Doc. 10531
27 avril 2005

Vers une dépénalisation de la diffamation

Proposition de recommandation
présentée par M. Holovaty et plusieurs de ses collègues

La présente proposition n’a pas été examinée par l’Assemblée et n’engage que ses signataires

1.       L’Assemblée, rappelant ses Recommandations 1589 (2003) et 1506 (2001), confirme qu’elle attache la plus haute importance à la liberté d’expression dans une société démocratique, conformément à l’article 10 de la Convention européenne des Droits de l’Homme.

2.       La Cour européenne des Droits de l’Homme, en défendant le rôle essentiel de « chien de garde public » exercé par les médias, a affirmé que les limites de la critique admissible sont plus larges à l’égard des hommes politiques que des simples particuliers, qu’il convient de faire une distinction entre les faits et les jugements de valeur et que les amendes devraient être proportionnées.

3.       Dans sa Déclaration sur la liberté du discours politique dans les médias, adoptée en février 2004, le Comité des Ministres estime que la diffamation ou l’insulte par les médias ne devrait pas entraîner de peine de prison, sauf dans des circonstances exceptionnelles et spécifiques, quand d’autres droits fondamentaux ont été sérieusement violés, comme dans le cas du discours de haine.

4.       Le Représentant de l’OSCE pour la liberté des médias fait campagne depuis plusieurs années en faveur de la dépénalisation de la diffamation dans les Etats participants de l’OSCE.

5.       L’Assemblée note que, dans la plupart des Etats membres du Conseil de l’Europe, les dispositions sur la diffamation ou l’insulte relèvent encore du droit pénal. A l’inverse, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, la Géorgie, la Moldova et l’Ukraine ont donné l’exemple en dépénalisant la diffamation.

6.       Dans beaucoup d’Etats membres, les journalistes, les artistes et toutes les autres personnes intervenant dans le débat public continuent par conséquent de s’exposer à des poursuites pénales lorsqu’ils transgressent les limites d’un comportement admissible, limites qui sont souvent floues et variables selon le lieu et dans le temps.

7.       La perspective d’encourir des poursuites pénales peut faire obstacle à la libre expression d’opinions. D’autre part, cette possibilité peut être utilisée de manière abusive pour harceler les médias critiques de manière sélective pour des motifs politiques.

8.       Exceptionnellement, des dispositions pénales peuvent être un moyen acceptable de protéger le droit à la vie et la dignité humaine de personnes ou de groupes de population exposés au discours de haine.

9.       Les intérêts légitimes des personnes qui se sentent insultées ou estiment être victimes de toute autre façon de la diffusion publique d’allégations mensongères préjudiciables peuvent être suffisamment protégés par des moyens de droit civil, lesquels ne doivent pas non plus être utilisés pour restreindre la liberté d’expression et d’information.

10.       En conséquence, l’Assemblée invite :

i.       les Etats membres du Conseil de l’Europe a envisager de dépénaliser la diffamation, sauf dans des cas extrêmes où d’autres droits fondamentaux ont été sérieusement violés, comme le discours de haine ;

ii.       le Comité des Ministres à envisager de prendre de nouvelles mesures en vue de la dépénalisation de la diffamation dans les Etats membres du Conseil de l’Europe.

Signé1:


1     SOC: Groupe socialiste
      PPE/DC: Groupe du Parti populaire européen
      LDR: Groupe libéral, démocrate et réformateur
      GDE: Groupe des démocrates européens
      GUE: Groupe pour la gauche unitaire européenne
      NI: non inscrit dans un groupe