Doc. 10568
3 juin 2005

Respect des obligations et engagements de la Fédération de Russie

Rapport

Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (Commission de suivi)

Co-rapporteurs: M. David Atkinson, Royaume-Uni, Groupe démocrate européen et M. Rudolf Bindig, Allemagne, Groupe socialiste

Résumé

La période écoulée depuis le précédent rapport de suivi en avril 2002 a été marquée par un effort des autorités russes visant à traiter plusieurs problèmes graves qui représentaient – et, dans certains cas, continuent de représenter – une menace pour la stabilité politique, le progrès économique et le fonctionnement normal des institutions démocratiques du pays. L'Assemblée parlementaire soutient pleinement les efforts déployés par les autorités russes pour lutter contre ces problèmes et améliorer l'efficacité et la responsabilisation du système politique et administratif russe. Toutefois, l'Assemblée considère aussi que les autorités russes devraient opter pour des solutions conformes aux normes et principes contraignants, juridiquement et politiquement, du Conseil de l'Europe.

Ces trois dernières années, la Fédération de Russie a adopté un nouveau code de procédure pénale et une loi sur le service militaire de substitution, elle a réduit significativement le nombre des personnes détenues dans les établissements pénitentiaires, signé la Convention européenne sur le transfèrement des personnes condamnées ainsi que des accords frontaliers avec certains pays voisins. Durant cette même période, cependant, les autres engagements encore non respectés n'ont que très faiblement progressé, y compris en ce qui concerne l'abolition formelle de la peine de mort, le retrait des troupes russes de Moldova et l'obligation de traduire en justice les responsables avérés de violations des droits de l'homme, en particulier en relation avec les événements de Tchétchénie.

L'Assemblée insiste sur la nécessité pour les autorités russes, non seulement d'accélérer le processus de mise en conformité avec les engagements encore non respectés, mais aussi de modifier l'orientation de certaines réformes politiques, législatives et administratives menées récemment. Cela est particulièrement important pour ce qui concerne les changements relatifs au fonctionnement normal de la démocratie pluraliste, qui requiert l'organisation d'élections libres et équitables, la garantie de droits adéquats aux partis d'opposition, la responsabilisation du pouvoir exécutif et l'indépendance des médias.

Dans ce contexte, l'Assemblée décide de poursuivre son suivi du respect des obligations et engagements acceptés par la Fédération de Russie jusqu'à ce qu'elle reçoive des preuves de progrès substantiels concernant notamment les questions mentionnées dans la résolution.

I.Projet de résolution

1.       La Fédération de Russie a adhéré au Conseil de l'Europe le 28 février 1996. Lors de cette adhésion, elle s'est engagée à respecter ses obligations générales au titre du Statut du Conseil de l'Europe, à savoir la démocratie pluraliste, la prééminence du droit et le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales de toutes les personnes placées sous sa juridiction. La Fédération de Russie a aussi accepté de respecter, dans des délais définis, un certain nombre d'engagements spécifiques énumérés dans l'Avis N° 193 (1996) de l'Assemblée.

2.       Ces 15 dernières années, la Russie a fondamentalement changé. Le dernier rapport de suivi de l'Assemblée et la Résolution 1277 (2002), adoptée en avril 2002, ont salué les progrès indéniables accomplis par la Russie en matière de prééminence du droit et de démocratie, ainsi que les efforts considérables entrepris depuis l'adhésion pour honorer ses obligations et engagements.

3.       Ces trois dernières années, la Fédération de Russie a adopté un nouveau code de procédure pénale et une loi sur le service militaire de substitution, réduit significativement le nombre des personnes détenues dans les établissements pénitentiaires, signé la Convention européenne sur le transfèrement des personnes condamnées, ratifié un accord frontalier avec la Lituanie et signé un tel accord avec l'Estonie. Durant cette même période, cependant, les autres engagements encore non respectés n'ont que très faiblement progressé, y compris en ce qui concerne l'abolition formelle de la peine de mort, le retrait des troupes russes de Moldova et l'obligation de traduire en justice les responsables avérés de violations des droits de l'homme, en particulier en relation avec les événements de Tchétchénie.

4.       La période écoulée depuis le précédent rapport de suivi a aussi été marquée par un effort des autorités russes visant à traiter plusieurs problèmes graves qui représentaient – et, dans certains cas, continuent de représenter – une menace pour la stabilité politique, le progrès économique et le fonctionnement normal des institutions démocratiques du pays. Ces problèmes sont notamment les suivants: la menace terroriste persistante liée au conflit dans le Caucase du Nord; les privatisations obscures et irrégulières qui ont abouti à un contrôle oligarchique sur un grand nombre d'actifs et de ressources économiques du pays; enfin, les allégations de corruption émises à l'encontre de certains gouverneurs fédéraux qui n'étaient responsables ni devant les autorités fédérales ni devant les citoyens qui les avaient élus.

5.       L'Assemblée parlementaire soutient pleinement les efforts déployés par les autorités russes pour lutter contre ces problèmes et améliorer l'efficacité et la responsabilisation du système politique et administratif russe. Elle reconnaît sans réserve le droit des autorités russes à mener des réformes adaptées à la situation économique, politique, administrative et historique du pays. Toutefois, l'Assemblée considère aussi que les autorités russes devraient opter pour des solutions conformes aux normes et principes contraignants, juridiquement et politiquement, du Conseil de l'Europe.

6.       L'Assemblée voit dans le train de réformes que le Président Poutine a introduites en automne 2004 afin de renforcer «la verticale du pouvoir», un sujet de grande préoccupation, car ces réformes menacent de multiples manières l'équilibre des pouvoirs indispensable au fonctionnement normal de toute démocratie. Ce bon fonctionnement nécessite non seulement un renforcement vertical du pouvoir mais aussi son partage horizontal.

7.       L'Assemblée s'inquiète de ce que les changements récents apportés à la législation concernant l'élection de la Douma d'Etat et l'organisation des partis politiques vont restreindre de manière drastique la compétition entre les partis. La forte augmentation du seuil électoral (porté à 7%), l'interdiction des coalitions électorales, la réduction, de quatre à deux, du nombre minimal des partis devant être représentés à la chambre basse et, enfin, les nouvelles règles restrictives pour l'autorisation des partis à participer aux élections de la Douma d'Etat, vont limiter les conditions d'accès au parlement, au net avantage des partis déjà représentés à l'actuelle Douma.

8.       De la même manière, les changements qui donnent au Président une influence décisive dans l'élection des gouverneurs régionaux vont affecter la composition de la chambre haute du Parlement russe - le Conseil de la Fédération - qui est responsable du contrôle de l'action du gouvernement fédéral et du Président. Selon la nouvelle législation, la moitié des membres du Conseil seront nommés par les gouverneurs régionaux qui sont eux-mêmes sélectionnés – et peuvent être révoqués à tout moment – par le Président lui-même. Une telle situation est clairement incompatible avec le principe démocratique fondamental de la séparation des pouvoirs entre les organes législatifs et exécutifs.

9.L'Assemblée s'inquiète des propositions récentes visant à confier à l'exécutif la nomination et la révocation des juges et de l'administration judiciaire et les procédures disciplinaires les concernant, car elles peuvent compromettre les chances d'avènement, en Fédération de Russie, d'un système judiciaire indépendant et impartial.

10.       La création récente d'une «chambre publique» chargée de «la coordination des intérêts» des citoyens, des organisations non gouvernementales et des pouvoirs publics est critiquable. Il est en effet difficile de comprendre quel est l'intérêt de créer un nouvel organe chargé de remplir le rôle normalement dévolu, d'une part, à un parlement pluraliste et démocratiquement élu et, d'autre part, à une société civile fonctionnant de manière réellement libre et indépendante.

11.       Des délégations de l'Assemblée ont observé, respectivement en décembre 2003 et en mars 2004, les élections législatives et présidentielles et elles ont dans les deux cas fortement critiqué la partialité des médias et l'utilisation des ressources de l'Etat en faveur du Président en exercice et de ses alliés politiques. L'Assemblée considère que le manque de pluralisme et la partialité des médias audiovisuels constituent un obstacle insurmontable à la conduite d'élections réellement libres et équitables et au bon fonctionnement de la démocratie dans son ensemble.

12.       L'Assemblée encourage donc fortement les autorités russes à améliorer les conditions d'un fonctionnement normal de la démocratie pluraliste et, à cette fin, de:

i.       renforcer les conditions juridiques, administratives et politiques dans lesquelles un parlement élu démocratiquement et réellement pluraliste pourra, non seulement soutenir mais contrôler l'action du pouvoir exécutif;

ii.       réviser la législation adoptée récemment concernant les élections des gouverneurs régionaux, dans la mesure où elle affecte la composition et l'indépendance de la chambre haute du Parlement russe, afin de garantir le plein respect du principe de la séparation des pouvoirs;

iii.       poursuivre les objectifs qui ont inspiré la mise en place de la chambre publique en créant les conditions administratives, fiscales et politiques nécessaires à un fonctionnement normal de la société civile de Russie;

iv.       créer les conditions du pluralisme et de l'impartialité des médias audiovisuels et, à cette fin:

v.       mettre immédiatement fin aux pratiques de harcèlement et d'intimidation à l'encontre des membres de la société civile critiques à l'égard des autorités, en particulier des journalistes, scientifiques et écologistes, qui font régulièrement l'objet d'une application abusive des lois sur la diffamation et le secret d'Etat.

13.       Concernant la prééminence du droit et la protection des droits de l'homme, l'Assemblée encourage fortement les autorités russes à prendre les mesures suivantes:

i.       concernant l'abolition de la peine de mort, ratifier immédiatement le Protocole n° 6 à la Convention européenne des droits de l'homme. L'Assemblée rappelle que le délai initial pour le respect de cet engagement a expiré en 1999 et que les autres pays qui n'ont pas respecté cet engagement essentiel ont été exposés à des sanctions;

ii.       concernant le conflit en République tchétchène, mettre en œuvre les recommandations de l'Assemblée contenues dans la Résolution 1403 (2004), notamment traduire en justice les responsables avérés de violations des droits de l'homme, rechercher un règlement pacifique du conflit, respecter strictement les dispositions du droit humanitaire international, engager des poursuites pour toutes les tentatives visant à intimider ou harceler les militants des droits de l'homme et les personnes ayant déposé une requête devant la Cour européenne des Droits de l'Homme, mettre en oeuvre les recommandations figurant dans les rapports du Comité européen pour la prévention de la torture et envisager leur publication;

iii.       coopérer sans réserve avec la Cour européenne des Droits de l'Homme, ne s'opposer en aucune manière à l'exercice effectif du droit de recours individuel devant la Cour et exécuter rapidement et intégralement ses décisions, en particulier celle qui a été rendue dans l'affaire Ilascu et autres;

iv.       concernant les mauvais traitements et les décès survenus dans l'armée en dehors des conflits armés, appliquer une politique de tolérance zéro au problème endémique et persistant du bizutage, au moyen de programmes de formation pour les personnels et en veillant à ce que les infractions fassent de manière systématique, fiable et transparente l'objet d'une instruction et de poursuites;

v.       réviser la loi adoptée récemment sur le service militaire de substitution afin d'enlever à cette loi son caractère disproportionné et de la rendre conforme aux pratiques européennes;

vi.       intensifier les efforts visant à combattre les violences et la discrimination à motivation religieuse, ethnique ou raciale, améliorer en particulier la situation des Turcs meskhètes qui souhaitent rester dans la région de Krasnodar et instruire et sanctionner tous les cas avérés de harcèlement et de discrimination;

vii.       garantir l'exclusion de toute discrimination juridique, administrative et fiscale à l'encontre des confessions dites non traditionnelles et rendre la loi fédérale sur la liberté de conscience et les associations religieuses conforme aux normes du Conseil de l'Europe;

viii.        poursuivre les réformes dans le domaine judiciaire en stricte conformité avec les normes du Conseil de l'Europe afin de lever tous les doutes quant à l'équité et l'indépendance du système judiciaire russe, qui sont notamment apparus au sujet des procès contre les dirigeants de Ioukos;

ix.       poursuivre la réforme de la Prokuratura conformément aux normes européennes pertinentes et retirer la réserve formulée au sujet de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme;

x.       concernant la loi sur le service fédéral de sécurité:

xi.       concernant la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, ratifier l'instrument sans plus tarder et respecter ainsi l'engagement dont le délai initial a expiré en février 1997;

xii.       concernant la Charte sociale européenne et la Convention européenne sur le transfèrement des personnes condamnées, ratifier ces deux instruments aussi rapidement que possible.

14.       Pour ce qui concerne les relations de la Russie avec les Etats voisins et les autres Etats de la région qui sont également membres du Conseil de l'Europe, l'Assemblée, tout en se félicitant du récent accord sur la fermeture des bases militaires russes restantes en Géorgie, encourage fortement les autorités russes à prendre les mesures suivantes:

i.       concernant le retrait des forces armées russes et de leur matériel restant du territoire de la Moldova, effectuer sans plus tarder ce retrait qui aurait dû être achevé en octobre 1997;

ii.       concernant le traitement des pays voisins et des autres pays de la région comme des zones d'influence spéciale, contribuer de manière constructive à la résolution des problèmes encore en suspens et mettre un terme aux pratiques qui, comme la délivrance de passeports russes aux habitants des régions géorgiennes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud, peuvent – de manière directe ou indirecte – porter atteinte à la souveraineté et l'intégrité territoriale de ces pays;

iii.       coopérer avec les autorités géorgiennes afin de créer les conditions d'un retour volontaire des Turcs meskhètes vers les régions d'où ils ont été déplacés par la force;

iv.       concernant les personnes autrefois déportées y compris des Etats baltes et leurs descendants, leur fournir une assistance pour les aider à retourner chez eux conformément aux programmes mentionnés dans l'Avis N° 193 (1996) et la législation adoptée;

v.       concernant la restitution des biens culturels et autres réclamés par les Etats membres du Conseil de l'Europe, continuer de s'efforcer de régler les questions encore en suspens au moyen de négociations directes avec les pays concernés, à des conditions mutuellement avantageuses, compte tenu de la nécessité de restituer les biens culturels qui ont été transférés de Russie pendant la seconde guerre mondiale.

15.       L'Assemblée voit un signe encourageant dans les déclarations récentes de la délégation russe promettant des progrès au sujet de plusieurs engagements non respectés à ce jour. Toutefois, elle souhaite insister sur la nécessité pour les autorités russes, non seulement d'accélérer le processus de mise en conformité avec les engagements encore non respectés, mais aussi de modifier l'orientation de certaines réformes politiques, législatives et administratives menées récemment. Cela est particulièrement important pour ce qui concerne les changements relatifs au fonctionnement normal de la démocratie pluraliste, qui requiert l'organisation d'élections libres et équitables, la garantie de droits adéquats aux partis d'opposition, la responsabilisation du pouvoir exécutif et l'indépendance des médias.

16.       Dans ce contexte, l'Assemblée décide de poursuivre son suivi du respect des obligations et engagements acceptés par la Fédération de Russie jusqu'à ce qu'elle reçoive des preuves de progrès substantiels concernant notamment les questions mentionnées dans la présente résolution.

II.Projet de recommandation

1.       Se référant à la Résolution … (2005) sur le respect par la Fédération de Russie de ses obligations et engagements, l'Assemblée parlementaire considère que la Russie doit continuer, dans les années à venir, de bénéficier des programmes d'assistance et de coopération du Conseil de l'Europe afin de promouvoir la démocratie pluraliste, le respect de la prééminence du droit et la sauvegarde des droits de l'homme.

2.       Eu égard à l'étendue et à la diversité de la Russie, l'Assemblée considère que les programmes d'assistance et de coopération en cours (y compris les programmes menés conjointement avec l'Union européenne) ne sont pas suffisants – à la fois en termes de domaine d'application, de financement et de ressources humaines – pour avoir un impact significatif dans chacun des 89 sujets de la Fédération de Russie, en particulier dans les domaines où les réformes indispensables, présentes ou futures, profiteraient indéniablement de l'expertise et du savoir-faire du Conseil de l'Europe.

3.       L'Assemblée recommande donc au Comité des Ministres:

i.        d'analyser les obstacles rencontrés par les autorités russes en ce qui concerne la ratification des conventions du Conseil de l'Europe comme en effet, depuis son adhésion il y a neuf ans, sur un total de 200 conventions, la Fédération de Russie n'en a ratifié que 46 et signé 15 (en mai 2005) et d'insister en particulier sur une ratification rapide des Protocoles 6, 12, 13 et 14 à la Convention européenne des droits de l'homme;

ii.       d'encourager les autorités russes à intensifier la coopération avec le Conseil de l'Europe afin de garantir la parfaite conformité de la législation et des pratiques russes avec les principes et normes de l'Organisation, en particulier pour ce qui est des normes contenues dans la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi que le plein respect des décisions de la Cour de Strasbourg au sujet des mesures – individuelles et générales – qui pourraient s'avérer nécessaires et d'intensifier les programmes de coopération et d'assistance pour renforcer les institutions fédérales et régionales du médiateur et l'indépendance du système judiciaire;

iii.       d'inviter les autorités de la Fédération de Russie à soumettre à l'évaluation des experts du Conseil de l'Europe, en particulier, tout projet de législation relatif à la réforme de la Prokuratura et du service fédéral de sécurité, la création d'un service public de radiodiffusion, la révision des lois sur les organisations religieuses et le service militaire de substitution, etc.;

iv.       de redéfinir, en consultation avec les autorités russes, les priorités des programmes actuels et futurs de coopération et d'assistance, afin de permettre à la Russie de respecter aussi tôt que possible les obligations et engagements restants, énumérés dans la Résolution … (2005);

v.       d'allouer à cette fin des crédits nettement plus importants au budget de l'Organisation consacré aux programmes d'assistance et de coopération, afin de renforcer de manière significative les programmes destinés à la Russie. Cette mesure ne devra pas être préjudiciable au programme intergouvernemental d'activités ni aux programmes d'assistance et de coopération des autres Etats membres.

III.       Exposé des motifs par M. Atkinson et M. Bindig

TABLE DES MATIÈRES

   

Page #

     

I.

INTRODUCTION

9

     
     

II.

VUE D'ENSEMBLE DES RELATIONS DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE AVEC LE CONSEIL DE L'EUROPE

9

     
     

III.

PRINCIPAUX DEVELOPPEMENTS DEPUIS 2002

10

     

A.

Le conflit dans la République Tchétchène

10

B.

Le terrorisme

11

C.

Les réformes récemment lancées par le Président Poutine

12

     
     

IV.

SITUATION ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

17

     

A.

Les tendances économiques générales

17

B

La réforme des prestations sociales

17

C.

La fin des oligarques?

18

D.

Les tendances démographiques

18

E.

L'épidémie du VIH/sida

19

F.

La Charte sociale européenne

19

     
     

V.

RELATIONS EXTÉRIEURES

19

     

A.

Relations avec d'autres organisations internationales

20

B.

Le retrait des troupes russes de la Moldova

22

C.

Le respect des obligations du Traité relatif aux forces armées conventionnelles en Europe (FCE)

23

D.

L'«étranger proche»

24

E.

La restitution des biens aux Etats membres du Conseil de l'Europe

25

     
     

VI.

FONCTIONNEMENT DE LA DÉMOCRATIE PLURALISTE

25

     

A.

Des élections libres et équitables

25

B.

Le fonctionnement du Parlement et son contrôle de l'exécutif

27

C.

La démocratie locale et régionale

27

D.

Le pluralisme des médias

28

E.

La société civile

30

F.

Les institutions de médiation

31

G.

La Commission présidentielle des Droits de l'Homme

33

     
     

VII.

PRÉÉMINENCE DU DROIT

34

     

A.

Réforme judiciaire

34

B.

Le fonctionnement du système judiciaire

37

C.

La réforme de la prokuratura

40

D.

Barreaux

44

E.

La réforme pénitentiaire

45

F.

Le transfert du centre de détention provisoire de Lefortovo

48

G.

La révision de la loi sur le service fédéral de sécurité

49

H.

    La loi fédérale sur les secrets d'Etat

51

I.

La lutte contre la corruption, le blanchiment de l'argent et la traite

52

     

VIII.

DROITS DE L'HOMME

54

     

A.

Affaires russes portées devant la Cour européenne des Droits de l'Homme

55

B.

Le droit à la vie et la lutte contre l'impunité

57

C.

L'abolition de la peine de mort

60

D.

Torture et traitements inhumains ou dégradants

62

E.

Violence à l'égard des femmes

64

F.

Le bizutage dans l'armée

64

G.

Le travail forcé

67

H.

La détention arbitraire ou illégale

67

I.

Procès équitable et accès à la justice

69

J.

La liberté de circulation et de résidence, migration et nationalité

71

K.

La liberté de conscience et de religion

74

L.

Le service militaire de substitution

80

M.

La liberté d'expression

81

N.

La liberté de réunion et d'association

86

O.

La protection des minorités, la xénophobie et l'intolérance raciale

86

     
 

ANNEXES

 
     

1.

Programmes des visites des co-rapporteurs en Fédération de Russie

93

     

2.

Liste des documents de l'Assemblée relatifs à la République tchétchène

103

     

3.

Liste des conventions auxquelles la Fédération de Russie est Partie

107

     

4.

Observations finales de la Délégation russe

111

     

5.

Avis N° 193 (1996)

116

I.       INTRODUCTION

1.       La Fédération de Russie a adhéré au Conseil de l'Europe le 28 février 1996. La procédure de suivi a débuté le 25 avril 1996, initialement au titre de la Directive n° 508 (1995) et, par la suite, en vertu de la Résolution 1115 (1997). Aux termes de cette résolution, la Commission de suivi est chargée de vérifier le respect des obligations contractées par les Etats membres conformément aux conditions du Statut du Conseil de l'Europe1, de la Convention européenne des Droits de l'Homme et de toutes les autres conventions du Conseil de l'Europe auxquelles ils sont parties2, et le respect des engagements souscrits par les autorités des Etats membres lors de leur adhésion au Conseil de l'Europe. La liste des engagements spécifiques de la Fédération de Russie qui, de même que les obligations générales, constituent la base de la procédure de suivi, figure dans l'Avis N° 193 (1996) de l'Assemblée (voir annexe 5).

II.       VUE D'ENSEMBLE DES RELATIONS DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE AVEC LE CONSEIL DE L'EUROPE

2.       En 1989, Mikhaïl Gorbatchev, Président du Soviet suprême de ce qui était alors l'URSS, s'est adressé à l'Assemblée parlementaire et a pour la première fois parlé du Conseil de l'Europe comme d'une «maison européenne commune».

3.       Le 14 janvier 1992, le Bureau a accordé au Parlement russe (qui portait encore la dénomination de «Soviet suprême») le statut d'invité spécial auprès de l'Assemblée, après avoir pris note que le mandat de la délégation d'invité spécial du Soviet suprême de l'URSS avait pris fin du fait de la dissolution de l'Union soviétique. La Fédération de Russie s'est portée candidate à l'adhésion au Conseil de l'Europe le 7 mai 1992.

4.       En janvier 1995, le Président de la Fédération de Russie, M. Eltsine, le Premier Ministre, M. Tchernomyrdine, le Président du Conseil de la Fédération, M. Choumeïko, et le porte-parole de la Douma d'Etat, M. Rybkine, ont signé une lettre assortie d'un mémorandum clarifiant plusieurs points que les co-rapporteurs de l'Assemblée avaient soulevés à propos de l'adhésion. Ces points ont par la suite été repris dans la liste d'engagements formels contenue dans l'Avis N° 193 (1996)3. Dans la lettre, les plus hauts responsables de la Fédération de Russie s'engageaient à «respecter pleinement» les obligations résultant de l'adhésion au Conseil de l'Europe.

5.       Dans le contexte du conflit dans la République tchétchène et en raison d'un recours inconsidéré et disproportionné à la force de la part de l'armée russe, l'Assemblée a suspendu la procédure relative à son avis statutaire sur la demande d'adhésion de la Russie le 2 février 19954. La procédure a été reprise en septembre 19955 à la suite de l'accord de cessez-le-feu du 30 juillet 1995, qui a mis un terme aux hostilités du premier conflit tchétchène. Le 25 janvier 1996, l'Assemblée a adopté l'Avis N° 193 (1996) relatif à la demande d'adhésion de la Russie au Conseil de l'Europe, qui a ouvert la voie à l'adhésion du pays le 28 février 1996. L'Assemblée a créé le même jour6 une commission ad hoc sur la Tchétchénie chargée de «suivre la situation en Tchétchénie et répondre à la demande d'assistance de la Russie afin d'élaborer des propositions qui soient conformes à la Convention-cadre du Conseil de l'Europe pour la protection des minorités nationales et qui soient acceptables pour les deux parties».

6.       Le présent document est le troisième rapport sur le respect des obligations et des engagements de la Fédération de Russie, après le rapport d'information de juin 19987 et un rapport complet en avril 20028. Les observations finales soumises par la Délégation russe à l'avant-projet de rapport révisé figurent en annexe IV au présent rapport explicatif.

7.       L'obligation de faire rapport au moins une fois tous les deux ans sur un pays soumis à une procédure de suivi n'a pu être respectée, en grande partie du fait de l'immensité du territoire9 de la Fédération de Russie et de la structure complexe de ses pouvoirs fédéraux et régionaux10, mais aussi en raison des élections législatives et présidentielles qui se sont déroulées respectivement en décembre 2003 et mars 2004. Lors de l'élaboration du présent rapport, nous avons visité Khabarovsk (kraï – territoirede Khabarovsk) et Vladivostok (territoire 'maritime') du 26 octobre au 1er novembre 2003, Ekaterinbourg (oblast – régionde Sverdlovsk) et Kazan (République du Tatarstan) du 9 au 14 octobre 2004 et Moscou du 1er au 6 novembre 200411.

III.       PRINCIPAUX DEVELOPPEMENTS DEPUIS 2002

A.       Le conflit en République tchétchène

8.       L'Assemblée a continué à suivre attentivement les événements en République tchétchène, les hostilités ayant repris à la suite d'une série d'attentats à la bombe dans plusieurs grandes villes russes, et après l'incursion de Chamil Bassaïev au Daghestan au cours de l'été et au début de l'automne 1999. Plusieurs de ses commissions ont établi des rapports12 traitant de la crise sur les plans politique, humanitaire et des droits de l'homme. En 2000, l'Assemblée a suspendu le droit de vote de la délégation de la Douma d'Etat à l'Assemblée et, après la levée de cette sanction en 2001, a créé un groupe de travail mixte sur la Tchétchénie réunissant des représentants de l'Assemblée et de la Douma d'Etat.

9.       Les trois derniers rapports sur la situation de la République tchétchène ont été adoptés durant la partie de session d'octobre 2004. La Résolution 1404 (2004) sur la situation humanitaire de la population tchétchène déplacée13 déplore le fait que la sécurité et la situation humanitaire en République tchétchène demeurent peu satisfaisantes, malgré quelques améliorations concernant la situation des personnes déplacées en Ingouchie.

10.       La Résolution 1402 (2004) sur la situation politique dans la République tchétchène14 condamne la poursuite et l'extension de la violence en Tchétchénie et dans les régions voisines et, notamment, la prise d'otages tragique de Beslan par des terroristes tchétchènes. La résolution examine également les possibilités de règlement politique du conflit et charge la Commission des questions politiques de créer une table ronde rassemblant les forces politiques de la République tchétchène et les autorités de la Fédération de Russie. La première de ces tables rondes s'est déroulée à Strasbourg dès le mois de mars 2005.

11.       Le rapport établi par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme15 et la Résolution 1403 (2004) ont décrit la situation des droits de l'homme en République tchétchène comme étant dramatique. L'Assemblée a conclu qu'un climat d'impunité continuait à prévaloir en Tchétchénie, les forces de l'ordre tchétchènes et fédérales ne pouvant, ou ne souhaitant, pas amener la vaste majorité des auteurs de graves violations des droits de l'homme à répondre de leurs actes (pour plus de détails, voir ci-dessous la section relative aux droits de l'homme).

12.       Le conflit en République tchétchène, et notamment la conduite des forces de sécurité de la Fédération du Russie, relève de la procédure de suivi. Les conclusions d'autres commissions de l'Assemblée et d'autres organes du Conseil de l'Europe, les décisions de la Cour européenne des Droits de l'Homme dans ce domaine et les informations fournies par les autorités russes sont mentionnées dans le présent rapport de suivi afin d'évaluer le respect de deux engagements spécifiques et d'une obligation générale de respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales en vertu de l'article 3 du Statut du Conseil de l'Europe.

13.       Le paragraphe 10 (vii) de l'Avis N° 193 (1996) relatif à la demande d'adhésion de la Russie au Conseil de l'Europe prend note de l'intention de ce pays «de régler les différends internationaux et internes par des moyens pacifiques (obligation qui incombe à tous les Etats membres du Conseil de l'Europe), en rejetant résolument toute menace d'employer la force contre ses voisins». L'engagement de régler les conflits internes par des moyens pacifiques est applicable à la situation en Tchétchénie; toutefois, son respect doit être évalué en tenant compte de la menace que l'insurrection dans cette République présente pour la sécurité publique de la population de Tchétchénie et du reste de la Fédération de Russie. Le second conflit a été provoqué par une série d'attentats terroristes et il serait ridicule de demander à la Russie de répondre à cette crise en n'employant que des moyens pacifiques.

14.       Comme tout Etat membre du Conseil de l'Europe, la Russie a une obligation constitutionnelle de protéger ses citoyens. Pour ce faire, elle a le droit de recourir à tous les moyens légaux dont elle dispose, y compris un usage raisonné et proportionné de la force, sous réserve que toutes les normes du Conseil de l'Europe en la matière soient respectées. Le respect de cet engagement peut donc être évalué d'après les efforts déployés par les autorités russes pour apporter au conflit une solution pacifique et politique. Ces efforts sont indéniables, mais ils souffrent de l'impunité continue pour les violations des droits de l'homme et du fait que la République tchétchène est devenue une zone de non-droit, d'où la défiance de la population locale. Dans ces conditions, le référendum constitutionnel de mars 2003 et les élections présidentielles d'août 2004 n'ont pu répondre aux critères d'un scrutin démocratique.

15.       Dans le chapitre sur les droits de l'homme, la situation en Tchétchénie sera évaluée au regard de l'obligation générale figurant dans l'article 3 du Statut du Conseil de l'Europe, selon lequel «Tout membre du Conseil de l'Europe reconnaît le principe de la prééminence du droit et le principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction doit jouir des droits de l'homme et des libertés fondamentales». La Russie a en outre pris l'engagement spécifique de traduire en justice les auteurs de violations des droits de l'homme, notamment en relation avec les événements de Tchétchénie.

B.       Le terrorisme

16.       Depuis le début du second conflit en République tchétchène, les attentats terroristes contre des citoyens russes ont augmenté de manière significative. La multiplication des attentats à la bombe qui a déclenché l'intervention des forces russes en septembre et en octobre 1999 a été suivie d'attentats contre des cibles militaires et, surtout, civiles dans l'ensemble de la Fédération de Russie, qui ont fait plusieurs centaines de victimes. L'un des actes terroristes parmi les plus impitoyables et les plus tragiques a été la prise d'otages du théâtre de la Dubrovka, à Moscou, en octobre 2002, où plus de 120 otages ont été tués; il faut mentionner aussi deux attentats suicides perpétrés en décembre 2002 et mai 2003, qui visaient des édifices de l'Etat en Tchétchénie et qui ont tué au total plus d'une centaine de personnes. En juin et en août 2003, deux attentats suicides tout aussi meurtriers ont pris pour cible le personnel militaire de Mozdok, près de la frontière tchétchène. En juillet 2003, un attentat suicide, lors d'un festival de rock près de Moscou, a tué au moins

quinze personnes tandis qu'un autre attentat suicide, commis en décembre 2003 devant l'Hôtel National de Moscou, a fait six autres victimes. Egalement en décembre 2003, plus d'une quarantaine de personnes ont été tuées dans un attentat à la bombe contre un train, dans le sud de la Russie.

17.       Il y a eu une nouvelle escalade du terrorisme en 2004. En février, un attentat suicide a fait une quarantaine de victimes dans le métro de Moscou. En mai, Le Président tchétchène Kadyrov est mort à Grozny dans l'explosion d'une bombe. En août, deux avions de ligne ont explosé en vol à quelques minutes d'intervalle, tuant l'ensemble des 89 passagers et membres de l'équipage. En août également, dix personnes au moins ont été tuées dans une explosion à l'extérieur de la station de métro Rijskaïa, à Moscou.

18.       Cette série d'attentats terroristes a atteint un sommet en septembre 2004 lorsqu'un commando de rebelles tchétchènes a pris en otage des centaines d'enfants, de parents et d'enseignants dans une école de Beslan, en Ossétie du Nord. Plus de 330 personnes ont été tuées, dont un grand nombre d'enfants. Beslan et ses victimes innocentes ont mis l'Europe face à une horreur qu'elle n'avait pas imaginée. Cet attentat sciemment organisé contre des enfants alors qu'ils célébraient le jour de la rentrée scolaire a marqué un niveau de barbarie encore jamais atteint dans la guerre que mène le terrorisme mondial contre l'humanité tout entière. Nous souhaitons saisir cette occasion pour réitérer notre sympathie et notre soutien aux familles des victimes de Beslan, ainsi qu'à tous les citoyens de la Fédération de Russie.

19.       Cette énumération des actes de terrorisme commis récemment sur le territoire de la Fédération de Russie n'est pas exhaustive, mais elle illustre bien l'ampleur de la menace que doivent affronter les autorités de ce pays. Les citoyens russes sont profondément traumatisés et demandent à bon droit au gouvernement une action urgente et efficace qui assurera leur protection contre la violence terroriste. Le gouvernement russe nécessite et mérite par conséquent un plein soutien dans sa lutte contre le terrorisme. Sa réussite ou son échec dans cette entreprise sera décisif pour la sécurité non seulement de la Russie mais aussi de l'Europe et du monde entier.

20.       L'Assemblée et le Conseil de l'Europe, mais aussi d'autres instances européennes et internationales, devraient soutenir toutes les mesures anti-terroristes compatibles avec les normes européennes en matière de droits de l'homme et de libertés fondamentales. A cet égard, nous souhaitons réitérer la position inébranlable de l'Assemblée selon laquelle les droits de l'homme, la prééminence du droit et la démocratie sont dans la guerre contre le terrorisme un atout, et non un obstacle à l'efficacité. Toutes les mesures et réformes adoptées jusqu'ici par l'administration présidentielle et la Douma en réponse au terrorisme doivent être évaluées au regard de ce contexte, ce que nous nous proposons de faire dans le présent rapport.

C.       Les réformes récemment lancées par le Président Poutine

21.       Les dernières élections de la Douma d'Etat ont eu lieu le 7 décembre 2003 et ont vu la victoire retentissante du parti de la Russie Unie qui a obtenu 300 des 450 sièges, donnant à ce parti pro-présidentiel une majorité constitutionnelle de 66,7% au parlement16.

22.       Le président Poutine a encore consolidé sa position après les élections présidentielles du 14 mars 2004, qu'il a remportées avec plus de 70% des suffrages, devant le candidat du Parti communiste M. Kharitonov qui a obtenu moins de 14% des suffrages17.

23.       Les deux scrutins ont fait l'objet d'une observation par des délégations de l'Assemblée, qui ont conclu que le scrutin était techniquement bien organisé; cependant, elles ont vivement critiqué la couverture des médias, extrêmement partiale et favorable au président sortant et aux forces politiques qui le soutenaient18. Nous reviendrons sur ce point dans le chapitre sur le pluralisme politique et le fonctionnement des institutions démocratiques en Fédération de Russie.

24.       Du fait de ces élections législatives, une majorité pro-présidentielle écrasante domine entièrement la Douma d'Etat. Cela permet au président et à son gouvernement de mettre en œuvre des réformes d'envergure que l'opposition ne peut pas réellement contester, ralentir ni bloquer. On souhaiterait qu'une des premières mesures à bénéficier de cette situation soit l'abolition formelle de la peine de mort, engagement souscrit de longue date vis-à-vis du Conseil de l'Europe. L'excuse invoquée précédemment, selon laquelle l'initiative ne jouissait pas d'un soutien parlementaire suffisant, ne saurait à présent prétendre à la même validité.

25.       En l'absence, à ce jour, d'une quelconque initiative en faveur de l'abolition de la peine de mort, le premier train de réformes majeures présenté par le pouvoir présidentiel a été annoncé dans le sillage de la tragédie de Beslan, en septembre 2004. Lors d'une réunion gouvernementale élargie, le 13 septembre, le président Poutine a annoncé son intention de procéder à une réorganisation complète du système du pouvoir exécutif du pays, en conséquence de quoi «la Fédération et ses sujets (entités) devront participer de concert à la mise en œuvre des organes exécutifs dans les territoires de Russie» et, d'autre part, «les hauts responsables des entités de la Fédération devront être élus par les assemblées locales sur proposition du chef de l'Etat19». Lors de la même réunion, le président Poutine a également annoncé son intention d'introduire le scrutin proportionnel pour l'élection de la Douma et d'instituer une «chambre publique» chargée de «l'examen public des décisions clés du gouvernement, et notamment des projets de loi…» Dmitri Kozak, chef de l'administration présidentielle, a été nommé représentant plénipotentiaire du président dans le District fédéral («super-région») du Sud; doté de pouvoirs étendus, il est chargé d'améliorer le niveau de vie de la région. Le président a aussi insisté sur la nécessité de se pencher sur les activités des services d'urgence et des forces de l'ordre de Russie, et d'interdire les organisations extrémistes qui «se dissimulent derrière des slogans religieux, nationalistes ou autres». A l'occasion d'autres déclarations publiques, le président a défendu son plan comme étant une mesure nécessaire pour le renforcement de la «verticale du pouvoir».

      Changements concernant l'élection des gouverneurs de régions

26.       Le 29 septembre 2004, le président Poutine a présenté à la Douma d'Etat un projet de loi visant à modifier les lois fédérales «sur les principes généraux de l'organisation des instances législatives et exécutives des sujets de la Fédération de Russie» et «sur les garanties fondamentales des droits électoraux et du droit des citoyens de la Fédération de Russie à participer à des référendums». Le projet de loi a été adopté par la Douma d'Etat en première lecture le 29 octobre 2004 et définitivement le 3 décembre (le 8 décembre par le Conseil de la Fédération); il a été promulgué par le président le 11 décembre 2004.

27.       Aux termes de cette loi, le président de la Fédération de Russie soumet aux parlements régionaux les candidatures pour les responsables des organes exécutifs régionaux. Si un parlement régional refuse par deux fois d'accepter la candidature soumise, le président de la Fédération de Russie a le droit de dissoudre l'assemblée en question et de nommer un chef intérimaire de l'exécutif régional (il peut aussi soumettre une troisième candidature). Une assemblée régionale peut également être dissoute par le Président si elle ne parvient pas à résoudre des contradictions entre la législation régionale et la législation fédérale en application d'une décision de justice20. Par ailleurs, d'autres motifs de révocation des gouverneurs par le président avant la fin de leur mandat ont été prévus, par exemple en cas de «perte de la confiance du président» ou d'«exécution inadéquate des obligations». Ces dispositions peuvent être appliquées à la fois dans le cas de personnes nommées après l'entrée en vigueur de la nouvelle procédure et de personnes élues antérieurement au suffrage universel direct21.

28.       Initialement, le président Poutine et les représentants de son administration avaient suggéré que la réforme pourrait mutatis mutandis être étendue à la nomination des candidats à la fonction de maire des grandes villes. Toutefois, le 8 avril 2005, la Douma d'Etat a adopté en dernière lecture (le texte est en cours d'examen par le Conseil de la Fédération) des modifications à la loi fédérale sur les principes généraux de l'organisation de l'autonomie locale en Fédération de Russie, qui permettent aux autorités des Sujets de la Fédération de décider du mode d'élection des responsables locaux (maires). Après la première lecture du projet de loi, en mars, le président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe, M. Di Stasi, a souligné que le Congrès considère qu'une telle disposition serait contraire à l'article 3 (2) de la Charte européenne de l'autonomie locale, qui prévoit que les droits en matière d'autonomie locale doivent être exercés par des autorités démocratiquement constituées. Le Congrès a aussi considéré que le pouvoir d'élire les maires doit appartenir à la population de la localité concernée ou à un organe élu spécifique représentant la collectivité locale. La version finale du projet de loi devrait donc être contrôlée du point de vue de sa conformité avec la Charte.

29.       Les réactions internes aux modifications apportées au mode d'élection des chefs des exécutifs régionaux ont été majoritairement positives, y compris de la part de ceux qu'elles concernaient le plus directement. A quelques rares exceptions près, la plupart des gouverneurs régionaux ont soutenu l'initiative. Un grand nombre d'entre eux ont même décidé de rejoindre le parti pro-présidentiel 'Russie Unie' afin, semble-t-il, d'augmenter leurs chances d'être reconduits dans leurs fonctions dans le nouveau système. Plusieurs membres de la chambre haute (le Conseil de la Fédération), qui sont pour moitié désignés par les gouverneurs régionaux et pour l'autre moitié par les assemblées régionales, ont aussi rejoint ce parti. Par conséquent, le parti 'Russie Unie', qui disposait déjà d'une majorité des deux tiers à la chambre basse, contrôle maintenant aussi la chambre haute du parlement russe.

30.       Une des rares expressions de désaccord est venue de la République du Tatarstan, qui jouit du niveau le plus élevé d'autonomie parmi les 89 entités fédérales de la Russie. Alors que M. Mintimer Chaïmiev, président du Tatarstan, avait lors de notre réunion d'octobre soutenu l'initiative du président Poutine et présenté cette réforme comme une mesure temporaire susceptible d'être rapportée à l'avenir, le parlement de la République avait des objections quant au droit du président de la Fédération de dissoudre une assemblée régionale. Ces objections, qui n'allaient pas jusqu'à contester l'ensemble des réformes, semblent avoir été partiellement prises en considération par l'administration présidentielle et la loi adoptée comporte, sans entrer dans les détails, une référence à une «procédure de conciliation» qui sera mise en œuvre avant que le président puisse faire usage de son droit de dissoudre un parlement régional.

31.       Aucun instrument du Conseil de l'Europe ne prévoit qu'un pays doive adopter une structure fédérale, mais le fait est qu'un système fédéral fonctionnant correctement pourrait servir de contrepoids démocratique au pouvoir central et renforcer le fonctionnement de la démocratie dans la Fédération de Russie, compte tenu de l'immensité du territoire et de la diversité du pays. Selon le président Giovanni di Stasi et le Bureau du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe, «la nomination des gouverneurs régionaux par les autorités fédérales, même avec l'approbation des assemblées régionales, est contraire à l'esprit du fédéralisme22».

32.       Afin d'évaluer les conséquences des changements apportés au mode d'élection des gouverneurs pour le fédéralisme en Russie et la pertinence de ces mesures au regard de leur objectif proclamé de lutte contre le terrorisme, la Commission de suivi a demandé à la Commission de Venise de rédiger un avis sur la proposition de projet de loi, qui avait déjà été adoptée par la Douma d'Etat le 3 décembre 2004. La Commission de Venise a adopté son avis lors d'une réunion tenue le 4 décembre 200423.

33.       Sur la question de la constitutionnalité du projet de loi, la Commission de Venise a déclaré qu'à ses yeux la constitution de la Fédération de Russie offre une base à une ingérence du niveau fédéral dans la fonction exécutive des sujets de la Fédération. Elle a ajouté qu'il appartiendrait en dernier ressort à la Cour constitutionnelle russe, si elle était saisie de cette question, de déterminer dans quelle mesure la base constitutionnelle est suffisante pour justifier le très large pouvoir d'intervention que le projet de loi donne au président.

34.       S'agissant de la compatibilité du projet de loi avec les «normes européennes applicables dans les Etats fédéraux», la Commission de Venise a tout d'abord souligné qu'un Etat centralisé peut être membre du Conseil de l'Europe et qu'une évolution d'un Etat fédéral vers la centralisation ne peut par conséquent être considérée comme contraire aux normes européennes. Elle a cependant ajouté que, si des combinaisons d'éléments fédéraux et centralisés sont possibles, elles ne doivent pas comporter d'incohérences ni de facteurs de dysfonctionnements susceptibles de poser des problèmes eu égard aux principes de la prééminence du droit et de la séparation des pouvoirs. En comparant les solutions envisagées dans le projet de loi avec les principes appliqués dans d'autres Etats fédéraux européens tels que l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse, la Belgique et l'Espagne, la Commission de Venise a conclu que le nouveau projet de loi russe méconnaissait manifestement le principe selon lequel les entités fédérées déterminent de manière autonome la composition de leurs instances exécutives et législatives.

35.       La principale inquiétude exprimée par la Commission de Venise concerne les conséquences de la nouvelle loi pour la chambre haute du parlement russe – le Conseil de la Fédération. Cette instance, dont la tâche principale est de contrôler l'action des autorités fédérales et, en particulier, du président, se compose de deux représentants de chaque sujet de la Fédération de Russie, issus respectivement des instances législatives et exécutives. Aux termes de la nouvelle loi, la moitié des représentants composant l'instance chargée de contrôler le président seront désignés par les plus hauts responsables de l'exécutif, eux-mêmes nommés par ce président, et pouvant être révoqués à tout moment par ce dernier. La Commission de Venise conclut par conséquent que l'adoption du projet de loi nécessite une réforme de la composition du Conseil de la Fédération, afin de préserver le principe de la séparation des pouvoirs.

      Modifications de l'élection de la Douma d'Etat et enregistrement des partis

36.       Les modifications tendant à faire passer le système électoral mixte à un système purement proportionnel24, également annoncées par le président Poutine le 13 septembre, ont été soumises à la Douma d'Etat le 8 décembre et adoptées en première lecture le 24 décembre 2004 et en deuxième lecture le 15 avril 2005. Les élections législatives de 2007 seront donc les premières à appliquer un scrutin purement proportionnel, avec un nouveau seuil porté à 7% (envisagé dans la loi adoptée en 2002 et également proposé dans le nouveau projet de loi) et l'impossibilité pour les coalitions de participer. Dans pareilles conditions, les chances pour qu'il existe au parlement une opposition constructive et durable face aux partis pro-présidentiels seront sérieusement réduites.

37.       C'est également en décembre 2004 que la Douma d'Etat a adopté en dernière lecture – et que le président a signé – les modifications à la loi sur les partis politiques, qui portent de 10 000 à 50 000 le nombre des membres requis pour qu'un parti puisse être enregistré. La loi exige aussi que les partis aient des sections d'au moins 500 membres dans plus de la moitié des 89 sujets de la Fédération, et des sections d'au moins 250 membres dans les autres (au lieu de 100 et 50 membres respectivement dans la loi précédente). Afin d'être autorisés à se présenter aux élections de la Douma de 2007, les partis politiques devront avoir enregistré leur nombre minimum d'adhérents d'ici le 1er janvier 2006. Il est clair que ces nouvelles conditions avantagent les partis représentés actuellement à la Douma d'Etat – Russie Unie, Rodina (Patrie) et le Parti démocratique libéral – tous trois favorables au projet de loi, ainsi que le parti communiste, dans l'opposition, qui compte quelque 500 000 membres. En revanche, les partis libéraux comme Iabloko et l'Union des Forces de Droite, qui n'ont pu franchir le seuil de 5% requis pour siéger à la Douma d'Etat, auront les plus grandes difficultés à remplir les conditions pour participer aux prochaines élections de 200725.

38.       En février 2005, la Cour constitutionnelle fédérale a rendu sa décision sur la constitutionnalité des dispositions de la loi sur les partis politiques (dans sa formulation précédente) concernant les obligations des partis eu égard au nombre des sections régionales et des membres (décision sur le recours de l'organisation «Parti républicain balte» de Kaliningrad). La Cour a considéré que «dans les circonstances actuelles, eu égard aux graves difficultés dues aux séparatistes, aux nationalistes et aux groupes terroristes, qui tendent à abuser de leurs droits et libertés constitutionnels, et alors que la société russe n'a pas encore acquis une solide expérience de la vie démocratique, la création de partis politiques régionaux, qui visent à défendre leurs intérêts régionaux et locaux, entraînerait la destruction de l'intégrité de l'Etat et de l'unité du système de gouvernance de l'état en tant que fondement de la constitution fédérale de la Russie». La Cour a aussi mentionné l'«opportunité politique» comme critère de la discrétion du législateur dans la fixation du nombre minimal des membres des partis et des exigences concernant leur assise territoriale.

      Création d'une «chambre publique»

39.       Dans son discours du 13 septembre 2004, le président Poutine a émis la proposition d'instituer une «chambre publique qui serait un lieu où seraient examinés par la société civile les décisions clés du gouvernement et surtout les projets de loi relatifs aux perspectives de développement revêtant une importance pour l'ensemble du pays26». Le président a soumis le 8 décembre 2004 un projet de loi correspondant, qui propose la création d'un nouvel organe consultatif composé de 126 représentants non partisans issus des ONG de dimension fédérale et régionales. Cette chambre a pour mission de «veiller à la coordination des intérêts» des citoyens, des ONG et des pouvoirs publics, notamment par des avis d'experts sur les projets de textes législatifs et réglementaires fédéraux et régionaux, et par l'exercice d'un contrôle public sur l'activité du pouvoir exécutif. Le président de la Russie nommera les 42 premiers membres de la Chambre publique, qui coopteront ensuite 42 autres membres – parmi les représentants d'ONG de dimension fédérale – et, enfin, ces 84 membres éliront 42 représentants des ONG régionales. Les activités de la Chambre publique seront financées sur le Budget fédéral et ses membres recevront une «indemnité» pour leur travail. Le projet de loi a été adopté en première lecture dès le 22 décembre 2004, en deuxième lecture le 18 février 2005 et la dernière lecture a eu lieu en mars. Le président a signé la loi le 4 avril.

40.       Il est difficile de comprendre l'intérêt de créer une «chambre publique» spéciale pour assurer la mission qui est normalement celle d'un parlement pluraliste et démocratiquement élu représentant la société dans son ensemble. Par ailleurs, les principes régissant sa formation et son fonctionnement font naître des doutes quant à son indépendance et sa crédibilité. Il semble s'agir d'une tentative pour étendre «la verticale du pouvoir» à la société civile, qui est par nature horizontale. Pour atteindre les objectifs invoqués pour la création de la «chambre publique» de manière plus efficace et conformément aux pratiques habituelles dans les démocraties européennes, nous recommanderions de créer les conditions nécessaires au fonctionnement normal de la société civile dans la Fédération de Russie, et de renforcer le respect des autorités pour la société civile et leur ouverture au dialogue avec ses représentants.

      L'impact de la réforme sur le fonctionnement des institutions démocratiques

41.       Le nouveau rôle du Président dans la nomination des chefs des exécutifs régionaux va affaiblir considérablement l'effet de contrepoids démocratique que les autorités régionales pourraient avoir face au pouvoir fédéral et, en particulier, à celui du président de la Fédération. Il est vrai que par le passé les pouvoirs régionaux ont souvent été utilisés abusivement mais cela devrait être une raison pour améliorer l'autonomie régionale et non pour la supprimer quasi totalement. En outre, l'incidence sur la composition du Conseil de la Fédération porterait gravement atteinte au principe de la séparation des pouvoirs et, par conséquent, au fonctionnement des institutions démocratiques de la Fédération. En ce qui concerne le système électoral, les effets cumulés de la réduction du nombre des partis politiques et de l'introduction d'un scrutin purement proportionnel consolideront la position des forces politiques au pouvoir, déjà ultra majoritaires à la Douma d'Etat. Les possibilités de contestation extérieure de leur emprise sur le pouvoir seront fortement réduites. Si de futures élections peuvent certes déboucher sur une redistribution des suffrages entre les quatre partis actuellement représentés à la Douma, on peut se demander si cette redistribution suffirait à garantir le fonctionnement normal des institutions politiques du pays en accord avec les principes et les normes du Conseil de l'Europe. Un gouvernement ne peut être responsable démocratiquement s'il est virtuellement protégé contre toute menace de perdre les élections quelle que soit son action.

42.       L'effet cumulé du train de réformes qui renforce la «verticale du pouvoir» du Président de la Fédération de Russie est par conséquent un motif d'inquiétude. Si nous comprenons et soutenons pleinement les efforts du président Poutine pour réussir dans sa lutte contre le terrorisme et augmenter l'efficacité du système politique et administratif de la Fédération de Russie, il n'est pas souhaitable – ni nécessaire – que cette efficacité soit obtenue aux dépens de la démocratie. Pour que cette dernière fonctionne correctement, le pouvoir doit être non seulement renforcé verticalement mais aussi partagé horizontalement.

IV.       SITUATION ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

A.       Les tendances économiques générales27

43.       Sur le front économique, le premier mandat de Vladimir Poutine s'est terminé sur une note positive, attestée par une évolution très favorable de tous les indicateurs macro-économiques. Depuis 1998, le PIB s'est accru de 40% et le niveau de la production industrielle de 45%. La croissance demeure soutenue, avec un rythme annuel légèrement supérieur à 6% depuis 1999, et s'élevant à 7% en 2003. Le budget et les comptes des opérations extérieures sont excédentaires et la dette publique diminue. S'agissant du budget de l'Etat, l'excédent représentait 1,4% du PIB en 2002 et 1,7% en 2003, ces surplus étant transférés à un fonds de stabilisation budgétaire. L'excédent de la balance commerciale, dû principalement aux exportations de produits énergétiques, a permis une reconstitution rapide des réserves en devises. Procédant à des remboursements anticipés, la Russie est parvenue à réduire de manière significative sa dette extérieure, qui est maintenant passée en dessous de 40% du PIB. Par ailleurs, certains des signes les plus tangibles de la crise de 1998 sont effacés. Les arriérés de salaires n'ont plus cours dans la fonction publique et la part des échanges réalisés sous forme de troc ne représente plus que 15% du total des transactions, au lieu des deux tiers pendant la crise.

44.       Pour une large part, les excellents résultats de l'économie russe sont attribuables au secteur de l'énergie, grâce à l'augmentation du volume des exportations et à la hausse des cours du pétrole. Selon les statistiques officielles, les secteurs pétrolier et gazier représentent à eux seuls 12% du PIB, près de 40% des recettes fiscales et environ la moitié des exportations. Une augmentation du prix du baril de 1 dollar représenterait donc 0,5 point de PIB et environ 6% de recettes supplémentaires pour le budget. Les experts de la Banque mondiale estiment que le secteur de l'énergie représente près de 25% du PIB, ce qui indiquerait que l'économie dépend encore plus des exportations énergétiques et des fluctuations des cours.

45.       Pour ce qui est des aspects plus négatifs, un grand nombre d'infrastructures de base sont délabrées et les besoins sociaux sont considérables dans les secteurs de la santé, du logement, des transports et de l'environnement. Malgré l'émergence d'une classe moyenne, une forte proportion de la population vit plus ou moins au jour le jour. La situation des universitaires et des personnels des secteurs non commerciaux s'est, dans une certaine mesure, dégradée et divers systèmes de protection ont disparu avec l'effondrement de l'Union soviétique. Plus du quart de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté28. La détérioration des conditions sociales – jointe au traumatisme provoqué par les attentats terroristes – est la principale raison de la très nette augmentation des incidents racistes et xénophobes. Nous sommes par conséquent pleinement favorables à la politique menée par le gouvernement, qui considère la lutte contre la pauvreté comme une de ses trois grandes priorités.

B.       La réforme des prestations sociales

46.       Lors de notre visite à Moscou, en novembre 2004, un certain nombre d'ONG nous ont fait part de leur vive inquiétude concernant la réforme des prestations sociales; en effet, à compter du 1er janvier 2005, les personnes qui bénéficiaient jusque alors de la gratuité des transports, d'une

réduction de leurs frais de téléphone ou de la redevance TV, ou avaient droit à des services médicaux en nature, recevront une allocation monétaire. Pour la seule région de Moscou, cela représentera un budget de 3,5 milliards de roubles.

47.       Les citoyens sont descendus dans la rue pour protester contre une réforme visant la libéralisation de l'économie du pays et la réduction des dépenses de l'Etat. Cette contestation a débuté en janvier et s'est poursuivie dans tout le pays. A la mi-février 2005, 284 manifestations ont eu lieu simultanément dans 77 régions, avec une participation estimée à 250 000 personnes. Le gouvernement fédéral a cependant survécu à un vote sur la question de confiance en raison de la majorité écrasante dont la faction pro-présidentielle dispose au parlement. Dans le même temps, la cote de popularité du président Poutine a chuté brutalement: les chiffres de la Fondation de l'opinion publique ont montré qu'en février 2005 la part de l'électorat qui aurait voté pour Vladimir Poutine était de 42%, contre 65% lors de sa réélection en mars 2004.

C.       La fin des oligarques?

48.       Le gouvernement russe semble avoir la ferme intention de mettre un terme à un capitalisme sauvage qui a bénéficié aux «oligarques» et surtout d'exercer un certain degré de contrôle sur le secteur stratégique de l'énergie et des matières premières. Le cas du plus grand groupe pétrolier russe, Ioukos, qui à lui seul représente 4% de l'économie russe, est typique, en ce qui concerne tant les objectifs que les méthodes employées.

49.       La Résolution 1418 (2005)29, adoptée par l'Assemblée le 25 janvier 2005, considère que les circonstances de l'arrestation et l'inculpation des hauts dirigeants de Ioukos suggèrent que l'intérêt de l'Etat à agir dans ces affaires va au delà du simple exercice de la justice pénale pour s'étendre à des éléments tels que l'affaiblissement d'un adversaire politique déclaré, l'intimidation d'autres grands capitalistes et la reprise du contrôle d'actifs économiques stratégiques30.

50.       Le gouvernement de la Fédération de Russie a procédé à la vente de la principale unité de production du groupe Ioukos, Iouganskneftegaz, d'où provenaient 60% de la production pétrolière du groupe. Le produit de cette vente est censé servir à régler rapidement la facture croissante des arriérés d'impôts (plus de 18 milliards de dollars US en décembre 2004). En décembre 2004, Iouganskneftegaz a été vendu à une société inconnue pour 9 milliards de dollars US (soit la moitié du prix estimé par les audits étrangers), laquelle l'a aussitôt revendu à la compagnie pétrolière Rosneft, détenue par l'Etat. L'Assemblée a noté dans la Résolution 1418 que les circonstances de cette vente soulèvent des questions supplémentaires concernant la protection des biens (Premier Protocole additionnel à la CEDH, article 1).

D.       Les tendances démographiques

51.       Les perspectives économiques de la Fédération de Russie sont freinées par un facteur de la plus haute importance: la dégradation de la situation démographique. Les résultats officiels du recensement d'octobre 2002 indiquent une population totale de 145,2 millions d'habitants soit, pour la première fois, un recul de la population qui s'élevait en 1989 à 147 millions d'habitants dans les frontières actuelles de la Russie. D'après le Bureau fédéral des statistiques, la population a continué à diminuer et, au 1er décembre 2004, elle n'était plus que de 143,5 millions. Les projections démographiques des Nations Unies, fondées sur les tendances démographiques récentes, évaluent la population de 2050 à 101,5 millions d'habitants, soit une perte de près d'un million d'habitants chaque année. Les démographes considèrent que l'allongement de l'espérance de vie s'est arrêté dans les années 1960, parallèlement à la détérioration des indicateurs. L'espérance de vie, qui en 1964 était de 65,1 ans pour les hommes et de 73,6 ans pour les femmes, n'a cessé de baisser depuis lors et elle était en 2001 de 59 ans pour les hommes et 72,3 ans pour les femmes. Le taux de fécondité est à présent de 1,2 enfant par femme, soit 57% du taux nécessaire pour assurer le remplacement des générations.

