut de membre associ� depuis 1963, que sa premi�re demande dadh�sion remontait � 1987, que lunion douani�re avait �t� r�alis�e depuis janvier 1996 et que sa candidature avait �t� officiellement retenue � Helsinki en 1999. Fut �galement exprim�e la crainte quen 2004, avec 25 Etats membres, lUnion europ�enne ne prenne encore plus difficilement une d�cision en sa faveur.
31. Le sentiment de faire lobjet dun traitement discriminatoire fut aussi exprim�, notamment par rapport � la candidature de pays de lancien bloc communiste. Enfin, les d�clarations de Val�ry Giscard dEstaing du 8 novembre 2002 selon lesquelles la � Turquie nest pas un pays europ�en � et que � son adh�sion signifierait la fin de lUnion � ont jet� un grand trouble, que les co-rapporteurs ont tent� de dissiper en rappelant que la Turquie fait incontestablement partie de la famille europ�enne[16] depuis son adh�sion au Conseil de lEurope en 1949.
32. Malgr� cette d�ception, le nouveau gouvernement na eu de cesse dafficher sa volont� deffectuer des r�formes, non seulement pour r�ussir lexamen de passage fin 2004, mais aussi pour moderniser la Turquie dans lint�r�t de tous ses citoyens. Ainsi il passa encore deux paquets de r�formes en janvier 2003 et le sixi�me paquet �tait en cours d�laboration lors de la 2�me visite des co-rapporteurs fin mai 2003, tandis que le septi�me �tait d�j� annonc� pour fin juillet 2003.
33. Le 26 mars 2003, la Commission de Bruxelles proposa de doubler laide de pr�-adh�sion de lUnion � la Turquie, pour la porter de 177 millions par an � 1,05 milliards entre 2004 et 2006[17] et M. Verheugen a d�clar� r�cemment quune adh�sion �tait possible � lhorizon 2010-2011. Le 15 avril 2003[18], un nouvel accord de partenariat en vue de ladh�sion a �t� adopt� sur proposition de la Commission et le nouveau Programme national a �t� adopt� fin juillet.
34. Les co-rapporteurs rappellent que les crit�res politiques d�finis par le Conseil europ�en de Copenhague de juin 1993 auxquels les pays candidats � ladh�sion � lUnion doivent satisfaire pr�voient que ces pays doivent �tre parvenus � une stabilit� des institutions � garantissant la d�mocratie, la primaut� du droit, les droits de lhomme ainsi que le respect des minorit�s et leur protection �. Cest uniquement dans la mesure o� lesdits crit�res de Copenhague font en substance r�f�rence aux obligations statutaires de la Turquie en tant que membre du Conseil de lEurope que les co-rapporteurs ont pris note des arguments pr�sent�s par les autorit�s turques � ce sujet. En effet, la d�cision prise lors du sommet de Copenhague et la question de la date �ventuelle douverture des n�gociations dadh�sion � lUnion ne font pas partie du mandat des co-rapporteurs et navaient donc pas vocation, en tant que telles, � �tre discut�es avec les autorit�s turques.
35. Les co-rapporteurs ont en revanche insist� sur le fait que la Turquie est membre fondateur du Conseil de lEurope et qu� ce titre elle a pris d�s 1949 des engagements quil sagit de respecter : la d�mocratie pluraliste, le respect du principe de la pr��minence du droit et la protection des droits fondamentaux de lindividu, tels que d�finis par le statut et les conventions[19] du Conseil de lEurope.
36. La question de la r�unification de Chypre est depuis des ann�es une source constante de pr�occupation pour le Conseil de lEurope. Ellerev�t bien entendu aussiune importance cruciale pour ce qui est dune possible adh�sion de la Turquie � lUnion europ�enne. Dans son rapport annuel publi� le 5 novembre 2003, la Commission a ainsi soulign� que labsence dun r�glement avant mai pourrait �tre un � obstacle s�rieux � � la candidature turque. Enfin, lors du sommet de Bruxelles de d�cembre 2003, les Etats membres de lUnion ont r�affirm� leur pr�f�rence pour lentr�e dans lUnion dune Chypre r�unifi�e le 1er mai 2004 et soulign� quune plus grande implication de la Turquie dans la recherche dune solution � faciliterait grandement ses aspirations � devenir membre de lUnion �. Les co-rapporteurs estiment que ces appels lanc�s � la Turquie ne dispensent pas pour autant les autorit�s chypriotes grecques de leur obligation de participer elles aussi avec un esprit constructif � la recherche dune solution satisfaisante.
37. Certes, la Turquie consid�re toujours que son intervention militaire en 1974 en tant que pays garant �tait l�gitime pour prot�ger la communaut� chypriote turque et quon ne saurait lui imputer la responsabilit� exclusive de la division de l�le. La Turquie consid�re aussi que la � R�publique turque de Chypre du Nord (RTCN)[20] �, autoproclam�e en 1983, est un Etat � part enti�re, avec des institutions d�mocratiques telles que pr�vues par sa � constitution � de 1985. Malgr� les 35 000 soldats stationn�s dans la partie nord de Chypre, malgr� les 560 millions de subventions diverses vers�es annuellement � la RTCN, la Turquie refuse encore aujourdhui dadmettre quelle est pleinement et enti�rement responsable des actes de ladministration quelle soutient. Cette position a �t� r�affirm�e aux co-rapporteurs en f�vrier 2003 lors de leurs entretiens, notamment avec M. Yakis, alors ministre des Affaires �trang�res.
38. Or, faut-il le rappeler, la � RTCN � nest reconnue par personne, sauf par la Turquie[21]. En droit international, il sagit non pas dun Etat mais dune entit� de facto et la Cour europ�enne des Droits de lHomme a jug�, tant dans laffaire Loizidou que dans laffaire inter-�tatique Chypre contre Turquie, que les violations de la CEDH �taient imputables � la Turquie et non pas � la � RTCN �.
39. Les co-rapporteurs rappellent que cette �le de la M�diterran�e est divis�e depuis maintenant bient�t 30 ans, que des pourparlers intra-communautaires sous l�gide du Secr�taire G�n�ral des Nations-Unies sont en cours depuis 1977 et qu� ce jour aucune solution nest en vue. Il est temps quun compromis, m�me imparfait, soit enfin trouv�. La population chypriote turque est lasse de cette situation et la prouv� lors de nombreuses manifestations au moment des n�gociations du plan Annan. Malgr� laide �conomique apport�e par la Turquie, le revenu par habitant dans la partie nord est quatre fois inf�rieur � celui de la partie sud et ladh�sion prochaine de la R�publique de Chypre augmente le risque disolement �conomique et social qui p�se sur la population chypriote turque
- Le plan Annan
40. La situation na gu�re �volu� depuis janvier 2002, lorsque lAssembl�e exprimait lespoir dans sa R�solution 1267 que les n�gociations directes allaient enfin aboutir � une solution. Les co-rapporteurs regrettent que ces n�gociations directes effectivement entam�es depuis janvier 2002, en pr�sence du repr�sentant du Secr�taire des Nations-Unies, aient �chou� en mars 2003.
41. Le 11 novembre 2002, lorsquil devint clair que les parties narriveraient pas � sentendre, le Secr�taire G�n�ral des Nations Unies avait pr�sent�, un � plan de r�glement global du probl�me de Chypre �.Suite aux r�actions des deux parties sur le fond du document, M. Annan pr�senta, le 10 d�cembre 2002, une deuxi�me version de son plan, sur lequel les parties devaient prendre position pour le 28 f�vrier 2003
42. Suite � l�lection, le 17 f�vrier 2002, de Tassos Papadopoulos comme pr�sident de la R�publique de Chypre, et au d�part le 28 f�vrier de Glafkos Clerides, le dirigeant historique, le Secr�taire G�n�ral des Nations-Unies accepta de modifier encore une fois son plan et convoqua une r�union � La Haye pour le 10 mars, pour tenter darracher aux deux parties la promesse de tenir un referendum le 30. En cas daccord, cela aurait permis � une Chypre r�unifi�e de signer le Trait� dadh�sion � lUnion europ�enne le 16 avril 2003.
43. Malheureusement, aucun accord ne fut trouv�. En pr�sentant le 1er avril 2003 son rapport au Conseil de s�curit� des Nations Unies, M. Annan a estim� que, si les deux parties chypriotes ont �t� en partie responsables des �checs des diff�rentes �tapes et des occasions manqu�es dans le processus de r�glement chypriote, cest M. Denktash, le dirigeant chypriote turc, qui porte la responsabilit� premi�re de l�chec final.
44. Les n�gociations directes furent donc rompues, m�me si des pourparlers sont toujours en cours et que le plan Annan reste sur la table. Le gouvernement de M. Erdogan semble pr�t � trouver une solution et ne menace plus en tout cas, comme lavait fait le pr�c�dent, dannexer purement et simplement la partie nord de Chypre. Les co-rapporteurs partagent tout � fait lopinion exprim�e par M. Erdogan qui soutient que � pas de solution nest pas une solution � mais craignent que lintransigeance manifest�e par Rauf Denktash[22] jusquil y a peu ne soit un frein puissant � toute vell�it� gouvernementale de trouver un compromis.
45. Les co-rapporteurs avaient exprim� lespoir que les �lections � l�gislatives � dans la partie nord de Chypre, pr�vues pour le 14 d�cembre 2003 contribueraient � relancer les n�gociations du plan Annan. Or, si le � gouvernement � sortant a perdu, lopposition na pas gagn�. En effet, le scrutin du 14 d�cembre 2003 a abouti � un match nul puisque les deux partis dopposition, � savoir le Parti r�publicain turc (CTP) et le Mouvement pour la paix et le d�mocratie (BDH), ont remport� 25 si�ges, tr�s exactement autant que les deux partis composant la majorit� sortante, le Parti de lUnit� nationale (UBP) et le Parti d�mocrate (DP) de Serdar Denktash, le fils de Rauf Denktash. Les partis dopposition, qui avaient fait de la relance des n�gociations du plan Annan le th�me central de leur campagne, sont certes sortis renforc�s de ce scrutin mais sans obtenir la majorit� n�cessaire pour changer radicalement de politique.
46. Cest Mehmet Ali Talat, chef du CTP (Parti r�publicain turc) qui a �t� charg� de former le nouveau � gouvernement �. Apr�s dintenses n�gociations, un � gouvernement � de coalition r�unissant le CTP, le DP et le BDH a �t� form� le 13 janvier 2004. Mehmet Ali Talat et Serdar Denktash, chef du parti Democrate, ont annonc� leur intention de favoriser la r�unification des parties turque et grecque de l'�le, dans la perspective de l'entr�e de Chypre dans l'Union europ�enne en mai prochain
47.Les co-rapporteurs avaient esp�r� que les dirigeants des deux communaut�s reprendraient le plus vite possible les n�gociations sur la base du plan Annan en vue de parvenir � un r�glement politique du probl�me chypriote, de pr�f�rence avant le 1er mai 2004, conform�ment au souhait exprim�e par lAssembl�e dans sa R�solution 1362 (2004) sur la situation � Chypre. Ils se f�licitent de la reprise des n�gociations d�cid�e � New-York le 13 f�vrier dernier, qui devrait permettre daboutir � une solution dans lint�r�t de la population tout enti�re. Ils exhortent tant les autorit�s turques que les autorit�s chypriotes � enfin trouver un terrain dentente et � enterrer les querelles du pass�.
- Mesures de confiance
48. Si le r�glement d�finitif de la question chypriote na gu�re progress� jusquici dun point de vue politique, la situation a n�anmoins beaucoup chang� sur le terrain. Les co-rapporteurs se f�licitent ainsi de la d�cision prise par les autorit�s de la � RTCN � douvrir la ligne de d�marcation (dite ligne verte) le 23 avril : rien que les dix premiers jours, 130 000 personnes avaient fait le d�placement de lautre c�t�, par les trois points de passage ouverts. M. Denktash a aussi propos� de rouvrir la�roport de Nicosie et dentamer dimportants travaux de d�minage. La R�publique de Chypre de son c�t� a �galement fait des efforts pour am�liorer la situation : le 30 avril 2003, il fut d�cid� que les Chypriotes Turcs pourront exporter par le sud, avoir un permis de travail au sud et avoir acc�s aux soins. Le 10 juillet 2003, le parlement de la R�publique de Chypre a adopt� une loi supprimant enfin linterdiction de mariages mixtes entre Chypriotes grecs et Chypriotes turcs, en vigueur depuis 1960.
49. Enfin, il est � noter que la Commission de lUnion europ�enne a accord� une aide de 12 millions d�but juin 2003 � ladministration chypriote turque pour laider � se rapprocher de lUnion.
50. Ces � mesures de confiance � sont prometteuses mais il est clair quelles ne r�gleront pas � elles seules le probl�me de la division de Chypre. Les co-rapporteurs encouragent la R�publique de Chypre comme les autorit�s de la � RTCN � et de la Turquie � poursuivre cette politique de d�tente et � sabstenir de toute provocation susceptible de remettre en cause ce climat de confiance qui commence � peine � sinstaurer.
- Lex�cution de larr�t Loizidou
51. Les autorit�s turques ont longtemps persist� � lier lex�cution de cet arr�t aux discussions en cours sur lavenir de Chypre et se r�fugiaient notamment derri�re les n�gociations en cours sur le plan Annan, qui nest plus sur la table depuis le 30 mars. Or, lobligation de paiement de satisfaction �quitable qui incombe � la Turquie dans cette affaire, conform�ment � larticle 41 de la CEDH, na rien � voir avec la question politique du r�glement du probl�me de Chypre. En ratifiant la CEDH et en acceptant la juridiction obligatoire de la Cour, la Turquie sest formellement engag�e � se conformer aux arr�ts d�finitifs de la Cour dans les litiges auxquels elle est partie (article 46 de la CEDH). Tant en f�vrier quen mai 2003, les co-rapporteurs ont rappel� � tous leurs interlocuteurs officiels quil �tait totalement inacceptable que la Turquie, depuis plus de 5 ans, et malgr� trois R�solutions du Comit� des Ministres la rappelant � ses devoirs, nait toujours pas vers�, sans y mettre de conditions, la somme due � Mme Loizidou. En effet, lun des principaux principes dun Etat de droit est le respect des d�cisions rendues par les tribunaux, quils soient internes ou internationaux. : il ne sert � rien davoir des tribunaux pour trancher les litiges si lune des parties au proc�s refuse ensuite de se conformer � une d�cision qui, par d�finition, tranche en faveur de lune ou de lautre.
52. A Ankara, il a �t� assur� aux co-rapporteurs quil y avait une volont� politique au plus haut niveau pour enfin r�gler ce probl�me et que le paiement inconditionnel pourrait intervenir en d�but dautomne, vers le mois doctobre. Malheureusement ce ne fut pas le cas et le Comit� des Ministres adopta le 12 novembre 2003 une 4�me R�solution int�rimaire[23] mena�ant la Turquie de sanctions si le paiement nintervenait pas dici le 19 novembre. Il fallut encore pr�s de 15 jours dintenses n�gociations et de pressions pour que la Turquie se conforme � larr�t de la Cour et accepte de payer la satisfaction �quitable, dun montant total, int�r�ts de retard compris, denviron 900 000 USD.
53. Le 2 d�cembre 2003, par sa R�solution DH (2003) 190, le Comit� des Ministres, apr�s avoir pris note dune d�claration faite par le Gouvernement turc, prit acte du fait que le paiement �tait intervenu et d�cida de clore lexamen de laffaire Loizidou en ce qui concerne la question de la satisfaction �quitable[24]. Lex�cution de larr�t Loizidou est une tr�s bonne nouvelle et les co-rapporteurs f�licitent les autorit�s turques davoir enfin compris � quel point leur refus persistant de se conformer � larr�t de la Cour portait atteinte � limage dune Turquie soucieuse de respecter les principes de la pr��minence du droit.
54. Les co-rapporteurs nignorent pas � quel point il a �t� difficile pour les autorit�s turques de prendre cette d�cision, notamment � cause dun �ventuel effet boule de neige : la Cour ayant constat� dans cette affaire une violation continue du droit de faire usage dun bien, le d�lai de six mois pour saisir la Cour nest pas opposable aux personnes qui se trouvent actuellement dans la m�me situation que Mme Loizidou et des nouvelles requ�tes devant la Cour sont donc � pr�voir. En outre, la Cour se trouve d�j� saisie denviron 460 affaires similaires. Deux arr�ts dans de telles affaires � clones � ont �t� prononc�s le 31 juillet[25] : comme dans laffaire Loizidou, la Cour a constat� une violation de larticle 8 de la CEDH et de larticle 1 du Protocole additionnel et a d�cid� que la question de la satisfaction �quitable pour le pr�judice moral et mat�riel ne se trouvait pas en �tat.
55. Pour �viter � la Turquie davoir � payer des millions voire des milliards de dollars dindemnisation, le � parlement � de la � RTCN � a adopt�, le 30 juin 2003, une loi qui offre aux chypriotes grecs la possibilit� de saisir dans un certain d�lai une commission sp�cialement cr��e pour demander une indemnisation pour les propri�t�s quils ont d� �vacuer en 1974. Une vingtaine de demandes aurait d�j� �t� pr�sent�e � la date du 15 ao�t 2003, nonobstant une campagne des autorit�s chypriotes grecques pour d�courager ce genre dinitiative.
56. Il appartiendra � la Cour dappr�cier, au vu de sa jurisprudence en la mati�re, si cette commission repr�sente une voie de recours interne, tel quil est entendu selon les principes du droit international g�n�ralement reconnus, et dans laffirmative, sil sagit dune voie de recours efficace, susceptible de rem�dier � la violation all�gu�e[26]. Quelle que soit la d�cision prise par la Cour � cet �gard le moment venu, il conviendra de la respecter, que la question de Chypre ait �t� ou non r�gl�e entre-temps.
57. La Turquie est membre de lOTAN depuis 1952 et lun des plus fid�les alli�s de Washington dans la r�gion. En tant que pays frontalier de lIrak, la Turquie avait connu, lors de la premi�re guerre du Golfe en 1991, un afflux massif de r�fugi�s[27] fuyant le Kurdistan irakien et subi du fait de la guerre de lourdes pertes �conomiques, en particulier pour ce qui est de son approvisionnement �nerg�tique[28]. La d�termination am�ricaine de mener une nouvelle guerre en Irak, avec ou sans laval des Nations-Unies, pla�a le nouveau gouvernement dans une position tr�s difficile, notamment vis-�-vis de ses alli�s europ�ens, suite aux demandes am�ricaines douvrir un front nord, via la Turquie, pour prendre Bagdad en tenaille.
58. Entre janvier et mars 2003, il y eut dintenses consultations avec les Am�ricains et un large d�bat au niveau interne, ponctu� dun certain nombre de valses-h�sitations. Comme dans bon nombre de pays dEurope, il y eut des manifestations anti-guerre et dapr�s les sondages, 90% de la population de Turquie �tait oppos�e � une intervention militaire en Irak.
59. En janvier 2003 le gouvernement entama parall�lement, mais sans succ�s, dintenses d�marches[29] dans les pays de la r�gion pour tenter d�viter la guerre.
- Le refus dassistance aux Etats-Unis
60. Le 1er mars 2003, le gouvernement soumit une motion � la TBMM en vue dautoriser, comme le demandait le gouvernement am�ricain, le d�ploiement terrestre denviron 62 000 soldats am�ricains en Turquie et lenvoi de troupes turques dans le nord de lIrak. Celle-ci fut rejet�e faute datteindre la majorit� absolue. Il est � noter que lors de la r�union mensuelle du 28 f�vrier du Conseil national de s�curit�, aucune recommandation ne fut �mise et que lAKP ne donna pas de consignes de vote, laissant chacun de ses d�put�s se d�terminer en son �me et conscience. Seul le CHP avait annonc� quil voterait contre.
61. Le 20 mars, le jour m�me du d�but de loffensive am�ricaine en Irak, la TBMM autorisa uniquement, dune part, le survol du territoire turc par les avions de la coalition anglo-am�ricaine (sans toutefois autoriser leur ravitaillement sur des bases turques) ainsi que lenvoi de troupes turques dans le nord de lIrak si besoin �tait. Entre le 20 mars et le 1er mai, date � laquelle le Pr�sident Bush annon�a la fin des op�rations arm�es, les troupes turques, qui se tenaient pr�tes � intervenir dans le Sud-Est anatolien, ne p�n�tr�rent pas dans le nord de lIrak.
62. Le 4 juillet 2003, une centaine de soldats am�ricains fit irruption dans un bureau de liaison turc � Souleymani� dans le nord de lIrak et arr�t�rent 11 soldats et officiers turcs[30]. Transf�r�s � Bagdad, ils ne furent lib�r�s que deux jours plus tard. Cette arrestation cr�a un incident diplomatique s�rieux avec les Etats-Unis, la Turquie nacceptant pas un tel traitement de la part dun alli�.
63. Il est clair que les relations entre les Etats-Unis et la Turquie ont travers� r�cemment une passe difficile, malgr� les efforts du gouvernement pour en minimiser lampleur. Mais loctroi dun pr�t de 8,5 milliards de dollars par les Etats-Unis en septembre 2003 et le vote � la TBMM le 8 octobre 2003 dune motion autorisant le d�ploiement de soldats turcs en Irak pour un an prouvent, si besoin est, que la Turquie reste un alli� privil�gi� des Etats-Unis dans la r�gion, m�me si pour linstant, en raison de lopposition manifest�e par le conseil de gouvernement transitoire irakien, le gouvernement turc a renonc� � envoyer des soldats turcs en Irak.
- Lassistance aux r�fugi�s et demandeurs dasile
64. Pendant la premi�re visite des co-rapporteurs (17-21 f�vrier 2003), au moment o� r�gnait encore la plus grande incertitude quant � l�ventualit� dune intervention militaire en Irak, le ministre de lInt�rieur, M. Aksu, avait assur� aux co-rapporteurs que toutes les mesures avaient �t� prises pour fournir une assistance humanitaire durgence aux �ventuels r�fugi�s en provenance dIrak[31] mais que la lev�e de la r�serve g�ographique � la Convention de Gen�ve de 1951 n�tait pas � lordre du jour. Les co-rapporteurs ont � nouveau pos� la question lors de leur visite du mois de mai mais nont pas obtenu de r�ponse concr�te.
65. La lev�e de la r�serve g�ographique � la Convention de Gen�ve de 1951 et son protocole additionnel de 1967 figurait d�j� comme objectif � moyen terme, � lhorizon 2004, dans le Programme national de mars 2001 et a �t� repris dans la version r�vis�e de ce programme, adopt�e en juillet 2003. Les co-rapporteurs esp�rent vivement que cet objectif sera r�alis� dans les meilleurs d�lais. Ils estiment anormal quun pays europ�en comme la Turquie se d�charge de ses obligations internationales sur ce point en refusant daccorder le statut de r�fugi� aux demandeurs dasile non europ�ens, essentiellement en provenance dIran et dIrak. En Turquie, cest au HCR de d�terminer le statut de r�fugi�, de trouver un pays tiers susceptible de les accueillir ou de prendre les mesures n�cessaires pour un rapatriement volontaire.
66. Il conviendrait en tout �tat de cause de revoir lordonnance de 1994, qui oblige les demandeurs dasile � solliciter aupr�s des autorit�s turques un droit de s�jour temporaire pendant lexamen de leur demande dasile[32]. Les co-rapporteurs notent cependant avec satisfaction que la r�glementation concernant les demandeurs dasile a �t� modifi�e en 1999, de mani�re � porter le d�lai pendant lequel un �tranger peut formuler une demande dasile politique de 5 � 10 jours � compter de son entr�e, l�gale ou ill�gale, en Turquie. Ce d�lai de 10 jours est sans doute encore trop court mais il sagit dun progr�s par rapport � la situation pr�c�dente.
C. REFORMES REALISEES DEPUIS JUIN 2001
i. Introduction
67. Pour les co-rapporteurs, il est tout � fait ind�niable que la Turquie, malgr� une situation politique et �conomique difficile, a fait depuis 2001 des efforts sans pr�c�dent pour se conformer aux engagements pris dans le Programme national pour ladoption de lacquis de mars 2001 et pour prendre en compte les critiques et suggestions de lAssembl�e, telles que formul�es dans sa R�solution 1256 (2001).
68. Le pr�ambule et 33 articles de la Constitution ont �t� modifi�s le 3 octobre 2001 et trois � paquets � de r�formes[33] ont �t� adopt�s respectivement en f�vrier, mars et ao�t 2002 par le gouvernement pr�c�dent tandis que le nouveau, issu des �lections du 3 novembre, en passait encore deux en janvier 2003[34]. Par la suite, la TBMM adopta encore un sixi�me et un septi�me paquets de r�formes, entr�s en vigueur respectivement le 19 juillet 2003 et le 7 ao�t[35] 2003, apr�s une mise � jour du Programme national, effectu�e par la Commission dharmonisation pour lUnion europ�enne, nouvellement cr��e par une loi entr�e en vigueur le 19 avril 2003. La TBMM travaille darrache-pied et a vot� un nombre consid�rable de lois dans les domaines les plus divers.
69. Au-del� des mesures phares comme labolition de la peine de mort, les modifications apport�es au r�le du Conseil national de s�curit�, la lev�e compl�te de l�tat durgence ou la r�duction des d�lais de garde � vue, qui �taient r�clam�es depuis longtemps (voir infra), les divers paquets de r�forme touchent des domaine tr�s vari�s.
70. De lavis des co-rapporteurs, la volont� du gouvernement comme du parlement deffectuer les r�formes n�cessaires est incontestable mais, et le gouvernement actuel en est tout � fait conscient, passer des r�formes l�gislatives est une chose, leur application concr�te sur le terrain en est une autre. Pour que les r�formes se traduisent dans les faits, il faudra du temps, notamment pour vaincre la r�sistance bureaucratique et amener un changement de mentalit�s. Ce nest qu� moyen terme quil sera possible dappr�cier le degr� de p�n�tration des r�formes car il faudra faire �galement un important travail dadaptation r�glementaire et informer les autorit�s � tous les niveaux du contenu et de la port�e des r�formes. Les co-rapporteurs estiment que la mise en place en septembre 2003 dun comit� interminist�riel de suivi des r�formes, pr�sid� par le vice-premier ministre et ministre des affaires �trang�res, M. Abdullah G�l, est une tr�s bonne initiative. Ce comit� de suivi, qui se r�unit tous les mois, sera en mesure de relever et de r�soudre rapidement les �ventuelles difficult�s d�tect�es dans lapplication des r�formes.
71. Pour ce qui est de la r�vision constitutionnelle doctobre 2001 (voir en annexe I le r�sum� des modifications apport�es), les co-rapporteurs encouragent vivement le projet du nouveau gouvernement de proc�der � une r�vision compl�te de la Constitution et estiment que la Turquie pourrait utilement profiter de lexp�rience de la Commission de Venise en la mati�re. En effet, la Constitution actuelle a quelque peu mauvaise presse : bien quadopt�e par referendum en 1982, on lui reproche de porter lempreinte des militaires auteurs du coup dEtat de 1980.
72. De plus, il faut noter quelle a d�j� �t� modifi�e � plusieurs reprises (en 1987, 1993, 1995, 1999, 2001 et 2002) et que l�quilibre g�n�ral du texte sen ressent n�cessairement, dans la mesure o� sur certains points il est trop vague tandis que sur dautres il est trop pr�cis. Ladaptation de la Constitution turque aux normes les plus modernes en vigueur[36] est dautant plus importante que la Convention europ�enne des Droits de lHomme na pas deffet direct en droit turc, Conform�ment � larticle 90 de la Constitution, la CEDH a valeur l�gislative mais infra-constitutionnelle, ce qui pose certains probl�mes, notamment en mati�re dex�cution des arr�ts de la Cour. De lavis des co-rapporteurs, la Turquie aurait tout � gagner � �laborer une nouvelle constitution qui, tout en faisant une r�f�rence historique � la fondation de la Turquie moderne, devrait �tre bas�e sur la garantie des droits fondamentaux de tous les individus relevant de la juridiction de lEtat turc.
ii. Fonctionnement des institutions
73. A nen pas douter la Turquie est un pays d�mocratique, qui conna�t des �lections libres, la s�paration des pouvoirs et un v�ritable syst�me parlementaire multipartite. En revanche, linfluence consid�rablede larm�e sur la vie publique turque a �t� une source constante de pr�occupation en Europe, notamment parce que le vrai pouvoir en Turquie n�tait pas exerc�, comme dans les autres d�mocraties europ�ennes, exclusivement par le parlement et le gouvernement. Les co-rapporteurs sont davis que dans une d�mocratie moderne, larm�e doit imp�rativement �tre plac�e sous contr�le des institutions d�mocratiques.
74. En Turquie il semblerait que le probl�me tient autant au r�le institutionnel de larm�e quau prestige et � la confiance dont elle jouit dans la soci�t� turque. A priori, les co-rapporteurs ont eu du mal � comprendre pourquoi larm�e[37] jouit dun tel capital de confiance dans le pays : deux coups dEtat, en 1960 et 1980, et deux interventions amenant des Premiers ministres d�mocratiquement �lus � d�missionner, en 1971 et 1997[38], auraient suffi ailleurs en Europe � la discr�diter. Il leur a �t� expliqu� que la fondation de la Turquie moderne en 1923 par un militaire, Mustapha Kemal dit � Atat�rk � et lattachement sans faille manifest� depuis par les militaires aux valeurs d�fendues par Atat�rk, qui ont pris la forme dune doctrine, le k�malisme, y �taient pour beaucoup. En outre, dapr�s le G�n�ral Kilin�, Secr�taire g�n�ral du MGK, que les co-rapporteurs ont rencontr� en f�vrier 2003, larm�e serait �galitaire dans son recrutement, bas� uniquement sur le m�rite, non politis�e, professionnelle et, surtout, p�renne compar�e � une classe politique instable et souvent peu fiable.
75. Bref, larm�e sait ce qui est bon pour le pays et, si le pays ne le sait pas, larm�e prendra les mesures n�cessaires. Ce r�le doracle et de bon p�re de famille est dailleurs entretenu par certains m�dias, qui se pr�cipitent � la sortie de chaque r�union du MGK, � laff�t de tout d�saccord entre le gouvernement et les militaires, et qui pr�tent leurs colonnes � tout g�n�ral, m�me � la retraite, d�sireux de sexprimer sur nimporte quel sujet.
76. De lavis des co-rapporteurs, cette attitude quelque peu paternaliste na plus lieu d�tre au 21e si�cle : la classe politique turque nest aujourdhui, 80 ans apr�s la proclamation de la R�publique, pas plus incomp�tente ou irresponsable quailleurs et, en tout cas, elle nest pas immature. Au vu de ses d�clarations publiques, notamment � loccasion de la crise irakienne, le chef d�tat-major actuel, le G�n�ral �zk�k, semble lavoir compris.
77. Les co-rapporteurs ont tent� par ailleurs de savoir si linfluence de larm�e sexpliquait par son poids relativement consid�rable dans l�conomie turque : cr��e en 1961, la mutuelle du personnel des forces arm�es, OYAK, a r�alis� un chiffre daffaires en 2001 de 2,8 milliards USD et un profit de 475 millions USD. Elle a 28 filiales, dont 8 cot�es � la bourse, et emploie pr�s de 17 000 personnes. A lorigine de sa puissance �conomique se trouvent les cotisations vers�es par ses adh�rents : 10% des soldes des membres permanents des forces arm�es et 5% pour les membres non permanents (soit environ 193 000 cotisants). Il leur a �t� expliqu� cependant, notamment par T�SIAD, une association patronale, quOYAK n�tait pas dirig�e par des militaires, quil ne sagissait que dun fonds de pension priv� bien g�r�, � linstar de ceux existant aux Etats-Unis et quil ne saurait donc �tre question dune quelconque mainmise de larm�e sur l�conomie du pays, dautant quOYAK est loin datteindre une taille et une puissance financi�re comparable � dautres grands conglom�rats turcs, comme Dogan, Dogus ou Sabanci.
78. Dans un pays aussi grand que la Turquie, qui a des milliers de kilom�tres de fronti�res terrestres avec la Gr�ce, la Bulgarie, la G�orgie, lArm�nie, lIran, lIrak et la Syrie, il nest par ailleurs pas �tonnant quil y ait une arm�e forte : elle compte 650 000 hommes (dont 100 000 soldats de m�tier) et est la seconde du point num�rique dans lOTAN.
79. Il n y a pas dobjection de conscience en Turquie, le service militaire est obligatoire � partir de 18 ans et dure jusqu� 18 mois[39]. En outre, pour les Turcs r�sidant � l�tranger, le fait de ne pas accomplir son service militaire est sanctionn� par la d�ch�ance de la nationalit� turque. Un certain nombre de jeunes se retrouve d�s lors apatrides, ce qui ne manque pas, comme en Allemagne[40], de cr�er des probl�mes � lEtat de r�sidence. Enfin, larticle 155 du Codep�nal pr�voit que toutecontestation de linstitution du service militaire est punie dune peine de prison pouvant aller jusqu� deuxans. Cette infraction fait partie de celles figurant � larticle 58 du code p�nal militaire, qui ne seront plus jug�es par des tribunaux militaires en vertu de la limitation partielle, apport�e par le 7�me paquet dao�t 2003, � la comp�tence des tribunaux militaires pour juger des civils, ce qui est une r�forme bienvenue.
80. Pour les co-rapporteurs, il conviendrait que dans un avenir proche les autorit�s turques autorisent lobjection de conscience et instaurent un service civil de remplacement, comme il est dusage dans la plupart des pays europ�ens. Les co-rapporteurs rappellent � cet �gard que lexercice du droit � lobjection de conscience au service militaire est une pr�occupation constante du Conseil de lEurope depuis plus de 30 ans et que la Turquie, tout comme les autres Etats membres, devrait se conformer aux d�cisions de lAssembl�e qui pose lexigence dun v�ritable service alternatif de nature exclusivement civile, qui ne doit �tre ni dissuasif ni punitif[41].
- Le contr�le de larm�e par les institutions d�mocratiques
81. La plupart des critiques se sont focalis�es sur le Conseil national de s�curit� (MGK), qui est un organe constitutionnel[42] qui se r�unissait une fois par mois sous la pr�sidence du Pr�sident de la R�publique, et dont lordre du jour est �labor� par le Pr�sident, apr�s consultation du Premier Ministre et du chef d�tat-major (General chief of staff). Les � recommandations � du MGK font lobjet dun communiqu� de presse.
82. Larticle 118 de la Constitution relatif au MGK a �t� modifi� le 17 octobre 2001 : il est pr�cis� clairement quen ce qui concerne les questions relevant de la s�curit� nationale, les avis du MGK ont maintenant un caract�re � consultatif �. Pour les autres questions relevant du � maintien de lexistence et de lind�pendance de lEtat, de lint�grit� et de lindivisibilit� du pays et de la paix et s�curit� de la soci�t� �, il est indiqu� que le Conseil des Ministres, au lieu daccorder une importance � prioritaire � aux mesures pr�conis�es en la mati�re par le MGK, doit en � �valuer les d�cisions �, ce qui, apparemment, semble lui laisser une plus grande latitude.
83. Enfin, il convient de relever que larticle 118 a aussi �t� modifi� pour ce qui est de la composition du MGK : avec lajout des ministres adjoints au Premier ministre et du ministre de la Justice, il y a maintenant 9 civils et seulement 5 militaires qui si�gent dans le MGK.
84. Le probl�me du poids de larm�e dans la soci�t� ne se r�soudra que par un changement des mentalit�s et les mesures prises nauront deffet qu� long terme. Ceci dit les co-rapporteurs avaient recommand� que le MGK voie ses fonctions effectivement limit�es � celles dun organe consultatif en mati�re de s�curit� nationale, ce qui a �t� fait, y compris par des modifications apport�es � la loi sur le fonctionnement du MGK et de son secr�tariat.
85. Le 7�me paquet de r�formes adopt� en ao�t 2003 a en effet apport� des modifications � la loi n� 2945 du 9 novembre 1983 sur le MGK et le secr�tariat g�n�ral du MGK, qui vont dans le sens de la recommandation des co-rapporteurs : larticle 4 de cette loi indique dor�navant encore plus clairement que le MGK, dans le cadre de ses fonctions telles que d�finies � larticle 2, ne fera des recommandations quen ce qui concerne la d�finition et lapplication de la politique de d�fense nationale. Les pouvoirs ex�cutifs conf�r�s au secr�tariat du MGK par les articles 9 et 14 de la loi ont �t� supprim�s et larticle 13 tel quamend� r�duit son r�le, qui interf�rait avec celui du pouvoir ex�cutif. Les co-rapporteurs se f�licitent de cette r�forme fondamentale qui vise � mettre la l�gislation en conformit� avec la Constitution telle quamend�e en octobre 2001.
86. Ils notent aussi avec satisfaction que la p�riodicit� normale des r�unions du MGK a �t� r�duite � une tous les deux mois, sauf lorsquil est convoqu� sur demande du Premier ministre ou directement par le Pr�sident. Le secr�taire g�n�ral du MGK pourra dor�navant �tre un civil puisquil sera nomm� sur proposition du Premier ministre apr�s approbation du Pr�sident. Lavis favorable du chef d�tat-major ne sera n�cessaire que sil est envisag� de nommer un militaire � ce poste[43]. Enfin, une autre loi (n� 5017), entr�e en vigueur le 17 d�cembre 2003, a notamment abrog� le secret d�fense applicable aux d�crets r�gissant le fonctionnement du Secr�tariat g�n�ral du MGK, ce qui a permis la publication au Journal officiel, le 8 janvier 2004, dun nouveau d�cret, qui pr�cise les nouvelles attributions du Secr�tariat g�n�ral, modifi�es de mani�re � le transformer en organe destin� � servir une institution purement consultative. Les co-rapporteurs f�licitent les autorit�s turques pour cet effort de transparence. Les changements sont en effet historiques : diminution des pouvoirs du secr�tariat, d�finitions des nouvelles taches, nouveau fonctionnement. D�sormais le Secr�tariat n'a plus la capacit� de mener des enqu�tes de s�ret� nationale de sa propre initiative. En outre, le secr�tariat ne g�re plus directement les fonds sp�ciaux qui lui sont attribu�s et sera plac� sous lautorit� exclusive du premier ministre.
87. En revanche, les co-rapporteurs ne voient aucune raison susceptible de justifier que des repr�sentants de larm�e si�gent dans des organismes civils tels que, par exemple, le Haut conseil de l�ducation[44] (Y�K) ou la RT�K (Conseil supr�me de laudiovisuel public). Il semblerait quavec le 7�me paquet (article 9 de la loi n�4963), ce probl�me ait �t� partiellement r�solu puisque le secr�taire g�n�ral du MGK a �t� supprim� de la loi de 1981 sur les proc�dures de nomination dans les minist�res et autres institutions affili�es. En revanche, il a �t� confirm� aux co-rapporteurs quen ce qui concerne le Y�K, il faudra modifier larticle 131 � 2 de la Constitution, qui pr�voit express�ment que le chef d�tat-major peut nommer des candidats. Les co-rapporteurs esp�rent que cette modification interviendra sans tarder. Quant � la RT�K, les autorit�s envisagent de modifier larticle 6 de la loi sur la cr�ation de la radio-t�l�vision du 14 juin 2002 pour �liminer cette anomalie. Il y a eu un certain retard dans la mise en uvre de cette r�forme suite � une d�cision de la Cour constitutionnelle, qui a ordonn� la suspension provisoire de certains articles de cette loi.
88. Enfin, dans un pays d�mocratique, il nest pas normal que le budget de larm�e ne fasse pas lobjet dun d�bat parlementaire, comme tout autre poste du budget de lEtat. Il semblerait qu� lheure actuelle, la TBMM vote le budget de la d�fense en bloc et que larm�e b�n�ficie dun certain nombre de sources de financement extrabudg�taires, notamment pour lachat de ses armements[45], qui ne sont soumises � aucun contr�le s�rieux. Il est ainsi pratiquement impossible de savoir quelle est la part du budget de lEtat consacr� � la d�fense : pour certains elle s�l�ve � au moins 10%, pour dautres elle repr�senterait en r�alit� pr�s de 18 � 20%. Il est clair en tout cas que la part du budget consacr� par la Turquie � ses forces arm�es est de loin sup�rieure � ce qui se pratique dans les autres Etats europ�ens et que cet effort est consenti au d�triment des d�penses n�cessaires par exemple en mati�re de justice, de sant�[46], d�ducation ou de d�veloppement �conomique. Les co-rapporteurs esp�rent que le projet de loi actuellement en discussion au parlement sur la gouvernance et le contr�le financier �liminera effectivement ces fonds extrabudg�taires en les incluant dans le budget ordinaire de lEtat.
89. De lavis des co-rapporteurs, il est urgent dinstaurer un contr�le et un vote parlementaire normal du budget militaire par la TBMM, pour que celle-ci puisse appr�cier en toute connaissance de cause ce que co�te larm�e au pays. La possibilit� offerte aux commissions denqu�te de la TBMM par le 7�me paquet de r�formes dao�t 2003 de pouvoir demander en priorit� � la Cour des Comptes dauditer �galement, entre autres,les avoirs de lEtat d�tenus par les forces arm�es est un progr�s mais il est insuffisant, notamment � cause de la proc�dure envisag�e qui vise � maintenir le secret d�fense
b. La dissolution de partis politiques
90. Les co-rapporteurs estiment que la fr�quence des dissolutions de partis politiques en Turquie rel�ve non seulement dune atteinte au droit � la libert� dassociation et de r�union garantie par larticle 11 de la CEDH mais quelle est r�v�latrice dun probl�me plus g�n�ral de fonctionnement des institutions. La cr�ation dun parti politique est apparemment tr�s facile en droit turc[47] mais la Constitution comme la loi sur les partis politiques donne une tr�s grande latitude aux autorit�s pour dissoudre tout parti jug� non conforme et susceptible de mettre en cause les dogmes fondateurs de la R�publique. La Turquie est le pays dEurope o� il y a le plus de dissolutions de partis politiques et il ressort de la jurisprudence de la CEDH que, dans la plupart des cas dont elle a �t� saisie, cette sanction �tait disproportionn�e[48].
91. Ainsi que lAssembl�e le rappelait dans sa R�solution 1308 (2002), si toute d�mocratie a le droit de se d�fendre contre les partis extr�mistes, la dissolution ne devrait �tre une mesure � ne prendre quen dernier ressort car elle ne se justifie que dans les cas o� le parti concern� fait usage de violence ou menace gravement la paix civile et lordre constitutionnel d�mocratique du pays.
92. En Turquie, des progr�s certains ont �t� r�alis�s depuis 1995 : les d�put�s membres dun parti dissous ne sont plus automatiquement tous d�chus de leur mandat parlementaire[49] et un certains nombre dam�nagements ont �t� apport�s tant par la r�forme constitutionnelle doctobre 2001 que par des modifications partielles de la loi sur les partis politiques. En vertu de larticle 69 de la Constitution tel quamend�, un parti ne peut plus �tre dissous que sil est devenu l�picentre dactivit�s contraires � lordre constitutionnel, lorsque celles-ci sont commises de mani�re � intense � par les membres du parti et ouvertement ou � tacitement � approuv�es par les organes directeurs du parti ou commises directement et d�lib�r�ment par lesdits organes.
93. Le nouvel article 69 pr�voit �galement une sanction alternative � la dissolution, � savoir la privation totale ou partielle de toute subvention publique aux partis en question. En outre larticle 149 modifi� de la Constitution pr�voit dor�navant quune mesure de dissolution doit �tre prise par la Cour constitutionnelle � la majorit�[50] des 3/5 et non plus � la majorit� qualifi�e.
94. Les articles 101, 102 et 103 de la loi sur les partis politiques ont �t� modifi�s par la loi n� 4748 du 26 mars 2002. Le nouvel article 101 pr�cise que la privation de subventions publiques ne peut �tre inf�rieure � la moiti� du montant de la derni�re subvention annuelle accord�e � ce parti. Le nouvel article 102 introduit une proc�dure davertissement : un parti pourra �viter la dissolution si dans un certain d�lai il r�voque les membres ou les organes dont les d�clarations ou actions sont jug�es par le Procureur g�n�ral contraires � lordre constitutionnel. En revanche, larticle 96 de la loi sur les partis politiques, qui interdit le terme � communiste � dans la d�nomination dun mouvement politique, na pas �t� modifi�.
95. A signaler �galement que larticle 105 de la loi sur les partis politiques a �t� r�cemment d�clar� inconstitutionnel : en vertu de cet article, le Procureur g�n�ral avait demand� la dissolution de sept partis parce quils n avaient pas pr�sent� de candidats aux deux derni�res �lections l�gislatives.
96. La dissolution (le 13 mars 2003) du parti HADEP, avec linterdiction pour pr�s de 45 de ses membres ou dirigeants dexercer toute activit� politique pendant 5 ans, la proc�dure en dissolution engag�e contre le parti DEHAP pour avoir contrevenu aux r�gles relatives � la pr�sence organis�e dans un certain nombre de districts pour les �lections l�gislatives de novembre 2002, de m�me que la proc�dure de dissolution engag�e contre l AKP, parti maintenant au pouvoir, � 15 jours des �lections de novembre 2002, sont toutefois inqui�tantes. Enfin de nombreuses proc�dures p�nales contre des dirigeants ou des membres de partis politiques sont actuellement pendantes notamment contre certains membres du DEHAP, accus�s de faux pour l�tablissement des certificats de pr�sence organis�e dans les districts et serviront probablement ult�rieurement � justifier la dissolution du DEHAP. Au cas o� tel serait le cas, un certain nombre danciens membres du HADEP ont dailleurs cr�� r�cemment (le 6 juin 2003) un nouveau parti, le Parti pour une Soci�t� Libre (OTP).
97. Il semble aux co-rapporteurs que les proc�dures de dissolution diligent�es, en toute ind�pendance et sans recevoir dinstruction de quiconque, leur a t-il �t� assur� par le Procureur g�n�ral pr�s la Cour de cassation, sont non seulement de nature � donner une mauvaise image de la Turquie � l�tranger mais que de surcro�t elles ne remplissent pas leur but officiel, qui est de prot�ger lordre constitutionnel. En effet, les partis interdits renaissent imm�diatement de leurs cendres : pour les partis pro-kurdes, il y a eu successivement les partis HEP, DEP, HADEP, DEHAP et maintenant lOTP ; pour les partis islamistes, le Refah a fait place au Fazilet puis au Saadet. Les dirigeants interdits dactivit�s politiques reviennent aux affaires au bout de 5 ans, comme par exemple Necmettin Erbakan, ou continuent de tirer les ficelles dans lombre.
98. Ce jeu du chat et de la souris ne b�n�ficie pas � la d�mocratie et les co-rapporteurs invitent les autorit�s turques � revoir de fond en comble la loi sur les partis politiques[51], comme sy �tait engag� M. Erdogan lors de sa campagne �lectorale, en vue dintroduire des crit�res stricts pour une �ventuelle dissolution, tels que lapologie de la violence ou des menaces claires contre les valeurs essentielles de la d�mocratie. L� aussi, les autorit�s turques pourraient utilement sinspirer des lignes directrices[52] �labor�es par la Commission de Venise en 2000.
c. Le fonctionnement du syst�me judiciaire
99. Lors de leur premi�re visite en Turquie en f�vrier 2003, les co-rapporteurs ont rencontr� le pr�sident de la Cour constitutionnelle, le Procureur g�n�ral pr�s la Cour de cassation et le Pr�sident de celle-ci, ainsi que le ministre de la Justice. Il ne saurait �tre question ici de brosser un tableau complet du fonctionnement des institutions judiciaires[53] et les co-rapporteurs se limiteront donc � traiter de trois points qui leur semblent importants. Dembl�e toutefois, ils rel�veront quau cours de leur deux visites aucune all�gation de corruption ou de manque dind�pendance et dimpartialit� na �t� �mise contre les juges en Turquie[54], qui, comme dans dautres d�mocraties en Europe, croulent sous le travail et souffrent dun manque de moyens.
100. Les autorit�s turques ont fait ces derni�res ann�es, en coop�ration avec le Conseil de lEurope dimportants efforts de formation des 9 600 juges et procureurs de Turquie, y compris des juges des cours de s�ret� de lEtat : 225 dentre eux ont ainsi re�u une formation de formateurs et pourront � leur tour former leurs coll�gues. Par ailleurs, suite � lentr�e en vigueur le 31 juillet 2003 de la loi n�4954, la Turquie sest maintenant dot�e dune Acad�mie de justice, qui r�pondra aux besoins de formation de tous les membres du syst�me judiciaire, y compris les notaires et les avocats.
101. Les critiques entendues par les co-rapporteurs se sont dans lensemble concentr�es sur les membres du parquet, qui feraient preuve dun z�le excessif dans lexercice des poursuites, en mati�re de libert� dexpression et dassociation notamment et, � linverse, dune retenue suspecte lorsquil sagit de diligenter des enqu�tes sur des all�gations de torture ou de mauvais traitements. Mais il a �t� �galement soulign� que dans un certain nombre de cas, les poursuites diligent�es par le parquet, notamment en mati�re de libert� dexpression ou dassociation, se terminaient par un non-lieu au niveau des tribunaux.
102. Les co-rapporteurs ont aussi pris bonne note de deux r�formes apport�es r�cemment et qui sont importantes. La premi�re concerne les tribunaux pour enfants qui ne pouvaient examiner jusqu� pr�sent que les cas denfants �g�s de 11 � 15 ans. Tout enfant �g� de plus de 15 ans pouvait donc �tre jug� par un tribunal p�nal ordinaire, voire par une cour de s�ret� de lEtat. Le 7�me paquet du 7 ao�t 2003 a modifi� la loi sur les tribunaux pour enfants dont larticle 6 pr�voit d�sormais que les tribunaux pour enfants auront comp�tence pour juger toute personne �g�e de moins de 18 ans. La deuxi�me concerne la limitation apport�e � la comp�tence des tribunaux militaires pour juger des civils (voir supra, influence de larm�e).
- Le r�le de la Cour constitutionnelle
103. La Cour constitutionnelle turque, cr��e en 1962, est lune des plus anciennes dEurope. Elle peut �tre saisie, sur le mod�le du Conseil constitutionnel fran�ais, dans un d�lai de 60 jours apr�s ladoption dune loi par le parlement, soit par le Pr�sident, soit par le plus grand parti dopposition, soit par 1/5 des d�put�s dun recours all�guant linconstitutionnalit� dune loi. Elle est comp�tente en premi�re et derni�re instance en mati�re de dissolution des partis politiques.
104. Elle peut �galement �tre saisie dun recours pr�judiciel[55] par un tribunal, lorsquil est all�gu� que la loi qui doit �tre appliqu�e par le juge est inconstitutionnelle. Si la Cour constate que la loi en question est en tout ou en partie inconstitutionnelle, elle devient imm�diatement inapplicable et le l�gislateur dispose dun d�lai dun an pour la mettre en conformit� avec linterpr�tation donn�e par la Cour. Les parties � un proc�s peuvent demander au tribunal de saisir la Cour mais il ny a pas dacc�s direct de lindividu, comme par exemple en Allemagne.
105. Les co-rapporteurs souhaitent mettre en exergue la r�forme tr�s importante apport�e par la suppression du dernier � de larticle 15 provisoire de la Constitution, lors de la r�vision doctobre 2001 : la Cour constitutionnelle pourra dor�navant examiner les exceptions dinconstitutionnalit� soulev�es dans le cadre des 600 lois pass�es entre 1980, date du coup dEtat et la premi�re �lection � la TTBMM de d�cembre 1983. Il sagit l� dun progr�s important, qui renforcera le r�le de la Cour constitutionnelle en mati�re de protection des libert�s individuelles, dans la mesure o� la plupart des lois restrictives des droits et libert�s fondamentales, quil sagisse de la loi sur les associations, sur les partis politiques ou sur les syndicats, datent pr�cis�ment de cette p�riode.
106. En revanche, il semblerait que la CEDH nait toujours pas deffet direct en droit turc[56]. Le statut de la CEDH dans la hi�rarchie des normes fait lobjet de beaucoup de discussions doctrinales et nest toujours pas d�finitivement tranch�. il a �t� expliqu� aux co-rapporteurs par M. Bumin, le Pr�sident de la Cour constitutionnelle, quen cas de conflit entre une disposition de la Constitution et la CEDH, la Cour ne pourrait faire autrement quappliquer la Constitution. En revanche, le pr�sident de la Cour de cassation, lors dun discours remarqu� prononc� le 8 septembre 2003 � loccasion de laudience solennelle de rentr�e judiciaire, a indiqu� qu� tous les stades de quelque proc�dure que ce soit, les dispositions de la CEDH et la jurisprudence de la Cour devaient �tre appliqu�es comme des lois internes. Les co-rapporteurs recommandent donc, lors dune r�vision ult�rieure de la Constitution, de faire le n�cessaire pour que la CEDH soit dapplicabilit� directe en droit turc, aussi sur le plan constitutionnel. Cela faciliterait grandement lex�cution des arr�ts par la Turquie et la p�n�tration effective de la jurisprudence de Strasbourg dans la jurisprudence constitutionnelle turque.