E.       L'épidémie de VIH/sida et ses conséquences économiques

52.       La Fédération de Russie compte le plus grand nombre de personnes contaminées par le VIH dans la région, estimé à 860 000 (fourchette: 420 000 – 1,4 millions). Le tableau n'est pas homogène; nettement plus de la moitié des cas signalés de contamination par le VIH concerne 10 régions seulement sur les 89 que compte le pays. La plupart des toxicomanes, en Russie, sont des hommes. La proportion des femmes dans les nouveaux cas de VIH est cependant en augmentation rapide: un nouveau cas sur quatre en 2001; un an plus tard, un cas sur trois. Cette tendance est particulièrement visible dans les régions de la Russie où l'épidémie est la plus ancienne, ce qui suggère un rôle accru des rapports sexuels dans la transmission. Entre 1998 et 2002, le taux de contamination par le VIH chez les femmes enceintes est passé de moins de 0,01% à 0,1%, soit une multiplication par dix. A Saint-Pétersbourg, cependant, la séroprévalence du VIH est passée de 0,013% en 1998 à 1,3% en 2002, soit une multiplication par cent31. Ces dernières années, entre 22 et 25 millions de tests VIH ont été effectués en Russie annuellement, dont 10% chez des femmes enceintes.

53.       L'expansion du VIH/sida pourrait avoir des effets catastrophiques sur l'économie de la Fédération de Russie en altérant brutalement la structure démographique. La croissance du produit intérieur brut pourrait baisser de 1% du fait de l'augmentation du taux de mortalité de la population active, tandis que les dépenses de santé pour les personnes atteintes du SIDA pourraient absorber jusqu'à 3% du PIB. La population actuelle, de quelque 144 millions d'habitants, pourrait tomber, d'ici 2045, à 100 millions dans un scénario épidémique moyen et à 97 millions selon le scénario le plus pessimiste. En l'absence de cette maladie, la projection serait de 117 millions d'individus32.

F.       La Charte sociale européenne

54.       Lors de son adhésion au Conseil de l'Europe en 1996, la Fédération de Russie s'est engagée à étudier, en vue de sa ratification, la Charte sociale du Conseil de l'Europe. Dans l'attente de la ratification, elle s'est aussi engagée à mener une politique conforme aux principes de cette convention. Tout en étant conscients de la complexité et du poids financier considérable de la mise en œuvre de la charte, nous regrettons l'absence d'avancées concrètes dans le respect de cet engagement. La Charte sociale européenne révisée (STCE n° 163) a été signée en 2000 mais, en avril 2005, n'a toujours pas été ratifiée par la Fédération de Russie.

V.       RELATIONS EXTÉRIEURES

55.       Les éléments les plus marquants concernant la Fédération de Russie depuis le précédent rapport de suivi de 2002 sont le rôle et l'approche qu'elle a adoptés relativement à la lutte mondiale contre le terrorisme, à la guerre en Irak et, enfin, à l'élargissement de l'OTAN et celui de l'Union européenne qui ont étendu ces deux organisations jusqu'aux frontières du pays.

56.       La lutte contre le terrorisme international a eu un effet double, et dans une certaine mesure contradictoire, sur les relations de la Russie avec le monde. D'une part, l'importance de la menace terroriste qui pèse sur la Fédération de Russie et la reconnaissance du fait que cette menace ne peut être combattue que par une coopération internationale étroite et substantielle ont renforcé les liens de ce pays avec les organisations internationales concernées et les principaux acteurs internationaux. Il est communément admis que le concours de la Russie est essentiel au succès de la lutte contre le terrorisme mondial.

57.       D'autre part, les méthodes employées par ce pays pour riposter au terrorisme, qu'il s'agisse du comportement de ses troupes en République tchétchène ou du train de réformes engagées par le président Poutine à la suite de la tragédie de Beslan, sont de plus en plus contestées, en particulier en Europe – réaction qui a, à son tour, incité la Russie à se montrer plus réticente dès lors qu'il s'agit de discuter de questions internationales à propos desquelles son bilan en matière de droits de l'homme pourrait être critiqué. Cette situation a eu un impact sur les relations de la Fédération de Russie avec l'Union européenne et l'OSCE, que nous examinerons de manière plus approfondie dans ce qui suit.

58.       Nous nous penchons dans le présent chapitre sur les relations de la Russie avec ses principaux partenaires européens, en soulignant plus particulièrement l'attitude de ce pays vis-à-vis du rôle des institutions européennes et euro-atlantiques dans la consolidation de la démocratie et la protection des droits de l'homme. Nous pensons que ces relations ont un rapport direct avec l'attitude de la Fédération de Russie vis-à-vis du Conseil de l'Europe, principale instance européenne dans le domaine de la démocratie, des droits de l'homme et de la prééminence du droit. Par ailleurs, les relations extérieures de la Fédération de Russie seront examinées au regard d'un certain nombre d'engagements spécifiques énoncés dans l'Avis N° 193 (1996), liés à ses relations avec l'étranger33, et de l'obligation statutaire générale de collaborer sincèrement et activement à la poursuite du but du Conseil de l'Europe.

A.        Relations avec d'autres organisations internationales

59.       Le fondement juridique des relations de l'Union européenne avec la Fédération de Russie est l'Accord de partenariat et de coopération de 1997, valide pour une période initiale de dix ans. Un protocole qui étend l'accord à dix nouveaux Etats membres a été signé le 27 avril 2004. La stratégie commune de l'UE concernant la Russie, pour une période de cinq ans, couvrant quatre domaines prioritaires (consolidation de la démocratie, prééminence du droit et institutions publiques; intégration de la Fédération de Russie dans un espace économique et social européen commun; stabilité et sécurité en Europe et au-delà et défis communs sur le continent européen), est arrivée à son terme en juin 2004. Le montant total de l'assistance technique accordée par l'UE depuis 1991 s'élève à plus de 2,6 milliards d'euros34.

60.       Au Sommet de Saint-Pétersbourg, en mai 2003, l'UE et la Russie ont convenu de renforcer leur coopération par la création à long terme de quatre «espaces communs» dans le cadre de l'Accord de partenariat et de coopération. Il a été décidé de créer un espace économique commun, un espace commun de liberté, de sécurité et de justice, un espace de coopération dans le domaine de la sécurité extérieure et, enfin, un espace de recherche et d'éducation, comportant des aspects culturels.

61.       Le sommet semestriel UE-FR, qui s'est tenu le 25 novembre 2004, s'est achevé sans qu'un accord soit conclu concernant les «quatre espaces», en raison de divergences de vues persistantes sur les questions liées à la justice et aux relations extérieures. L'UE et la Fédération de Russie ont néanmoins convenu de créer un «forum consultatif» sur les droits de l'homme et de poursuivre les négociations en vue de la conclusion d'accords sur les quatre espaces lors du prochain sommet, prévu pour mai 2005. Les accords concernant les «quatre espaces» ont été signés lors du 15ème sommet UE-Russie le 10 mai 2005.

62.       L'Union européenne s'est vivement félicitée de la récente ratification par la Russie du traité de Kyoto, qui a permis à cet instrument international essentiel pour la lutte contre le changement climatique d'entrer en vigueur le 16 février 2005. Par ailleurs, l'Union européenne a accepté de soutenir la candidature de la Russie à l'adhésion à l'Organisation mondiale du Commerce, qui pourrait intervenir d'ici 2006, sous réserve de l'approbation d'autres membres importants de l'OMC comme les Etats-Unis et la Chine.

63.       Nous espérons que la Fédération de Russie va continuer à élargir sa coopération internationale dans le but également de prévenir et d'éliminer les effets écologiques des catastrophes naturelles et technologiques35, conformément à l'Avis N° 193 (1996) (§ 10 xxi).

Les relations avec l'OTAN

64.       Les relations de la Russie avec l'OTAN se caractérisent de manière générale par la coopération. L'élargissement récent de l'OTAN, avec l'inclusion des trois Etats baltes, n'a pas profondément affecté ces relations. Le Conseil OTAN-Russie (COR) a été institué en mai 2002 en vue de faire progresser les relations OTAN-Russie; dans ce cadre, les 26 Alliés et la Fédération de Russie travaillent ensemble à dégager et à poursuivre des pistes d'action commune. La décision de créer le COR a été prise à la suite des attentats terroristes de septembre 2001 qui ont clairement montré la nécessité d'une action coordonnée face à des menaces communes. L'objectif commun de «construire une paix durable et ouverte à tous dans la région euro-atlantique» a été défini pour la première fois dans l'Acte fondateur de 1997 sur les relations, la coopération et la sécurité mutuelles entre l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord et la Fédération de Russie, qui constitue la base formelle des relations OTAN-Russie.

65.       A la différence de l'OTAN, la seconde organisation euro-atlantique est clairement et de plus en plus impliquée dans le domaine de la démocratie et des droits de l'homme, du fait en particulier de son rôle dans les missions d'observation des élections. Ce rôle est de plus en plus contesté par la Fédération de Russie et d'autres membres de l'OSCE appartenant à la Communauté des Etats indépendants (CEI). Lors d'une réunion organisée à Moscou en juillet 2004, la Russie a proposé l'adoption d'une déclaration reflétant sa position nouvelle au sujet de l'OSCE.

66.       Selon cette déclaration, l'OSCE n'est aujourd'hui plus adaptée aux exigences d'un monde en mutation et n'est pas en mesure de répondre de manière satisfaisante aux problèmes de sécurité et de coopération de la région euro-atlantique. L'organisation ne respecte pas assez les documents fondamentaux tels que l'Acte final d'Helsinki (1975), la Charte de Paris pour une nouvelle Europe (1990) et la Charte européenne pour la sécurité (1999). Il arrive fréquemment que les principes fondamentaux d'Helsinki, comme la non-intervention dans les affaires intérieures et le respect de la souveraineté des Etats, ne soient pas respectés.

67.       Cette déclaration relève également l'existence d'un déséquilibre manifeste entre les trois dimensions de la sécurité – militaire et politique, économique et écologique, humanitaire. Il y a un glissement des priorités vers les problèmes humanitaires, ce qui réduit notablement la capacité de l'OSCE de faire face aux problèmes et dangers nouveaux. L'action dans le domaine humanitaire amène à exercer un contrôle sur la situation des droits de l'homme et à mettre en place des institutions démocratiques au sein de la CEI et de l'ex-Yougoslavie. Si la déclaration reconnaît l'importance de ce volet des activités de l'OSCE, elle exprime aussi la conviction que le déploiement des activités de l'organisation selon cet axe ne correspond pas aux grands principes de l'OSCE. Elle reproche à l'OSCE d'accorder de manière sélective une plus grande attention à certains pays tout en fermant les yeux sur les problèmes existant dans d'autres pays membres. La déclaration voit là une violation du mandat de l'OSCE, qui montre que l'organisation pratique une double morale et des approches sélectives, et qu'elle ne souhaite pas prêter attention aux particularités et aux spécificités des différentes nations.

68.       Le gouvernement de la Fédération a depuis tenu des propos analogues à diverses occasions, la dernière étant le Conseil ministériel de l'OSCE du 7 décembre 2004, à Sofia, qui s'est achevé sans déclaration politique en raison de désaccords, notamment sur l'Ukraine, la Moldova et la Géorgie. Les autorités de la Fédération, y compris le président Poutine, ont aussi fortement contesté les conclusions de la mission d'observation internationale organisée avec la participation de l'OSCE à l'occasion du référendum du 17 octobre 2004 au Belarus et des premier et deuxième tours controversés de l'élection présidentielle de novembre 2004 en Ukraine. De décembre 2004 à mai 2005, la Russie a bloqué l'adoption du budget annuel de l'OSCE pour 2005.

La Communauté des Etats indépendants (CEI)

69.       La CEI compte actuellement 12 membres: la Russie, le Bélarus, l'Ukraine36 et la Moldova; les trois républiques du Caucase: Arménie, Azerbaïdjan et Géorgie; et les cinq Etats d'Asie centrale: Turkménistan, Kazakhstan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Kirghizistan. La CEI compte au total 280 millions d'habitants, dont un peu plus de la moitié vivent dans la Fédération de Russie. On estime à 16 millions le nombre des Russes vivant dans les 11 autres Etats membres de la CEI.

70.       Plusieurs regroupements coexistent au sein de la CEI. Dans le secteur de la sécurité, un traité de sécurité collective, connu également sous le nom de Traité de Tachkent, a été signé en mai 1992 par sept des 12 Etats membres de la CEI: la Fédération de Russie, le Kazakhstan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan, le Kirghizistan, l'Arménie et le Belarus. A la fin de 1993, l'Azerbaïdjan et la Géorgie ont également signé le traité, semble-t-il dans l'objectif d'obtenir l'assistance de la Russie pour le règlement des conflits séparatistes du Haut-Karabakh, d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud. Cependant, ces deux pays, de même que l'Ouzbékistan, se sont retirés du traité en 1999, au moment de la crise du Kosovo. Les six Etats qui sont actuellement parties au Traité de sécurité collective de la CEI ont convenu en mai 2001 de la mise en place de forces communes d'intervention rapide, dont la plus importante est basée à Bichkek, au Kirghizistan, en vue d'un déploiement en Asie centrale. Les deux autres forces impliquent respectivement la Russie et l'Arménie et la Russie et le Belarus.

71.       Enfin, les relations entre le Belarus et la Fédération de Russie constituent une exception. Ces deux pays ont institué en 1996 une communauté qui est devenue, en 1997, l'«Union russo-biélorusse». Cette déclaration d'une fusion en un seul Etat a un caractère relativement formel, et elle a essentiellement impliqué Moscou dans la création d'un protectorat militaire. Par ailleurs, l'intégration économique n'a guère progressé, car Minsk a conservé des structures économiques héritées de l'Union soviétique.

72.       La CEI est une organisation faiblement structurée, à géométrie variable qui ne comporte pas de dispositifs par trop contraignants. Grâce aux sommets de chefs d'Etat et autres réunions, elle offre cependant un cadre utile à la résolution de certains problèmes bilatéraux. Elle permet aussi à la Fédération de Russie d'affirmer ses priorités, comme on l'a vu dans le chapitre ci-dessus concernant les relations avec l'OSCE.

B.       Le retrait des troupes russes de Moldova

73.       Le paragraphe 10 ix de l'Avis N° 193 (1996) demande à la Russie «de ratifier, dans un délai de six mois après son adhésion, l'accord intervenu le 21 octobre 1994 entre les Gouvernements russe et moldave, et de poursuivre le retrait de la 14e armée et de son matériel du territoire de la Moldova dans un délai de trois ans à compter de la date de signature de l'accord».

74.       Le conflit entre les autorités moldaves et les séparatistes transnistriens, en 1992, a pris fin après l'intervention de la 14e Armée russe placée sous le commandement du général Lebed. L'accord de cessez-le feu de juillet 1992 a établi une force tripartite de maintien de la paix composée d'unités moldaves, russes et transnistriennes. Le 21 octobre 1994, les Premiers ministres de la Moldova et de la Fédération de Russie ont signé un accord sur le retrait de la 14e Armée du territoire de la Moldova dans un délai de trois ans après l'entrée en vigueur de l'accord. Malheureusement, cet accord n'a toujours pas été ratifié par la Douma d'Etat de la Fédération.

75.       A l'occasion du sommet de l'OSCE d'Istanbul, en 1999, la Russie a également pris des engagements selon lesquels des troupes auraient dû être retirées pour la fin de 2002. A Porto, en 2002, le Conseil ministériel de l'OSCE a repoussé ce délai au 31 décembre 2003, «sous réserve que les conditions nécessaires soient réunies».

76.       En juillet 2002, l'OSCE et les médiateurs russe et ukrainien ont approuvé un document présentant un plan de réunification de la Moldova dans le cadre d'un système fédéral. En février 2003, les Etats-Unis et l'Union européenne ont imposé des restrictions en matière de visas visant les autorités transnistriennes. En avril 2003, le gouvernement de la Moldova et les autorités transnistriennes ont décidé de créer une commission conjointe chargée de rédiger la constitution d'un Etat réunifié, mais des désaccords fondamentaux sur la répartition des pouvoirs n'ont pu être résolus. En novembre 2003, à la suite d'un bref mouvement de protestation émanant de l'opposition, M. Voronine, le président de la Moldova, a décidé de ne pas signer avec la Transnistrie d'accord «arrangé» par la Fédération de Russie.

77.       Le 8 juillet 2004, la Grande Chambre de la Cour européenne des Droits de l'Homme a rendu son arrêt dans l'affaire Ilascu et autres c. Moldova et Russie, relative aux événements intervenus en Transnistrie (République de Moldova) entre 1991-1992. Eu égard à la Fédération de Russie, la Cour a conclu que «pendant le conflit en République de Moldova, en 1991-1992, des forces de l'ex-14e Armée (qui a appartenu successivement à l'URSS, à la CEI puis à la Russie) stationnées en Transnistrie, ont combattu avec et pour le compte des forces séparatistes transnistriennes. D'importantes quantités d'armes de l'arsenal de la 14e Armée ont été transférées volontairement aux séparatistes qui ont pu, en outre, s'emparer d'autres armes sans que les militaires russes ne s'y opposent. Ainsi, les autorités russes ont contribué, tant militairement que politiquement, à la création d'un régime séparatiste dans la région de Transnistrie, qui fait partie du territoire de la République de Moldova.»

78.       Si plusieurs régiments de la 14e Armée ont été démobilisés et l'armement et les matériels militaires en partie enlevés, quelque 2 000 soldats de la Fédération sont aujourd'hui encore présents sur le territoire de la République de Moldova.

79.       La présence continue des forces russes en Transnistrie et la non-ratification de l'accord du 21 octobre 1994 signifient que la Russie ne respecte pas l'engagement pris au titre du paragraphe 10 ix. Les co-rapporteurs prennent note de la position russe selon laquelle la poursuite du retrait est ralentie du fait que la partie moldave refuse le plan fédéral de 2002 pour la Moldova. Cependant, si les autorités russes encouragent assurément le gouvernement de la Moldova à renforcer ses efforts pour trouver une solution politique au conflit, elles ne peuvent invoquer un événement politique ultérieur comme justification du non-respect d'un engagement clair et inconditionnel à l'égard de l'Assemblée.

80.       Nous notons avec satisfaction que les autorités de la Fédération ont déjà versé aux requérants de l'affaire Ilascu et autres les sommes allouées par la Cour à titre de satisfaction équitable. Nous sommes cependant préoccupés de constater que la Fédération de Russie n'a pas, à ce jour, pris «les mesures nécessaires pour mettre fin à la détention arbitraire des deux requérants encore incarcérés et assurer leur remise en liberté immédiate», comme l'a ordonné la Cour. Le fait que les autorités russes considèrent cet arrêt sur le fond de l'affaire comme «erroné, partial et d'inspiration clairement politique» ne les dispense pas de l'obligation de s'y plier conformément à l'article 46 de la Convention37.

C.       Le respect des obligations du Traité relatif aux forces armées conventionnelles en Europe (FCE)

81.       Le paragraphe 10 x de l'Avis N° 193 (1996) appelle la Fédération de Russie à remplir les obligations qui lui incombent en vertu du Traité FCE.

82.       Le Traité FCE initial, signé en 1990, fixe aux 30 Etats parties des limites égales concernant les armements conventionnels indispensables au lancement d'attaques surprises ou d'opérations offensives de grande envergure. La principale réalisation à l'actif du traité a été la réduction ou la destruction massives des matériels militaires conventionnels au cours des cinq années qui ont suivi son entrée en vigueur. La Fédération de Russie remplit largement ses obligations au titre du Traité FCE initial, ce qui est l'objet de son engagement devant l'Assemblée.

83.       Au sommet de l'OSCE d'Istanbul, en novembre 1999, les Etats parties au CFE ont signé l'Accord d'adaptation portant modification du Traité FCE afin de prendre en compte l'évolution du contexte géostratégique européen. Les pays de l'OTAN attendent, pour ratifier le Traité adapté, que la Russie se conforme aux dispositions du FCE relatives aux flancs et qu'elle respecte durablement les engagements pris au sommet d'Istanbul concernant la présence des forces russes en Géorgie et en Moldova38. Lors de la réunion du Conseil ministériel de l'OSCE organisée à Sofia le 7 décembre 2004, la Russie a adopté une déclaration distincte sur la position de certains Etats concernant l'établissement d'une corrélation entre les «engagements d'Istanbul» et la ratification de l'Accord adapté: la Fédération de Russie a déclaré que «cette corrélation ne lui paraît pas légitime» et que «les accords que la Russie a conclus en 1999 avec, respectivement, la Géorgie et la Moldova ont un caractère bilatéral et n'entraînent pour la Russie aucune obligation envers des pays tiers. Les Etats qui, sur la base d'arguments irrecevables, diffèrent la ratification seront seuls responsables du sort qui sera réservé à l'Accord, qui est pourtant une pierre angulaire de la sécurité en Europe».

D.       L'«étranger proche»

84.       Dans le paragraphe 10 xi de l'Avis N° 193 (1996) de l'Assemblée, il est demandé à la Russie «de dénoncer comme erroné le concept de deux catégories différentes de pays étrangers, qui permet de traiter certains d'entre eux, appelés «l'étranger proche», comme une zone d'influence spéciale».

85.       Ce terme d'«étranger proche» (blijnéié zaroubiéjé) est couramment utilisé en Russie pour désigner les 14 autres ex-républiques soviétiques. Pour remplir ses engagements envers l'Assemblée, la Fédération de Russie devrait dénoncer comme erroné ce concept d'«étranger proche» mais aussi cesser effectivement de traiter certains pays comme une zone d'influence spéciale justifiant une approche plus «souple» du respect de leur pleine souveraineté et de leur intégrité territoriale. Cela vaut assurément pour l'attitude de la Fédération de Russie à l'égard de la Moldova, dont il a été question ci-dessus. Les récentes élections présidentielles en Ukraine ont aussi illustré la réticence tenace des autorités russes à renoncer à cette approche.

86.       Le concept d'«étranger proche» continue également d'exercer une influence sur les relations de la Russie avec la Géorgie, notamment pour ce qui concerne la situation des régions séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud.

87.       Des mouvements sociaux et des tentatives des pouvoirs locaux de se séparer de la Géorgie sont à l'origine du conflit abkhaze. En septembre 1993, la partie abkhaze, avec l'aide de mercenaires étrangers et, semble-t-il, le soutien de la Russie, a occupé Soukhoumi et, quelques jours plus tard, l'Abkhazie tout entière. Les combats ont entraîné le déplacement de centaines de milliers de civils, Géorgiens pour la plupart. Le 14 mai 1994, les parties géorgienne et abkhaze ont signé à Moscou un Accord de cessez-le-feu et de séparation des forces. Les parties ont accepté le déploiement par la Communauté des Etats indépendants (CEI) d'une force de maintien de la paix chargée de contrôler le respect de l'Accord, et le suivi par les Nations Unies de la mise en œuvre de l'Accord et du fonctionnement de la force de la CEI.

88.       En octobre 1993, la Géorgie a dû renoncer à sa ferme opposition à l'adhésion à la CEI39; elle en est devenue membre à part entière et a signé une série d'accords sur la coopération en matière de sécurité. Le traité d'amitié russo-géorgien appelait à l'installation de bases militaires en Géorgie pour le groupement des forces de la Fédération en Transcaucasie (Gruppa rossiiskikh voïsk v Zakavkaz'e, GRVZ). En 1995, dans le cadre d'un traité russo-géorgien, trois bases russes ont fait l'objet d'une location-bail de 25 ans. D'après les autorités de la Fédération, ces deux accords n'ont jamais été mis en œuvre.

89.       Les forces de la Fédération participent également à une force tripartite de maintien de la paix40 dans l'oblast (région) autonome d'Ossétie du Sud, qui s'est séparé de la Géorgie et où elles sont stationnées depuis 1992. Les forces de maintien de la paix sont commandées et contrôlées par une Commission de contrôle quadripartite composée de représentants de la Géorgie, de la Russie, de l'Ossétie du Sud et de l'Ossétie du Nord. A la suite des actions menées par les autorités géorgiennes au printemps 2004 pour combattre le marché noir et les activités de contrebande dans cette partie de la Géorgie, une série d'incidents sérieux a failli mettre en échec le processus de maintien de la paix. Un accord de cessez-le-feu est en vigueur depuis le mois d'août 2004, mais la situation demeure tendue.

90.       Nous notons également que d'après les représentant de l'OSCE en Géorgie41 la participation des troupes russes aux opérations de maintien de la paix, tant en Ossétie du Sud qu'en Abkhazie, en coopération avec les Nations Unies, continue à contribuer utilement à ces opérations. Nous encourageons toutefois la Russie à engager avec les autorités géorgiennes42 un dialogue constructif au cours duquel le point de vue de ces dernières sur l'avenir des bases militaires russes en Géorgie sera pleinement pris en compte. Cette initiative serait cohérente avec les assurances données lors de l'adhésion de la Fédération de Russie au Conseil de l'Europe43.

91.       Entre-temps, et afin de respecter ses engagements concernant la dénonciation du concept d'«étranger proche», la Fédération de Russie devrait s'abstenir de tout acte compromettant la neutralité de ses troupes basées en Ossétie du Sud et en Abkhazie. Afin de garantir la crédibilité et l'efficacité de son rôle dans le maintien de la paix, la Russie devrait cesser de soutenir les régimes séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud. Sa politique actuelle de délivrance de passeports de la Fédération de Russie à la population de ces deux régions est un exemple de conduite regrettable à cet égard. Au lieu de soutenir les régimes séparatistes, la Russie devrait mettre tout son poids politique et économique au service des efforts tendant à trouver une solution politique et pacifique compatible avec le respect de l'intégrité territoriale de la Géorgie.

E.       La restitution des biens aux Etats membres du Conseil de l'Europe

92.       Lors de son adhésion, la Russie s'est engagée à «négocier les demandes de restitution de biens culturels à d'autres pays européens sur une base ad hoc qui permettrait de distinguer les différentes catégories de biens (archives, œuvres d'art, bâtiments, etc.) et de propriétaire (public, privé ou institutionnel)44». Elle a aussi accepté de «régler rapidement toutes les questions relatives à la restitution de biens réclamés par des Etats membres du Conseil de l'Europe, et notamment les archives transférées à Moscou en 194545».

93.       Dans ses commentaires écrits, rédigés à la demande des co-rapporteurs, la délégation estonienne auprès de l'Assemblée parlementaire déclare que les autorités russes n'ont accompli aucun progrès, à ce jour, concernant les engagements relatifs à la restitution des biens culturels (et à celle des biens des déportés).

94.       Les commentaires de la délégation lettonne indiquent qu'une Commission intergouvernementale russo-lettonne a été créée, mais qu'aucune réponse adéquate n'a encore été apportée aux demandes de réparation pour les pertes subies par la Lettonie, ses ressortissants et ses résidents permanents. Pour ce qui concerne les biens culturels, la délégation nous a indiqué que la Russie avait restitué une partie des archives du ministère letton des Affaires étrangères et certains dossiers du KGB sur des citoyens lettons. Un accord permanent entre les services des archives des deux Etats permet par ailleurs aux chercheurs lettons d'avoir accès aux archives russes et de reproduire des documents. Il est cependant parfois difficile d'avoir accès aux documents des archives du KGB et du ministère russe des Affaires étrangères.

VI.       FONCTIONNEMENT DE LA DÉMOCRATIE PLURALISTE

A.       Des élections libres et équitables

95.       Deux élections importantes se sont tenues dans la Fédération de Russie depuis le dernier rapport de suivi complet de 2002. Le 7 décembre 2003 se sont déroulées les élections à la chambre basse du parlement russe, la Douma d'Etat. Le 14 mars 2004, le président sortant Vladimir Poutine a remporté de façon écrasante l'élection présidentielle. Ces deux scrutins ont été observés par des délégations de l'Assemblée qui ont fortement critiqué la couverture partiale des médias et l'utilisation de moyens publics en faveur du président Poutine et de ses alliés politiques.

      Les élections législatives de décembre 2003

96.       L'équipe internationale qui a observé les élections législatives s'est félicitée des améliorations apportées à l'organisation du scrutin conformément aux recommandations formulées par l'Assemblée il y a quatre ans mais elle a exprimé son inquiétude concernant les pratiques inéquitables en faveur d'un parti. Selon les observateurs, les élections législatives de 2003 attestent un ralentissement des progrès de la Russie vers la démocratie. Ils ont conclu qu'il existe en Russie une démocratie multipartite et que les élections peuvent être considérées comme libres46, mais certainement pas comme équitables.

97.       Les observateurs ont approuvé les conclusions de la mission préélectorale qui a considéré que si les quotidiens semblaient refléter un vaste éventail d'opinions, les trois chaînes de télévision nationales étaient toutes sous contrôle du gouvernement et ne respectaient pas l'impartialité dans leurs émissions politiques. Dans une perspective à plus long terme, la mission d'observation a considéré que ce genre de problèmes ne pouvait être résolu que par la mise en place d'un système de radiodiffusion de service public qui échappe à l'influence et à la mainmise de l'Etat ainsi qu'aux manipulations d'autres groupes d'intérêts47.

      L'élection présidentielle de mars 2004

98.       Les observateurs de l'élection présidentielle du 14 mars 2004 ont fait des observations analogues au sujet de la couverture médiatique. Un communiqué de presse commun BIDDH/Assemblée a conclu à une bonne organisation générale de l'élection mais à l'absence d'une compétition authentiquement démocratique.

99.       Le rapport de la Commission ad hoc de l'Assemblée48, qui faisait partie de la mission internationale d'observation des élections, a rappelé la nécessité d'une télévision publique indépendante. Il a conclu que, durant l'élection présidentielle, les médias placés sous le contrôle de l'Etat ont fait preuve de partialité en faveur du président sortant, qu'il s'agisse de la présentation des informations ou de la couverture de la campagne, sans que les autorités prennent la moindre mesure corrective.

100.       Le rapport fait référence au suivi de l'OSCE/BIDDH sur la couverture médiatique de l'élection. Il conclut que les médias publics n'ont pas rempli leur obligation légale de traiter tous les candidats sur un pied d'égalité. Le rapport contient aussi l'évaluation d'observateurs indépendants des médias, selon lesquels l'élection présidentielle de 2004, comparée aux élections de 2000, marque un recul déplorable qui n'a fait qu'accentuer la dégradation et le discrédit des élections en tant qu'institution démocratique. Tandis que, lors de la campagne électorale de 2000, moins d'un tiers du temps d'antenne total avait été réservé à M. Poutine, quatre ans plus tard, cette part a augmenté de près de 50%49.

101.       En conclusion, la Commission ad hoc s'est déclarée particulièrement préoccupée par l'absence d'indépendance des médias et de pluralisme démocratique au cours de la campagne. Les médias russes n'ont pas su assurer une couverture équitable et objective de la campagne électorale. La plus grande partie du temps d'antenne et des pages des quotidiens consacrés aux élections était accordée au président sortant. Le refus du président Poutine de participer à des débats ouverts et démocratiques, bien que conforme à la loi, a été ressenti par les membres de la Commission ad hoc comme un recul de la démocratie dans le pays. La Commission ad hoc appelle à la mise en place, sans plus de retard, d'une télévision publique indépendante en Russie50.

B.        Le fonctionnement du Parlement et son contrôle de l'exécutif

102.       Actuellement, la chambre basse et la chambre haute du parlement russe sont l'une et l'autre aux mains des forces favorables au président Poutine. Dans le cas de la chambre haute – le Conseil de la Fédération – il s'agit d'un fait nouveau qui résulte de la décision d'un certain nombre de membres désignés par les exécutifs et les assemblées des régions de rejoindre le parti 'Russie Unie'. Dans le cas de la chambre basse – la Douma d'Etat –, le parti pro-présidentiel 'Russie Unie' jouit d'une majorité des deux tiers correspondant à la majorité constitutionnelle. De surcroît, deux des trois autres partis, Rodina (Patrie) et les Démocrates Libéraux, votent régulièrement avec Russie Unie, portant la majorité à 372 sièges sur 450. Au Conseil de la Fédération, 87 membres (sur 178) appartiennent maintenant au parti 'Russie Unie'.

103.       Cette majorité est le résultat d'un scrutin qui, selon les observateurs de l'Assemblée, n'a pas été équitable. On peut donc raisonnablement conclure que la volonté de l'électorat a été, au moins dans une certaine mesure, influencée par la couverture médiatique dont la partialité en faveur des forces soutenant le président Poutine ne fait aucun doute. Les réformes annoncées récemment, dont le but est de renforcer la «verticale du pouvoir» du président, vont encore consolider les succès électoraux et la position dominante des forces politiques au pouvoir. A l'avenir, tout candidat extérieur abordera la compétition politique avec un handicap très lourd. L'adhésion à l'«équipe gagnante», comme on l'a observé dans le cas des gouverneurs régionaux, a toutes les chances de faire école, en particulier auprès des membres indépendants de la Douma, promis à l'extinction lorsque le scrutin entièrement proportionnel annoncé entrera en vigueur.

104.       Elu dans un contexte médiatique nettement favorable au pouvoir en place, le parlement russe dominé par les forces progouvernementales continue à bénéficier de cette partialité pendant la législature. Dans ces circonstances, il est difficile de conclure que le parlement de la Fédération de Russie est en position d'exercer un contrôle démocratique effectif sur l'exécutif. Il va sans dire que ce contrôle est la pierre angulaire du système d'équilibrage des pouvoirs essentiel au fonctionnement normal de la démocratie dans le pays.

C.       La démocratie locale et régionale

105.       La réforme du fédéralisme et de l'autonomie locale lancée par le président Poutine en 2000, qui portait sur la création des districts fédéraux (super-régions) et la réforme du Conseil de la Fédération, s'est poursuivie en 2003 avec deux lois fédérales dans ce domaine et avec les travaux de la commission présidée par Dmitri Kozak. Dès son investiture le 7 mai 2000, Vladimir Poutine a entamé une vaste réorganisation de l'administration fédérale et des relations de la Fédération avec les régions (entités constitutives ou «sujets» de la Fédération)51. Il a immédiatement donné la preuve de son désir d'assurer la continuité de l'Etat fédéral en créant, le 13 mai, sept districts fédéraux (outre les 89 régions qu'ils recouvrent) regroupant de 6 à 18 régions: Centre (Moscou), Nord-Ouest (Saint-Pétersbourg), Sud (Rostov-sur-le-Don), Volga (Nijni Novgorod), Oural (Ekaterinbourg), Sibérie (Novossibirsk), Extrême-Est (Khabarovsk), et en nommant ses plénipotentiaires dans chacun de ces districts. La principale mission de ces derniers était tout d'abord de garantir une unité juridique en encourageant les entités de la Fédération à modifier leur législation de façon à la mettre en conformité avec la législation fédérale. Dans le même temps, les pouvoirs de contrôler la constitutionalité et la légalité des mesures prises par les entités de la Fédération ont été accrus par la loi fédérale du 29 juillet 2000, qui modifiait et complétait la loi du 6 octobre 1999 sur les principes d'organisation

généraux relatifs aux organes législatifs (représentatifs) et aux organes exécutifs des sujets de la Fédération (articles 9, 19, 27). Les sanctions prévues visent aussi à encourager les pouvoirs régionaux à respecter la législation fédérale.

106.       La même année, la modification de la composition du Conseil de la Fédération a indéniablement été la réforme politique la plus importante. Avec la promulgation de la loi du 5 août 2000, les chefs de l'exécutif et les présidents des assemblées législatives régionales ont cessé de siéger au Conseil de la Fédération, qui comprend à présent une personne nommée par le chef de l'exécutif et une autre nommée par l'assemblée législative pour chaque entité de la Fédération. Les gouverneurs et les chefs des républiques ont pris place au Conseil d'Etat créé par le décret n° 1602 du 1er septembre 2000; il s'agit d'un organe consultatif à la tête duquel se trouve le président de la Fédération de Russie. Au moins une fois par mois, le président convoque un présidium de sept membres qui sont choisis parmi les membres du Conseil pour un mandat de six mois conformément à un principe de rotation.

107.       Le rapport du CPLRE sur la démocratie locale et régionale52 dans la Fédération de Russie53 adopté le 4 mai 2004 conclut que «le processus de la réforme de l'autonomie locale en Russie semble souffrir d'un certain nombre de problèmes54, de gravité et d'importance inégales». Cependant, le rapport estime aussi que «la Fédération de Russie, confrontée aux problèmes propres à cet échelon, semble pleinement consciente de la difficulté de l'opération et a résolu de mettre en œuvre le processus de réforme de façon responsable».

108.       Nos réflexions sur les réformes plus récentes du président Poutine concernant l'élection des gouverneurs régionaux ainsi que le point de vue du président du CPLRE sur cette question sont consignés ci-dessus dans le chapitre sur l'évolution politique depuis 2002. La composition du Conseil de la Fédération, la chambre haute du parlement, devra être révisée car la moitié de ses membres seront indirectement nommés par le président Poutine lorsque la réforme de l'élection des gouverneurs entrera en vigueur.

D.       Le pluralisme des médias

109.       La Constitution de la Fédération de Russie consacre la liberté d'expression et la liberté de la presse; cependant, la pression du gouvernement sur les médias persiste, et entraîne de nombreuses violations de ces droits. Confrontées à des difficultés financières constantes et à la pression du gouvernement russe et de grandes sociétés privées liées aux autorités, nombre de groupes de presse voient rétrécir le champ de leur autonomie55.

110.       Alors que cinq des six quotidiens nationaux et plus de 20% des 35 000 journaux et périodiques locaux recensés demeurent entre des mains privées, seulement le tiers environ des 2 500 chaînes de télévision sont privées, le reste appartenant entièrement ou partiellement aux autorités fédérales ou locales. Cependant, le gouvernement influence indirectement la plupart des sociétés de médias au moyen d'une participation au capital des structures fédérales et locales, dont Gazprom (qui a le monopole du gaz) et la compagnie pétrolière Ioukos, qui détiennent elles-mêmes des parts importantes dans les groupes de presse.

111.       En 2003, le gouvernement a renforcé son influence sur NTV, chaîne autrefois propriété de Vladimir Goussinski mais qui, en 2001, est passée sous le contrôle de Gazprom Media, la branche médias de Gazprom, conglomérat gazier dont l'Etat est le premier actionnaire56. En juin 2003, TV Spektrum (TVS), dernière chaîne nationale à ne pas être passée sous le contrôle de l'Etat et connue pour ses critiques vis-à-vis de la politique du gouvernement, a dû cesser d'émettre au motif de «mauvaise gestion et crise financière».

112.       Aujourd'hui, sur les trois chaînes de télévision nationales, l'Etat possède la chaîne Rossia (RTR) et il est actionnaire majoritaire dans la Première Chaîne (ORT). L'Etat détient une participation financière de 38% dans Gazprom qui, à son tour, détient une participation financière de contrôle dans la troisième chaîne nationale, la grande chaîne privée NTV57. Il conserve aussi le contrôle des plus grandes stations de radio, Radio Mayak et Radio Rossii, et des agences de presse ITAR-TASS et RIA-Novosti.

113.       Le 16 septembre 2004, Miklos Haraszti, Représentant de l'OSCE pour la liberté des médias, a présenté un rapport sur la façon dont les médias russes ont couvert les récents attentats terroristes de Beslan, en Ossétie du Nord. M. Haraszti a souligné le fait que les principales sources d'informations destinées au public de la Fédération étaient les trois radiodiffuseurs nationaux et que, malheureusement, leurs informations n'étaient ni exactes ni à jour. En fin de compte, la presse écrite et les sites d'information d'Internet ont investi ce domaine afin de remédier du mieux possible à ce déficit d'informations58. La situation semble être la même pour ce qui est de la couverture, par la télévision publique, des manifestations récentes contre la réforme des prestations sociales.

114.       En juin 2004, la chaîne NTV a licencié Leonid Parfenov, présentateur de la célèbre émission d'analyse de l'actualité Namedni, après qu'il a contesté publiquement la décision de la chaîne de ne pas diffuser une interview de la veuve du leader séparatiste tchétchène Zelimkhan Iandarbiev. En juillet, Gazprom Media a installé Vladimir Koulistikov, ex-directeur de l'information de la chaîne publique Rossia, à la tête de NTV. Il a interrompu brutalement la plupart des émissions politiques de la chaîne, y compris la célèbre Svoboda Slova (Liberté d'expression), dernière émission de débat en direct de la télévision nationale. Nous partageons l'émoi que le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, M. Gil Robles, a exprimé dans son récent rapport sur la Russie59 concernant la disparition de toutes les émissions d'analyse en direct.

115.       Au vu des considérations ci-dessus, nous ne pouvons que conclure que le pluralisme et l'indépendance des médias en Russie ne sont pas suffisamment garantis et que cela n'est pas sans conséquences pour le fonctionnement normal de la démocratie dans le pays.

116.       Nous nous félicitons de la récente déclaration du ministre fédéral du Développement économique et du Commerce annonçant la préparation d'un plan visant à créer en Russie une vraie chaîne de télévision publique (d'ici 2008), mais nous aimerions aussi pouvoir constater au plus vite des mesures concrètes dans cette direction60 conformément à la Recommandation 1641 (2004) de l'Assemblée.

117.       Sans préjudice de la nécessité de se conformer aux autres engagements et obligations importants, nous considérons qu'il est fondamental de garantir le pluralisme des radiodiffuseurs nationaux (au sens de 'diffusant sur l'ensemble du territoire de la Fédération de Russie'). Cet objectif sera atteint, de préférence, par la création d'un radiodiffuseur public indépendant. Nous appelons par conséquent les autorités de la Fédération à agir rapidement et à créer un tel radiodiffuseur, en stricte conformité avec les normes du Conseil de l'Europe en la matière61.

118.       Dans le même temps, nous préconisons également la mise en place des conditions nécessaires au fonctionnement des médias électroniques privés. A cette fin, il conviendrait de créer une autorité indépendante de régulation du secteur de la radiodiffusion, conformément à la Recommandation Rec(2000)23 du Comité des Ministres, du 20 décembre 2000.

119.       Nous encourageons les autorités de la Fédération à soumettre aux experts du Conseil de l'Europe tout projet de loi concernant la création du futur radiodiffuseur public indépendant et de l'autorité de régulation du secteur de la radiodiffusion.

E.       La société civile

120.       Reconnaissant la contribution essentielle de la société civile au système d'équilibrage des pouvoirs dans une démocratie, l'Assemblée souligne – au paragraphe 9 de l'Avis N° 193 (1996) – la nécessité d'accorder une attention toute particulière à l'appui et au renforcement des organisations non gouvernementales dans le domaine des droits de l'homme et à l'établissement d'une société civile62.

121.       A l'occasion de notre visite à Moscou et dans d'autres régions de la Fédération de Russie, nous avons pu rencontrer de nombreux représentants d'ONG nationales et internationales œuvrant dans ce pays et de nous entretenir avec eux. Nous avons le sentiment que ces organisations sont actives et engagées et qu'elles sont en mesure d'apporter une contribution essentielle au fonctionnement normal de la démocratie et à la protection des droits de l'homme en Russie. Elles comprennent un certain nombre d'organisations de renommée internationale telles que «Mémorial», le Groupe Helsinki de Moscou et le Comité des «Mères de soldats de Russie», qui serait en voie de se transformer en parti politique. D'autres sont moins connues mais méritent aussi pleinement notre attention et notre soutien.

122.       Nous nous inquiétons cependant de la campagne émergente, dirigée par de hauts responsables de l'Etat, qui vise clairement à discréditer une partie importante de la société civile. Selon la Fédération internationale des Droits de l'Homme, lors d'une conférence de presse organisée le 7 mai 2004 sur la situation dans les prisons, le chef de la Direction générale de l'exécution des peines du ministère fédéral de la Justice (GUIN), le général Kraiev, a déclaré que, d'après des informations dont dispose ce ministère, les ONG seraient financées par des «organisations criminelles». Le général Kraiev a en particulier accusé des organisations du domaine des droits de l'homme, des «pouvoirs criminels», des familles de détenus et des avocats de déstabiliser les activités du ministère de la Justice en exerçant des pressions sur l'administration pénitentiaire et en répandant de fausses informations dans les médias63. Selon M. Kraiev, 163 «prétendues organisations de défense des droits de l'homme» seraient financées par des oligarques. Il a très explicitement désigné plusieurs ONG dans son allocution.

123.       Un autre motif d'inquiétude, plus grave encore, est la déclaration que le président Poutine a faite à l'occasion de son discours annuel sur l'état de la nation devant le Conseil de la Fédération, le 26 mai 200464. Dans son allocution, le président de la Fédération de Russie a déclaré ce qui suit: «Dans notre pays, il y a des milliers d'associations publiques et de syndicats qui travaillent de manière constructive. Mais toutes ne sont pas orientées vers la défense des intérêts réels de la population. Pour certaines d'entre elles, la priorité est de recevoir un financement de fondations étrangères influentes. D'autres sont au service de groupes douteux et d'intérêts commerciaux. Les problèmes les plus graves du pays et de ses citoyens ne reçoivent quant à eux aucune attention. Lorsqu'il s'agit de violations des droits humains fondamentaux, quand les intérêts réels des personnes sont menacés, la voix de ces organisations ne se fait guère entendre. Il n'y a là rien de surprenant: le fait est qu'elles ne peuvent pas mordre la main qui les nourrit. Naturellement, ces exemples ne sauraient justifier que nous portions des accusations contre l'ensemble de la société civile. Je pense que ces problèmes sont inévitables et de nature temporaire».

124.       Nous espérons assurément que la politique du président à l'égard de la société civile s'inspirera de la dernière et non de la première partie de sa déclaration et que le harcèlement administratif, fiscal et physique auquel certaines ONG sont paraît-il en butte prendra fin. Il va sans dire qu'il s'agit là d'un préalable essentiel au fonctionnement normal de la démocratie et au respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales en Russie. L'usage du pouvoir par le président et son autorité morale seront aussi d'une importance décisive à cet égard.

F.        Les institutions de médiation

      Le médiateur fédéral

125.       La fonction de Médiateur est entièrement nouvelle en Russie puisqu'elle a été créée en 1997, à la suite de la recommandation de l'Assemblée65, avec l'adoption par la Douma d'Etat d'une loi constitutionnelle fédérale sur «le médiateur de la Fédération de Russie» portant création du poste de commissaire fédéral aux droits de l'homme – ou médiateur.

126.       Elu pour un mandat de cinq ans, le médiateur est indépendant du gouvernement. La fonction est financée par le parlement, auquel le médiateur rend compte chaque année. Le médiateur s'occupe des plaintes déposées par des particuliers contre l'administration66, y compris celles dont les tribunaux ont été saisis67, mais sur lesquelles ils n'ont pas encore statué. Il peut engager une procédure68 en cas de violation des droits d'une personne ou d'une catégorie de personnes si la violation a un effet d'une «dimension sociale importante» ou si elle frappe des personnes incapables de défendre elles-mêmes leurs intérêts. Le Bureau du médiateur remplit également une fonction d'information puisqu'il établit des rapports à l'intention des organes publics concernés et communique avec les entités de la Fédération pour expliquer les nouvelles lois fédérales.

127.       Le poste de médiateur a été, dans l'ensemble, un poste hautement politique, et beaucoup considèrent qu'il a une valeur purement symbolique. Le premier médiateur, Sergueï Kovalev, alors qu'il était membre de la Douma lors de l'examen parlementaire de la loi portant sur la création de la fonction69, a considéré que le médiateur ne devrait pas avoir de mandat judiciaire analogue à celui de la Prokuratura, mais devrait simplement fonder l'exécution de son programme sur son «autorité morale». Un grand nombre de militants des droits de l'homme ont estimé que M. Mironov, qui a été médiateur fédéral de 1998 à février 2004, a été un médiateur moins entreprenant que son prédécesseur, mais il a aussi été critiqué comme étant «une source d'irritation pour le gouvernement» et accusé de «transplanter artificiellement en Russie les idées et pratiques du modèle occidental de défense des droits de l'homme.»

128.       Oleg Mironov a été remplacé, à compter du 13 février 2004, par M. Vladimir Loukine. Nous avons été ravis de pouvoir rencontrer notre ancien collègue de l'Assemblée parlementaire pendant notre visite à Moscou en novembre 2004. Il nous a dit que son rapport annuel serait publié avant la fin de l'année et que trois rapports spéciaux (sur la situation des femmes, la situation des militaires et la situation dans les prisons) étaient en cours d'élaboration. Nous avons également appris qu'au cours des huit premiers mois de son mandat, ses services avaient reçu plus de 20 000 plaintes de particuliers, soit environ 2 500 en moyenne par mois70. Cela peut paraître une charge de travail importante, mais dans un pays de 145 millions d'habitants, c'est presque négligeable.

129.       Nous considérons qu'il est absolument indispensable d'accroître sensiblement, dans un avenir très proche, les ressources humaines et financières de l'institution car la crédibilité du médiateur est en jeu: un effectif total de 200 agents71 (y compris les membres du personnel technique) n'est pas suffisant pour desservir la population d'un pays aussi grand que la Fédération de Russie. En Pologne, par exemple, dont la population est de 39 millions d'habitants, les services du médiateur emploient plus de 400 personnes.

130.       Six ans après la mise en place de la nouvelle institution, la création de ce poste n'a encore eu que peu de répercussions pratiques pour ce qui est de faire progresser l'État de droit et d'assurer le respect des droits de l'homme. De fait, certains critiques considèrent que la fonction de médiateur équivaut à celle d'un deuxième procureur général, sans grande influence de surcroît. Cela ne veut pas dire qu'il faille supprimer ce poste: bien au contraire, la fonction éducative de la publication par le médiateur de documents décrivant la situation des droits de l'homme en Russie est du plus haut intérêt. En dernière analyse, toutefois, si la fonction de médiateur n'est pas renforcée, il faudra toujours, en l'absence d'autres mécanismes suffisamment développés pour rendre l'Etat légalement comptable de ses actes, un organe doté d'une autorité officielle, tel que la prokuratura, pour faire respecter la légalité.

      Les médiateurs régionaux

131.       Selon l'article 5 de la loi relative au commissaire fédéral aux droits de l'homme, les 89 entités de la Fédération de Russie peuvent également, si elles le souhaitent et à leurs frais, élire leur propre médiateur. Nous notons avec satisfaction qu'au moment de la rédaction du présent rapport, c'est le cas de vingt-neuf d'entre elles, situées dans des régions aussi éloignées les unes des autres que Kaliningrad sur la côte balte, la région des Komis sous le cercle polaire arctique et celle de l'Amour sur le littoral du Pacifique. Nous nous félicitons vivement de cette évolution et invitons les entités (sujets) de la Fédération de Russie qui ne l'ont pas encore fait à créer sans plus tarder l'institution du médiateur. Les mandats des institutions existantes peuvent différer dans une certaine mesure, mais elles connaissent toutes des plaintes de particuliers contre l'administration locale, rendent compte au parlement régional de la façon dont l'administration applique sa législation et sont habilités à accéder aux locaux et aux documents pertinents. Elles formulent toutes des recommandations relatives aux améliorations à apporter.

132.       Le Tatarstan, république principalement musulmane située sur la Volga, est la région où le médiateur – que nous avons rencontré en octobre 2004 – a le mandat qui couvre le champ le plus large. Il doit veiller à ce que les normes internationales soient appliquées au Tatarstan et peut porter des affaires devant la Cour constitutionnelle de la République. M. Kryjov, qui a été nommé il y a trois ans médiateur de l'oblast de Moscou (qui ne comprend pas la capitale elle-même), ne dispose

pour desservir 73 communes que de 25 agents, dont 19 ont été effectivement nommés. Il a déjà publié trois rapports spéciaux portant respectivement sur la situation des enfants72, sur l'éducation juridique et sur les centres de détention provisoire.

133.       Jusqu'à une date très récente, il n'y avait pas de médiateur dans la République tchétchène: nous avons été heureux d'apprendre qu'un médiateur par intérim (M. Khassouïev) avait été nommé par décret présidentiel à la fin d'octobre 2004, comme suite à une proposition du Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe73, appuyée notamment par M. Loukine. Nous espérons que ce médiateur nouvellement nommé74 pourra contribuer de façon appréciable à rétablir la prééminence du droit dans la République tchétchène.

134.       Notant avec satisfaction que 29 médiateurs régionaux au total sont à pied d'oeuvre, nous réitérons notre recommandation de 2002 tendant à ce qu'une institution de médiation régionale soit créée dans toutes les entités de la Fédération. Cet objectif figure aussi parmi les priorités du médiateur fédéral pour 2005, comme l'indique son rapport annuel de 2004. Nous recommandons par ailleurs d'uniformiser autant que faire se peut les mandats des médiateurs régionaux et de préciser les liens entre les institutions de médiation régionales et le médiateur fédéral. Dans les régions où il n'y a pas de bureau d'information du Conseil de l'Europe, nous proposons de fournir aux services du médiateur une documentation leur permettant de donner des informations et des documents sur les activités de l'Organisation.

G.       La Commission présidentielle des droits de l'homme

135.       En vertu de la Constitution de la Fédération, le Président est le garant des droit et libertés du peuple et des citoyens. Pour l'aider à coopérer avec le gouvernement, les juridictions fédérales, la Prokuratura, les forces de l'ordre et les organismes publics, un certain nombre d'organes consultatifs auprès de la présidence ont été créés. Auparavant, il y avait 10 commissions relevant du président, parmi lesquelles la commission des droits de l'homme, et huit conseils75.

136.       La Commission présidentielle des droits de l'homme76 se compose de 30 membres bénévoles issus des principales ONG. Ella Pamfilova, ancien député à la Douma d'Etat, dirige les travaux de la commission depuis juillet 2002. Lorsque nous l'avons rencontrée à Moscou en novembre 2004, son énergie et son dévouement nous ont beaucoup impressionnés. Complétant l'action du médiateur, cet organe consultatif, qui est en contact direct77 avec le président Poutine et l'administration présidentielle, peut assurément jouer un rôle important pour la promotion et la défense des droits de l'homme et la sensibilisation du public. Nous avons appris que le président Poutine avait décidé, par décret présidentiel n° 1417 en date du 6 novembre 2004, de transformer la commission présidentielle des droits de l'homme en un «conseil présidentiel pour la promotion du développement des institutions de la société civile et des droits de l'homme».

137.       Nous espérons que, ce faisant, l'administration présidentielle a pris en considération les «principes de Paris» relatifs aux institutions nationales de promotion et de protection des droits de l'homme78 qui donnent des lignes directrices concernant leur statut et leurs compétences. Cela permettrait à cette nouvelle institution russe de devenir membre du réseau d'institutions nationales pour les droits de l'homme des Etats membres du Conseil de l'Europe qui a été mis sur pied en application de la Résolution (97)11 du Comité des Ministres79 et de poursuivre sa coopération déjà fructueuse avec le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe.

138.       Dans un pays régi par la prééminence du droit, le gouvernement ne doit pas empiéter sur l'activité des tribunaux, les tribunaux ne doivent pas empiéter sur l'action du gouvernement et l'élaboration de la loi se distingue de son application80. Si la loi se révèle inadéquate, seul le Parlement doit pouvoir la modifier. Dans tout ce qu'il entreprend, le gouvernement doit s'en tenir à des règles fixées et annoncées à l'avance. Ce principe implique que toute personne – ministre, juge, fonctionnaire ou citoyen ordinaire – doit respecter la loi, que nul n'est au-dessus des lois et que la loi est la même pour tous. Le respect des principes du droit consiste à garantir le maintien de l'ordre, la stabilité, la sécurité juridique et la bonne exécution des décisions de justice. C'est une assurance indispensable contre l'arbitraire à tous les niveaux.

139.       Les droits de l'homme ne peuvent être pleinement garantis et protégés que si ce principe de primauté du droit est respecté. L'instauration de l'Etat de droit requiert davantage que l'adoption de bonnes lois. Elle requiert que toutes les institutions publiques et tous les secteurs du système judiciaire – y compris le ministère de la Justice, les tribunaux, la magistrature, les procureurs, les avocats et les policiers – appliquent les lois d'une manière conforme aux intentions et objectifs de celles-ci. En dernière analyse, la prééminence du droit ne pourra devenir une réalité que lorsque le public sera convaincu que les tribunaux et les organes de la justice pénale sont véritablement en mesure de poursuivre les auteurs d'infractions tout en protégeant le droit des prévenus à un procès équitable conformément aux normes européennes en la matière.

140.       Lorsqu'elle a adhéré au Conseil de l'Europe, la Fédération de Russie a accepté l'obligation statutaire de respecter les principes de l'Etat de droit et, dans l'Avis N° 193 (1996) (§ 10 xx.), elle a accepté un engagement «indéfini» de mener des réformes juridiques pour mettre l'ensemble de sa législation en conformité avec les normes du Conseil de l'Europe. Par ailleurs, l'Avis N° 193 (1996) a énuméré un certain nombre de domaines où des réformes spécifiques s'imposaient.

A.       Réforme judiciaire

141.       La Fédération de Russie a engagé un ambitieux programme de réforme judiciaire, mais a décidé d'adopter une approche graduelle tenant compte de la dimension du pays, de son organisation territoriale décentralisée, de ses ressources budgétaires limitées et de la nécessité d'adapter les règles de procédure au fonctionnement des nouveaux tribunaux. La tendance générale est à une spécialisation plus poussée des tribunaux par la création de nouvelles instances spécialisées ou de sections spécialisées au sein des tribunaux existants.

142.       Au cours de la décennie écoulée, la Russie a mené, dans tous les domaines de son ordre juridique et de son système judiciaire, des réformes importantes qui ont de profondes répercussions sur les lois et les institutions chargées d'administrer la justice. Dans le domaine du droit pénal, les réformes ont été particulièrement spectaculaires depuis l'entrée en vigueur du nouveau Code fédéral de procédure pénale, intervenue entre le 1er juillet 2002 et le 1er janvier 2004. Ces réformes exigeront l'adoption de nouvelles structures procédurales, l'acquisition de nouvelles compétences et l'exécution de nouvelles obligations. Cependant, dans sa Résolution 1418 (2005), adoptée le 25 janvier 2005, l'Assemblée a regretté, soulignant l'importance de l'indépendance de l'appareil judiciaire et en particulier des juges, que les réformes législatives introduites par la Fédération de Russie en décembre 2001 et mars 2002 n'aient pas apporté une meilleure protection des juges contre l'influence

indue de l'exécutif et qu'elles aient même accentué leur vulnérabilité à cet égard. Des études récentes et des affaires qui ont fait grand bruit dans les médias ont montré que les tribunaux restent très exposés à des influences abusives.

      Juridictions de première instance (juges de paix)

143.       Mis en place à partir de 1998, ces tribunaux connaissent des infractions pénales passibles d'une peine maximale d'une durée inférieure à trois ans et de certaines affaires civiles81. Il y avait 5 576 juges de paix dans l'ensemble du pays, encore qu'il reste bien des postes à pourvoir dans ce système. Ces juges s'occupent de diverses affaires civiles et pénales. Dans les régions où ce système a été intégralement mis en place, le nombre d'affaires en attente et les retards ont nettement diminué, qu'il s'agisse des affaires dont sont saisies ces tribunaux ou les juridictions ordinaires, les rôles désencombrés ayant pu accepter les affaires plus graves plus rapidement.

144.       Ce système connaît un développement inégal selon les régions, mais fonctionnaient sur l'ensemble du territoire (sauf en Carélie et en Tchétchénie). Dans certaines régions, ces juridictions se chargeaient de 65% des affaires civiles des juges fédéraux et de 25% au maximum de leurs affaires pénales, ce qui pourrait avoir contribué à désencombrer les centres de détention provisoire (voir plus loin, à la section consacrée au système pénitentiaire).

      Suppression des tribunaux comportant des juges non professionnels

145.       Entré en vigueur le 1er juillet 2002, le Code de procédure pénale a abrogé la loi sur les juges non professionnels du 10 janvier 2000; cependant, en application des dispositions provisoires du nouveau Code, les magistrats non professionnels pouvaient traiter des d'affaires pénales jusqu'au 1er janvier 2004. La procédure de nomination de ces juges non juristes était en cause dans l'affaire Posokhov c. Russie, dans laquelle la Cour a jugé le 4 mars 2003 que le droit du requérant à ce que sa cause soit entendue par un tribunal «établi par la loi» avait été violé82. Au civil, en vertu de la loi sur l'application du Code de procédure civile (14 novembre 2002), les juridictions comportant des magistrats non professionnels ont été supprimées à compter du 1er février 2003.

      Procès avec jury

146.       La Russie moderne83 a décidé de réintroduire le procès avec jury en 1991. Auparavant, la Constitution de 1978 de la RSFSR modifiée stipulait que les affaires civiles et pénales devaient être examinées collectivement ou individuellement, soit dans les tribunaux de première instance – avec la participation de jurés et de juges non professionnels, soit par un collège de trois juges, soit encore par un juge unique. En 1991, à la suite de la modification de la législation pertinente (Code de procédure pénale, Code pénal, loi sur la magistrature et Code des infractions administratives), les tribunaux avec jury ont été établis par la loi mais mis en place graduellement. En 1993, de tels tribunaux ont été mis en place à titre expérimental dans 9 entités («sujets») de la Fédération.

147.       Le nouveau Code de procédure pénale entré en vigueur entre le 1er juillet 2002 et le 1er janvier 2004 prévoyait l'institution du procès avec jury dans le reste du pays pour des infractions passibles d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à 10 ans. A la fin de 2003, 83 des 89 régions avaient instauré le procès avec jury. Le 1er janvier 2004, cinq des six régions à ne l'avoir pas encore fait, y compris Saint-Pétersbourg, avaient prévu d'instituer le procès avec jury; seule reste la Tchétchénie, où cette mise en place doit intervenir le 1er janvier 2007. Le nouveau Code de procédure pénale prévoit une nouvelle procédure pour plaider coupable et comporte des incitations sous la forme, notamment, de peines plus courtes et de procès plus courts pour certaines catégories d'infractions. Au cours des six premiers mois d'application de cette disposition, celle-ci ne pouvait être invoquée que pour des infractions passibles d'une peine d'emprisonnement inférieure à trois ans. Au cours de cette période, 100 400 prévenus se sont prévalus de la nouvelle procédure. En juillet 2003, le Code a été modifié pour simplifier la procédure et en faire bénéficier les prévenus passibles d'une peine d'emprisonnement d'une durée maximale de 10 ans.

148.       Selon les observateurs, la majorité des avocats, des prévenus84, et de l'opinion publique est favorable au procès avec jury et à une procédure pénale contradictoire. Toutefois, le procès avec jury est réservé à un petit nombre d'infractions particulièrement graves. Les autres affaires pénales sont jugées par des juges uniques, car les deux «assesseurs du peuple» qui siégeaient avec le juge avant les réformes ont été supprimés. Selon la Cour suprême, 496 procès avec jury se sont tenus en 2003, concernant environ 1 000 prévenus85. Dans environ 21% des cas, ces procès ont débouché sur un acquittement (contre 0,5% dans le cas des procès sans jury). En l'absence d'une règle de l'autorité de la chose jugée qui rendrait l'acquittement insusceptible d'appel, un quart environ de ces acquittements ont été annulés en appel86.

149.       Le fort pourcentage d'acquittements par des tribunaux avec jury s'explique généralement par les violations du droit procédural par les organes d'instruction et les enquêteurs chargés de recueillir des preuves.

150.       Selon le médiateur fédéral87, M. Loukine, il n'en faudra pas moins régler un certain nombre de problèmes dans un proche avenir si l'on veut rendre pleinement opérationnel le système des tribunaux avec jury. En particulier, il convient d'améliorer le système de sélection des jurés. A l'heure actuelle, les listes de jurés éventuels sont établies sur la base des listes électorales. Un ordinateur réalise ensuite une sélection aléatoire. Il n'est pas prévu par la loi d'exclure automatiquement de la liste des jurés éventuels les personnes à la tête d'organes législatifs ou exécutifs ou leurs adjoints, les militaires, les juges, les procureurs, les avocats ou les membres des forces de l'ordre. Ils ne peuvent être dispensés de leurs fonctions de juré que sur leur demande. En l'absence d'une telle demande, le juge peut les récuser s'il a des raisons de douter de leur impartialité.

151.       M. Loukine a été d'avis que la loi devrait interdire à ces personnes d'exercer les fonctions de juré et que le système de sélection devrait être réformé de façon à exclure toute possibilité de sélection arbitraire. Il a proposé de créer dans chaque région une commission spéciale d'établissement de listes de jurés, qui serait chargée de dresser ces listes, de les mettre à jour, de les vérifier, de convoquer les jurés, de contrôler leur comparution devant le tribunal et d'établir une documentation sur les responsabilités des jurés.

      Tribunaux pour mineurs

152.       Il est également proposé, dans le cadre des réformes, d'instituer des tribunaux spécialisés pour mineurs. Le Conseil présidentiel pour la réforme de l'appareil judiciaire a présenté une proposition à cet effet. Selon la procurature générale, il y aurait trois millions d'enfants sans abri ou d'enfants qui ne sont pas pris en charge par leurs parents. Un grand nombre d'entre eux sombrent dans la délinquance. A l'heure actuelle, les tribunaux examinent les infractions commises par des mineurs comme s'il s'agissait d'infractions commises par des «adultes». Les procédures pénales débouchent sur la condamnation de 23 à 24% des délinquants juvéniles à des peines d'emprisonnement. Il s'ensuit que la Russie a un nombre de mineurs incarcérés parmi les plus élevés du monde: 17 personnes pour 100 000 habitants, soit 25 000 environ au début de 2004. Les tribunaux pour mineurs sont censés considérer les enfants non comme un objet de répression, mais comme les sujet d'une action de réinsertion.

B.       Le fonctionnement du système judiciaire

153.       Selon la loi constitutionnelle fédérale sur le système judiciaire de la Fédération de Russie88, l'appareil judiciaire est divisé en trois branches. Les juridictions ordinaires, y compris les tribunaux militaires, sont soumises à l'autorité de la Cour suprême89. Ces juridictions connaissent d'affaires civiles et pénales et comprennent également les tribunaux de district, qui desservent chaque district urbain et rural, les tribunaux régionaux et la Cour suprême. Les décisions rendues par les tribunaux de première instance ne sont susceptibles d'appel qu'auprès de la juridiction immédiatement supérieure sauf si une question constitutionnelle est en jeu. Le système des tribunaux d'arbitrage (de commerce), placé sous l'autorité de la Cour suprême d'arbitrage90, constitue une deuxième branche de l'appareil judiciaire. Les juridictions d'arbitrage connaissent d'affaires concernant des litiges commerciaux entre des personnes morales, et entre des personnes morales et l'Etat. La Cour constitutionnelle91 (ainsi que les cours constitutionnelles d'un certain nombre de régions de la Fédération de Russie) représente la troisième branche.

154.       Toutes les conditions préalables au fonctionnement d'un appareil judiciaire efficace se trouvent à présent réunies, mais l'on continue aujourd'hui de considérer cet appareil comme faible, inefficace, partial et corrompu. La corruption est l'aspect qui suscite le plus de plaintes et elle est reconnue par tous les hauts responsables du pays. Les allégations de corruption doivent naturellement faire l'objet d'enquêtes; certains de nos interlocuteurs ont toutefois indiqué que ces allégations pourraient également être avancées, en particulier par les médias, afin de jeter le discrédit sur un appareil judiciaire qui, ces dernières années, a acquis du prestige et de l'autorité.

155.       Des accusations de «justice par téléphone» sont également fréquentes: de nombreux juges préfèreraient se voir donner des instructions par le parquet ou la cour d'appel plutôt que risquer d'avoir leur jugement annulé. Cela semble dû au fait que le système d'appréciation du comportement professionnel des juges repose sur le nombre de jugements rendus qui sont ou ne sont pas cassés.

156.       A cet égard, il convient de noter que l'appareil judiciaire avait déjà mauvaise réputation à l'époque soviétique, ce qui tenait peut-être au fait que lorsqu'un particulier invoquait un «droit», il s'adressait plus souvent à l'autorité, la prokuratura dans la plupart des cas, en l'implorant de redresser une injustice, et non à un tribunal indépendant, qui procèderait à un calcul utilitaire pour évaluer sa demande à l'aune d'une hiérarchie de droits concurrents.

157.       L'absence générale de culture juridique et la défiance globale de la population vis-à-vis des tribunaux ne sont cependant pas uniquement héritées de l'ère soviétique: elles tiennent aussi à la piètre qualité du système judiciaire dans son ensemble. Bien que leur traitement ait connu une augmentation importante, la plupart des juges du pays travaillent dans de très mauvaises conditions. Le personnel judiciaire est mal rémunéré, les locaux ont besoin de réparations urgentes et on nous a dit que beaucoup de tribunaux du pays ne reçoivent pas de fonds suffisants pour leur permettre de régler leurs factures de téléphone ou d'électricité. Selon Russian Axis92, l'appareil judiciaire ne s'est vu affecter que 1,77% des crédits du budget de 2004, contre 11,68% pour les forces de l'ordre et la sécurité de l'Etat93.

158.       Pour ce qui est des aspects plus positifs: nous avons été informés que le nombre d'affaires portées devant les juridictions ordinaires était passé d'un million il y a huit ans à six millions en 2004. Cela semble indiquer que, contrairement à ce qui a été dit plus haut, la population a plus souvent recours aux tribunaux que par le passé, ce que l'on peut interpréter comme le signe d'une plus grande confiance dans l'appareil judiciaire. Toutefois, cela implique que les juges, déjà mal équipés et surchargés de travail94, ont à présent de plus en plus d'affaires à traiter et qu'il leur faut plus de temps en moyenne pour statuer sur ces affaires, ce qui, à son tour, diminue la confiance dans l'appareil judiciaire. Le fait que la législation nouvellement adoptée, surtout en matière pénale, impose des délais rigoureux complique singulièrement la tâche des juges. On nous a dit qu'il était très facile d'engager une procédure disciplinaire contre n'importe quel juge car tous avaient dépassé ou dépasseraient les délais de procédure en raison de la charge de travail qui leur était imposée.

159.       En vertu de la Constitution, les juges des trois plus hautes juridictions (la Cour constitutionnelle, la Cour suprême et la Cour d'arbitrage suprême) sont nommés à titre permanent (jusqu'à l'âge de 65 ans, à l'exception des juges de la Cour constitutionnelle) par le Conseil de la Fédération, sur proposition du Président. Celui-ci désigne directement les juges de tous les autres tribunaux fédéraux sur proposition du président de la Cour suprême ou de la Cour suprême d'arbitrage, conformément à la loi sur le statut des juges.

160.       Le président et le vice-président de tous les tribunaux fédéraux sont nommés95 par le Président pour un mandat de six ans renouvelable96, sur proposition du président de la Cour suprême (ou de la Cour d'arbitrage suprême), après consultation de la commission supérieure d'habilitation. Ce mode de nomination est accusé de donner à l'administration présidentielle le moyen d'influer sur toutes les décisions de justice importantes car, par définition, des présidents de tribunal nommés par l'exécutif sont plus enclins soit à se conformer aux instructions reçues directement du Kremlin («justice par téléphone»), soit à essayer de rendre des décisions qui ne soient pas de nature à contrarier l'exécutif.

161.       On est d'autant plus fondé à nourrir ce soupçon qu'il appartient au président du tribunal de «répartir les responsabilités entre ses adjoints ainsi qu'entre les autres juges siégeant au tribunal» (article 6 § 2 de la loi fédérale sur le statut des juges). Qui plus est, en vertu de la loi fédérale sur les organes de la magistrature97, le président d'un tribunal peut demander à la commission (supérieure) d'habilitation de révoquer un juge pour manquement à la discipline.

162.       Dans un Etat régi par la prééminence du droit, il est de la plus haute importance que l'appareil judiciaire jouisse de la confiance du public et soit perçu comme une autorité indépendante et impartiale, en particulier vis-à-vis de l'exécutif. A cet égard, nous avons été informés de certains faits préoccupants, de nature à faire planer une menace sur l'indépendance du pouvoir judiciaire.

163.       En septembre 2004, sur une initiative de son président, M. Mironov, le Conseil de la Fédération a approuvé un projet de loi qui donnerait au président Poutine et au Conseil de la Fédération le pouvoir de recruter et de révoquer les juges (projet de loi n° 93807-4 soumis à la Douma d'Etat le 30 septembre 2004). Ce projet de loi modifie la structure de la commission supérieure d'habilitation et le mode de sélection de ses membres; cette commission jouait jusqu'ici un rôle important dans la nomination des magistrats des juridictions fédérales, y compris les juges de la Cour suprême. Par ailleurs, cette commission est le seul organe habilité à révoquer les juges ou à lever leur immunité.

164.       A l'heure actuelle, 18 des 29 membres de la Commission sont élus au scrutin secret par le Congrès panrusse de la magistrature. Le Conseil de la Fédération nomme dix membres non professionnels et le Président nomme un membre. En vertu du projet de loi, le nombre des membres de la Commission serait ramené à 21, dont 10 seraient nommés par le Président et confirmés par le Conseil de la Fédération. Le président de ce Conseil nommerait 10 membres non professionnels et un membre resterait nommé directement par le Président98. Parallèlement au transfert au Président du pouvoir de contrôle sur la commission, le projet de loi étendrait aussi le mandat de celle-ci en l'autorisant à examiner les décisions des commissions d'habilitation des entités de la Fédération concernant la révocation des juges ou les mesures disciplinaires à leur encontre. Ce projet de loi doit encore être approuvé par la chambre basse, la Douma d'Etat, qui est dominée par des partis favorables au Kremlin.

165.       Le texte du projet est accompagné d'une note explicative selon laquelle, dans la pratique, la mise en œuvre de la loi sur les organes de la magistrature a montré que le «problème de la responsabilité des juges vis-à-vis de la société dans l'accomplissement de leur mission n'est pas pleinement résolu». La note explicative va plus loin et précise que le projet de loi vise à «étendre le contrôle public sur l'évaluation des compétences professionnelles des candidats à la magistrature, le respect de la déontologie par les juges, les décisions concernant leur recrutement, leur révocation et leur responsabilité disciplinaire». Il est difficile de comprendre comment la concentration des pouvoirs de contrôle dans les mains du Président peut contribuer à l'amélioration du contrôle public; on peut aussi se demander si le fait de limiter la participation des juges aux procédures relatives à leur recrutement et leur révocation est une solution adéquate pour obtenir qu'ils remplissent dûment leur mission.

166.       Deux anciens juges de rang élevé qui auraient été révoqués99 pour avoir refusé d'obéir aux ordres officieux de l'exécutif ont critiqué ce projet de loi dont ils considèrent qu'il place le pouvoir judiciaire, déjà, selon eux, sous l'influence de l'exécutif, entièrement sous le contrôle du Kremlin. Lors d'une audition du Conseil de la Fédération organisée le 28 octobre 2004, le Président du Conseil de la Magistrature de la Fédération de Russie, Youri Sidorenko, a lui aussi critiqué les changements proposés comme portant atteinte à l'indépendance du pouvoir judiciaire. Dans sa Résolution 1418 (2005), l'Assemblée a déclaré «s'inquiéter tout particulièrement» des nouvelles propositions tendant à accroître encore l'influence de l'administration présidentielle sur la commission d'habilitation des juges.

167.       Une autre proposition contestée du Conseil de la Fédération est de modifier la nomination du chef du Service de la magistrature de la Cour suprême fédérale (soumise en septembre 2004). Ce service, dont le fonctionnement s'appuie sur la loi relative système judiciaire et la loi sur le Service judiciaire, est une instance fédérale chargée d'apporter une assistance organisationnelle aux tribunaux et aux juges (financement, soutien logistique, ressources humaines, etc.). Jusqu'à présent, le chef de ce service était nommé et révoqué par le président de la Cour suprême avec l'approbation du Conseil de la magistrature de la Fédération de Russie, mais le projet de loi propose de transférer cette compétence au président de la Fédération qui nommera le chef du service «sur proposition du président de la Cour suprême et en prenant en compte l'opinion du Conseil de la magistrature». L'autonomie du service judiciaire (dont le nom officiel est «Service judiciaire auprès de la Cour suprême», при Верховном Суде Российской Федерации) vis-à-vis de l'exécutif garantit la séparation des pouvoirs et l'indépendance de l'appareil judiciaire. La possibilité de décider de l'attribution des fonds et des ressources peut devenir un moyen de contrôle des tribunaux.

168.       Nous engageons vivement les autorités russes à renoncer à toute réforme qui ferait planer des doutes quant à l'impartialité et à l'indépendance du pouvoir judiciaire. Nous les appelons aussi à veiller à ce que toute réforme soit conforme aux normes européennes et, en particulier, à la Charte européenne sur le statut des juges et la Recommandation R (94) 12 sur l'indépendance, l'efficacité et le rôle des juges.

C.       La réforme de la Prokuratura

169.       Lors de son adhésion au Conseil de l'Europe, la Fédération de Russie s'est engagée à adopter «de nouvelles lois conformes aux normes du Conseil de l'Europe ... sur le rôle, le fonctionnement et l'administration du Parquet» (Avis N° 193 (1996) § 7 v). Dans la Résolution 1277 (2002), l'Assemblée, tout en notant que certains progrès avaient été réalisés, a indiqué qu'elle attendait des autorités russes qu'elles mènent à bien la réforme de la Prokuratura conformément aux principes du Conseil de l'Europe et aux engagements contractés.

170.       Force nous est de signaler que depuis 2002, ce processus de réforme s'est arrêté et que les autorités de la Fédération ne semblent pas actuellement disposées à engager un nouveau processus de réforme digne de ce nom. Cette attitude s'explique de deux manières: les autorités russes considèrent, d'une part, que l'entrée en vigueur par étapes, entre le 1er juillet 2002 et le 1er janvier 2004, du nouveau Code de procédure pénale aligne les prérogatives de la Prokuratura en matière pénale sur les exigences des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) et, d'autre part, que la fonction de contrôle général de légalité demeure une nécessité dans la Russie d'aujourd'hui et qu'il n'existe aucune norme européenne les empêchant de conserver une institution qui a fait la preuve de son utilité sociale au cours des derniers siècles.

171.       Eu égard à la Recommandation Rec(2000)19 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe aux Etats membres sur le rôle du ministère public dans le système de justice pénale, à la Recommandation 1604 (2003) de l'Assemblée parlementaire sur le rôle du ministère public dans une société démocratique régie par le principe de la primauté du droit et à la jurisprudence applicable de la Cour européenne des Droits de l'Homme, nous considérons que l'actuelle loi fédérale sur la prokuratura de la Fédération de Russie100 n'est toujours pas conforme aux normes européennes, comme on le verra ci-dessous.

      L'indépendance de la Prokuratura et ses relations avec les autres pouvoirs publics

172.       L'article 129 de la Constitution dispose que «la prokuratura de la Fédération de Russie constitue un système centralisé unique dans lequel les procureurs inférieurs sont subordonnés aux procureurs supérieurs et au Procureur général de la Fédération de Russie». En vertu de l'article 12 de la loi fédérale de 1992 sur la prokuratura, le Procureur général de la Fédération de Russie est nommé pour cinq ans par le Conseil de la Fédération, sur proposition du Président. Les procureurs des régions de la Fédération sont nommés par le Procureur général fédéral, avec l'aval des régions101.

173.       Il convient toutefois de noter que, si la loi prévoit la révocation du Procureur général par le Président (et non par le Conseil de la Fédération), elle n'indique aucun motif de révocation. Il n'est pas prévu d'examen indépendant et impartial de la procédure de révocation du Procureur général, comme le préconise la Recommandation Rec(2000)19 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe. Par ailleurs, le mandat de cinq ans conféré au Procureur général augmente le risque de voir ce dernier prendre des décisions motivées non par des considérations purement juridiques, mais par l'opportunité politique.

174.       L'article 7 de la loi prévoit la participation du Procureur général à des réunions d'organes législatifs et exécutifs, aux niveaux fédéral, régional ou local. Nous considérons tout à fait inapproprié qu'un Procureur général ait la possibilité de soumettre des propositions de lois aux assemblées régionales (article 9 de la loi) ou de participer aux débats parlementaires102. Nous jugeons également étrange que les procureurs puissent assister à toutes les audiences des juridictions de droit commun et des cours d'arbitrage (article 1 de la loi de 1992). Nous estimons que ces droits servent à renforcer le pouvoir du procureur vis-à-vis des autres organes publics et à créer dans l'Etat une sorte de super-autorité, ce qui est extrêmement dangereux pour le développement d'un Etat démocratique et respectueux des lois.

175.       En définitive, vu les pouvoirs très étendus conférés à la Prokuratura, il n'est pas étonnant qu'elle ait souvent été qualifiée de quatrième pouvoir. L'analyse ci-dessous aidera à comprendre pourquoi.

      La fonction de contrôle général de légalité

176.       Il faut rappeler que la Prokuratura103 de l'époque soviétique a été maintenue et institutionnalisé sans grand changement dans la Constitution de 1993104 de la Fédération de Russie. La prokuratura a deux fonctions principales: l'exercice de l'action pénale et l'enquête sur les infractions, et le contrôle général de légalité (nadzor) sur les organes administratifs. Depuis plus d'une décennie, le statut de la prokuratura fait l'objet de vives controverses, et un certain nombre de propositions ont été formulées concernant l'orientation à imprimer aux futures réformes.

177.       Dès avant la fin du gouvernement de Gorbatchev, la prokuratura était l'objet de critiques portant spécifiquement sur ses larges pouvoirs de contrôle. Les juristes soviétiques recommandaient eux-mêmes d'adopter un certain nombre de réformes: supprimer la prérogative de contrôle en l'absence de «signe d'une violation», c'est-à-dire de plainte émanant d'un citoyen; mettre fin à la pratique des avertissements et des ordres donnés aux organes administratifs de modifier un comportement jugé illégal par la prokuratura; et lui interdire de suspendre directement des actes administratifs au lieu de notifier simplement à l'organe concerné qu'il ferait l'objet de poursuites judiciaires s'il ne mettait pas fin de lui-même aux pratiques en question. Ces propositions visaient à maintenir le pouvoir effectif de la prokuratura d'intervenir au nom de citoyens mécontents, tout en limitant l'exercice de la fonction afin de prévenir les abus.

178.       A l'heure actuelle, la prokuratura conserve sa fonction de contrôle général de légalité, qui implique l'exercice d'un contrôle sur les pouvoirs exécutif et législatif105, les organes d'instruction et les organes administratifs. A ces fins, elle peut: 1) se rendre dans les locaux d'un organe et demander communication des matériaux et documents se rapportant à la violation de la loi; 2) engager des poursuites pénales ou une action administrative contre l'auteur d'une violation; 3) demander l'annulation d'un acte juridique contraire à la loi; ou 4) intenter un procès civil en réparation des dommages causés par une violation. La prokuratura a également le pouvoir de prendre des ordonnances concernant un organe ou une personne quelconque, notamment une ordonnance de comparution devant le Procureur général pour présenter des explications concernant toute question faisant l'objet du contrôle ou d'une enquête mené par ce dernier. D'une façon générale, le champ d'application des instruments confiés à la prokuratura est beaucoup trop étendu et la loi ne précise pas les questions et les procédures à propos desquelles ces ordonnances sont contraignantes.

179.       L'étendue de ces pouvoirs semble être contraire au paragraphe 12 de la Recommandation (2000) 19 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, qui dispose que le ministère public ne doit pas s'ingérer dans les compétences du pouvoir législatif ou du pouvoir exécutif. Par ailleurs, ces pouvoirs recoupent dans une certaine mesure les attributions des sept représentants plénipotentiaires du président dans les régions et des 89 inspecteurs fédéraux.

180.       Toutefois, la grande majorité de nos interlocuteurs, tant à Moscou que dans les régions, ont présenté des arguments tout à fait convaincants en faveur du maintien de cette position dominante en matière de contrôle de la légalité. L'un des arguments pratiques ayant le plus de poids est celui faisant valoir que l'appareil judiciaire n'est tout simplement pas assez développé ni expérimenté pour pouvoir s'occuper d'un nombre d'affaires106 qui serait considérablement accru si l'on réduisait les pouvoirs de cette institution. On a fait observer que les «réformateurs» (par opposition aux éléments plus «conservateurs» ou «gradualistes») souhaitent retirer purement et simplement à la prokuratura sa fonction de contrôle général de légalité pour la confier au pouvoir judiciaire, qui agirait sur la base de plaintes individuelles, conformément aux articles 46 et 53 de la Constitution. On nous a dit qu'il s'agissait là d'un changement positif dans un «monde idéal», mais que le moment n'était pas encore venu d'abandonner le système actuel dans lequel la prokuratura exerce un contrôle général sur les instances gouvernementales. La meilleure façon de concilier ces positions antagonistes sur l'avenir de la prokuratura serait, selon nos interlocuteurs, de faire coexister parallèlement les processus du contrôle judiciaire et du contrôle par la prokuratura, et de supprimer à terme la fonction de contrôle général dévolue à cette dernière. A ce jour, le pays compte environ 35 000 procureurs, le nombre des juges des tribunaux de droit commun étant de 23 000.

181.       Nous engageons vivement les autorités de la Fédération à poursuivre le processus de réforme de la prokuratura, conformément aux normes européennes susmentionnées. A cet égard, nous rappelons qu'en ce qui concerne les responsabilités non pénales des procureurs, la Recommandation 1604 (2003) dispose qu'il est indispensable que «les pouvoirs et les responsabilités des procureurs soient limités à la poursuite des infractions pénales et à un rôle général de défense de l'intérêt public à travers le système de justice pénale, et que des organismes séparés, efficaces et situés dans des lieux appropriés soit établis pour s'acquitter de toutes les autres fonctions». Ces organismes peuvent être des tribunaux ordinaires, des tribunaux administratifs spécialisés, sur le modèle du système français ou allemand, ou un autre organisme indépendant.

      La prokuratura et la protection des droits de l'homme

182.       Les articles 26 à 28 de la loi fédérale de 1992 confient à la prokuratura de nouvelles responsabilités dans le domaine du contrôle et de la garantie des droits des citoyens de la fédération. Cela a été considéré comme une avancée décisive par rapport au système soviétique. Concrètement, la prokuratura: 1) examine les requêtes et les recours émanant de particuliers; 2) s'entretient avec les victimes et leur explique leurs droits; 3) prend des dispositions pour prévenir toute violation; 4) engage des poursuites contre ceux qui violent les droits des citoyens, et 5) a qualité pour représenter les victimes qui, pour des raisons tenant à leur santé, à leur âge, etc., ne peuvent pas défendre elles-mêmes leurs intérêts. À nos yeux, ces fonctions empiètent manifestement au moins en partie sur celles de l'institution de médiation, au niveau fédéral et régional.

183.       En ce qui concerne le droit de représenter les citoyens dans le cadre de procédures judiciaires civiles, la prokuratura ne devrait intervenir que dans des cas exceptionnels d'utilité publique, tels que la tutelle, la recherche de paternité et l'invalidité d'un mariage, ou pour représenter les intérêts de personnes incapables telles que les mineurs ou les handicapés mentaux. L'action civile est la responsabilité des parties et les tribunaux civils ne devraient intervenir qu'après avoir été saisis par l'une des parties.

184.       S'agissant de l'intervention de la prokuratura en matière pénale dans l'intérêt de la victime, elle ne doit pas se substituer au pouvoir de l'appareil judiciaire de sanctionner l'auteur de l'infraction et d'indemniser la victime ni porter atteinte à ce pouvoir.

185.       Pour ce qui est des plaintes déposées par des particuliers contre des actes des pouvoirs publics, il est exact que le dépôt de plaintes devant le parquet a longtemps été le principal mode de contestation des actes des agents de l'Etat et que cette pratique reste très répandue, car elle est considérée comme permettant d'obtenir rapidement une assistance rapide et gratuite. Cette allégation est corroborée par les statistiques concernant le nombre de cas où des particuliers ont saisi cette institution pour défendre leurs droits107 .

186.       Il est exact également que les réformes de la prokuratura n'ont pas été menées d'une façon systématique, ce qui a débouché sur l'adoption de lois et de politiques contradictoires. Ainsi, par exemple, un traité de droit constitutionnel faisant autorité signale que diverses lois contreviennent directement à l'article 46 de la Constitution de la Fédération en n'autorisant la seule prokuratura à poursuivre une action contre les organes visés et en ne prévoyant pas ce droit pour les particuliers. Les révisions successives du Code civil et des autres instruments normatifs ont encore obscurci la lisibilité du rôle de la prokuratura.

187.       Le nouveau Code de procédure civile (CPC) contient par exemple des dispositions qui ne concordent pas entièrement avec la loi sur la prokuratura, laquelle dispose que «lorsque les droits ou libertés d'un nombre important de citoyens sont en jeu et que la violation, en raison des circonstances, a une dimension sociale importante, le procureur peut, dans l'intérêt des victimes, intenter un procès devant une juridiction de droit commun ou un tribunal d'arbitrage.» Or, le Code de procédure civile ne permet au procureur d'intenter un procès au nom d'un(e) citoyen(ne) que s'il/elle est incapable de le faire en raison de son état de santé, de son incapacité d'ester en justice ou pour toute autre raison.

188.       Ces dispositions et d'autres dispositions contradictoires montrent que la prokuratura voit progressivement se réduire sa compétence en matière de contrôle de la légalité dans les affaires individuelles. Toutefois, le statut légal de la prokuratura n'a pas été modifié en conséquence et l'on n'a pas non plus modifié de façon appréciable la façon dont l'institution exerce sa fonction de contrôle de la légalité.

189.       Nous considérons que le fait que la prokuratura agisse à la fois en tant que représentant de l'Etat dans les procédures judiciaires, et en tant que protecteur général de la légalité et défenseur des citoyens contre l'Etat est contraire aux principes de l'Etat de droit.

      Le rôle de la prokuratura dans les procédures pénales

190.       La Fédération de Russie s'est engagée à faire respecter toutes les normes internationales relatives aux droits de l'homme énoncées dans la Convention européenne des droits de l'homme. Un grand nombre de ces normes concernent la protection d'importants droits individuels pendant les enquêtes judiciaires et les procès pénaux, notamment le droit au silence à toutes les étapes de l'enquête judiciaire, le droit de se faire assister par un avocat, le droit à un procès public et d'autres droits garantissant un procès équitable. En matière de droit pénal, le respect de la primauté du droit consiste en la protection de ces droits individuels combinée à la capacité de l'Etat d'exercer efficacement l'action pénale, ce qui incite le public à faire confiance à la justice et sert les intérêts de la société.

191.       Dans cette optique, le fait que la prokuratura soit tout à la fois chargé d'assurer le contrôle général de l'ensemble des organes répressifs, d'enquêter sur les infractions, de protéger les victimes ou les citoyens en général (voir plus haut), de poursuivre les auteurs d'infractions et de faire respecter la légalité dans l'ensemble des procédures judiciaires est un sujet de préoccupation. Il nous a toutefois été assuré qu'en matière pénale tout du moins, les prérogatives de la prokuratura ont été sensiblement réduites afin de satisfaire aux exigences de la Convention européenne des droits de l'homme. Le temps nous dira s'il en est bien ainsi.

192.       Le Code de procédure pénale n'a été adopté que le 18 décembre 2001, soit quatre ans après l'entrée en vigueur du nouveau Code pénal, le 1er janvier 1997. Il était prévu de le mettre en application par étapes entre le 1er juillet 2002 et le 1er janvier 2004. Il a retiré à la prokuratura et aux autres organes d'enquête tels que le FSB (Service fédéral de sécurité) le droit d'arrestation, de perquisition ou de saisie sans ordonnance d'un tribunal. Toute personne arrêtée doit être présentée à un juge dans un délai de 48 heures. Ces modifications devaient originellement entrer en vigueur le 1er janvier 2004 mais, à la suite d'une décision de la Cour constitutionnelle en date du 14 mars 2002108, elles ont été appliquées à compter du 1er juillet 2002. Cette réforme devrait permettre aux autorités de la Fédération de retirer la réserve à la Convention européenne des droits de l'homme formulée à l'égard de l'article 5 sur le droit à la liberté et à la sûreté.

193.       Par ailleurs, le nouveau Code a sensiblement réduit la durée maximale de la détention provisoire, qui est à présent fixée à 12 mois, avec la possibilité d'une prolongation jusqu'à 18 mois pour les infractions les plus graves. Le ministère de la Justice nous a informés que la procédure accusatoire, tendant à transférer au procureur et à la défense la responsabilité de présenter leurs thèses respectives, a remplacé l'ancienne procédure inquisitoire.

194.       Tandis qu'en 2001 les tribunaux ont acquitté 2 608 personnes, ils en ont acquitté 2 758 au cours du second semestre de 2002 et près de 5 000 en 2003. Les évaluations de l'impact du nouveau Code pénal sur ce processus étaient assez divergentes109. Les violations du droit à un procès équitable ont diminué; cependant, de nombreuses voix critiques se sont élevées selon lesquelles le pays était loin d'avoir mis en place une procédure pénale véritablement accusatoire. La presse a rapporté que 9 000 personnes, soit 0,8% des prévenus, avaient été acquittées en 2002, c'est-à-dire deux fois plus que l'année précédente; toutefois, les chiffres tendaient à montrer que les tribunaux étaient lents à appliquer les réformes judiciaires. Un spécialiste des questions juridiques a noté que les juridictions supérieures avaient annulé 40% des jugements d'acquittement rendus par les juridictions inférieures, mais seulement 1,05% des verdicts de culpabilité.

D.       Barreaux

195.       En application de l'Avis N° 193 (1996), § 7 vi, la Russie s'est engagée à protéger par la loi le statut des professions juridiques et à établir une association professionnelle. Avec l'adoption, en mai 2002, de la nouvelle loi sur les barreaux, qui a remplacé la loi de 1979 sur le barreau de l'URSS, le barreau est pour la première fois dans l'histoire de la Russie devenu un organe indépendant et autorégulé. Nous nous félicitons de cette innovation.

196.       En janvier 2003, un Barreau de la Fédération de Russie a été créé et il s'est engagé à concevoir un système assurant la représentation des suspects indigents. Le Barreau fédéral est une organisation qui regroupe les 88 barreaux régionaux (la Tchétchénie n'en a pas) et il y a actuellement en Fédération de Russie 58 000 juristes pouvant exercer les fonctions d'avocat de la défense.

197.       Nous avons été informés que le niveau professionnel des avocats s'était considérablement amélioré depuis la création des commissions d'habilitation qui contrôlent les compétences des candidats au barreau et sont responsables des procédures disciplinaires110. Ces commissions se composent de 13 membres, dont 7 membres du barreau, 2 représentants du ministère de la Justice, 2 membres élus par un organe législatif régional et 2 représentants du pouvoir judiciaire. Le ministère de la Justice, qui délivre un certificat à chaque avocat accepté par la commission, peut contester devant les tribunaux la décision de la commission d'inscrire tel ou tel avocat au barreau. Les sanctions disciplinaires, également prises à la demande du ministère de la Justice, peuvent faire l'objet d'un recours devant les tribunaux, mais l'action en matière disciplinaire ne peut être engagée qu'à l'initiative du barreau, non de la prokuratura ou des tribunaux.

198.       Le Code de procédure pénale et la loi sur le barreau fédéral prévoient la désignation d'un avocat à titre gratuit si un suspect n'a pas les moyens d'en engager un; toutefois, cette disposition était souvent inopérante dans la pratique. Les avocats cherchaient à éviter d'accepter ce genre d'affaires car le gouvernement ne les payait pas toujours. Or, du fait du coût élevé de la représentation par des juristes compétents, les prévenus à faibles revenus ne sont souvent pas représentés. Il n'y a pas d'avocats de la défense dans les régions reculées du pays. Il existe toutefois des centres publics qui dispensent des conseils juridiques à la population. Ce service est généralement assuré à temps partiel par des avocats qui, bien que ne pouvant se permettre d'offrir leurs services à l'audience ou de se charger du dossier, donnent des consultations gratuites sur les droits et les recours prévus par la loi. En matière civile, la nouvelle loi dispose qu'il appartient aux régions de financer des programmes d'aide judiciaire mais les règlements d'application correspondants n'ont pas encore été adoptés.

E.       La réforme pénitentiaire

199.       L'amélioration des conditions de détention conformément à la Recommandation R (87) 3 sur les règles pénitentiaires européennes et, en particulier, l'amélioration des conditions quasi inhumaines régnant dans de nombreux centres de détention provisoire étaient un engagement contracté au moment de l'adhésion (voir Avis N° 193 (1996), § 7 ix). Nous avons le plaisir de signaler que de nouveaux progrès importants ont été réalisés dans ce domaine depuis la Résolution 1277 (2002).

200.       En 1996, lorsque la Fédération de Russie a adhéré au Conseil de l'Europe, plus d'un million de personnes étaient détenues dans le système pénitentiaire de ce pays, ce qui tenait en particulier à la montée en flèche de la criminalité dans les années 90, et les conditions de détention y étaient déplorables. Le surpeuplement atteignait 230% et la situation sanitaire et médicale des détenus était épouvantable. La Russie a ratifié le 5 mai 1998 la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants et le CPT a effectué à ce jour 12 visites en Fédération de Russie.

201.       En novembre 2002, le ministère de la Justice a publié dans sa revue professionnelle111 le rapport du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) sur sa visite (la troisième visite périodique) du 2 au 17 décembre 2001 dans des centres de détention de deux régions de l'extrême Est112 (Khabarovskii kraï et Primorskii kraï), ainsi que dans un certain nombre de postes de la milice (police) de Moscou. Nous considérons que cette publication sera des plus utiles pour aligner, en étroite coopération avec le CPT, les conditions de la détention provisoire sur les prescriptions de la Convention. Nous déplorons toutefois que les autorités de la Fédération n'aient officiellement autorisé la publication de ce rapport que le 30 juin 2003. Nous déplorons également que cette publication soit à ce jour la seule que ces autorités aient accepté d'autoriser.

202.       Comme en 2002, nous invitons les autorités russes a) à appliquer toutes les recommandations faites par le CPT dans ses différents rapports et b) à autoriser la publication113 de tous les rapports sur les visites du CPT dans le pays, y compris les rapports sur la Tchétchénie.

203.       Nous engageons également la Fédération de Russie à ratifier sans plus attendre la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées (Avis N° 193 (1996), § 10 vi). La Convention et son Protocole ont été signés par la Russie le 7 avril 2005. La Fédération de Russie est, excepté Monaco, le seul Etat membre du Conseil de l'Europe à ne pas avoir encore ratifié cette Convention très importante.

      Surpeuplement

204.       Depuis 1998, après son transfert du ministère de l'Intérieur au ministère de la Justice, la Direction générale de l'exécution des peines (GUIN) administre le système pénitentiaire de manière centralisée, depuis Moscou. Les ministères de la Justice, de la Santé, de la Défense et de l'Education gèrent tous des établissements pénitentiaires. Il existe cinq types essentiels de détention dans le système de justice pénale: les centres de rétention temporaire de la police (IVS), les centres de détention provisoire avant jugement dits SIZO (prison préventive), les colonies de rééducation par le travail114 (ITK), les prisons prévues pour ceux qui contreviennent aux règlements des ITK et les colonies d'éducation par le travail (VTK) pour les mineurs. Les hommes et les femmes étaient incarcérés séparément et les mineurs séparés des adultes.

205.       Pendant notre entretien au ministère de la Justice en novembre 2004, nous avons appris que ce nombre avait encore été réduit et s'établissait alors à 769 000115. Au 1er janvier 2005, d'après les commentaires de la délégation de la Fédération, le nombre total des personnes détenues dans le système pénitentiaire a encore diminué: on compte 763 054 détenus, dont 140 503 en détention provisoire et 622 551 condamnés. Parallèlement, dans les SIZO, le nombre des détenus dépasse de 14 000 la capacité normale et, dans 22 régions, les dimensions des SIZO ne correspondent pas aux normes établies116. Les amnisties de masse accordées depuis quelques années avaient offert un répit immédiat. Les autorités ont aussi pris des mesures globales et à long terme visant à réduire l'effectif de la population carcérale, par exemple le recours à des peines de substitution dans certaines régions et la révision du Code pénal et du Code de procédure pénale afin de supprimer les peines d'emprisonnement pour un grand nombre d'infractions peu graves. De nouvelles modifications du Code pénal et des Codes de procédure pénale et d'exécution des peines ont été adoptées en décembre 2003 afin d'améliorer encore, entre autres, les conditions de détention.

206.       Le nouveau Code de procédure pénale, partiellement entré en vigueur le 1er juillet 2002, a lui aussi permis de faire baisser sensiblement le nombre des personnes placées en détention provisoire, car il dispose qu'il appartient uniquement aux tribunaux d'ordonner et de prolonger la détention provisoire et fixe des délais plus stricts en matière d'enquête et de procès (voir articles 109, 162, 255).

207.       Le nombre moyen de personnes placées en détention provisoire chaque mois a ainsi été ramené de 10 000 en 2001 à 3 700 en septembre-octobre 2002. Il s'ensuit que le nombre global de personnes en détention provisoire est tombé de 199 000 en octobre 2001 à 137 000 en octobre 2002 et 131 000 en novembre 2004, ce qui a considérablement réduit le surpeuplement des centres de détention provisoire (SIZO).

208.       Le Programme fédéral de réforme du système pénitentiaire du ministère de la Justice pour 2002-2006, qui a été adopté par décision du gouvernement de la Fédération en date du 29 août 2001, prévoit la construction de nouveaux centres de détention provisoire (SIZO), totalisant 10 130 places, et la rénovation d'un grand nombre de centres existants en vue d'améliorer, notamment, les conditions sanitaires de détention. En 2002, 838 nouvelles places ont été créées dans les SIZO. En 2003, 10 000 places environ ont été créées dans les régions de Moscou, d'Irkoutsk, de Krasnoïarsk et d'autres régions. En 2004, 4 nouveaux SIZO ont été construits et 5 818 nouvelles places créées dans la République de Khakassie la République des Adyguéens et dans les oblasts (régions) de Tioumen et Volgograd.

209.       Les statistiques détaillées les plus récentes117 sur la population carcérale dans les entités («sujets») de la Fédération de Russie font apparaître un surpeuplement moyen des centres de détention provisoire en Russie de seulement 1% par rapport à la capacité d'accueil normale de ces centres. A la suite des mesures ci-dessus, chaque détenu disposait au 1er janvier 2003 de 3,46 m² en moyenne118. Une analyse détaillée par région montre toutefois que les centres de détention provisoire restent plus ou moins surpeuplés dans 34 sujets de la Fédération (contre 57 au début de 2003). Dans 15 d'entre elles, le surpeuplement est inférieur à 20% et dans 16 autres, il oscille entre 20 et 50%. Dans trois régions, les centres de détention provisoire (SIZO) ou établissements équivalents demeurent plus gravement surpeuplés (République de Touva et régions de Tchita et de Kostroma).

210.       Nous sommes là en présence d'un élément très positif et nous félicitons les autorités russes des progrès qu'elles ont accomplis dans ce domaine. Cela dit, beaucoup d'établissements pénitentiaires du pays sont encore à rénover et à moderniser de toute urgence. L'augmentation continue119 des crédits budgétaires alloués à la Division pénitentiaire du ministère de la Justice (le projet de budget pour 2005 prévoit une augmentation d'environ 20% (61 milliards de roubles - 1,7 milliards d'euros) par rapport au budget de 2004 (48,3 milliards de roubles – 1,4 milliards d'euros) devra être maintenue pendant plusieurs années.

      Soins de santé dans les établissements pénitentiaires

211.       La loi fait obligation aux autorités de fournir aux détenus un espace, une alimentation et des soins médicaux adéquats; la diminution spectaculaire de la population carcérale les met en mesure de mieux répondre à ces normes. Cependant, les personnes détenues dans le système pénitentiaire souffrent toujours de l'insuffisance des soins de santé. En 2001, le président Poutine a qualifié le problème des maladies dans le système pénitentiaire de «Tchernobyl» en puissance. Selon le GUIN, il y avait au 1er juillet 2003 environ 77 000 personnes infectées par la tuberculose (soit un détenu sur dix) et 37 000 personnes infectées par le VIH dans les SIZO et les colonies de rééducation par le travail120. Les mesures de santé publique, financées par l'aide internationale et par le doublement des ressources publiques affectées au budget médical du système pénitentiaire, ont permis de faire reculer dans une certaine mesure la propagation de la tuberculose, mais n'ont pas pu enrayer celle de l'infection par le VIH. Les centres de détention ont un taux d'infection par la tuberculose très supérieur à celui de l'ensemble de la population.

212.       En novembre 2004, le ministère de la Justice nous a informés que sur une population carcérale totale de 769 000 personnes, 600 000 étaient malades, dont 120 000 étaient atteintes d'un trouble mental. Cette proportion très élevée peut s'expliquer par la rudesse des conditions de détention, mais aussi par le fait que le niveau général de la santé publique s'est fortement dégradé au cours de la décennie écoulée. Le ministère espère pouvoir, d'ici quelques années, améliorer sensiblement les soins de santé dans les établissements pénitentiaires et, dans l'immédiat, pouvoir en particulier consacrer davantage de crédits au traitement non seulement des maladies infectieuses, mais aussi des maladies psychologiques ou psychiatriques. Selon la Fédération internationale Helsinki pour les droits de l'homme121, il serait extrêmement utile d'intégrer les services médicaux des établissements du ministère de la Justice122 au réseau national de santé, aussi déficient que ce réseau puisse être. Les médecins et autres personnels de santé devraient se voir conférer un statut indépendant et n'être supervisés que par les seules autorités médicales afin de pouvoir s'acquitter dûment de leurs responsabilités de professionnels de la santé.

      Traitement des détenus

213.       Le gouvernement n'a pas publié de statistiques sur le nombre de personnes qui ont été tuées ou sont mortes pendant leur détention, ni sur le nombre d'agents de la force publique ou de gardiens de prison ayant fait l'objet de mesures disciplinaires123. Le Centre moscovite pour la réforme des prisons (PCPR) a estimé qu'il y a quelques années, entre 10 000 et 11 000 détenus mouraient chaque année dans les établissements pénitentiaires, dont 2 500 dans les SIZO. En 2003, ces chiffres auraient été légèrement inférieurs. La plupart des décès s'expliquent par les mauvaises conditions d'hygiène ou le manque de soins de santé. Les mauvais traitements infligés à des détenus par d'autres détenus sont une réalité dans d'autres Etats membres du Conseil de l'Europe, mais ils restent également un problème grave dans la Fédération de Russie. La violence entre détenus, notamment les passages à tabac et le viol, semble très répandue. Il existe des systèmes très élaborés de castes imposés par les détenus, dans lesquels les indicateurs, les homosexuels, les violeurs, les victimes de viol en prison, les bourreaux d'enfants et d'autres étaient considérés comme «intouchables» et étaient très durement traités, sans que les autorités pénitentiaires interviennent vraiment pour les protéger. Enfin, on continue de signaler des cas de maltraitance, de torture ou de traitements inhumains ou dégradants infligés par les forces de l'ordre. Ces faits doivent faire l'objet d'enquêtes approfondies et leurs auteurs être traduits en justice.

214.       La transparence accrue de la gestion des établissements pénitentiaires est un autre motif de satisfaction. Les représentants des médias, y compris les journalistes étrangers, sont à présent autorisés à se rendre dans les prisons ou les colonies. C'est également le cas d'environ 1 500 ONG dans tout le pays, et un Conseil des ONG auprès du ministère de la Justice a même été créé. Fin 2003, la Douma d'Etat a approuvé en première lecture un projet de loi fédérale n° 11807-3 sur «le contrôle public du respect des droits de l'homme dans les lieux de détention et l'aide fournie à ceux-ci par les associations»: il prévoit la création de «commissions publiques d'observation» dans chacune des entités de la Fédération. Les ONG de défense des droits de l'homme peuvent se porter candidates à la participation à ces commissions et leurs candidatures doivent être approuvées par le médiateur fédéral. Les candidats sont toutefois tenus de soumettre leurs plans d'action aux parquets régionaux civils et militaires pour approbation préalable. Cette disposition cause certaines inquiétudes concernant l'indépendance des commissions et nous espérons qu'elle sera modifiée en seconde lecture.

F.       Transfert du centre de détention provisoire de Lefortovo au ministère de la Justice

215.       Le transfert au ministère de la Justice, dès que possible, de la responsabilité de l'administration pénitentiaire et de l'application des peines (voir Avis N° 193 (1996), § 7 x) et la suppression du droit du Service Fédéral de Sécurité de posséder et de gérer des centres de détention préventive (Avis N° 193 (1996), § 10 xvii) étaient des engagements contractés au moment de l'adhésion. Dans la Résolution 1277 (2002), l'Assemblée s'est félicitée du transfert, le 31 décembre 1998, de la responsabilité du système pénitentiaire du ministère de l'Intérieur au ministère de la Justice et elle a préconisé la poursuite de la démilitarisation de l'administration pénitentiaire. Elle a demandé que le centre de détention provisoire de Lefortovo124 soit transféré sans plus attendre du FSB au ministère de la Justice.

216.       Nous devons signaler que l'engagement concernant spécifiquement le centre de détention provisoire de Lefortovo n'a pas encore été honoré. En novembre 2004, lorsque nous avons rencontré, à Moscou, le Directeur adjoint du FSB, M. Ouchakov, on nous a dit que les recommandations de l'Assemblée parlementaire n'étaient pas contraignantes et que, compte tenu des pouvoirs d'investigation accordés au FSB par la législation pertinente, ce dernier avait absolument besoin d'un centre de détention de haute sécurité pour détenir et interroger les suspects. De plus, Lefortovo était le meilleur SIZO du pays: pouvant accueillir environ 200 détenus, il n'hébergeait jamais plus de 50 «pensionnaires» et chaque détenu avait le droit de recevoir chaque mois de l'extérieur 50 kg de nourriture supplémentaire. En fait, les conditions y étaient si bonnes que beaucoup de détenus demandaient à être transférés125 à Lefortovo. On nous a répété à maintes reprises que tous les règlements publiés par le ministère de la Justice étaient respectés à la lettre et que la prokuratura inspectait régulièrement Lefortovo.

217.       Lorsque nous avons demandé pourquoi Lefortovo ne pouvait pas être géré, comme n'importe quel autre SIZO, par le ministère de la Justice, on nous a répondu que le système pénitentiaire normal n'offrait pas, s'agissant de la détention provisoire, des garanties de sécurité suffisantes et qu'il n'était pas à l'abri de la corruption. C'est là un argument que nous jugeons fort peu convaincant et nous demandons à nouveau instamment que soit immédiatement transférée au ministère de la Justice la responsabilité du centre de détention provisoire de Lefortovo et de tous les autres centres de détention encore gérés ou utilisés par le FSB au titre de la loi sur le FSB et de la loi sur la détention des personnes soupçonnées et accusées d'avoir commis des infractions. Nous avons cependant noté avec satisfaction que d'après la Délégation russe, le Président signera dans un avenir proche un décret ordonnant le transfert de Lefortovo au ministère de la Justice.

G.       La révision de la loi sur les services fédéraux de sécurité

218.       Lors de son adhésion au Conseil de l'Europe en 1996, la Fédération de Russie s'est engagée à réviser la loi sur les services fédéraux de sécurité de façon à la mettre en conformité avec les principes et les normes du Conseil de l'Europe dans un délai d'un an à compter de la date de l'adhésion.

219.       Une fois de plus, nous regrettons d'avoir à signaler qu'à ce jour, cet engagement n'a pas été tenu, huit ans après l'adhésion au Conseil de l'Europe.

220.       La loi du 3 avril 1995 sur les organes du Service fédéral de sécurité126 a donné au Président la direction des activités de ce service, qui a rang d'organe exécutif fédéral, et exposé en détail la mission du FSB. Ce dernier a retrouvé un certain nombre des fonctions qui avaient été supprimées dans le cadre des premières réorganisations post-KGB. Le pouvoir d'enquête a été pleinement restauré par la loi, encore que le FSK, l'un de ses prédécesseurs, ait déjà mené des enquêtes judiciaires en vertu d'un décret présidentiel. Les 14 établissements de détention provisoire de la Russie et plusieurs détachements de troupes spéciales ont également été replacés sous le contrôle du service de sécurité. Contrairement à ce qui était indiqué dans le rapport de 2002 de l'Assemblée, le centre de détention provisoire de Lefortovo n'est pas le seul qui soit utilisé: en fait, puisque le FSB est un organe centralisé ayant des départements régionaux, il a également à sa disposition des SIZO dans les régions.

221.       A ce jour, la loi de 1995 n'a été ni abrogée ni sensiblement modifiée: elle dispose toujours que, outre les activités normales d'un service secret127, le FSB exerce des fonctions d'application de la loi qui, dans la plupart des Etats membres, sinon dans tous, sont communément confiées à des départements spécialisés de la police ou du parquet. De fait, le principal problème posé par le FSB n'est pas le fait qu'il soit encore autorisé à gérer un certain nombre de centres de détention provisoire, mais qu'il conserve jusqu'à ce jour certains pouvoirs en matière d'enquête qui portent gravement atteinte aux droits individuels et qu'il ne devrait pas avoir.

222.       L'article 10 de la loi de 1995128, intitulé «lutte contre la criminalité», dispose que les organes du FSB, conformément à la législation de la Fédération de Russie, prennent des mesures d'enquête sur le terrain visant à dépister, prévenir, réprimer et démasquer les activités relevant de l'espionnage, du terrorisme, du crime organisé, de la corruption, du trafic d'armes et de drogue, de la contrebande et d'autres infractions pour lesquelles la loi leur a confié des pouvoirs d'enquête [doznanié] et d'instruction préalable [sledstvié], ainsi qu'en ce qui concerne l'activité de formations armées illégales, des associations de malfaiteurs, de particuliers et d'associations de particuliers dont le but est de modifier par la force l'ordre constitutionnel de la Fédération de Russie. La liste des infractions sur lesquelles le FSB peut enquêter est très longue et il existe un risque grave d'empiétement sur les pouvoirs d'enquête du parquet.

223.       L'article 13 d) de la loi de 1995 autorise le FSB à utiliser les centres de détention conformément à la législation de la Fédération de Russie129. Selon l'article 13 h), la police peut pénétrer dans des résidences privées s'«il existe des raisons suffisantes de supposer qu'une infraction y est ou y a été commise … ou si elle recherche des personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction.» En pareils cas, les lois pertinentes ne font obligation au fonctionnaire de police responsable d'informer le procureur que dans un délai de 24 heures après qu'il a pénétré dans les lieux.

224.       L'article 23 de la loi stipule que le Président, l'Assemblée fédérale (parlement) et les organes judiciaires contrôlent le service de sécurité. Mais le seul droit conféré aux députés de la Douma d'Etat à cet égard est une vague disposition selon laquelle ils pourraient obtenir des informations sur l'activité des organes du FSB conformément aux procédures fixées par la législation. L'imprécision des fonctions de contrôle effectif est aggravée par la disposition de la loi sur la sécurité selon laquelle des «instruments normatifs» non publiés régiraient l'essentiel des activités du FSB. Enfin, l'article 24 de la loi de 1995 dispose que le procureur général de la Fédération de Russie et les procureurs auxquels il confère les pouvoirs correspondants supervisent l'application des lois de la Fédération de Russie par les organes du FSB.

225.       Si rien ne nous autorise à douter que les milliers d'agents travaillant aujourd'hui pour le FSB agissent uniquement dans l'intérêt national et conformément à la loi, respectent pleinement les libertés fondamentales et ne sont pas utilisés comme moyen d'oppression ou de pression indues, comme c'était le cas pour le KGB, il n'en reste pas moins que la structure actuelle du FSB n'est manifestement pas conforme aux normes européennes et, en particulier, à la Recommandation 1402 (1999) de l'Assemblée sur le contrôle des services de sécurité intérieure dans les Etats membres du Conseil de l'Europe. Nous ne croyons pas, contrairement à ce que nous ont dit nos interlocuteurs, que la nécessité de combattre le terrorisme et le crime organisé justifie les pouvoirs très étendus qui sont encore attribués au FSB.

226.       Aussi engageons-nous les autorités russes à honorer sans plus attendre cet engagement non encore tenu en révisant la loi de 1995 sur les services fédéraux de sécurité conformément aux normes du Conseil de l'Europe.

H.        La loi fédérale sur les secrets d'Etat

227.       Nous tenons également à mentionner la loi fédérale de 1993 sur les secrets d'Etat130, qui classe parmi les secrets d'Etat des domaines de la vie militaire dont elle donne une définition assez large. Un décret présidentiel de 1995131 a précisé les informations qui seraient traitées comme un secret d'Etat en application de la loi de 1993. Toutefois, le FSB s'est également autorisé certains décrets secrets ou à effet rétroactif dans le cadre d'un certain nombre d'affaires dont il a saisi les tribunaux ces dernières années, pour l'essentiel en application de l'article 275 du Code pénal, qui sanctionne de peines d'emprisonnement d'une durée maximale de 20 ans l'espionnage, la trahison ou la divulgation de secrets d'Etat. On peut craindre que le droit à un procès équitable soit alors mis à mal, comme l'a relevé la Cour suprême de la Fédération de Russie dès le 17 avril 2000, lorsqu'elle a acquitté Alexandre Nikitine132. Or, en dépit des nombreux projets d'amendement qui ont été présentés à la Douma, la loi fédérale de 1993 sur les secrets d'Etat est toujours en vigueur.

228.       L'article 24 de la loi dispose que les droits des personnes ayant accès aux secrets d'Etat peuvent faire l'objet de restrictions temporaires et qu'en particulier, le droit de voyager à l'étranger peut être limité pendant une période qui doit être précisée dans le contrat d'engagement de l'intéressé. La cessation, avec effet immédiat, des restrictions à la liberté de circulation internationale de personnes ayant connaissance de secrets d'Etat, à l'exception des restrictions généralement admises dans les Etats membres du Conseil de l'Europe, était un engagement contracté au moment de l'adhésion (Avis N° 193 (1996), § 10 xv). Etant donné que la Cour européenne des Droits de l'Homme a récemment déclaré recevable133, sans préjuger du fond, une requête concernant une restriction imposée au déplacement à l'étranger pendant les cinq ans suivant la date d'expiration du contrat de l'intéressé, il semblerait que l'exercice concret du droit de quitter tout pays, y compris le sien, pose encore des problèmes dans la pratique.

229.       La commission interministérielle spéciale chargée de l'examen des requêtes liées aux restrictions du droit des citoyens de quitter la Fédération de Russie traite les plaintes de citoyens qui ont fait l'objet d'une telle restriction. En 2003, il y a eu 235 requêtes, pour 202 en 2002. Dans 40 cas, la commission n'a trouvé aucun motif justifiant la levée des restrictions temporaires au droit de quitter le territoire et ces restrictions ont été maintenues. Au contraire, 193 plaintes ont abouti à la levée par la commission des restrictions temporaires du droit de quitter le territoire et la direction des passeports et visas du ministère de l'Intérieur de la Fédération a en conséquence reçu pour instruction de délivrer aux intéressés des passeports internationaux. En 2004, dans 13 cas, la commission n'a trouvé aucun motif pour une levée des restrictions temporaires au droit de quitter le territoire, tandis que 82 plaintes ont eu une issue positive. La plupart des personnes qui se sont adressées à la commission étaient d'anciens membres des forces armées ou des personnels du ministère de l'ntérieur. Les autres plaintes émanaient de civils, principalement d'anciens cadres moyens et supérieurs d'entreprises du secteur de l'armement ou d'instituts et sociétés du domaine de la recherche scientifique.

I.       La lutte contre la corruption, le blanchiment de l'argent et la traite

      La lutte contre la corruption

230.       Les plus hautes autorités du pays, y compris le président Poutine, ont reconnu que la corruption est l'un des plus graves fléaux de la société russe134. Selon un sondage d'opinion réalisé par Transparency International Russie entre janvier 2002 et janvier 2003, 75% des personnes interrogées considèrent que les forces de l'ordre sont malhonnêtes. Un sondage plus récent, réalisé par la Fondation de l'opinion publique en octobre 2004, a également montré que les deux tiers des personnes interrogées considèrent les juges comme «corrompus et toujours prêts à accepter des pots-de-vin».