107. A terme, les co-rapporteurs sugg�rent �galement de pr�voir lacc�s direct de lindividu � la Cour constitutionnelle. Le syst�me du recours individuel constitutionnel a fait ses preuves notamment en Allemagne et le nombre de requ�tes individuelles port�es ensuite devant la Cour de Strasbourg est sensiblement inf�rieur � celui en provenance dEtats dune taille comparable.
- Le r�le de la Cour de cassation
108. La Cour de cassation ou cour supr�me dappel comprend 250 juges, r�partis entre 21 chambres civiles et 11 chambres p�nales. Les co-rapporteurs ont �t� abasourdis dapprendre quelle est saisie de 500 000 pourvois par an, 300 000 en mati�re civile et 200 000 en mati�re p�nale et que malgr� cette �norme charge de travail, la dur�e moyenne dexamen des pourvois ne d�passait pas 3 � 4 mois. Ils ont �t� tout aussi surpris dapprendre quil nexiste pas de cours dappel dans le syst�me turc et que dans la plupart des cas, apr�s la d�cision de premi�re instance, le seul recours disponible est le pourvoi en cassation. La Cour de cassation ne rejuge pas laffaire au fond : soit elle confirme le jugement de premi�re instance soit elle casse et renvoie.
109. Avec une charge de travail aussi importante, il nest pas �tonnant que les arr�ts de la Cour de cassation soient tr�s brefs (g�n�ralement moins dune page), comme les co-rapporteurs ont pu le constater avec les exemples de d�cisions fournis par les autorit�s turques en mati�re daffaires p�nales de libert� dexpression. Il sensuit que la Cour de cassation nest pas en mesure, sauf lorsquelle statue en formation de chambres r�unies, dassurer le r�le qui incombe aux autres cours supr�mes en Europe par des d�cisions souvent longuement motiv�es, � savoir �tablir les grandes lignes de jurisprudence � appliquer par les tribunaux inf�rieurs.
110. La responsabilit� primaire quant � l�tablissement des faits, lexamen contradictoire des moyens de preuve des parties et la qualification en droit incombe donc au juge de premi�re instance, qui est souvent un juge unique, ce qui est une lourde responsabilit�. Les co-rapporteurs estiment que les efforts de formation des juges dans tout le pays doivent imp�rativement �tre poursuivis, notamment par le biais des programmes de formation des juges et procureurs organis�s par le Conseil de lEurope, conjointement avec lUnion europ�enne, en particulier sur la jurisprudence de la CEDH, programmes qui devraient si possible �tre encore renforc�s pour cr�er un vivier de formateurs turcs exp�riment�s.
111. Les co-rapporteurs ont eu en effet limpression que le taux de p�n�tration de la jurisprudence de la CEDH en Turquie est encore relativement faible. Cette situation est sans doute due au fait que le premier arr�t contre la Turquie na �t� rendu quen 1996 et que les juridictions turques nont pas encore pris lhabitude de se r�f�rer � la jurisprudence de Strasbourg comme crit�re dinterpr�tation du droit turc (voir supra pour ce qui est du probl�me de leffet direct), m�me si des progr�s ont �t� constat�s.
112. Les co-rapporteurs ont �galement �t� surpris des d�clarations faites par lun des plus hauts personnages de linstitution judiciaire, � savoir le Procureur g�n�ral pr�s la Cour de cassation, qui a contest� la force obligatoire des arr�ts de la Cour europ�enne des Droits de lHomme et sest plaint de doubles standards, notamment par rapport � la jurisprudence de la Cour sur labsence de n�cessit� d�puiser les voies de recours internes en Turquie. Les co-rapporteurs esp�rent que cette position nest pas partag�e par le nouveau Procureur g�n�ral, M. Nuri Ok, car il ne saurait �tre question, conform�ment � larticle 46 de la CEDH, de contester la force obligatoire des arr�ts rendus par la Cour, ce qui nexclut pas, bien s�r, quil doive �tre possible de les critiquer.
- Les cours de s�ret� de lEtat
113. Suite � larr�t Incal de la CEDH de juin 1998, la TBMM avait modifi� en 1999 larticle 143 de la Constitution pour exclure les magistrats militaires de la composition des cours de s�ret� de lEtat. Mais un certain nombre de sp�cificit�s proc�durales, notamment en ce qui concerne les r�gles relatives � la garde � vue, avaient �t� maintenues. En vue daligner compl�tement la proc�dure suivie devant les cours de s�ret� de l�tat sur la proc�dure p�nale normale, le 6�me paquet du 19 juillet a purement et simplement abrog� larticle 31 de la loi n�3842 du 1er d�cembre 1992 portant r�forme du code de proc�dure p�nale. Cet article disposait que les modifications apport�es � la proc�dure p�nale ne sappliquaient pas � la proc�dure devant les cours de s�ret� de lEtat, qui continuait d�tre r�gie par les dispositions de lancien code.
114. Les co-rapporteurs f�licitent les autorit�s turques pour cette importante r�forme qui alignera enfin la proc�dure dexception suivie devant les cours de s�ret� de lEtat sur la proc�dure p�nale ordinaire. Les autorit�s turques ont confirm� que labrogation de larticle 31 du Code de proc�dure p�nale conduira automatiquement � lannulation de toute disposition contraire figurant soit dans la loi sur les cours de s�ret� de lEtat soit dans les divers r�glements relatifs � larrestation, la garde � vue et linterrogatoire.
115. Si tel devrait �tre le cas, il ny aurait plus aucune raison de maintenir les cours de s�ret� de l�tat. Les 8 cours existantes, compos�es de 3 juges et 2 procureurs, pourraient �tre, soit transform�es en cours dappel (voir supra), soit en tribunaux sp�cialis�s en mati�re de lutte contre la corruption et les d�lits financiers, le crime organis� ou le trafic d�tre humains. Au minist�re de la Justice, qui envisage la deuxi�me hypoth�se, cette transformation est � l�tude mais il convient de noter quelle n�cessitera une modification de la Constitution...
- Le r�le des ONG
116. Les co-rapporteurs rappellent que la d�mocratie implique non seulement des institutions politiques qui fonctionnent, mais aussi la participation de la soci�t� civile au d�bat politique, �conomique et social. Le degr� de d�mocratisation se mesure pr�cis�ment � la diversit� des opinions qui sexpriment, � lexistence dorganisations diverses et au dialogue qui sinstaure entre celles-ci et les autorit�s.
117. De lavis des co-rapporteurs, les autorit�s continuent de faire preuve dune certaine m�fiance envers les associations quelles ne contr�lent pas et soup�onnent dans toute divergence de vues imm�diatement une menace soit envers lint�grit� de lEtat, soit la la�cit�, soit m�me lexistence de la Turquie comme r�publique ind�pendante.
118. M�me si les co-rapporteurs ont bien compris largumentation de lestablishment turc selon lequel la Turquie est une jeune d�mocratie, situ�e dans une r�gion difficile et p�riph�rique par rapport au centre de lEurope et quil convient donc d�tre vigilant, ils estiment que plus de 80 ans apr�s linstauration de la R�publique, les autorit�s devraient �tre en mesure de t�moigner dune plus grande confiance dans les citoyens turcs, qui sont, tout autant que les autres ressortissants des pays dEurope, attach�s aux valeurs d�mocratiques. En tout �tat de cause, les co-rapporteurs sont convaincus que le dialogue avec les opposants et la discussion sereine des probl�mes qui se posent servent davantage la d�mocratie que la m�fiance et quil y a lieu dencourager la cr�ation dorganisations ind�pendantes, que ce soient des ONG, des syndicats ou encore des pouvoirs locaux.
119. Comme lindique le Commissaire aux Droits de lHomme dans son Rapport annuel 2002, les ONG, en raison de leur engagement actif et de leur connaissance directe du terrain, sont particuli�rement bien plac�es pour soulever les questions relatives � certaines pratiques, proposer des solutions et contribuer � leur mise en uvre La critique quelles �mettent est indispensable au bon fonctionnement dune d�mocratie et, � ce titre, devrait non seulement �tre tol�r�e mais encourag�e par les autorit�s. En outre, les ONG sont g�n�ralement bien plus que des simples opposants externes � la pratique et � la politique du gouvernement car elles contribuent aussi, dans de nombreux domaines, � lexercice des pr�rogatives r�galiennes de lEtat, en assistant les groupes vuln�rables, en fournissant �coute, aide et conseil aux victimes de violations ou en participant aux programmes de formation des fonctionnaires.
120. Les co-rapporteurs traiteront dans le chapitre relatif au droit � la libert� dassociation des modalit�s de fonctionnement des ONG en Turquie mais, du point de vue plus global de fonctionnement des institutions, ils ont �t� frapp�s par le faible degr� dacceptation r�elle du r�le des ONG ou des plates-formes dONG par les autorit�s[57], surtout au niveau local. Certes, les personnes victimes de torture ou de mauvais traitements en Turquie ne sont pas toutes des Kurdes ou des militants dextr�me gauche mais il se trouve que ces deux cat�gories de la population ont effectivement par le pass� fait lobjet de telles violations : ce nest pas pour autant que les ONG qui d�noncent de telles pratiques sont n�cessairementdes ennemies de la R�publique, � condition bien s�r de faire preuve de s�rieux, dind�pendance et de sensdes responsabilit�s.
121. A lheure actuelle, m�me si la situation sest beaucoup am�lior�e, les autorit�s continuent dadopter une attitude tr�s d�fensive face � ce quelles estiment �tre des critiques injustes et purement partisanes. Les co-rapporteurs esp�rent donc que les organes de consultation instaur�s ou r�activ�s r�cemment par les autorit�s, notamment au niveau du Premier ministre, comme les commissions des droits de lhomme dans les provinces et les districts, permettront dinstaurer et de consolider un climat de confiance r�ciproque. Ils notent avec satisfaction quun d�cret du 23 novembre 2003 a modifi� la composition de ces commissions au niveau des provinces et des districts : le nombre de repr�sentants dONG a �t� augment� et les membres des forces de s�curit� (police et gendarmerie), dont la participation avait �t� souvent critiqu�e, ny si�geront plus. En outre, la nouvelle loi sur le droit dacc�s � linformation (n�4982) du 9 octobre 2003, entr�e en vigueur le 24 avril 2004 obligera tous les services publics � r�pondre sous 15 jours � toute demande de renseignement ou dacc�s � des informations officielles pr�sent�e par une personne physique ou morale, ce qui contribuera sans aucun doute � am�liorer la relation entre les citoyens et les administrations.
- La cr�ation de linstitution de lombudsman
122. En octobre 2000, les autorit�s turques avaient inform� les co-rapporteurs de l�poque du fait quun projet de loi sur la cr�ation dun � Inspecteur public � ou � Ombudsman �, conforme aux normes universelles et compatible avec les conditions propres � la Turquie, �tait pratiquement finalis� et devait �tre pr�sent� au parlement sous peu. En mai 2001, le ministre de la Justice avait d�clar� quun projet de loi sur la cr�ation dinstitutions de contr�le public avait �t� pr�sent� au parlement. Plus de deux ann�es ont pass� et linstitution de lOmbudsman na toujours pas vu le jour.
123. Au vu de la r�action du Pr�sident de la TBMM, M. Arin�, et du Pr�sident de la commission parlementaire des droits de lhomme, M. Elkatmis, les co-rapporteurs ont eu limpression que le projet de loi en question ne faisait pas partie des priorit�s actuelles et quil risquait de rester encore dans les tiroirs pendant un certain temps. Ce serait dommage, car linstitution du m�diateur, comme organe de m�diation impartial et ind�pendant entre la soci�t� civile et le pouvoir, a fait ses preuves dans beaucoup dautres pays et sest r�v�l�e particuli�rement utile dans les pays en transition ou sortant dune p�riode de conflit arm�. Les co-rapporteurs recommandent donc aux autorit�s turques d�tudier attentivement la question afin de soumettre dans les meilleurs d�lais un nouveau projet de loi � la TBMM.
124. La Commission parlementaire des droits de lhomme, cr��e en 1990, fait un travail formidable et a produit plusieurs rapports importants, notamment sur la situation dans les prisons, mais elle ne peut pas faire de propositions de lois et nest pas consult�e pr�alablement pour avis sur les projets de loi d�pos�s par le gouvernement. Enfin, elle ne dispose pas de pouvoir denqu�te propre. Elle nest donc pas en mesure de remplir les fonctions normalement d�volues � un Ombudsman.
e. La d�mocratie locale et r�gionale
125. La R�publique de Turquie a ratifi� la Charte de l'autonomie locale le 9 d�cembre 1992, et son adh�sion a pris effet le 1er avril 1993. Le seul autre trait� du Conseil de lEurope ratifi� par la Turquie dans ce domaine est la convention cadre sur la coop�ration transfrontali�re des collectivit�s et autorit�s territoriales[58]. Pour les co-rapporteurs, la modernisation de la Turquie et lam�lioration des standards en mati�re de pr��minence du droit et de respect des droits de lhomme passent aussi par une r�forme de la l�gislation sur les pouvoirs locaux.
126. Une d�centralisation impliquant un transfert de comp�tences au niveau local et r�gional, en mati�re d�ducation et de culture notamment, contribuerait, m�me si elle �tait mise en oeuvre uniform�ment dans l'ensemble du pays, � cr�er les conditions d'un meilleur exercice des droits d�mocratiques, y compris pour la population kurdophone du sud-est du pays. Sans vouloir �tablir de lien direct entre la r�forme des pouvoirs locaux et r�gionaux et le terrorisme qui a ensanglant� la r�gion jusquen 1999, les co-rapporteurs estiment que ces changements pourraient aider � effacer les frustrations dont se sont nourries � l�poque les activit�s du PKK.
127. Il faudrait aussi augmenter la part du budget de lEtat dans le financement des collectivit�s locales : � lheure actuelle moins de 5% des recettes de lEtat leur sont redistribu�es.
128. Les co-rapporteurs ont mis � profit leur deuxi�me visite en mai 2003 pour sentretenir tant avec le ministre de lInt�rieur, M. Aksu, quavec les maires de Diyarbakir et Bing�l et ladjoint au maire de Lice de l�tat de la d�mocratie locale et r�gionale en Turquie, qui est un Etat tr�s centralis� o� l'administration centrale exerce, dans le cadre des principes et des proc�dures d�finis par la loi, un important pouvoir de tutelle sur les collectivit�s locales : il est clair que dans beaucoup de domaines, les fonctionnaires nomm�s par lEtat central ont beaucoup plus de pouvoirs que les �lus.
129. En Turquie, la tutelle administrative sur les collectivit�s locales est exerc�e par le minist�re de l'Int�rieur et, dans les r�gions, par les gouverneurs (vali) des 81 provinces[59] et les gouverneurs de district. Les co-rapporteurs ont ainsi rencontr� les gouverneurs de Diyarbakir et de Bing�l et le gouverneur du district de Lice.
130. Les �lections locales ont lieu tous les cinq ans, conform�ment aux principes �nonc�s � l'article 67 de la Constitution ; les prochaines auront lieu le 28 mars 2004. Pour les �lections municipales le syst�me est celui du suffrage universel direct � un tour : remporte l�lection celui qui a obtenu le plus de voix par rapport aux autres candidats. Dans le Sud-Est, 36 municipalit�s sont d�tenues par des maires du parti HADEP, dissous en mars 2003. Les maires de Diyarbakir et Bing�l ont depuis rejoint le DEHAP et le maire de Lice, inscrit au parti Fazilet, dissous en juin 2001, a rejoint lAKP. La coop�ration entre les maires et les gouverneurs est en g�n�ral bonne, m�me si les maires se plaignent de ne pas avoir assez de comp�tences[60] et de ne pas disposer de sources de financement suffisantes.
131. La r�forme de ladministration locale et du service public fait lobjet de discussions depuis maintenant pr�s de 10 ans et divers projets ont �t� �labor�s[61]. Le ministre de lInt�rieur a indiqu� aux co-rapporteurs quun nouveau projet de loi-cadre tr�s ambitieux, �labor� apr�s dintenses consultations, a �t� soumis r�cemment � la TBMM. Il pr�voit la r�duction de la tutelle des gouverneurs sur les maires : la tutelle ne portera plus que sur un contr�le de l�galit� et une �valuation des performances. En outre, il est pr�vu de transf�rer aux autorit�s locales un certain nombre de services centraux de lEtat install�s dans les provinces. Les co-rapporteurs invitent les autorit�s � sassurer, pr�alablement au vote, de la conformit� de cette nouvelle loi avec la Charte de lautonomie locale.
- Destitution provisoire des �lus locaux par le ministre de lInt�rieur
132. Aux termes de larticle 127 de la Constitution, le r�glement des litiges portant sur l'acquisition de leur qualit� par les organes �lus des collectivit�s locales, ainsi que les d�cisions touchant � la perte de cette qualit�, sont du ressort des tribunaux. Le ministre de l'Int�rieur peut toutefois, � titre provisoire et dans l'attente d'un jugement d�finitif, suspendre pour faute professionnelle les organes des collectivit�s locales ou les membres de ces organes faisant l'objet d'enqu�tes ou de poursuites. Ce pouvoir est exerc� soit sur la demande du gouverneur, adress�e au ministre, soit d'office par le ministre lui-m�me, sur la base d'une enqu�te men�e par les inspecteurs du minist�re.
133. Si un maire �lu est ainsi suspendu par le ministre, le gouverneur convoque le conseil municipal dans un d�lai de dix jours. Au cours de cette r�union, un maire int�rimaire (ou maire provisoire) est �lu parmi les membres du conseil pour exercer cette charge jusqu'aux nouvelles �lections ou jusqu'au retour de l'ancien maire, selon la d�cision qui sera rendue par le tribunal. Le pouvoir du ministre de l'Int�rieur de �suspension temporaire de maires dans l'attente d'une d�cision de justice� cesse d�s qu'est rendue la d�cision d�finitive. Si le jugement du tribunal exige la destitution d�finitive du maire, la proc�dure l�gale pr�vue par la loi sur les communes est engag�e. Selon l'article pertinent de cette loi, seul le Conseil d'Etat, agissant en qualit� d'instance administrative supr�me, peut prononcer la destitution d�finitive. Le ministre de l'Int�rieur a us� 81 fois de cette pr�rogative entre 1989 et 1996 et 12 fois entre 1996 et 2001. Ce chiffre correspond � 0,4 % du nombre total de maires.
134. Tout comme le Congr�s des pouvoirs locaux et r�gionaux, les co-rapporteurs pensent que sur ce point, larticle 127 de la Constitution devrait �tre modifi� : le mandat dun �lu est irr�vocable et ne saurait lui �tre retir� que par les urnes ou apr�s une condamnation p�nale d�finitive. La suspension du mandat dun �lu, m�me � titre provisoire, par lex�cutif nest pas compatible avec le principe de la s�paration des pouvoirs.
135. Depuis plus de 20 ans, la Turquie a �t� soumise � l�tat durgence et � une l�gislation dexception, suite au coup d�tat de 1980 et � la r�bellion kurde entre 1984 et 1999. Le conflit de Chypre a isol� la Turquie sur la sc�ne internationale, malgr� son r�le dalli� strat�gique des Etats-Unis dans lOTAN.
136. La Turquie a longtemps cru que lunion douani�re avec lUnion europ�enne, r�alis�e en 1996, suffirait � r�aliser son r�ve dune �conomie plus prosp�re gr�ce � des relations privil�gi�es avec lUnion. Ce nest qu� partir de 1996-1997, avec, notamment, un rapport publi� par la T�SIAD, une association patronale, quil y a eu une prise de conscience de limportance du respect et de la protection des droits de lhomme et des institutions v�ritablement d�mocratiques par rapport au d�veloppement �conomique et � lint�gration europ�enne. De m�me, jusquen 1996, date du premier arr�t rendu par la CEDH, laTurquie ne se sentait pas v�ritablement concern�e par la protection des droits de lhomme.
137. La situation a radicalement chang� depuis et les co-rapporteurs sen f�licitent car le chemin parcouru et l�volution de la soci�t� turque depuis le milieu des ann�es 1990 ont �t� tout � fait remarquables, m�me si la vie politique a �t� marqu�e par une grande instabilit�.
138. A lheure actuelle et depuis plus ou moins 1997, la situation �conomique est catastrophique et les caisses de lEtat, mal g�r�es et ob�r�es par un budget militaire excessif, sont vides. Dans 21 des 81 provinces de Turquie, la population survit avec moins de 1500 USD de revenu par an et il y aurait 2 � 3 millions de personnes qui disposeraient de moins de 700 USD.
139. Linsuffisance dans lacc�s aux soins de sant�, � l�ducation, � la justice, les violences faites aux femmes sont, de lavis des co-rapporteurs, des obstacles majeurs � la d�mocratisation du pays. Ce nest pas pour autant quils justifient une politique s�curitaire visant � limiter les droits civils et politiques dune mani�re disproportionn�e. Dans une soci�t� d�mocratique, les droits individuels nont pas � �tre sacrifi�s sur lautel de la s�curit� et de la p�rennit� de lEtat. Les r�formes entreprises depuis 1995, et surtout depuis 2001, t�moignent de cette prise de conscience.
140. Larticle 19 de la Constitution, qui pr�voyait jusqu� 15 jours de garde � vue en cas de d�lits collectifs, a �t� amend� lors de la r�forme constitutionnelle doctobre 2001 : la dur�e de la garde � vue sans comparution devant un juge est dor�navant de 4 jours maximum pour les d�lits collectifs et toute personne arr�t�e ou d�tenue aura droit � ce que ses proches re�oivent notification sans d�lai de leur arrestation ou d�tention.
141. Les co-rapporteurs f�licitent les autorit�s turques pour cette importante r�forme, par laquelle la Turquie saligne enfin sur la pratique europ�enne en mati�re de dur�e de la garde � vue, y compris pour les crimes les plus graves, conform�ment � la jurisprudence de la Cour europ�enne des Droits de lHomme. Ils observent en outre que, contrairement � ce qui se pratique dans beaucoup de pays membres, o� la dur�e de la garde � vue est fix�e par le code de proc�dure p�nale, la dur�e maximale de 4 jours est garantie par la Constitution et ne pourra donc pas �tre modifi�e facilement.
142. Les dispositions correspondantes du Code de proc�dure p�nale ont �t� modifi� par une loi n� 4744 du 6 f�vrier 2002 (1er paquet), qui a �galement pr�vu le droit � lassistance dun avocat d�s la premi�re heure de garde � vue, sauf pour les affaires relevant des cours de s�ret� de lEtat. Enfin, la loi n� 4778 du 11 janvier 2003 (5�me paquet) a aboli larticle 16 � 4 de la loi sur les cours de s�ret� de lEtat, qui refusait lacc�s � un avocat pendant les premi�res 48 heures de garde � vue � toute personne d�tenue par la police pour des infractions relevant de la comp�tence des cours de s�ret� de lEtat.
143. Les co-rapporteurs estiment que le droit de toute personne d�tenue de faire appel � un avocat d�s la premi�re heure de la garde � vue, quel que soit le type dinfraction, est une avanc�e majeure dans la protection des droits fondamentaux et une garantie importante contre le risque de mauvais traitements aux mains de la police.
144. A noter toutefois quau cas o� l�tat durgence serait r�tabli dans une province conform�ment � larticle 120 de la Constitution, la garde � vue pourra �tre port�e � 7 jours, apr�s comparution devant un juge (modification de larticle 16 � 3 de la loi n� 2845 sur les cours de s�ret� de lEtat)[62].
145. Le 18 septembre 2002, un r�glement sur les interpellations, la garde � vue et linterrogatoire a introduit lune des recommandations du CPT, � savoir linterdiction de la pr�sence dun officier de police ou dun gendarme lors de lexamen m�dical du d�tenu, sauf si celui-ci ou son m�decin le demande express�ment. Ce r�glement pr�cise aussi les informations � communiquer imp�rativement � la personne d�tenue et, notamment, lobligation de lui communiquer ses droits. Ce r�glement a de nouveau �t� modifi� le 3 janvier 2004, pour tenir compte des observations du CPT.
146. Les co-rapporteurs esp�rent que les diverses modifications intervenues seront strictement appliqu�es tant par la police que par la gendarmerie lorsquelles proc�dent � des arrestations, dont le nombre a sensiblement augment� dans les six premiers mois de 2003, par rapport � la m�me p�riode en 2002, notamment dans la r�gion de Diyarbakir[63], ce que les co-rapporteurs d�plorent vivement.
147. Lordre des avocats de Diyarbakir a �galement fait �tat de probl�mes persistants pour ce qui est du droit des personnes d�tenues dinformer leur famille ou de demander � avoir acc�s � un avocat. Sur ce dernier point, le CPT sest d�clar� surpris dans son dernier rapport du faible nombre de personnes qui ont r�clam� un avocat et il semblerait donc que linformation sur leurs droits donn�e par la police aux personnes en garde � vue soit encore insuffisante, notamment par rapport � la gratuit� de lintervention des avocats.
b. La lutte contre limpunit� et la torture
148. Les co-rapporteurs rappellent que depuis 1996, la Cour europ�enne a rendu plus de 45 arr�ts mettant en cause les actions des forces de s�curit� en Turquie pour des homicides, des disparitions, des actes de torture et de mauvais traitement ainsi que des destructions de biens immobiliers ou mobiliers, tels que maisons, villages ou r�coltes. La plupart de ces arr�ts portent sur des faits anciens et ne refl�tent donc pas n�cessairement la situation actuelle mais il est clair, ainsi que le relevait le Comit� des Ministres[64], que les graves violations constat�es par la Cour �taient imputables � des probl�mes structurels : lacunes dans la formation et la gestion des personnels des forces de s�curit�, dans la d�finition juridique du cadre de leurs activit�s et dans les voies de recours, p�nales, civiles ou administratives, ouvertes aux victimes en cas dabus.
149. Dimportantes mesures ont �t� prises par les gouvernements successifs pour lutter contre limpunit� : depuis 1999, les peines maximales susceptibles d�tre inflig�es aux fonctionnaires jug�s coupables de torture ou de mauvais traitements ont �t� augment�es et port�es respectivement � 8 et 5 ans de prison. Cette r�forme fut toutefois critiqu�e parce que les peines prononc�es �taient souvent assorties du sursis ou converties en amende et que lautorisation administrative pr�alable n�cessaire pour pouvoir diligenter des poursuites p�nales contre les fonctionnaires avait �t� maintenue dans certains cas.
150. Le 2�me paquet de r�forme du 9 avril 2002 modifia larticle 13 de la loi sur les fonctionnaires de 1965 obligeant ceux-ci � rembourser � lEtat toute somme pay�e par celui-ci en cas de condamnation par la CEDH pour torture ou s�vices contraires � larticle 3 de la Convention.