231.       Selon une étude réalisée par Transparency International135 pendant l'été de 2002 dans 40 régions, la partie méridionale de la Russie est considérée comme plus corrompue que le nord. La corruption est présentée comme un problème grave dans les régions agricoles dites de la ceinture méridionale – qui s'étend de l'oblast de Rostov à la région de la Volga. En revanche, les régions septentrionales, telles que les oblasts d'Arkhangelsk, de Carélie et de Iaroslavl, sont généralement considérées comme moins corrompues. Cette distinction peut par s'expliquer la disparité de développement et les différences culturelles entre les régions modernes et européanisées de la Russie du Nord et les régions plus traditionnelles de la Russie du Sud; les structures familiales et claniques plus fortes qui prospèrent dans le Caucase peuvent faire le lit de la corruption. La partie orientale de la Russie – tels le Territoire de Khabarovsk et le Territoire maritime (Primorskii kraï) – est considérée comme plus corrompue que l'ouest du pays. Toutefois, la partie occidentale dite région des capitales – Saint-Pétersbourg, Moscou et l'oblast de Moscou – a été évaluée comme l'une des régions les plus corrompues. En troisième lieu, contrairement à ce que l'on pense couramment, le degré de corruption dans les régions riches en ressources naturelles – telles que l'oblast de Tioumen et le Bachkortostan – a été considéré comme inférieur à la moyenne.

232.       Il n'y a rien eu de bien nouveau depuis que le projet de «fondements politiques de la lutte contre la corruption» a été présenté au parlement en juin 2002 ni depuis août 2002, lorsque le président Poutine a signé un décret visant à améliorer l'éthique et l'intégrité de la bureaucratie. En vertu du décret, on attend des fonctionnaires qu'ils respectent la loi, servent efficacement le public, évitent les conflits d'intérêts et demeurent politiquement neutres. Certains observateurs se sont dits sceptiques quant à l'efficacité de cette mesure et ont exigé que des dispositions plus rigoureuses soient prises pour poursuivre les hauts fonctionnaires136 accusés de corruption. Un Conseil présidentiel de lutte contre la corruption a été créé à la fin de 2003, mais il ne s'est encore réuni qu'une fois. Le 21 mai 2004, le Procureur général adjoint a proposé de modifier le Code de procédure pénale afin de simplifier les procédures en vigueur concernant la levée de l'immunité des juges, des parlementaires et autres hauts fonctionnaires. Sa proposition de renverser la charge de la preuve s'agissant de l'origine légale du revenu des intéressés a soulevé une tempête de protestations et, semble-t-il, n'a pas été adoptée.

233.       La corruption, la criminalité organisée et le blanchiment de l'argent font peser une grave menace sur la démocratie et l'Etat de droit, en l'absence desquels le respect des droits fondamentaux ne saurait exister. Les mesures à prendre pour contrer cette menace doivent être globales, s'appuyer sur un engagement politique et une législation bien conçu, et allier répression, prévention et participation du public. Nous nous félicitons de la décision prise en avril 2004 par la Douma d'Etat de créer une commission de lutte contre la corruption, composée de 15 députés et d'un certain nombre d'experts, dont le représentant russe de Transparency International. Cette Commission est chargée d'élaborer un projet de loi globale pour combattre la corruption et examinera également les projets de loi relatifs à d'autres domaines pour recenser les risques éventuels de corruption. Nous engageons vivement la Fédération de Russie à ratifier dès que possible les conventions civile et pénale du Conseil de l'Europe sur la corruption, car la coopération et l'assistance internationales sont des conditions préalables du succès.

      La lutte contre le blanchiment de l'argent

234.       La Russie a ratifié, le 28 mai 2001, la Convention européenne relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime (STE 141) et participe au processus de surveillance du MONEYVAL137.

235.       Les principales infractions économiques et financières qui apportent à leurs auteurs des produits illégaux importants sont les suivantes: l'escroquerie, l'entreprise illicite, le détournement de fonds, le vol, les malversations (y compris la corruption), la contrebande, la contrefaçon, la fraude fiscale et la concussion. Les pertes économiques causées par ces infractions ont été estimées à 51,2 milliards de roubles en 2001 et 33,9 milliards de roubles en 2002. Les infractions relevant de la criminalité organisée (y compris les infractions liées à la drogue), les infractions de corruption et la criminalité financière/économique génèrent la plus grande part des produits du crime et constituent de ce fait la source principale de blanchiment d'argent.

236.       En février 2003, le Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux de l'OCDE a rayé la Russie de sa liste noire après l'entrée en vigueur en janvier 2003 d'une nouvelle loi fédérale destinée à modifier et compléter une loi antérieure contre le blanchiment de l'argent138. Le blanchiment de l'argent est érigé en infraction pénale par l'article 174 du Code pénal et l'auto-blanchiment est sanctionné par l'article 174.1 du Code pénal.

237.       Le deuxième rapport du MONEYVAL sur la Russie (juillet 2004) a constaté que des améliorations très substantielles avaient été apportées au système de lutte contre le blanchiment de l'argent dans la Fédération de Russie. Les principales réalisations sont l'élaboration des textes de loi servant la lutte contre le blanchiment de l'argent avec l'adoption de la loi fédérale n° 115, qui est pleinement opérationnelle, et la mise en place du système d'Etat pour la lutte contre le blanchiment de l'argent avec la Commission russe de surveillance financière (CSF). L'engagement politique d'améliorer le régime de lutte contre le blanchiment de l'argent se manifeste par l'allocation à la CSF de ressources qui permettent de recruter un personnel nombreux, compétent et dévoué et de mettre en place une impressionnante infrastructure de technologies de l'information. La CSF assume un rôle de premier plan s'agissant de développer les moyens de coordination du système, aux niveaux opérationnel et stratégique. Elle développe rapidement les bases de la lutte contre le blanchiment de l'argent mise en place par la Banque centrale de Russie. La Banque centrale reste très active et son action fait d'elle le deuxième des grands acteurs dans ce domaine.

238.       Sur le plan de la répression, on enregistre des enquêtes, des poursuites et des condamnations pour faits de blanchiment. Les enquêtes et les poursuites demeurent concentrées sur les infractions présentées comme relevant de la fraude/escroquerie. Les enquêtes et poursuites concernant les produits du crime générés par des infractions commises dans le cadre du crime organisé et du trafic de drogue ne semblent pas, jusqu'à présent, avoir bénéficié d'un même degré de priorité. La création de la nouvelle Commission publique pour la lutte contre le trafic des drogues et des substances psychotropes remédie dans une certaine mesure à cette situation: elle pourrait devenir un acteur principal et axer la répression sur les aspects financiers des infractions liées à la drogue.

      La lutte contre la traite

239.       La loi interdit la traite des êtres humains mais la traite des femmes et des enfants est un problème de plus en plus grave. On ne dispose pas d'estimations fiables sur l'ampleur du phénomène, mais les observateurs pensaient que la traite, nationale et internationale, était très répandue. On soupçonne la corruption des fonctionnaires de faciliter la traite. Nous avons été informés que, dans la Fédération, la région de Sverdlovsk vient au deuxième rang pour la traite des femmes, de nombreuses agences de «rencontres» y opérant en dehors de tout contrôle des pouvoirs publics.

240.       On signale que l'augmentation de la traite est liée à la mauvaise situation socio-économique qui affecte la plus grande partie de la population de la Fédération. Dans la plupart des familles monoparentales, le chef de famille est une femme, qui est à la fois davantage tributaire, pour subvenir aux besoins de sa famille, d'un revenu tiré d'un emploi et moins sûre d'en trouver un qu'à l'époque de l'Etat providence soviétique. Selon le ministère du Travail, 70% des chômeurs inscrits étaient des femmes. Les services de police indiquaient qu'au moins la moitié des femmes victimes de la traite étaient au chômage. Les ONG ont signalé que beaucoup de femmes avaient désespérément besoin de revenus supplémentaires. Les enfants courent également un plus grand risque d'être victimes de la traite.

241.       En décembre 2003, des modifications du Code pénal ont criminalisé la traite des êtres humains et l'utilisation du travail forcé et alourdi la responsabilité pénale en cas de recrutement de personnes aux fins de prostitution, de proxénétisme et de diffusion de pornographie mettant en scène des enfants. En vertu de ces articles, si certaines circonstances aggravantes sont établies, la traite et l'exploitation du travail servile sont l'une et l'autre punissables d'une peine d'emprisonnement d'une durée maximale de 15 ans; le recrutement aux fins de prostitution, d'une peine d'une durée maximale de 8 ans; l'organisation d'un réseau de proxénétisme, d'une peine d'une durée maximale de 10 ans; enfin, la fabrication et la diffusion de pornographie mettant en scène des enfants, d'une peine d'une durée maximale de 8 ans. Ces modifications du Code pénal ont été l'aboutissement d'une année d'efforts des législateurs, des militants de la lutte contre la traite et de responsables du gouvernement et des forces de l'ordre, menés afin de faire adopter une législation efficace contre la traite, dont nous nous félicitons.

242.       Fin 2003, un projet de loi «sur le statut des victimes de la traite» était en cours d'examen par la Douma. Il visait à introduire un ensemble de mesures destinées à protéger les victimes de la traite, y compris la mise en place de refuges et de centres d'assistance. Il devait par ailleurs prescrire la coopération entre les services gouvernementaux et les ONG luttant contre la traite et définir des procédures de réinsertion sociale des victimes.

243.       Le gouvernement n'a jusqu'à présent financé aucun programme officiel de protection et d'assistance en faveur des victimes. Cependant, un projet de loi plus général sur la protection des victimes et des témoins, visant la mise en place d'une série de mesures de protection, a été adopté en juillet 2004 et est entré en vigueur le 1er janvier 2005. La loi sur la protection de l'Etat pour les victimes, les témoins et les autres personnes participant aux procédures pénales s'applique à toutes les affaires pénales dans lesquelles la vie ou la sécurité physique d'une personne est menacée; cette loi vise à aider les organes de répression à enquêter sur les infractions et à poursuivre leurs auteurs. En vertu de l'article 28 de la loi, il est prévu que le gouvernement, afin d'organiser cette protection, adopte un programme visant à garantir la sécurité des victimes, des témoins et des autres personnes participant aux procédures pénales.

244.       Le Comité ad hoc sur la lutte contre la traite des êtres humains travaille actuellement à l'élaboration de la Convention européenne du Conseil de l'Europe sur cette question. On attend de cette convention qu'elle offre un instrument concret au service de la coopération internationale, axé sur la protection des droits des victimes et le respect des droits de l'homme. Elle cherchera à réaliser un équilibre satisfaisant entre les droits de l'homme et l'action pénale. La rédaction définitive de cette Convention n'est pas encore terminée, mais nous espérons que les autorités de la Fédération seront en mesure de tirer profit des débats auxquels elle donne lieu pour arrêter le texte définitif des projets de loi actuellement devant la Douma.

245.       Par ailleurs, nous avons été informés de l'existence de graves lacunes dans la législation concernant l'adoption internationale: selon le Procureur général adjoint Kolesnikov, entre 2001 et 2003, le taux d'adoption d'enfants russes par des étrangers a augmenté de 51%. Prenant la parole lors d'une audition tenue par la Douma le 15 novembre 2004, il a déclaré que l'adoption illégale est un grave problème et qu'elle est devenue un commerce très lucratif: l'adoption d'un enfant en Russie coûte jusqu'à 50 000 dollars américains. La ratification de la Convention européenne en matière d'adoption des enfants (STE n° 58) aiderait assurément à améliorer la situation. Les ambassadeurs des pays membres du Conseil de l'Europe que nous avons rencontrés à Moscou en novembre ont également mentionné l'existence de problèmes croissants en ce qui concerne l'exécution des décisions en matière de garde des enfants. Nous notons à ce propos que la Russie n'a pas signé ni ratifié la Convention européenne sur la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de garde des enfants et le rétablissement de la garde des enfants (STE n° 105).

VIII.       DROITS DE L'HOMME

246.       Le médiateur fédéral, M. Loukine, dans son premier rapport annuel présenté en mars 2005, jugeait la situation de la Russie en matière de droits de l'homme et de liberté «peu satisfaisante». D'après ce rapport, les principaux droits de l'homme – le droit à la vie et l'intégrité de la personne – ne sont pas garantis dans les faits. Les atteintes aux droits des réfugiés et des personnes déplacées n'ont pas cessé, le nombre des violations des droits des citoyens par la police et les autres organes répressifs est en augmentation, le système pénitentiaire connaît toujours une situation difficile, les droits des conscrits font l'objet d'atteintes systématiques et l'on constate des manifestations cas d'extrémisme et de xénophobie. La tendance à la restriction de l'activité des médias fédéraux et, surtout, régionaux persiste. Les pratiques d'intimidation des journalistes ne sont pas rares139.

A.       Affaires russes portées devant la Cour européenne des Droits de l'Homme

247.       La Convention est entrée en vigueur pour la Russie le 5 mai 1998. A l'époque de la rédaction de notre dernier rapport, en mars 2002, la Cour n'avait encore rendu aucun arrêt concernant la Fédération de Russie. En mai 2002, la Cour a rendu son premier arrêt contre la Russie dans l'affaire Burdov, concernant la non-exécution d'une décision définitive d'une juridiction interne et, le 15 juillet 2002, elle a conclu à la violation, entre autres, de l'article 3 de la Convention (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) dans l'affaire Kalachnikov concernant les conditions de détention dans une cellule surpeuplée et l'absence de soins de santé adéquats.

248.       A la mi-avril 2005, 44 arrêts au total avaient été rendus, dont 42 concluant à l'existence de violations140. Pour la seule période de janvier à avril 2005, la Cour a rendu 22 arrêts dans des affaires impliquant la Russie. En octobre 2004, la Cour avait reçu un peu plus de 19 000 requêtes141 contre la Russie. Plus de 250 requêtes ont été transmises au Gouvernement de la Fédération et la Cour a déclaré plus de 60 requêtes recevables. Depuis janvier 2002, la Russie est le deuxième pays (après la Pologne) pour le nombre des requêtes nouvellement introduites. Sur le plan géographique, les requêtes proviennent de l'ensemble de la Fédération, et non pas seulement des grandes villes.

249.       En décembre 2002, six requêtes relatives à des violations des droits de l'homme en Tchétchénie ont été déclarées recevables par la Cour. En février 2005, la Cour a conclu à une violation par la Russie du droit à la vie et de l'interdiction de la torture, ainsi que du droit à un recours effectif et au respect des biens142.

250.       D'autres requêtes recevables concernent des questions liées à des procédures pénales et à la détention pendant la procédure pénale, la non-exécution de jugements rendus contre l'Etat, la liberté de la presse ou l'enregistrement des partis politiques. L'affaire recevable Fadeïeva et al. c. Russie, à propos de laquelle une audience s'est tenue en juillet 2004, concerne des questions de grave pollution de l'environnement et le droit des requérants au transfert de leur lieu de résidence en application d'une décision judiciaire. L'affaire a été déclarée recevable sur la base des articles 6 et 8 de la Convention.

251.       Jusqu'à présent, plus de 150 requêtes ont été transmises au Gouvernement de la Fédération pour observations écrites. Le groupe le plus important – plus de 50% – concerne des cas de non-exécution de décisions judiciaires définitives par des organes de l'Etat ou des cas où les actes de ces organes ont contribué à la violation. Parmi les requêtes transmises, trente environ ont trait à différents aspects de la procédure pénale et à la détention dans des centres de détention provisoire et des établissements pénitentiaires après condamnation. Un certain nombre de requêtes ont trait aux conditions de détention et aux mauvais traitements infligés par des membres des organes répressifs. Certaines requêtes concernent la durée de la détention provisoire et celle de la procédure pénale. D'autres encore se fondent sur l'article 6 concernant l'égalité des moyens et le procès équitable. Plusieurs requêtes soulèvent des questions liées à l'absence, lors de l'audience de cassation, du requérant ou de son avocat, alors que le procureur était présent. Dans un autre cas, le requérant se plaint de l'absence d'avocat depuis les premières heures de la détention et de l'interrogatoire. Dans un cas, une provocation policière a servi à obtenir la condamnation d'un pourvoyeur de drogue.

252.       Plusieurs affaires ont été transmises dans le sillage de l'arrêt Brumarescu c. Roumanie, dans lesquelles les requérants se plaignent de ce que les décisions définitives rendues en leur faveur ont été annulée dans la cadre de la procédure dite de recours en supervision («nadzor»). Cette procédure, utilisée dans le système juridique russe en matière pénale comme en matière civile, soulève des questions au regard du principe de sécurité juridique. Il y a aussi des requêtes liées à la longueur de la procédure civile et à l'accès à un recours en cas de durée excessive.

253.       Un certain nombre d'affaires transmises concernent des violations des articles 10 et 11. Elles ont été introduites par des partis politiques, des organisations religieuses et des syndicats, et ont trait à la procédure d'enregistrement de ces entités et à l'implication de l'Etat. Un nombre important de requêtes relevant de l'article 10 concernent la liberté de la presse et les actions en justice intentées en guise de sanction par des fonctionnaires contre des journalistes pour des jugements de valeur.

254.       Toutefois, la majorité des requêtes introduites contre la Russie ont, jusqu'à présent, été déclarées irrecevable. Beaucoup d'affaires étaient irrecevables ratione temporis, car elles concernent des événements qui se sont produits avant le 5 mai 1998, date à laquelle la Russie a ratifié la Convention européenne des droits de l'homme. Un grand nombre de requêtes sont irrecevables parce qu'elles sont présentées après expiration du délai de six mois. La Russie applique un système de contrôle de légalité («nadzor») qui permet aux juges de rang élevé, sur leur initiative ou sur celle du procureur, par le biais d'un recours en supervision, de rouvrir une procédure devant des juridictions supérieures alors qu'un jugement définitif a déjà été rendu. La législation interne a modifié ce système en matière pénale et civile, mais la Cour a, dans ses décisions, réitéré sa position antérieure selon laquelle les changements apportés n'ont pas été suffisants pour que ce système puisse être considéré comme un recours effectif et donc être pris en compte dans le calcul du délai de six mois.

255.       Un grand nombre de requêtes portent sur des questions sociales et économiques: modicité des pensions et prestations, dépôts dans des banques ou autres institutions financières ayant fait faillite ou qui n'étaient pas indexés du fait de l'inflation, problèmes de logement, etc.

256.       Etant donné que les arrêts de la Cour ont force obligatoire (article 46 de la Convention), il est vraisemblable que les décisions rendues sur des requêtes individuelles entraîneront pour la Russie l'obligation d'adopter des mesures législatives ou autres afin de remédier aux carences constatées par la Cour. Dans le présent rapport et, en particulier, dans le chapitre consacré aux droits de l'homme, nous nous appuierons donc, le cas échéant, sur les conclusions de la Cour européenne des Droits de l'Homme.

257.       Nous notons avec satisfaction que l'importance du respect de la Convention européenne a été soulignée par la Cour suprême en session plénière le 10 octobre 2003 dans une décision concernant l'application par les juridictions ordinaires des principes et normes du droit international et des traités

internationaux conclus par la Fédération de Russie. Cette décision rappelle que la Convention, telle qu'elle est interprétée à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne, fait partie intégrante de l'ordre juridique national et que ses dispositions priment toute autre disposition législative.

258.       Les conclusions de la Cour européenne des Droits de l'Homme dans l'affaire Shamaïev et 12 autres c. Géorgie et Russie sont donc pour nous un sujet de vive préoccupation. Cet arrêt rendu le 12 avril 2005 et non encore définitif143, concernait l'extradition de plusieurs rebelles tchétchènes présumés de Géorgie vers la Fédération de Russie. Pour ce qui concerne les requêtes introduites contre la Russie, la Cour a conclu à une violation de l'article 38 § 1 (a) de la Convention (obligation de fournir toutes les facilités nécessaires à un examen contradictoire de l'affaire) du fait de l'absence de coopération des autorités russes, qui ont refusé que soit organisée une visite d'information, malgré les demandes répétées de la Cour, interdisant ainsi l'accès aux requérants détenus en Russie. Selon la Cour, ce comportement a constitué une entrave inacceptable à l'établissement d'une partie des faits dans cette affaire. La Cour a aussi considéré que la Fédération de Russie violait l'article 34 (obligation de ne pas entraver l'exercice efficace du droit de requête individuelle) concernant les cinq requérants extradés vers la Russie le 4 octobre 2002 et les deux requérants arrêtés par les autorités de la Fédération le 19 février 2004. L'absence de coopération de la part des autorités russes, si cet arrêt devenait définitif ou était confirmé par la grande Chambre, ferait inévitablement planer de sérieux doutes sur la volonté de la Fédération de Russie de respecter de bonne foi les engagements pris lors de la ratification de la Convention européenne des droits de l'homme.

259.        Enfin, au vu de l'augmentation constante de la charge de travail de la Cour européenne des Droits de l'Homme et afin de contribuer à améliorer l'efficacité à long terme du système de contrôle de la Convention, nous appelons les autorités de la Fédération à prendre toutes les mesures nécessaires pour signer et ratifier le Protocole n° 14 à la Convention aussi rapidement que possible, comme le recommandait la Déclaration du Comité des Ministres «Assurer l'efficacité de la mise en œuvre de la Convention européenne des Droits de l'Homme aux niveaux national et européen144». Cette signature et cette ratification contribueraient notamment à diminuer le nombre élevé des requêtes en instance devant la Cour pour lesquelles la Fédération de Russie est l'Etat défendeur et à accélérer le traitement des nouvelles requêtes.

B.        Le droit à la vie et la lutte contre l'impunité

260.        L'Assemblée a régulièrement condamné les violations flagrantes des droits de l'homme, les violations du droit international humanitaire et les crimes de guerre commis en Tchétchénie par les deux parties au conflit. Dès le tout début du premier conflit en Tchétchénie, en 1994, l'Assemblée a demandé que les auteurs de ces actes soient traduits en justice – sans grand succès. Il s'ensuit un climat d'impunité qui est propice à de nouvelles violations des droits de l'homme et représente un déni de justice pour les milliers de victimes; l'amertume de la population est telle que la République tchétchène pourrait devenir véritablement ingouvernable. Si l'on veut qu'un processus politique positif s'amorce dans cette république, il faut que les atteintes aux droits de l'homme cessent et que les personnes responsables d'exactions soient déférées à la justice145.

261.        Dans sa Résolution 1403 (2004)146, l'Assemblée a condamné fermement les innombrables violations des droits de l'homme telles que les meurtres, les disparitions forcées, les actes de torture, les prises d'otages, les viols et les détentions arbitraires, perpétrées par les membres des différentes forces de sécurité fédérales et tchétchènes prorusses au cours de leurs opérations «spéciales» ou «ciblées» en République tchétchène et, de plus en plus, dans les régions voisines147. Les événements survenus à Blagovechtchensk illustrent bien la propagation du climat d'impunité dans d'autres régions

(même non limitrophes de la Tchétchénie). Selon l'organisation Memorial, dont les activités de suivi ne couvrent qu'un tiers environ du territoire de la république, 396 personnes ont été enlevées en 2004, dont 24 ont ensuite été retrouvées mortes et 175 portées disparues148.

262.        Le remplacement, du côté des forces fédérales, des grandes opérations de «ratissage» par des «opérations ciblées» de moindre envergure a été qualifié de faux progrès. Si ces opérations affectent moins de personnes, elles sont perçues comme des opérations de type «escadrons de la mort» quasi-légalisées. Qui plus est, du fait du nombre nettement plus faible de témoins potentiels, il est plus dangereux pour les familles des victimes de porter plainte, car les informateurs peuvent beaucoup plus facilement être identifiés et faire l'objet de représailles149.

263.       Le 24 février 2005, la Cour européenne des Droits de l'Homme a conclu dans trois arrêts150 à la violation du droit à la vie, de l'interdiction de la torture et du droit à un recours effectif et au respect des biens (articles 2, 3 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et article 1er du Premier Protocole à la CEDH) dans les six affaires concernant la République tchétchène. Dans l'affaire Khachiev et Akaïeva c. Russie, la Cour européenne a conclu que le décès des membres des familles des requérants qui avaient été tués par des militaires était imputable à l'Etat, et constituait une violation du droit à la vie (article 2). Dans son arrêt sur l'affaire Issaïeva, Youssoupova et Bazaïeva c. Russie et dans l'arrêt distinct concernant la sixième affaire, Issaïeva c. Russie, la Cour européenne a conclu que les autorités russes n'avaient pas protégé le droit à la vie des requérants et de leur famille lors de la planification et de l'exécution des opérations militaires. Dans les six affaires, la Cour a accordé une indemnisation aux requérants. Au total, plus de 150 requêtes individuelles en provenance de Tchétchénie ont été présentées à la Cour. Elles soulèvent également la question de la non-disponibilité de voies de recours interne effectives car il n'existe en Tchétchénie aucun tribunal ni aucune autre institution civile chargée de l'application de la loi en état de fonctionner.

264.       Il faut rappeler que la Fédération de Russie n'a pas prévu de dérogation au sens de l'article 15 de la Convention, qui prévoit une telle possibilité «en cas de guerre ou en cas d'autre danger public menaçant la vie de la nation» et qu'en tout état de cause, même dans le cas où elle l'aurait fait, le § 2 de l'article 15 stipule que cette disposition «n'autorise aucune dérogation à l'article 2 et aux articles 3, 4 (§ 1) et 7». En d'autres termes, mis à part l'article 5 au sujet duquel la Russie a formulé une réserve, toutes les dispositions de la Convention sont pleinement applicables en Tchétchénie.

265.       Nous sommes gravement préoccupés par les informations selon lesquelles un certain nombre de requérants tchétchènes qui avaient saisi la Cour européenne des Droits de l'Homme ont fait l'objet de représailles. Celles-ci sont allées des brimades aux menaces et, dans quelques cas, les requérants ou des membres de leur famille ont été tués. Il apparaît que les victimes tchétchènes de violations des droits de l'homme n'ont, en Fédération de Russie, qu'un accès des plus limités à la justice, mais que leur vie est en outre mise en danger lorsqu'elles tentent d'obtenir justice par le biais des mécanismes internationaux151.

266.       Une nouvelle pratique effrayante est par ailleurs apparue avec la prise en otage de membres de la famille de personnes soupçonnées de terrorisme afin de les forcer à se rendre en menaçant de torturer ou de tuer leurs parents. Ces méthodes sont des actes criminels totalement inacceptables auxquels les autorités fédérales et tchétchènes doivent mettre un terme. A cet égard, nous avons appris avec stupéfaction que, dans la déclaration qu'il a faite en novembre 2004 pendant une audition de la Douma d'Etat, le Procureur général de la Fédération de Russie, M. Oustinov, a estimé que la prise d'otages pouvait être une mesure de lutte contre le terrorisme152. Les ONG russes s'occupant des droits de l'homme ont exigé du Président qu'il révoque le Procureur général pour sa proposition qui contrevient à un certain nombre d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme.

267.       Nous espérons que cette déclaration du Procureur général n'a aucun lien avec l'enlèvement en décembre 2004 de huit membres de la famille d'Aslan Maskhadov, dont les responsables seraient des membres des forces contrôlées par le premier Vice-Premier ministre tchétchène Ramzan Kadyrov (forces appelées les «kadyrovtsi»).

268.       Nous avons par ailleurs appris avec inquiétude que des militants des droits de l'homme en Ingouchie ont fait l'objet d'une série d'agressions. Les recherches menées par Amnesty International dans le Caucase du Nord à ce sujet lui ont permis de constater que les défenseurs et militants des droits de l'homme qui expriment leur opinion sur la situation dans la région, qui enquêtent sur ces violations ou encore qui ont essayé d'obtenir réparation auprès de la Cour européenne des Droits de l'Homme sont eux-mêmes de plus en plus souvent victimes de graves violations des droits de l'homme. Certains ont été tués ou sont portés disparus, d'autres ont été soumis à la torture, y compris au viol. De nombreux autres ont été l'objet de mauvais traitements, de brimades et de menaces153.

269.       Nous constatons par conséquent que la situation des droits de l'homme en Tchétchénie n'a, à ce jour, pas progressé et que la Russie n'a pas fait respecter le principe de la prééminence du droit et n'a pas reconnu le principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction en Tchétchénie doit jouir des droits de l'homme et des libertés fondamentales, comme le prescrit l'article 3 du Statut du Conseil de l'Europe. La Fédération de Russie n'a toujours pas tenu son engagement spécifique de traduire en justice les responsables avérés de violations des droits de l'homme en relation avec les événements de Tchétchénie (Avis N° 193 (1996), § 7.vii.) et de respecter strictement les dispositions du droit international humanitaire, y compris en cas de conflits armés sur son territoire (§ 10.xxiv.).

270.       En conséquence, nous engageons vivement les autorités de la Fédération à faire cesser le climat d'impunité qui règne en Tchétchénie, à mener des enquêtes impartiales et approfondies sur toutes les violations des droits de l'homme qu'auraient commises les troupes fédérales et/ou les forces de l'ordre tchétchènes et à mettre un terme à la pratique de l'intimidation et du harcèlement des militants des droits de l'homme œuvrant dans la région.

Autres affaires

271.       Un certain nombre d'agents de l'Etat ont été assassinés à travers le pays. Certains de ces assassinats ont pu avoir un mobile politique, en relation soit avec le conflit en cours en Tchétchénie, soit avec la vie politique. Un député de la Douma bien connu et coprésident du parti Russie libérale, Sergueï Youchenkov, a été abattu le 17 avril 2003. M. Youchenkov avait critiqué ouvertement la politique menée par le président Poutine dans un certain nombre de domaines et il était un des candidats à la direction de son propre parti. La première audience du procès de l'affaire Youchenkov s'est tenue le 26 décembre. En mars 2004, un jury du tribunal municipal de Moscou a déclaré Mikhaïl Kodanev et trois de ses associés coupables d'avoir organisé l'assassinat. M. Kodanev est l'ancien dirigeant du parti Russie libérale et un partisan de Boris Berezovski, adversaire du président Poutine.

272.       Youri Chtchekotchikhine, membre de la Douma et rédacteur en chef de la Novaïa Gazeta, est mort en juillet 2003 dans des circonstances mystérieuses (sa mort serait due à une «réaction allergique aiguë»). Il était connu depuis longtemps pour sa pratique du journalisme d'enquête qui l'avait amené en particulier à démasquer la corruption au Conseil municipal de Moscou, au ministère de la Défense, au parquet général et parmi les forces militaires russes en Tchétchénie. A l'époque de sa mort, il avait commencé, avec M. Youchenkov, à enquêter sur les accusations selon lesquelles le FSB aurait été responsable d'une série de plastiquages d'immeubles en 1999154. Selon les commentaires de la délégation de la Fédération, le centre fédéral de médecine légale, qui dépend du ministère de la Justice, n'a constaté aucun élément indiquant que le décès avait été causé par des violences ou par un empoisonnement chimique. Le parquet de la ville de Moscou a par conséquent refusé, en août 2003, d'engager une procédure pénale. Le Parquet général a confirmé cette décision.

273.       Nikolaï Guirenko – éminent défenseur des droits de l'homme, professeur d'ethnologie et spécialiste du racisme et de la discrimination dans la Fédération de Russie – a été abattu le 19 juin 2004 à son domicile de Saint-Pétersbourg. Il était bien connu et très estimé pour ses travaux et ses recherches sur le racisme et la discrimination en Fédération de Russie. Il dirigeait la Commission sur les droits des minorités de l'Union scientifique de Saint-Pétersbourg et avait réalisé pour le compte des autorités de Moscou et de Saint-Pétersbourg plusieurs études sur les groupes néo-nazis et de skinheads de la Fédération de Russie. Il avait, à maintes reprises, attiré l'attention sur la montée en puissance de ces groupes. Il avait participé en tant qu'expert à un certain nombre d'enquêtes et d'affaires judiciaires très médiatisées concernant des agressions qui auraient eu un mobile raciste et il était considéré comme le meilleur spécialiste de la question dans la Fédération de Russie155. Quelques jours après l'assassinat, plusieurs groupes extrémistes ont affirmé sur leur site Internet en être les auteurs. Nous déplorons que l'enquête sur cet assassinat n'ait pas vraiment progressé et nous demandons aux autorités russes de diligenter une enquête approfondie et rapide et de traduire les auteurs de cet acte en justice.

C.        Abolition de la peine de mort

274.       Conformément à l'Avis N° 193 (1996), § 10.ii, la Russie s'est engagée à signer dans l'année et ratifier dans les trois ans suivant son adhésion le Protocole n° 6 à la Convention européenne des Droits de l'Homme concernant l'abolition de la peine de mort en temps de paix et à mettre en place un moratoire sur les exécutions prenant effet le jour de l'adhésion. A ce jour, cet engagement fondamental n'est toujours pas respecté pour ce qui concerne la ratification du Protocole n° 6.

275.       A la suite du décret présidentiel en date du 16 mai 1996, sur la réduction, étape par étape, de l'application de la peine de mort en liaison avec l'entrée de la Fédération de Russie au Conseil de l'Europe, le moratoire officiel sur l'exécution des peines de mort, décrété par le président Eltsine le 2 août 1996, est respecté. Le 16 avril 1997, la Russie a signé le Protocole nº 6 qui, en vertu du Traité

de Vienne, a valeur d'obligation juridique. Le 6 août 1999, le Président a soumis un projet de loi de ratification à la Douma d'Etat. Cependant, à la date du présent rapport, ce projet n'a pas été adopté, même en première lecture.

276.       Le 2 février 1999, la Cour constitutionnelle a jugé que les tribunaux ne peuvent pas prononcer une peine de mort tant que le système du jury n'est pas mis en place dans l'ensemble du pays. Une loi de décembre 2001 sur l'application du Code de procédure pénale de la Fédération de Russie (tel que modifié en 2002) prévoit l'introduction progressive des tribunaux avec jury dans le pays à compter du 1er juillet 2002 (dans 9 entités), du 1er janvier 2003 (60 entités), du 1er juillet 2003 (13 entités), du 1er janvier 2004 (5 entités) et du 1er janvier 2007 dans la République tchétchène. Ainsi, même si le moratoire de 1996 était levé, la décision de la Cour constitutionnelle de 1999 empêcherait les condamnations à la peine capitale au moins jusqu'en 2007156.

277.       L'Assemblée, dans sa Résolution 1277 (2002), tout en reconnaissant que le moratoire officiel applicable aux exécutions, instauré par le président Eltsine le 2 août 1996, est respecté, a néanmoins appelé instamment les autorités russes à abolir la peine de mort de jure et à conclure la procédure de ratification du Protocole n° 6 à la Convention européenne des Droits de l'Homme. Tant que la peine de mort n'est pas exclue en droit, l'absence d'exécution des peines de mort dépendra totalement de l'existence d'une volonté politique de maintenir le moratoire de fait appliqué dans le pays depuis 1996.

278.       Nous tenons à rappeler aux autorités russes que l'abolition de la peine de mort est une décision qui exige du courage de la part des responsables politiques, mais qu'elle est aussi l'une des valeurs sociétales fondamentales au sujet desquelles les responsables politiques doivent montrer la voie et non pas se laisser guider par le dernier sondage d'opinion. Il n'est pas question d'ignorer les préoccupations véritables de la population, mais il faut avoir le courage de reconnaître que la peine de mort n'est pas une panacée pour réduire la délinquance, améliorer le moral de la population ou assurer la justice. Le respect des droits de l'homme ne doit jamais être subordonné aux caprices de l'opinion publique. La torture, par exemple, ne sera jamais tolérable, même si l'opinion publique devait être favorable à son usage dans certains cas. Dans une société démocratique, il incombe aux responsables politiques et aux personnalités publiques de guider l'opinion publique et non pas de la suivre ou de s'en faire un écran; il leur appartient de prendre une décision qui s'impose quand les droits de l'homme fondamentaux sont en cause157.

279.       Le délai fixé par l'Assemblée pour la ratification du Protocole n° 6 a expiré depuis 1999 et la Russie est à ce jour le seul pays européen à ne pas avoir aboli la peine de mort de jure158. Etant donné la majorité absolue dont disposent les forces pro-présidentielles au Parlement, du moins depuis décembre 2003, il semble que la raison de ce retard soit l'absence de volonté politique de remplir cet engagement majeur encore en suspens.

280.       Nous aimerions rappeler aux autorités de la Fédération que l'Assemblée a toujours affirmé avec la plus grande force que la ratification du Protocole n° 6 est de la plus haute importance pour tous les Etats membres du Conseil de l'Europe et que les Etats qui refusent de le ratifier ou retardent exagérément la ratification en violation des engagements formels pris lors de l'adhésion devront supporter les conséquences de ce comportement. Les délégations ukrainienne159 et arménienne160 auprès de l'Assemblée parlementaire ont été exposées, respectivement en 1999 et 2002, à une

annulation de leurs pouvoirs et, dans le cas de l'Ukraine, à une recommandation au Comité des Ministres de la suspendre de son droit de représentation, conformément à l'article 8 du Statut du Conseil de l'Europe.

281.       Au vu de ces précédents, nous invitons instamment les autorités russes à tirer avantage de la majorité absolue dont elles disposent au parlement et à ratifier le Protocole nº 6 sans plus tarder et au plus tard d'ici à décembre 2005.

D.        Torture et traitements inhumains ou dégradants

282.       Nous accueillons avec satisfaction les modifications du Code pénal de la Fédération de Russie, intervenues en décembre 2003, qui introduisent la définition de la «torture» dans la législation pénale161. Nous espérons qu'il en résultera une augmentation du nombre des personnes poursuivies pour faits de torture (article 117 du Code pénal) et non pas pour abus de pouvoir (article 286) ou pour exercice de la contrainte afin d'obtenir un témoignage (article 302) car ces deux derniers chefs de poursuites entraînent des peines moins sévères.

283.       Le 10 juillet 2003, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants a publié une déclaration (CPT/Inf (2003) 33) dans laquelle il a constaté qu'«il y a, de la part des membres des forces de l'ordre et des forces fédérales opérant en République tchétchène, un recours continu à la torture et à d'autres formes de mauvais traitements» et que «les mesures prises pour déférer à la justice les responsables de tels faits sont lentes et se révèlent finalement – dans nombre de cas – inefficaces». Les dénonciations de mauvais traitements reçues par le CPT concernaient les institutions de caractère répressif (départements des affaires intérieures et certains établissements du Service fédéral de sécurité) sur l'ensemble du territoire de la République tchétchène; elles portaient sur des lieux de détention officiels et non officiels. Le CPT, au cours de ses visites dans la République tchétchène de 2002 et 2003, a recueilli une quantité considérable d'informations qui indiquent que des violations des droits de l'homme ont été commises lors d'opérations spéciales et d'autres activités ciblées menées par les organes du pouvoir fédéral, comportant le mauvais traitement des personnes détenues et des cas de disparition forcée.

284.       Plus récemment, en octobre 2004, la Fédération internationale Helsinki pour les droits de l'homme a publié son rapport sur les établissements de détention de la Fédération de Russie162. La délégation de la FIH a observé des conditions de détention variables, de satisfaisantes à inhumaines, dans les établissements qui relèvent du ministère de la Justice. Elle a félicité l'administration pénitentiaire de Moscou de ses efforts pour améliorer les conditions de détention dans les établissements de détention provisoire des mineurs et des femmes. Ces efforts ont abouti à une amélioration sensible au cours des trois dernières années. La délégation a constaté également que la législation et les pratiques du pays avaient besoin de réformes profondes pour atteindre un niveau qui soit pleinement conforme aux normes internationales en matière de traitement des détenus. Elle a considéré que les conditions de détention des détenus condamnés à la prison à vie équivalaient à un traitement inhumain.

285.       Les ONG russes de défense des droits de l'homme et les médias font état de nombreux cas de torture et de mauvais traitements infligés par les forces de l'ordre russes. Ils mentionnent notamment l'usage de violences physiques et psychologiques au cours de l'arrestation, de la détention et de l'interrogatoire des suspects163. Tout récemment, le Comité pour les droits de l'homme basé à Moscou a publié un rapport contenant une liste de plus de 500 dénonciations de brutalités policières dans la seule région de Moscou au cours des deux dernières années164.

286.       L'une des causes de la pratique répandue des tortures et des mauvais traitements par les forces de l'ordre semble être le besoin de produire de «bonnes» statistiques de lutte contre la délinquance. Pour cette raison, les agents des services de police et des autres forces de l'ordre font couramment usage de la violence pour obtenir des aveux ou des informations sur les complices, etc. Ces abus sont la conséquence du système d'évaluation des activités des forces de l'ordre et de leurs agents, fondé sur les données quantitatives de la proportion des infractions élucidées par rapport à celles qui sont enregistrées165. Une autre cause est la mauvaise connaissance du droit et le niveau d'instruction insuffisant des personnels.

287.       Selon les ONG de défense des droits de l'homme166, les mauvais traitements par la police sont aggravés par la déficience du mécanisme de contrôle, interne et externe. Le service de la Sécurité intérieure, créé en 1995 au sein du ministère de l'Intérieur, manque de personnel et de ressources. De plus, il relève de l'autorité des mêmes officiers supérieurs que la police et son personnel est majoritairement recruté parmi les fonctionnaires de police.

288.       Par ailleurs, le parquet, pourtant responsable de la supervision des forces de l'ordre, ne semble pas pour diverses raisons agir efficacement dans les cas de torture et de mauvais traitements. Les enquêtes sur les plaintes pour mauvais traitements sont confiées à la prokuratura du district dans lequel les faits dénoncés ont été commis. Or, en général, les procureurs et les fonctionnaires de police d'un district donné coopèrent étroitement dans le cadre des enquêtes sur la délinquance et établissent ainsi des relations professionnelles et personnelles étroites qui nuisent à l'impartialité des procureurs. De plus, les parquets locaux manquent souvent des ressources techniques et humaines nécessaires pour enquêter sur toutes les plaintes, notamment sur les cas de torture. C'est pourquoi les procureurs délèguent souvent les enquêtes sur ces affaires aux services de la police locale où les mauvais traitements ont été signalés.

      Rafles policières de Blagovechtchensk

289.       Nous sommes extrêmement préoccupés par les événements violents qui se sont déroulés à Blagovechtchensk (Bachkortostan) du 10 au 14 décembre 2004. Pas moins de mille personnes - principalement des hommes âgés de 14 à 30 ans – ont été arrêtées par la police; beaucoup ont été battues et il a aussi été fait état de tortures et de viols. La majorité des plus de 400 personnes qui se sont présentées à l'hôpital local souffraient de graves ecchymoses et beaucoup présentaient des commotions cérébrales ou des fractures. Selon la version officielle, la raison de cette opération de grande envergure est un attentat qui aurait été commis contre des fonctionnaires du ministère de l'Intérieur quelques jours avant les rafles. Sept hauts responsables de la police locale ont fait l'objet d'un blâme, et le directeur adjoint de la police locale, ainsi que les membres de l'unité des forces spéciales (OMON) ayant participé aux rafles, ont été rétrogradés. Par la suite, six officiers de police de rang subalterne ont été accusés d'«abus de pouvoir en relation avec l'usage de la force». Le médiateur fédéral et les militants des droits de l'homme ont demandé la révocation du ministre Bachkir de l'Intérieur qui a personnellement donné l'ordre de déployer l'unité de l'OMON dans la ville.

290.       Nous partageons l'inquiétude que la sous-commission des droits de l'homme de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme a exprimée dans sa déclaration du 27 janvier 2005 où elle dénonce les événements survenus dans la ville de Blagovechtchensk entre le 10 et le 14 décembre 2004, qu'elle qualifie d'«exemple terrifiant de la propagation du climat d'impunité qui sévit en République tchétchène vers d'autres régions de la Fédération de Russie». Cette conclusion tient à ce que les rafles ont été menées, outre la participation de la police locale, par un détachement des Forces spéciales (OMON) venu de la ville de Oufa et qui était précédemment stationné en Tchétchénie.

291.       Nous invitons donc instamment les autorités de la Fédération à faire en sorte que des enquêtes impartiales et complètes soient menées sans retard sur tous les cas présumés de tortures et que les agents responsables soient poursuivis et punis (en particulier pour ce qui concerne les événements de Blagovechtchensk); les autorités russes sont également fortement encouragées à améliorer le contrôle des forces de l'ordre.

292.       Nous souhaitons également réitérer notre appel tendant à ce que la Fédération de Russie autorise la publication de tous les rapports sur les visites faites dans le pays par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants et à ce que toutes les mesures nécessaires soient prises pour donner effet aux recommandations du CPT.

E.        Violence à l'égard des femmes

293.       En décembre 2004, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences a présenté sa déclaration sur les résultats de sa visite en Russie167. Tout en se félicitant de la ratification récente par ce pays du Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, le Rapporteur spécial note que la violence – en particulier domestique – reste chaque année une cause de blessures et de décès pour des milliers de femmes. En raison du système d'enregistrement (propiska) et d'un manque de moyens financiers, de nombreuses femmes sont contraintes de partager un logement avec un partenaire violent, même après que le divorce a été déclaré officiellement. La situation est encore aggravée par le nombre insuffisant de structures d'accueil. Les violences contre les femmes et les discriminations sexuelles restent des domaines négligés de l'action des pouvoirs publics. Les projets de lois sur les violences domestiques présentés à la Douma d'Etat en 1996 et 1999 n'ont pas été adoptés. La commission sur les femmes, qui était chargée d'intégrer l'égalité entre les hommes et les femmes dans les politiques et programmes de l'Etat, a été supprimée en 2004. Actuellement, un service du ministère de la Santé et du Développement social est le seul organe de la Fédération à traiter des problèmes de discrimination fondée sur le sexe168.

294.       Nous appelons par conséquent les autorités russes à traiter les problèmes exposés dans les rapports et à adopter une législation spécifique sur la violence domestique. Nous les encourageons aussi fortement à prendre en considération les recommandations formulées à ce sujet par le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe dans son rapport d'avril 2005 sur la Russie (paragraphes 482-488).

F.        Le bizutage dans l'armée

295.       Lors de son adhésion au Conseil de l'Europe, la Russie s'est engagée à réduire, sinon à éliminer, les cas de mauvais traitements et les décès parmi les forces armées en dehors des conflits militaires (Avis N° 193 (1996), par. 10.xix).

296.       Les mauvais traitements infligés aux jeunes conscrits (parfois appelés «dedovchtchina», c'est-à-dire «bizutage»169) posent toujours un grand problème de droits de l'homme. Dans un rapport récent170 publié en octobre 2004, l'organisation Human Rights Watch déclare que des dizaines de conscrits trouvent la mort chaque année à la suite de tels abus et que des milliers subissent des préjudices graves et souvent permanents pour leur santé physique et mentale. Des centaines de conscrits se suicident ou tentent de se suicider et des milliers désertent leur unité.

297.       Bien que le droit international fasse obligation aux autorités russes d'appliquer des mesures immédiates pour mettre fin à ces abus, les mesures qui s'imposent n'ont toujours pas été prises. Au lieu d'adopter publiquement une position claire contre ces abus, les responsables politiques passent pour une large part le problème sous silence dans leurs nombreuses déclarations au sujet de la réforme de l'armée. Les autorités n'ont toujours pas adopté de stratégie claire et complète pour lutter contre les abus. Au lieu de procéder à un examen approfondi des raisons pour lesquelles les conscrits de première année s'enfuient de leurs unités, les dirigeants militaires menacent habituellement les déserteurs de poursuites pour abandon non autorisé de leurs bases. Le commandement et la prokuratura militaire, au lieu d'enquêter sur les incidents qui leur sont signalés, protègent les auteurs et les soustraient à la justice. La position du gouvernement est d'autant plus incompréhensible que la pratique de la «dedovchtchina» nuit très clairement à l'efficacité des forces militaires de la Fédération.

298.       La «dedovchtchina» existe dans les unités militaires dans toute la Fédération de Russie. Elle crée une hiérarchie parallèle parmi les conscrits, suivant leur durée de service, et un ensemble correspondant de droits et obligations pour chaque groupe de la hiérarchie. Les conscrits de deuxième année, appelés «dedy» (ce qui signifie littéralement «grands-pères», le singulier étant «ded»), exercent un pouvoir quasiment illimité à l'égard de leurs camarades moins anciens. Si, autrefois, la pratique de la «dedovchtchina» a pu servir comme une sorte d'initiation, elle a dégénéré dans les vingt dernières années en un système dans lequel les conscrits de deuxième année, ayant eux-mêmes été victimes d'abus et de privations, jouissent d'un pouvoir sans limite de faire violence à leurs camarades plus jeunes, en dehors de toute règle, restriction ou crainte d'être punis. Il en résulte non pas un renforcement de l'esprit de corps mais une situation de non-droit et de violations graves des droits de l'homme.

299.       Les récits d'horreur à propos de la «dedovchtchina» poussent chaque année des milliers de parents à tenter d'éviter que leurs fils soient appelés par l'armée. Comme les familles les plus aisées sont celles qui y parviennent le mieux171, les forces armées recrutent de plus en plus parmi les catégories défavorisées de la population et de nombreuses recrues souffrent de malnutrition, de mauvaise santé, d'alcoolisme ou de toxicomanie ou encore d'autres maux sociaux, avant même de commencer leur service. De plus, comme il est indiqué plus haut, des milliers de jeunes gens appelés chaque année s'enfuient de leur unité et des centaines se suicident.

300.       Le ministère de la Défense de la Fédération de Russie a déclaré, dans sa réponse au rapport de HRW sur le bizutage, que «les mesures prises ces dernières années par les organes de commandement militaire, les chefs d'unité à tous les niveaux et les cadres responsables de la gestion du personnel renforcent la tendance à une diminution régulière du nombre des infractions et des accidents dans les unités militaires. La même constatation s'applique sans réserve au problème des violations des règles de service dans les relations entre militaires. D'après les statistiques du ministère, depuis plusieurs années, le taux de délinquance parmi les forces armées est de deux à deux fois et demie moins élevé que le niveau général de la Fédération. En 2002, 2003 et 2004, aucun cas de «dedovchtchina» ne s'est produit dans 90% des unités et aucune violation d'aucune sorte n'a eu lieu dans 80% des unités. Le fait que le «hooliganisme» dans les casernes n'est pas un phénomène massif est également confirmé par les observations des défenseurs des droits de Human Rights Watch qui, en trois ans de recherche, n'ont rencontré que 100 victimes de la «dedovchtchina», dont les déclarations servent de base au rapport»172.

301.       Le Premier procureur militaire, M. Alexandre Savenkov, a indiqué que 25 conscrits sont décédés des suites de violences en rapport avec le bizutage durant le premier semestre de 2004. Au total, 109 militaires se sont suicidés durant cette période, ce qui représente une augmentation de 38% par rapport à la même période l'année précédente. M. Savenkov a déclaré que 60 de ces conscrits «avaient été menés au suicide» du fait du bizutage. Les statistiques officielles pour les six premiers mois de 2004 mentionnaient en conséquence 85 décès dans les forces armées en dehors des conflits militaires173. Dans la mesure où ces statistiques rendent compte uniquement des affaires portées devant les tribunaux, l'ampleur véritable du problème est réellement inquiétante. Cependant, le ministère de la Défense nous a fait observer que le taux de suicide pour 100 000 habitants en Russie est nettement inférieur à celui de certains pays européens.

302.       La prokuratura militaire, chargée d'examiner les plaintes des soldats et d'enquêter sur les abus dans les forces armées, a indiqué également que 3 200 militaires, dont 400 officiers, ont été reconnus coupables de faits de bizutage («relations non prévues par la loi») au cours des neufs premiers mois de 2004. Durant la même période, environ 3 000 militaires ont été soumis au bizutage et 31 sont décédés. En 2003, un total de 3 400 militaires, dont 500 officiers, ont été déclarés coupables de faits de bizutage; 4 500 militaires ont été reconnus victimes de tels faits («relations non prévues par la loi») et 38 sont décédés174.

303.       Le ministère de la Défense et la prokuratura affirment que l'augmentation du nombre des cas de mauvais traitements signalés est due au progrès de la transparence dans le traitement des violations commises au sein de l'armée. Selon les autorités, il est résulté de cette transparence une baisse sensible de la «délinquance latente» dans les rangs de l'armée. Parmi les mesures prises pour lutter contre les mauvais traitements dans l'armée, les responsables du ministère de la Défense citent le passage progressif au recrutement de volontaires sur une base contractuelle, la réduction de la durée du service militaire à un an (au lieu d'un an et demi) et les campagnes d'information et de sensibilisation.

304.       Le Comité des mères de soldats de la région de Sverdlovsk a signalé que le nombre des cas de mauvais traitements ne diminue pas et qu'en conséquence, la désertion reste fréquente. Toutefois, une meilleure coopération a été établie avec les services du procureur militaire et les commandants des unités militaires (par exemple, des fonctions spéciales de commandant adjoint, chargé de l'action éducative, ont été créées pour coopérer avec les organisations non gouvernementales et traiter les cas de mauvais traitements). Le ministère de la Défense a également décidé que les conscrits qui désertent ne doivent pas être réintégrés dans l'unité d'où ils se sont enfuis, car ils risquent d'y être exposés au harcèlement.

305.       En avril 2005, le ministre de la Défense Serguei Ivanov a promis de punir les coupables, y compris les officiers supérieurs, après que douze conscrits se soient enfuis de la base navale de Lomonosov et aient porté plainte pour bizutage alléguant avoir été battus par des marins plus anciens dès leur arrivée.

306.       L'une des causes de ce phénomène largement répandu tient à la procédure appliquée aux affaires de mauvais traitements une fois qu'une plainte a été déposée. Il apparaît qu'une telle plainte (sauf en cas de meurtre), quelle que soit la personne qui la dépose, fait d'abord l'objet d'une enquête menée par le commandant de l'unité militaire concernée, lequel a tout intérêt à passer les faits sous silence. Il est évident que cette procédure a une incidence sur le nombre des cas portés à l'attention du procureur militaire.

307.       Les ONG de défense des droits de l'homme indiquent également que les mauvais traitements des conscrits commencent dès le moment où les nouvelles recrues sont stationnées dans les «centres de conscription» en attendant leur affectation dans une unité militaire. Les mauvaises conditions qui existent dans ces centres (locaux mal chauffées, nourriture insuffisante) n'ont guère retenu l'attention jusqu'à présent. Il en va de même des conditions de transport des conscrits jusqu'à

leur unité d'affectation. En décembre 2003, à la suite du transport des conscrits vers la ville de Magadan, en Sibérie extrême-orientale, près d'une centaine d'individus ont contracté une pneumonie et un conscrit est mort de froid175.

308.       Nous partageons la conclusion de HRW qui considère que le gouvernement de la Fédération ne peut pas attendre la création d'une armée de métier pour lutter efficacement contre les abus liés au mauvais traitement des conscrits et que rien ne l'oblige à attendre ainsi. Nous ne pouvons que renouveler l'appel lancé aux autorités russes pour qu'elles prennent sans retard toutes les mesures effectives propres à remédier correctement à ce problème endémique et à réduire notablement le nombre des cas de mauvais traitements.

309.       Constatant avec satisfaction que le phénomène du bizutage dans les armées est désormais davantage mis au jour, nous estimons néanmoins que ce problème doit trouver une solution au niveau fédéral et que son règlement doit être l'une des priorités de la réforme des armées. Il importe que les plus hautes autorités de l'Etat fassent savoir clairement et sans retard que cette pratique est inacceptable et que le gouvernement fera tout son possible pour l'éliminer. Une politique de tolérance 'zéro' à l'égard de ces formes de violence doit être mise en place, comportant des programmes d'éducation destinés aux officiers, un renforcement des mécanismes de contrôle, le renvoi en justice des individus responsables de tels abus, etc.

310.        La même démarche devrait s'appliquer aussi à la pratique du «louage de conscrits» à des institutions privées moyennant une rémunération versée aux officiers commandant les unités militaires (voir ci-dessous).

G.        Le travail forcé

311.       Nous avons trouvé décourageant d'apprendre l'existence du travail forcé dans l'armée de la Fédération. Les ONG de défense des droits de l'homme emploient même le mot «esclavage» pour décrire une pratique qui semble être largement répandue (des centaines de cas ont été mentionnés). Les commandants ou officiers des unités militaires «louent» des conscrits à des entreprises privées de types divers ou utilisent cette main-d'œuvre pour la construction de leurs propres habitations. Le Comité des mères de soldats soutient que ces violations devraient être reconnues et poursuivies en vertu de l'article 127.2 du Code pénal de la Fédération de Russie, «Recours à l'esclavage»176. Selon le Comité, à Khabarovsk, un officier qui a dénoncé cette forme de travail forcé a été limogé et interné dans un hôpital psychiatrique; à Volgograd, des officiers ont filmé la manière dont les conscrits sont soustraits à leur unité pour être affectés à des travaux civils.

312.       Les représentants du ministère de la Défense ont nié le caractère généralisé de tels abus, reconnaissant qu'un cas unique avait été signalé, dans la ville de Samara, et avait fait l'objet d'une enquête en bonne et due forme. Nous partageons l'indignation que le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe a exprimée dans son rapport récent sur la Russie au sujet de cet «esclavage des temps modernes».

H.       La détention arbitraire ou illégale

313.        Le Code de procédure pénale prévoit que la police ne peut détenir une personne plus de 24 heures avant que le dossier soit communiqué au procureur qui dispose, à son tour, de 24 heures pour ouvrir une enquête pénale ou clore le dossier. A ce moment, le procureur doit décider s'il demande au tribunal de prononcer la détention provisoire de l'intéressé. La loi exclut la détention provisoire dans le cas des infractions punies d'une peine inférieure à trois ans de prison, sauf s'il existe un risque démontrable que le prévenu prenne la fuite. La détention pendant la durée du procès est limitée à 6 mois, sauf en cas d'infraction particulièrement grave. Le Code de procédure pénale précise que, dans les deux mois qui suivent l'arrestation d'un suspect, la police doit avoir terminé son enquête et transmis le dossier au procureur en vue de la mise en jugement de l'intéressé.

314.        Une personne détenue avant janvier 2002 pouvait passer jusqu'à trois ans dans un SIZO, en attente de jugement. Aujourd'hui, la détention provisoire est limitée à six mois dans la plupart des cas. La prokuratura ne peut solliciter la prolongation de la détention pendant six mois supplémentaires que dans le cas d'un petit nombre d'infractions graves et d'enquêtes complexes; avec l'approbation personnelle du procureur général, elle peut demander au tribunal une prolongation portant la détention provisoire à une durée maximale de 18 mois. Durant les six premiers mois d'application des nouvelles règles, aucune prolongation jusqu'à 18 mois n'a été demandée et la plupart des affaires ont été renvoyées devant les tribunaux dans les six mois prévus. Selon le président Lebedev, de janvier à mai 2003, les tribunaux ont reçu 37 000 demandes de prolongation de la détention provisoire et 35 000 ont été accordées. Ces procédures ont dans l'ensemble été respectées; il reste encore, cependant, des juges et des régions qui ne leur donnent, semble-t-il, pas pleinement application. D'après les renseignements que nous avons reçus en novembre 2004, les tribunaux ont examiné, en 2004, un total de 630 000 affaires impliquant la mise en détention, dont 150 000 concernant des demandes de mise en liberté conditionnelle.

315.       La plupart des cas de détention arbitraire ou illégale signalés récemment étaient liés au climat d'impunité qui persiste en Tchétchénie et dans les territoires adjacents et aux droits des minorités nationales (voir les passages pertinents du présent rapport).

316.        Dans une autre affaire (Goussinski c. Russie), la Cour a conclu à une violation de l'article 5 de la Convention, au motif que la détention du requérant n'était pas «licite» car il était exonéré des poursuites pénales en vertu de la loi d'amnistie. La Cour a jugé également que la détention de M. Goussinski constituait un abus de pouvoir et que, par le biais de la détention, les autorités cherchaient à le forcer à vendre son entreprise de médias à Gazprom à des conditions défavorables. La Cour a donc jugé qu'il y avait eu violation de l'article 18 de la Convention combiné à l'article 5177.

317.        A ce propos, nous renvoyons à la Résolution 1418 (2005) de l'Assemblée, selon laquelle les circonstances entourant l'arrestation et l'inculpation des hauts dirigeants de Ioukos suggèrent fortement que nous sommes en présence d'un cas manifeste de non conformité au droit et que ces personnes ont été arbitrairement prises pour cible par les autorités, en violation du principe de l'égalité devant la loi.

318.        Nous relevons également que dans son arrêt d'octobre 2003 sur l'affaire Rakevitch c. Russie, la Cour européenne des Droits de l'Homme a conclu à une violation de l'article 5 § 1 (la demande d'une décision d'internement psychiatrique a été examinée par un tribunal de district après l'expiration du délai fixé par la loi); la Cour a aussi conclu à la violation de l'article 5 § 4 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales au motif que la loi fédérale sur le traitement psychiatrique et les garanties des droits civils connexes n'accorde pas à la requérante un droit direct de contester devant un juge la légalité de son placement forcé dans un hôpital psychiatrique.

319.        Nous invitons instamment les autorités russes à réformer la législation pertinente (le Code de procédure civile et la loi fédérale sur le traitement psychiatrique et les garanties des droits civils connexes) afin d'assurer sa conformité avec l'article 5 de la Convention et avec la Recommandation Rec(2004)10 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe aux Etats membres relative à la protection des droits de l'homme et de la dignité des personnes atteintes de troubles mentaux. Nous apprenons avec satisfaction que, dans le cadre du contrôle de l'exécution de l'arrêt Rakevitch, un premier projet de loi a déjà été rédigé.

I.       Procès équitable et accès à la justice

      Procès équitable en matière pénale

320.        Il est probablement trop tôt pour évaluer si les modifications récemment apportées au Code de procédure pénale ont permis de résoudre tous les problèmes liés au droit à un procès équitable en matière pénale, particulièrement en ce qui concerne le rôle de la prokuratura et le principe de l'égalité des armes énoncé à l'article 6 de la Convention.

321.        Nous notons cependant avec satisfaction qu'en juin 2003 le Code de procédure pénale a été modifié de nouveau pour permettre aux «témoins» d'être accompagnés de leur propre avocat lors des interrogatoires de police. Cet amendement visait à remédier à la pratique des services de police qui interrogent les personnes soupçonnées hors de la présence d'un avocat sous prétexte qu'il s'agit de témoins, pour déclarer ensuite, lorsqu'ils ont obtenu des déclarations compromettantes, que les intéressés sont mis en examen. Cette évolution est positive.

322.        En outre, le Code de procédure pénale limite désormais la durée de la détention sans accès à un avocat ou aux membres de la famille et répute inutilisables devant la justice les déclarations faites en l'absence d'un avocat. D'après certaines indications, cependant, l'efficacité de ces réformes serait affaiblie par la pratique qui consiste pour les services de police à s'assurer la présence d'un avocat «bien disposé» lors des interrogatoires et par l'ignorance générale des dispositions nouvelles parmi les avocats. Malgré les dispositions du code, les tribunaux restent peu enclins à exclure les éléments de preuve susceptibles d'avoir été obtenus par la contrainte.

323.        Dans l'ensemble, les tribunaux ont prononcé la mise en liberté des suspects dont les aveux avaient été recueillis hors de la présence d'un avocat ou détenus au-delà des délais fixés. La Cour suprême a annulé un certain nombre de décisions dans lesquelles les juges des juridictions inférieures avaient accordé l'autorisation de détenir des individus pour des motifs que la Cour suprême a jugés insuffisants.

      L'affaire Ioukos

324.        L'affaire de la compagnie pétrolière Ioukos – naguère la plus importante du pays – et de ses directeurs est un tournant dans le développement de l'Etat de droit en Russie. Les procès intentés contre M. Khodorkovski, M. Lebedev et M. Pichouguine soulèvent de graves inquiétudes quant à leur équité. Dans sa Résolution 1418 (2005), l'Assemblée a relevé les anomalies suivantes: des retards dans l'obtention de l'autorisation du procureur ont empêché les avocats d'entrer en contact avec leurs clients, l'accès à la salle d'audience a été refusé aux défenseurs de M. Lebedev lors de l'audience au cours de laquelle son placement en détention provisoire a été décidé, perquisition et saisie de documents opérées dans les bureaux des avocats de la défense, convocation des avocats à un interrogatoire concernant les affaires de leurs clients et allégation de mise sur écoute des avocats de la défense, restrictions injustifiées de la publicité de certaines procédures judiciaires, refus de libération sous caution, etc.

325.        Nous regrettons qu'il n'ait pas été tenu compte de la Résolution de l'Assemblée et que de nouvelles allégations de violations de la légalité soient signalées. En particulier, nous sommes troublés d'apprendre que la directrice adjointe du service juridique de Ioukos, Mme Svietlana Bakhmina, qui a été arrêtée en décembre 2004, est toujours en détention provisoire178.

326.        Conformément à la législation en vigueur, le procureur et certains magistrats, dont le Présidium de la Cour suprême, peuvent introduire un recours en supervision (пересмотр в порядке судебного надзора) visant toute décision définitive et exécutoire rendue par un tribunal, pour des motifs de fond ou de forme. Dans l'affaire Ryabykh c. Russie, la Cour européenne des Droits de l'Homme a jugé, le 24 juillet 2003, qu'un système judiciaire qui comporte le risque que des décisions de justice définitives et exécutoires soient infirmées à plusieurs reprises179 par une juridiction de rang supérieur sur recours exercé par un agent de l'Etat est incompatible en soi aussi bien avec le principe de la sécurité juridique qu'avec les droits garantis par l'article 6 § 1 de la Convention. Le principe de la sécurité juridique exige notamment que, lorsque les tribunaux se sont prononcés définitivement sur une question, leur décision ne puisse être remise en cause.

327.        A la suite de l'entrée en vigueur du nouveau Code de procédure civile, le 1er février 2003, nous constatons avec satisfaction que le délai d'exercice du recours en supervision180 dans les affaires civiles est limité à un an (article 376) et que la liste des agents de l'Etat habilités à exercer ce recours est sensiblement réduite (article 377). Ces changements montrent clairement que les autorités russes s'efforcent sérieusement d'aligner le droit et la pratique internes sur les normes de la Convention. D'autres mesures s'imposent, cependant, pour prévenir de nouvelles violations du même ordre. En effet, un nombre relativement élevé d'agents de l'Etat peuvent encore solliciter l'annulation de décisions de justice définitives en invoquant ce qui semble être essentiellement les mêmes motifs très largement définis181 qu'auparavant, c'est-à-dire en cas «de violation majeure de la loi».

328.        Quant aux réformes supplémentaires qui s'imposent, elles doivent tendre à renforcer la capacité du système judiciaire de rendre une justice de qualité dans le cadre de la procédure ordinaire afin d'éviter la nécessité d'utiliser des recours extraordinaires pour parvenir à ce résultat. Les réformes pourraient aussi viser à renforcer la capacité de la Cour suprême et des cours d'appel de garantir une application correcte et uniforme de la loi.

329.        Dans le domaine de la justice pénale, la situation s'est améliorée avec l'entrée en vigueur du nouveau Code de procédure pénale. D'après le chapitre 48 du Code, le procureur peut introduire un recours en supervision et l'accusé (suspect, condamné, acquitté) ou la victime – une demande en supervision concernant une décision de justice définitive sans aucun délai et sur des motifs excessivement ouverts. Cependant, l'article 405 garantit maintenant que la situation de la personne condamnée ne peut être aggravée en conséquence de ce nouvel examen182.

330.        Parallèlement au recours en supervision, le Code envisage la possibilité de rouvrir une procédure en raison de faits nouveaux ou nouvellement connus dans un délai d'un an pour les affaires où un acquittement a été prononcé et pour les affaires classées (il n'y a pas de délai si la procédure est rouverte au bénéfice du condamné). Cette dernière procédure est globalement conforme à l'article 4 du Protocole n° 7 à la CEDH et à la Recommandation N° R (2000) 2 du Comité des Ministres sur le réexamen ou la réouverture de certaines affaires au niveau interne suite à des arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme.

      Durée de la procédure

331.        Dans de nombreux Etats membres du Conseil de l'Europe183, la durée excessive de la procédure est l'un des principaux griefs portés devant la Cour. La Fédération de Russie ne fait pas exception: plusieurs arrêts ont déjà constaté que la Russie ne respectait pas l'article 6 § 1 de la Convention à cet égard184, notamment parce qu'en vertu de la législation en vigueur, les décisions définitives pouvaient être infirmées à plusieurs reprises par le biais du recours en supervision (voir plus haut).

      Exécution des décisions de justice

332.        Un autre problème majeur que les autorités de la Fédération devront régler concerne l'absence d'exécution des décisions judiciaires internes, qui était en cause, notamment, dans les affaires Bourdov (mai 2002) et Timofeïev (23 octobre 2004). La Cour a rappelé, dans l'arrêt Timofeïev, que «l'article 6 § 1 garantit à chacun le droit de porter devant un tribunal toute cause concernant ses droits et obligations civils. Cependant, ce droit serait illusoire si le système juridique interne d'un Etat contractant permettait qu'une décision judiciaire définitive et exécutoire reste sans effet au préjudice d'une partie. Il serait inconcevable que l'article 6 § 1 décrive en détail des garanties de procédure accordées aux parties sans protéger l'exécution des décisions judiciaires; l'exécution d'un jugement rendu par un tribunal doit donc être considérée comme faisant partie intégrante du «procès» aux fins de l'article 6».

J.        Liberté de circulation et de résidence, migration et nationalité

333.        L'un des engagements pris par la Russie au moment de son adhésion était de garantir l'exercice effectif des droits énoncés à l'article 27 de la Constitution185 et dans la loi sur la liberté de circulation et de choix du lieu de résidence (Avis N° 193 (1996), § 7.viii.). L'Assemblée, dans sa Résolution 1277 (2002), tout en notant que les autorités fédérales russes avaient fait des progrès notables dans la voie de l'abolition des derniers éléments de l'ancien système de la propiska (permis de résidence), regrettait que des conditions d'enregistrement restrictives continuent d'être appliquées, souvent de manière discriminatoire, à l'encontre des minorités ethniques. C'est pourquoi l'Assemblée réitérait la demande faite dans la Recommandation 1544 (2001) dans laquelle elle exhortait les Etats membres concernés «à procéder à la révision de l'intégralité de la législation et des politiques nationales en vue de supprimer toute disposition de nature à entraver la libre circulation et le libre choix du lieu de résidence à l'intérieur des frontières nationales». Dans sa Recommandation 1667 (2004)186, l'Assemblée a aussi noté que bien que le système de la propiska ait été officiellement aboli, on en trouve encore des vestiges dans les réglementations et les pratiques administratives, ce qui est une source de difficultés superflues pour la population déplacée.

334.        La loi fédérale sur la liberté de circulation et de résidence dans la Fédération de Russie pour les ressortissants de la Fédération a été adoptée en 1993. Elle prévoit l'obligation de déclarer son lieu de résidence et de séjour et l'obligation de vivre ou de séjourner au lieu d'enregistrement. Son application fait l'objet d'un contrôle administratif (de police) de l'enregistrement de la résidence.

335.       La loi de 1993 sur la liberté de circulation dispose que l'enregistrement ou l'absence d'enregistrement ne peut pas servir de motif pour restreindre l'application des droits et libertés des citoyens ni pour la soumettre à des conditions. Cependant, cette disposition est parfois tournée dans la pratique car le système d'enregistrement a des liens étroits avec les autres registres publics: impôts, service militaire, archives de police, etc. De plus, pour obtenir un passeport interne, une personne doit fournir la preuve de son enregistrement.

336.        Les détails de la procédure d'enregistrement sont fixés dans les règlements approuvés par le gouvernement187. Les citoyens arrivant pour un séjour temporaire (plus de dix jours) dans un lieu qui n'est pas leur lieu habituel de résidence sont tenus de se faire enregistrer dans les trois jours qui suivent leur arrivée188. Ils doivent présenter un document constituant la justification juridique de leur séjour temporaire à cet endroit (bail ou déclaration du propriétaire de l'habitation). Des règles similaires s'appliquent en cas de changement du lieu de résidence.

337.        Nous constatons avec satisfaction qu'en août 2004 ces réglementations ont été modifiées et que les dispositions qui prévoyaient la possibilité de refuser l'enregistrement ont été abolies. Toutefois, le règlement n'indique toujours pas clairement que la procédure d'enregistrement a le caractère d'une notification et non pas celui de l'octroi d'une autorisation. Nous invitons donc instamment les autorités russes à garantir que l'absence d'enregistrement ne restreint pas la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels.

338.        Le médiateur fédéral, M. Loukine, a déclaré dans son rapport annuel de 2004 qu'il y a encore des atteintes au droit des citoyens de changer de lieu de résidence à l'intérieur du pays. La nouvelle procédure d'enregistrement par simple notification est en grande partie une modification de pure forme et elle n'a entraîné dans la pratique aucune amélioration sensible de la situation. Le médiateur continue de recevoir des plaintes pour des abus commis par les forces de l'ordre, en particulier des amendes pour séjour sans enregistrement. Il y a également un risque élevé de corruption dans ce domaine. Dans certaines entités de la Fédération, telles que la ville de Moscou, la législation fédérale n'est pas appliquée correctement lors du traitement des plaintes relatives à l'enregistrement; parfois, la législation régionale et locale est en contradiction avec la législation fédérale.

339.        Dans son récent rapport sur la Russie, le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe note que le système de la propiska, qui est un vestige de l'époque soviétique, a été remplacé par une nouvelle formalité – l'enregistrement – qui lui est, dans la pratique, quasiment identique. Il mentionne aussi les informations indiquant que la procédure d'enregistrement serait liée à un degré élevé de corruption parmi les forces de police.

340.        Si nous nous félicitons du fait que les autorités reconnaissent que la loi fédérale sur la liberté de circulation doit être mise en conformité avec la Constitution de la Fédération et les normes européennes, nous notons qu'un projet de loi restrictif sur l'enregistrement des ressortissants de la Fédération, qui réintroduit de fait le système de la propiska, a été soumis récemment à la Douma d'Etat. L'une des propositions vise à permettre aux autorités régionales de fixer des restrictions à l'entrée. De même, de nombreuses autorités régionales et locales, notamment celles de la Ville de Moscou, ont avancé des propositions qui rendraient les règles d'enregistrement sensiblement plus strictes. Cette tendance nous paraît alarmante et nous invitons instamment les autorités compétentes à veiller au respect rigoureux du droit à la liberté de circuler et de choisir sa résidence.

341.        Selon les ONG, le régime des passeports intérieurs dans la Fédération de Russie est un instrument de répression et de restriction et ses victimes les plus fréquentes sont les migrants et les minorités ethniques. Les agents de l'administration, spécialement dans les secteurs du logement et de l'immigration, abusent du pouvoir de décision que leur confère le régime des passeports intérieurs pour pratiquer une discrimination envers les membres de certaines minorités spécialement ciblées. D'après M. Alexandre Ossipov, spécialiste des relations ethniques pour Memorial, organisation basée à Moscou, «les problèmes les plus graves et les plus douloureux du pays tiennent au «régime des passeports». C'est un exemple classique de racisme institutionnel qui comporte des éléments de discrimination directe et organisée de la part de l'Etat»189.

342.        Un citoyen de la Fédération dépourvu de passeport subit une restriction de ses droits telle qu'elle équivaut à une ingérence dans sa vie privée. La loi exige en effet qu'une personne qui souhaite trouver un emploi, recevoir gratuitement des soins médicaux, recevoir du courrier, se marier, voter,

recourir aux services d'un notaire, faire installer une ligne de téléphone, placer ses économies en achetant des devises étrangères ou voyager par le train ou par avion, présente un passeport intérieur. De plus, le fait de ne pas avoir de passeport constitue en lui-même une infraction administrative190.

343.        Dans l'affaire Smirnova c. Russie, la Cour européenne a jugé le 24 juillet 2003 que le refus des autorités russes de restituer son passeport intérieur à la requérante après sa libération à la suite d'une détention provisoire constituait une violation de l'article 8 de la Convention. Selon la Cour, il est établi que, dans leur vie quotidienne, les citoyens de la Fédération doivent prouver leur identité avec une fréquence inhabituelle, même pour accomplir des actes aussi courants que le change de devises ou l'achat d'un billet de train. Le passeport intérieur est aussi exigé en relation avec des besoins plus primordiaux, tels que trouver un emploi ou recevoir des soins médicaux. La confiscation du passeport constituait donc une ingérence continue dans la vie privée de la requérante, en l'espèce dépourvue de toute base légale en droit interne.

      Restriction des voyages à l'étranger

344.        En juillet 2003, la demande de passeport international déposée par M. Grigori Pasko191 a été rejetée par le Département des visas et de l'enregistrement (OVIR) du district Sud-Est de Moscou. L'OVIR a justifié sa décision de rejeter la demande de M. Pasko en invoquant des «instructions internes de l'OVIR». L'instruction interne, émise en 1998 et valide seulement à Moscou, interdisait la délivrance d'un passeport aux personnes mises en liberté conditionnelle parce que ce régime ne constitue pas une «pleine» exonération de sanction192 et qu'il s'ensuit qu'une personne mise en liberté conditionnelle n'est pas autorisée à voyager à l'étranger. Le recours en justice intenté par M. Pasko n'a pas abouti, mais l'intéressé a finalement reçu un passeport international en juin 2004, après avoir renouvelé sa demande.

345.        Le 12 janvier 2005, la Chambre basse – la Douma d'Etat – a approuvé en première lecture un projet de loi introduisant un certain nombre de modification de la législation relative à l'entrée/sortie du territoire de la Fédération193. Aux termes du projet de loi, tout étranger impliqué dans des «actes irrespectueux à l'égard des autorités fédérales, des symboles de l'Etat ou des valeurs spirituelles, culturelles et publiques fondamentales de la société russe» ou tenu pour avoir porté atteinte au prestige international de la Fédération de Russie peut se voir refuser l'entrée sur son territoire. La décision concernant le caractère irrespectueux de ces actions appartiendrait au Président, au parlement, au gouvernement ou à un tribunal. Nous invitons les autorités russes à vérifier la conformité de ces projets d'amendements avec les engagements internationaux de la Fédération de Russie et, en particulier, avec les normes en matière de liberté de circulation.

Absence de statut juridique

346.        Nous avons appris aussi qu'entre 600 000 et 1,4 millions de personnes vivent sur le territoire de la Fédération de Russie sans aucun statut juridique. Outre les migrations illégales, le problème vient de l'absence de statut juridique qui est le lot d'un grand nombre d'anciens citoyens soviétiques qui, auparavant, résidaient légalement sur le territoire de la Fédération de Russie et qui ont été réputés migrants en situation irrégulière à partir de l'entrée en vigueur des lois fédérales de 2002 sur la citoyenneté de la Fédération et sur le statut juridique des ressortissants étrangers dans la Fédération de Russie. Ainsi, les citoyens de l'ex-URSS qui n'ont pas obtenu la citoyenneté de la Fédération se heurtent-ils à des problèmes sans solution quand ils tentent d'obtenir un permis de résidence et risquent d'être expulsés. A compter de 2005, quand les passeports soviétiques cesseront d'être des documents d'identité valides, ces personnes se trouveront dans un vide juridique total.

347.        De nombreux ex-citoyens soviétiques vivent dans le pays sous le régime d'un enregistrement provisoire ou même sans être enregistrés. Ils ne sont en rien responsables de cette situation: ils ne peuvent pas remplir objectivement les conditions du régime des passeports ou l'enregistrement leur a été refusé arbitrairement.

      Demandeurs d'asile194

348.        Le Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, dans son avis de 2002, a fait part de sa préoccupation au sujet du retard considérable dans le traitement des demandes d'asile, en particulier à Moscou et dans sa région, où les demandeurs d'asile doivent parfois attendre plus de deux ans avant de pouvoir engager officiellement la procédure de demande. Il a également estimé préoccupant le fait que le Service de l'immigration de Moscou ne permet apparemment pas aux enfants non accompagnés de déposer des demandes d'asile s'ils n'ont pas un tuteur légal. Nous espérons que ce problème sera traité convenablement par le Service fédéral de l'immigration et les autorités régionales, et nous avons pris note que, d'après les autorités de la Fédération, un nouveau projet de loi fédérale sur les réfugiés est en préparation depuis 2002.

K.        La liberté de conscience et de religion

349.        Outre son engagement, en vertu du Statut du Conseil de l'Europe, de garantir l'exercice, par toutes les personnes relevant de sa compétence, des droits de l'homme et des libertés fondamentales, y compris la liberté de conscience et de religion (article 9 de la CEDH), la Fédération de Russie a pris également les engagements ci-après: a) introduire de nouvelles lois conformes aux normes du Conseil de l'Europe: ... sur la liberté de religion; b) restituer promptement les biens immobiliers des institutions religieuses.

350.        La législation libérale sur la liberté de religion adoptée au début des années 90 a encouragé une vaste pluralité de confessions et d'organisations religieuses dans toute la Fédération195. Cependant, la loi fédérale sur la liberté de conscience et les associations religieuses porte les marques d'un traitement inégal des différentes confessions car elle reconnaît «le rôle spécial de l'orthodoxie dans l'histoire de la Russie», déclare «respecter le christianisme, l'islam, le bouddhisme, le judaïsme et les autres religions qui font partie intégrante du patrimoine historique des peuples de Russie196». Ces dispositions, inscrites dans le préambule de la loi et sans force contraignante directe, sont néanmoins la source d'une discrimination à l'égard des confessions qui ne sont pas mentionnées. Par exemple, les autorités fédérales et régionales semblent accorder un traitement préférentiel à l'Eglise orthodoxe russe. Nous avons entendu des allégations selon lesquelles les communautés

religieuses minoritaires doivent obtenir l'agrément de l'Eglise orthodoxe locale pour pouvoir construire un lieu de culte et autorités locales prendraient l'avis de l'Eglise orthodoxe avant d'arrêter leurs décisions en rapport avec ces groupes religieux.

351.        Nous jugeons très préoccupants les renseignements recueillis au cours de nos missions d'information à propos de nombreux cas de violence à motivation religieuse – violence physique, intimidation et autres formes d'attaques contre les représentants de confessions «non traditionnelles» ou contre leurs lieux de culte197. Le plus souvent, les autorités locales et régionales ferment les yeux sur ces agissements et ne poursuivent pas les auteurs.

352.        Les personnalités religieuses et les missionnaires étrangers rencontrent des difficultés pour obtenir des visas d'entrée ou pour résider en Russie198. Depuis le début de 2002, un évêque catholique et plusieurs prêtres ont été expulsés de Russie, alors que certains d'entre eux vivaient dans ce pays depuis des années. Outre les refus ou les révocations de visas dans le cas de prêtres catholiques, dans de nombreux autres cas, des religieux étrangers n'ont apparemment pas pu obtenir de visa pour entrer ou revenir dans le pays, notamment des personnes de confessions chrétienne protestante, bouddhiste ou musulmane. Dans les régions de Krasnodar et de Kaliningrad, les prêtres et les religieuses peuvent seulement obtenir des visas de trois mois. Fin 2003, un tribunal du Tatarstan a refusé un nouveau permis de résidence à un missionnaire baptiste en se fondant sur l'avis des services de sécurité locaux qui estimaient que les activités de l'intéressé étaient de nature «extrémiste». Depuis plusieurs années, la communauté bouddhiste de Kalmoukie demande au ministère russe des Affaires étrangères de revenir sur ses refus antérieurs d'un visa et d'autoriser son chef spirituel, le Dalaï Lama, à venir en Russie. Nous nous félicitons que le Dalaï Lama ait été autorisé, en novembre 2004, à se rendre en Kalmoukie.

353.        Une loi de juillet 2002 sur le statut juridique des ressortissants étrangers dans la Fédération de Russie, qui a transféré une grande part de la compétence à l'égard des questions de visa du ministère des Affaires étrangères au ministère de l'Intérieur, semble avoir réaménagé le régime des visas pour les travailleurs religieux et les autres travailleurs étrangers, contribuant à la forte baisse de la délivrance de visas de longue durée et créant une situation difficile pour de nombreux groupes. Le FSB a affirmé son autorité dans les matières concernant les visas et la religion, spécialement en rapport avec les groupes qu'il considère comme des «cultes et sectes dangereux». Par exemple, un agent du FSB, participant en qualité de représentant officiel de son pays à la réunion du 16 juin 2004 de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur les relations entre la propagande raciste, xénophobe et antisémite sur l'Internet et les crimes de haine, a prononcé une déclaration officielle qui citait les communautés des Témoins de Jéhovah et de Hare Krishna comme exemples de cultes xénophobes qui répandent «une foi fanatique et le rejet des autres religions» sur leurs sites Web199.

354.        En 2004, les médias ont révélé de nombreux cas de collecte illégale de données personnelles par les services régionaux du ministère de la Justice. Ainsi, à Tcheliabinsk, Samara et Iaroslav, les départements de la Justice ont adressé aux organisations religieuses un questionnaire auquel une liste des fidèles devait être jointe. Une telle pratique existait à l'époque soviétique où les églises, les mosquées et les synagogues devaient communiquer aux organismes officiels des renseignements personnels sur leurs fidèles; cette pratique avait disparu après le démantèlement de l'URSS. La pratique consistant à recueillir des données personnelles sur les fidèles dans les régions de la Fédération doit cesser; le service central du ministère de la Justice doit faire savoir aux services régionaux que cette pratique n'est pas tolérable.

355.        Un autre grand problème, fréquemment cité en rapport avec la jouissance de la liberté de religion, concerne l'attribution de terrains pour construire des lieux de culte pour certaines communautés religieuses. Il se pose spécialement dans le cas des confessions minoritaires, notamment les Témoins de Jéhovah, qui ont rencontré des difficultés à Ekaterinbourg, Kazan, Dalnegorsk, Adler et Saint-Pétersbourg. Une communauté juive de Ekaterinbourg a mentionné également des difficultés pour obtenir un terrain. D'après les informations recueillies, le site attribué précédemment a été repris pour construire la résidence du représentant plénipotentiaire du président (nous avons rencontré le représentant, M. Latichev, qui n'a ni confirmé ni contesté ces allégations).

356.        Nous estimons alarmante la tendance récente à la séparation des organisations religieuses entre groupes traditionnels et groupes non traditionnels. Reconnaissant que les autorités fédérales cherchent à assurer la réalisation sans obstacle de la liberté de religion, nous devons cependant constater que les organes régionaux et locaux sont, bien souvent, peu enclins à protéger les droits des communautés religieuses et ne réagissent pas correctement aux cas de violation de la liberté de religion.

357.        Dans le même temps, la Douma d'Etat n'a toujours pas apporté son soutien aux initiatives tendant à accorder officiellement un statut spécial aux organisations religieuses dites «traditionnelles»200, nonobstant la déclaration faite le 26 mars 2004 par le Président, dans laquelle il se dit favorable à la rédaction d'un projet de loi sur le soutien de l'Etat «aux chefs spirituels des confessions religieuses traditionnelles», comme l'a rapporté l'agence de presse ITAR-Tass.

358.        L'Assemblée, dans sa Résolution 1277 (2002), a déploré les difficultés rencontrées par l'Armée du salut201 et les Témoins de Jéhovah à Moscou mais s'est félicitée de la décision des autorités russes de mettre fin au problème de la discrimination et du harcèlement exercés localement envers ces communautés religieuses. Nous devons cependant relever que, jusqu'à présent, ces deux organisations continuent à rencontrer dans certaines régions de la Fédération des obstacles juridiques ou pratiques dans la conduite de leurs activités.

359.        En février 2003, le tribunal de district de la Taganka, à Moscou, a annulé sa propre décision de septembre 2001 ordonnant la liquidation de la section moscovite de l'Armée du salut à la suite d'une décision de la Cour constitutionnelle en date du 7 février 2002202. Comme la décision de la Cour constitutionnelle portait seulement sur la procédure de liquidation, les décisions de refus de réenregistrer prises en 2000 sont toujours applicables. La section moscovite de l'Armée du salut est aujourd'hui privée de facto de son statut juridique puisque le délai de réenregistrement a expiré.

360.        La section moscovite de l'Armée du salut a saisi la Cour européenne des Droits de l'Homme le 18 mai 2001; le recours a été déclaré recevable en juin 2004203. Dans sa requête, la section moscovite de l'Armée du salut soutient, en invoquant les articles 9 et 11 de la Convention, que le refus de lui accorder le statut d'entité juridique nuit gravement à sa capacité de manifester sa religion par l'exercice du culte et la pratique. Elle estime que la qualification d'organisation paramilitaire attribuée à l'Armée du salut et la présomption que ses membres enfreindraient inévitablement la loi russe ne sont fondées sur aucune preuve matérielle et constituent un jugement inacceptable sur la légitimité de la religion des requérants.

361.        Témoins de Jéhovah. Le 26 mars 2004, le tribunal du district Golovinski, à Moscou, a rendu une décision qui interdit l'activité de l'organisation des Témoins de Jéhovah dans la capitale russe en vertu d'une disposition de la loi de 1997 permettant aux tribunaux d'interdire les groupes religieux dont ils estiment qu'ils incitent à la haine ou à l'intolérance204. La décision a été confirmée en appel par le tribunal de la ville de Moscou le 16 juin 2004. Nonobstant le fait que le bureau national de l'organisation avait été enregistré auparavant, les tribunaux de Moscou ont estimé que la communauté était coupable d'avoir contraint des familles à se séparer, d'avoir porté atteinte aux droits et libertés du citoyen, d'avoir encouragé au suicide ou au refus, pour des motifs religieux, d'une assistance médicale à des personnes dans un état de santé critique et d'avoir incité des citoyens à refuser d'exécuter leurs obligations civiles telles que prévues par la loi. Les Témoins de Jéhovah ont été la première grande organisation religieuse dont une section locale a été interdite en vertu de la loi de 1997. L'organisation a saisi la Cour européenne des Droits de l'Homme d'une requête, actuellement en cours d'examen.

362.        De nombreuses congrégations locales des Témoins de Jéhovah dans l'ensemble du pays ont fait savoir que les contrats de location des bâtiments qu'elles occupent étaient résiliés par les propriétaires ou en passe de l'être. Des membres des Témoins de Jéhovah ont indiqué que les refus de ce type se multipliaient à mesure que la connaissance des décisions judiciaires du 26 mars et du 16 juin, interdisant toutes les activités religieuses du groupe à Moscou, se diffusait dans le pays. Certains propriétaires ont mal interprété les jugements, pensant que la loi les obligeait à résilier les baux de location conclus avec le groupe. A Sotchi, en juin, l'accès à un lieu de réunion a été refusé aux Témoins de Jéhovah à la suite des pressions exercées sur le propriétaire par le FSB; la décision de refuser l'accès a finalement été annulée et la réunion a pu se tenir.

363.       Nous avons eu également la déception d'apprendre que cette organisation fait l'objet de poursuites non seulement dans la ville de Moscou mais aussi dans certaines autres régions où nous nous sommes rendus, en particulier à Ekaterinbourg où le congrès des Témoins de Jéhovah a été perturbé l'été dernier par des représentants des autorités locales. Les conventions locales des Témoins de Jéhovah ont aussi été perturbées à Moscou, Vladimir, Khabarovsk, dans le territoire de Stavropol, à Nijni Novgorod, Piatigorsk, Sotchi et Tcheliabinsk205.

364.        Nous invitons les autorités russes, à tous les niveaux, à assurer le traitement égal de toutes les confessions conformément à la loi. Nous rappelons la recommandation de l'Assemblée aux autorités russes, inscrite dans la Résolution 1278 (2002)206, d'appliquer la loi sur la religion plus uniformément dans toute la Fédération de Russie, pour mettre fin aux discriminations régionales et locales injustifiées à l'encontre de certaines communautés religieuses et au traitement préférentiel

dont bénéficie l'Eglise orthodoxe russe de la part des responsables locaux, et notamment l'insistance de ces derniers pour que les organisations religieuses obtiennent l'accord préalable de l'Eglise orthodoxe russe pour leurs activités dans certains districts.

365.        La Fédération de Russie s'est engagée notamment à se doter de lois nouvelles conformes aux normes du Conseil de l'Europe, en particulier au sujet de la liberté de religion (Avis N° 193 (1996), § 7.v). La loi fédérale sur la liberté de conscience et les associations religieuses est entrée en vigueur le 1er octobre 1997, remplaçant une loi de 1990 sur le même sujet. Cette législation nouvelle est critiquée, dans le pays comme à l'étranger, au motif qu'elle méconnaît le principe de l'égalité des religions. Le préambule de la loi mentionne expressément l'orthodoxie, le christianisme, l'islam, le bouddhisme et le judaïsme. Dans la pratique, les organes administratifs et les tribunaux, interprétant la loi comme un tout dans la perspective de son préambule, traitent souvent les «organisations religieuses non traditionnelles» comme des «sectes totalitaires»207.

366.        La loi distingue ensuite entre les «organisations religieuses», selon qu'elles existaient ou n'existaient pas avant 1982 et crée une troisième catégorie, celle des «groupes religieux». Les organisations religieuses ayant moins de quinze ans d'existence et les groupes religieux sont soumis à un régime juridique et fiscal désavantageux et leurs activités sont restreintes208.

367.        L'intention était, semble-t-il, d'établir une discrimination à l'égard des membres des religions étrangères et moins connues, en leur compliquant la tâche de créer des organisations religieuses. Par exemple, de nombreux agents des forces de l'ordre et membres du corps législatif parlent de la nécessité de protéger la «sécurité spirituelle» du pays en décourageant la multiplication des «sectes» et des «cultes», qui, dans leurs propos, englobent généralement les mouvements protestants et les autres mouvements religieux plus récents. La loi de 1997 est très complexe et ses dispositions sont souvent ambiguës. Elle crée différentes catégories de communautés religieuses auxquelles s'appliquent des régimes juridiques et des privilèges différents. La principale distinction est celle qui sépare les «groupes» religieux des «organisations» religieuses. Un «groupe» religieux n'est pas enregistré et ne possède donc pas la personnalité juridique; il ne peut pas ouvrir un compte bancaire, avoir la propriété de biens immobiliers, adresser des invitations à des invités étrangers, publier des écrits ni tenir des offices religieux dans les établissements pénitentiaires et les hôpitaux d'Etat ou au sein des forces armées. Il ne jouit d'aucun avantage fiscal et n'a pas le droit de diffuser ses croyances. A titre individuel, les membres du groupe peuvent acquérir des biens immobiliers pour l'usage du groupe, inviter personnellement des visiteurs qui donneront une instruction religieuse et importer des documents et des objets religieux. Les groupes sont ainsi autorisés théoriquement à louer des espaces publics et à tenir des offices religieux mais, en pratique, les membres des groupes non enregistrés rencontrent souvent des difficultés considérables dans l'exercice de ces droits.

368.        La loi de 1997 dispose qu'un groupe qui existe depuis plus de 15 ans et compte au moins dix membres ressortissants de la Fédération peut s'enregistrer en qualité d'«organisation religieuse locale». Il acquiert alors le statut d'une entité juridique et bénéficie de certains avantages juridiques. Une organisation religieuse «centralisée» ne peut être constituée que par au moins trois organisations religieuses locales de la même confession. La loi de 1997 établit donc une procédure très complexe pour créer une nouvelle organisation religieuse non locale, capable d'exercer ses activités sur plus d'un «territoire» (la loi ne définit pas clairement les circonscriptions administratives englobées dans un «territoire local»). Compte tenu des différences marquées dans les droits accordés aux groupes religieux et aux organisations religieuses, cette disposition peut être considérée comme discriminatoire à l'égard des croyances minoritaires ou nouvelles.

369.        D'autre part, pour être autorisées à faire figurer dans leur appellation les mots «Fédération de Russie», «russe» et leurs dérivés, les organisations religieuses centralisées doivent avoir fonctionné légalement sur le territoire de la Fédération depuis au moins 50 ans à la date du dépôt de leur demande d'enregistrement officiel.

370.        Des mesures ont été prises pour traiter certains de ces problèmes, par le biais notamment des décisions de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie en date des 23 novembre 1999, 13 avril 2000 et 7 février 2002. Bien que la Cour ait déjà limité l'application de la «règle des 15 ans», qui restreignait sévèrement, à l'origine, les droits des groupes religieux incapables de prouver leur existence sur le territoire de la Fédération depuis au moins 15 ans avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, l'abolition totale de cette règle serait considérée comme une grande amélioration du régime juridique209.

371.       Bien que la loi prévoie que les ressortissants étrangers et les apatrides qui résident légalement sur le territoire de la Fédération de Russie jouissent du droit à la liberté de conscience et à la liberté d'opinion religieuse sur un pied d'égalité avec les citoyens de la Fédération de Russie (article 3), elle dispose aussi que seuls les nationaux et autres personnes «résidant en permanence et légalement sur le territoire de la Fédération de Russie» peuvent s'associer pour former des organisations religieuses (être fondateurs ou membres de telles organisations). Cette disposition peut être considérée comme contraire à l'article 28 de la Constitution de la Fédération et à l'article 9 de la Convention européenne des Droits de l'Homme dans la mesure où la législation russe prévoit une procédure spéciale pour l'obtention de la résidence permanente.

372.        Le médiateur de la Fédération de Russie, dans son Rapport spécial «Sur l'exécution par la Russie des engagements pris lors de l'adhésion au Conseil de l'Europe», publié en mai 2002, a indiqué également que l'article 3 (2) de la loi prévoit la possibilité de restreindre la liberté de religion si cela est nécessaire pour protéger la sécurité de l'Etat, alors que l'article 9 de la CEDH ne contient aucune restriction semblable.

373.        Une loi sur la lutte contre les activités extrémistes a été adoptée en juillet 2002 dans l'intention de réduire l'intolérance religieuse et ethnique et de limiter les activités des organisations d'extrême droite. La législation interdit d'affirmer dans un discours public la supériorité d'aucun groupe sur la base de particularités tenant à la religion, à la race, à la nationalité, à la langue ou à d'autres caractéristiques. Les adversaires de cette législation ont estimé qu'elle risquait d'entraîner un élargissement dangereux du pouvoir de la police et que le gouvernement avait déjà fait preuve d'un manque de volonté politique dans l'application de la législation en vigueur210. Certains observateurs se sont particulièrement inquiétés de l'effet de la législation sur la liberté religieuse. En 2003, les autorités de Samara ont utilisé la législation anti-extrémisme pour annuler l'enregistrement d'une communauté bouddhiste et de l'Eglise de la Dernière Alliance (Church of the last Covenant) et pour refuser d'enregistrer les communautés de scientologues et l'Eglise de l'Unification. Dans le même temps, dans l'immense majorité des infractions commises au détriment des organisations et des biens juifs, les services officiels occultent généralement la motivation antisémite des faits et poursuivent les délinquants pour le chef beaucoup moins grave de «vandalisme» (hooliganisme).

374.        Nous invitons donc instamment les autorités russes à réviser la loi de 1997 sur la liberté de conscience et les associations religieuses, notamment pour éliminer les dispositions discriminatoires qui entravent l'enregistrement des organisations religieuses nouvelles, pour simplifier les procédures d'enregistrement, pour élargir les droits accordés aux groupes religieux non enregistrés et pour rendre les autres dispositions de la loi conformes à la Constitution de la Fédération et à la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales telle qu'elle est interprétée par la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme.

375.        La Russie a également pris l'engagement de restituer sans retard les biens des institutions religieuses (Avis N° 193 (1996), § 10.xiii). Nous observons que la restitution des biens religieux saisis par le régime soviétique pose toujours problème. La plupart des biens servant aux services religieux, notamment les églises, les synagogues et les mosquées, ont été restitués. Cependant, par exemple, la communauté juive cherche toujours à obtenir la restitution d'un certain nombre de synagogues, de rouleaux d'écritures saintes et d'objets culturels et religieux. A Kazan, l'ancienne cathédrale de l'Eglise catholique romaine n'a pas été restituée parce qu'elle abrite aujourd'hui le laboratoire d'une école d'aviation.

376.        L'Eglise orthodoxe russe paraît avoir plus de succès que les autres groupes dans la récupération de ses biens d'avant la révolution, quoiqu'il reste encore des biens en litige, malgré son traitement préférentiel. La communauté des Vieux-Croyants orthodoxes russes de Saint-Pétersbourg n'a pas pu obtenir la restitution de son église, confisquée par les autorités soviétiques en 1922. Les catholiques continuent à exercer des recours en justice pour obtenir la restauration de la cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul de Moscou. Les bureaux d'une compagnie pétrolière occupent actuellement l'édifice et la paroisse catholique se réunit dans une ancienne salle de danse car elle doute que la compagnie libère les locaux.

377.        A ce propos, nous nous félicitons de l'adoption, par le parlement de la Fédération, de la loi211 accordant aux organisations religieuses un droit de propriété à titre gratuit sur les parcelles de terrain appartenant à l'Etat ou aux collectivités locales et occupées par des édifices religieux (si le bâtiment considéré appartient à l'organisation), ou leur possession à long terme à titre gratuit. Nous espérons que cette loi s'appliquera sans discrimination aux différentes organisations religieuses et qu'elle les libérera de la nécessité d'acheter les terrains sur lesquels leurs bâtiments se trouvent déjà ou de payer pour leur usage.

378.        Nous invitons donc instamment les autorités russes à régler sans plus de retard les problèmes toujours pendants en rapport avec la restitution des biens aux institutions religieuses.

L.        Le service militaire de substitution

379.       La Fédération de Russie s'est aussi engagée à adopter une loi instituant un service militaire de substitution, comme prévu à l'article 59 de la Constitution (Avis N° 193 (1996), § 10.xviii). Cette loi a été adoptée en juillet 2002 et elle a pris effet le 1er janvier 2004. Deux suppléments à la loi ont été publiés en mars 2004: le premier contenait la liste de 722 organisations auxquelles les conscrits peuvent être affectés pour accomplir un service de substitution et le second, la liste de 283 activités que les conscrits sont autorisés à exercer. En mai 2004, le Gouvernement de la Fédération a adopté les règlements d'application de la loi sur l'accomplissement du service civil de substitution. En juillet 2003, le Président a signé un décret définissant les organes de l'Etat autorisés expressément à organiser le service civil de substitution, à savoir le ministère du Travail et du Développement social (en mars 2004, cette fonction a été transférée au Service fédéral du travail et de l'emploi) et le ministère de la Défense.

380.       La loi est souvent critiquée pour plusieurs de ses dispositions. La durée du service civil de substitution est 1,75 fois plus longue que celle du service militaire ordinaire (42 mois ou 21 mois pour les diplômés de l'université). Cependant, si le service est accompli dans les «organisations des forces armées», sa durée est réduite à 1,5 fois celle du service militaire ordinaire; les conscrits qui choisissent le service de substitution doivent l'accomplir en dehors du territoire de l'entité (sujet) de la Fédération de Russie où se trouve leur résidence actuelle, ce qui a pour effet de distendre les liens familiaux et sociaux.

381.       Nous considérons que la nouvelle loi n'est pas compatible avec les normes européennes et ne peut pas être réputée conforme aux engagements pris. Malheureusement, cette loi reflète, dans la plupart de ses dispositions, la position du ministère de la Défense de la Fédération de Russie, qui s'est officiellement déclaré favorable à l'introduction du service civil de substitution mais qui, dans la pratique, y met des obstacles212.

382.        Dans la pratique, donc, la loi prive du droit au service de substitution la majorité des jeunes gens désireux de choisir cette formule. Le service militaire de substitution tel qu'il est prévu par la loi est un moyen de punir les individus qui choisissent de se conformer à leurs convictions religieuses ou morales213. La loi est donc restrictive et largement inefficace: seul un petit nombre des appelés a opté pour le service de substitution en 2004 (1% au plus)214.

383.        Selon nous, il est aussi anormal que les jeunes gens qui choisissent le service civil de substitution soient fréquemment tenus d'accomplir leurs trois ans et demi de service en travaillant dans l'industrie ou dans d'autres unités économiques. Le but du service civil de substitution ne devrait pas être de fournir une main-d'œuvre à bon marché aux entreprises, même publiques, mais de donner aux jeunes gens qui ne souhaitent pas faire un service militaire la possibilité de servir la société tout entière en accomplissant un travail dans le secteur public à but non lucratif, par exemple dans les hôpitaux, les écoles, les maisons de retraite et les établissements du même type.

384.        A cet égard, nous devons relever que l'engagement de la Russie concernant la loi sur le service civil de substitution n'a pas été rempli car il ne s'agit pas seulement d'adopter une loi mais il faut aussi que cette loi et son application soient conformes aux normes européennes. Une loi qui, dans les faits, dresse des obstacles devant les jeunes gens refusant de porter les armes pour des raisons religieuses ou pour d'autres motifs de conscience, ou qui les décourage d'opter pour un service non militaire ne peut pas être considérée comme satisfaisante. Nous invitons donc instamment les autorités russes à réviser la loi pour la rendre conforme aux normes européennes applicables.

M.        La liberté d'expression215

385.        Depuis quelques années, la Fédération de Russie connaît un recul de la liberté d'expression. Plusieurs cas typiques de fermeture ou de prise de contrôle d'organes d'information (prise de contrôle de NTV, fermeture de la chaîne TVS, disparition de plusieurs émissions d'analyse indépendantes à la télévision nationale, etc.) ont incité à une attitude d'autocensure dans les milieux de presse.

      Violence physique

386.        On signale aussi une montée de la violence physique contre les journalistes. D'après la Fédération internationale des journalistes, 12 journalistes et autres personnels des médias ont trouvé la mort dans la Fédération de Russie en 2003, soit trois de plus que l'année précédente216. Le 9 juillet 2004, Paul Khlebnikov, rédacteur en chef de l'édition russe du magazine Forbes, a été tué par balles alors qu'il quittait le bâtiment de son bureau à Moscou. En mai, le magazine avait publié la liste des 100 personnes les plus riches de Russie, dont beaucoup avaient manifesté leur mécontentement à ce sujet. Aucun véritable progrès n'a été fait jusqu'à présent dans l'enquête sur cet assassinat.

      Harcèlement et intimidation

387.       Le représentant de l'OSCE pour la liberté des médias a signalé, dans son rapport sur la couverture de la tragédie de Beslan par les médias russes, plusieurs cas inquiétants de harcèlement de journalistes: Mme Anna Politkovskaïa, correspondante de Novaïa Gazeta, a été empêchée de se rendre à Beslan, ayant apparemment été empoisonnée à bord de l'avion qui la transportait vers Rostov-sur-le-Don; M. Andreï Babitski, correspondant de Radio Liberty, a été retenu à l'aéroport de Moscou le 2 septembre, alors qu'il partait couvrir le siège, après avoir été arrêté217 pour «hooliganisme»; Mme Nana Lejava, reporter pour la chaîne géorgienne de télévision Roustavi-2, et son caméraman ont été arrêtés le 4 septembre parce qu'ils n'avaient pas les documents nécessaires pour travailler dans la région. Ils ont été conduits dans un bâtiment du FSB dans la ville voisine de Vladikavkaz où Mme Lejava a déclaré qu'elle avait été soumise à un «examen gynécologique forcé».

388.        Le 3 septembre, pendant et après l'assaut donné à l'école, les bandes contenant des images de l'assaut, enregistrées par les équipes de télévision de ZDF (Allemagne), ARD (Allemagne), APTV (Etats-Unis) et Rustavi-2 (Géorgie), ont été confisquées; le 7 septembre, les services de sécurité d'Ossétie du Nord ont expulsé de Beslan, sans explication, l'équipe (le correspondant Zourab Dvali et son caméraman) de la chaîne de télévision géorgienne Mzé. Le 6 septembre 2004, le rédacteur en chef du quotidien russe Izvestia, M. Raf Chakirov, a été licencié par le propriétaire du journal à cause de la couverture des événements de Beslan218.

389.        Nous sommes préoccupés par la législation en vigueur concernant la diffamation et de son application par les pouvoirs judiciaire et exécutif. Les journalistes font souvent l'objet de poursuites pour diffamation (environ 8 000 à 10 000 procès par an). Comme l'indique le Centre pour le journalisme dans les situations extrêmes, le nombre des poursuites contre les journalistes a augmenté sensiblement à partir de 2000. Quarante-neuf affaires pénales ont été ouvertes en 2002 et, en moyenne, de 30 à 35 actions pénales ont été engagées contre des journalistes en 2002-2004.

390.        En octobre 2004, Kommersant, un des rares organes de presse encore critiques vis-à-vis du gouvernement, a été condamné, entre autres, au versement de 8 millions d'euros de dommages intérêts pour «atteinte à la réputation», demandés par la banque Alfa au motif que l'article publié dans Kommersant concernant les «problèmes graves» rencontrés par la banque lors de la crise financière de l'été dernier avait porté atteinte à sa réputation commerciale. Cette somme correspondant au total à 70% des biens du journal, celui-ci a dû obtenir un prêt auprès d'une banque pour pouvoir la payer219. Cette décision a été confirmée en décembre 2004 par la Cour d'arbitrage en appel. Nous pensons que la condamnation à des dommages intérêts pécuniaires excessifs et disproportionnés devrait être découragée dans la mesure où les lourdes peines financières entravent la libre circulation de l'information et ont un «effet paralysant» sur la liberté d'expression.

391.       En outre, le Code pénal considère encore la diffamation comme une infraction pénale220. Cette position ne semble pas être conforme à la pratique des autres Etats européens et inspire de graves doutes quant à sa compatibilité avec l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme221. Lors de la réunion tripartite de haut niveau des représentants du Conseil de l'Europe, de l'OSCE et des Nations Unies, qui s'est tenue le 18 février 2005, il a été noté que la dépénalisation de la diffamation était considérée comme un moyen efficace d'améliorer la liberté d'expression et d'information à la condition que, parallèlement, le niveau des sanctions pécuniaires pour diffamation soit contrôlé.

392.        La législation pertinente ne devrait pas, par ailleurs, accorder aux fonctionnaires de protection particulière contre les critiques222. L'article 298 du Code pénal, cependant, prévoit que la diffamation est passible de certaines des peines les plus sévères si elle concerne un juge, un procureur, un enquêteur, un policier ou un officier judiciaire. Enfin, la possibilité pour les pouvoirs publics d'intenter des actions contre les médias et les journalistes devrait être abolie puisque ces autorités ne peuvent pas, par nature, avoir une dignité, un honneur ou une réputation.

393.        Par conséquent, nous demandons instamment aux autorités russes de réformer leur législation en matière de diffamation et, notamment: de dépénaliser la diffamation, d'abroger la protection supplémentaire accordée aux fonctionnaires contre la diffamation, d'introduire une interdiction claire pour les organes publics d'engager des procédures civiles visant à protéger leur «réputation» (sans préjudice du droit des fonctionnaires d'engager des actions à titre privé), d'établir clairement que nul ne peut être reconnu coupable de diffamation pour l'expression d'une opinion («jugements de valeur»), de privilégier les formes non pécuniaires de réparation et d'améliorer la protection des sources d'information des journalistes223.

      «Espionite»3

394.       Tout au long des huit dernières années, le Service fédéral de la sécurité (FSB) a porté des accusations d'espionnage souvent douteuses contre environ une douzaine de scientifiques, de journalistes et de militants écologistes224. Chacune des personnes poursuivies avait travaillé avec des correspondants étrangers sur des sujets qui, à l'époque soviétique, relevaient du contrôle exclusif du prédécesseur du FSB, le KGB (stockage des déchets nucléaires, dégradation de l'environnement, niveau de préparation militaire de la Russie, technologie militaire, etc.) mais qui étaient devenus les sujets d'un débat public plus vaste à l'époque de la glasnost. Les militants des droits de l'homme, qui ont inventé le mot «espionomanie» (en russe: chpionomania) pour décrire les séries de procès pour espionnage, pensent que le FSB a délibérément porté de fausses accusations contre ces personnes afin de rétablir ce qu'il considère être son domaine exclusif et d'imposer de nouvelles limitations à la liberté d'expression sur ces sujets225.

395.        L'affaire Grigory Pasko. L'Assemblée a rappelé, dans sa résolution 1354 (2003)226, que la démocratie se fonde sur la liberté de la presse et la liberté d'expression. Ces libertés ne doivent pas être réduites par l'intimidation et l'exercice de poursuites à l'égard de journalistes critiques tels que M. Pasko. L'Assemblée a estimé que la conclusion la plus importante à tirer de l'affaire de M. Pasko était que la définition de ce qui constitue un secret d'Etat doit être clarifiée et, avant toute chose, rendue publique. La résolution déclare qu'il est inacceptable que, alors que le droit fédéral (public) relatif aux secrets d'Etat contient près de trente-six articles rédigés en termes vagues, la définition détaillée soit donnée dans un décret secret du ministère de la Défense (décret no 55:96), qui mentionne près de 700 exemples de secrets de cet ordre.

396.        Cela donne aux services de sécurité toute latitude pour engager des poursuites pour trahison, offrant ainsi un formidable outil d'intimidation contre des journalistes tels que M. Pasko et des chercheurs tels que M. Nikitine, lequel a finalement été acquitté en septembre 2000, après avoir été poursuivi pendant plus de quatre ans sur la base du décret nº 55:96227.

397.        Le 23 janvier 2003, M. Pasko a été mis en liberté conditionnelle, après avoir accompli les deux tiers de sa peine de quatre ans de prison228. En décembre 2002, il a adressé une requête à la Cour européenne des Droits de l'Homme, soutenant qu'au cours de la procédure dont il avait fait l'objet les autorités russes avaient violé plusieurs de ses droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme. L'examen de sa requête est en cours. Outre le fait que M. Pasko a dû se défendre dans le labyrinthe des tribunaux militaires russes durant plus de cinq ans, il a ensuite été empêché de se rendre à l'étranger par le Département des visas et de l'enregistrement de Moscou qui a refusé sa demande de passeport international en juin 2003229.

398.        Le cas d'Igor Soutiaguine. M. Igor Soutiaguine a été arrêté le 29 octobre 1999, puis accusé de 38 chefs de haute trahison. Le Service fédéral de sécurité de la Russie (FSB) l'a accusé d'avoir rassemblé des informations sur divers sujets en rapport avec les systèmes d'armement de la Russie et d'autres questions militaires et de les avoir transmises à des agents des services de renseignement militaire des Etats-Unis.

399.        En décembre 2001, le tribunal régional de Kalouga a renvoyé le dossier au FSB pour complément d'enquête. Le FSB a demandé a cette occasion un réexamen par des experts de la totalité des chefs d'accusation antérieurement retenus. En juillet 2002 les experts de différents départements du ministère de la Défense ont conclu que seulement cinq des 38 documents contenaient effectivement des renseignements classés qui ne pouvaient pas provenir des documents publiquement disponibles examinés. Sur la base de cette évaluation, le FSB a rédigé un nouvel acte d'accusation, retenant contre M. Igor Soutiaguine cinq chefs de haute trahison en vertu de l'article 275 du Code pénal. En septembre 2003, l'affaire est revenue devant le tribunal municipal de Moscou. Après l'ouverture des audiences en novembre 2003 devant un tribunal avec jury, conformément à la demande de M. Soutiaguine, le juge initial a été remplacé en février 2004 par un autre, Mme Marina Komarova, qui n'avait pas d'expérience préalable du procès avec jury et avait précédemment condamné le diplomate Valentin Moïsseïev pour trahison, à l'issue d'un procès non conforme aux normes internationales230

400.        Le 15 mars 2004, un nouveau procès s'est ouvert, sous la présidence de Mme Komarova. Le jury précédent a été dissous et un nouveau jury a été constitué. Le 5 avril 2004, en audience à huis clos, le tribunal municipal de Moscou a déclaré M. Igor Soutiaguine coupable de haute trahison. Deux jours plus tard, le tribunal l'a condamné à la peine de prison la plus lourde pour haute trahison depuis l'époque soviétique: 15 ans dans une colonie à régime sévère. Les avocats de la défense affirment que des représentants du FSB ont été cooptés parmi les jurés231. Le 17 août 2004, la Cour suprême de la Fédération de Russie a confirmé le jugement.

401.        En février 2004, un projet de résolution a été soumis à l'Assemblée parlementaire sur le cas d'Igor Soutiaguine, relevant que la procédure conduite contre lui était entachée d'un grand nombre d'irrégularités semblables à celles qui s'étaient produites dans l'affaire Pasko, notamment l'usage de décrets secrets et le fait que le Service fédéral de Sécurité n'a pas vérifié l'affirmation de l'accusé selon laquelle il n'avait utilisé dans ses travaux que des sources publiquement disponibles. Le débat de l'Assemblée parlementaire sur l'affaire Soutiaguine est prévu pour 2005.

402.        L'affaire Valentin Danilov. En 2000, le Service fédéral de sécurité (FSB) a accusé M. Danilov d'avoir vendu à une entreprise chinoise les résultats de ses recherches sur l'influence des ondes électromagnétiques sur les satellites. En 2001, l'université où M. Danilov faisait ses recherches a lancé de nouvelles accusations contre lui, soutenant qu'il avait détourné des fonds que l'université avait reçus des Chinois pour le projet dirigé par M. Danilov. Ce dernier a été arrêté le 16 février 2001; il a passé un an et demi en détention provisoire, puis a été libéré à condition qu'il ne quitte pas les environs. Au cours du premier procès, le tribunal a renvoyé deux fois le dossier au parquet pour qu'il rectifie l'acte d'accusation. Le procès s'est achevé en décembre 2003 par l'acquittement de M. Danilov, prononcé par un jury. Cependant, en juin 2004, la Cour suprême a infirmé l'acquittement, au motif de «violations graves des règles de procédure ayant fortement influencé la décision des jurés», et renvoyé l'affaire à Krasnoïarsk pour un nouveau jugement devant un autre jury.

403.        Le second procès s'est ouvert le 14 septembre 2004 et les médias n'ont pas été autorisés à le suivre. Le 5 novembre, le jury a déclaré M. Danilov coupable de détournement de fonds et conclu que le physicien avait communiqué des renseignements sur ses recherches à la Chine (le jury ne s'est pas prononcé sur la nature des renseignements communiqués à l'entreprise chinoise, laissant cet aspect à la seule appréciation du juge). Le 10 novembre, le juge a décidé de faire arrêter M. Danilov à l'audience. Le même jour, un procès distinct s'est ouvert pour que le juge décide si les renseignements communiqués par M. Danilov aux Chinois étaient des renseignements classés secrets à l'époque.

404.        Le 24 novembre 2004, le tribunal du territoire de Krasnoïarsk a condamné Valentin Danilov à 14 ans de détention dans un camp de travail à sécurité maximale, pour haute trahison et pour détournement aggravé de fonds232. Les avocats de la défense ont fait savoir qu'ils déposeraient un recours devant la Cour suprême de la Fédération et qu'ils saisiraient la Cour européenne des Droits de l'Homme.

405.        Nous nous inquiétons aussi de l'apparition possible d'une nouvelle affaire d'«espionnage» concernant le physicien de 66 ans Oscar Kaïbytchev, chef de l'institut de superplasticité des métaux de l'Académie nationale des sciences, que le parquet a accusé en février 2005 d'exportation illégale en Corée du Sud de technologies à double usage (civil et militaire). Le scientifique et ses partenaires américains affirment que cette technologie n'est pas secrète. M. Kaïbytchev encourt une peine d'emprisonnement d'au moins dix ans si les accusations les plus graves sont retenues. Par conséquent, nous demandons instamment aux autorités russes de veiller à l'impartialité de l'instruction de cette affaire et à la tenue d'un procès équitable et public.