151. Le 4�me paquet de r�forme du 11 janvier 2003 a modifi� les articles 243 du Code p�nal relatif � la torture et larticle 245 relatif aux mauvais traitements : dor�navant il ny a plus de sursis ni de conversion en amende. En outre, la loi de 1999 sur les poursuites contre les fonctionnaires a aussi �t� modifi�e pour supprimer lautorisation administrative pr�alable pour ce qui est des poursuites engag�es en vertu des articles 243 et 245 du Code p�nal. Une circulaire du minist�re de lInt�rieur rappelant � tous les fonctionnaires quaucune forme de torture ou de mauvais traitement ne serait plus tol�r�e fut �mise le 16 janvier 2003.
152. Enfin, le 7�me paquet de r�forme dao�t 2003 a modifi� le Code de proc�dure p�nale et pr�voit que toutes les poursuites p�nales fond�es sur les articles 243 et 245 seront d�sormais trait�es selon une proc�dure durgence et que les audiences ne pourraient plus �tre report�es de plus de 30 jours et se tiendraient y compris pendant les vacances judiciaires. Cette derni�re r�forme �tait n�cessaire car il avait �t� constat� que, du fait des multiples ajournements daudience et de la dur�e de la proc�dure en r�sultant, dans beaucoup de cas, les proc�s intent�s contre les forces de s�curit� devaient �tre abandonn�s � cause de la prescription.
153. Enfin, il est � noter quune circulaire du minist�re de la Justice dat�e du 20 octobre 2003 enjoint maintenant � tous les procureurs denqu�ter personnellement et en priorit� sur toute all�gation de torture ou de mauvais traitements au lieu de confier ces enqu�tes � la police ou � la gendarmerie.
154. Les co-rapporteurs ne voient pas en revanche pourquoi il serait n�cessaire de maintenir le syst�me dautorisation administrative pr�alable pour toute autre infraction p�nale susceptible d�tre reproch�e � un fonctionnaire pour des actes commis dans lexercice de ses fonctions. Il conviendrait � tout le moins de la supprimer aussi dans le cadre des articles du Code p�nal r�primant les homicides, disparition de personnes, destructions de biens etc. commis par les forces de s�curit� et denvisager une proc�dure provisoire de suspension � titre disciplinaire pour tout fonctionnaire mis en cause dans une enqu�te p�nale pour des faits graves.
155. Les co-rapporteurs sont conscients que l�radication de la pratique de la torture et des s�vices pendant la garde � vue est un processus de longue haleine : il ne suffit pas de modifier les lois, il faut encore quelles soient appliqu�es sur le terrain par les fonctionnaires de base. Le ministre de lInt�rieur a indiqu� aux co-rapporteurs que des efforts importants de formation avaient �t� faits[65], que les arr�ts de la Cour �taient syst�matiquement traduits et publi�s et que des circulaires avaient �t� envoy�es pour rappeler la politique de tol�rance z�ro des autorit�s en la mati�re.
156. Les co-rapporteurs soutiennent sans r�serve les efforts du gouvernement � cet �gard car il faut rester vigilant : dapr�s un rapport publi� en ao�t 2003 par lAssociation des droits de lhomme[66] (IHD), le nombre de personnes soumises � des tortures ou des mauvais traitements aurait augment� pendant le premier semestre 2003, en comparaison avec les six premiers mois de 2002 (413 cas pendant le premier semestre en 2002, 715 pour la m�me p�riode en 2003). Dapr�s le m�me rapport, les proc�s intent�s contre au total 63 membres des forces de s�curit� devant 11 tribunaux pour avoir tortur� 42 personnes ont abouti pendant le premier semestre 2003 � : 29 d�cisions de classement pour prescription, 13 d�cisions dacquittement, 8 d�cisions de condamnation avec sursis et 13 d�cisions de condamnation � de la prison ferme, mais o� lex�cution des peines a �t� totalement ou partiellement suspendue.
157. Le CPT a �galement indiqu�, dans le dernier rapport publi� suite � sa visite � Diyarbakir en septembre 2002[67], avoir constat� sur un certain nombre de d�tenus des traces compatibles avec des all�gations de torture et de mauvais traitements. Le CPT a effectu� depuis une autre visite, du 7 au 15 septembre 2003, � Adana, Bismil, Cinar, Diyarbakir et Mersin, dont les conclusions ne sont pas encore publi�es. Les co-rapporteurs invitent instamment les autorit�s turques � mettre en uvre toutes les recommandations du CPT et � r�primer s�v�rement tous les abus qui seraient constat�s.
c. La situation dans les prisons
158. Le gouvernement turc avait entam� une r�forme de son syst�me p�nitentiaire en vue de remplacer le syst�me de grands dortoirs (jusqu� 100 d�tenus par pi�ce) par un syst�me de cellule de un ou trois d�tenus. Cette r�forme, qui met la Turquie en conformit� avec les normes p�nitentiaires europ�ennes, a �t� rejet�e par certains prisonniers qui all�guaient quil sagissait en r�alit� dun syst�me disolation assimilable � la torture et aux mauvais traitements. Ils ont entam� une gr�ve de la faim en 2000 et manifest� dans diff�rentes prisons, ce qui a men� � lintervention de la gendarmerie, qui a �vacu� les prisons de force, ce qui a co�t� 32 vies[68].
159. Les gr�ves de la faim de personnes oppos�es aux prisons de type F ont co�t� la vie � plus de 70 personnes entre 2000 et 2003, ce qui est plus que regrettable. Les co-rapporteurs ne peuvent que se joindre � tous ceux qui prient les gr�vistes de la faim et les autorit�s turques de mettre un terme � ce drame humain. Ils f�licitent les autorit�s turques davoir suivi les conseils du CPT pour assurer aux prisonniers des prisons de type F la possibilit� de passer une partie raisonnable de la journ�e � participer au programme dactivit�s communes en dehors de leurs cellules et regrettent lintransigeance des d�tenus qui refusent encore dy participer.
160. Il est en effet � relever que la coop�ration avec le CPT est excellente et que la Turquie a accept� que tous les rapports du CPT et les r�ponses du Gouvernement soient publi�s, ce qui constitue un progr�s notable. Le rapport sur la visite effectu�e par le CPT du 2 au 14 septembre 2001 a ainsi �t� rendu public en avril 2002 et la r�ponse du Gouvernement a �t� rendue publique le 24 janvier 2003. Les autorit�s turques ont �galement consenti � la publication des observations pr�liminaires adress�es par le CPT aux autorit�s, suite � une visite effectu�e du 21 au 27 mars 2002, notamment dans une prison de type F, � Sin�an, pr�s dIstanbul, et dans des postes de gendarmerie � Diyarbakir. Enfin, les autorit�s turques ont �galement accept� la publication le 25 juin 2003 du rapport �tabli suite � la visite de septembre 2002, accompagn� des observations du gouvernement.
161. Il ressort de ce rapport[69] que le CPT se d�clare satisfait des programmes dactivit�s communes organis�s par les autorit�s. En outre, le gouvernement a donn� suite � une autre recommandation du CPT : en vertu dune circulaire du minist�re de la Justice du 10 octobre 2002, la possibilit� de participer � des � p�riodes de conversation �, pendant lesquelles les d�tenus peuvent converser ensemble pendant deux � trois heures sans surveillance, ne sera plus subordonn�e � la participation pr�alable aux activit�s communes.
162. Sur certains autres points concrets (comme par exemple, lexamen m�dical syst�matique � larriv�e dans une prison et la confidentialit� de lexamen m�dical), les autorit�s turques, ont mis en uvre les recommandations du CPT par une circulaire du minist�re de la Sant� du 10 octobre 2003. Les co-rapporteurs invitent les autorit�s turques � continuer de mettre en uvre sans d�lai toutes les recommandations du CPT.
163. De mani�re plus g�n�rale, il faut f�liciter les autorit�s turques pour avoir, par la loi n� 4806 entr�e en vigueur le 10 f�vrier 2003 portantmodification du Code p�nal et de la loi sur ladministration p�nitentiaire, align� la l�gislation sur les standards europ�ens applicables en la mati�re, notamment en ce qui concerne la confidentialit� des documents d�tenus par les prisonniers pour pr�parer leur d�fense et labsence de fouille des avocats rendant visite � leurs clients.
d. Labolition de la peine de mort
164. Le 3 octobre 2001, apr�s un d�bat particuli�rement houleux, le parlement modifia larticle 38 de la Constitution pour abolir la peine de mort en temps de paix, mais en faisant une exception pour les crimes de terrorisme[70]. Par la suite, la loi du 9 ao�t 2002 (3�me paquet) a supprim� cette exception, en pr�voyant que, pour toutes les infractions passibles de la peine de mort, sauf celles commises en temps de guerre ou de danger imminent de guerre, telles que pr�vues dans le code p�nal et dautres lois, comme la loi sur la contrebande ou la loi sur les for�ts, les peines seraient commu�es en r�clusion criminelle � perp�tuit�, sans possibilit� de b�n�ficier dune lib�ration conditionnelle. Des amendements au code p�nal militaire, qui pr�voit aussi la peine de mort, sont en pr�paration. Le 6�me paquet du 19 juillet 2003 a pr�cis� que labolition serait applicable �galement aux crimes punissables de la peine de mort pr�vus par la loi du 17 f�vrier 2000 sur le parc national de la p�ninsule de Gallipoli.
165. Le Protocole n� 6 a �t� sign� par la Turquie le 15 janvier 2003, juste avant la visite du Premier ministre turc � loccasion de la session de lAssembl�e. Les instruments de ratification ont �t� d�pos�s aupr�s du Secr�taire G�n�ral du Conseil de lEurope le 12 novembre 2003. Le 9 janvier 2004, la Turquie a en outre sign� le Protocole n� 13, qui pr�voit labolition de la peine de mort en toute circonstance, donc y compris en temps de guerre.
166. Les co-rapporteurs f�licitent la Turquie pour cette importante r�forme, qui a n�cessit� beaucoup de courage politique. Labolition compl�te de la peine de mort fait partie des valeurs communes europ�ennes et on ne peut que se r�jouir que la Turquie, qui nex�cutait plus ses condamn�s � mort depuis 1984, ait saut� le pas pour labolir de jure. Il convient maintenant de parachever cette importante r�forme en modifiant la Constitution, suite � la ratification prochaine du Protocole n� 13 et � supprimer la peine de mort �galement dans le code p�nal militaire.
167. La libert� dexpression fait lobjet de nombreuses possibilit�s de restriction en droit turc. Lors de leurs entretiens avec des journalistes, des syndicats ou des associations, les co-rapporteurs ont �t� inform�s que lun des probl�mes majeurs r�side dans la multitude de textes pouvant servir � limiter la libert� dexpression : code p�nal, code civil, code �lectoral, loi sur les associations, loi sur les partis politiques, lois sur la presse, sur la t�l�vision etc. Beaucoup dorganes de presse, ou dassociations doivent consacrer une part importante de leur temps, de leur budget ou de leurs ressources � la r�mun�ration davocats sp�cialis�s et � la comparution personnelle des dirigeants devant les tribunaux. Au quotidien H�rriyet, par exemple, qui se d�finit pourtant comme un journal � constitutionnel �, une personne est affect�e � plein temps � la d�fense du journal.
168. Lautre probl�me qui a �t� mentionn� est celui du harc�lement judiciaire : les journalistes, les ONG, les �crivains, les �lus ne savent jamais � lavance si ce quils disent, �crivent ou publient ne fera pas lobjet de poursuites. Il y a des cas o� � �a passe �, dautres o� � �a ne passe pas �. Cela d�pendrait du moment, de la r�gion ou de lhumeur du fonctionnaire du minist�re de lInt�rieur qui contr�le toutes les publications avant leur parution. Face � cette situation, certains organes de presse ont admis quils pratiquaient une forme dautocensure, pour rester conformes au politiquement correct tel que d�fini par les trois premiers articles[71] de la Constitution. Dautres journaux sont syst�matiquement saisis ou interdits de publication. Le journal pro Kurde Yenide �zg�r G�ndem, par exemple, qui est le 8�me � avoir succ�d� au quotidien �zg�r G�ndem[72], para�t depuis septembre 2002[73] : sur les 164 �ditions publi�es au 12 f�vrier 2003, 64 ont �t� saisies le jour de leur parution, y compris le jour de la visite des co-rapporteurs, qui ont par ailleurs �t� inform�s que le r�dacteur en chef et le propri�taire du journal faisaient lobjet de 82 proc�dures p�nales au total (dont une demandant linterdiction compl�te du journal), fond�es sur les articles 159, 169 et 312 du code p�nal ou les articles 6 et 8 de la loi anti-terreur.
169. Il a �galement �t� soulign� que dans un grand nombre de cas, les poursuites intent�es par le minist�re public donnaient lieu, au bout du compte, � des acquittements ou des relaxes et que les peines de prison faisaient r�guli�rement lobjet damnisties. Il semblerait donc que les tribunaux jouent en g�n�ral efficacement leur r�le de gardiens des libert�s individuelles, � lexception notable des cours de s�ret� de lEtat, qui ont tendance � �tre plus s�v�res.
170. Ce qui est pr�occupant est le nombre et la fr�quence des poursuites diligent�es : la section de lassociation des droits de lhomme (IHD) � Bing�l (Est), par exemple, doit faire face � lheure actuelle � pr�s de 50 poursuites, pour des motifs divers. La derni�re en date concerne la publication, sans autorisation pr�alable, dun rapport du 5 juillet 2003 sur le respect des droits de lhomme dans la r�gion. Lassociation G�c-DER, qui soccupe de migrants, a �t� poursuivie pour activit�s non statutaires lorsquelle a voulu distribuer un questionnaire pour tenter d�valuer le nombre de personnes souhaitant effectivement retourner dans leurs villages dorigine.
171. Le si�ge de lassociation des droits de lhomme (IHD) � Ankara a fait lobjet dune perquisition et de saisie de documents le 6 mai 2003, le lendemain dune r�union o� ses repr�sentants avaient �t� convi�s par les autorit�s pour une consultation sur le nouveau programme national. Cette perquisition, certes autoris�e par un juge, a �t� d�nonc�e notamment par la commission des droits de lhomme de la TBMM. Lorsque les co-rapporteurs ont demand� des �claircissements au ministre de la Justice, il leur a �t� r�pondu que la justice est ind�pendante. A ce sujet, les co-rapporteurs souhaitent rappeler que larticle 144 de la Constitution pr�voit que la supervision des juges et procureurs, notamment pour ce qui est de la mani�re dont ils sacquittent de leurs t�ches, est assur�e par linspection g�n�rale du minist�re de la Justice.
172. Les co-rapporteurs notent avec satisfaction que, depuis la r�forme constitutionnelle doctobre 2001, de multiples am�nagements ont �t� apport�s aux restrictions en mati�re de libert� dexpression. Il est trop t�t pour en appr�cier limpact, m�me si un certain nombre de d�cisions judiciaires ont d�j� �t� rendues. Pour les co-rapporteurs, ce qui doit aussi baisser est le nombre de poursuites engag�es. Ce nest pas le cas, par exemple, dans les r�gions de lEst et du Sud-Est, dapr�s le dernier rapport de la FIDH, publi� en d�cembre 2002. Paradoxalement, dapr�s les ONG de Diyarbakir et de Bing�l, laugmentation du nombre de poursuites est sans doute due aussi � une meilleure garantie de la libert� dexpression, qui encourage les gens � en faire plus souvent usage. La situation a toutefois commenc� � sam�liorer : dapr�s le dernier rapport de l association des droits de lhomme, publi� fin 2003, les poursuites en mati�re de libert� dexpression auraient diminu� de moiti� entre 2002 et 2003.
173. Un autre fait pr�occupant est lutilisation alternative par les procureurs dautres articles du code p�nal, semblerait-il, pour contourner et �viter lapplication des dispositions modifi�es par le l�gislateur. Ainsi, il y aurait beaucoup moins de poursuites fond�es sur les articles 159 et 312 du code p�nal ou larticle 8 de la loi anti-terreur mais le nombre de poursuites engag�es en vertu de larticle 169, qui r�prime laide et le soutien apport�s � des organisations ill�gales de quelque mani�re que ce soit par une peine de prison pouvant aller jusqu� 5 ans, aurait consid�rablement augment�. La modification apport�e � larticle 169 par le 7�me paquet dao�t 2003 (suppression du membre de phrase qui indiquait � de quelque mani�re que ce soit �) ne semble pas de nature � diminuer cette pr�occupation des co-rapporteurs.
174. Malgr� les d�n�gations des autorit�s turques, les co-rapporteurs estiment que, si cette pratique est av�r�e, elle serait de nature � s�rieusement miner les efforts incontestables du gouvernement et du l�gislateur en la mati�re. Certes, les juges comme les procureurs sont ind�pendants et ne re�oivent pas dinstructions du minist�re de la Justice mais il conviendrait de leur rappeler, ne serait-ce que par des circulaires minist�rielles, limportance de leur r�le dans la mise en uvre des r�formes d�mocratiquement vot�es.
175. Enfin, m�me si les r�formes ont pour but essentiel de r�pondre aux critiques et aux demandes exprim�es par les Etats europ�ens, les co-rapporteurs encouragent vivement les autorit�s, quand elles seront moins press�es par le temps, � effectuer une r�forme en profondeur des textes l�gislatifs et r�glementaires applicables en mati�re de libert� dexpression, le cas �ch�ant avec laide du Conseil de lEurope. La philosophie g�n�rale leur semble en effet toujours assez s�curitaire et il nest pas normal dans une d�mocratie que la libert� dexpression soit aussi fr�quemment sanctionn�e par de si lourdes peines privatives de libert�, qui devraient �tre r�serv�es aux cas les plus graves et encore, uniquement en cas de r�cidive.
176. En ce qui concerne les modifications l�gislatives intervenues depuis octobre 2001, les co-rapporteurs se limiteront dans ce rapport � mentionner les plus embl�matiques, qui concernent des articles de loi fr�quemment mis en cause par les arr�ts de la Cour europ�enne des droits de lhomme et ne traiteront pas ici, faute de temps, des diverses modifications apport�es � la loi sur la presse et la t�l�vision[74].
177. Larticle 159 du Code p�nal (r�primant les injures et outrages aux corps constitu�s et au concept de � Turkishness �[75]) a �t� modifi� par la loi n� 4744 du 6 f�vrier 2002 (1er paquet): la peine maximale pour ce genre dinsultes a �t� ramen�e de 6 ans � 3 ans de prison (mais le minimum restait � 1 an). Ceux qui insultent ouvertement les lois ou les d�cisions du parlement encourent toujours de 15 jours � 6 mois de prison mais lamende[76] a �t� supprim�e.
178. La loi du 3 ao�t 2002 (3�me paquet) a de nouveau modifi� larticle 159 en rempla�ant le mot � publiquement � par le mot � ouvertement �, ce qui dapr�s les autorit�s turques, introduisait un �l�ment intentionnel pour que le d�lit soit constitu�. Le 7�me paquet de r�forme entr� en vigueur en ao�t 2003 a r�duit la peine minimale pour cette dinfraction de un an � six mois de prison, ce qui constitue un progr�s important. Un nouveau paragraphe a �galement �t� ajout� pr�cisant que lexpression de critiques, sans intention dinsulter ou de d�nigrer, ne serait pas punissable. Cet ajout semble quelque peu surprenant aux co-rapporteurs dans la mesure o� ils avaient cru comprendre que l�l�ment intentionnel de linfraction avait d�j� �t� introduit par le 3�me paquet. Ils sont �galement surpris du maintien de linfraction doutrage � la nation turque, laquelle, lorsquelle est commise par un Turc � l�tranger, a pour cons�quence que la peine applicable peut �tre augment�e dun tiers jusqu� la moiti�.
179. Les co-rapporteurs rappellent que dapr�s la jurisprudence de la CEDH, les limites de la critique admissible sont plus larges � l�gard du gouvernement[77] que dun simple particulier ou m�me dun homme politique et que la position dominante occup�e par les autorit�s leur commande de faire usage de retenue dans lusage de la voie p�nale[78]. En cons�quence, les co-rapporteurs recommandent labolition pure et simple de larticle 159 du code p�nal turc ou � tout le moins, la suppression compl�te de peine privative de libert� et son remplacement par une amende.
180. Larticle 312 du Code p�nal, qui r�prime lincitation � la haine entre les peuples a aussi �t� l�g�rement modifi� par la loi du 18 f�vrier 2002 : la peine peut toujours aller de 6 mois � 2 ans demprisonnement mais lamende a disparu pour le d�lit consistant � parler ouvertement en faveur dun crime ou � inciter � d�sob�ir aux lois. La peine maximale reste fix�e � 3 ans pour incitation du public � la haine (suppression de lamende l� aussi) mais le crit�re datteinte � lordre public a �t� rajout�. La peine minimale reste fix�e � un an de prison.
181. Larticle 7 � 2 de la loi anti-terreur de 1991 a aussi �t� modifi�, toujours par la loi du 18 f�vrier 2002 (1er paquet), puis ensuite par le 7�me paquet dao�t 2003 : lassistance et la propagande en faveurs dorganisations interdites, mais uniquement lorsquelles pr�nent lusage de m�thodes terroristes,restent passibles de 1 � 5 ans de prison et maintenant aussi dune amende de 500 millions � 1 milliard de TL.
182. En f�vrier 2002, avec le 1er paquet de r�formes, larticle 8 de la loi anti-terreur, qui vise la propagande s�paratiste par voie de presse, d�crits, m�dias audiovisuels ou de manifestations a �t� modifi� : il continuait de pr�voir de 1 � 3 ans de prison ainsi quune amende de 1 � 3 milliards de TL. En revanche, la peine ne pouvait �tre augment�e dun tiers que si la propagande en question avait encourag� lutilisation de m�thodes terroristes. A peu pr�s les m�mes peines �taient applicables aux �diteurs et propri�taires de m�dias. Par contre linterdiction d�mettre n�tait plus quau maximum de 7 jours (au lieu de 15 auparavant).
183. Le 6�me paquet[79] (loi n� 4928 du 19 juillet 2003) a finalement totalement abrog� larticle 8 de la loi anti-terreur. Toutes les enqu�tes pr�paratoires introduites en vertu de cet article seront conclues par une ordonnance de non-lieu. Les personnes d�tenues en vertu de cet article seront lib�r�es soit par le Procureur si elles nont pas encore �t� inculp�es soit par le tribunal comp�tent si des poursuites ont �t� engag�es. Les cons�quences des condamnations en vertu de cet article seront annul�es, que la peine soit ou non purg�e ou quelle ait ou non acquis lautorit� de la chose jug�e. Toutes ces affaires, quelles soient ou non pendantes et ce � nimporte quel stade de la proc�dure, y compris au stade de lex�cution des peines, seront � traiter en priorit� par les tribunaux.
184. Cette r�forme est tr�s importante, notamment parce quelle permettra sans doute de mettre fin au contr�le de lex�cution par le Comit� des Ministres des 17 arr�ts de la CEDH o� la Cour avait constat� une violation de larticle 10 de la Convention europ�enne des Droits de lHomme.
185. De lavis de certains juristes, les modifications ci-dessus, � lexception de labrogation pure et simple de larticle 8 de la loi anti-terreur, seraient purement cosm�tiques : il ny a toujours pas dexcuse de bonne foi ni de crit�re clair concernant lincitation � la violence et le quantum minimum des peines pr�vues reste excessif. Pour les co-rapporteurs, il convient dattendre pour voir comment les nouvelles dispositions seront appliqu�es par les tribunaux. Le r�le de la Cour constitutionnelle sera important � cet �gard, suite, dune part, � la modification du 5�me paragraphe du pr�ambule de la Constitution, qui ne mentionne plus que les activit�s contraires � lint�r�t national et non plus les id�es et opinions et, dautre part, � la modification de larticle 26 de la Constitution relatif � la libert� dexpression, qui a �t� compl�t� par une liste limitative dexceptions possibles, sur le mod�le du paragraphe 2 de larticle 8 de la CEDH.
f. La libert� dassociation et de r�union
186. La loi sur les associations[80], qui date de 1983, fait partie des 600 lois qui avaient �t� pass�es entre 1980 et 1983 par le conseil national de s�curit� sous lemprise de l�tat durgence et qui ne pouvait �tre attaqu�e par la voie du recours constitutionnel, en vertu de larticle 15 provisoire de la Constitution. Le paragraphe pertinent de cet article a �t� supprim� par la r�forme constitutionnelle doctobre 2001, ce dont il faut se f�liciter. Il nen demeure pas moins quelle porte lempreinte de la conception s�curitaire qui pr�valait apr�s le coup dEtat de 1980 et quelle doit compl�tement �tre revue, comme sy est engag� le Premier ministre. Les co-rapporteurs ont en effet limpression que les restrictions � la libert� dassociation ont �t� partiellement assouplies mais quelles nont pas �t� lev�es et que les principes dun contr�le strict de lEtat restent dactualit�.
- Cr�ation dune association
187. La loi de 1983 sur les associations contient de tr�s nombreuses restrictions � la libert� dassociation. L'article 5 de la loi limite consid�rablement l'objet des associations qui ne peuvent avoir pour but, entre autres, de � porter atteinte � l'unit� indivisible de l'Etat et de la Nation
turcs � et de � promouvoir l'id�e qu'il existe des minorit�s en Turquie fond�e sur des diff�rences de classe, de race, de langue, de religion ou de r�gion ou de cr�er des minorit�s en prot�geant, promouvant, d�fendant ou r�pandant des langues ou cultures diff�rentes de la langue ou de la culture turque[81] �.188. Cette restriction a �t� partiellement lev�e par la loi du 9 avril 2002 (2�me paquet), puis par la loi du 11 janvier 2003 (4�me paquet), qui a reformul� larticle 5, notamment en y ajoutant les restrictions pr�vues � larticle 11 � 2 de la CEDH : dor�navant ne seront plus interdites que les associations qui visent � � cr�er des diff�rences de race, religion, secte, r�gion et des minorit�s et � porter atteinte � la structure unitaire de lEtat �. Il semblerait donc qu� lavenir on puisse promouvoir au moins lid�e quil existe des minorit�s en Turquie, avec des langues et des cultures diff�rentes. A noter quil reste interdit de diffamer ou de d�nigrer la personne, luvre ou la m�moire dAtat�rk.