      Lois antiterroristes

406.        Nous nous inquiétons de l'adoption en première lecture (le 17 décembre 2004) du projet de loi sur la lutte contre le terrorisme. Ce projet prévoit l'introduction d'un régime d'alerte terroriste, en plus des régimes de situation d'urgence et d'opérations antiterroristes applicables en vertu de la législation antiterroriste actuellement en vigueur. Le projet de loi donne aux autorités russes le pouvoir d'imposer un régime de sécurité restrictif de 60 jours sur la seule base d'un soupçon qu'un attentat terroriste se prépare, sans aucune confirmation. Pendant cette période, les autorités peuvent prendre des mesures d'urgence telles que l'interdiction des manifestations, les écoutes téléphoniques, les contrôles d'identité, les restrictions à la liberté de circulation, etc. Le projet de loi propose aussi des restrictions à l'activité des médias, qui pourraient interdire les photographies et les images télévisées montrant des scènes de violence et limiter la possibilité pour les journalistes de faire des reportages sur le lieu d'attentats terroristes. En outre, ce projet de loi propose d'inclure dans la notion d'activité terroriste «l'aide sous forme d'information ou autre à la planification, la préparation ou la réalisation d'un attentat terroriste», «la propagation des idées terroristes, la diffusion d'informations qui appellent à la poursuite d'activités terroristes ou qui confortent ou justifient la nécessité de telles activités». Les journalistes qui informent sur les attentats terroristes peuvent donc être eux-mêmes accusés de terrorisme233.

407.        Nous encourageons donc vivement les autorités de la Fédération à réviser le projet de loi avant son adoption définitive et à vérifier la conformité de ses dispositions avec les normes du Conseil de l'Europe en matière de liberté d'expression234, avec la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme concernant l'article 10 et avec l'article 56 de la Constitution de la Fédération de Russie, qui ne permet les restrictions des droits de l'homme et des libertés qu'en cas d'état d'urgence.

N.        La liberté de réunion et d'association

408.       Le 19 juin 2004, la loi fédérale sur les débats, les réunions, les manifestations, les processions et les piquets de grève a été adoptée. L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme235 a fait part de son inquiétude concernant cette loi qui «restreint gravement les droits de la société civile de manifester publiquement de manière pacifique». «La loi dresse des obstacles considérables à la préparation et à la mise en œuvre des manifestations pacifiques légales. Pour obtenir l'autorisation d'organiser une manifestation, il faut notamment, aujourd'hui, que les autorités locales soient avisées dix jours à l'avance et reçoivent un programme du déroulement heure par heure et que les organisateurs fassent la preuve qu'ils seront responsables de la sécurité générale autour de la manifestation.

409.        De plus, des restrictions considérables s'appliquent aux horaires et aux lieux des manifestations. Aucune réunion publique ne peut se tenir après 23 heures, ce qui exclut toutes les manifestations de longue durée. Une liste énumère les lieux où les manifestations ne sont pas autorisées, notamment «à proximité de la résidence du Président, des salles d'audience des tribunaux et des établissements pénitentiaires». En pratique, la loi donne aux responsables locaux le pouvoir de fixer ou de modifier l'emplacement de la manifestation en ne donnant aux coordonnateurs qu'un préavis de trois jours. Malgré d'importantes modifications par rapport au texte initial, telles que l'a suppression de l'interdiction de toute manifestation dont «le but et la forme seraient contraires aux normes morales communément acceptées», la loi actuelle entrave néanmoins fortement le droit de réunion pacifique.»

410.       Nous sommes également préoccupés par les nombreuses informations relatives à des entraves au droit des organisations religieuses de tenir librement des réunions pacifiques et de se constituer en associations (voir les sections pertinentes du présent rapport).

O.        La protection des minorités, la xénophobie et l'intolérance raciale

      Cadre juridique de la protection des minorités nationales

411.        Lors de son adhésion au Conseil de l'Europe, la Russie s'est engagée, notamment, à adopter de nouvelles lois conformes aux normes du Conseil de l'Europe ... sur la protection des minorités nationales (Avis N° 193 (1996), § 7.v); à signer et à ratifier dans l'année suivant son adhésion la Convention-cadre européenne pour la protection des minorités nationales; à fonder sa politique à l'égard des minorités sur les principes énoncés dans la Recommandation 1201 (1993) de

l'Assemblée, et à intégrer ces principes dans le système et la pratique juridiques et administratifs du pays (10.iv); à signer et à ratifier dans l'année suivant son adhésion … la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (10.v).

412.        La Fédération de Russie a ratifié la Convention-cadre européenne pour la protection des minorités nationales le 21 août 1998236 et signé la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires le 10 mai 2001; toutefois, la ratification de cet instrument n'est toujours pas intervenue et devrait être accomplie sans plus de retard.

413.        En 1996, la Russie a adopté la loi fédérale sur l'autonomie culturelle nationale. Le Comité consultatif de la Convention-cadre a noté, dans son Avis de septembre 2002 sur la Fédération de Russie (ACFC/INF/OP/I(2003)005), que la loi de 1996 restreint, en son article 1er, la notion d'autonomie culturelle nationale aux seuls ressortissants de la Fédération de Russie. Etant donné que la loi en question est considérée par les autorités de la Fédération comme un élément normatif essentiel dans la mise en œuvre de la Convention-cadre, le Comité consultatif a estimé qu'il est important que son champ d'application personnel soit conforme à l'approche souple adoptée dans la Convention-cadre, de manière à permettre aux non-ressortissants appartenant aux minorités concernées de bénéficier de cette loi.

414.        A ce propos, nous devons relever que les autorités russes n'ont pas donné suite à cet avis puisque la loi en vigueur sur l'autonomie culturelle nationale (révisée les 10 novembre 2003, 29 juillet et 22 août 2004) a toujours un champ d'application étroit.

415.        Le Comité consultatif a signalé également l'absence de dispositions détaillées et globales de droit civil et/ou administratif relatives à la discrimination dans plusieurs domaines pertinents, tels que l'éducation et le logement. Le Comité consultatif a estimé qu'il serait souhaitable de se doter d'une telle législation afin de mettre en place une protection complète des personnes contre la discrimination de la part des pouvoirs publics et des organismes privés.

416.        Une autre préoccupation au sujet du cadre juridique, exprimée par le Comité consultatif et qui n'a pas encore été prise en considération, concerne la disposition figurant dans l'article 20 de la loi sur les langues des peuples de la Fédération de Russie, selon laquelle les émissions des chaînes de radio et de télévision couvrant toute le territoire de la Fédération utilisent uniquement la langue russe. Cet article de la loi paraît être exagérément restrictif puisqu'il sous-entend l'exclusion générale de l'usage des langues des minorités nationales dans les émissions de radio et de télévision destinées à l'ensemble du pays. Le Comité consultatif a conclu qu'une telle exclusion a priori n'est pas compatible avec l'article 9 de la Convention-cadre, compte tenu, notamment, de la taille de la population concernée et du fait qu'un grand nombre de personnes appartenant à des minorités nationales sont dispersées et résident dans plusieurs entités de la fédération.

417.        D'autre part, en décembre 2002, la loi sur les langues des peuples de la Fédération de Russie a été complétée par une disposition (article 3, paragraphe 6) qui imposant l'usage d'un alphabet fondé sur les caractères cyrilliques pour les langues officielles de la Fédération de Russie et de ses républiques, sauf exception prévue par une loi fédérale. Il s'ensuit que, contrairement à l'avis du Comité consultatif237, le droit des républiques d'adopter une langue officielle pouvant être utilisée parallèlement à la langue russe, énoncé à l'article 68, paragraphe 2, de la Constitution de la Fédération de Russie, n'est pas considéré comme entraînant le droit de choisir l'alphabet qui sert à écrire la langue en question.

418.        Le 16 novembre 2004, la Cour constitutionnelle de la Fédération a jugé que l'usage obligatoire des caractères cyrilliques était conforme à la Constitution car il respecte les principes établis de l'organisation fédérale, au premier rang desquels le principe de l'unité de l'Etat, et les dispositions de la constitution prévoyant que les éléments fondamentaux de la politique fédérale dans le domaine de la culture et du domaine du développement du pays, notamment la politique des langues officielles, la protection des droits de l'homme et des libertés, sont régis par les lois fédérales.

419.        Nous invitons donc les autorités de la Fédération à tenir compte des commentaires ci-dessus et à aligner la législation pertinente sur les normes du Conseil de l'Europe.

420.        Le 13 septembre 2004, un nouveau ministère du Développement régional a été créé par décret présidentiel. Son domaine de compétence englobe notamment les «relations interethniques» et la «protection des droits des minorités nationales»238. Nous accueillons avec satisfaction le rétablissement au sein de l'exécutif fédéral d'un organe spécialisé s'occupant des minorités nationales239 et nous espérons que son action contribuera à améliorer la situation en matière de protection des droits des minorités dans la Fédération de Russie.

      Populations indigènes

421.        A propos du premier rapport de la Russie soumis conformément à la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, le Comité consultatif a déclaré regretter profondément qu'il soit particulièrement difficile de garantir l'égalité pleine et effective dans le cas des personnes appartenant à un grand nombre des peuples autochtones du nord numériquement peu importants qui connaissent toujours de multiples problèmes dans les domaines économique, social, politique et culturel, à tel point que leur situation n'est pas compatible avec l'article 4 de la Convention-cadre. Le Comité consultatif a estimé que la marginalisation continue dont elles sont victimes n'est pas étrangère à la situation sanitaire très préoccupante de ces populations. De plus, le faible niveau d'instruction de ces populations, associé à un accès de plus en plus limité à leurs moyens d'existence traditionnels, est à l'origine de taux de chômage anormalement élevés.

422.        Nous tenons à mentionner aussi le projet de résolution déposé devant l'Assemblée en octobre 2004 sur la situation des populations finno-ougriennes et samoyèdes, qui exprime de graves préoccupations concernant le fait que l'effectif de ces population ont diminué considérablement au cours des dernières années, tandis que l'usage de leurs langues reculait dans la Fédération de Russie. D'après les chiffres du recensement fédéral de 2002, l'effectif total de la population finno-ougrienne a connu un recul spectaculaire depuis le recensement de 1998, tombant de 3,3 millions à 2,7 millions. Le nombre de personnes parlant les langues ouraliennes est tombé en dessous de 2 millions.

423.        Le 22 février 2005, un groupe de responsables politiques et de personnalités américains, britanniques, suédois, finlandais, estoniens et hongrois a appelé les autorités de la Fédération à cesser de porter atteinte aux droits politiques et culturels des Maris, une communauté nationale de 600 000 membres. Ils ont demandé instamment au gouvernement de mettre fin immédiatement à la vague croissante de discrimination et de persécution dont fait l'objet la communauté mari dans la République de Mari El, et à engager une enquête sur l'agression dont à été victime M. Vladimir Kozlov, un des principaux leaders de cette communauté, qui, roués de coups au début de ce mois, a failli en perdre la vie. En mars 2005, la Commission européenne a elle aussi exprimé son inquiétude à la suite d' informations faisant état d'une répression à l'encontre des personnalités d'opposition, des journalistes et des responsables indigènes de la République de Mari El, qui fait partie de la Fédération de Russie240.

424.        Nous souhaitons réitérer l'avis du Comité consultatif qui a estimé que les autorités russes devraient accorder une plus grande attention à la situation de ces populations et, notamment, prendre des mesures plus efficaces pour assurer l'application de la nouvelle législation relative à leurs droits241.

      Violence et intolérance racistes

425.        Outre les anomalies du régime juridique, les ONG de défense des droits de l'homme font état de violations fréquentes des droits des minorités nationales par les forces de l'ordre et d'un niveau élevé d'intolérance dans la société242. La police a couramment recours au profilage racial; les cibles les plus fréquentes comprennent les Roms et les populations originaires du Caucase. La discrimination pour des motifs de race et d'appartenance ethnique est très fréquente dans de nombreux domaines, notamment l'accès à l'éducation, aux services de santé et au logement social ainsi qu'à l'enregistrement local de la résidence, l'obtention de documents d'identité et des avantages qui s'y rattachent et l'acquisition de la citoyenneté de la Fédération. Nous nous inquiétons de la fréquence élevée des agressions violentes contre les minorités ethniques et religieuses et contre les étrangers, commises notamment par les «skinheads» et les néo-nazis243.

426.        A la suite des événements de Beslan, on a signalé aussi une recrudescence des agressions contre les Tchétchènes et autres Caucasiens du Nord par des «skinheads» et des membres d'autres groupes extrémistes. Des «skinheads» ont agressé à plusieurs reprises des personnes originaires du Caucase dans le métro de Moscou. Des cafés appartenant à des Caucasiens ont été incendiés à Moscou et à Ekaterinbourg; le propriétaire d'un des cafés a été assassiné. Une femme portant le voile a été agressée à Vladivostok par une personne qui a crié «Voilà pour Beslan!» Le 26 octobre 2004, à Moscou, un groupe de jeunes a agressé (volé, poignardé et battu) deux personnes originaires du Caucase, qui ont été hospitalisées. Le 14 octobre 2004, 24 heures durant, la Russie (dans la région de Moscou, à Tchita et à Saint-Pétersbourg) a été le théâtre d'une série d'agressions contre les étrangers. Trois personnes sont décédées (un Ouzbek, un Chinois et un Vietnamien) et une a été blessée. Le chef du Département des enquêtes pénales, M. Vladimir Gordienko, a déclaré que les citoyens russes sont de plus en plus souvent victimes des étrangers et que l'origine ethnique n'importe pas dans le cas des auteurs d'agressions contre des non-Russes. La plupart de ces agressions ne font pas l'objet d'enquêtes satisfaisantes de la part des forces de l'ordre244.

427.        Malheureusement, l'étiquette «personne de nationalité caucasienne», qui désigne tout un ensemble de personnes dont les Tchétchènes, les Ingouches, les Ossètes, les Daghestanais, les Géorgiens, les Azéris, etc., est toujours utilisée. Outre les «personnes de nationalité caucasienne» et les «Tsiganes», les Juifs, les Tadjiks et quelques autres peuples originaires d'Asie centrale sont aussi la cible de comportements et d'actes racistes. Alors que la plupart des régions de la Fédération de Russie ont pour pratique locale courante d'appliquer des stéréotypes négatifs à l'égard d'un groupe ou d'un autre, suivant le moment, les groupes mentionnés plus haut sont désavantagés dans tout le pays et les comportements racistes envers eux sont tenaces et profondément ancrés. Ce phénomène

inquiétant est aussi signalé dans le récent rapport sur la Russie du commissaire aux droits de l'homme du CdE, qui fait état d'un «sentiment de méfiance, sinon de haine ou de mépris total, envers les personnes originaires du Caucase».

428.        La présidente de la Commission présidentielle pour les droits de l'homme, Mme Ella Pamfilova, a déclaré que la «tolérance» au niveau des autorités fédérales n'avait jamais été meilleure mais que l'atmosphère de «xénophobie quotidienne» est «très mauvaise». «C'est le problème d'une société irresponsable où il n'y pas d'aversion pour les actes de ce type», a-t-elle déclaré. «L'extrémisme dans la vie quotidienne est largement répandu, surtout parmi les petits fonctionnaires». Mme Pamfilova a demandé aux agents des forces de l'ordre – et surtout aux procureurs – d'adopter une attitude plus rigoureuse et plus «radicale» envers l'extrémisme245.

429.        Mme Lioudmila Alexeïeva, présidente du Groupe Helsinki de Moscou, a donné une analyse différente: si l'extrémisme progresse, a-t-elle dit, ce n'est pas en raison d'une «sorte de xénophobie terrible» parmi les Russes ordinaires, mais parce qu'il est «encouragé et renforcé d'en haut, si ce n'est sous la direction du Président lui-même, du moins en raison des déclarations irresponsables de nombreux dirigeants sur la question de la nationalité». Mme Alexeïeva a cité l'exemple du gouverneur de Krasnodar, M. Alexander Tkatchev, qui a promis il y a quelques mois de chasser de sa région «les étrangers et les dissidents» (New Moscow Times, septembre 2004).

      Le sort des Roms

430.        Les recherches récentes du Centre européen pour les droits des Roms ont montré que les violences policières contre les Roms de Russie sont très fréquentes mais rarement dénoncées auprès des autorités. Les brutalités et les violences policières de la part des membres des services répressifs sont un problème général dans la Fédération de Russie depuis quelques années, et elles inquiètent fortement les organisations internationales et russes de défense des droits de l'homme. Les Roms et plusieurs autres minorités ethniques sont particulièrement vulnérables. Le profilage racial des Roms par la police, le ciblage des quartiers roms pour des opérations de police injustifiées et la persistance de l'application de stéréotypes raciaux aux Roms, considérés par les membres des forces de l'ordre comme des délinquants et des trafiquants de drogue, montrent bien les préjugés raciaux qui interviennent dans le traitement des Roms par les agents de l'Etat. Les suspects roms sont torturés et maltraités durant leur détention dans les locaux de la police et, dans certains cas, les violences physiques ont entraîné la mort des intéressés. Les quartiers roms font, à toute heure du jour de la nuit, l'objet de descentes de police, notamment de la part des unités spéciales chargées de lutter contre le trafic des stupéfiants. L'enlèvement de membres des familles roms et la demande d'une rançon en échange de leur libération est une forme d'abus largement répandue246.

431.        Nous appelons donc les autorités de la Fédération à prendre des mesures urgentes pour lutter contre les violences à motivation raciste, à assurer la protection effective des minorités contre toute forme de harcèlement et de discrimination et à faire en sorte que les personnes coupables d'abus de ce type soient poursuivies, quel que soit leur statut social. Nous sommes profondément préoccupés de constater que les forces de l'ordre refusent fréquemment de reconnaître la motivation raciste de telles agressions et les considèrent comme étant l'œuvre «de voyous, d'individus asociaux». Cette pratique devrait être abandonnée car elle contribue à développer un climat d'impunité pour l'intolérance raciale et la violence247.

432.        Les Turcs meskhètes sont un groupe majoritairement musulman qui a été déplacé de force par l'ex-régime soviétique, en 1944, du Sud-Ouest de la Géorgie vers les républiques d'Asie centrale. En 1989-1990, à la suite d'affrontements ethniques, de nombreux Turcs meskhètes ont été contraints de quitter l'Ouzbékistan et de chercher refuge dans différentes parties de la Russie. La grande majorité des plus de 15 000 Meskhètes résidant sur le Territoire (kraï) de Krasnodar sont privés des droits, notamment du droit à la citoyenneté de la Fédération, sous l'effet de la législation et des pratiques discriminatoires en vigueur sur le Territoire de Krasnodar, qui sont contraires à la loi fédérale248. Seulement 4 000 Meskhètes ont pu acquérir le citoyenneté de la Fédération (mais pas dans la région de Krasnodar) et un millier seulement étaient enregistrés dans le Territoire de Krasnodar et ont par conséquent obtenu un statut juridique249.

433.        Dans sa Résolution 1428 (2005)250 l'Assemblée note que la situation de plusieurs milliers de Turcs meskhètes qui vivent dans le territoire de Krasnodar est fort préoccupante. Comme l'enregistrement de la résidence leur est refusé et qu'ils ne sont pas reconnus comme citoyens de la Fédération de Russie, ils sont privés des droits civils, politiques, économiques et sociaux fondamentaux. «Cette situation, qui perdure jusqu'à aujourd'hui, est inacceptable. Elle est d'autant plus préoccupante que l'administration régionale recourt délibérément à des pratiques discriminatoires à l'encontre des Turcs meskhètes».

434.        Les autorités des Etats-Unis ont lancé un programme de migration pour la population meskhète. 3 528 familles (soit environ 10 250 personnes) ont demandé à entrer aux Etats-Unis251, 1 690 familles (environ 4 950 personnes) ont obtenu le statut de réfugiés et 189 personnes ont déjà émigré aux Etats-Unis.

435.        A partir de septembre 2004, les huissiers de justice et les fonctionnaires du Territoire de Krasnodar ont commencé à exiger le paiement de toutes les amendes administratives infligées aux Turcs meskhètes pour les infractions au régime du passeport durant les dernières années. Les autorités locales continuent à refuser d'enregistrer les Turcs meskhètes dans le kraï de Krasnodar et, simultanément, la police vérifie les enregistrements et inflige des amendes aux personnes qui ne sont pas enregistrées.

436.        Le 7 octobre 2004, tôt le matin, une famille de Turcs meskhètes du kraï de Krasnodar qui participe au programme de migration des Etats-Unis a été agressée. Deux hommes armés ont pénétré dans la maison, battu la mère et tiré sur le père, qui a été blessé; les enfants se sont enfuis par la fenêtre. Les agresseurs portaient des brassards où figurait l'inscription «Patrouille des Cosaques»252 Selon le Comité des droits de l'homme de Novorossisk, dans l'espace des 15 dernières années, aucune des affaires d'agressions commises contre des Turcs meskhètes n'a été portée devant les tribunaux. Les plaintes adressées aux autorités fédérales sont renvoyées aux organes répressifs régionaux pour examen.

437.        Dans certaines écoles de la région, les enfants meskhètes font l'objet d'une ségrégation ethnique dans des classes distinctes (par exemple dans le district de Crimée, selon le Comité des droits de l'homme de Novorossisk).

438.        Nous considérons, comme le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe M. Gil Robles, que la situation actuelle de la communauté meskhète, due au fait que les autorités de la région de Krasnodar continuent arbitrairement et illégalement à refuser la citoyenneté de la Fédération aux Turcs meskhètes, est véritablement désastreuse. Nous demandons par conséquent aux autorités russes de donner aux Meskhètes qui souhaitent obtenir la citoyenneté et demeurer à leur lieu actuel de résidence la possibilité de le faire; de renforcer la collaboration avec les autorités géorgiennes pour obtenir le transfert en Géorgie de l'effectif de population meskhète que les autorités géorgiennes sont en mesure d'accueillir253; de mettre un terme aux pratiques de discrimination ethnique et d'enquêter sur tous les cas d'exactions à l'encontre des Meskhètes et de soumettre leurs auteurs à la justice. Les recommandations figurant dans la Résolution 1428 (2005) de l'Assemblée devraient aussi être pleinement prises en considération.

439.        Nous demandons, de plus, instamment aux autorités de la Fédération de Russie de ratifier la Convention européenne sur la nationalité (STCE n° 166), que ce pays a signée le 6 novembre 1997. Dans sa Recommandation 1667 (2004), l'Assemblée déplorait que la Russie n'ait pas ratifié la Convention européenne sur la nationalité; or, cette convention comporte des dispositions spécifiques sur la non-discrimination ainsi que sur la prévention de l'apatridie.

Annexe 1. Programmes des visites des co-rapporteurs en Fédération de Russie


COMMISSION POUR LE RESPECT DES OBLIGATIONS ET DES ENGAGEMENTS DES ETATS MEMBRES DU CONSEIL DE L'EUROPE

Programme de la visite des co-rapporteurs à

KHABAROVSK ET VLADIVOSTOK

Co-rapporteurs:       M. David ATKINSON (Royaume-Uni, GDE)

      M. Rudolf BINDIG (Allemagne, SOC)

Secrétariat:       Mme Ivi-Triin ODRATS

Dimanche 26 octobre 2003

19h35        Arrivée de M. Bindig et de Mme Odrats à l'aéroport de Moscou-Cheremetievo

20h00       Rencontre avec MM. A.F. BECHTOLD et M. KUPERMAN, Présidents d'organisations des droits de l'homme à Khabarovsk et Ioujno-Sakhalinsk

20h20       Arrivée de M. Atkinson à l'aéroport de Moscou

Lundi 27 octobre 2003

00h20        Départ pour Khabarovsk

15h05        Arrivée à Khabarovsk

15h30       Enregistrement à l'hôtel «Parous»

16h00       Briefing sur le Programme

20h00       Dîner

Mardi 28 octobre 2003

8h30 – 9h15       Petit-déjeuner avec M. O. SUBBOTENKO, Centre d'information du public de Khabarovsk

9h30 – 12h30        Forum des ONG

9h30 – 10h15       Atelier # 1: Questions relatives aux droits de l'homme

10h30 – 11h15       Atelier # 2: Questions sociales, droits des enfants et des femmes

11h30 – 12h15       Atelier # 3: Questions écologiques

12h30 – 14h00       Rencontre avec M. A.B. LEVINTAL, Ministre régional du développement économique du territoire de Khabarovsk (Khabarovskii Krai)

14h00 – 14h50       Rencontre avec des représentants de la presse autour du thème de la liberté d'expression

15h00 – 15h50       Rencontre avec M. S. A. GVOZDEV, Vice-Président du tribunal du territoire de Khabarovsk

16h00 – 16H50       Rencontre avec M. V.A. GONTCHAROV, Directeur adjoint de la Direction des affaires intérieures du territoire de Khabarovsk

17h00 – 18h00       Rencontre avec le représentant du ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie à Khabarovsk

19h30 – 21h30       Dîner informel avec M. Yuichi KUSUMOTO, Consul Général du Japon

Mercredi 29 octobre 2003

8h00 – 8h40        Petit-déjeuner

9h00 – 9h50       Rencontre avec M. A.A. PODLASENKO, Substitut du Procureur général du territoire de Khabarovsk

10h00 – 11h00       Rencontre avec Mme E.V. NAJEKINA, Directrice adjointe de la Direction générale du ministère de la Justice de la Fédération de Russie dans le territoire de Khabarovsk

11h00 – 12h00       Rencontre avec M. V.A. TREGUBOV, Adjoint au Représentant plénipotentiaire du Président de la Fédération de Russie dans le District fédéral de l'Extrême-Orient

12h30 – 14h00       Déjeuner

14h00 – 15h30       Visite du SIZO (maison d'arrêt) n° 1

16h00 – 17h30       Visite du centre de détention n° 12

18h20 – 19h20       Rencontre avec M. A.A. CHETILOV, Président de la Commission électorale du territoire de Khabarovsk

20h00       Départ pour Vladivostok par le train de nuit

Jeudi 30 octobre 2003

8h45        Arrivée à Vladivostok

      Réception organisée par M. N.A. KOROLEV, Vice-Gouverneur du Territoire maritime (Primorskii kraï)

9h15       Enregistrement à l'hôtel Hyundai

10h30 – 11h50       Forum des ONG

12h00 – 12h45       Réformes administratives:

12h45 – 14h00       Déjeuner d'affaires avec M. N.A. KOROLEV

14h15 – 15h15       Rencontre avec des représentants des principaux partis de l'assemblée législative du Territoire maritime (Primorskii kraï)

15h30 – 16h15       Rencontre avec M. S.A. SOPTCHUK, Président de l'assemblée législative du Territoire maritime (Primorskii kraï)

16h45 – 17h30       Réforme de la Prokuratura:

      Rencontre avec M. VASSILENKO, Procureur du Territoire maritime (Primorski kraï)

18h00 – 19h00       Liberté d'expression:

      Rencontre avec des représentants de la presse indépendante

19h30       Dîner avec M. BROCKMANN, Consul Honoraire d'Allemagne

Vendredi 31 octobre 2003

8h30        Petit-déjeuner à l'hôtel (éventuellement petit-déjeuner de travail avec des représentants à Vladivostok d'organisations internationales à but non lucratif – ISAR, IREX, USAID, Fondation Eurasia)

9h30 – 12h30       Réforme de la justice, liberté de conscience et discrimination à l'encontre des églises et des autres organisations religieuses

      Président du tribunal du Territoire maritime; Directeur du département chargé d'organiser les activités des assesseurs non juristes de l'administration du Territoire maritime (Primorskii kraï); représentants de la direction générale du ministère de la Justice de la Fédération de Russie dans le Territoire maritime; membres du Barreau; département de la communication et de l'information du public de l'administration du Territoire maritime

9h50 – 10h30       Organisation des élections législatives et présidentielles:

      M. S. GNJAZEV, Président de la Commission électorale du Territoire maritime et Mme N. VOLOKHNINA, Présidente de la Commission électorale de la ville de Vladivostok

10h45 – 11h30       Réformes administratives:

      Directeurs des administrations des villes de Vladivostok, Artem, Oussourinsk et Nakhodka

11h45 – 12h30       Rencontre avec le Chef des forces de police du Territoire maritime

12h40 – 14h00       Déjeuner d'affaires avec le Président et des membres de l'Assemblée législative du Territoire maritime

14h30 – 17h00       Visite du SIZO-1 (maison d'arrêt), GUIN du Territoire maritime (Primorskii kraï)

      Direction générale de l'exécution des peines du ministère de la Justice de la Fédération de Russie dans le Territoire maritime

17h30 – 18h30       Conférence de presse

19h30       Dîner

Samedi 1er novembre 2003

10h45       Départ de l'hôtel

01h30        Départ pour Moscou

04h10        Arrivée à Moscou

      Rencontre avec M. PASKO, journaliste

Après-midi       Départ de la délégation


COMMISSION POUR LE RESPECT DES OBLIGATIONS ET DES ENGAGEMENTS DES ETATS MEMBRES DU CONSEIL DE L'EUROPE

Programme de la visite des co-rapporteurs à

EKATERINBOURG (oblast de Sverdlovsk) et KAZAN (République du Tatarstan)

9-14 octobre 2004

Membres de la délégation:

Co-rapporteurs: M. David ATKINSON (Royaume-Uni, GDE)

Secrétariat:        M. Matjaz GRUDEN, Secrétaire de la Commission de suivi de l'APCE

Accompagnés par M. Valery GREBENNIKOV, membre de la délégation de la Fédération de Russie auprès de l'APCE, Premier vice-président de la Commission de la Douma d'Etat sur le droit civil, pénal, arbitral et procédural

EKATERINBOURG

Samedi 9 octobre

21.10

Arrivée de la délégation à Ekaterinbourg par le vol Lufthansa LH3204

Délégation accueillie par M. Nikolai Voronin (Président de la Douma de l'oblast, chambre basse de l'assemblée législative régionale), Mme Tatiana Merzlyakova (Médiatrice), M. Viktor Kokcharov (Ministre des Relations économiques internationales et extérieures de l'oblast de Sverdlovsk)

21.30-21.50

Transfert et installation à l'hôtel Premier.

22.00

Dîner avec Mme Tatiana Merzlyakova, Médiatrice de l'oblast de Sverdlovsk

 

Dimanche 10 octobre

 

9.00

Petit-déjeuner

10.00-11.00

Rencontre des ONG des droits de l'homme (Musée d'histoire de la jeunesse de l'Oural, 32 rue Karl Liebknecht)

11.10-12.00

Rencontre avec les représentants de minorités nationales (Musée d'histoire de la jeunesse de l'Oural, 32 rue Karl Liebknecht)

12.10-12.50

Rencontre avec les représentants d'organisations religieuses (Musée d'histoire de la jeunesse de l'Oural, 32 rue Karl Liebknecht)

13.00-14.00

Déjeuner avec M. Nikolai Voronin, Président de la Douma de l'oblast de Sverdlovsk

14.10-15.00

Rencontre avec les représentants de la presse (Musée d'histoire de la jeunesse de l'Oural, 32 rue Karl Liebknecht)

15.10-16.00

Rencontre avec les représentants des partis politiques (Musée d'histoire de la jeunesse de l'Oural, 32 rue Karl Libknecht)

16.20-17.20

Rencontre avec Mme Tatiana Merzlyakova, Médiatrice de l'oblast de Sverdlovsk

(résidence du Gouverneur de l'oblast de Sverdlovsk, 21/23 rue Gorki)

17.30-17.50

Transfert à la maison d'arrêt pour mineurs (SIZO n°1) d'Ekaterinbourg (2 rue Repine)

17.50-18.50

Visite de la maison d'arrêt pour mineurs (SIZO n°1) d'Ekaterinbourg

19.00

Transfert à l'hôtel

Lundi 11 octobre

08.00-08.45

Petit-déjeuner

09.00-09.45

Rencontre avec M. Eduard Rossel, Gouverneur de l'oblast de Sverdlovsk (résidence du Gouverneur de l'oblast de Sverdlovsk, salle de réunion, 21/23 rue Gorki)

10.00-11.00

Rencontre avec M. Petr Latychev, Envoyé présidentiel dans le district fédéral de l'Oural, et M. Viktor Baidukov, Inspecteur fédéral en chef de l'oblast de Sverdlovsk (3 place Oktiabrskaïa)

11.10-11.50

Bref tour de la ville, visite de l''Eglise sur le Sang' (lieu d'exécution de la famille du tsar)

12.00-12.40

Rencontre avec M. Arkadii Tchernetskii, Maire d'Ekaterinbourg (Hôtel de ville, 24a rue Lenine)

13.00-13.50

Déjeuner avec M. Vladimir Kulik, Maire adjoint d'Ekaterinbourg

14.00-14.30

Rencontre avec M. Aleksei Vorobiev, Chef du gouvernement de l'oblast de Sverdlovsk (Siège du gouvernement, 1 place Oktiabrskaïa)

14.30-15.00

Rencontre avec M. Youri Osintsev, Président de la Chambre des représentants de l'Assemblée législative de l'oblast de Sverdlovsk (chambre haute), M. Nikolai Voronin, Président la Douma de l'oblast de l'Assemblée législative de l'oblast de Sverdlovsk (chambre basse), et des députés de l'Assemblée législative de l'oblast de Sverdlovsk

15.10-15.40

Rencontre avec M. Boris Kuznetsov, Procureur de l'oblast de Sverdlovsk (Bureau du Procureur de l'oblast, 21 rue Moskovskaïa)

15.45- 16.45

Rencontre avec:

    - M. Vladimir Zadiora, Président de la Cour constitutionnelle de l'oblast de Sverdlovsk (cour constitutionnelle locale)

    - M. Alekseï Dementiev, Premier vice-président du tribunal de l'oblast;

    - M. Valerii Etreiev, Président du tribunal militaire du commandement de Privoljsk-Oural;

    - M. Vladimir Vorotnikov, Directeur du département général des Affaires intérieures de l'oblast de Sverdlovsk;

    - M. Vladimir Nifontov, Directeur du département des Migrations au sein du département général des Affaires intérieures de l'oblast de Sverdlovsk;

    - M. Gennadii Novosselov, Directeur adjoint du département général du ministère de la Justice de l'oblast de Sverdlovsk;

    - M. Vladimir Smirnov, Président du Barreau de l'oblast de Sverdlovsk, Mme Natalia Sukhareva, Présidente del'Association des avocats de l'oblast de Sverdlovsk

(Cour constitutionnelle de l'oblast de Sverdlovsk, 19 rue Pouckine)

16.45-17.15

Conférence de presse

17.15-18.00

Retour à l'hôtel. Transfert à l'aéroport Koltsovo

18.40

Départ pour Moscou par le vol Ural Airlines U6 266

KAZAN

Lundi 11 octobre

23.55

Arrivée à Kazan par le vol Siberian Airlines S7 006 en provenance de Moscou (aéroport international de Kazan)

Délégation accueillie par M. Iouriiy Kamaltynov (Vice-Président du Conseil d'Etatl) et M. Rachyt Vaguissov (Médiateur)

00.00-00.30

Transfert et installation à l'hôtel Guiseppe (15/25 rue Kremlevska)

Mardi 12 octobre

8.30

Petit-déjeuner

9.00-9.50

Rencontre avec des ONG des droits de l'homme

(salle de conférence de l'hôtel Guiseppe, 15/25 rue Kremlevskaïa)

9.55-10.20

Visite de la cathédrale Petropavlovsk

Délégation accueillie par l'archevêque de Kazan et du Tatarstan

10.30-11.50

Rencontre avec les représentants de minorités nationales (Maison de l'amitié entre les peuples, 23 rue Ostrovski)

12.00-12.20

Visite de l'Université islamique russe (9 rue Gazova)

Délégation accueillie par Gusman-khazrat Ickhakov, mufti du Tatarstan

12.30-13.50

Rencontre avec les représentants d'organisations religieuses (Centre culturel national «Kazan»)

14.00-14.50

Déjeuner avec M. Kamil Ickhakov, Chef de l'administration de Kazan (Centre culturel national «Kazan»)

14.50-15.50

Rencontre avec des partis politiques (Centre culturel national «Kazan»)

16.00-16.35

Rencontre avec M. A.G. Gataulin, Président par intérim de la Cour constitutionnelle de la République du Tatarstan

16.40-16.55

Visite de la grande salle nationale de concert, nommée en l'honneur de S. Saidachev

17.00-17.40

Rencontre avec les membres du Barreau de la République du Tatarstan

18.00-19.00

Rencontre avec les médias (Agence de communication de la République du Tatarstan «Tatmedia», 3 rue Akademitcheskaïa)

19.30

Dîner avec Mme Rimma Ratnikova, Vice-Présidente du Conseil d'Etat, et M. Rachyt Vaguissov, Médiateur de la République du Tatarstan (Restaurant Botchka)

Lundi 13 octobre

8.20

Petit-déjeuner

9.00-9.55

Rencontre avec M. Kamil Amirov, Procureur de la République du Tatarstan, et M. M.K. Fedorov, Substitut au procureur militaire de la garnison de Kazan (14 rue Kremlevskaïa)

10.00-10.55

Rencontre avec M. Gilasov, Premier vice-président de la Cour suprême de la République du Tatarstan, et M. E.E. Safonov, Vice-Président du tribunal militaire de la garnison de Kazan (12/20 rue Kremlevskaïa)

11.00-11.40

Rencontre avec M. R.Z. Timerzianov, ministre par intérim des Affaires intérieures de la République du Tatarstan (19 rue Dzerjinski)

11.50-12.40

Visite de l'établissement pénitentiaire 16/2 (98 rue Bolchaïa)

Délégation accueillie par M. Daufit Khamadichin, Directeur du Département de l'exécution des peines du ministère de la Justice de la République of Tatarstan

12.50-13.40

Déjeuner avec M. Rachyt Vagisov, Médiateur de la République du Tatarstan (Restaurant Medved)

13.50-14.30

Rencontre avec M. Farid Mukhametchin, Président du Conseil d'Etat de la République du Tatarstan, ainsi qu'avec des responsables de groupes de députés et des présidents de commissions (1 place de la Liberté)

14.40-15.40

Rencontre avec M. L.V.Giltchenko, Assistant du Représentant plénipotentiaire du Président dans le District fédéral de Privoljsk (Volga), et M. Marsel Galimardanov, Inspecteur fédéral en chef de la République du Tatarstan (61 rue Karl Marx)

15.45-15.55

Visite du Kremlin de Kazan, de la mosquée Kul-Sharif, de la cathédrale de l'Annonciation, du Palais présidentiel

16.00-17.00

Rencontre avec M. Mintimer Chaimiev, Président de la République du Tatarstan (Kremlin, résidence présidentielle, salle de réunion)

17.00-17.30

Conférence de presse

17.30-18.15

Rencontre avec M. Rachyt Vagisov, Médiateur de la République du Tatarstan (Bureau du médiateur)

18.30-19.00

Interview «en direct» des co-rapporteurs à la radio «L'Echo de Moscou-Kazan»

19.10

Visite du centre culturel Piramida, dîner avec Mme Rimma Ratnikova, Vice-Présidente du Conseil d'Etat,et M. Rachyt Vagisov, Médiateur de la République du Tatarstan

Jeudi 14 octobre

6.00

Petit-déjeuner

6.30-7.00

Transfert à l'aéroport international de Kazan

7.20

Départ pour Moscou par le vol Siberian Airlines S7 005


COMMISSION POUR LE RESPECT DES OBLIGATIONS ET DES ENGAGEMENTS DES ETATS MEMBRES DU CONSEIL DE L'EUROPE

Programme de la visite des co-rapporteurs à

MOSCOU (Fédération de Russie)

1-7 novembre 2004

Membres de la délégation:

Co-rapporteurs: M. David ATKINSON (Royaume-Uni, GDE)

Secrétariat:        Mme Caroline RAVAUD, Directrice du secrétariat de la Commission de suivi de l'APCE

Lundi 1er novembre

16.30

Arrivée de M. ATKINSON à Moscou (Domodedovo) par le vol British Airwaves BA 872

18.05

Arrivée de Mme RAVAUD et de M. KOTLYAR à Moscou (Cheremetievo) par le vol Lufthansa LH 3186

18.50

Arrivée de M. BINDIG à Moscou (Cheremetievo) par le vol Aeroflot SU 266

19.30

Transfert et installation à l'hôtel Metropol

Mardi 2 novembre

8.00

Petit-déjeuner

8.30-9.30

Rencontre avec des ONG des droits de l'homme

10.00-11.30

Rencontre avec M. KALININ, ministre délégué de la Justice, M. FILIMONOV, Directeur adjoint de la Direction générale de l'exécution des peines, M. TARAKANOV, Directeur du département de contrôle du respect de la loi et des droits de l'homme dans le système pénitentiaire, M. JAFIAROV, Directeur par intérim du département des organisations publiques et religieuses

12.00-13.00

Rencontre avec M. YUNOSH, Directeur adjoint du service fédéral des migrations

13.30-14.30

Rencontre avec M. GUJINSKI, Directeur du département général de la coopération militaire internationale du ministère de la Défense, M. BOGATYRIOV, Directeur du département général de l'action éducative

15.00-16.00

Rencontre avec M. OUCHAKOV, Directeur adjoint du service de la sécurité fédérale (FSB), M. OLECHKO, Directeur adjoint du département d'enquête du FSB, M. MAKOV, Directeur de la maison d'arrêt de Lefortovo

16.30-17.30

Rencontre avec M. KEKHLEROV, Substitut au procureur, et M. AROUTIUNIAN, Substitut au procureur militaire

18.15-19.15

Rencontre avec M. MOKRY, Président de la Commission de la Douma d'Etat sur l'autonomie locale

19.40

Rencontre avec Mme MELNIKOVA, Présidente de l'Union des comités de mères de soldats

Mercredi 3 novembre

09.45-11.00

Rencontre privée des co-rapporteurs avec M. PRIKHODKO, aide du Président de la Fédération de Russie pour les affaires étrangères

11.30-12.30

Rencontre avec M. SEMENIAKO, Président de la chambre fédérale des avocats, M. GALOGANOV, Président de l'Union fédérale des avocats, M. MIRZOEV, Président de l'association des avocats russes

12.30-13.00

Déjeuner

13.30-14.30

Rencontre à l'hôtel de ville avec M. CHANTSEV, Maire adjoint

15.00-16.00

Rencontre avec M. LEBEDEV, Président de la Cour suprême de la Fédération de Russie, M. SIDORENKO, Président du Conseil des juges, M. GUSEV, Directeur Général du département judiciaire

16.30-17.30

Rencontre avec M. ZORKIN, Président de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie

19.30-21.00

Rencontre avec les représentants d'organisations religieuses (Institut de religion et de droit)

Jeudi 4 novembre

8.00

Petit-déjeuner

10.15-10.45

Rencontre avec M. BOOS, Vice-Président de la Douma d'Etat

11.00-11.45

Rencontre avec M. Vladimir JIDKIKH, Premier vice-président de la Commission de la Douma d'Etat sur les questions fédérales et la politique régionale

12.00-12.45

Rencontre avec M. SLUTSKI, Premier vice-président de la Commission de la Douma d'Etat sur les affaires internationales, membre de la délégation de la Fédération de Russie auprès de l'APCE

13.00-13.45

Rencontre avec M. GREBENNIKOV, Premier vice-président de la Commission de la Douma d'Etat sur le droit civil, pénal, arbitral et procédural, membre de la délégation de la Fédération de Russie auprès de l'APCE

14.00-15.30

Déjeuner de travail avec MM. MARGELOV et GREBENNIKOV, membres de la délégation de la Fédération de Russie auprès de l'APCE

16.00-17.00

Rencontre avec M. KAZAKOV, Président de la Commission du Conseil fédéral sur les questions fédérales et la politique régionale, MM. VECHNIAKOV et PLOTNIKOV, membres de la commission

17.10-18.00

Rencontre avec M. CHARANDIN, Président de la Commission du Conseil fédéral sur la législation constitutionnelle, membre de la délégation de la Fédération de Russie auprès de l'APCE

19.30

Dîner organisé par M. Vincent PIKET, Président adjoint de la délégation de la Commission européenne en Russie, en présence d'ambassadeurs de l'Union européenne – M. KRIEGER, Ambassadeur du Luxembourg, M. DE BOER, Directeur adjoint de la mission des Pays-Bas, M. BOWERS, Premier secrétaire de l'ambassade du Royaume-Uni, M. MEIER-KLODT, Conseiller auprès de l'ambassade d'Allemagne

Vendredi 5 novembre

10.00-11.30

Rencontre avec M. PARKHOMENKO, premier vice-président du gouvernement de l'oblast de Moscou, M. KARAKHANOV, ministre des relations économiques extérieures, MM. TARANENKO et BUSSOV, Présidents des commissions de la Douma de l'oblast de Moscou

12.00-13.00

Rencontre avec M. FEDOROV, adjoint de l'Envoyé présidentiel dans le District fédéral central

14.00-15.00

Rencontre avec Mme PAMFILOVA, Présidente de la Commission des droits de l'homme auprès de la Présidence de la Fédération de Russie

15.30-16.30

Rencontre avec M. LOUKIN, Médiateur de la Fédération de Russie, et M. KRYJOV, Médiateur de l'oblast de Moscou

17.30

Conférence de presse (agence de presse «RIA Novosti»)

Samedi 6 novembre

9.00-10.45

Rencontre avec les ONG de la presse (hôtel Metropol)

11.00-12.45

Rencontre avec les ONG des droits de l'homme (hôtel Metropol)

17.30

Départ de M. BINDIG (Domodedovo, Swiss Airlines LX 1327)

Dimanche 7 novembre

14.35

Départ de Mme RAVAUD et de M. KOTLIAR (Cheremetievo, Lufthansa LH 3183)

17.40

Départ de M. ATKINSON (Domodiedovo, British Airways BA 873)

Annexe 2. Liste des documents de l'Assemblée relatifs à la République tchétchène

Doc 7230 Rapport sur la demande d'adhésion de la Russie à la lumière de la situation en Tchétchénie (Rapporteur: M. MÜHLEMANN, Suisse, Groupe libéral, démocratique et réformateur)

Doc 7231 Avis sur la demande d'adhésion de la Russie à la lumière de la situation en Tchétchénie (Rapporteur: M. BINDIG, Allemagne, Groupe socialiste)

Résolution 1055 (1995) Demande d'adhésion de la Russie à la lumière de la situation en Tchétchénie (adoptée par l'Assemblée le 2 février 1995, 7e séance)

Directive n° 506 (1995) Demande d'adhésion de la Russie à la lumière de la situation en Tchétchénie (adoptée par l'Assemblée le 2 février 1995, 7e séance)

AS/Jur (1995) 22 Rapport sur les droits de l'homme en Tchétchénie (Rapporteur: M. Bindig, Allemagne, Groupe socialiste) (Visite de la sous-commission des droits de l'homme à Moscou, en Tchétchénie et dans les républiques environnantes, du 5 au 11 juin 1995)

AS/Pol (1995) 41 Développements dans la Fédération de Russie en relation à la situation en Tchétchénie ((Rapporteur: M. Mülhlemann, Suisse, LDR) – Visite de MM Atkinson, Bindig et Mülhlemann à Moscou et à Groznyï du 21 au 24 août 1995).

Résolution 1065 (1995) Procédure pour un avis concernant la demande d'adhésion de la Russie au Conseil de l'Europe (adoptée par l'Assemblée le 26 septembre 1995, 27e séance)

Doc 7372 Rapport (Rapporteur: M. Mülhlemann, Suisse, LDR)

Doc 7384 Avis (Rapporteur: M BINDIG, Allemagne, Groupe socialiste) (Conflit en Tchétchénie) – Annexe I – Rapport sur les droits de l'homme en Tchétchénie (AS/jur (1995) 22)

Directive N° 516 (1996) Création d'une commission ad hoc sur la Tchétchénie – Doc 7475 (Atkinson) – (adoptée par l'Assemblée le 25 janvier 1996, 7e séance)

Résolution 1086 (1996) relative aux développements dans la Fédération de Russie en relation avec la situation en Tchétchénie – Doc 7531 (Mülhlemann); Doc 7532 avis (Bindig) (adoptée par l'Assemblée le 24 avril 1996 (13e séance))

Directive N° 520 (1996) Développements dans la Fédération de Russie en relation avec la situation en Tchétchénie – Doc 7531 (Mülhlemann), Doc 7532 avis (Bindig) (adoptée par l'Assemblée le 24 avril 1996 (13e séance))

AS/Bur/Tch (1996) 2

Doc 7560 Addendum III

Rapport d'information sur la situation en Tchétchénie

Réunions de la Commission ad hoc relative à la Tchétchénie, à Moscou (30-31 mai 1996) et à Moscou, Grozny, Ourous-Martan et Nazran (Ingouchie) (8-10 juin 1996)

Doc 7633 Addendum II au Rapport d'activité

Rapport d'information relatif à la Tchétchénie (projet de rapport intérimaire sur la visite de la Commission ad choc relative à la Tchétchénie, à Moscou, du 27 au 29 août 1996)

Résolution 1201 (1999) Conflit en Tchétchénie Doc 8585 (Rapporteur: M. Ernst Mülhlemann, Suisse, Groupe Démocratique et réformateur) (texte adopté par la Commission permanente le 4 novembre 1999)

AS/Inf (1999) 10 Déclaration du Bureau de l'Assemblée parlementaire sur la situation en Tchétchénie (13 décembre 1999)

AS/Bur (2000) 6 Tchétchénie – Note de M. Mülhlemann, président de la Commission ad hoc relative à la Tchétchénie sur la visite en Russie du 15 au 21 décembre 1999 en qualité de Chef de la Commission ad hoc de l'Assemblée parlementaire pour observer les élections législatives en Russie

Rec 1444 (2000) Conflit en Tchétchénie Doc 8630 (Rapporteur: Lord Judd, Royaume-Uni, Groupe socialiste) Doc 8631 Avis (Rapporteur: M. Rudolf Bindig, Allemagne, Groupe socialiste) (AS/jur) Doc 8632 Avis (Rapporteur: M. Tadeusz Iwiński , Pologne, Groupe socialiste) (AS/Mig)

Doc 8671 et Addendum sur le Conflit en Tchétchénie – Réponse de la Fédération de Russie à la demande d'explications ultérieures de la part du Conseil de l'Europe – Lettre du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe au ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, datée du 27 janvier 2000.

Doc 8678 Addendum Conflit en Tchétchénie – Lettre du président de l'Assemblée parlementaire au président du Comité des Ministres, datée du 11 février 2000

Doc 8678 Conflit en Tchétchénie – Lettre du président du Comité des Ministres au président de l'Assemblée parlementaire, datée du 14 mars 2000

Doc 8685 Echange de correspondance entre le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe et le ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie au titre de l'article 52 de la Convention européenne des Droits de l'Homme

Doc 8686 Situation en Tchétchénie – Mise en œuvre de la Recommandation 1444 – Lettre du président de la délégation de l'Assemblée fédérale de la Fédération de Russie au président de l'Assemblée parlementaire, datée du 28 mars 2000

Rec 1456 Conflit en Tchétchénie – Mise en œuvre par la Russie de la Recommandation 1444 (2000) Doc 8697 (Rapporteur: Lord Judd, Royaume-Uni, Groupe socialiste), Doc 8700 avis (Rapporteur: M. Rudolf Bindig, Allemagne, Groupe socialiste) (AS/Jur) Doc 8705 avis (Rapporteur: M. Reginald Moreels, Belgique, EPP/CD) (AS/Mon) Doc 8706 avis (Rapporteur: M. Tadeusz Iwiński , Pologne, Groupe socialiste) (AS/Mig) Doc 8707 avis (Rapporteur: M.Gyula Hegyi, Hongrie, Groupe socialiste) (AS/Cult)

Doc 8736 Suivi de la Recommandation 1456 (2000) – Mise en œuvre par la Russie de la Recommandation 1444 (2000) – Communication du président de l'Assemblée – Déclaration de la Douma d'Etat de l'Assemblée fédérale de la Fédération de Russie relative à la position de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe sur la situation en République tchétchène (Moscou, 12 avril 2000).

Doc 8777 Situation de la République de Tchétchénie – Mise en œuvre de la Recommandation 1456 (2000) – Communication du président de l'Assemblée

Res 1221 (2000) Conflit en République tchétchène – Doc 8785 Suivi des Recommandations 1444 (2000) et 1456 (2000) de l'Assemblée parlementaire (Rapporteur:Lord Judd, Royaume-Uni, Groupe socialiste)

Doc 8788 Avis sur le conflit en République tchétchène – Mise en œuvre par la Russie des recommandations 1444 et 1456 (2000) (Rapporteur: M Rudolf Bindig, Allemagne, Groupe socialiste)

Rec 1478 (2000), Res 1227 (2000) Conflit en République tchétchène: récents développements (suivi des recommandation 1444 (2000) et 1456 (2000) de l'Assemblée parlementaire Doc 8840 (Rapporteur: Lord Judd, Royaume-Uni, Groupe socialiste) Doc 8843 avis (Rapporteur: M. Rudolf Bindig, Allemagne, Groupe socialiste)

Doc 8229 Conflit en République tchétchène – récents développements (Rapporteur: Lord Judd, Royaume-Uni, Groupe socialiste) Doc 8948 avis (Rapporteur: M. Rudolf Bindig, Allemagne, Groupe socialiste)

Doc 8944 Situation humanitaire des réfugiés et des personnes déplacées de Tchétchénie (Rapporteur: M. Tadeusz Iwiński , Pologne, Groupe socialiste)

Rec 1498 (2001), Rés 1240 (2001) Conflit en République tchétchène – développements récents Doc 8929 (Lord Judd), Doc 8948 avis (M. Bindig)

Doc 9038 Rapport sur les activités du Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie, comprenant des membres de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et de la Douma d'Etat de l'Assemblée fédérale de la Fédération de Russie, présenté par Lord Judd et M. Dimitri Rogozin, co-présidents du Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie

AS/Bur/AH/ Tchétchénie (2001) 02 rev. 1 Confidentiel Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie comprenant des membres de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et de la Douma d'Etat de l'Assemblée fédérale de la Fédération de Russie – Rapport sur les activités du Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie

AS/Bur/AH/ Tchétchénie (2001) 03 Strictement confidentiel Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie – Listes d'affaires criminelles

Doc 9227 Rapport sur les activités du Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie présenté par Lord Judd et M. Dimitri Rogozin, co-présidents du Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie

Rec 1548 (2002), Res 1270 (2002) Conflit en République tchétchène Doc 9319 (Lord Judd, Royaume-Uni, Groupe socialiste) Doc 9329 avis (M. Rudolf Bindig, Allemagne Groupe socialiste), Doc 9330 avis (M. Iwiński , Pologne, Groupe socialiste)

Doc 9415 Addendum I Révisé Addendum I au Rapport d'activité – Rapport sur les activités du Groupe de travail mixte sur la Tchétchénie (GTM), comprenant des membres de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et de la Douma d'Etat de l'Assemblée fédérale de la Fédération de Russie, présenté par Lord Judd et M. Dimitri Rogozin, co-présidents du GTM

Doc 9559 Partie I Document d'information sur le conflit en République tchétchène – Notes sur la visite du Groupe de travail mixte Assemblée parlementaire/Douma d'Etat (GTM) à Moscou du 10 au 12 juillet 2002 (Rapporteur: Lord Judd, Royaume-Uni, SOC)

Doc 9559 Partie II Document d'information sur le conflit en République tchétchène – Notes sur la visite du Groupe de travail mixte Assemblée parlementaire/Douma d'Etat (GTM) à Groznyï et Moscou du 3 au 5 septembre 2002 (Rapporteur: Lord Judd, Royaume-Uni, SOC)

Rec 1593 (2003), Rés 1315 révisée (2003), Directive 584 (2003) Evaluation des perspectives de solution politique du conflit en République tchétchène – Doc 9687 (Lord Judd, Royaume-Uni, Groupe socialiste), Doc 9688 avis (M. Bindig, Allemagne, Groupe socialiste), Doc 9689 avis (M. Iwiński , Pologne, Groupe socialiste)

Doc 9740 Addendum I au rapport d'activité du Bureau de l'Assemblée et de la Commission permanente (31 janvier 2003 – 31 mars 2003) Projet de Constitution de la République tchétchène

Doc 9740 Addendum II au rapport d'activité du Bureau de l'Assemblée et de la Commission permanente (31 janvier 2003 – 31 mars 2003) Avis sur le Projet de Constitution de la République tchétchène adopté par la Commission de Venise lors de sa 54e réunion plénière (Venise, 14-15 mars 2003)

Rec 1600 (2003), Res 1323 (2003), Directive 586 (2003) Situation des droits de l'homme en République tchétchène Doc 9732 et Addendum (Rapporteur: M. Rudolf Bindig, Allemagne, Groupe socialiste)

Rec 1667 (2004) Situation des réfugiés et des personnes déplacées dans la Fédération de Russie et dans d'autres pays de la CEI Doc 10118 (Rapporteur: M. Tadeusz Iwiński , Pologne, Groupe socialiste)

Rec 1678 (2004), Res 1402 (2004) Situation politique en République tchétchène: mesures pour accroître la stabilité démocratique conformément aux normes du Conseil de l'Europe Doc 10276 (Rapporteur: M. Andreas Gross, Suisse, Groupe socialiste)

Rec 1679 (2004), Res 1403 (2004) Situation des droits de l'homme en République tchétchène Doc 10283 (Rapporteur: M. Rudolf Bindig, Allemagne, Groupe socialiste)

Res 1404 (2004) Situation humanitaire de la population tchétchène déplacée Doc 10282 (Rapporteur: M. Tadeusz Iwiński , Pologne, Groupe socialiste)

Annexe 3. Liste des conventions auxquelles la Fédération de Russie est Partie



Russie

Traités signés et ratifiés ou ayant fait l'objet d'une adhésion au 10.05.2005

Titre

Ouverture du traité

Entrée en vigueur

E.

N.

C.

001

Statut du Conseil de l'Europe

5/5/1949

3/8/1949

 

Ratification ou adhésion: 28.02.96

Entrée en vigueur: 28.02.96

         

002

Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe

2/9/1949

10/9/1952

 

Ratification ou adhésion: 28.02.96

Entrée en vigueur: 28.02.96

         

005

Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales

4/11/1950

3/9/1953

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 05.05.98

         

009

Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales

20/3/1952

18/5/1954

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 05.05.98

         

010

Protocole additionnel à l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe

6/11/1952

11/7/1956

 

Ratification ou adhésion: 28.02.96

Entrée en vigueur: 28.02.96

         

015

Convention européenne relative à l'équivalence des diplômes donnant accès aux établissements universitaires

11/12/1953

20/4/1954

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 17.09.99

Entré en vigueur: 17.09.99

         

018

Convention culturelle européenne

19/12/1954

5/5/1955

X

 

Ratification ou adhésion: 21.02.91

Entrée en vigueur: 21.02.91

         

021

Convention européenne sur l'équivalence des périodes d'études universitaires

15/12/1956

18/9/1957

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 17.09.99

Entrée en vigueur: 17.09.99

         

022

Deuxième Protocole additionnel à l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe

15/12/1956

15/12/1956

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 28.02.96

Entrée en vigueur: 28.02.96

         

024

Convention européenne d'extradition

13/12/1957

18/4/1960

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 10.12.99

Entrée en vigueur: 09.03.00

         

030

Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale

20/4/1959

12/6/1962

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 10.12.99

Entrée en vigueur: 09.03.00

         

032

Convention européenne sur la reconnaissance académique des qualifications universitaires

14/12/1959

27/11/1961

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 17.09.99

Entrée en vigueur: 18.10.99

         

036

Quatrième Protocole additionnel à l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe

16/12/1961

16/12/1961

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 28.02.96

Entrée en vigueur: 28.02.96

         

044

Protocole no. 2 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, attribuant à la Cour européenne des Droits de l'Homme la compétence de donner des avis consultatifs

6/5/1963

21/9/1970

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 05.05.98

         

045

Protocole no. 3 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, modifiant les articles 29, 30 et 34 de la Convention

6/5/1963

21/9/1970

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 05.05.98

         

046

Protocole no. 4 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la Convention et dans le premier Protocole additionnel à la Convention

16/9/1963

2/5/1968

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 05.05.98

         

049

Protocole additionnel à la Convention européenne relative à l'équivalence des diplômes donnant accès aux établissements universitaires

3/6/1964

4/7/1964

X

X

 

Signature: 19.02.98

Ratification ou adhésion: 17.09.99

Entrée en vigueur: 18.10.99

         

055

Protocole no. 5 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, modifiant les articles 22 et 40 de la Convention

20/1/1966

20/12/1971

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 05.05.98

         

062

Convention européenne dans le domaine de l'information sur le droit étranger

7/6/1968

17/12/1969

X

X

 

Ratification ou adhésion: 12.02.91

Entrée en vigueur: 13.05.91

         

065

Convention européenne sur la protection des animaux en transport international

13/12/1968

20/2/1971

X

X

X

 

Ratification ou adhésion: 13.11.90

Entrée en vigueur: 14.05.91

         

066

Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique

6/5/1969

20/11/1970

X

X

 

Ratification ou adhésion: 13.11.90

Entrée en vigueur: 14.02.91

         

086

Protocole additionnel à la Convention européenne d'extradition

15/10/1975

20/8/1979

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 10.12.99

Entrée en vigueur: 09.03.00

         

090

Convention européenne pour la répression du terrorisme

27/1/1977

4/8/1978

 

Signature: 07.05.99

Ratification ou adhésion: 04.11.00

Entré en vigueur: 05.02.01

         

098

Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'extradition

17/3/1978

5/6/1983

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 10.12.99

Entrée en vigueur: 09.03.00

         

099

Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale

17/3/1978

12/4/1982

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 10.12.99

Entrée en vigueur: 09.03.00

         

103

Protocole additionnel à la Convention européenne sur la protection des animaux en transport international

10/5/1979

7/11/1989

X

X

X

 

Ratification ou adhésion: 13.11.90

Entrée en vigueur: 14.05.91

         

106

Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales

21/5/1980

22/12/1981

X

 

Signature: 03.11.99

Ratification ou adhésion: 04.10.02

Entrée en vigueur: 05.01.03

         

117

Protocole no. 7 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales

22/11/1984

1/11/1988

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 01.08.98

         

118

Protocole no. 8 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales

19/3/1985

1/1/1990

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 05.05.98

         

120

Convention européenne sur la violence et les débordements de spectateurs lors de manifestations sportives et notamment de matches de football

19/8/1985

1/11/1985

X

X

 

Ratification ou adhésion: 12.02.91

Entrée en vigueur: 01.04.91

         

121

Convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l'Europe

3/10/1985

1/12/1987

X

X

X

 

Ratification ou adhésion: 13.11.90

Entrée en vigueur: 01.03.91

         

122

Charte européenne de l'autonomie locale

15/10/1985

1/9/1988

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 01.09.98

         

126

Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants

26/11/1987

1/2/1989

X

X

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 01.09.98

         

135

Convention contre le dopage

16/11/1989

1/3/1990

X

X

 

Ratification ou adhésion: 12.02.91

Entrée en vigueur: 01.04.91

         

137

Cinquième Protocole additionnel à l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe

18/6/1990

1/11/1991

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 28.02.96

Entrée en vigueur: 01.06.96

         

138

Convention européenne sur l'équivalence générale des périodes d'études universitaires

6/11/1990

1/1/1991

X

X

X

 

Signature: 07.11.96

Ratification ou adhésion: 07.11.96

Entrée en vigueur: 01.01.97

         

140

Protocole no. 9 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales

6/11/1990

1/10/1994

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 01.09.98

         

141

Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime

8/11/1990

1/9/1993

X

X

 

Signature: 07.05.99

Ratification ou adhésion: 02.08.01

Entrée en vigueur: 01.12.01

         

146

Protocole no. 10 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales

25/3/1992

 

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

         

147

Convention européenne sur la coproduction cinématographique

2/10/1992

1/4/1994

X

X

 

Signature: 30.03.94

Ratification ou adhésion: 30.03.94

Entrée en vigueur: 01.07.94

         

151

Protocole no. 1 à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants

4/11/1993

1/3/2002

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 01.03.02

         

152

Protocole no. 2 à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants

4/11/1993

1/3/2002

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entré en vigueur: 01.03.02

         

155

Protocole no. 11 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, portant restructuration du mécanisme de contrôle établi par la Convention

11/5/1994

1/11/1998

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 05.05.98

Entrée en vigueur: 01.11.98

         

157

Convention-cadre pour la protection des minorités nationales

1/2/1995

1/2/1998

X

X

 

Signature: 28.02.96

Ratification ou adhésion: 21.08.98

Entrée en vigueur: 01.12.98

         

162

Sixième Protocole additionnel à l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe

5/3/1996

1/11/1998

 

Signature: 07.05.99

Ratification ou adhésion: 10.05.01

Entrée en vigueur: 11.06.01

         

165

Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l'enseignement supérieur dans la région européenne

11/4/1997

1/2/1999

X

X

X

 

Signature: 07.05.99

Ratification ou adhésion: 25.05.00

Entrée en vigueur: 01.07.00

         

46 traités trouvés

Notes: Convention(s) et Accord(s) ouverts aux Etats membres du Conseil de l'Europe et, le cas échéant, aux: E. – Etats européens non membres; N. – Etats non européens non membres; C. – Communauté européenne. Voir les dispositions finales de chaque traité.

Source: Bureau des Traités à l'adresse suivante: http://conventions.coe.int/traités

Annexe 4: Observations finales de la Délégation russe

A:        Monsieur David ATKINSON

Monsieur Rudolf BINDIG

Moscou, le 18 mai 2005

Messieurs,

Permettez-nous, en complément des observations déjà envoyées par la Délégation de la Russie au sujet du rapport sur le respect par la Fédération de Russie des obligations prises lors de l'adhésion au Conseil de l'Europe, d'attirer une fois de plus votre attention sur les renseignements ci-après, car le projet révisé de rapport sur la Russie du 10 mai 2005 (AS/Mon (2005) 14 rév.) n'a pas pris en considération les observations sur les points qui concernent la réforme de la Prokuratura, la ratification de certaines conventions du Conseil de l'Europe et les procédures judiciaires en cas de haute trahison, d'espionnage etc.

I.       S'agissant de la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, l'Administration du Président de la Fédération a tenu une réunion avec la participation des ministères fédéraux des Affaires étrangères, de la Justice, et du Développement régional. Il a été décidé de constituer un groupe de travail interministériel pour coordonner les travaux liés à la ratification de la Charte. Lors de l'achèvement de ces travaux, le groupe élaborera des recommandations et des propositions à l'intention du Gouvernement fédéral.

II.       Une commission interministérielle a de nouveau été formée en vue de la ratification de la Charte sociale européenne (révisée) du 3 mai 1996. Elle doit achever en avril - mai l'étude de la compatibilité de la législation interne avec les dispositions de ce texte en tenant compte des réformes menées en Russie. L'ensemble des projets de documents élaborés seront envoyés en mai pour approbation aux ministères et administrations intéressés avant d'être soumis pour examen au Gouvernement fédéral (Instruction n° AJ-P12-589 du 12 février 2005) conformément aux modalités fixées.

Pour élaborer les documents, la commission interministérielle part du principe selon lequel le niveau des garanties offertes par l'Etat aux différents groupes sociaux est déterminé par les possibilités économiques de l'Etat. L'amélioration de ce niveau jusqu'au point où il correspondra aux normes consacrées par la Charte est liée au développement économique de la Russie.

La Commission interministérielle a sélectionné le minimum nécessaire d'articles et de points de la Charte et a proposé que le Russie s'engage au titre des dispositions de la Partie I et des articles 1, 2 (par. 1, 3 à 7), 3, 4 (par. 2 à 5), 5 à 11, 12 (par. 1), 14, 15 (par. 1 et 2), 16, 17, 18 (par. 4), 19 (par. 5 et 9), 20 à 22, 24, 26 (par. 2) et 27 à 29 de la Partie II. Il est prévu de soumettre pour ratification 19 articles (68 paragraphes) sur 31 (soit 89 paragraphes) au total, dont six (n° 1, 5, 6, 7 16 et 20) des neuf articles obligatoires (1, 5, 6, 7, 12, 13, 16, 19 et 20).

Le ministère de la Santé et du Développement social envisage d'achever le processus de ratification de la Charte au cours du second semestre de 2005.

III.       La Convention européenne sur la nationalité sera ratifiée par la Douma d'Etat au cours de la session de l'automne 2005.

IV.       S'agissant du droit des habitants à une information objective, et de l'adoption de mesures pour préserver et renforcer le pluralisme et l'indépendance des médias en Russie, le Président de la Fédération Vladimir Poutine a, dans son allocution à l'Assemblée fédérale du 25 avril 2005, déclaré notamment ceci:

"Que faut-il faire pour que la télévision nationale tienne pleinement compte des besoins concrets de la société civile et réponde à ses intérêts ? Il faut que nous mettions en place des garanties pour que la

radiodiffusion et la télévision d'Etat soient le plus objectifs possible, qu'elles ne soient pas influencées par certains groupes, mais qu'elles reflètent tout l'éventail des forces politiques et sociales de la Russie.

Je propose de renforcer les pouvoirs de la Chambre sociale pour que l'opinion puisse mieux contrôler le respect par les chaînes de télévision de la liberté d'expression. A cette fin, une Commission formée de personnalités reconnues pourrait être créée au sein de la Chambre afin d'assurer l'indépendance de la politique de radiodiffusion et de nommer des personnes qualifiées. A cette fin, je projette de demander à la Douma de modifier la législation en ce sens. De plus, il convient d'assurer l'accès aux médias de l'ensemble des groupes parlementaires".

La Douma est en train de travailler sur l'idée exprimée dans l'allocution.

V.       Nous tenons à attirer l'attention des rapporteurs sur les dispositions du rapport consacrées à la réforme de la Prokuratura (points 169 à 194 du projet de rapport du 10 mai 2005).

1.       La loi fédérale n° 2202-1 du 17 janvier 1992 sur la Prokuratura de la Fédération de Russie à laquelle se réfèrent les auteurs du projet de rapport n'est restée en vigueur que jusqu'en 1995, si bien qu'aucune disposition de ce texte-là n'est plus appliquée en Russie depuis dix ans. La loi a été révisée dans son ensemble. Cette révision complète de la teneur de la loi et de ses parties ne permet pas de considérer la loi fédérale de 1995 comme une version modifiée de l'ancienne loi de 1992.

2.       Le Procureur général de la Fédération de Russie est nommé et destitué par le Conseil de la Fédération à la demande du Président de la Fédération. Cette règle, qui est totalement conforme à l'article 129 paragraphe 2 de la Constitution fédérale, est la "procédure indépendante et impartiale" qui garantit le principe d'indépendance de l'activité de la Prokuratura. Ce qui est indiqué correspond pleinement au point 5 alinéa a de la Recommandation R (2000) 19 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe.

3.       S'agissant de la participation du Procureur général à l'activité législative (voir point 156 du projet de rapport), le caractère erroné et exagéré des avis et des craintes exprimés par les rapporteurs est notamment lié à l'analyse de la loi de 1992, qui n'est plus en vigueur. Dans le même temps, les auteurs du rapport passent sous silence les traditions juridiques russes, qui contribuent à un processus de formation complexe du cadre législatif. Ils étudient la loi en faisant abstraction des autres textes de loi notamment les Codes fédéraux de procédure civile (CPC) et de procédure arbitrale (CPA) Ils ne tiennent pas non plus compte des normes consacrées par la Constitution fédérale, qui a la primauté sur tout le territoire russe.

Conformément à l'article 104 de la Constitution, le Procureur général n'a pas le droit d'initiative parlementaire ce qui l'empêche de participer directement à l'adoption de lois, c'est-à-dire aux "débats parlementaires". Selon l'article 9 de la loi fédérale de 1995 sur la Prokuratura de la Fédération de Russie, le Procureur "peut proposer aux organes législatifs et aux institutions ayant le pouvoir d'initiative législative la modification, l'abrogation ou l'adoption de lois ou d'autres textes normatifs". Etant donné ce dont dispose la Constitution, ces propositions de lois n'ont pas de caractère obligatoire. Leur caractère facultatif exclut que le procureur puisse "renforcer [son] pouvoir vis-à-vis des autres organes publics".

Le rôle de la Prokuratura en matière d'activité législative est véritablement conforme au point 6 de la Recommandation R (2000) 19 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe en vertu de laquelle les procureurs "ont en particulier le droit de prendre part à tout débat public portant sur des questions touchant au droit, à l'administration de la justice ainsi qu'à la promotion et à la protection des droits de l'homme…", ce qui ne peut porter préjudice à leur statut professionnel, car ils accomplissent des actes licites.

4.       Conformément à l'article 45 CPC et à l'article 52 CPA, les droits du procureur de participer à la procédure civile et arbitrale sont strictement réglementés (il peut uniquement le faire pour défendre les personnes qui, pour des raisons de santé, d'âge ou de capacité juridique et pour d'autres motifs valables ne peuvent saisir le tribunal, ainsi que dans l'intérêt de l'Etat) – (voir point 156 du projet de rapport).

5.       Permettez-nous, s'agissant des fonctions de contrôle général de légalité ("nadzor") de la Prokuratura (voir points 176-181 du projet de rapport), d'attirer l'attention des rapporteurs sur le fait que le terme "contrôle général [de légalité] de la Prokuratura" ne figure en fait ni dans les dispositions de la loi sur la Prokuratura de la Fédération de Russie", ni dans d'autres textes législatifs au niveau fédéral. La législation fédérale en vigueur définit les fonctions de la Prokuratura, et notamment celles qui sont liées à la mise en œuvre du contrôle général de légalité hors du cadre des poursuites pénales.

Des fonctions analogues fort étendues sont propres aux parquets d'autres pays européens aussi, comme le Portugal, l'Espagne, la France, la Belgique etc. Les renseignements officiels actuels sur les parquets des différents pays d'Europe montrent que ceux-ci ne limitent pas leur activité au domaine pénal. C'est notamment ce qui ressort des actes du Troisième séminaire international des 22-23 septembre 2004 avec la participation d'experts du Conseil de l'Europe. Ainsi, dans son exposé, l'expert André Vandoren, Président du Comité permanent de contrôle des services de police de Bruxelles, a souligné que le Conseil des procureurs royaux a approuvé les fonctions existantes du parquet, notamment "le contrôle du pouvoir judiciaire et de l'exécution des fonctions judiciaires; le contrôle des notaires et de la police, ainsi que d'autres membres des services d'ordre. L'influence de l'activité des procureurs tend donc à s'accroître en Belgique".

A ce jour, il n'y a aucun texte juridique européen, ayant même valeur de recommandation, où il soit indiqué clairement qu'il est indispensable ou qu'il serait souhaitable d'exclure ces fonctions des systèmes juridiques des Etats européens, car le contrôle général de légalité assurés par les procureurs vise en fait à défendre avant tout les droits de l'homme et les libertés fondamentales.

6.       S'agissant de l'évaluation pratique du contrôle général de légalité assuré par la Prokuratura, nous aimerions attirer l'attention des rapporteurs sur les points suivants: entre l'année 2002 et 2004 (incluse), les procureurs ont mis en évidence et contesté plus de 14 500 actes normatifs qui avaient été adoptés par les instances exécutives de Sujets de la Fédération et près de 163 000 qui l'avaient été par des collectivités locales. Sur ce dernier chiffre, plus de 11 500 étaient les statuts d'entités municipales. Après l'intervention de la Prokuratura, la plupart des textes normatifs ont été mis en conformité avec la loi ou annulés.

7.       Il ressort des points 178-179 que les éléments ci-après n'ont pas été compris:

La Prokuratura fédérale ne contrôle pas le Gouvernement et le Parlement fédéraux.

Conformément aux articles 21 et 26 de la loi fédérale sur la Prokuratura, lorsqu'ils contrôlent l'application des lois, les services de la Prokuratura ne se substituent pas à un autre service administratif ou à un fonctionnaire quels qu'ils soient et ne s'ingèrent pas dans le fonctionnement de ces institutions.

La Prokuratura ne peut procéder à un contrôle que si elle reçoit des informations faisant état de violations de la loi qui exigent une réaction des procureurs (article 21 alinéa 2 de la loi fédérale sur la Prokuratura). Pour appliquer le principe de séparation des pouvoirs et mettre en œuvre un système fiable de protection des droits de l'homme, il est essentiel que la Prokuratura ne puisse pas prendre des décisions définitives. Elle fait désormais office d'instance appelée à œuvrer pour remédier aux violations de droits, à déclencher une procédure, et non, à l'inverse du tribunal, à prendre des décisions de nature civile, administrative ou pénale.

8.       On ne sait pas bien non plus sur quoi est fondée la conclusion subjective des rapporteurs selon laquelle "l'étendue de ces pouvoirs semble être contraire au paragraphe 12 de la Recommandation (2000) 19 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe" (voir point 179 du projet de rapport).

D'abord, la Recommandation "traite exclusivement du rôle du Ministère public…". Ensuite, l'exposé des motifs précise encore au sujet de la Recommandation que "… le texte de la Recommandation n'étant pas juridiquement contraignant, toute formulation … ne vise en effet qu'à indiquer qu'il incombe à l'Etat de mettre en œuvre le principe dont il s'agit."

La Cour constitutionnelle fédérale a constamment réaffirmé la constitutionnalité des normes de la loi qui donne au procureur des compétences en matière de contrôle général de la conformité d'actes à la Constitution fédérale, et de l'application des lois par (arrêts de la Cour n° 6-P du 11.04.2000, n° 3-P du 18.02.2000 et n° 13-P du 18.07.2003).

9.       Conformément au Chapitre 3 de la loi fédérale sur la Prokuratura, le procureur doit veiller au respect des droits de l'homme par les administrations et ministères fédéraux, par les organes politiques des Sujets de la Fédération, et par les fonctionnaires et les responsables de diverses organisations.

La défense des droits de l'homme et des libertés fondamentales est un axe essentiel de l'activité des services de la Prokuratura de tous niveaux. Rien qu'en 2004, les procureurs ont mis en évidence plus de 650 000 violations du droit social, dont 462 900 relevaient du droit du travail et 40 900 du droit au logement. A la suite de 37 000 plaintes, des mesures ont été prises pour réparer le préjudice subi par des particuliers en raison de la non-exécution de décisions judiciaires. Au cours de la même période, 300 000 violations de la législation sur la rémunération du travail ont été constatées. Pour y remédier, la Prokuratura a contesté plus de 11 000 textes législatifs illégaux, elle a adressé près de 34 000 représentations, dont l'examen a conduit à imposer des sanctions disciplinaires à 6 500 fonctionnaires reconnus coupables. Plus de 155 000 requêtes ont été adressées aux tribunaux pour défendre les droits constitutionnels de la population de toucher une rémunération pour son travail. En 2004, 1 448 affaires pénales ont été ouvertes en raison du refus de verser un salaire (article 145-1 du Code pénal fédéral).

Ces statistiques montrent combien le contrôle général de l'exécution des lois assuré par la Prokuratura répond à un besoin de la société.

10.       S'agissant de ce qu'exigent les "normes européennes", le travail réalisé depuis dix ans dans le cadre du Conseil de l'Europe a convaincu les experts de la Russie qu'il n'y a pas en Europe de système de normes unique qui définisse les grandes lignes des missions et des compétences du parquet.

Il serait injuste d'essayer de redéfinir le système du parquet d'un Etat en se fondant sur les principes d'un autre. Chaque système doit être compatible avec la culture et l'histoire du pays et être accepté par la société au sein de laquelle il fonctionne (voir le document final de la Conférence paneuropéenne du Conseil de l'Europe – Autriche, mai 1993).

Il faut organiser les services de la Prokuratura en tenant compte de la situation sociopolitique du pays et des traditions juridiques démocratiques de l'Etat, tout en donnant la primauté à la prééminence du droit et à la démocratie (voir les conclusions de la Conférence internationale du Conseil de l'Europe, Budapest, 1994).

Le document final du séminaire international du Conseil de l'Europe sur "Le ministère public dans un Etat de droit" (Moscou, janvier 1997), rencontre multilatérale d'experts du Conseil de l'Europe et de représentants des parquets de France, d'Allemagne, d'Italie, d'Espagne, de Belgique, de Suisse, des Pays-Bas et de Russie, constatait une fois de plus que "si le statut constitutionnel et les compétences de l'instance du ministère public peuvent différer selon le pays, l'histoire et la culture juridique, (…) il est essentiel que cette instance trouve sa place dans la société démocratique, qui est fondée sur le principe de séparation des pouvoirs et sur la prééminence du droit".

En réponse à la Recommandation 1604 (2003) de l'APCE, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe soulignait "la diversité des modèles de ministère public entre les pays, qui tient aux traditions juridiques et aux différences dans l'organisation des systèmes de justice pénale". Selon ce texte, "le Comité des Ministres ne voit ni pourquoi on demanderait l'abandon du principe de légalité dans les ressorts européens où il s'applique, ni pourquoi on empêcherait les procureurs d'exercer certaines fonctions en dehors de la justice pénale comme ils le font dans de nombreux systèmes juridiques".

11.       L'activité du parquet dans les conditions d'un Etat démocratique moderne a ceci de particulier que toute décision ou action des institutions publiques, notamment des services du ministère public, peut être contestée en justice. Un système de cette nature peut assurer une protection véritable des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Il faut que le statut, les structures, les missions et les modes de fonctionnement du parquet évoluent en douceur conformément aux modifications du système judiciaire et légal dont il fait partie. Tant qu'il n'y aura pas de système cohérent de contrôle public, tant que le pouvoir judiciaire ne se sera pas renforcé, le fonctionnement de la Prokuratura de Russie, qui paraît peu traditionnel selon certaines conceptions d'Europe occidentale, sera conditionné par la société et répondra à un besoin social.

Ainsi, le statut, les fonctions et les compétences de la Prokuratura définis en Russie ne sont pas contraires aux principes universels et aux normes du droit international, qui visent à défendre les droits de l'homme et les libertés fondamentales, ils correspondent à la législation interne moderne, aux recommandations du Conseil de l'Europe et aux engagements pris par la Fédération de Russie.

VI.       En ce qui concerne les droits des personnes accusées de haute trahison et d'espionnage, nous avons l'honneur de vous informer que le Code pénal fédéral incrimine les actes tels que la haute trahison (article 275), et l'espionnage (article 276). L'enquête préalable pour ces catégories d'affaires est menée selon la procédure ordinaire prévue par les dispositions du Chapitre VIII du Code fédéral de procédure pénale. Les affaires concernant ces chefs d'accusation sont examinées par des cours d'assises (articles 30 et 31 du Code fédéral de procédure pénale). Dans le même temps, dans des Etats aussi développés que la France, la Suisse, la Norvège etc., l'instruction des affaires qui relèvent de cette catégorie est confiée exclusivement à des juges professionnels.

Il convient d'attirer l'attention sur le fait que la législation fédérale permet de réaliser des expertises des renseignements relatifs à la haute trahison non pas en jugeant de motifs formels comme la présence sur un document d'une mention le classifiant "secret", mais sur la base du caractère effectif des renseignements qui y figurent. De plus, l'expertise judiciaire est menée non seulement par des juristes experts de l'Etat, mais aussi par toute autre expert disposant des connaissances spéciales nécessaires (article 195 du Code fédéral de procédure pénale), ce qui permet à la défense de faire appel à des experts indépendants. A titre de comparaison, on peut relever que par exemple dans des pays comme le Royaume Uni, la Suède ou l'Autriche, ce type d'expertise est réalisée exclusivement par les services de l'Etat compétents.

A titre d'exemple de l'efficacité de ces normes de procédure pénale, on peut citer l'affaire A.K. Nikitine, qui était accusé de l'infraction visée à l'article 64 du Code pénal de la RSFSR ("trahison"). Bien qu'il ait saisi la Cour européenne des droits de l'homme (affaire n° 50178/99 "Nikitine c. Fédération de Russie), le tribunal a jugé qu'il n'y avait pas eu de violation de la législation par la Fédération de Russie à l'égard de celui-ci.

VII.       S'agissant de la maison d'arrêt de Lefortovo, qui relève du FSB, nous avons l'honneur de vous informer qu'il a été décidé de transférer cet établissement au Ministère de la Justice. Le dossier juridique nécessaire est en cours d'élaboration, si bien que la question sera résolue prochainement.

Veuillez agréer …

K.I. Kosatchev

Chef de la Délégation

de l'Assemblée fédérale de la Russie à l'APCE

Annexe 5

Parliamentary Assembly
Assemblée
parlementaire


AVIS No 193 (1996)1 relatif à la demande d'adhésion de la Russie au Conseil de l'Europe

1.       La Fédération de Russie a déposé une demande d'adhésion au Conseil de l'Europe le 7 mai 1992. Par sa Résolution (92) 27 du 25 juin 1992, le Comité des Ministres a demandé à l'Assemblée parlementaire d'émettre un avis sur cette demande, conformément à la Résolution statutaire (51) 30 A.

2.       Le statut d'invité spécial auprès de l'Assemblée parlementaire a été accordé au Parlement de la Fédération de Russie le 14 janvier 1992.

3.       La procédure concernant l'avis sur la demande d'adhésion de la Russie a été interrompue le 2 février 1995 du fait du conflit en Tchétchénie. Avec l'adoption de la Résolution 1065, le 27 septembre 1995, cette procédure a été reprise au motif que la Russie était désormais engagée dans la recherche d'une solution politique et que des atteintes alléguées et attestées aux droits de l'homme faisaient l'objet d'enquêtes.

4.       L'Assemblée a suivi avec beaucoup d'inquiétude les événements de décembre 1995 à Goudermes et ceux récemment intervenus à Pervomaïskoïe. Elle condamne fermement la prise d'otages en tant qu'acte de terrorisme et violation flagrante des droits de l'homme, qu'aucune cause ne peut justifier. En même temps, elle estime que les autorités russes ne se sont pas assez préoccupées de la sécurité des otages. L'usage apparemment sans discrimination de la force a coûté la vie à de nombreuses personnes innocentes et violé le droit humanitaire international. Le conflit tchétchène ne peut être réglé par la force. On ne pourra instaurer la paix dans la région, ni mettre fin aux attaques terroristes, sans une solution politique fondée sur la négociation et les valeurs démocratiques européennes.

5.       L'Assemblée note que les réformes politiques, juridiques et économiques se sont poursuivies. Le système juridique laisse encore apparaître des insuffisances, comme l'avaient noté les experts juridiques du Conseil de l'Europe (le 7 octobre 1994). On constate néanmoins un progrès vers une prise de conscience générale et un plus grand respect de la légalité.

6.       Des assurances quant à la poursuite des progrès ont été données au Conseil de l'Europe par le Président de la Fédération, le Premier ministre, le président de la Douma et le président du Conseil de la Fédération dans leur lettre du 18 janvier 1995.

7.       Compte tenu de ces assurances et des considérations et engagements ci-dessous, l'Assemblée estime que la Russie - au sens de l'article 4 du Statut - a clairement la volonté et sera capable dans un avenir proche de se conformer aux dispositions de l'article 3 de ce Statut précisant les conditions requises pour pouvoir adhérer au Conseil de l'Europe («Tout membre du Conseil de l'Europe reconnaît le principe de la prééminence du droit et le principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction doit jouir des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il s'engage à collaborer sincèrement et activement à la poursuite [de ce] but...»):

i.       la Russie s'est associée à plusieurs activités du Conseil de l'Europe depuis 1992 - par le biais de sa participation aux programmes intergouvernementaux de «coopération et d'assistance» (notamment dans le domaine des réformes juridiques et des droits de l'homme) et par la participation de sa délégation d'invités spéciaux aux travaux de l'Assemblée parlementaire et de ses commissions;

ii.       un «dialogue politique» est établi entre la Russie et le Comité des Ministres depuis le 7 mai 1992;

iii.       la Russie a adhéré à plusieurs conventions du Conseil de l'Europe, dont la Convention culturelle européenne;

iv.       les textes législatifs suivants sont actuellement élaborés en priorité, à la lumière de consultations internationales, sur la base des principes et des normes du Conseil de l'Europe: un nouveau Code pénal et un Code de procédure pénale; un nouveau Code civil et un Code de procédure civile; une loi sur le fonctionnement et l'administration du système pénitentiaire;

v.       de nouvelles lois conformes aux normes du Conseil de l'Europe seront adoptées: sur le rôle, le fonctionnement et l'administration du Parquet et de l'Office du commissaire aux droits de l'homme; sur la protection des minorités nationales; sur la liberté de réunion et la liberté religieuse;

vi.       le statut de la profession juridique sera protégé par la loi: une association professionnelle (barreau) sera établie;

vii.       les responsables avérés de violations des droits de l'homme seront traduits en justice - notamment en relation avec les événements de Tchétchénie;

viii.       l'exercice effectif des droits consacrés par l'article 27 de la Constitution et par la loi sur la liberté de mouvement et de choix du lieu de résidence sera assuré;

ix.       les conditions de détention seront améliorées conformément à la Recommandation R (87) 3 relative aux règles pénitentiaires européennes: en particulier, les conditions quasi inhumaines régnant dans de nombreux centres de détention préventive seront améliorées dans les plus brefs délais;

x.       la responsabilité de l'administration pénitentiaire et de l'application des peines sera transférée au ministère de la Justice dès que possible;

xi.       l'état d'avancement de la réforme législative permettra la signature et la ratification, dans les délais indiqués, des conventions européennes énumérées ci-dessous au paragraphe 10;

xii.       la Fédération de Russie aidera les personnes précédemment déportées des Etats baltes occupés ou celles qui descendent de déportés à rentrer dans leur pays conformément à des programmes spéciaux de rapatriement et d'indemnisation qui devront être mis au point.

8.       Pour assurer la concrétisation de ces assurances et le respect de ces engagements, l'Assemblée décide d'établir - en étroite coopération avec la délégation parlementaire russe - son propre programme parlementaire «de conseil et de contrôle» sous l'autorité des commissions responsables de la mise en œuvre de la Directive no 508 (1995) relative au respect des obligations et engagements contractés par les Etats membres du Conseil de l'Europe. Ce programme complétera la procédure de contrôle prévue par la Directive no 508 (1995), sans y porter atteinte.

9.       Comme contribution à l'assistance et à la coopération à long terme, l'Assemblée se félicite du programme joint Union européenne/Conseil de l'Europe pour le renforcement des structures fédérales et des mécanismes de protection des droits de l'homme, et pour la réforme du système juridique: une attention toute particulière devrait également être accordée à l'appui et au renforcement des organisations non gouvernementales dans le domaine des droits de l'homme, et à l'établissement d'une société civile.

10.       L'Assemblée parlementaire prend note que la Fédération de Russie partage pleinement sa conception et son interprétation des engagements contractés, tels qu'énoncés au paragraphe 7, et qu'elle a l'intention:

i.       de signer la Convention européenne des Droits de l'Homme au moment de son adhésion; de ratifier la Convention et les Protocoles nos 1, 2, 4, 7 et 11 dans un délai d'un an; de reconnaître, dans l'attente de l'entrée en vigueur du Protocole no 11, le droit de requête individuelle auprès de la Commission européenne et la juridiction obligatoire de la Cour européenne (articles 25 et 46 de la Convention);

ii.       de signer dans l'année et de ratifier dans les trois ans suivant son adhésion le Protocole no 6 à la Convention européenne des Droits de l'Homme concernant l'abolition de la peine de mort en temps de paix, et de mettre en place un moratoire sur les exécutions prenant effet le jour de l'adhésion;

iii.       de signer et de ratifier dans l'année suivant son adhésion la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants;

iv.       de signer et de ratifier dans l'année suivant son adhésion la Convention-cadre européenne pour la protection des minorités nationales; de fonder sa politique à l'égard des minorités sur les principes énoncés dans la Recommandation 1201 (1993) de l'Assemblée, et d'incorporer ces principes dans le système et la pratique juridiques et administratifs du pays;

v.       de signer et de ratifier dans l'année suivant son adhésion la Charte européenne de l'autonomie locale et la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires; d'étudier, en vue de sa ratification, la Charte sociale du Conseil de l'Europe; et de mener entre-temps sa politique selon les principes de ces conventions;

vi.       de signer et de ratifier et d'appliquer entre-temps les principes de base d'autres conventions du Conseil de l'Europe - notamment celles relatives à l'extradition; à l'entraide judiciaire en matière pénale; au transfèrement des personnes condamnées; et au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime;

vii.       de régler les différends internationaux et internes par des moyens pacifiques (obligation qui incombe à tous les Etats membres du Conseil de l'Europe), en rejetant résolument toute menace d'employer la force contre ses voisins;

viii.       de régler les différends internationaux qui subsistent en matière de frontières selon les principes du droit international, en s'en tenant aux traités internationaux existants;

ix.       de ratifier, dans un délai de six mois après son adhésion, l'accord intervenu le 21 octobre 1994 entre les Gouvernements russe et moldove, et de poursuivre le retrait de la 14e armée et de son matériel du territoire de la Moldova dans un délai de trois ans à compter de la date de signature de l'accord;

x.       de remplir les obligations qui lui incombent en vertu du Traité relatif aux forces armées conventionnelles en Europe (CFE);

xi.       de dénoncer comme erroné le concept de deux catégories différentes de pays étrangers, qui consiste à traiter certains d'entre eux appelés «pays étrangers proches» comme une zone d'influence spéciale;

xii.       de négocier les demandes de restitution de biens culturels à d'autres pays européens sur une base ad hoc qui permettrait de distinguer les différentes catégories de biens (archives, œuvres d'art, bâtiments, etc.) et de propriétaire (public, privé ou institutionnel);

xiii.       de restituer dans les plus brefs délais les biens des institutions religieuses;

xiv.       de régler rapidement toutes les questions relatives à la restitution de biens réclamés par des Etats membres du Conseil de l'Europe, et notamment les archives transférées à Moscou en 1945;

xv.       de cesser de restreindre, avec effet immédiat, la liberté de circulation internationale de personnes ayant connaissance de secrets d'Etat, à l'exception des restrictions qui sont généralement acceptées dans les Etats membres du Conseil de l'Europe, et de faciliter la consultation des archives conservées dans la Fédération russe;

xvi.       de s'assurer que l'application de la Convention des droits de l'homme de la CEI n'entrave en rien la procédure et les garanties de la Convention européenne des Droits de l'Homme;

xvii.       de réviser la loi sur les services de sécurité fédéraux afin de la mettre en conformité avec les principes et les normes du Conseil de l'Europe dans un délai d'un an suivant son adhésion: en particulier, le droit du Service fédéral de sécurité (FSB) de posséder et de gérer des centres de détention préventive devrait être supprimé;

xviii.       d'adopter une loi prévoyant un service militaire de substitution, comme prévu à l'article 59 de la Constitution;

xix.       de réduire, voire d'éliminer, les incidents de mauvais traitements et les décès dans les forces armées en dehors des affrontements militaires;

xx.       de poursuivre les réformes juridiques afin de mettre l'ensemble de sa législation en conformité avec les principes et les normes du Conseil de l'Europe: en particulier, le décret présidentiel no 1226 devrait être révisé dans les plus brefs délais;

xxi.       d'élargir sa coopération internationale pour prévenir - et éliminer les effets écologiques - des catastrophes naturelles et technologiques;

xxii.       de signer et de ratifier dans l'année suivant son adhésion l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe et ses protocoles additionnels;

xxiii.       de coopérer pleinement à la mise en œuvre de la Directive no 508 (1995) de l'Assemblée relative au respect des obligations et engagements contractés par les Etats membres du Conseil de l'Europe, ainsi qu'aux processus de contrôle établis en vertu de la Déclaration du Comité des Ministres du 10 novembre 1994 (95e session);

xxiv.       de respecter strictement les dispositions du droit international humanitaire, y compris en cas de conflits armés sur son territoire;

xxv.       de coopérer de bonne foi avec les organisations humanitaires internationales et de leur permettre d'exercer leurs activités sur son territoire conformément à leurs mandats.

11.       L'Assemblée recommande au Comité des Ministres - sur la base des engagements et ententes exposés ci-dessus:

i.       d'inviter la Fédération de Russie à devenir membre du Conseil de l'Europe;

ii.       d'attribuer à la Fédération de Russie dix-huit sièges à l'Assemblée parlementaire;

iii.       de garantir une augmentation des moyens et des capacités de l'Organisation, notamment ceux de l'Assemblée et des institutions des droits de l'homme, afin de faire face aux conséquences de ces décisions, et de se garder d'utiliser l'adhésion de la Fédération de Russie pour diminuer les contributions des Etats qui sont déjà membres.

__________

1. Discussion par l'Assemblée le 25 janvier 1996 (6e et 7e séances) (voir Doc. 7443, rapport de la commission des questions politiques, rapporteur: M. Muehlemann; et Doc. 7463, avis de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, rapporteur: M. Bindig).

Texte adopté par l'Assemblée le 25 janvier 1996 (7e séance).

Commission chargée du rapport: commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi)

Renvoi en commission: Résolution 1115 (1997) du 27 janvier 1997.

Projet de résolution adopté par la commission le 1er juin 2005 avec 21 voix pour et 1 voix contre et projet de recommandation adopté par la Commission le 1er juin 2005 avec 21 voix pour et une abstention.

Membres de la commission: M. György Frunda (Président), Mme Hanne Severinsen, Mme Naira Shakhtakhtinskaya, M. Mikko Elo (Vice-Présidents), M. Pedro Agramunt, M. Bakhtiyar Aliyev, M. René André, M. Giuseppe Arzilli, M. David Atkinson, M. Jaume Bartumeu Cassany, Mme Mertixell Batet, Mme Gülsün Bilgehan, M. Rudolf Bindig, Mme Mimount Bousakla, M. Luc Van den Brande, M. Patrick Breen, Mme Beáta Brestensktá, M. Milos Budin, M. Mevlüt Çavuşoğlu, M. Jonas Čekuolis, M. Doros Christodoulides, M. Boriss Cilevičs, M. Georges Colombier, M. Joseph Debono Grech, M. Juris Dobelis, Mme Josette Durrieu, M. Mátyás Eörsi, M. Jean-Charles Gardetto, M. József Gedei, M. Marcel Glesener, M. Stef Goris, M. Andreas Gross, M. Alfred Gusenbauer, M. Michael Hagberg, M. Michael Hancock, M. Andres Herkel, M. Serhiy Holovaty, M. Jerzy Jaskiernia, M. Erik Jurgens, Lord Kilclooney of Armagh, M. Evgeni Kirilov, M. Shavarsh Kocharian, Mme Synnøve Konglevoll, M. Konstantin Kosachev, M. André Kvakkestad, Mme Darja Lavtižar-Bebler, Mme Sabine Leutheusser-Schnarrenberger, M. Eduard Lintner, M. Mikhail Margelov, M. Dick Marty, M. Frano Matušić, M. José Medeiros Ferreira, M. Miloš Melčák, M. Azim Mollazade, M. Zsolt Németh, M. İbrahim Özal, M. Theordoros Pangalos, Mme Eleonora Petrova-Mitevska, Mme Sólveig Pétursdóttir, M. Leo Platvoet, M. Christos Pourgourides, M. Dumitru Prijmireanu, M. Anatoliy Rakhansky, M. Dario Rivolta, M. Armen Rustamyan, Mme Katrin Saks, M. Kimmo Sasi, M. Adrian Severin, M. Vitaliy Shybko, M. Leonid Slutsky, M. Jerzy Smorawiński, M. Michael Spindelegger, Mme Maria Stoyanova, M. Qazim Tepshi, Mme Elene Tevdoradze, M. Tigran Torosyan, M. Miltiadis Varvitsiotis, Mme Birutė Vėsaitė, M. Rudolf Vis, M. Oldřich Vojíř, Mme Renate Wohlwend, M. Marco Zacchera, M. Emanuelis Zingeris.

N.B. Les noms des membres qui ont participés à la réunion sont indiqués en caractères gras.

Chef du secrétariat: Mme Ravaud

Secrétaires de la commission: M. Gruden, Mme Theophilova-Permaul, M. Kotlyar.


1 Article 3 du Statut du Conseil de l'Europe: «Tout membre du Conseil de l'Europe reconnaît le principe de la prééminence du droit et le principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction doit jouir des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il s'engage à collaborer sincèrement et activement à la poursuite du but défini au chapitre 1er».

2 La liste des conventions auxquelles la Fédération de Russie est partie est annexée au rapport (Annexe III).

3 Ernst Mühlemann (Suisse, LDR) pour la Commission des affaires politiques, Rudolf Bindig (Allemagne, SOC) pour l'avis de la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme et David Atkinson (Royaume-Uni, GDE) pour l'avis de la Commission des relations avec les pays européens non membres.

4 Résolution 1055 (1995), Rapporteurs Mühlemann (Suisse, LDR) et Bindig (Allemagne, SOC).

5 Résolution 1065 (1995), mêmes rapporteurs que ci-dessus.

6 Directive n° 516 (1996) relative à la création d'une commission ad hoc sur la Tchétchénie.

7 Document de l'Assemblée 8127 (co-rapporteurs Rudolf Bindig (Allemagne, SOC) et Ernst Mühlemann (Suisse, LDR).

8 Document de l'Assemblée 9396, Résolution 1277 (2002) et Recommandation 1533 (2002), co-rapporteurs David Atkinson (Royaume-Uni, GDE) et Rudolf Bindig (Allemagne, SOC).

9 Le territoire de la Fédération de Russie couvre 11 fuseaux horaires.

10 La Fédération de Russie se compose de 89 'sujets' (entités constitutives): 21 Républiques, 6 Territoires ou Kraïs, 49 Régions ou Oblasts, 2 villes d'importance fédérale (Moscou et Saint-Pétersbourg), une Région autonome et 10 Districts autonomes ou Okrugs. Toutes ces entités jouissent de droits égaux en vertu de l'article 5 de la Constitution de 1993. Les républiques ont chacune une constitution et leur propre législation; les autres entités ont des «statuts» et leur propre législation. Les républiques reposent sur une base ethnique et ont le droit de décider de leur langue officielle. La Constitution de la Fédération de Russie définit ce qui relève de la compétence exclusive de la Fédération, de la compétence partagée entre la Fédération et ses entités et de la compétence propre des entités. Pour des raisons de commodité, toutes les entités seront dénommées régions dans le présent rapport.

11 Voir le programme des visites à l'Annexe I.

12 Voir l'Annexe II.

13 Rapporteur Tadeusz Iwiński (Pologne, SOC) pour le compte de la Commission des migrations, des réfugiés et de la population.

14 Situation politique en République tchétchène: mesures pour accroître la stabilité en conformité avec les normes du Conseil de l'Europe, Rapporteur Andreas Gross (Suisse, SOC), pour le compte de la Commission des questions politiques.

15 Rapporteur Rudolf Bindig (Allemagne, SOC).

16 Russie Unie 300 sièges, Parti communiste 52, Démocrates libéraux 36, Rodina (Patrie) 36, indépendants 26 sièges.

17 Le président Poutine 71,31%, M. Kharitonov (Parti communiste) 13,69%, M. Glaziev 4,1%, Mme Khakamada (Union des Forces de Droite) 3,84%, M. Malychkine (LDPR) 2,02% et M. Mironov 0,75%; la participation électorale était de 64,39%.

18 Voir le document 10032 de l'Assemblée, du 22 janvier 2004, sur l'observation des élections législatives et le document 10150, du 26 avril 2004, sur l'observation des élections présidentielles.

19 Source: site Internet officiel de la Présidence de la Russie (http://president.kremlin.ru/eng/speeches/2004/09/13/0000_type82912type82913_76667.shtml).

20 Cette possibilité s'ajoute aux pouvoirs déjà existants des autorités fédérales (loi n° 106 du 29 juillet 2000) afin de sanctionner les autorités régionales en cas de non-respect des lois fédérales.

21 Cette disposition a déjà été appliquée par le président Poutine qui, en mars 2005, a démis le gouverneur du district autonome (okrug) de Koriak, M. Loguinov, qui avait été élu au suffrage universel direct.

22 Communiqué de presse du Conseil de l'Europe 17 septembre 2004 (réf 437f04).

23 Avis n° 321/2004 (CDL-AD (2004)042).

24 Système de représentation proportionnelle avec des listes fédérales par partis, la formation de blocs n'étant pas autorisée. Le seuil de 7% pour l'attribution de sièges à une liste est maintenu (la loi en vigueur prévoit aussi son application à compter des élections de 2007). Par ailleurs, le projet de loi réduit de quatre à deux le nombre minimal des partis devant être représentés à la Douma d'Etat.

25 Selon des rapports des médias, Iabloko affirme compter quelque 85 000 membres, alors que l'Union des Forces de Droite n'en compte que 35 000.

26 http://president.kremlin.ru/eng/speeches/2004/09/13/0000_76667.shtml.

27 Source: rapport d'information n° 317 de la commission des affaires étrangères du Sénat français, 19 mai 2004 (http://www.senat.fr/rap/r03-317/r03-317.html)

28 Cette situation est particulièrement problématique pour les enfants: d'après les chiffres de l'UNICEF, il y avait en 1998 environ 150 000 enfants sans abri dans la seule ville de Moscou (voir http://pangaea.org/street children/russia/unicef.htm). Leur nombre est aujourd'hui estimé aux alentours de 50 000. D'après le médiateur fédéral, M. Loukine, le nombre des enfants sans abri en Russie augmente de 100 000 à 130 000 chaque année, et il a atteint un million, Interfax, 10 décembre 2004.

29 Résolution 1418 (2005) Circonstances entourant l'arrestation et l'inculpation de hauts dirigeants de Ioukos, Doc.10368, rapport de la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme, rapporteur: Mme Leutheusser-Schnarrenberger.

30 Les hauts dirigeants de Ioukos ainsi que les sociétés appartenant au groupe ont introduit des requêtes auprès de la Cour européenne des Droits de l'Homme. Deux d'entre elles ont obtenu d'être traitées en priorité: Platon Lebedev c/ Russie (N° 4493/04) et la Compagnie pétrolière Ioukos c/ Russie (N° 14902/04).

31 Rapport 2004 sur l'épidémie mondiale du sida (UNAIDS).

32 Rapport du PNUD «Inverser le cours de l'épidémie – faits et stratégies», février 2004.

33 Voir paragraphe 10 vii, viii, ix, x, xi, xii, xiv, xvi, xxi, xxiv et xxv.

34 Cette somme inclut le financement de programmes communs avec le Conseil de l'Europe pour la Russie. A l'heure actuelle, le 8e programme est en cours.

35 La coopération internationale et les projets d'assistance visant à traiter le problème des déchets et des «cimetières nucléaires» devraient se poursuivre.

36 L'Ukraine n'est pas un membre à part entière de la CEI car elle n'a pas signé ni ratifié les Statuts de la Communauté.

37 Voir également la Résolution Intérimaire DH(2005)42, adoptée par le Comité des Ministres le 22 avril 2005.

38 Fiche d'information du Département d'Etat américain (http://www.state.govt/ac/ris/fs/11243.htm)

39 A la suite des incidents survenus en été 2004 en Ossétie du Sud, la Géorgie envisage à présent la possibilité de quitter la CEI.

40 Géorgie, Russie et Ossétie du Sud.

41 L'ambassadeur Roy Stephen Reeve lors d'une réunion avec la Commission de suivi, à Tbilissi, le 25 octobre 2004.

42 Le 13 août 2004, le Parlement géorgien a adopté une résolution non contraignante demandant le remplacement des troupes russes par une force internationale de maintien de la paix. D'après le chef de la Mission de l'OSCE en Géorgie, un tel dispositif n'est pour l'instant pas envisageable.

43 «La Fédération de Russie respecte et respectera les principes du droit international en matière de stationnement des troupes russes hors de son territoire…selon lequel les contingents militaires de la Fédération sont déployés sur le territoire d'un petit nombre d'Etats seulement, où ils se trouvent par nécessité, uniquement avec l'accord des gouvernements des Etats concernés» (Annexe au message des hautes personnalités russes du 18 janvier 1995, voir le Doc. 7443 de l'Assemblée).

44 Paragraphe 10 xii de l'Avis 193 (1996).

45 Paragraphe 10 xiv de l'Avis 193 (1996).

46 En décembre 2004, pour la première fois depuis 1989, l'ONG de défense des droits de l'homme Freedom House a rétrogradé la Russie de la catégorie «Partiellement libre» à «Pas libre» dans son étude annuelle sur la liberté dans le monde, invoquant notamment le caractère inéquitable des élections.

47 Rapport de la Commission ad hoc du Bureau sur l'observation des élections législatives dans la Fédération de Russie (7 décembre 2003), Doc. 10032 de l'Assemblée du 22 janvier 2004.

48 Rapport de la Commission ad hoc du Bureau sur l'observation de l'élection présidentielle dans la Fédération de Russie (14 mars 2004), Doc. 10150 de l'Assemblée du 26 avril 2004.

49 Rapport préliminaire sur le suivi de la couverture médiatique de l'élection présidentielle en Russie le 14 mars 2004, mis en œuvre par l'Union russe des journalistes et financée par l'Union européenne, SIM Spa. Branche GICO.

50 Au § 9 de la Résolution 1277 (2002), l'Assemblée déclarait «[attendre] également la preuve de l'existence de chaînes de radio et de télévision indépendantes de l'Etat et des gouvernements régionaux, et de l'impartialité des médias lors des prochaines élections parlementaires et présidentielles».

51 Les entités («sujets») jouissent de droits égaux liés aux compétences propres ou partagées. Les dispositions législatives et réglementaires des entités de la Fédération ne doivent pas être en contradiction avec les lois fédérales adoptées dans les domaines de compétence fédérale exclusive ou partagée (les lois fédérales l'emportent en cas de contradiction). En revanche, les réglementations adoptées par les entités dans leurs domaines de compétence prévalent contre la législation fédérale.

52 Le 28 février 1997, la Fédération de Russie a ratifié la Charte européenne de l'autonomie locale. Il s'agissait d'un engagement lié à l'adhésion (Avis 193, § 10 v) qui devait entrer en vigueur dans un délai d'un an après l'adhésion.

53 Source: Rapport du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe sur la démocratie locale et régionale dans la Fédération de Russie, 4 mai 2004 (Réf. CG (11) 5 Partie II).

54 Bien que toutes les entités soient égales en droit, la Constitution ne dit rien sur la subordination des régions. D'une part, les districts (okrugs) sont inclus dans des territoires et régions et, d'autre part, les entités de la Fédération de Russie sont égales en droit tant dans leurs relations internes que dans leurs relations avec les autorités centrales. De ce fait, les autorités des territoires (kraïs) et des régions (oblasts) insistent sur leur priorité en matière économique et politique, tandis que les districts (okrugs) ne se considèrent pas comme faisant partie intégrante des territoires et des régions au sens politique ou juridique. Cette structure dite des «matriochki» («poupées russes») crée un conflit juridique, car une entité légalement indépendante est incluse dans une autre entité, alors qu'elles sont égales en droit.

55 Rapport du ministère des Affaires étrangères des Etats-Unis sur les pratiques en matière de droits de l'homme en 2003, (http://www.state.gov/g/drl/rls/hrrpt/2003/27861.htm)

56 Dans son arrêt du 19 mai 2004 dans l'affaire Goussinski c/ Russie, la Cour européenne des droits de l'homme a estimé qu'«à propos du grief du requérant selon lequel la détention avait pour véritable finalité de contraindre l'intéressé à céder à Gazprom ses sociétés dans le secteur des médias à des conditions défavorables,… force est à la Cour de conclure que la restriction à la liberté du requérant que permettait l'article 5 § 1 c) a été appliquée non seulement dans le but de traduire le requérant devant l'autorité judiciaire compétente parce qu'il y avait des raisons plausibles de le soupçonner d'une infraction, mais aussi pour des raisons étrangères à cette fin». La Cour a donc établi une violation de l'article 18 combiné avec l'article 5 de la Convention. Cela est sans précédent. Le texte complet du jugement est accessible sous le lien suivant: http://www.echr.coe.int/Fr/Press/2004/mai/Annoncearrêts18-190504.htm.

57 D'après les estimations des experts, les parts d'audience des trois chaînes de télévision publiques couvrant l'ensemble du territoire, pour septembre 2004, étaient les suivantes: Première Chaîne (ORT) – 30% (22% à Moscou); Rossia (RTR) – 18% (idem à Moscou); NTV – 13% (15% à Moscou).

58 Le rapport complet est disponible sous le lien http://www.osce.org.

59 Rapport du Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, M. Alvaro Gil Robles, sur ses visites dans la Fédération de Russie (15-30 juillet 2004, 19-29 septembre 2004), BCommDH(2005)3, 12 avril 2005.

60 Un projet de loi visant à transformer la Société de radio et de télévision d'Etat panrusse (VGTRK) en un radiodiffuseur public a été soumis à la Douma d'Etat en 2003 mais n'a jamais été examiné.

61 Telles qu'elles sont énoncées dans la Résolution sur l'avenir du service public de la radiodiffusion adoptée lors de la 4e Conférence ministérielle européenne sur la politique des communications de masse, en décembre 1994, et la Recommandation n° R (96) 10 du Comité des Ministres concernant la garantie de l'indépendance du service public de la radiodiffusion, du 11 septembre 1996.

62 Cette référence a été faite dans le contexte du programme commun Union européenne/Conseil de l'Europe pour le renforcement des structures fédérales et des mécanismes de protection des droits de l'homme, et pour la réforme du système juridique.

63 D'après les autorités russes, en juillet 2004, la prokuratura interdistrict de Mechtchansk, dans la région de Moscou, a refusé d'engager une procédure pénale pour diffamation, à la demande de L.A. Ponomarev, directeur général du mouvement associatif panrusse «Za prava tcheloveka» (Pour les droits de l'homme), contre le premier directeur adjoint de la Direction générale de l'exécution des peines du ministère fédéral de la Justice, le lieutenant-général V.K. Kraiev, au motif que les informations fournies par le requérant n'ont pas pu être corroborées.

64 http://president.kremlin.ru/eng/speeches/2004/05/26/1309_type70029_71650.shtml.

65 L'adoption d'une nouvelle loi sur le Bureau du commissaire aux droits de l'homme était un engagement contracté au moment de l'adhésion (Avis 193, § 7 v).

66 En principe, le médiateur fédéral s'occupe des plaintes visant des actes ou omissions des autorités fédérales. Cependant, il examine également les plaintes déposées par des particuliers vivant dans des régions où il n'existe pas de médiateur, et il peut aussi examiner les plaintes dont un médiateur régional s'est préalablement occupé.

67 Le 1er juillet 2004, la Cour constitutionnelle a décidé que le médiateur fédéral ne pouvait pas être empêché d'assister aux procédures judiciaires et de les observer.

68 Sur la base des informations concernant la violation, le médiateur peut intenter un procès, demander que l'organe public compétent applique des sanctions administratives, vérifier auprès du tribunal ou du parquet qu'une décision ou une résolution est en voie d'application et échanger des conclusions avec les responsables ou organes compétents, ou former un recours devant la Cour constitutionnelle.

69 En 1993, il a été décidé qu'en attendant l'adoption de la loi portant création du médiateur, Sergueï Kovalev, qui présidait la Commission présidentielle des droits de l'homme, ferait fonction de médiateur.

70 Selon le rapport annuel de M. Mironov, présenté le 10 février 2004, ce sont au total 36 634 plaintes et recours qui avaient été déposées et formés auprès de cette institution en 2003. Depuis 1998, le nombre des plaintes a en moyenne augmenté chaque année d'environ 10%, le principal domaine concerné (48,7%) étant lié au droit de la procédure pénale et de l'exécution des peines. Dans son premier rapport annuel, remis en mars 2005, M. Loukine fait état de plus de 35 000 requêtes auprès du médiateur fédéral pour l'année 2004.Voir www.ombudsmanrf.ru.

71 À l'heure actuelle, 177 postes seulement ont été pourvus.

72 La situation dans les orphelinats est jugée problématique.

73 Voir la «Déclaration de Grozny», adoptée le 24 septembre 2004 lors de la conférence sur «Les problèmes des droits de l'homme en République tchétchène» (CommDH(2004)17).

74 Cette nouvelle institution de médiation n'a rien à voir avec la «commission spéciale» créée dans la République tchétchène en 2000, et qui était placée sous l'autorité du Représentant spécial du président Poutine pour les libertés et droits fondamentaux en Tchétchénie – d'abord Vladimir Kalamanov, puis Abdoul Khakim Soultygov. Plusieurs experts du Conseil de l'Europe avaient été détachés auprès de cet organe aux termes d'un accord conclu en mars 2000 avec le ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie. Chargée de suivre la situation des droits de l'homme dans la république, cette commission spéciale a passé le plus clair de son temps à s'occuper de cas de «disparitions» en Tchétchénie attribuées aux forces fédérales et à transmettre les plaintes aux autorités aux fins d'enquête et de poursuites. La commission spéciale a été dissoute en janvier 2004.

75 Conseils pour la lutte contre la corruption, pour la culture et les arts, pour l'amélioration de la justice, pour la codification et l'amélioration de la législation civile, pour la science, les technologies et l'éducation, pour la coopération avec les associations religieuses, et pour la culture physique et les sports, et le conseil héraldique.

76 La création de cette commission remonte à 1993.

77 La commission tient une réunion officielle tous les deux mois; Mme Pamfilova dispose d'un petit bureau dans les locaux de l'administration présidentielle et la commission plénière rencontre le président Poutine une fois par an.

78 Voir la résolution 48/134 de l'Assemblée générale des Nations Unies, adoptée le 20 décembre 1993.

79 Résolution (97)11 sur la coopération entre les institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l'homme des États membres, et entre celles-ci et le Conseil de l'Europe, adoptée par le Comité des Ministres le 30 septembre 1997.

80  Voir l'allocution d'ouverture prononcée par le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe lors de la Conférence paneuropéenne sur le thème «Le ministère public au XXIe siècle», Strasbourg, mai 2000.

81  Voir la loi fédérale sur «les juges de première instance de la Fédération de Russie» n° 188-FZ, 17 décembre 1998 (modifiée le 19 juin et le 22 août 2004). Ces juges siégeant seuls connaissent d'affaires pénales, mais aussi d'affaires civiles ou administratives telles que les divorces, la répartition des biens entre conjoints, d'autres causes matrimoniales, certains conflits du travail, les affaires concernant l'occupation du sol et la construction et certaines affaires administratives visées par le Code des infractions administratives.

82 À titre de mesure générale provisoire destinée à garantir l'exécution de l'arrêt Posokhov de la Cour européenne, en date du 4 mars 2003 (Rés. DH (2004) 46), le Vice-Président de la Cour suprême a, le 17 avril 2003, adressé aux présidents de tous les tribunaux une circulaire dans laquelle il attirait leur attention sur les conclusions de la Cour ainsi que sur la nécessité d'assurer l'application des règles régissant la participation de juges non professionnels aux procès pénaux jusqu'au 1er janvier 2004, date à laquelle le nouveau Code de procédure pénale serait pleinement en vigueur.

83 Les tribunaux avec jury ont été institués en Russie à la faveur de la réforme judiciaire de 1864 et ont fonctionné jusqu'en 1917. Ils n'ont été supprimés en droit qu'en 1922. Entre 1864 et 1917, les tribunaux avec jury ont examiné près de 76% de l'ensemble des affaires pénales.

84 Les tribunaux avec jury se composent d'un juge professionnel et de 12 jurés. C'est à l'accusé de choisir le procès avec jury. Toutefois, si l'accusation concerne un groupe de personnes, le tribunal avec jury se charge de l'affaire si l'un des accusés le demande. Les intéressés peuvent se pourvoir en cassation contre des verdicts des tribunaux avec jury auprès de la Cour suprême de la Fédération de Russie.

85 Au cours des trois premiers mois de 2004, 146 affaires ont été jugées et 138 jugements ont été prononcés, se soldant par 233 condamnations et 66 acquittements.

86 En 2003, la Cour suprême a examiné 299 appels contre des jugements rendus par des tribunaux avec jury (concernant 551 accusés): 28 personnes ont vu l'annulation d'un verdict de culpabilité et 34 celle d'un verdict de non-culpabilité.