189. Larticle 33 de la Constitution relatif � la libert� dassociation a �t� modifi� le 17 octobre 2001. Le refus denregistrement des statuts dune association, sa dissolution ou la suspension de ses activit�s rel�vent maintenant dans tous les cas dun contr�le judiciaire : toute d�cision administrative en la mati�re devra �tre soumise � un juge dans les 24 heures et si le juge ne statue pas sous 48 h, elle sera automatiquement annul�e. Il sagit l� dun progr�s important qui devrait permettre le limiter larbitraire et le harc�lement dont les associations ont souvent fait lobjet par le pass�.
- Activit�s internationales
190. Les articles 7, 11 et 12 de la loi restreignant les activit�s des associations turques � l�tranger et interdisant les activit�s dassociations �trang�res en Turquie ont �t� annul�es par le les lois du 9 avril 2002 (2�me paquet) et du 9 ao�t 2002 (3�me paquet). Mais le nouvel article 11, adopt� en ao�t 2002, continue de pr�voir que les associations turques ne peuvent �tre membres d'autres organisations internationales ou participer � des activit�s internationales sans avoir au pr�alable obtenu une autorisation du Conseil des Ministres, saisi par le ministre de l'Int�rieur, et apr�s avis du ministre des Affaires �trang�res. Cette proc�dure a �t� simplifi�e mais pas supprim�e avec le 7�me paquet dao�t 2003 : dor�navant il ny aura plus dintervention du Conseil des ministres.
191. A d�faut de permission, l'association pouvait �tre imm�diatement dissoute par le Conseil des Ministres sur demande du Ministre de l'Int�rieur, apr�s avis du Ministre des Affaires Etrang�res. Cette possibilit� de dissolution a disparu mais la permission peut �tre retir�e si lassociation �trang�re, dont une association turque est membre ou avec laquelle elle coop�re, exerce des activit�s contraires aux lois turques et aux int�r�ts nationaux turcs. La m�me proc�dure s'impose, en vertu du nouvel article 12, aux associations dont le si�ge est � l'�tranger qui souhaitent ouvrir un bureau en Turquie.
192. La loi adopt�e en ao�t 2002 pr�voit quune association �trang�re peut op�rer en Turquie � dans les cas o� une coop�ration internationale est jug�e utile en vue de b�n�ficier de sa comp�tence et de ses connaissances dans les domaines de la culture, de l�conomie, des questions techniques, du sport et de la science �. Les co-rapporteurs ne sont pas s�rs que cette d�finition sapplique � Amnesty International, qui a obtenu l'autorisation de cr�er une section en Turquie en mars 2002, apr�s s'en �tre vue refuser l'autorisation � plusieurs reprises.
193. Par contre, et il sagit dun progr�s notable, les associations qui souhaitent inviter en Turquie des membres dassociations �trang�res ou participer � des r�unions � l�tranger nont plus lobligation dobtenir une autorisation pr�alable : en vertu de larticle 43 de la loi, tel quamend� en avril 2002 (2�me paquet), il suffit maintenant quelles en informent lautorit� comp�tente au moins 7 jours � lavance, en donnant adresse, date, lieu et but de la r�union et en fournissant la liste des participants.
194. En vertu de l'article 60, les associations ne peuvent toujours pas recevoir de fonds �trangers (particuliers ou institutions) sans l'autorisation pr�alable du Ministre de l'Int�rieur.
195. L'article 38, modifi� en avril 2002 (2�me paquet) limite toujours le champ d'activit� des associations d'�tudiants � leur strict domaine d'activit� (�ducation, enseignement, travail, alimentation, sant� physique et morale, ). Le 7�me paquet dao�t 2003 a de nouveau amend� larticle 38, permettant aux �tudiants de cr�er des associations ayant pour but lart, la culture et le science. Linterdiction pour les fonctionnaires, pr�vue � l'article 39, de fonder des associations en dehors de leur strict domaine d'activit� a �t� lev�e par un amendement de la loi en ao�t 2002 (non produit par le gouvernement, qui indique que cet article a purement et simplement �t� abrog�)). Toutefois, les juges doivent obtenir au pr�alable l'autorisation du Ministre de la Justice, et les autres fonctionnaires celle du Premier Ministre.
- Contr�le de lactivit� des associations
196. L'article 6 interdisait l'utilisation de toute autre langue que le turc non seulement par �crit dans les statuts et les documents mais �galement oralement dans les r�unions priv�es des membres de l'association. Cette restriction a �t� lev�e par la loi du 11 janvier 2003(4�me paquet), les associations ayant dor�navant l'obligation d'utiliser la langue turque uniquement dans leurs travaux officiels.
197. Jusquici, en vertu de l'article 44, les autorit�s locales disposaient d'un v�ritable droit de censure puisque les associations �taient tenues de soumettre leurs interventions publiques, tracts ou autres publications, au Procureur et au repr�sentant du Gouverneur avant toute diffusion, laquelle ne pouvait avoir lieu dans la presse avant l'expiration d'un d�lai de 24 heures. Cette censure pr�alable a disparu avec le 4�me paquet du 11 janvier 2003 : les communiqu�s de presse, publications, tracts etc. pourront seulement �tre confisqu�s sur ordre de la plus haute autorit� administrative locale, qui devra en avertir le juge de 1�re instance dans les 24 h. Le juge devra statuer sur la d�cision de confiscation dans les 48h faute de quoi la d�cision administrative est automatiquement annul�e.
198. A noter enfin que la loi du 11 janvier (4�me paquet) a modifi� les articles 45 et 46 sur le contr�le et linspection des associations en pr�voyant la cr�ation dune direction des associations au sein du minist�re de lInt�rieur. Le contr�le des activit�s des associations ne rel�vera donc plus, comme c�tait le cas jusqu� pr�sent, de la direction de la s�ret� du minist�re.
199. Les quelques exemples ci-dessus de modifications apport�es par les paquets de r�forme successifs d�montrent, de lavis des co-rapporteurs, quune refonte totale de la loi sur les associations et des dispositions correspondantes figurant notamment dans le code civil - simpose. La modifier au coup par coup et article par article nuit en effet � la coh�rence de lensemble et n�cessite ensuite des correctifs. En outre, nayant pu examiner la loi dans sa totalit�, les co-rapporteurs ne sont pas � m�me de sassurer quelle est maintenant tout � fait en conformit� avec les standards europ�ens, notamment ceux de la CEDH. Ils invitent par cons�quent les autorit�s turques � soumettre la loi sur les associations dans son int�gralit� pour expertise du Conseil de lEurope.
- Libert� de r�union et de manifestation
200. En ce qui concerne le droit � la libert� de r�union et de manifestation, les co-rapporteurs ont not� avec satisfaction que le 7�me paquet dao�t 2003 a apport� dimportants assouplissements � la loi n� 2911 du 6 octobre 1983 : une manifestation ne pourra dor�navant plus �tre interdite ou report�e que sil y a clairement et actuellement un danger que des infractions p�nales seront commises. En outre la dur�e maximale dinterdiction dune manifestation ou de report de celle-ci a �t� r�duite et ne sera plus que dun mois au maximum. Les co-rapporteurs aimeraient en revanche disposer dinformations suppl�mentaires sur la proc�dure dautorisation pr�alable en vigueur et sur les �ventuels recours judiciaires disponibles pour contester une interdiction de manifester.
- Les minorit�s religieuses
201. Les seules minorit�s reconnues comme telles en Turquie sont les minorit�s religieuses, auxquelles le trait� de Lausanne de 1923 accorda des droits sp�cifiques. 98% de la population en Turquie est de confession musulmane sunnite[82]. Les 2 % restants sont compos�s de chr�tiens orthodoxes, de juifs, de catholiques et de protestants. Les orthodoxes syriaques, les protestants, les Bahais, et les chr�tiens maronites, bulgares, chald�ens, nestoriens et g�orgiens ne b�n�ficient pas du statut du trait� de Lausanne, r�serv� aux orthodoxes arm�niens et grecs et aux juifs. Il resterait moins de 100.000 chr�tiens en Turquie, divis�s en de nombreuses Eglises, sur une population de pr�s de 70 millions d'habitants. Les Arm�niens -- environ 60.000 personnes--, sont pour la plupart fid�les � l'Eglise apostolique d'Arm�nie dirig�e par le patriarche Mesrob Moutafian (Mesrob II) qui si�ge � Istanbul. Les autres sont catholiques romains ou orientaux sous la conduite d'un Catholicos si�geant � Beyrouth. L'Eglise arm�nienne compte une quarantaine d'�glises et des �coles soumises au contr�le de l'Etat. Les juifs sont tr�s peu nombreux (environ 25 000).
202. L'Eglise orthodoxe grecque compte quelque 3 000 fid�les vivant surtout � Istanbul, o� ils �taient plusieurs centaines de milliers au d�but du si�cle. Leur patriarche Bartholom�e Ier est le chef spirituel de tous les orthodoxes d'Europe occidentale. Il est citoyen turc et son �lection est soumise � l'approbation de l'Etat turc, mais ses relations ne sont pas toujours faciles avec les autorit�s qui se m�fient de son r�le international et rejettent son titre oecum�nique. Il a notamment d�plor� l'absence de progr�s concernant la r�ouverture de la facult� de th�ologie de Heybeliada (Halki en grec), sur une des �les au large d'Istanbul, ferm�e en 1971.
203. Le probl�me essentiel rencontr� par les minorit�s religieuses en Turquie �tait labsence de personnalit� juridique et limpossibilit� dacqu�rir ou de vendre des biens immobiliers. Dapr�s le gouvernement ce probl�me est r�gl� depuis la modification de larticle 1 de la loi n� 2762 de 1935 sur les fondations, effectu�e par le 3�me paquet du 9 ao�t 2002 : dor�navant les communaut�s religieuses, m�me sans personnalit� juridique, pourront acqu�rir et vendre des biens immobiliers avec lautorisation du Conseil des Ministres, � condition de faire enregistrer leurs biens existants dans un d�lai de six mois apr�s lentr�e en vigueur de la loi, soit au plus tard le 9 f�vrier 2003.
204. Ce d�lai sav�ra trop court et le 4�me paquet du 11 janvier 2003, reprenant exactement le m�me texte quen ao�t 2002 (mais en rempla�ant la permission � obtenir du Conseil des ministres par celle de la direction g�n�rale des fondations, organisme rattach� au Premier ministre) ajouta quun d�cret dapplication minist�riel viendrait pr�ciser les modalit�s de mise en uvre de cet article. Le d�cret en question fut publi� le 24 janvier 2003, mais le d�lai fix� pour faire enregistrer les biens immobiliers existants restait fix� au 9 f�vrier 2003 et se r�v�la donc impossible � respecter. Cest pourquoi le 6�me paquet du 19 juillet 2003 ajouta un article provisoire � la loi sur les fondations pr�voyant que lenregistrement devait �tre effectu� dans un d�lai de 18 mois � compter de lentr�e en vigueur de la loi. Au 1er d�cembre 2003, pr�s de 2000 demandes �manant denviron 116 fondations ont d�j� �t� d�pos�es aupr�s de la direction g�n�rale des fondations.
205. Les co-rapporteurs ne disposent pas dinformation sur les difficult�s �ventuelles de mise en uvre de ce d�cret mais labsence de personnalit� juridique des Eglises ou communaut�s religieuses leur semble pr�occupante[83].
206. Il leur semble tout aussi pr�occupant que, plus de deux ans et demi apr�s la conclusion dun r�glement amiable devant la Cour, les autorit�s turques naient toujours pas trouv� le moyen dex�cuter les termes de laccord auquel elles �taient parvenues dans laffaire de lInstitut des pr�tres fran�ais (arr�t du 14 d�cembre 2000). Ainsi que le relevait le pr�sident du Comit� des Ministres dans une lettre adress�e au ministre turc des Affaires �trang�res en juin 2003, cette situation est sans pr�c�dent. Les co-rapporteurs esp�rent que la d�cision du Conseil dEtat du 30 d�cembre 2003 permettra de d�bloquer la situation dans les plus brefs d�lais.
207. A noter �galement que le 6�me paquet de juillet 2003 a modifi� la loi n� 3194 de 1985 de la loi sur la construction, qui ne visait que la construction de mosqu�es. Le terme � mosqu�e � a �t� remplac� par le terme plus g�n�ral de � lieu de culte �, et lautorisation du mufti local nest plus n�cessaire, ce qui permettra aux communaut�s religieuses non musulmanes de demander �galement des permis de construire.
- Le respect de la la�cit�
208. La Turquie est le seul Etat musulman la�c. Cette la�cit� a �t� voulue et impos�e par Atat�rk et constitue lun des principes fondateurs de la Turquie moderne. Larticle 174 de la Constitution indique encore aujourdhui quaucune disposition de la Constitution ne permet dall�guer linconstitutionnalit� des huit lois de r�forme pass�es entre 1924 et 1934. Ces lois visaient, entre autres, � supprimer les habits et couvre-chefs traditionnels, y compris le voile pour les femmes, � interdire les derviches, � introduire lalphabet latin, � abolir les titres ottomans, � introduire un mariage civil obligatoire et � unifier le syst�me denseignement. Il nest pas exag�r� de dire que ce faisant, Atat�rk imposa ainsi, quasiment du jour au lendemain, une transformation radicale � une soci�t� o� traditionnellement le pouvoir religieux et le pouvoir politique se confondaient.
209. Les co-rapporteurs observent cependant que ce concept de la�cit� na rien � voir avec la s�paration de lEglise et de lEtat, telle quelle est pratiqu�e en France depuis la loi de 1905, qui implique notamment que la France ne reconna�t ni ne subventionne aucun culte. Il ny a pas dEglise dans la religion musulmane, ni de clerg�, ni dautorit� eccl�siastique : il y a une communaut� de croyants. Les 72 000 imams en Turquie sont des fonctionnaires, pay�s et form�s par la direction des affaires religieuses (DIYANET) et dans cette mesure, on pourrait dire que lislam est une religion dEtat. La�cit� en Turquie signifie rel�gation de la religion au niveau de la sph�re priv�e et interdiction dappliquer les lois coraniques dans la vie sociale et politique.
210. Do� la crispation des autorit�s vis-�-vis de tout fondamentalisme, qui est per�u comme un danger pour lexistence de la R�publique. Les co-rapporteurs esp�rent que les attentats dIstanbul des 15 et 20 novembre 2003, dirig�s contre deux synagogues et contre le consulat et une banque britanniques, qui ont �t� revendiqu�s par un obscur groupe islamiste turc, le Front des combattants du Grand Orient, ne renforceront pas ces craintes..
211. Les co-rapporteurs ont en revanche eu du mal � comprendre la pol�mique autour du port en public du foulard islamique par les femmes, alors que les femmes rencontrent bien dautres probl�mes dans la soci�t� turque. Il leur semble excessif de renvoyer pour ce motif des �tudiantes ou de leur interdire de passer des examens. Mais ils comprennent la crainte des femmes qui veulent pouvoir porter un foulard si elles le souhaitent mais ne veulent pas quon le leur impose. Pour elles, linterdiction compl�te du foulard est une garantie. Quoi quil en soit, la CEDH est saisie de deux affaires de ce genre et tranchera.
212. Toute proposition de r�introduction de la charia par contre inqui�te � juste titre les autorit�s, parce quelle contient des principes et des r�gles qui sont contraires aux droits de lhomme et incompatibles avec une soci�t� d�mocratique, ainsi que la Cour europ�enne des Droits de lHomme la rappel� dans son arr�t relatif � la dissolution du parti Refah.
213. Le conflit entre 1984 et 1999 a fait pr�s de 35 000 morts, dont pr�s de 5 000 civils, et a laiss� de profondes traces dans le pays. Il est certain que le conflit et la mani�re dont il a �t� g�r� par la Turquie ont retard� son entr�e dans lUnion europ�enne, sans parler des cons�quences �conomiques et sociales quil a entra�n�es pour la r�gion comme pour la Turquie dans son ensemble. Les Kurdes ne sont pas la seule minorit� en Turquie mais ils sont particuli�rement nombreux : 10 � 12 millions de personnes, selon les estimations[84]. Cette circonstance et le fait que de multiples violations des droits de lhomme ont eu lieu dans cette r�gion ont conduit les co-rapporteurs � se rendre dans lest et le sud-est de la Turquie plut�t que dans le nord ou le sud.
214. Lors de leur deuxi�me visite (24-28 mai 2003), les co-rapporteurs sont all�s � Diyarbakir et � Bing�l, qui venait de subir le 1er mai un terrible tremblement de terre qui causa la mort de pr�s de 200 personnes, dont 80 enfants �cras�s sous les d�combres de leur pensionnat. Les co-rapporteurs se sont �galement rendus dans la petite ville de Lice, qui avait �t� le th��tre, en octobre 1993, de tr�s violents affrontements entre le PKK et les forces de s�curit� au cours desquels 16 personnes (dont le g�n�ral de gendarmerie de Diyarbakir) avaient �t� tu�es et 19 bless�es. La ville fut quasiment d�truite : plus de 400 magasins et plus de 600 maisons furent partiellement ou totalement endommag�s[85].
215. De nombreuses violations des droits de lhomme ont �t� commises par les membres du PKK mais les moyens de lutte anti-terroriste mis en uvre par les forces de s�curit� pendant cette p�riode ont donn� lieu � de graves abus, tels que tortures, arrestations arbitraires, disparitions et destruction de villages et de r�coltes, qui ont �t� sanctionn�s par la Cour europ�enne des Droits de lHomme. La strat�gie des autorit�s consistant � armer des � gardes de village � kurdes a sans doute �t� militairement payante pour tenter de briser le soutien -au moins passif- de la population aux activit�s du PKK mais elle a plac� la population civile face � un choix corn�lien : soit elle acceptait dassurer la s�curit� pour le compte des autorit�s, avec des sanctions en cas de refus, y compris des destructions de villages et de r�coltes, soit elle passait pour tra�tre aux yeux du PKK et encourait, l� aussi, des repr�sailles.
216. Toutefois, suite � la capture du leader du PKK, Abdullah ��alan, au Kenya en f�vrier 1999, le PKK se trouva d�capit� et d�cida de cesser la lutte arm�e en septembre 1999. Elle na, heureusement, pas repris depuis, sauf quelques incidents isol�s, m�me si un certain nombre de combattants du PKK[86] se sont retranch�s dans les montagnes, notamment au nord de lIrak. Tous les interlocuteurs rencontr�s par les co-rapporteurs dans lEst et le Sud-Est ont indiqu� que la situation s�tait consid�rablement am�lior�e depuis la fin des hostilit�s en 1999 et que la lev�e de l�tat durgence allait encore y contribuer.
a. La lev�e de l�tat durgence
217. Les co-rapporteurs ont �t� soulag�sdapprendre que l�tat durgence avait enfin �t� lev� dans les provinces de Hakkari et Tunceli au 30 juillet 2002 et quil la �t� au 30 novembre 2002 dans les deux derni�res encore soumises � l�tat durgence, � savoir Diyarbakir et Sirnak. Mais il y a encore des barrages routiers et des points de contr�le de la Jandarma, comme les co-rapporteurs ont pu le constater lorsquils se sont rendus de Diyarbakir � Bing�l au mois de mai 2003.
218. Par ailleurs, depuis le d�but des ann�es 1990, la Turquie avait notifi� au Conseil de lEurope des d�rogations en vertu de larticle 15 de la CEDH concernant les garanties offertes par larticle 5 de la Convention en mati�re darrestation et de d�tention. La derni�re d�rogation a �t� retir�e le 29 janvier 2002, ce qui est �galement tr�s positif. Les co-rapporteurs notent enfin qu� aucun moment de la crise irakienne, il na �t� propos� de restaurer l�tat durgence dans les provinces de lEst et du Sud-Est.
b. La loi sur la r�int�gration dans la soci�t� du 29 juillet 2003
219. Les co-rapporteurs sont conscients du fait que la question kurde demeure tr�s sensible en Turquie mais, plus de 4 ans apr�s labandon de la lutte arm�e par le PKK, il leur semble quil est temps de songer � la r�conciliation. Le ministre turc de l'Int�rieur, Abdulkadir Aksu, a propos� le 26 juin 2003 des mesures d'amnistie notamment aux militants kurdes. La loi adopt�e dans la foul�e par la TBMM et qui est entr�e en vigueur le 6 ao�t 2003[87], envisage le pardon pour ceux qui se rendent et qui n'ont pas commis de crimes de sang et des r�ductions de peine pour les autres, � condition qu'ils donnent des informations sur leur organisation. Les dirigeants sont exclus de toute offre d'amnistie. La loi �tait valable pendant six mois et au 6 f�vrier 2004, environ 3000 personnes, la plupart d�tenues dans les prisons turques, ont demand� � en b�n�ficier. Il semblerait donc, que pour linstant, la loi nait pas atteint lun de ses buts, qui �tait dobtenir la reddition des Kurdes retranch�s dans le Nord de lIrak : � peine 700 personnes se seraient ainsi rendues aux autorit�s.
220. L'offre du gouvernement, la huiti�me du genre, a �t� d�nonc�e comme contre-productive par Tuncer Bakirhan, le dirigeant du Parti d�mocratique du peuple (Dehap), le principal parti pro-kurde en Turquie, qui r�clame une amnistie g�n�rale. Une p�tition en ce sens totalisant un million de signatures a �t� remise � la TBMM en juin et un certain nombre de manifestations, souvent organis�es par des associations de femmes, ont �galement eu lieu en mai et en juin et ont �t� dispers�es, violemment para�t-il, par la police.
221. Les co-rapporteurs ont �galement appris que le KADEK a d�cr�t� le 1er septembre 2003 la fin du cessez le feu appliqu� depuis 1999 et mena�ait de reprendre la lutte arm�e si le gouvernement nentamait pas des n�gociations politiques en vue dune amnistie g�n�rale. Ils condamnent fermement cette menace qui nest pas de nature � favoriser une r�conciliation que tout le monde appelle de ses vux. Les co-rapporteurs estiment que les r�gles dun �tat de droit doivent �tre respect�es par tout le monde, y compris par les Kurdes, qui ne sauraient revendiquer une participation � la vie d�mocratique du pays tout en continuant de pr�ner lusage de la violence et du terrorisme.
222. Il est sans doute encore trop t�t pour envisager sans autre condition une amnistie g�n�rale, notamment pour tous ceux qui ont commis des crimes de sang.Mais la loi sur la r�int�gration a au moins le m�rite doffrir une porte de sortie � tous ceux qui aspirent � revenir au pays pour y reprendre une vie normale. Elle ne suffira pas � cr�er le climat de confiance dont pourtant la Turquie et ses habitants ont grandement besoin. Il est �vident que 15 ans de conflit arm� ont caus� de part et dautre des blessures profondes qui ne seffaceront pas facilement.
223. Les co-rapporteurs se demandent sil ne faudrait pas envisager � terme la cr�ation dune commission de r�conciliation, qui pourrait d�buter par un forum de discussion o�, patiemment et dans la plus grande objectivit� possible, les faits soient dabord �tablis, puis �tudi�s et discut�s. Il sagit de mettre � jour et de faire accepter, de part et dautre, les raisons qui ont conduit � un conflit aussi meurtrier, de reconna�tre les responsabilit�s des uns et des autres et ensuite de d�gager des solutions pour surmonter les haines et les animosit�s accumul�es et r�soudre les probl�mes, chemin qui passera n�cessairement par le d�veloppement �conomique de la r�gion (voir infra).
224. Abdullah �calan, qui a admis �tre le fondateur et le leader du PKK, est d�tenu depuis f�vrier 1999 sur l�le prison dImrali. Il avait �t� condamn� � la peine capitale le 29 juin 1999 par la Cour de s�ret� de lEtat dAnkara, apr�s que, le 18 juin, la TBMM eut modifi� larticle 143 de la Constitution pour exclure les magistrats militaires de la composition des cours de s�ret� de lEtat. Si labolition de la peine de mort a tant tard� � �tre vot�e par le parlement, alors quaucune ex�cution nest plus intervenue depuis 1984, cest incontestablement � cause du cas ��alan : une grande partie de la population comme de la classe politique ne pouvait tout simplement pas admettre quil puisse �chapper � un ch�timent m�rit�.
225. Labolition de la peine de mort sest faite en deux temps : en octobre 2001, larticle 38 de la Constitution fut modifi� dans le sens que la peine capitale ne pourrait plus �tre prononc�e ni ex�cut�e sauf en temps de guerre ou de danger imminent de guerre, ou en cas dactes terroristes, ce qui excluait ��alan. Cette restriction a �t� abolie par le parlement lors de ladoption du 5�me paquet de r�formes dao�t 2002 et la peine capitale d��alan a �t� commu�e en d�tention criminelle � perp�tuit� par d�cision de la Cour de s�ret� de lEtat du 3 octobre 2002, sans aucune possibilit� toutefois de lib�ration conditionnelle[88] ou de remise de peine. Il purgera donc sa peine jusqu� sa mort.
226. Le 12 mars 2003, la Cour europ�enne, dans un arr�t de chambre, a jug� que lors de la garde � vue et du proc�s devant la Cour de s�ret� de lEtat, M. ��alan avait �t� victime de violations des articles 3, 5 et 6 de la CEDH. Tant le requ�rant que le gouvernement ont ensuite demand� le renvoi de cette affaire devant la Grande Chambre, ce qui a �t� accept� le 11 juillet 2003. En labsence dune d�cision d�finitive, les co-rapporteurs sabstiendront donc de tout commentaire.
227. En revanche, ils souhaitent mentionner le probl�me des conditions de d�tention du plus c�l�bre prisonnier de Turquie : lors de leur visite en f�vrier 2003, ils ont en effet �t� inform�s que M. ��alan, d�tenu � lisolement depuis 1999, navait plus re�u la visite de ses avocats et de sa famille (limit�e � ses fr�res et surs) depuis le 27 novembre 2002. Les autorit�s ont fait �tat des mauvaises conditions climatiques qui emp�cheraient le bateau de prendre la mer et ont indiqu� que le CPT venait de se rendre � Imrali (les 16 et 17 f�vrier). La visite du CPT avait �t� d�clench�e � la suite de plusieurs rapports d'apr�s lesquels proches et avocats d'Abdullah ��alan �taient confront�s � de consid�rables difficult�s d'acc�s � l'�le d'Imrali pour lui rendre visite. La d�l�gation du CPT a r�examin� ses conditions de d�tention � la lumi�re des recommandations faites par le CPT apr�s ses pr�c�dentes visites � la prison d'Imrali (en mars 1999 et septembre 2001). Les co-rapporteurs esp�rent vivement que les recommandations du CPT, contenues dans un rapport publi� le 25 f�vrier 2004, avec les observations du Gouvernement, continueront d�tre syst�matiquement prises en compte par les autorit�s.
d. La r�vision des proc�s Zana et autres
228. Dans sa R�solution 1256 (2001), lAssembl�e demandait � la Turquie, dans lattente dun arr�t de la Cour europ�enne des Droits de lHomme dans laffaire de Mme Leyla Zana et autres, dexaminer ou, �ventuellement, de cr�er les possibilit�s juridiques permettant de r�viser les proc�dures de poursuites et les peines prononc�es ensuite � lencontre des anciens d�put�s du DEP emprisonn�s depuis lors.