87 Interview donnée au journal «Rossiiskaïa Gazeta», 11 novembre 2004.

88 Loi n° 1-FKZ, adoptée le 21 décembre 1996, modifiée le 15 décembre 2001 et le 4 juillet 2003.

89 La Cour suprême (125 membres) est la plus haute instance judiciaire pour les questions civiles, pénales et administratives. Au niveau immédiatement inférieur, on trouve les cours suprêmes des entités de la Fédération. Le troisième niveau comprend les tribunaux implantés dans les districts et les petites villes, qui triatent la plus grande partie des affaires. Un système distinct de tribunaux militaires relève directement de la Cour suprême.

90 La Cour suprême d'arbitrage, qui est dirigée par un conseil composé d'un président et de quatre vice-présidents, est la juridiction la plus élevée pour le règlement des litiges économiques. Il existe aussi des cours d'arbitrage à des degrés de juridiction inférieurs.

91 La Cour constitutionnelle, qui se compose de 19 membres, statue sur la conformité à la Constitution fédérale des lois fédérales, des décrets et ordonnances présidentiels et fédéraux et des constitutions, chartes et lois régionales. Les traités conclus entre le gouvernement central et une juridiction régionale ainsi qu'entre les juridictions régionales font l'objet du même contrôle. Par ailleurs, la Cour constitutionnelle tranche les litiges opposant les organes fédéraux ou locaux du pouvoir, et il peut aussi lui être demandé d'interpréter la Constitution fédérale. La Cour constitutionnelle a cessé provisoirement d'exister après la dissolution du Parlement par Eltsine en octobre 1993. Bien qu'elle soit prévue par la nouvelle Constitution, la Cour était encore moribonde en 1994 en l'absence de nouvelle loi concernant ses procédures et sa composition. En 1995, le Conseil de la Fédération a fini par approuver les nominations des membres de la Cour constitutionnelle, qui a recommencé à fonctionner cette année-là.

92 Voir «The judicial system of the Russian Federation: a system-crisis of independance» (Le système judiciaire de la Fédération de Russie: une crise systémique de l'indépendance), sur le site www.russianaxis.org.

93 D'après cette même source, les crédits accordés à la défense nationale s'élèvent à 15,47% du budget, soit deux ou trois fois plus que le budget de la défense de la plupart des pays européens.

94 Nous avons été informés que dans l'ensemble de la Fédération de Russie (145 millions d'habitants), le nombre total de juges des juridictions de droit commun est de 23 000.

95 Voir l'article 6 de la loi fédérale sur le statut des juges n° 91-Fz, en date du 1er juin 1995, modifié en dernier lieu le 22 août 2004. En vertu de la précédente loi sur le statut des juges (26 juin 1992), les juges devaient être nommés à titre permanent. Cela a été modifié en 2001: les juges nommés après 1995 doivent maintenant accomplir une période probatoire de trois ans avant de devenir inamovibles (depuis 2003, l'âge de départ obligatoire à la retraite est fixé à 65 ans).

96 Mais pour deux mandats consécutifs au maximum.

97 Loi n° 30-FZ, en date du 14 mars 2002, modifiée le 22 août 2004.

98 Il est contraire à la Charte européenne sur le statut des juges (paragraphe 1.3.) que leur organe représentatif (le Congrès de la magistrature) soit exclu de la composition de l'organe responsable de la sélection, du recrutement, de la nomination, de l'avancement et de la cessation de fonction des magistrats. Aux termes dudit § 1.3. une telle autorité doit être indépendante des pouvoirs exécutif et législatif et composée au moins pour moitié de juges élus par leurs pairs selon des modalités garantissant la représentation la plus large de ceux-ci.

99 Ex-juge au tribunal municipal de Moscou, Olga Koudechkina a déclaré: «si ce projet de loi épouvantable est approuvé, cela voudra dire que nous perdrons tout espoir de voir un pouvoir judiciaire indépendant en Russie». Mme Koudechkina s'est vu interdire l'exercice aux fonctions de juge en 2003 après avoir refusé de statuer comme la prokuratura l'avait demandé dans l'affaire de Pavel Zaïtsev, l'enquêteur du ministère de l'Intérieur qui avait mené une enquête très contestée sur une fraude concernant le magasin de meubles Tri Kita.

100 La version anglaise de la loi fédérale sur la prokuratura n°2201-1, en date du 17 janvier 1992, dans sa version du 17 novembre 1995, modifiée par la suite le 10 février et le 19 novembre 1999, le 2 janvier et le 27 décembre 2000, les 29 et 30 décembre 2001, les 28 juin, 25 juillet et 5 octobre 2002, le 30 juin 2003 et le 22 août 2004, peut être consultée à l'adresse http://www.venice.coe.int.

101 La procédure d'approbation de la nomination diffère selon les entités de la Fédération. Selon les cas, l'approbation doit être donnée par le gouverneur, la Douma régionale ou un autre organe législatif. Quel que soit le mode de nomination des Procureurs régionaux, ils relèvent tous directement du Procureur général de la Fédération de Russie, qui peut les révoquer sans consultation préalable des autorités régionales.

102 On notera que le Procureur général présente un rapport annuel au Président, à la Douma et au Conseil de la Fédération (article 11 de la loi). Il n'est toutefois pas tenu de le publier.

103 Dès sa création en 1722 par Pierre le Grand, la Prokuratura, surnommée «l'oeil du tsar», a été l'institution juridique essentielle chargée de contrôler l'exécution par les autorités gouvernementales des décisions du pouvoir. Les réformes judiciaires de 1864 l'ont rattachée au ministère de la Justice et ont réduit son influence sur le pouvoir judiciaire, mais elle a été rétablie en 1922. La Constitution stalinienne de 1936 a encore renforcé la prokuratura en disposant que les procureurs généraux étaient indépendants des autorités locales. À l'époque de Nikita Khrouchtchev, on a entrepris de soustraire la prokuratura au contrôle du parti et de mener d'autres réformes structurelles, mais après que Leonid Brejnev eut écarté Khrouchtchev du pouvoir, en 1964, ces réformes ont été abandonnées. Le mouvement lancé vers la fin des années 70 pour renforcer la «légalité socialiste» a engagé la prokuratura dans une campagne de lutte contre toutes les formes de corruption, qui s'est poursuivie pendant les années 80 avec Andropov et Gorbatchev.

104 La disposition applicable à la prokuratura est l'article 129 de la Constitution, cité dans le chapitre consacré au pouvoir judiciaire: il dispose (§ 5) que les attributions, l'organisation et les modalités de fonctionnement de la prokuratura de la Fédération de Russie sont définis par la loi fédérale.

105 En juillet 2003, toutefois, la Cour constitutionnelle fédérale a retiré à la prokuratura le pouvoir de saisir les juridictions de droit commun afin de faire déclarer des dispositions des constitutions (lois) régionales incompatibles avec les lois fédérales. La prokuratura n'en conserve pas moins celui de contester devant les tribunaux la conformité des lois régionales avec les lois fédérales.

106 Selon les statistiques de la prokuratura pour 2003, les procureurs au mis au jour 1 326 000 violations de la législation et 190 000 actes juridiques illégaux. Les demandes d'annulation présentées par les procureurs ont abouti à la révision ou l'annulation de plus de 10 000 actes des autorités régionales et de 108 000 actes des organes de l'autonomie locale. 232 000 actions ont été engagées «pour la défense des intérêts de la société ou de l'Etat».

107 Selon les statistiques de la prokuratura pour 2003, «409 000 citoyens ont été rétablis dans leurs droits».

108 Consultable (en russe) sur le site Web de la Cour à l'adresse http://ks.rfnet.ru.

109 Selon les statistiques publiées en janvier 2004 par la prokuratura, 2 576 000 infractions ont été enregistrées en 2003; 1 236 000 personnes ont été mises en examen, et 711 000 d'entre elles ont été reconnues coupables. Dans 22 000 affaires, le procureur a refusé d'engager des poursuites pénales et dans 62 000 autres, un examen supplémentaire a été requis. La prokuratura a enquêté sur 112 000 affaires (dont 26 000 meurtres et 8 000 affaires de corruption).

110 On nous a dit que plus de 100 avocats avaient été révoqués par les commissions d'habilitation au cours des deux dernières années.

111 Vedomosti UIS, n° 8/2002.

112 Nous nous sommes rendus dans le SIZO n° 1 et l'établissement pénitentiaire n° 12 de Khabarovsk, lors de notre visite en Extrême-Orient russe en novembre 2003 ainsi que dans le SIZO n° 1 de Vladivostok (Primorskii kraï). Les conditions de détention y étaient encore loin d'être satisfaisantes.

113 Selon la Convention, la publication des rapports du CPT n'est pas une obligation qui s'impose aux Etats membres. Toutefois, depuis 1989, une «bonne pratique» selon laquelle les Etats autorisent la publication s'est établie.

114 Les établissements de rééducation par le travail apportent une contribution importante à l'économie nationale. Au début des années 90, la valeur de la production industrielle dans les camps était estimée à 100 millions de dollars, à quoi les camps implantés dans les forêts ajoutaient environ 27 millions de dollars, grâce essentiellement à la production de bois de construction, de traverses de chemin de fer et de datchas. Nous ne disposons pas de statistiques récentes.

115 D'après le Centre international d'études pénitentiaires, basé à Londres, la Fédération de Russie est encore au troisième rang mondial en matière de population carcérale, après les Etats-Unis (2 millions de détenus) et la Chine (1,5 millions). En janvier 2005, la Russie comptait un taux de population carcérale de 532 détenus pour 100 000 habitants (688 en 1998); on comptait au total 1 025 établissements pénitentiaires (760 colonies, 195 SIZO (détention provisoire), 8 prisons et 62 colonies pour mineurs). Avec une capacité officielle de 960 066 personnes, le taux d'occupation du système pénitentiaire est de 79%.

116 Déclaration du chef du Service fédéral de l'exécution des peines, ITAR-TASS, 16 février 2005.

117 Ces statistiques (au 1er septembre 2004) ont été fournies au Comité des Ministres dans le cadre de sa fonction de contrôle de l'exécution de l'arrêt de la CEDH dans l'affaire Kalachnikov c. Russie, en date du 15 octobre 2002, dans lequel la Cour a jugé notamment que la détention du requérant pendant cinq ans dans la région de Magadan, dans une cellule construite pour huit détenus mais qui en accueillait 24 et sans accès à des soins médicaux suffisants, constituait une violation de l'article 3 de la Convention. Voir également la Résolution intérimaire DH (2003)123 adoptée le 4 juin 2003.

118 C'est là un grand progrès par rapport au mètre carré dont chaque détenu disposait précédemment. D'après les commentaires de la délégation russe, la superficie moyenne est de 3,9 m², et donc très proche des normes européennes qui prévoient 4 m² par détenu.

119 Nous avons été informés que le budget du système pénitentiaire avait été multiplié par six depuis 1998.

120 D'après le rapport de 2005 de l'Organisation Mondiale de la Santé sur le taux d'infection de la tuberculose, le nombre des cas enregistrés parmi la population carcérale de la Fédération de Russie a diminué. Depuis 2001, les cas signalés ont diminué, passant de plus de 24 000 cas à environ 16 000 en 2003. Cependant, le nombre des cas pour l'ensemble de la population a augmenté (12e rang au classement mondial du nombre annuel de signalements de cas de tuberculose), en particulier parmi les enfants. Le taux de mortalité due à la tuberculose est de plus en plus haut, avec environ 20 cas pour 100 000 habitants. Voir http://www.who.int/tb/publications/global_report/en. D'après les commentaires de la délégation russe, au 1er janvier 2005, il y avait 50 915 personnes détenues dans le système pénitentiaire atteintes d'une forme active de la tuberculose. Le nombre total des personnes infectées par le VIH était de 31 000.

121 Rapport sur «Les lieux de détention dans la Fédération de Russie», publié en octobre 2004, à la suite d'une visite des lieux de détention effectuée en février 2004 par des ONG s'occupant des droits de l'homme.

122 Sous la responsabilité du ministère de la Justice, 37 hôpitaux et 57 centres de soins dispensent un traitement aux détenus atteints de tuberculose. Rapport 2005 de l'OMS, http://www.who.int/tb/publications/global_report/en.

123 En 2004, 3 044 personnes sont mortes de maladies dans les établissements du GUIN (13% de moins qu'en 2003) – chiffres provenant des commentaires des autorités russes sur l'avant-projet de rapport. Dans le même temps, d'après ces commentaires, aucun cas de torture n'a été signalé dans le système pénitentiaire.

124 Le centre de détention provisoire de Lefortovo avait été transféré au ministère de la Justice en 1993 mais réintégré dans le FSB en 1994.

125 Des ONG nous ont même dit que dans un certain nombre de cas, compte tenu des conditions de détention épouvantables dans les SIZO ordinaires, les suspects avouaient avoir commis des infractions relevant de la compétence du FSB uniquement pour obtenir leur transfert à Lefortovo.

126 Loi fédérale n° 40-FZ adoptée par la Douma d'Etat le 22 février 1995 et signée par le Président B. Eltsine le 3 avril 1995. Un certain nombre de décrets présidentiels (n° 633 du 23 juin 1995, n° 806 du 6 juillet 1998, n° 308 du 11 mars 2003 et n° 960 du 11 août 2003) ont précisé la loi et la structure du FSB. La dernière restructuration en date du FSB a eu lieu le 11 juin 2004 par le biais d'un décret présidentiel: les 6 départements existants ont été réorganisés en 8 nouveaux services (surveillance des frontières; contre-espionnage; sécurité économique; personnel scientifique et technique; contrôle; analyse et planification stratégique; protection de l'ordre constitutionnel et lutte contre le terrorisme). Le directeur du FSB, qui est nommé et révoqué directement par le Président, a désormais 4 adjoints au lieu de 11.

127 En mars 2003, le président Poutine a signé un décret portant dissolution de l'Agence fédérale de communications et d'information (FAPSI) et du Service fédéral de surveillance des frontières (FSP) et leur intégration dans le FSB, annulant ainsi la décision prise par Eltsine en 1992 de démanteler le KGB en créant plusieurs agences fédérales distinctes.

128 La traduction anglaise de cette loi est consultable à l'adresse www.fas.org.

129 Les dispositions concernées sont les articles 7 et 8 de la loi fédérale «sur la détention des personnes soupçonnées ou accusées d'avoir commis des infractions».

130 Loi sur les secrets d'Etat n° 5485-1 adoptée le 21 juillet 1993 et modifiée le 6 octobre 1997, le 30 juin et le 11 novembre 2003, le 29 juin et le 22 août 2004.

131 Décret présidentiel n° 1203 sur «l'approbation de la liste des informations liées aux secrets d'Etat», en date du 30 novembre 1995 (modifié le 24 janvier 1998, le 6 juin 2001, le 10 septembre 2001 et le 29 mai 2002). S'appuyant sur la liste complétée approuvée par le décret, les directeurs des organes de l'état (qui y sont habilités) approuvent des listes détaillées d'informations classées secrètes. La loi ne prescrit pas la publication de ces listes détaillées.

132 Voir l'arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Nikitine c. Russie le 20 juillet 2004, § 16.

133 Voir requête n° 55565/00, Bartik c. Russie, décision de recevabilité du 16 septembre 2004.

134 Le ministre fédéral de l'Intérieur a déclaré le 16 février 2005 que «le risque de se voir infliger une peine de prison pour corruption est minime et il l'est d'autant plus que les fonctions exercées sont élevées». D'après l'agence Itar-Tass, seules 5% des personnes arrêtées dans des affaires de corruption sont des hauts fonctionnaires et, en Russie, ceux qui acceptent les pots-de-vin ne sont condamnés qu'une fois sur dix.

135 En 2005, la Russie se situe au 90e rang sur 146 pays selon l'indice de perception de la corruption de Transparency International.

136 Toutefois, le ministère de l'Intérieur a affirmé avoir remporté certains succès dans la lutte contre la corruption. En 2002, il a dénoncé 21 000 policiers qui avaient commis des infractions pénales ou autres et en a licencié 17 000, y compris des commissaires de police, dans 10 des 89 régions du pays. En juin 2003, une opération conjointe du FSB et du parquet a permis d'arrêter trois colonels et trois lieutenants-colonels du département d'enquêtes judiciaires de Moscou (MUR), ainsi que Vladimir Ganaïev, un général de corps d'armée qui dirigeait le département de la sécurité du ministère des Situations d'urgence et était responsable de l'homologation de tous les bâtiments en matière de sécurité incendie. Ils ont été accusé de diriger une bande de policiers renégats qui plaçaient subrepticement des armes, des munitions et de la drogue chez des personnes qu'ils faisaient ensuite chanter, et rackettaient des casinos, des centres commerciaux et des restaurants de Moscou. Voir www.transparency.org.

137 S'appuyant sur l'évaluation par les pairs et la pression des pairs, le MONEYVAL contrôle le respect de la convention relative au blanchiment de l'argent, de la Directive de la CE du 10 juin 1991 sur la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de l'argent, des 40 recommandations du Groupe d'action financière (GAFI) de l'OCDE et de la Convention de Vienne de 1988. Créé en 1997, le MONEYVAL regroupe 27 Etats participants.

138 La Russie bénéficie d'un programme de coopération technique du Conseil de l'Europe appelé MOLI, d'un montant de 2,5 millions d'euros, financé par l'UE, aux fins de l'application pratique de cette loi.

139 Source: www.ombudsmanrf.ru.

140 Une des conclusions d'absence de violation a été rendue dans l'affaire Nikitine c. Russie, dans laquelle la Cour a considéré que l'introduction d'une demande de réexamen d'un jugement définitif disculpant le requérant de l'accusation d'espionnage n'était pas une violation de l'article 4 du Protocole n° 7 consacrant le principe non bis in idem.

141 Sur ce nombre, environ 9 000 ont été déclarées irrecevables et quelque 6 500 affaires sont en état. Le nombre des requêtes par rapport à la population était de 0,3 pour 10 000 habitants en 2002, et de 0,4 en 2003.

142 Affaires Issaïeva c. Russie (requête n° 57950/00), Issaïeva, Youssoupova, et Bazaïeva c. Russie (requête nos 57947/00, 57948/00 et 57949/00), et Khachiev et Akaïeva c. Russie (requêtes nos 57942/00 et 57945/00).

143 L'arrêt deviendra définitif dans les conditions définies par l'article 44 § 2 de la Convention.

144 Adoptée par le Comité des Ministres le 12 mai 2004, lors de sa 114e Session.

145 Résolution 1323 (2003) sur la situation des droits de l'homme en République tchétchène, en date du 2 avril 2003.

146 Résolution 1403 (2004) sur la situation des droits de l'homme en République tchétchène, en date du 7 octobre 2004.

147 Voir également la Résolution de l'Assemblée générale de la Fédération internationale Helsinki sur la crise des droits de l'homme en République tchétchène et les menaces qu'elle comporte, Moscou et Vienne, 15 novembre 2004.

148 Il est difficile de fournir des statistiques exactes concernant les disparitions et les statistiques officielles sont elles aussi variables: par exemple, le médiateur par intérim pour la Tchétchénie, M. Khassouïev, a déclaré en octobre 2004 que plus de 2 500 personnes ont été enlevées au cours des 4 dernières années, tandis que le médiateur fédéral, M. Loukine, a cité le chiffre, uniquement pour les onze premiers mois de 2004, de 1 700 personnes portées disparues (http://www.hro.org/war/2005/02/17.php). Voir aussi les rapports publiés par la Fédération internationale Helsinki en mars 2005 et par Human Rights Watch en février 2005.

149 Voir l'échantillon de cas individuels de violations des droits de l'homme en Tchétchénie annexé au Rapport de l'APCE sur la situation des droits de l'homme en République tchétchène, Doc. 10283, 20 septembre 2004.

150 Les arrêts deviendront définitifs dans les conditions définies par l'article 44 § 2 de la Convention.

151 Amnesty International signale la disparition, le 10 avril 2004, d'un jeune homme de 24 ans, Anzor Pokaev, dont le père avait, avec neuf autres habitants de Starie Atagi, introduit en juillet 2003 une requête auprès de la Cour européenne des droits de l'homme. Le lendemain matin, le corps criblé de balles d'Anzor Pokaev a été retrouvé à une dizaine de kilomètres de Starie Atagi. Selon un rapport de la Fédération internationale Helsinki publié le 15 septembre 2004, d'autres requérants, tels que Zoura Bitieva (n° 57953/00), ont été tués ou, comme Marzet Imakaïeva (n° 7615/02) et Sharfoudine Sambiev (n° 38693/04), ont été persécutés. Ce rapport précise aussi que certaines organisations qui représentent les requérants de Tchétchénie devant la CEDH, à savoir Memorial, le Centre européen de défense des droits de l'homme et Initiative Justice Tchétchénie, ont signalé des incidents visant certains de leurs mandants. Dans des lettres adressées à la CEDH, les organisations mentionnent 13 affaires, pour un total de 29 chefs d'accusation, dans lesquelles différents requérants ont été persécutés en liaison avec leurs tentative d'obtenir justice. Globalement, les affaires de persécution des requérants auprès de la CEDH comportent à la fois les menaces verbales et écrites, parfois proférées à l'encontre d'autres membres de la famille. Dans une affaire, le requérant a perdu son emploi. Dans deux autres, des soldats ont illégalement perquisitionné la maison du requérant. Au moins un des requérants a été cambriolé. Dans quatre affaires, les requérants ont été battus. Dans un cas, le requérant a dû se cacher. Dans deux cas au moins, les requérants envisagent de retirer leurs plaintes. Deux l'ont fait officiellement. La plupart des menaces et des violences ont été signalées en 2003 et 2004. Les forces fédérales seraient impliquées dans toutes ces affaires. Les organisations qui représentent les requérants affirment que le fait que la CEDH ait notifié les incidents aux autorités russes a parfois eu des conséquences positives, en diminuant la pression exercée sur les requérants et leurs familles.

152 «La détention de membres de la famille des terroristes pendant une attaque terroriste contribuerait certainement à sauver des vies», a déclaré M. Oustinov devant la Douma d'Etat. Dans son allocution, il a exhorté le parlement à étudier la question au moment de réviser la loi sur le terrorisme. En réponse, le président de la Douma, Boris Grizlov, a indiqué que le parlement russe s'apprête à examiner un amendement à la loi sur le terrorisme en vigueur qui autoriserait les forces fédérales à prendre des otages en cas d'attentat terroriste. Moscow News, http://www.moscownews.com.

153 Rapport d'Amnesty International intitulé “Russian Federation: The Risk of Speaking Out. Attacks on Human Rights Defenders in the context of the armed conflict in Chechnya”, novembre 2004. www.amnesty.org. Amnesty International dispose d'informations dûment étayées selon lesquelles plusieurs membres de la Société pour l'amitié russo-tchétchène ont été pris pour cibles à plusieurs reprises par les forces armées fédérales et tchétchènes en Tchétchénie. Le directeur du centre d'information de cette Société pour le Caucase du Nord, Imran Ejiev, a été placé en détention plus d'une douzaine de fois au cours des cinq dernières années. Plusieurs autres membres de cette Société ont été tués, semble-t-il par les forces russes, dans le cadre de ce qui paraît être une campagne visant à prendre délibérément pour cibles les militants des droits de l'homme. Les enquêtes judiciaires sur ces incidents n'ont donné aucun résultat et nul n'a eu à répondre de ces actes. En août 2004, il a été mis fin à ces enquêtes.

154 US Department of State Country Reports on Human Rights Practices in 2003 and 2004 [Rapports du ministère des Affaires étrangères des Etats-Unis sur les pratiques en matière de droits de l'homme en 2003 et 2004], http://www.state.gov.

155 Ses collègues universitaires et défenseurs des droits de l'homme estiment que son assassinat est lié à son activité dans le domaine des droits de l'homme, compte tenu en particulier de sa campagne contre le racisme et ses travaux sur le mouvement «skinhead». Le procureur adjoint de Saint-Pétersbourg aurait déclaré que les enquêteurs pensent également que son activité de chercheur et de témoin expert dans le cadre de procès et d'enquêtes concernant des affaires de racisme est le mobile le plus vraisemblable de son assassinat. Cela étant, il aurait également indiqué que cet assassinat pourrait être un acte de hooliganisme, explication souvent donnée par la police à propos d'agressions qui pourraient être motivées par le racisme.

156 L'article 20 (2) de la Constitution dispose que la peine de mort, tant qu'elle n'est pas abolie, peut être prévue par la loi fédérale comme une peine exceptionnelle dans le cas de crimes particulièrement graves contre la vie, et que l'accusé doit avoir le droit à ce que son affaire soit examinée par un tribunal avec jury. En vertu du Code pénal en vigueur dans la Fédération de Russie, la peine de mort figure dans la liste des peines possibles (article 44); la peine de mort est considérée comme une peine exceptionnelle qui ne peut être prononcée que dans le cas de crimes particulièrement graves contre la vie (article 59); cinq articles du Code prévoient la peine de mort parmi les peines possibles dans les cas suivants: meurtre aggravé; atteinte à la vie d'une personnalité publique ou d'un homme d'Etat; atteinte à la vie d'une personne qui administre la justice ou conduit des enquêtes; atteinte à la vie d'un agent des forces de l'ordre; génocide.

157 «La peine de mort: hors-la-loi!», Le Conseil de l'Europe et la peine de mort, octobre 2001.

158 À la suite de son adhésion récente au Conseil de l'Europe, Monaco a signé le Protocole le 5 octobre 2004 et la ratification devrait intervenir prochainement.

159 Voir la Résolution 1179 (1999), adoptée le 27 janvier 1999, et la Résolution 1194 (1999), adoptée le 24 juin 1999 (Doc. 8424, rapporteurs: M. Kelam et Mme Severinsen).

160 Voir la Résolution 1304 (2002) adoptée le 26 septembre 2002 (Doc. 9542, rapporteurs: Mme Belohorská et M. Jaskierna).

161 En vertu de la loi fédérale nº 162-FZ, du 8 décembre 2003, l'article 117 du Code (mauvais traitements) a été complétée par le paragraphe suivant: «Aux fins du présent article et des autres articles du Code, la torture est définie comme le fait de causer des souffrances physiques ou morales en vue de contraindre un individu à témoigner ou à commettre d'autres actes contre sa volonté, à titre de peine ou à d'autres fins».

162 «Places of detention in the Russian Federation», rapport sur la visite de la délégation d'ONG de défense des droits de l'homme dans les établissements de détention de la Fédération de Russie, les 19 et 20 février 2004.

163 Un exemple récent de mauvais traitements est dénoncé dans l'avis d'urgence publié par Amnesty International le 18 novembre 2004. Victor Knaus, âgé de 15 ans, aurait été battu et menacé par la police russe pour le contraindre à avouer le meurtre de deux jeunes garçons. Les éléments de preuve obtenus par la contrainte peuvent être utilisés contre lui au cours du procès qui devrait s'ouvrir dans les prochaines semaines.

164 RFE/RL Newsline Vol. 8, n° 156, Partie 1, 17 août 2004.

165 Par exemple, le site officiel du ministère de l'Intérieur publie des rapports réguliers sur le nombre d'infractions enregistrées et élucidées. De janvier à octobre 2004, 2 407 800 infractions ont été enregistrées et 1 305 100 ont été élucidées (2% de plus que durant la même période en 2003).

166 Voir, par exemple, le rapport intitulé «Tortures and ill-treatment in the Russian Police: roots of unlawful practices», publié par le centre de recherche pour la société civile DEMOS (http://www.publicverdict.org).

167 http://www.unhchr.ch/huricane/huricane.nsf/view01/F4314BAD6D4F1D3FC1256F75004E65FF?opendocument

168 Voir aussi le rapport de 2003 de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) soumis au Comité des Nations Unies pour les droits économiques, sociaux et culturels.

169 L'expression «mauvais traitements» a une portée plus large que le mot «dedovchtchina», qui désigne seulement le bizutage des conscrits de première année par leurs homologues de deuxième année. Ainsi, «dedovchtchina» ne s'applique pas aux intimidations que les officiers font subir aux conscrits (lesquelles représentent environ 30% de l'ensemble des infractions commises dans l'armée, selon les estimations du Comité des mères de soldats). Nous avons aussi tenu compte du fait que les statistiques officielles portent sur les violations entrant dans la catégorie des «relations non prévues par la loi» (article 335 du Code pénal, «Infractions aux règles légales dans les relations entre les militaires sans lien de subordination entre eux»). Ces statistiques ne rendent pas compte non plus du bizutage infligé par des officiers car il relève des situations de subordination.

170 Rapport de Human Rights Watch «The wrongs of passage: Inhuman and Degrading Treatment of New Recruits in the Russian Armed Forces», publié le 20 octobre 2004. Le rapport se fonde sur des recherches faites en 2002 et 2003 dans plusieurs régions de la Russie, notamment Tcheliabinsk, Moscou, Novokouznetsk, Novossibirsk, Saint-Pétersbourg, Vladivostok et Volgograd. HRW a interviewé plus d'une centaine de conscrits, leurs parents, des fonctionnaires, des avocats, des spécialistes des ONG et d'anciens militaires. Les conscrits avaient fait leur service militaire sur plus de 50 bases dans plus de 25 des 89 régions de la Fédération. HRW a également étudié attentivement les dossiers d'archives de plusieurs groupes de défense des droits des soldats. En février 2004, HRW a discuté des conclusions de son enquête à l'occasion d'une réunion avec des fonctionnaires du ministère de la Défense à Moscou.

171 D'après différentes estimations, environ la moitié des jeunes gens exemptés de service militaire obtiennent leur exemption par le versement de pots-de-vin (qui peuvent aller jusqu'à 5 000 dollars dans certaines régions).

172 http://www.mil.ru/releases.

173 Au cours de notre visite à Moscou, nous avons tenté de vérifier cette information auprès du ministère de la Défense et de la prokuratura militaire. Les représentants du ministère ont déclaré que les statistiques étaient confidentielles et relevaient du ministère de la Défense. Le substitut du procureur militaire, M. Aroutiounian, n'a à son tour ni confirmé ni infirmé les données citées par son supérieur et a promis de fournir aux co-rapporteurs des statistiques exactes avant la fin de leur mission (aucun renseignement n'avait été reçu à la date de la rédaction du présent rapport).

174 Interview du Premier procureur militaire, M. Savenkov, pour le magazine «ITOGUI», le 26 octobre 2004, http://genproc.gov.ru.

175 En août 2004, une peine de 3 ans d'emprisonnement avec sursis assortie d'une période de probation de 2 ans a été prononcée à l'encontre du commandant responsable du transport.

176 «Le recours à la main-d'œuvre constituée par une personne à l'égard de laquelle les pouvoirs inhérents au droit de propriété sont exercés si, pour des raisons indépendantes de sa volonté, l'intéressé ne peut pas refuser d'accomplir le travail».

177 De l'avis de la Cour, des instruments de droit public tels que l'action pénale et la détention provisoire n'ont pas pour objectif d'être utilisés dans le cadre de négociations commerciales. Le fait que Gazprom ait demandé au requérant de signer l'«Accord de juillet» alors qu'il était en prison, qu'un ministre ait entériné cet accord en apposant sa signature et qu'un magistrat instructeur ait ensuite exécuté cet accord en abandonnant les poursuites donne fortement à entendre que l'exercice de poursuites contre le requérant a été utilisé pour l'intimider. Dans ces conditions, la Cour ne peut que juger que la restriction de la liberté du requérant autorisée en vertu de l'article 5, § 1 (c) n'a pas été appliquée à seule fin de faire comparaître le requérant devant l'autorité légale compétente sur la base d'un soupçon raisonnable qu'il avait commis une infraction, mais aussi pour d'autres motifs.

178 En février 2005, l'Association du barreau international a adressé une lettre à la Prokuratura générale de la Fédération de Russie lui demandant la libération de Svietlana Bakhmina. Le 9 mars 2005, le tribunal municipal de Moscou a confirmé la décision du tribunal Basmanny de Moscou de prolonger jusqu'au 2 mai la période de détention de l'ancienne employée de Ioukos.

179 Dans l'affaire Ryabykh, le jugement de première instance a été infirmé cinq fois.

180 En réponse à d'autres arrêts relevant des violations similaires, les gouvernements d'autres Etats membres ont soit éliminé totalement la possibilité d'un réexamen de ce type (par exemple, la Roumanie, à la suite de l'arrêt Brumarescu en date du 28 octobre 1999; voir notamment le paragraphe 61) soit été invités par le Comité des Ministres à réformer la loi pour parvenir à ce résultat (cas de l'Ukraine; voir la Résolution intérimaire Rés. DH(2004)14, concernant l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme en date du 25 juillet 2002 dans l'affaire Sovtransavto Holding c. Ukraine, adoptée par le Comité des Ministres le 11 février 2004: voir notamment le paragraphe 77).

181 Dans son arrêt du 18 novembre 2004 dans l'affaire Pravednaïa c. Russie, la Cour a déclaré que le pouvoir de réexamen des «juridictions supérieures» doit s'exercer pour rectifier les erreurs judiciaires, non pour tenir lieu d'appel. Le réexamen ne peut pas servir d'appel déguisé et la simple possibilité de deux opinions sur le sujet n'est pas un motif de réexamen.

182 Le 11 mai 2005, la Cour constitutionnelle a cependant jugé que l’article 405 était incompatible avec la Constitution et avec l’article 4 § 2 du Protocole n°7 à la Convention européenne des Droits de l’Homme. Elle a estimé que cette disposition était discriminatoire pour ce qui est des droits des victimes et ne permettait pas de rectifier les violations importantes commises pendant la procédure antérieure.

183 La France, l'Italie ou le Portugal, par exemple.

184 Voir par exemple les affaires Kormatcheva (arrêt du 29 janvier 2004), Plaskine (arrêt du 29 avril 2004) ou Yemanokova (arrêt du 23 septembre 2004).

185 Article 27 § 1: Quiconque réside légalement sur le territoire de la Fédération de Russie a le droit de circuler librement et de choisir librement son lieu de résidence ou de domicile. Les exceptions sont établies par la loi fédérale. § 2: Chacun peut quitter librement la Fédération de Russie. Les ressortissants de la Fédération de Russie ont le droit de revenir librement dans la Fédération de Russie.

186 Recommandation 1667 (2004) Situation des réfugiés et des personnes déplacées dans la Fédération de Russie et dans d'autres pays de la CEI, Doc. 10118, rapport de la Commission des migrations, des réfugiés et de la population, rapporteur: M. Iwiński.

187 Résolution du Gouvernement de la Fédération de Russie nº 713 du 17 juillet 1995, telle que modifiée en 1996, 1997, 2000 et 2002.

188 Récemment, la période d'enregistrement a été étendue à trois mois pour tous les ressortissants de la Fédération de Russie, ce privilège ayant initialement été accordé en décembre 2004 aux seuls ressortissants ukrainiens.

189 Aleksandr Ossipov, «Europe, Russia, Durban», http://www.hrights.ru/text/b15/Chapter7.htm.

190 Historiquement, les permis de résidence ont été utilisés, à l'époque soviétique comme à celle des tsars, comme un moyen de limiter les déplacements entre les campagnes et les villes et d'assurer le respect de la loi. A partir de 1932, tous les citoyens soviétiques âgés de 16 ans et plus ont eu l'obligation d'être en possession d'un passeport qui devait porter un cachet (la propiska) indiquant leur lieu de résidence. Cependant, l'article 27 de la Constitution de 1993 garantit à quiconque légalement résident dans la Fédération de Russie le droit de circuler librement et de choisir son lieu de résidence. En conséquence, l'enregistrement devrait consister à informer la police de son adresse. Il ne devrait pas permettre à la police de refuser l'enregistrement des personnes qui ont légalement le droit de se faire enregistrer. En pratique, à de nombreux endroits, tels que Moscou et Saint-Pétersbourg et les régions méridionales de Stavropol et de Krasnodar, les procédures d'enregistrement imposent aux personnes de demander l'autorisation d'habiter à une adresse particulière, au lieu de simplement déclarer leur lieu de résidence.

191 M. Pasko a été arrêté en 1997 et acquitté du chef de trahison mais déclaré coupable d'infractions moindres à l'issue de son premier procès, en 1999. Il a été condamné pour trahison à quatre ans de prison en décembre 2001. Le 23 janvier 2003, il a bénéficié d'une libération conditionnelle après avoir accompli les deux tiers de sa peine.

192 Selon l'article 13.4 de la loi fédérale sur la procédure de sortie et d'entrée dans la Fédération de Russie, une personne peut subir une restriction de son droit de quitter le pays si elle n'a pas purgé sa peine ou n'est pas exonérée de sanction. Selon l'article 79 du Code pénal russe, la mise en liberté conditionnelle est l'une des modalités de l'exonération de sanction.

193 Projet de loi n° 111764-4 portant modification de la loi fédérale relative à l'entrée sur le territoire de la Fédération de Russie et la sortie de ce territoire et de la loi fédérale relative à l'égalité de statut des étrangers dans la Fédération de Russie, soumis par le député Pliguine, président de la commission de la Douma d'Etat sur la législation constitutionnelle. La deuxième lecture aura lieu au printemps 2005.

194 La Fédération de Russie est restée en 2004 le premier pays d'origine des demandeurs d'asile dans les pays industrialisés (avec 30 100 demandeurs), et la majorité d'entre eux seraient originaires de Tchétchénie, d'après le rapport publié le 1er mars 2005 par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

195 D'après le ministère de la Justice, au 1er mai 2004, 21 674 organisations religieuses et représentations d'organisations religieuses étrangères de plus de 63 confessions différentes étaient enregistrées dans la Fédération de Russie.

196 La Constitution de la Fédération dispose que la Fédération de Russie est un Etat laïque et qu'aucune religion n'est établie en tant que religion d'Etat ou religion obligatoire. Les associations religieuses sont séparées de l'Etat et sont égales devant la loi (article 14). Chaque personne a le droit à la liberté de conscience, à la liberté de religion, y compris le droit de professer, seule ou collectivement, une religion quelconque ou l'absence de religion, de choisir, d'avoir et de diffuser librement des convictions religieuses ou autres et d'agir conformément à ces convictions (article 28).

197 Par exemple: la dispersion violente du rassemblement des Baptistes (chrétiens protestants évangéliques) par les forces de l'ordre et l'incendie de leur maison dans la ville de Liouboutchani, dans la région de Moscou, en août et septembre 2004; de nombreux attentats contre l'église de «l'Arche» des baptistes de la ville de Balachikha, dans la région de Moscou; l'incendie criminel des églises Pentecôtistes de Podolsk, Tchekhovo, Toula, Lipetsk, Tioumen, Nijni Taguil; à la veille d'une conférence nationale, en juillet 2004, l'église baptiste «Initiative» de Toula a été attaquée à la bombe; le temple Hare Krishna de Rostov-sur-le-Don a subi une attaque. Des bâtiments religieux juifs ont fait l'objet d'actes de vandalisme et d'incendies criminels (attentats visant les synagogues de Kostroma, Tcheliabinsk, Moscou, Vladivostok et Kaliningrad). Rapport annuel de la Commission des Etats-Unis sur la liberté religieuse internationale, mai 2004, http://www.uscirf.gov/prPages/pr0239.php3.

198 Des difficultés pour obtenir des permis de résidence temporaire ont été signalées, par exemple, dans la région de Krasnodar et dans la République du Tatarstan.

199 Rapport international de 2004 sur la liberté religieuse, publié par le Bureau pour la démocratie, les droits de l'homme et le travail du ministère des Affaires étrangères des Etats-Unis, http://www.state.gov/g/drl/rls/irf/2004/35480.htm

200 Le projet de loi le plus récent à ce sujet a été soumis en avril 2004.

201 En août 1992, l'Armée du salut a été créée et enregistrée en qualité d'organisation religieuse ayant le statut d'une entité juridique. En 1999, le renouvellement de son enregistrement conformément à la loi de 1997 sur la liberté de conscience et les associations religieuses a été refusé. En juillet 2000, le tribunal du district Presnenski, à Moscou, a confirmé le refus du département de la Justice de Moscou de renouveler l'enregistrement de la section moscovite de l'Armée du salut. Dans la décision du tribunal du district Presnenski, l'Armée du salut était qualifiée d'«organisation paramilitaire». En novembre 2000, le tribunal de la ville de Moscou a confirmé le jugement du 5 juillet 2000. En septembre 2001, le tribunal du district de la Taganka a rendu une décision ordonnant la liquidation de la section moscovite de l'Armée du salut, à la demande du ministère de la Justice, qui est tenu de requérir la liquidation des groupes qui ne renouvellent pas leur enregistrement conformément à la loi de 1997. Le tribunal de la ville de Moscou a confirmé la décision en décembre 2001.

202 La Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie a jugé que le renouvellement de l'enregistrement d'une organisation religieuse ne pouvait pas être subordonné à la réalisation des conditions introduites par la loi de 1997, qui n'existaient pas en droit au moment de la création de l'organisation. Un tribunal ne pouvait se prononcer sur la liquidation d'une organisation qui ne mettait pas ses documents en conformité avec la loi que s'il était dûment établi que l'organisation avait cessé de fonctionner ou avait des activités illicites. La Cour a souligné également qu'une décision de justice sur la liquidation d'une organisation qui n'avait pas obtenu le renouvellement de son enregistrement devrait être motivée plus précisément que par la simple mention de motifs formels de liquidation comme l'absence de renouvellement de l'enregistrement ou l'absence de communication d'informations sur la poursuite de son fonctionnement. Enfin, la Cour a estimé que la cause de la section de l'Armée du salut devait être jugée de nouveau pour la partie non conforme à l'interprétation de la loi donnée par la Cour constitutionnelle.

203 Section moscovite de l'Armée du salut c. Russie, Requête numéro 72881/01.

204 Le début des poursuites menées pour interdire les témoins de Jéhovah à Moscou remonte à 1998. La prokuratura du Circuit Nord de Moscou a interdit l'organisation locale des Témoins de Jéhovah au motif qu'elle créait une menace pour la société, ce qui constitue un motif d'interdiction d'une organisation religieuse en vertu de la loi de 1997. A la différence de la liquidation, qui entraîne «seulement» la perte du statut juridique, l'interdiction exclut les activités de toute une communauté religieuse. En 2001, un tribunal de Moscou a annulé la décision d'interdiction mais une juridiction supérieure a ensuite ordonné que l'affaire soit jugée de nouveau et le second procès s'est ouvert en novembre 2002. Le ministère public a présenté le témoignage de spécialistes des religions qui décrivent les Témoins de Jéhovah comme une «secte totalitaire» qui «cherche à contrôler la pensée des personnes».

205 En septembre 2004, la Cour européenne des droits de l'homme a déclaré recevable, sans préjuger du fond, le recours déposé par 102 requérants concernant la perturbation d'une réunion religieuse des Témoins de Jéhovah et les conditions inéquitables du jugement rendu sur leur plainte dans la ville de Tcheliabinsk en mars 2000: voir Kouznetsov et autres c. Russie, Requête numéro 184/02.

206 Résolution 1278 (2002) de l'Assemblée, La loi russe sur la religion, adoptée le 23 avril 2002, paragraphe 6. Doc. 9393, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, rapporteur: M. McNamara.

207 Rapport spécial du médiateur de la Fédération de Russie «Sur l'exécution par la Russie des engagements pris lors de l'adhésion au Conseil de l'Europe», 20 mai 2002, http://www.ombudsmanrf.ru/doc/spdoc/0102.shtml.

208 Rapport de la Commission de suivi de l'Assemblée sur le respect des obligations et engagements par la Fédération de Russie, Doc. 9396 (2002).

209 Résolution 1278 (2002) de l'Assemblée, paragraphe 2.

210 Notamment l'article 282 du Code pénal, qui concerne l'incitation à la haine pour cause de nationalité, de race ou de religion.

211 Loi fédérale nº 123-FZ, portant amendement du code foncier de la Fédération de Russie, loi fédérale sur l'application du code foncier et loi fédérale sur la restitution des terrains agricoles, signées par le Président le 3 octobre 2004.

212 Rapport spécial du médiateur de la Fédération de Russie «sur l'exécution par la Russie des engagements pris lors de l'adhésion au Conseil de l'Europe», 20 mai 2002, http://www.ombudsman.gov.ru/public/speuro.htm

213 C'est ce que confirment aussi les conclusions du Comité des droits de l'homme de l'ONU (6 novembre 2003, CCPR/CO/79/RUS) qui s'est déclaré préoccupé par le fait que la loi sur le service civil de substitution semble établir une sanction en prévoyant un service civil d'une durée qui est 1,7 fois celle du service militaire normal. En outre, selon le Comité, la loi ne paraît pas garantir que les tâches dont sont chargés les objecteurs de conscience soient compatibles avec leurs convictions.

214 Sur 176 393 appelés en vertu du décret présidentiel de conscription de l'automne 2004, seulement 1 530 jeunes gens (0,8%) ont demandé à faire un service de substitution. De plus, environ 500 d'entre eux n'ont pas réussi à convaincre les commissions de conscription qu'ils avaient choisi un service de substitution en raison de leurs convictions. Dans la région de Moscou, à la date d'octobre 2004, seulement cinq jeunes hommes avaient demandé à faire un service de substitution.

215 Voir aussi «Le pluralisme des médias» dans le chapitre du présent rapport intitulé «Fonctionnement de la démocratie pluraliste».

216 Six d'entre eux ont été victimes d'accidents.

217 Il a été détenu pendant cinq jours après que deux jeunes gens eurent provoqué une rixe avec lui à l'aéroport. Ces deux derniers ont déclaré au quotidien Moskovsskii Komsomlets qu'ils avaient été engagés par le Service fédéral de sécurité (FSB) pour déclencher la bagarre.

218 Moscow News, 06.09.2004, http://mosnews.com/news/2004/09/06/daily.shtml S'exprimant sur Radio Liberté, Chakirov a expliqué que le propriétaire du journal, la société Pro-Media, était mécontente de la manière dont les Izvestia avait couvert cette tragédie: les investisseurs avaient jugé le numéro du samedi «trop émotionnel et accrocheur».

219 En novembre 2004, l'Association mondiale de la presse écrite et le Forum mondial des rédacteurs en chef ont protesté auprès des autorités russes contre cette condamnation jugée abusive. Ces deux organisations, dont le siège se trouve à Paris, ont déclaré dans une lettre au Président de la Cour suprême d'arbitrage de Russie: «Nous aimerions attirer votre attention sur l'opinion largement répandue parmi la presse mondiale selon laquelle l'octroi de dommages-intérêts aussi élevés, qui sont près de 10 fois supérieurs à toute somme accordée précédemment, peut paraître être inspiré par des motivations politiques et destiné à intimider les médias critiques».

220 En août 2003, un tribunal du district de Tcheliabinsk a condamné Guerman Galkine, rédacteur en chef du quotidien Vetcherni Tcheliabinsk et directeur de la maison d'édition du même nom, à une peine d'un an d'emprisonnement dans un camp de travaux forcés à la suite d'une plainte en diffamation déposée en 2002 par deux vice-gouverneurs de la région de Tcheliabinsk. D'après la Fondation pour la défense de la glasnost (FDG), M. Galkine a été le premier journaliste, depuis la fin de l'ère soviétique, à être emprisonné pour diffamation. En novembre 2003, le tribunal régional de Tcheliabinsk a confirmé la condamnation, mais l'a assortie d'un sursis, et M. Galkine a été libéré après 3 mois d'emprisonnement. Le 30 mars 2004, le même tribunal a rejeté l'appel interjeté par M. Galkine dans le but d'obtenir un acquittement total.

221 Voir, parmi de nombreux autres exemples, les arrêts de la Cour dans les affaires Castells c. Espagne et Colombani et autres c. France. La grande organisation de défense de la liberté d'expression Article 19 soutient aussi l'abolition de toutes les lois pénales sur la diffamation et leur remplacement, le cas échéant, par des lois civiles appropriées puisque dans de nombreux pays «les lois pénales sur la diffamation font l'objet d'abus de la part des dirigeants afin de limiter les critiques et d'étouffer le débat public».

222 Voir, notamment, Oberschlick c. Autriche.

223 Conformément à la Recommandation R (2000) 7 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe sur le droit des journalistes de ne pas révéler leurs sources d'information et à la jurisprudence de la CEDH (par exemple Goodwin c. Royaume-Uni, De Haes et Gijsels c. Belgique).

224 En mai 1998, le FSB a arrêté M. Valentin Danilov, directeur d'un centre de recherche à l'université technique d'Etat de Krasnoïarsk, et l'a accusé d'espionnage. L'arrestation, également pour espionnage, de M. Valentin Moïsseïev, diplomate russe et spécialiste de la Corée, est intervenue deux mois plus tard. En juillet 1999, le FSB a découvert une carte secrète d'une base de sous-marins lors d'une perquisition à l'appartement de M. Vladimir Soïfer, scientifique qui travaille depuis quarante ans sur les problèmes de pollution nucléaire dans la mer du Japon; le FSB a accusé M. Soïfer de projeter de communiquer cette carte à une organisation étrangère. En août 2000, les services du FSB ont accusé M. Valeri Kovaltchouk d'exportation illégale de technologie militaire. En août 2003, un tribunal de Vladivostok a déclaré M. Vladimir Chtchourov coupable de divulgation de secret d'Etat. Le tribunal a condamné M. Chtchourov à deux ans de prison avec sursis et l'a immédiatement exonéré de la peine au titre d'une amnistie générale. En février 2003, le tribunal municipal de Moscou a déclaré M. Anatoli Babkine coupable, mais l'a condamné à une peine de prison de huit ans avec sursis, assortie d'une période de probation de cinq ans.

225 «Russia's "Spy Mania": A Study of the Case of Igor Sutiagin” (“L'espionnite en Russie: étude de l'affaire Igor Soutiaguine”) Document d'information de Human Rights Watch, octobre 2003. Le Comité des droits de l'homme de l'ONU a, lui aussi, dans ses conclusions sur le rapport de la Fédération de Russie soumis conformément à l'article 40 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, exprimé sa préoccupation du fait que des journalistes, des chercheurs et des défenseurs de l'environnement avaient été jugés et condamnés pour trahison, essentiellement parce qu'ils avaient diffusé des renseignements d'intérêt public légitime; il a constaté avec inquiétude que, dans certains cas où les accusations étaient sans preuve, les tribunaux avaient renvoyé le dossier aux procureurs au lieu d'acquitter les personnes poursuivies.

226 Résolution 1354 (2003) Condamnation de Grigory Pasko, Doc. 9926, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, rapporteur: M. Bindig.

227 Résolution de l'Assemblée 1354 (2003) en date du 25 novembre 2003.

228 M. Pasko a travaillé comme journaliste militaire et il a publié plusieurs articles fortement critiques au sujet de la pollution de l'environnement. Il a été arrêté et accusé d'espionnage le 20 novembre 1997. En 1999, Amnesty International a conclu que M. Pasko était détenu seulement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d'expression et l'a classé parmi les prisonniers de conscience.

229 Des indications plus détaillées figurent dans la partie consacrée à la liberté de circulation.

230 Dans son rapport mondial de 2002, Human Rights Watch déclarait: «La condamnation pour espionnage de l'ex-diplomate Valentin Moïsseïev a également soulevé des questions quant à l'équité du procès. Le tribunal de la ville de Moscou a déclaré M. Moïsseïev coupable à l'issue d'un procès douteux, au cours duquel trois juges différents ont été saisis successivement de l'affaire avant d'être écartés sans explication claire. En août 2001, un quatrième juge a finalement condamné M. Moïsseïev à quatre ans et demi de prison».

231 Parmi les jurés dans le procès de M. Soutiaguine figurait M. Grigory Iakimichen, dont le nom était mentionné aussi sur la liste des jurés possibles du tribunal militaire de district de Moscou. M. Iakimichen a été secrétaire de presse à l'ambassade de la Fédération de Russie en Pologne et a été impliqué dans le scandale d'espionnage autour du Premier ministre polonais, Jozef Oleksy, en 1996. La presse polonaise a considéré à cette époque que M. Iakimichen était un agent des services de renseignement russes à l'étranger (Moscow News, 27 octobre - 2 novembre 2004, p. 4).

232 Au 1er mars 2005, trois mois après le jugement, le Tribunal n'avait pas communiqué le jugement écrit ni les minutes du procès aux avocats de la défense en raison de leur caractère confidentiel.

233 Récemment, le journal Kommersant a reçu un avertissement des autorités après la publication d'une interview du chef des rebelles tchétchènes Aslan Maskhadov (trois avertissements entraînent l'interdiction du journal).

234 Voir par exemple les Déclarations du Comité des Ministres sur la liberté d'expression et d'information, du 29 avril 1982, et sur la liberté d'expression et d'information dans les médias dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, du 2 mars 2005, les Lignes directrices sur les droits de l'homme et la lutte contre le terrorisme, adoptées le 11 juillet 2002, etc. Dans sa récente Déclaration sur la liberté d'expression et d'information dans les médias dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, le Comité des Ministres du CdE appelait les autorités publiques des Etats membres, notamment, à n'introduire de nouvelles restrictions à la liberté d'expression et d'information dans les médias qu'à la condition qu'elles soient strictement nécessaires et proportionnées dans une société démocratique et seulement après avoir vérifié que les lois et autres mesures en vigueur ne sont pas suffisantes; le Comité des Ministres les appelait aussi à ne pas adopter de mesures qui assimilent les reportages sur le terrorisme à un soutien du terrorisme.

235 L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme est un programme commun de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) et de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) http://www.omct.org

236 Les autorités russes ont soumis leur premier rapport au Comité consultatif de la Convention-cadre en 2000; le second rapport devait être soumis pour le 1er décembre 2004 et l'a été le 26 avril 2005.

237 Le Comité consultatif a noté que l'article 10 de la Convention-cadre ne traite pas la question du choix d'un alphabet séparément du droit d'employer une langue minoritaire. En fait, le Comité consultatif a jugé difficile de faire une distinction claire entre ces deux notions étroitement liées entre elles et d'établir des régimes juridiques distincts. Tout en reconnaissant qu'il n'y a pas toujours de consensus au sein des minorités intéressées – dans le cas des Tatars, par exemple – quant à l'alphabet devant être employé pour leur langue minoritaire, le Comité consultatif a considéré qu'en principe il s'agit d'une question qui devrait être laissée à la décision des personnes directement concernées et que les autorités fédérales devraient s'abstenir d'imposer des solutions artificielles. De plus, le Comité consultatif a été de l'avis que, dans les cas où l'emploi d'une langue ne concerne pas les relations avec les pouvoirs publics, le choix de l'alphabet devrait en règle générale être laissé à la discrétion des intéressés et ne pas être soumis à des limitations légales.

238 Conformément à la résolution nº 501 du Gouvernement de la Fédération de Russie, en date du 28 septembre 2004.

239 En 2002, le Comité consultatif de la Convention-cadre notait également que le ministère des Affaires fédérales et de la Politique en matière de Nationalités et de Migration avait été le principal organe fédéral à apporter le soutien des pouvoirs publics à la mise en place et au fonctionnement des autonomies culturelles et qu'à la suite de la suppression de ce ministère par un décret présidentiel du 16 octobre 2001, la question se posait de savoir quel organe fédéral serait chargé de ces missions.

240 Emma Udwin, porte-parole de la commission, a déclaré le 4 mars 2005 sur RFE/RL que la question avait été soulevée par l'Union européenne lors des consultations sur les droits de l'homme entre l'Union européenne et la Russie, organisées au Luxembourg le 1er mars. L'UE avait soumis une requête formelle dans laquelle elle demandait à Moscou de clarifier la situation de deux minorités – la population finno-ougrienne et la communauté des Turcs meskhètes. http://www.rferl.org/featuresarticle/2005/03/19336ee3-aa3b-4e45-8850-0ce0854090ac.html.

241 Lois fédérales sur la garantie des droits des petit peuples autochtones de la Fédération de Russie (adoptée le 30 avril 1999), sur les principes généraux d'organisation des communautés des populations indigènes numériquement faibles du Nord, de la Sibérie et de l'Extrême Est de la Fédération de Russie (20 juillet 2000).

242 Le 16 novembre 2004, le centre panrusse pour l'étude de l'opinion publique (VTsIOM) a publié les résultats d'une enquête (réalisée auprès de 1 601 personnes, dans 39 régions) d'après laquelle 34% des personnes interrogées considèrent que les personnes d'origine ethnique russe devraient avoir davantage de droits que les autres populations en Russie, 49% pensent que tous devraient avoir des droits égaux en Russie et 11% déclarent que la Russie devrait être un Etat peuplé de Russes.

243 La station de radio l'Echo de Moscou a indiqué que, d'après le Centre pour la nouvelle sociologie, la Russie compte plus de 55 000 «skinheads». D'après le Bureau des droits de l'homme de Moscou, 30 à 40 pogroms sont organisés chaque mois par des «skinheads»; au cours des trois ou quatre dernières années, le nombre des agressions d'inspiration raciste a augmenté annuellement de 30%. Le niveau d'intolérance est particulièrement élevé dans les villes de Moscou, Saint-Pétersbourg, Voronej, Volgograd et Vladimir.

244 Les ONG de défense des droits de l'homme affirment que les groupes d'extrême droite et néonazis ont même dressé une liste «d'ennemis de l'Etat russe» qui a été publiée sur le Web et qui contient des renseignements personnels sur une cinquantaine de militants antiracistes. Une des personnes figurant sur cette liste, M. Guirenko, a été assassinée cette année à Saint-Pétersbourg (voir la section «Le droit à la vie»). Le Bureau du procureur général ne semble pas avoir réagi devant ces faits.

245 Eurasia Daily Monitor, The Jamestown Foundation, 27 octobre 2004.

246 Voir la déclaration de 36 pages du Centre européen pour les droits des Roms, «Violations des droits des Roms en Fédération de Russie», 23 septembre 2004. http://www.errc.org. En octobre, la Fédération internationale Helsinki pour les droits de l'homme s'est associée à cette déclaration.

247 L'article 282 du Code pénal de la fédération réprime l'incitation à la haine ethnique, raciale ou religieuse. Cependant, d'après le Bureau du procureur général, une moyenne annuelle de seulement 70 actions pénales sont ouvertes sous ce chef; sur ces actions, dix seulement sont renvoyées devant les tribunaux et deux ou trois se concluent par des condamnations. Dans les autres cas, les personnes poursuivies sont acquittées ou amnistiées.

248 A plusieurs reprises, le gouverneur du Territoire de Krasnodar, Alexandre Tkatchev, a fait des déclarations dans la presse régionale et nationale au sujet des dangers que représentent les groupes minoritaires non slaves sur le Territoire de Krasnodar et de la nécessité d'encourager ces groupes à partir. Il a souvent désigné spécialement les Meskhètes.

249 Déclaration d'organisations russes de défense des droits de l'homme, 26 janvier 2004.

250 Résolution 1428 (2005) La situation de la population meskhète déportée, Doc. 10451, rapport de la Commission des migrations, des réfugiés et de la population, rapporteuse: Mme Vermot-Mangold.

251 Rapport du comité d'ONG de défense des droits de l'homme de Novorossisk, «Les violations systématiques des droits de l'homme dans le Territoire de Krasnodar ternissent la réputation internationale de la Russie», janvier 2005.

252 Le Comité des Nations Unies sur l'élimination de la discrimination raciale a exprimé, dans ses Conclusions sur le rapport de la Fédération de Russie (mars 2003), son inquiétude concernant les indications selon lesquelles des organisations de cosaques commettent des actes d'intimidation et de violence à l'encontre des groupes ethniques. D'après les informations dont dispose le Comité, ces organisations, qui fonctionnent comme des unités paramilitaires et sont utilisées par les autorités locales pour des missions de maintien de l'ordre, jouissent de privilèges particuliers, y compris un financement public. A cet égard, le Comité a recommandé que la Russie veille à ce qu'aucun soutien ne soit accordé aux organisations qui prônent la discrimination raciale et qu'elle interdise aux unités paramilitaires de cosaques d'assurer des fonctions de maintien de l'ordre à l'encontre des groupes ethniques.

253 Les autorités géorgiennes sont prêtes à accepter tous les Turcs meskhètes qui souhaitent émigrer en Géorgie; cependant, du fait des difficultés économiques que connaît ce pays, elles ne peuvent pas installer tous les migrants ensemble et proposent de les accueillir en les répartissant en divers points du territoire.