229. Larr�t Sadak et autres (dont Mme Zana et MM. Dicle et Dogan) a �t� rendu le 17 juillet 2001 : la Cour a jug� que les quatre parlementaires en question navaient pas b�n�fici� dun proc�s �quitable, notamment parce quils navaient pu obtenir la convocation de certains t�moins � charge et parce quen derni�re minute, les faits de trahison contre lint�grit� de lEtat reproch�s aux quatre parlementaires sous langle de larticle 125 du Code p�nal furent re-qualifi�s en appartenance � bande arm�e (article 168 du Code p�nal), sans quils aient eu la possibilit� dadapter leur d�fense en cons�quence. Ils purgent actuellement la peine de 15 ans de prison qui leur a �t� inflig�e et sont en principe lib�rables en 2005.
230. Face � lindignation g�n�rale suscit�e par cette condamnation et aux demandes insistantes dorganiser une r�vision de ce proc�s, la TBMM, dans le cadre du 3�me paquet de r�formes, adopt� le 3 ao�t 2002, modifia les codes de proc�dure civile et p�nale pour introduire une possibilit� de r�vision des proc�s suite � un arr�t de violation de la CEDH. Mais lentr�e en vigueur de cette partie de la loi �tait fix�e � un an apr�s la promulgation, soit au 2 ao�t 2003, et ne concernait que les requ�tes introduites devant la Cour apr�s lentr�e en vigueur de la loi. Mme Leyla Zana et autres ne pouvaient donc en b�n�ficier.
231. Le 23 janvier 2003, lors de ladoption du 5�me paquet de r�formes par le parlement, la possibilit� de demander la r�vision dun proc�s fut �tendue y compris aux affaires d�j� jug�es par la CEDH. Le d�lai pour introduire une demande de r�vision a �t� fix� � un an apr�s la date dentr�e en vigueur de la loi, tant pour les affaires civiles que p�nales. Le 6�me paquet de juillet 2003 a �galement introduit, avec le m�me d�lai dun an, une possibilit� de r�vision des proc�s administratifs. Pour les arr�ts d�finitifs rendus par la Cour apr�s la date dentr�e en vigueur de la loi, le d�lai dun an pour demander la r�vision court � compter du prononc� de larr�t de la Cour.
232. Les co-rapporteurs f�licitent les autorit�s turques pour cette importante r�forme, qui a permis notamment aux avocats de Mme Leyla Zana et autres de demander la r�ouverture du proc�s d�s le 4 f�vrier 2003. Dans cette affaire, la cour de s�ret� dAnkara tient depuis le 28 mars 2003 des audiences mensuelles.. En revanche, les demandes de mise en libert� provisoire ont jusqu� pr�sent toutes �t� rejet�es. Pour les co-rapporteurs, ces d�cisions de rejet sont dautant plus incompr�hensibles et regrettables que Mme Zana comme les autres, d�tenus depuis plus de dix ans, sont lib�rables en juin 2005 et quil ne saurait �tre soutenu que les infractions pour lesquelles ils sont rejug�s constituent un grave danger pour lordre public, vu lanciennet� des faits.
e. Loctroi de droits culturels
233. La grande majorit� des Kurdes ne se battent pas pour lind�pendance et ont accept� de vivre au sein de lEtat turc. Mais ils veulent, � juste titre, obtenir la reconnaissance de leur existence en tant que groupe ethnique minoritaire et loctroi dune certaine autonomie culturelle et �conomique. Que la langue turque demeure la langue commune denseignement ne leur pose pas de probl�me[89] mais ils aimeraient que le kurde[90] puisse �galement �tre enseign�, au m�me titre que langlais ou lallemand, dans les �coles, publiques ou priv�es. Enfin, linterdiction totale de lutilisation du kurde comme langue v�hiculaire, que ce soit dans les relations avec ladministration, dans la vie culturelle ou politique[91], linterdiction de lutilisation du kurde dans la presse ou la t�l�vision leur semble une n�gation de leur identit�.
234. Les autorit�s turques ont expliqu� aux co-rapporteurs que les Kurdes jouissent, comme tous les autres citoyens turcs, des droits civils et politiques et quils ne font lobjet daucune discrimination, notamment pour ce qui est de lacc�s � la fonction publique ou aux fonctions �lectives (il y aurait plus de 200 parlementaires dorigine kurde � la TBMM). Lid�e quon puisse revendiquer, en tant que minorit� nationale, des droits suppl�mentaires � ceux garantis � tous les autres citoyens leur semble relever dun s�paratisme dangereux pour lunit� de la nation. La Turquie na donc ni sign� ni ratifi� la convention cadre pour la protection des minorit�s nationales ni la Charte europ�enne des langues r�gionales et minoritaires et nenvisage de le faire, le cas �ch�ant , que lorsque dautre grands Etats europ�ens sy seront r�solus.
235. Quatre ann�es apr�s la fin du conflit, les autorit�s turques semblent enfin admettre que la question kurde ne se r�soudra pas seulement par les armes et la r�pression. Le gouvernement pr�c�dent a eu le courage initial de proposer et de faire adopter des r�formes, qui sont certes encore modestes et n�cessiteront du temps pour passer dans les faits, mais qui ont le m�rite incontestable de mettre fin � la n�gation compl�te du probl�me kurde.
- Les �missions de radio et t�l�vision dans une langue autre que le turc
236. Le paragraphe 3 de larticle 26 de la Constitution, qui restreignait lusage de langues interdites par la loi, a �t� supprim� lors de la r�vision constitutionnelle doctobre 2001. Le 3�me paquet de r�forme du 9 ao�t 2002 a modifi� larticle 4 de la loi de 1994 sur la radiodiffusion pour introduire une disposition autorisant des �missions de radio et de t�l�vision � dans les diff�rentes langues et dialectes utilis�s traditionnellement par les Turcs dans leur vie quotidienne�. Le d�cret dapplication paru le 18 d�cembre 2002 pr�voyait toutefois que les �missions de radio et de t�l�vision �taient limit�es � quatre heures et deux heures par semaine respectivement, quelles devaient �tre traduites ou sous-titr�es en turc et quelles ne pouvaient concerner que des programmes culturels, musicaux ou dinformation. Le d�cret ne pr�voyait que des �missions de la radio et de la t�l�vision publiques. Cette loi na pas �t� suivie deffet car la RT�K a saisi la Cour constitutionnelle dun recours, dont lexamen est toujours pendant. Il ny a donc toujours pas officiellement d�missions en kurde mais les co-rapporteurs ont �t� inform�s, lors de leur visite � Diyarbakir, que la population, au moins celle qui a les moyens de sacheter un t�l�viseur, regarde une cha�ne, Medya TV, qui est retransmise par satellite depuis la Belgique et que les autorit�s nont pas r�ussi � interdire.
237. Le 6�me paquet du 19 juillet a de nouveau modifi� larticle 4 de la loi de 1994 et pr�voit dor�navant que des cha�nes de radio ou de t�l�vision priv�es peuvent �galement diffuser des programmes dans une langue autre que le turc. Le d�cret dapplication pr�par� par la RT�K le 8 novembre 2003, apr�s examen en Conseil des Ministres, a �t� publi� le 25 janvier 2004. De lavis des co-rapporteurs, il faudra attendre de voir comment la situation �voluera concr�tement. Certaines cha�nes de t�l�vision priv�es, comme par exemple NTV, jugeront sans doute que des �missions en kurde ne sont pas rentables �conomiquement. En tout cas, la lib�ralisation intervenue est un grand progr�s.
- Lenseignement dautres langues que le turc
238. La deuxi�me r�forme majeure concerne le droit � lenseignement des langues autres que le turc. Le 3�me paquet de r�forme du 9 ao�t 2002 a modifi� larticle 2 de la loi n� 2923 sur lenseignement des langues �trang�res, qui, elle aussi, date de l�poque du coup dEtat puisque adopt�e le 14 octobre 1983. D�sormais, sous r�serve dun d�cret dapplication, des �coles priv�es pour enseigner les langues et dialectes utilis�s par les Turcs dans leur vie quotidienne pourront �tre ouvertes. Le d�cret dapplication, paru le 20 septembre 2002, a suscit� des critiques notamment parce quil fallait cr�er de toutes pi�ces de nouvelles �coles, avoir un dipl�me et la nationalit� turque pour enseigner et parce que les cours �taient limit�s aux enfants ayant accompli leur scolarit� obligatoire, donc �g�s de plus de 15 ans.
239. Une partie de ces critiques a fait lobjet dun ajustement op�r� par le 7�me paquet de r�formes du 7 ao�t 2003 : larticle 2 de la loi a de nouveau �t� modifi� et pr�voit maintenant aussi la possibilit� denseigner les langues traditionnelles autres que le turc dans les �coles de langue existantes. Le d�cret dapplication de cette loi, qui annule le pr�c�dent dat� de septembre 2002, a �t� publi� le 5 d�cembre 2003. Larticle 8 de ce d�cret pr�voit maintenant que les enfants inscrits � l�cole primaire ou dans le secondaire peuvent �galement participer � ces cours. Suite � ce d�cret, des cours de langues ont d�marr� � Batman, Sanliurfa et Van en janvier 2004.
240. Pour les co-rapporteurs, ces nouvelles dispositions sont un pas dans la bonne direction, quil convient de saluer, comme lont fait tous les interlocuteurs rencontr�s dans le sud-est de la Turquie. Il faut toutefois �tre conscient que lapplication effective de ces r�formes demandera du temps : il faudra cr�er des cursus universitaires pour former des professeurs susceptibles denseigner la langue ou les langues kurdes, ainsi que les autres langues minoritaires parl�es dans le pays. Or, � lheure actuelle il ny a pas en Turquie de professeur de langue kurde puisque le kurde �tait interdit jusquici et que le d�cret dapplication interdit le recrutement de professeurs �trangers. A terme, le kurde devrait aussi pouvoir �tre enseign� � l�cole publique ou priv�e, avant l�ge de 15 ans, comme lest le breton, le basque ou lalsacien en France.
- Lutilisation des langues autres que le turc dans les relations avec ladministration
241. Les co-rapporteurs estiment que lutilisation de la langue kurde comme langue v�hiculaire dans les relations avec ladministration dans lest et le sud-est de la Turquie est une question fondamentale qui d�passe de beaucoup les querelles sur lidentit� culturelle. En effet la combinaison de facteurs, comme lexode rural, le sous- d�veloppement de la r�gion, la pauvret�, le r�le de la femme, le haut degr� de non scolarisation, notamment des jeunes filles, fait quun grand nombre de familles dont surtout les femmes et les enfants ne parlent pas le turc et sont de ce fait coup�s de toute communication avec le monde en-dehors de leur famille ou de leur village. Ils nont donc pas acc�s aux informations les plus �l�mentaires et indispensables, telles que les r�gles dhygi�ne ou dalimentation, des questions de sant� publique, sans parler de leur participation � la vie sociale et politique du pays.
242. Tout en comprenant le souci des gouvernements successifs de pr�server lint�grit� du territoire et de respecter l�galit� de tous les citoyens turcs, les co-rapporteurs estiment que la non- participation dune partie importante de la population aux �chelons les plus �l�mentaires de la soci�t� constitue non seulement une violation des droits de lhomme, mais une menace plus grave pour la coh�sion du pays que le fait dadmettre la langue kurde comme langue v�hiculaire autoris�e. Ils recommandent donc aux autorit�s de faire un effort pour mettre des interpr�tes � la disposition de la population non turcophone de certaines r�gions de Turquie en vue de garantir lacc�s � la justice, ladministration et les soins de sant� et daide sociale.
243. Enfin, les co-rapporteurs f�licitent les autorit�s turques pour une autre r�forme importante, celle relative au choix du pr�nom des enfants par leurs parents : il semblerait quavec la modification de larticle 16 de la loi sur le recensement de 1972, op�r�e par le 6�me paquet de r�forme du 19 juillet 2003, seuls les pr�noms qui ne sont pas conformes � la morale ou offensent le public sont interdits. Les co-rapporteurs esp�rent que cette r�forme r�glera le probl�me des pr�noms kurdes, qui avaient fait par le pass� lobjet de multiples proc�dures, retardant lenregistrement � l�tat civil et contraignant les parents � choisir des pr�noms turcs. Les co-rapporteurs ont appris que lenregistrement de certains pr�noms avait �t� refus� par les officiers d�tat-civil au motif que ces pr�noms commencent par des lettres qui nexistent pas dans lalphabet turc, comme x, w ou q, qui correspondent en outre � des sons inconnus dans la langue turque. Ils appellent les autorit�s � faire preuve de flexibilit� : la lettre w, � tout le moins, m�me si elle ne fait pas partie officiellement de lalphabet turc, doit figurer sur tous les claviers dordinateurs turcs, faute de quoi il ne serait impossible dacc�der � internet.
f. Le retour des personnes d�plac�es
244. Le conflit avec le PKK entre 1984 et 1999 a caus� le d�placement forc� denviron 350 000 personnes dans le Sud-Est de la Turquie, chiffre fourni par les autorit�s, voire dun million et demi de personnes, selon les ONG. La moiti� des 10-12 millions de Kurdes vit aujourdhui en dehors du sud-est de la Turquie, la plupart sont venus grossir les bidons villes des grandes agglom�rations ou se sont repli�s sur Diyarbakir, dont la population a plus que doubl�, sans que les services de sant�, d�ducation, de logement ou daide sociale naient �t� augment�s en proportion de mani�re significative.
245. Lexode rural est un ph�nom�ne in�luctable, en Turquie comme ailleurs, mais les r�gions de lest et le sud-est se sont en grande partie aussi d�peupl�es pour des raisons de s�curit�, dune part, pour des raisons �conomiques dautre part : il a �t� expliqu� aux co-rapporteurs que linterdiction de faire pa�tre des troupeaux sur les hauts plateaux, soup�onn�s d�tre des repaires du PKK, la premi�re guerre du Golfe qui a arr�t� net les trafics et les �changes avec lIrak, enfin le sousd�veloppement dune r�gion o� personne na voulu investir compte tenu de lins�curit� sont tout autant � lorigine du d�placement de populations que les destructions de villages et les d�placements forc�s impos�s par les forces de s�curit�. Pour la plupart des ONG, lam�lioration des conditions �conomiques et sociales est la condition sine qua non pour le retour de la population, quelle ait �t� d�plac�e de force ou quelle soit partie volontairement.
246. Il est clair quun grand nombre de gens ne rentreront pas car ils auront refait leur vie ailleurs. Il faut noter que les gouvernements successifs nauront pas fait grand-chose pour encourager le retour : le projet de loi sur lindemnisation des personnes ayant subi des dommages et des d�g�ts pour � les actions des organisations terroristes et les mesures prises par lEtat pour les combattre � vient tout juste d�tre publi� le 19 janvier 2004 par le ministre de la Justice et nest pas encore vot�, la loi sur la mise en uvre de la responsabilit� extra d�lictuelle de lEtat est dapplication tr�s r�duite, enfin le programme de � retour au village � na toujours pas donn� les r�sultats escompt�s, faute dune strat�gie, dun financement[92] et dun calendrier dapplication transparents.
247. Le �Village return and rehabilitation project� a �t� lanc� en 1994, dans le cadre du GAP (South-eastern Anatolia project, essentiellement charg� des projets dinfrastructure tels que barrages etc), qui travaille sous lautorit� du Premier ministre. Fin 2002, le ministre de lInt�rieur, Abd�lkadir Aksu a annonc� quau total 58 513 personnes avaient b�n�fici� depuis juin 2002 du programme � retour au village � et le gouverneur de Diyarbakir a annonc� le 18 d�cembre 2002 quau total 48 villages et 58 hameaux avaient �t� mis � disposition dans le cadre de ce programme, m�me si, dans certaines villages (notamment dans les districts de Kulp et Dicle), lautorisation de r�installation navait pu �tre donn�e, pour des raisons de s�curit�. Au total, dapr�s les autorit�s turques, entre 2000 et fin juillet 2003, 91 829 personnes seraient retourn�es dans leurs villages, ce qui repr�sente plus de 25 % du nombre total de personnes d�plac�es.
248. Le gouvernement a voulu saisr loccasion de faire de lam�nagement du territoire et a essay� de rationaliser limplantation des nouveaux hameaux ou villages pour mieux distribuer des infra-structures tels qu�coles ou dispensaires. Ces nouveaux villages ou hameaux sont toutefois pour certains boud�s par les villageois, qui ne voient pas pourquoi ils ne pourraient tout simplement pas rentrer chez eux. Enfin, le retour serait �galement rendu difficile dans certains cas par le maintien du syst�me de � gardes de villages �, des milices para-militaires kurdes que les autorit�s nont toujours pas d�sarm�es, et qui pour certaines, se seraient install�es dans les villages vid�s de leurs occupants pendant le conflit.
249. Les co-rapporteurs se r�f�rent aux deux pr�c�dentes R�solutions[93] adopt�es par lAssembl�e, en 1998 et 2001, concernant la situation humanitaire des r�fugi�s kurdes et des personnes d�plac�es dans le sud-est de la Turquie, dont les recommandations nont pas �t� suivies deffets concrets et invitent les autorit�s turques � prendre dans les meilleurs d�lais les mesures n�cessaires pour favoriser le retour de ceux qui le souhaiteraient ou � pr�voir une juste indemnisation. Ils notent avec satisfaction que le Gouvernement envisage dintensifier les contacts avec les bailleurs de fonds internationaux, notamment les Nations-Unies et la Banque mondiale et que la loi sur lindemnisation est sur le point d�tre adopt�e par la TBMM.
g. L�tat durgence �conomique
250. Contrairement � la recommandation de lAssembl�e de 2001, l�tat �durgence �conomique� pour les provinces du Sud-Est na pas �t� mis en uvre, notamment � cause de la grave crise �conomique qui a frapp� la Turquie en novembre 2000 puis f�vrier 2001. Les projets de d�veloppement de la r�gion, notamment la construction de grands barrages par le GAP, nont pas �t� accompagn�s suffisamment par des programmes de d�veloppement socio-�conomique. Il a �t� expliqu� aux co-rapporteurs que, sauf pour ce qui est de la r�gion de Gaziantep et dans une moindre mesure, celle de Bitlis, lest et le sud-est souffraient toujours dun sous-d�veloppement criant en mati�res dinfrastructures.
251. A Diyarbakir, il y a 5 000 classes, il en faudrait 3 000 de plus pour pouvoir scolariser les enfants dans de bonnes conditions. Deux nouveaux centres de soins ont �t� ouverts r�cemment mais la capacit� daccueil des h�pitaux est insuffisante, tout comme le nombre de m�decins. Une grave �pid�mie de grippe a par exemple touch� environ 100 000 enfants principalement dans le Sud-est de la Turquie en d�cembre 2003 et lh�pital de Diyarbakir a eu �norm�ment de mal � faire face aux 2 000 demandes dadmission journali�res. Lacc�s aux soins nest pas vraiment garanti malgr� lexistence dune carte verte assurant th�oriquement-la gratuit� des soins aux plus d�munis et la loi n� 224 de 1963 sur les services m�dicaux nest pas appliqu�e.
252. Enfin, il y a un manque criant de logements et les cr�dits manquent pour en construire. A Lice, par exemple, qui avait �t� d�truite compl�tement par un tremblement de terre en 1975, on vit toujours pour lessentiel dans des b�timents pr�fabriqu�s. La m�me chose risque de se produire � Bing�l suite au tremblement de terre de mai 2003. Il ny a pas non plus de programmes daide sociale et lun des graves probl�mes � Diyarbakir est le ph�nom�ne des enfants de la rue, qui nest pas encore trait� de mani�re satisfaisante.
253. Les co-rapporteurs consid�rent que lune des priorit�s absolues de la Turquie doit �tre de diminuer les �normes �carts de d�veloppement entre les diff�rentes r�gions du pays. Lest et le sud-est ne sont pas les seules r�gions concern�es mais les co-rapporteurs estiment quune redistribution des ressources simpose comme un objectif en soi qui sera au b�n�fice de toute la soci�t� turque.
254. En Turquie, les femmes jouissent-en th�orie- dun statut tout � fait enviable par rapport � la situation qui leur est faite dans dautres pays musulmans : elles ont obtenu le droit de vote d�s 1935, ne sont plus oblig�es de porter le voile, peuvent conduire, sortir en public, exercer une profession et ont acc�s � l�ducation, comme les hommes. Plus de 30% des personnes titulaires de dipl�mes universitaires sont des femmes et plus de 30% des emplois qualifi�s aussi, mais cette situation nest pas en corr�lation avec leur repr�sentation au niveau politique et d�cisionnel.
255. En effet, comme dans certains autres pays europ�ens, les femmes sont tr�s largement sous repr�sent�es pour ce qui est de leur participation � la vie publique : seules 4,3% dentre elles ont �t� �lues � la TBMM lors des derni�res �lections[94] en novembre 2002 (soit 24 d�put�es sur 550). Sur les 81 gouverneurs des provinces de Turquie, il ny a pas une seule femme et il ny a quun seul maire qui le soit. Dans le gouvernement, il ny a quune seule femme.
256. La Turquie arrive ainsi 140�me sur 179 pays pour ce qui est de la repr�sentation politique des femmes et larriv�e au pouvoir de Tansu Ciller, premi�re femme � acc�der au poste de premier ministre en Turquie en 1993, ny a rien chang�.
257. Il ny a toujours pas de salaire �gal � travail �gal et la Turquie a �t� consid�r�e en violation de larticle 4 � 3 de la Charte sociale du Conseil de lEurope sur ce point. En revanche certains progr�s notables ont �t� enregistr�s avec, dune part, la r�forme constitutionnelle doctobre 2001 (larticle 41 garantit maintenant l�galit� entre �poux) et la refonte compl�te du Code civil (qui datait de 1926) en novembre 2001[95]. Enfin une loi dao�t 2002 (voir infra, droits sociaux), pr�voit maintenant une protection contre le licenciement des femmes enceintes. Il ne semble pas y avoir en revanche de r�glementation sur le cong� de maternit�.
258. Nonobstant ce qui pr�c�de, il semble aux co-rapporteurs quil y a en Turquie, en ce qui concerne les droits des femmes, un grand foss� entre la Turquie moderne et la Turquie traditionnelle, entre louest et lest. Il y a une diff�rence majeure entre les femmes et les jeunes filles qui habitent en ville et sont originaires des classes moyennes ou sup�rieures et qui mettent un foulard par coquetterie ou pour exprimer une revendication soci�tale ou religieuse et les femmes des milieux ruraux d�favoris�s, qui ne peuvent que subir les traditions qui leur sont impos�es en la mati�re.
259. Les co-rapporteurs ont �t� choqu�s dapprendre, lors de leur visite dans lest et le sud-est de la Turquie (mais la situation est la m�me dans un certain nombre dautres r�gions de Turquie, leur a-t-on assur�), que pr�s de 60 % des femmes[96] sont analphab�tes, que les mariages arrang�s, voire la polygamie[97], sont monnaie courante, que les crimes dhonneur continuent d�tre tol�r�s par les autorit�s et que la violence domestique est un ph�nom�ne de soci�t� tout � fait admissible. Beaucoup de filles ne sont tout simplement pas envoy�es � l�cole par leurs parents, certaines ne sont m�me pas d�clar�es � l�tat civil � leur naissance parce que cela implique un d�placement et des frais ou parce les familles attendent pour les d�clarer quelles aient atteint l�ge de trois ans et quelles aient surv�cu aux maladies infantiles.
260. Pr�s de 95% des crimes dhonneur r�pertori�s sont commis dans lest et le sud-est de la Turquie et le nombre de suicides des femmes -apparemment impos� comme alternative au meurtre par un membre de la famille ou pour �chapper � un mariage forc�- y est deux fois plus �lev� quailleurs.Dans un Etat moderne, cette situation est intol�rable et ne saurait se justifier ni par les traditions socioculturelles ni par le sous-d�veloppement �conomique de telle ou telle r�gion. Il ny a pas �galit� entre les citoyens, si un sexe est aussi d�favoris� que le sont les femmes dans certaines r�gions de Turquie.
261. Les co-rapporteurs ont �t� horrifi�s par la description des cas de crimes dhonneur qui leur ont �t� rapport�s. Les autorit�s doivent faire preuve de la plus grande fermet� pour que cessent ces pratiques dun autre �ge. Elles devraient soutenir financi�rement les associations telles que Ka-Der ou Ka-Mer qui tentent de soutenir les victimes, soit en leur apportant aide et conseil soit en ouvrant des refuges pour femmes battues ou en danger.
262. Les co-rapporteurs estiment aussi quil est urgent de modifier les articles du code p�nal qui pr�voient des circonstances att�nuantes ou des r�ductions de peine en cas de crimes dits dhonneur et sugg�rent d�tendre la d�finition du crime de viol, qui � lheure actuelle nest constitu� que sil y a p�n�tration sexuelle, ce qui est contraire aux standards internationaux applicables en la mati�re. Le 6�me paquet de juillet 2003 a modifi� larticle 453 du code p�nal relatif � linfanticide, qui pr�voyait de 4 � 8 ans de prison seulement lorsque quil sagissait du meurtre dun enfant ill�gitime tu� imm�diatement apr�s sa naissance. La peine a �t� port�e de 8 � 12 ans. Le 6�me paquet a �galement abrog� larticle 462 du code p�nal relatif aux r�ductions de peine en cas de crimes dhonneur, ce qui constitue un progr�s notable.
263. En ce qui concerne les violences sexuelles ou menaces sexuelles inflig�es aux femmes pendant la garde � vue ou en d�tention, les autorit�s devraient faire preuve l� aussi dune tol�rance z�ro. En outre, au moins jusquen 2001, les tests de virginit� ou les examens gyn�cologiques forc�s � lissue de la garde � vue semblent avoir �t� monnaie courante, pour permettre notamment aux officiers de police de se prot�ger pr�ventivement contre une accusation �ventuelle de viol. Cette pratique a �t� condamn�e par la CEDH le 23 juillet 2003 (arr�t Y.F c. Turquie). Jusquen f�vrier 2002, des tests de virginit� �taient �galement effectu�s pour lacc�s � certaines professions, comme la profession dinfirmi�re.
264. Enfin, linsuffisance patente de scolarisation des filles et lillettrisme qui en est la cons�quence prive aussi les femmes dans certaines r�gions de Turquie dacc�s aux soins de sant�, pour elles-m�mes et leurs enfants, dacc�s au march� du travail et dacc�s � l�ducation. Il est regrettable, comme la dit le G�n�ral �zk�k, que les autorit�s turques naient m�me pas �t� en mesure de faire apprendre le turc aux populations de certaines r�gions de lest et du sud-est mais linterdiction du kurde comme langue v�hiculaire dans les relations avec ladministration prive les autorit�s turques dun moyen important pour faire passer les messages relatifs par exemple � la sant� publique. Lordre des m�decins de Diyarbakir a ainsi fait �tat des difficult�s rencontr�es pour faire passer les messages de m�decine pr�ventive (vaccination des enfants, planning familial, hygi�ne etc.) dans les campagnes, du fait que tous les documents dinformation sont r�dig�s en turc seulement.
b. La lutte contre la corruption
265. La corruption est un mal end�mique en Turquie[98]. Certes, la Turquie sest dot�e en 1996 dune loi (n� 4208) sur le blanchiment et est membre du GAFI (Groupe dAction Financi�re sur le blanchiment des capitaux) mais le classement 2003 de � Transparence Internationale � sur la corruption mondiale (fond� sur la perception du degr� de corruption ressenti par les milieux daffaires, les universitaires et las analystes) classe toujours la Turquie au 77�me rang sur 133 pays (avec un indice de 3 sur 10). Il nest donc pas �tonnant que la lutte contre la corruption ait constitu� lun des grands th�mes de la campagne �lectorale men�e par lAKP. Le nouveau gouvernement a promis de s�vir et a adopt� en janvier 2003 un plan daction urgent pour lutter contre la corruption. Par ailleurs la TBMM a cr�� une commission denqu�te parlementaire sur le sujet. Elle a soumis un rapport pr�liminaire le 11 juillet 2003, dans laquelle elle estime que la corruption a caus� la perte denviron 150 milliards de dollars � l�conomie turque, dont 40 milliards suite � des faillites bancaires frauduleuses et 110 milliards suite � la corruption lors de la privatisation ou des proc�dures dappel doffres, notamment dans le secteur de l�nergie. La Commission a propos� de renvoyer 23 anciens ministres impliqu�s devant la Haute Cour de justice et recommande, � titre de mesure conservatoire et sans attendre lissue des proc�dures p�nales �ventuelles, de saisir les biens des dirigeants de banques incrimin�es. Enfin, le 9 novembre 2003, la TBMM a cr�� plusieurs commissions denqu�te visant notamment lancien premier ministre Mesut Yilmaz (chef du parti de la M�re Patrie) et cinq autres anciens ministres.
266. Les co-rapporteurs soutiennent sans r�serve les efforts d�ploy�s par le gouvernement actuel, qui pourront utilement �tre soutenus par le Conseil de lEurope suite � la ratification par la Turquie, le 17 septembre 2003, de la Convention civile sur la corruption de 1999, quelle avait sign�e deux ann�es auparavant. Avec la ratification de cette convention, la Turquie est devenue automatiquement membre du GRECO (Groupe dEtats contre la corruption) � compter du 1er janvier 2004 et b�n�ficiera de ce fait des recommandations qui seront �mises par le GRECO dans le cadre de sa proc�dure de suivi des Etats membres. La convention p�nale sur la corruption, �galement sign�e par la Turquie en septembre 2001 devrait aussi �tre ratifi�e prochainement. Les co-rapporteurs recommandent �galement aux autorit�s turques de ratifier la convention de 1990 du Conseil de lEurope sur le blanchiment, sign�e en septembre 2001. Enfin, les co-rapporteurs recommandent de mettre en place rapidement les structures administratives n�cessaires, notamment la cr�ation dun organisme de coordination sp�cialis� aupr�s du premier ministre, pour pouvoir mettre en uvre sans tarder le programme de lutte contre la corruption �labor� avec les autorit�s turques en avril 2003, qui pourrait b�n�ficier d�s le premier trimestre 2004 dune assistance importante du Conseil de lEurope, par le biais dun financement � hauteur de 5, 9 millions sur deux ans assur� par lUnion europ�enne dans le cadre de ses programmes pr�-adh�sion.
267. Lors de leur premi�re visite en Turquie en f�vrier 2003, les co-rapporteurs ont eu loccasion de rencontrer des associations patronales (T�SIAD ET M�SIAD) et des repr�sentants du syndicat DISK. Faute de temps, ils nont pu rencontrer des syndicats patronaux, comme le TISK, ou dautres syndicats, tel que le HAK-IS ou le TURK-IS. Ils ont �t� surpris de constater avec quel espoir les travailleurs attendaient lentr�e dans lUnion europ�enne. Il leur a �t� expliqu� quils nen attendaient pas seulement une augmentation de leur niveau de vie mais aussi une reconnaissance et un renforcement du r�le des syndicats.
268. Certes, les syndicats font lobjet de restrictions de leur libert� dassociation et de r�union comme les autres ONG mais la situation est dautant plus grave que leur objet est la d�fense et le d�veloppement des droits sociaux. Pour ce qui est des droits sociaux, il a �t� expliqu� aux co-rapporteurs qu� peine 50% de la population b�n�ficie de la protection de la s�curit� sociale (34% en ville), que lassurance ch�mage na �t� introduite quen avril 2002, que le travail au noir est tr�s r�pandu et que le salaire minimum �tait totalement insuffisant pour vivre[99]. Beaucoup de personnes, y compris des fonctionnaires ou des universitaires, doivent exercer deux m�tiers pour boucler leurs fins de mois.
269. Si les co-rapporteurs insistent sur les restrictions des droits syndicaux en Turquie, cest quils ont eu limpression, lors de leurs visites, que beaucoup de personnes ne participent pas � la vie d�mocratique et ne revendiquent m�me pas leurs droits parce quelles nont pas acc�s � lenseignement, parce quelles nont pas acc�s aux soins de sant�, parce quelles ne disposent pas de revenu en cas de vieillesse, parce quelles nont pas de logement d�cent. Elles sont � ce point pr�occup�es de trouver les moyens de survivre quelles en deviennent indiff�rentes aux libert�s fondamentales.
270. Or les co-rapporteurs sont convaincus que les syndicats ont un r�le fondamental � jouer pour la d�fense des droits sociaux de la population. Entraver laction et la lutte des syndicats pour la juste d�fense des droits sociaux �quivaut � priver une partie de la population dun outil pour am�liorer ses conditions de vie et de ce fait �tre � m�me de revendiquer les droits d�mocratiques.
271. A cet �gard il convient de noter que, bien que la l�gislation reconnaisse la libert� syndicale, elle impose de nombreuses restrictions. Ainsi, les candidats � des fonctions syndicales doivent avoir travaill� pendant au moins dix ans dans le secteur repr�sent� par le syndicat. En outre, toute personne d�sireuse de saffilier � un syndicat comme dailleurs � toute autre association - doit faire certifier son adh�sion chez un notaire, contre paiement dune somme non n�gligeable et les syndicats sont dans lobligation de produire la liste compl�te de leurs adh�rents, avec noms et adresses, � premi�re r�quisition des autorit�s.
272. Les syndicats doivent aussi obtenir une autorisation officielle pour organiser des r�unions ou des manifestations, tout en laissant la police y assister et enregistrer leurs d�bats, ce qui a fortement surpris les co-rapporteurs.
- Le droit de gr�ve
273. Les gr�ves de solidarit�, les gr�ves g�n�rales et les gr�ves perl�es sont interdites. Plusieurs sanctions sont pr�vues en cas de participation � des gr�ves ill�gales, et notamment une peine demprisonnement. Les gr�ves sont interdites dans de nombreux secteurs qui nentrent pas dans la cat�gorie des services essentiels d�finis par lOIT. Le droit de gr�ve est interdit dans les pompes fun�bres, ladministration des cimeti�res, les industries du gaz, du p�trole, de l�eau et de l�lectricit�, les services des pompiers, le transport maritime, les chemins de fer et le transport public urbain, le secteur des banques et de la finance, les services de sant� et les services publics. La loi impose larbitrage obligatoire dans ces services. La loi sur les syndicats et employ�s du secteur public, adopt�e par le parlement en juin 2001, limite le droit � la n�gociation collective et le droit de gr�ve de tous les syndicats des employ�s de la fonction publique (plus de deux millions demploy�s).
274. A noter cependant que dans les zones franches dexportation, la clause relative � linterdiction pendant 10 ans de mener une action de gr�ve, de lock-out et de m�diation a �t� abrog�e dans le cadre des r�formes l�gislatives dao�t 2002.
- La protection contre les licenciements
275. La loi n� 4857 sur la s�curit� de lemploi a �t� adopt�e en ao�t 2002 et constitue un progr�s notable. Dor�navant, les employeurs ne peuvent plus licencier sans raison valable des travailleurs dans des entreprises de plus de 10 salari�s et qui ont des contrats � dur�e ind�termin�e et travaillent depuis six mois dans lentreprise. La loi sp�cifie que les cas suivants ne peuvent �tre consid�r�s comme des motifs valables pour licencier un employ� : �tre affili� � un syndicat ou participer � des activit�s syndicales ; �tre un repr�sentant des travailleurs ou briguer un poste en tant que repr�sentant des travailleurs; inciter ou participer � des proc�dures judiciaires contre un employeur pour infraction aux droits; motifs fond�s sur la race, la religion, le sexe, l�tat civil, les obligations familiales, la grossesse, lopinion politique, lorigine ethnique ou sociale; une absence temporaire du travail en raison dun handicap ou dune maladie.
276. Selon les syndicats, la lacune la plus importante de cette loi est quelle ne couvre pas les lieux de travail o� il ny a que dix employ�s ou moins, ce qui donne aux employeurs la possibilit� d�chapper aux dispositions l�gales en employant moins de dix travailleurs dans lentreprise, souvent en transf�rant la production � des sous-traitants ou en employant des travailleurs sous contrats � dur�e d�termin�e.
277. Le pourcentage de lieux de travail en Turquie comptant moins de dix employ�s, �quivalait en 2000 � 25% de lemploi total. Lemploi dans le secteur non structur� repr�sente 30 � 40% de lemploi total et les infractions majeures aux droits des travailleurs se produisent pr�cis�ment dans ce secteur et dans les petites entreprises du secteur structur�. Les co-rapporteurs ont �t� inform�s que ce sont g�n�ralement les femmes et les enfants qui font les frais de cette absence de protection, m�me sil semblerait que le travail des enfants de moins de 15 ans ait sensiblement baiss�, notamment depuis lintroduction de huit ann�es de scolarit� obligatoire.
278. La loi sur le travail de 1936 a �t� amend�e en ao�t 2002, pour ajuster les dispositions en mati�re de s�curit� demploi aux conventions de lOIT. La loi amend�e inscrit �galement les entreprises agricoles comptant moins de 50 travailleurs dans le cadre de la l�gislation nationale du travail qui devait entrer en vigueur au 15 mars 2003.
- Restrictions � la n�gociation collective
279. Le droit � la n�gociation collective est fortement restreint en Turquie. Pour �tre reconnu comme agent de n�gociation, un syndicat doit repr�senter plus de la moiti� des salari�s d�une entreprise et 10 pour cent de lensemble des salari�s du secteur. Lorsque lentreprise est d�tenue par une holding, il faut pouvoir repr�senter 51% des salari�s des diff�rentes entreprises de la holding. Un seul syndicat par entreprise est autoris� � n�gocier collectivement. La proc�dure est � ce point longue et bureaucratique que, dans bien des cas, il est tr�s difficile duser librement de ce droit, dautant que lemployeur ou un syndicat concurrent peut contester devant les tribunaux le seuil des 51%. Les co-rapporteurs notent avec satisfaction que le Gouvernement envisage dabaisser les seuils mentionn�s ci-dessus.
280. Les co-rapporteurs encouragent vivement la Turquie, qui a ratifi� la Charte sociale du Conseil de lEurope en 1989, � accepter les articles 5 (droit syndical) et 6 (droit de n�gociation collective) de la Charte sociale de 1961, qui font partie des 9 articles du noyau dur de la Charte[100] pour mettre en conformit� avec les normes du Conseil de lEurope notamment les lois n�2821 sur les syndicats et n�2822 sur la n�gociation collective, qui datent de la p�riode du coup dEtat de 1980.
281. Les co-rapporteurs esp�rent que les r�formes envisag�es par le gouvernement permettront �galement � la Turquie daccepter les autres articles quelle na pas ratifi�s, comme larticle 2 (droit � des conditions de travail �quitables), larticle 3 (droit � la s�curit� et lhygi�ne dans le travail), larticle 15 (droit des personnes physiquement ou mentalement diminu�es � la formation professionnelle et � la r�adaptation) et surtout larticle 8 (droit des travailleuses � la protection, notamment droit � un cong� de maternit� et � la protection contre un licenciement en cas de grossesse).
282. Enfin, il conviendrait �galement de ratifier dans un proche avenir la Charte sociale r�vis�e de 1996 et daccepter le protocole de 1995 relatif au syst�me de r�clamations collectives.
Annexe I
R�sum� des modifications constitutionnelles du 17 octobre 2001
Ont �t� amend�s le pr�ambule de la Constitution, ainsi que les articles 13 (restriction aux droits fondamentaux : seulement pour des raisons sp�cifiques pr�vues par la Constitution et la loi ,suppression, notamment, de la r�f�rence � � lint�grit� indivisible de lEtat avec son territoire et sa nation �[101]),14 (introduction dune clause dinterdiction de labus de droits fondamentaux, reprenant le texte de larticle 17 de la CEDH), 19(droit � la libert� et � la s�curit� : diminution de la garde � vue pour d�lits collectifs qui passe de 15 jours � 4 jours maximum, introduction dun droit absolu � informer ses proches de son arrestation ou d�tention sans d�lai, droit � r�paration en cas de violation), 20 (protection de la vie priv�e, supprimant lexception li�e aux n�cessit�s de lenqu�te ou de linstruction et ajoutant les exceptions g�n�rales pr�vues au � 2 de larticle 8 CEDH, ainsi que la n�cessit� davoir un ordre �crit pour toute ing�rence), 21 (protection de linviolabilit� du domicile, idem que pour larticle 20), 22 (libert� de communication, idem que pour les articles 20 et 21), 23 (libert� de r�sidence et de mouvement : il nest plus possible de restreindre le droit du citoyen de quitter son pays en raison de la � situation �conomique nationale �), 26 (libert� dexpression : suppression de linterdiction dutiliser une langue non autoris�e par la loi mais restrictions toujours possibles, si elles sont pr�vues par la loi, en vue dassurer le respect � des caract�ristiques fondamentales de la R�publique et la protection de lint�grit� indivisible de lEtat avec son territoire et sa nation �), 28 (libert� de la presse : suppression de linterdiction de publier dans une langue non autoris�e par la loi), 31 (droit dutiliser des m�dias autres que la presse, ajout des cas restrictifs sur le mod�le du � 2 de larticle 10 CEDH), 33 (libert� dassociation, libell� sur le mod�le de lart. 11 CEDH), 34 (libert� de r�union et de manifestation, sans autorisation pr�alable, suppression de linterdiction de manifester pour les syndicats ou organisations professionnelles publiques), 36 � 1 (introduisant le droit � un proc�s �quitable comme un droit constitutionnel), 38 (abolition de la peine de mort sauf en temps de guerre et pour les crimes de terrorisme, 40 (� cet article sur la protection des droits fondamentaux est ajout� un 2�me �, obligeant lEtat � pr�voir des voies de recours), 41 (protection de la famille maintenant bas�e sur l�galit� entre �poux), 46 (expropriation), 49 (droit au travail, ajout dune obligation de lEtat de prot�ger aussi les ch�meurs et non plus seulement les travailleurs), 51 (droit de cr�er des syndicats sans d�claration pr�alable), 55 (droit � un salaire minimum tenant compte des besoins vitaux des travailleurs, 65 (limitation des devoirs et �conomiques et sociaux de lEtat), 66 (suppression de lacquisition non automatique de la nationalit� turque lorsque le p�re est �tranger), 67 (droit de vote, �ligibilit� et activit�s politiques, pr�voyant une exception � linterdiction du droit de vote impos�e aux personnes condamn�es p�nalement lorsquil sagit dune condamnation pour � n�gligence �), 69 (partis politiques, introduisant des crit�res pr�cis pour la d�termination de la question de savoir si un parti politique est devenu le � centre dex�cution dactivit�s ill�gales � : il faut maintenant quil sagisse dactes individuels r�p�t�s ayant re�u une approbation des organes dirigeants, soit � tacite � soit ouverte et la Cour constitutionnelle peut maintenant, outre la dissolution du parti, prononcer des sanctions moins s�v�res, telles que la suppression totale ou partielle des financement publics), 74 (droit de p�tition aupr�s du parlement et des autorit�s �tendu aux �trangers r�sidant en Turquie, sous r�serve de r�ciprocit�), 86 (droits sociaux, pensions et indemnit�s des membres du parlement), 87 (pr�voyant une majorit� des 3/5 pour tout vote par le parlement dune loi damnistie ou de pardon), 89 (promulgation des lois par le Pr�sident, obligation de renvoyer devant le parlement les lois qui lui semblent partiellement ou totalement inadapt�es (unsuitable), 94 (acc�l�ration de la nomination du pr�sident du parlement, le d�lai passe de 10 jours � 5 jours), 100 ( proc�dure devant la commission denqu�te parlementaire contre le premier ministre ou des ministres, 118 (Conseil de S�curit� nationale, modification du libell� pour renforcer ou souligner le caract�re purement consultatif de cet organe) et 149 (proc�dure devant la Cour constitutionnelle : dor�navant la dissolution dun parti ne peut plus �tre prononc�e que par une majorit� des 3/5, au lieu des 2/3 pr�vue avant).Enfin, il est maintenant possible dattaquer par la voie du recours constitutionnel des actes ou des lois pris pendant la dictature militaire 1980-82 (suppression du dernier � de lart. 15 provisoire).
Annexe II
Programme de la visite dinformation en Turquie
17-21 f�vrier 2003
Co-rapporteurs : Mme Mady Delvaux-Stehres (Luxembourg, SOC) M. Luc van den Brande (Belgique, PPE/DC) Secr�tariat : Mme Caroline Ravaud Lundi 17 f�vrier 2003 Arriv�e des co-rapporteurs � Ankara 22.00 R�union avec lAssociation des Droits de lHomme de Turquie (M. H�sn� �nd�l, Pr�sident, et Mme Feray Salman, Secr�taire G�n�ral) Mardi 18 f�vrier 2003 08.00 Petit d�jeuner de travail avec le HCR (Haut Commissariat des NU pour les R�fugi�s) (Mme Gesche Karrenbrock, Repr�sentante, et M. Stephen Corliss, Repr�sentant adjoint) et le PNUD (Programme des NU pour le d�veloppement) (M. Alfredo Witschi-Cestari, coordinateur r�sident en Turquie, et Mme Claire van der Vlaeren, Repr�sentante r�sidente adjointe) 09.30 R�union avec les membres de la d�l�gation de la Turquie aupr�s de lAssembl�e Parlementaire du Conseil de lEurope 10.30 Entretien avec M. Mehmet Ali Sahin, Ministre dEtat et Vice Premier Ministre 11.30 Entretien avec M. Inal Batu, Vice Pr�sident du Parti Populaire R�publicain (CHP) 12.30 D�jeuner � linvitation de M. Murat Mercan, Pr�sident de la d�l�gation de la Turquie aupr�s de lAssembl�e Parlementaire du Conseil de lEurope 14.00 Entretien avec M. Cemil �i�ek, Ministre de la Justice 15.30 Entretien avec M. Yasar Yakis, Ministre des Affaires Etrang�res 17.00 Entretien avec M. Recep Tayyip Erdogan, Pr�sident du Parti pour la Justice et le D�veloppement (AKP) 19.00 Entretien avec Dr Ayhan Bilgen, Pr�sident de Mazlum-der (Organisation pour les Droits de lHomme et la solidarit� avec les opprim�s) 20.00 D�ner � linvitation de M. S.I.H. Gosses, Ambassadeur des Pays-Bas, avec les ambassadeurs de la Bulgarie, du Danemark, de la Pologne et de la Su�de Mercredi 19 f�vrier 2003 09.30 Entretien avec M. Mustafa Bumin, Pr�sident de la Cour Constitutionnelle 11.00 Entretien avec M. B�lent Arin�, Pr�sident de la Grande Assembl�e Nationale de la Turquie 12.15 Entretien avec le G�n�ral Tuncer Kilin�, Secr�taire G�n�ral du Conseil dEtat � la S�curit� 13.30 D�jeuner � linvitation de Mme G�ls�n Bilgehan, membre de la d�l�gation de la Turquie aupr�s de lAssembl�e Parlementaire du Conseil de lEurope (Maison Rose, In�n� Foundation) 15.00 Entretien avec M. Sabih Kanadoglu, Procureur G�n�ral de la Cour de Cassation 16.15 Entretien avec M. Eraslan �zkaya, Pr�sident de la Cour de Cassation 17.30 Entretien avec M. Abd�lkadir Aksu, Ministre de lInt�rieur 18.30 Entretien avec M. Ahmet Turhan Demir, Pr�sident en exercice du Parti HADEP 21.15 D�part dAnkara 22.15 Arriv�e � Istanbul Jeudi 20 f�vrier 2003 09.30 Entretien avec M. Oguz Haksever, Coordinateur de lInformation de la cha�ne NTV (cha�ne de t�l�vision priv�e) 11.00 R�union avec la DISK (Conf�d�ration des syndicats progressistes de la Turquie), M. S�leyman Celebi, Pr�sident, M. Musa Cam, Secr�taire G�n�ral, et M.Tongu� Coban, Conseiller 12.30 Entretien avec M. Ergun Babahan, Editeur du quotidien SABAH 14.00 Entretien avec Dr �mer Bolat, Vice Pr�sident de la M�SIAD (Association des industriels et hommes daffaires ind�pendants) et M. Yusuf Cevahir, Pr�sident de la commission des affaires �trang�res de la M�SIAD 15.30 Entretien avec M. Perin Baran, Membre du Conseil dAdministration de la T�SIAD (Association turque de lindustrie et des affaires) et Dr Bahadir Kaleagasi, repr�sentant permanent de la T�SIAD aupr�s de lUnion Europ�enne et de lUNICE 17.30 Entretien avec M. Enis Berberoglu, coordinateur de linformation, M. Dogan Satmis, �diteur, et Gila Benmayor, chroniqueur, du quotidien H�RRIYET 19.00 Entretien avec M. Ali Celik Kasimogullari, propri�taire, et M. Mehmet Colak, R�dacteur en chef, du quotidien YENIDEN �ZG�R G�NDEM Vendredi 21 f�vrier 2003 8.45 D�part de M. Luc van den Brande 9.30 Entretien avec Mme �zlem Dalkiran, Amnesty international Turquie, et Prof. Dr Murat Belge, Assembl�e des Citoyens de Helsinki 18.15 D�part de Mme Mady Delvaux-Stehres
Annexe III
Projet de programme de la visite des co-rapporteurs en Turquie
(du 25 au 28 mai 2003)
Co-rapporteurs : M. Luc van den Brande (Belgique, PPE) Mme Mady Delvaux-Stehres (Luxembourg, SOC) Secr�tariat : Mme Caroline Ravaud, Chef du Secr�tariat de la Commission de suivi Samedi 24 mai 2003 Arriv�e des co-rapporteurs � Ankara Dimanche 25 mai 2003 9h30 Entretien avec lAssociation des Droits de lHomme (HRA) (h�tel Hilton) 15h00 D�part dAnkara pour Diyarbakir (TK 646) 16h30 Arriv�e � Diyarbakir et installation � lh�tel Dedeman 19h00 Entretien avec Mme Nebahat Akko�, Coordinatrice g�n�rale de KA-MER (Association de femmes) Lundi 26 mai 2003 9h30 D�part de Diyarbakir pour Bing�l 11h00 Arriv�e � Bing�l 11h15 Entretien avec M. H�seyin Avni Cos, Pr�fet de Bing�l 12h15 D�jeuner 13h30 14h20 Entretien avec M. Fevzullah Karaaslan, Maire de Bingol 14h30 15h30 Entretien avec M. Ridvan Kizgin, Pr�sident de lAssociation des Droits de lHomme 15h30 D�part pour Lice 16h30 Entretien avec M. Abd�lmuttalip Akdemir, Sous-pr�fet de Lice 17h30 Entretien avec M. Ziya Arda, Maire par int�rim de Lice 18h00 D�part pour Diyarbakir 19h00 Entretien avec M. Serdar Talay, Pr�sident de G��-DER (Association pour les migrants) Mardi 27 mai 2003 9h15 D�part de lh�tel 9h30 10h30 Entretien avec M. Nusret Miroglu, Gouverneur de Diyarbakir 10h45 11h45 Entretien avec M.Feridun �elik, Maire de Diyarbakir 12h00 13h00 Entretien avec M. Necdet Ipeky�z, Pr�sident de lOrdre des M�decins de Diyarbakir 13h00 14h00 D�jeuner 14h15 15h15 Entretien avec M. Selahattin Demirtas, Pr�sident de lAssociation des droits de lhomme 15h30 16h30 Entretien avec M. Sezgin Tanrikulu, Pr�sident du Barreau de Diyarbakir et de la Fondation des Droits de lHomme 17h10 D�part pour Ankara (TK 647) 18h40 Arriv�e � Ankara 20h00 D�ner avec les Ambassadeurs des pays membres du Conseil de lEurope et le Chef de la Repr�sentation de lUnion Europ�enne en Turquie � lAmbassade de Bulgarie Mercredi 28 mai 2003 9h15 D�part de lh�tel 9h30 10h30 Entretien avec M. Mehmet Elkatmis, Pr�sident de la Commission des droits de lhomme de la Grande Assembl�e Nationale de Turquie 10h45 11h30 Entretien avec M. Abd�lkadir Aksu, Ministre de lInt�rieur 11h45 12h30 Entretien avec la d�l�gation de la Turquie aupr�s de lAssembl�e Parlementaire 12h30 14h00 D�jeuner � linvitation des membres de la Commission de suivi de la d�l�gation de la Turquie 14h30 15h30 Entretien avec M. Cemil �i�ek, Ministre de la Justice 16h00 17h00 Entretien avec M. Ridvan Cakir, Pr�sident en exercice de la Direction des affaires religieuses (DIYANET) 18h15 19h30 Entretien avec lAssociation et la Fondation des droits de lhomme 20h00 D�ner � linvitation de M. Murat Mercan, Pr�sident de la d�l�gation de la Turquie aupr�s de lAssembl�e Parlementaire Jeudi 29 mai 2003 D�part dAnkara des co-rapporteurs.
Annexe IV
R�solution 1256 (2001)1
Respect des obligations et engagements de la Turquie
Commission charg�e du rapport : commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de lEurope (commission de suivi)
Renvoi en commission : Doc 8574, renvoi N� 2459 du 4 novembre 1999
Projet de r�solution adopt� avec 1 voix contre et 2 abstentions et projet de recommandation adopt� � lunanimit� par la Commission le 3 mars 2004
Membres de la commission : Mme Durrieu (Pr�sidente), M. Frunda, Mme Tevdoradze, Mme Severinsen (Vice-Pr�sidents), Mme Aguiar, M. Ak�am, M. Akhvlediani, M. B. Aliyev, M. Andr�, M. Arzilli, M. Atkinson, Mr Baka, Mme Bauer, M. Bernik, Mme Bilgehan, M. Bindig, Mme Bousakla, M. van den Brande, M. Budin, Mme Burbiene, M. Cabrnoch, M. M. Cavusoglu, M. Cekuolis, M. Christodoulides, M. Cilevics, M. Colombier, M. Debono Grech, Mme Delvaux-Stehres, M. Dobelis, M. Einarsson, M. Elo, M. E�rsi, M. Glesener, M. Gross, M. Gusenbauer, M. Hancock, M. Hedrich, M. Hegyi, M. Herkel, M. Holovaty, Mme J��tteenm�ki, M. Jakic, M. Jaskiernia, M. Jurgens, Lord Kilclooney, M. Kirilov, Mme Konglevoll, M. Kvakkestad, Mme Leutheusser-Schnarrenberger, M. van der Linden, M. Lintner, M. Mart�nez Casa�, M. Marty, M. Medeiros Ferreira, M. Melc�k, M. Mikkelsen, M. Mollazade, M. OKeeffe, M. Olteanu, M. Pangalos, Mme Petrova-Mitevska, Mme Petursdottir, M. Prijmireanu, M. Rakhansky, Mme Ringstad, M. Rivolta, M. Rogozin, M. Rustamyan, M. Sasi, Mme Shakhtakhtinskaya, M. Shybko, M. Slutscky ; M. Smorawinski, M. Soendergaard, M. Spindelegger, Mme Stoyanova, M. Surjan, M. Tepshi, M. Tk�c, M. Vis, Mme Wohlwend, M. Y��ez Barnuevo, M. Zacchera.
N.B. Les noms des membres qui ont particip� � la r�union sont indiqu�s en italique
Chef du secr�tariat : Mme Ravaud
Secr�taires de la commission : M. Gruden, Mme Odrats, Mme Clamer
[1] Rapport dinformation sur le respect des obligations et engagements de la Turquie - Doc. 8300 (rapporteurs : MM. B�rsony et Schwimmer).
[2] Rapport sur le respect des obligations et engagements de la Turquie Doc. 9120 (rapporteurs : MM. B�rsony et Zierer), pr�sent� � lAssembl�e le 28 juin 2001.
[3]La loi n�5084, entr�e en vigueur le 6 f�vrier 2004, vise � encourager et subventionner les investissements et lemploi dans les provinces o� le revenu par habitant est inf�rieur � 1 500 USD. Elle pr�voit des all�gements dimp�ts, des subventions pour les contributions de s�curit� sociale, des terrains gratuits pour les investisseurs et des tarifs pr�f�rentiels pour l�nergie.
[4] Notamment � labolition de la peine de mort et � loctroi de droits culturels aux Kurdes.
[5] Labr�viation turque utilis�e par le parti Justice et D�veloppement est AK Parti, le mot ak signifiant � blanc � et par extension � propre �.
[6] M. Erdogan a indiqu� aux co-rapporteurs que son parti se d�finissait comme islamique-conservateur, sur le mod�le du parti d�mocrate-chr�tien (CDU) allemand.
[7] Interdit dactivit�s politiques pendant 5 ans suite � la dissolution du Parti Refah, M. Necmettin Erbakan (77 ans) a refait surface en politique le 12 mai 2003, suite � son �lection � la pr�sidence du Parti du Bonheur, qui nest pas repr�sent� au parlement faute davoir pass� le seuil des 10 % lors des �lections de novembre 2002. Condamn� d�finitivement en d�cembre 2003 pour d�tournement des fonds de son parti, il devra cependant abandonner prochainement cette pr�sidence.
[8] Le 25 mars 2003, le Procureur g�n�ral indiqua quil ne demandait plus que la suppression partielle ou totale des financements publics dont b�n�ficie lAKP et non plus la dissolution.
[9] Au 15 octobre 2003, certains ind�pendants ou membres du CHP ralli�rent lAKP, qui dispose maintenant de 368 si�ges, soit une majorit� des deux tiers suffisante pour faire voter des amendements constitutionnels.
[10] Voir document As/Bur/ah Turkey (2002) 1 du 15 novembre 2002.
[11] Voir le rapport de lOSCE du 4 d�cembre 2002.
[12] Le parti HADEP fut finalement dissous par un arr�t unanime rendu par la Cour constitutionnelle le 13 mars 2003, pour violation des articles 68 et 69 de la Constitution et des articles 101 et 103 de la loi sur les partis politiques, pour soutien et assistance au PKK. Le Pr�sident, Murat Bozlak, et 45 autres personnes furent interdites dactivit�s politiques pendant 5 ans et tous les biens du parti furent transf�r�s au Tr�sor public.
[13] Au lieu de 38 dans le gouvernement pr�c�dent.
[14] Larticle 76 de la Constitution pr�voyait, notamment, qu�tait in�ligible toute personne condamn�e pour implication, incitation ou encouragement dactivit�s � id�ologiques ou anarchistes �, m�me si la condamnation avait �t� amnisti�e. Les mots � id�ologiques et anarchistes � ont �t� supprim�s et remplac�s par � terroristes �. Par contre, fut maintenue lin�ligibilit� de toute personne ayant �t� condamn�e � un an de prison ou plus, ce qui continue de priver beaucoup de citoyens du droit de se pr�senter aux �lections. Le Pr�sident de la R�publique refusa, dans un premier temps, de promulguer la loi adopt�e sur ce point par le parlement le 13 d�cembre 2002, estimant quil sagissait dune modification constitutionnelle ad personam, mais comme elle fut adopt�e de nouveau dans les m�mes termes par le parlement le 27 janvier 2003, il sinclina.
[15] Le 25 mars, il retira les trois requ�tes quil avait d�pos�es devant la Cour europ�enne des Droits de lHomme.
[16] Voir aussi la Recommandation 1247 (1994) relative � l�largissement du Conseil de lEurope.
[17] Cette aide est r�partie comme suit : 250 millions pour 2004, 300 millions pour 2005 et 500 millions pour 2006.
[18] D�cision du Conseil europ�en du 19 mai 2003.
[19] Sur les 194 trait�s �labor�s au sein du Conseil de lEurope, la Turquie en a ratifi� 83 et sign� 41 (au 10 f�vrier 2004).
[20]Cette r�f�rence � la � RTCN � nimplique aucune reconnaissance de la part des Rapporteurs, le seul Etat reconnu par le Conseil de lEurope �tant la R�publique de Chypre.
[21] Voir R�solution 1267 (2002) du 22 janvier 2002 sur la situation � Chypre (Rapport de la Commission des affaires politiques, Doc. 9302, Rapporteur : M. B�rsony).
[22] Pour M. Denktash, � pas de solution est une solution �.
[23] Voir la R�solution int�rimaire DH (2003)174.
[24] Par une autre R�solution adopt�e le m�me jour, le Comit� des Ministres d�cida de reprendre lexamen de lex�cution de larr�t rendu au principal le 18 d�cembre 1996 dans cette affaire en temps utile, en tenant compte de propositions visant � reprendre lexamen de cette question � la fin de 2005.
[25] Il sagit des arr�ts Eugenia Michaelidou Developments Ltd et Demades c. Turquie.
[26] Il semblerait en tout cas que la Turquie ne puisse, pour des raisons proc�durales, invoquer cette exception de non �puisement des voies de recours internes pour les 47 affaires d�clar�es recevables par la Cour avant lentr�e en vigueur de la loi du 30 juin 2003 (voir � 20 de larr�t Demades du 31 juillet 2003).
[27] Pr�s de 120 000 personnes se r�fugi�rent en Turquie d�s 1988, pour �chapper aux bombardements chimiques ordonn�s par le r�gime irakien.
[28] La Turquie na pas de p�trole, pas de centrales nucl�aires, peu de charbon et l�nergie y est en moyenne 20 % plus ch�re que dans les autres pays de lUnion.
[29] Apr�s une tourn�e au Moyen-Orient effectu�e par le premier ministre en janvier, la Turquie invita � Istanbul les ministres des Affaires �trang�res de la Syrie, de lEgypte, de lArabie saoudite, de lIran et de la Jordanie le 23 janvier pour un forum r�gional, � lissue duquel fut adopt�e une d�claration invitant instamment Saddam Hussein � se conformer � la r�solution 1441 de novembre 2002.
[30] Depuis 1997, la Turquie a d�ploy� environ 3 000 soldats dans le Nord de lIrak.
[31] Il avait �t� question douvrir 5 camps de r�fugi�s � lint�rieur m�me de lIrak.
[32] La Turquie avait �t� condamn�e pour violation de larticle 3 par la Cour europ�enne des Droits de lHomme pour lexpulsion dune iranienne qui risquait la mort par lapidation dans son pays pour adult�re (arr�t Jabari c. Turquie du 11 juillet 2000). La Cour avait �galement constat� une violation de larticle 13 (droit � un recours effectif) et mis en cause la proc�dure suivie en vertu de lordonnance de 1994.
[33] La r�vision de la Constitution est entr�e en vigueur le 17 octobre 2001. Le 1er paquet est contenu dans la loi n� 4744 du 6 f�vrier 2002, le 2�me dans la loi n� 4748 du 26 mars 2002 (entr�e en vigueur le 9 avril), le 3�me dans la loi n� 4709 du 3 ao�t 2002 (entr�e en vigueur le 9 ao�t), le 4�me dans la loi n� 4778 du 2 janvier 2003 (entr�e en vigueur le 11 janvier) et le 5�me dans la loi n� 4793 du 23 janvier 2003 (entr�e en vigueur le 4 f�vrier suivant).
[34] Sans parler des modifications constitutionnelles vot�es une deuxi�me fois, apr�s veto pr�sidentiel, par le parlement le 24 d�cembre 2002 et visant � permettre � M. Erdogan de se pr�senter aux l�gislatives partielles de Siirt. Ces modifications sont entr�es en vigueur le 31 d�cembre 2002.
[35] Le 6�me paquet (loi n� 4928) avait �t� adopt� par la TBMM le 19 juin mais lun des articles, relatif � la suppression de larticle 8 de la loi anti-terreur, avait fait lobjet dun veto pr�sidentiel. Apr�s avoir �t� revot�e par la TBMM dans les m�mes termes, le 6�me paquet est entr� en vigueur le 19 juillet 2003. Le 7�me paquet (loi n� 4963) a �t� adopt� par la TBMM le 30 juillet 2003 et est entr� en vigueur le 7 ao�t 2003.
[36] Il est regrettable, par exemple, que les articles provisoires de la Constitution de 1982 naient pas �t� supprim�s et que les articles 6 � 9 relatifs � la souverainet� nationale ne pr�voient aucun transfert de souverainet� � des organes supranationaux, ceux de lUnion europ�enne notamment.
[37] Le terme � arm�e � est utilis� ici par commodit� : comme en France, en plus des forces arm�es proprement dites, la gendarmerie (jandarma), qui op�re essentiellement en zone rurale, fait partie int�grante des forces arm�es.
[38] Intervention de larm�e en 1971, sans prise du pouvoir, pour forcer S�leyman Demirel (�lu par la suite pr�sident de la R�publique en 1993) � la d�mission et instaurer un �tat dexception. Intervention de larm�e aussi en 1997 : Necmettin Erbakan, devenu Premier ministre en juillet 1996, fut oblig� de d�missionner en juin 1997 et son parti, le Refah (Parti de la Prosp�rit�) fut dissous en 1998.
[39] A noter toutefois que larm�e a r�duit ses effectifs globaux de 17% � compter du 15 juillet 2003 : le service militaire a �t� ramen� de 18 � 15 mois pour les hommes du rang et de 16 � 12 mois pour les officiers de r�serve tandis que les appel�s dipl�m�s d'universit� pourront choisir entre devenir officier de r�serve et servir six mois comme simple soldat.
[40] Sur les 3,5 millions de Turcs qui vivent � l�tranger, deux millions habitent en Allemagne et 100 citoyens turcs vivant en Allemagne seraient devenus ainsi apatrides pour refus de faire le service militaire.
[41] Certes, comme le font remarquer les autorit�s turques, le droit � lobjection de conscience nest pas en tant que tel reconnu dans la CEDH mais il convient de se r�f�rer en lesp�ce � la Recommandation 1518 adopt� en mai 2001 sur lexercice du droit � lobjection de conscience, � la R�solution 337 (1967) relative au droit � lobjection de conscience et la Recommandation 816 (1977) relative au droit � lobjection de conscience au service militaire. Les principes pos�s par la Recommandation n� R (87) 8 du Comit� des Ministres relative � lobjection de conscience au service militaire obligatoire sont tout aussi clairs : � le service de remplacement doit en principe �tre civil et dint�r�t public �.
[42] Voir article 118 de la Constitution et la loi n� 4789 sur le Conseil national de s�curit� et le secr�tariat de celui-ci, telle quamend�e le 18 janvier 2003.
[43] Cest ce qui sest pass� r�cemment, avec le remplacement du G�n�ral Kilin� par un autre G�n�ral.
[44] Sur ce point il faudrait envisager de modifier larticle 131 � 2 de la Constitution.
[45] En particulier par le biais de deux fonds de soutien � lindustrie de la d�fense, le SSDF et le TSKGV, financ�s en partie par des imp�ts indirects.
[46] Seulement 2,4 % du budget de lEtat sont consacr�s � la sant�.
[47] En vertu du 4�me paquet de janvier 2003, il suffit de 30 citoyens pour cr�er un parti politique.
[48] Voir les arr�ts Parti communiste unifi� c. Turquie du 30 janvier 1998, Parti socialiste et autres du 25 mai 1998, Parti de la d�mocratie et de la libert� (�ZDEP) du 8 d�cembre 1999, Parti du travail du peuple (HEP) du 9 avril 2002, Parti de la d�mocratie (DEP) du 10 d�cembre 2002, Refah Partisi (Parti de la prosp�rit�) du 12 f�vrier 2003 et, en dernier lieu, larr�t Parti socialiste (STP) du 12 novembre 2003. La dissolution du parti islamiste Refah, dirig� par Necmettin Erbakan, est la seule � avoir �t� jug�e non contraire � larticle 11 de la CEDH par la Cour.
[49] Voir Arr�t Selim Sadak et Autres du 7 juin 2002, concernant, au regard de larticle 3 du Protocole n� 1 relatif au droit � des �lections libres, la d�ch�ance automatique du mandat parlementaire de 13 d�put�s de la TBMM apr�s dissolution en 1994 du parti DEP.
[50] La Cour constitutionnelle compte 15 juges (11 titulaires et 4 suppl�ants). Avant la r�forme, il fallait que 6 juges sur 11 votent pour la dissolution, maintenant il en faudra 7 sur 11.
[51] Ainsi que les articles pertinents de la Constitution.
[52] Voir lignes directrices sur linterdiction et la dissolution des partis politiques et mesures analogues, publi�es en janvier 200 par la Commission de Venise.
[53] Voir le rapport du centre pour lind�pendance des juges et des avocats de novembre 1999. Les co-rapporteurs notent avec satisfaction quun grand nombre de recommandations contenues dans ce rapport ont �t� mises en uvre depuis 1999.
[54] A lexception du tribunal qui est en train de rejuger Mme Zana et autres, o� la d�fense narrive pas � faire entendre certains t�moins.
[55] Sur les 520 recours pendants, 500 sont introduits par la voie pr�judicielle.
[56] En vertu de larticle 90 de la Constitution, la CEDH, trait� r�guli�rement ratifi�, a valeur supra-l�gislative mais infra-constitutionnelle.
[57] A titre dexemple, on citera le proc�s pour espionnage intent� � six fondations allemandes, les plus r�put�es du pays, qui sest heureusement conclu par une relaxe le 4 mars 2003, les difficult�s faites � Amnesty pour ouvrir un bureau en Turquie ou les multiples proc�s intent�s aux ONG locales.
[58] Ratification le 12 juillet 2001, entr�e en vigueur le 12 octobre 2001.
[59] Il y a eu r�cemment un important mouvement pr�fectoral : 35 gouverneurs sur 81 ont �t� remplac�s. Les gouverneurs de Diyarbakir et de Bing�l �taient en poste depuis moins de quatre mois � la date de visite des co-rapporteurs fin mai 2003.
[60] Le maire de Bing�l se plaignait, par exemple, quil ne pouvait mettre � la disposition des ONG une salle appartenant � la municipalit� sans autorisation du gouverneur. Cest aussi le gouverneur et pas la municipalit� qui donne les autorisations de manifester.
[61] Voir � ce sujet la Recommandation 29 (1997) du 3 juin 1997 adopt�e par le Congr�s des pouvoirs locaux et r�gionaux et le Rapport dinformation sur la d�mocratie locale et r�gionale en Turquie du 22 novembre 2001 sur la suite donn�e � la Recommandation 29 (1997). Un nouveau rapport sera �labor� par le Congr�s d�but 2004.
[62] Cette dur�e de garde � vue de 7 jours dans les r�gions qui seraient soumises � l�tat durgence est � comparer, par exemple, avec la garde � vue de 60 jours instaur�e par la Serbie-Mont�n�gro lorsque fut d�cr�t� l�tat durgence suite � lassassinat du Premier ministre le 12 mars 2003.
[63] Dapr�s la section de lIHD � Diyarbakir, il y aurait eu 2 773 arrestations dans la r�gion en 2002 et d�j� 1 188 pour les 4 premiers mois de 2003, dont seulement 271 ont abouti � un placement en d�tention provisoire.
[64] Voir les R�solutions int�rimaires DH (99) 434 et DH (2002) 98.
[65] La dur�e de formation des fonctionnaires de police est ainsi pass�e de 9 mois � deux ans, avec un cours obligatoire sur les droits de lhomme et la Turquie b�n�ficie du programme � Police et droits de lhomme � du Conseil de lEurope ainsi que des programmes de formation organis�s conjointement par lUnion et le Conseil de lEurope.
[66] LIHD est la plus ancienne ONG de Turquie : cr��e en 1986, elle compte environ 10 000 membres et dispose de 34 sections dans toutes les r�gions du pays.
[67] Dapr�s la section IHD de Diyarbakir, il y aurait eu 228 plaintes pour mauvais traitements pendant la garde � vue en 2002 et d�j� 117 plaintes dans les 4 premiers mois de 2003. En revanche, les plaintes pour torture auraient sensiblement baiss� : il sagit surtout de mauvais traitements (station debout prolong�e, yeux band�s, privation de nourriture etc.).
[68] Des poursuites p�nales contre les fonctionnaires en question sont pendantes.
[69] Voir documents CPT/Inf (2003) 28 et 29.
[70] Ce qui excluait Abdullah ��alan de toute possibilit� de faire commuer la peine capitale en une peine privative de libert�.
[71] Aux termes de larticle 4 de la Constitution, les trois premiers articles sont irr�vocables et leur modification ne peut �tre propos�e. Larticle 1 dispose que la Turquie est une r�publique, larticle 2 quelle est, notamment, un Etat d�mocratique, la�c et social, respectueux des droits de lhomme et loyal au nationalisme dAtat�rk et larticle 3 que lEtat turc, avec son territoire et sa nation, est une entit� indivisible.
[72] Voir larr�t �zg�r G�ndem c. Turquie du 16 mars 2000.
[73] Yenide �zg�r G�ndem tire � peine � 35 000 exemplaires, qui sont vendus pour lessentiel � la cri�e dans la rue ou par abonnement.
[74] Suppression de la responsabilit� p�nale des �diteurs pour usage dune autre langue que le turc et r�duction des d�lais de suspension des p�riodiques (2�me paquet), transformation de certaines peines privatives de libert� en amende (3�me paquet), protection des sources des journalistes (4�me paquet) et nouvelle r�glementation des �missions de TV et de radio en p�riode �lectorale (6�me paquet).
[75] La � Turkishness � est d�finie � larticle 66 de la Constitution comme suit : � toute personne li�e � lEtat par la citoyennet� turque est turque �.
[76] Lamende pr�vue �tait de toute fa�on dun montant ridicule : 100 � 500 TL.
[77] Des poursuites p�nales ont par exemple �t� r�cemment introduites sur le fondement de larticle 159 contre Cem Uzan, un homme daffaires controvers� et chef du Parti Jeune, pour avoir trait� le Premier ministre de � l�che � et de � m�cr�ant � et les cinq cha�nes de t�l�vision contr�l�es par la famille Uzan, qui avaient rapport� ses d�clarations, ont �t� interdites d�mission pendant un mois en juillet 2003.
[78] Voir, notamment larr�t Castells c. Espagne du 23 avril 1992, � 46, concernant la condamnation p�nale dun �lu pour avoir imput� au gouvernement la responsabilit� du terrorisme basque.
[79] La loi 4928 avait �t� adopt�e par la TBMM le 19 juin 2003 mais labrogation de larticle 8 de la loi anti-terreur avait fait lobjet dun veto pr�sidentiel. Apr�s avoir �t� revot�e dans les m�mes termes le 16 juillet, elle est entr�e en vigueur le 19 juillet 2003.
[80] Loi n� 2908 du 6 octobre 1983. La loi n� 2820 sur les partis politiques, du 22 avril 1983, a �t� pass�e dans les m�mes conditions.
[81] En f�vrier 2002, la Cour judiciaire n�2 d'Ankara avait par exemple ordonn� la fermeture de l'Union des organisations al�vites et bektashi (ABKB) sur la base de l'article 5, au motif que ses statuts pr�voyaient l'enseignement de la culture al�vite et bektashi, et qu'elle risquait d'encourager la division de l'Etat turc. Cette d�cision a �t� ult�rieurement annul�e.
[82] Y inclus les 20 � 25 millions dAl�vis, qui ne sont pas reconnus comme une communaut� religieuse s�par�e des sunnites, m�me si leurs pratiques sont quelque peu diff�rentes (ils ne prient pas dans les mosqu�es mais dans des maisons de pri�re appel�es cemevi et les femmes peuvent prier avec les hommes).
[83] A cet �gard il convient de rappeler que la Gr�ce, qui est �galement signataire du trait� de Lausanne, a �t� condamn�e par la Cour en 1997 faute doctroi de la capacit� juridique � lEglise catholique de la Can�e.
[84] Officiellement, il ny a pas de minorit�s en Turquie, sauf les minorit�s religieuses reconnues par le trait� de Lausanne. En cons�quence, il ny a pas de statistiques enregistrant lappartenance ethnique.
[85] Les incidents doctobre 1993 � Lice ont donn� lieu � lintroduction de plus de 600 requ�tes � la Cour europ�enne des droits de lhomme : 247 firent lobjet dune radiation du r�le suite � loffre du Gouvernement de verser � chacun des requ�rants entre 10 et 15 000 � (voir d�c. N� 26679/95 du 14 juin 2001), 280 furent d�clar�es irrecevables faute d�puisement valable des voies de recours internes et non respect du d�lai de six mois (d�c. N�62566/00) et 98 sont pendantes. Voir �galement larr�t de violation rendu par la Cour r�cemment dans laffaire Ayder et Autres du 8 janvier 2004.
[86] Le PKK sest transform� en KADEK en avril 2002 et les autorit�s turques essaient maintenant de faire inscrire �galement cette nouvelle organisation sur la liste des organisations terroristes. Le KADEK sest dissous � son tour le 11 novembre 2003 et a �t� remplac� par le Kongra-Gel (Congr�s du Peuple du Kurdistan).
[87] A noter que larticle 87 de la Constitution, modifi� le 17 octobre 2001, pr�voit maintenant une majorit� des 3/5 pour toute loi damnistie et de gr�ce.
[88] Voir article 1 de la loi n� 4771, dernier alin�a. Sur ce point la l�gislation est manifestement en contradiction avec la Recommandation n� 2003/22 du Comit� des Ministres concernant la lib�ration conditionnelle.
[89] Cest ce qui a �t� indiqu� aux co-rapporteurs tant par le pr�sident du HADEP, quils ont rencontr� � Ankara en f�vrier, que par le maire (DEHAP) de Diyarbakir.
[90] Il a �t� expliqu� aux co-rapporteurs quil nexiste pas en r�alit� de langue kurde : il y aurait au total 28 dialectes, dont les principaux sont le Kurman�i (75%), le sorani et le zazaki.
[91] Il est interdit, par exemple, dutiliser une autre langue que le turc lors des meetings de campagne �lectorale et tout contrevenant sexpose � des sanctions p�nales.
[92] Les autorit�s indiquent avoir investi dans la r�gion environ 72.5 millions USD.
[93] Recommandation 1377 du 25 juin 1998 (rapport de la commission des migrations, des r�fugi�s et de la d�mographie, Doc. 8131) et Recommandation 1563 du 29 mai 2002 (rapport de la commission des migrations du 22 mars 2002, Doc. 9391).
[94] Ce qui repr�sente moins que les 4,6% d�lues � la TBMM en 1935, lorsque les femmes obtinrent le droit de vote.
[95] Le nouveau code civil est entr� en vigueur en janvier 2002.
[96] Environ 30 � 35% des hommes seraient illettr�s dans ces r�gions, la diff�rence par rapport aux femmes sexpliquant par lobligation deffectuer le service militaire.
[97] Cest-�-dire des mariages non enregistr�s � l�tat civil, avec pour cons�quence la suppression des droits de propri�t�s des femmes en cas de divorce ou de d�c�s du conjoint et des limitations au droit de garde des enfants en cas de s�paration.
[98] Le classement 2003 de � Transparence Internationale � sur la corruption mondiale (fond� sur la perception du degr� de corruption ressenti par les milieux daffaires, les universitaires et las analystes) a class� la Turquie au 77�me rang sur 133 pays (avec un indice de 3 sur 10).
[99] M�me si, au 1er janvier 2004, le salaire minimum net a �t� fix� � 172, 75 par mois, en augmentation de 34% par rapport � 2003.
[100] Lors de la ratification de la charte sociale de 1961, chaque Etat doit accepter au moins 6 articles sur les 9 que compte le noyau dur.
[101] Voir cependant larticle 26 modifi� de la Constitution, qui r�introduit cette notion supprim�e dans larticle 13.