Parliamentary Assembly
Assemblée
parlementaire


Doc. 10807 rév.
1
24 janvier 2006

Contestation des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire d'Azerbaïdjan pour des raisons substantielles

Rapport
Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (Commission de suivi)
Rapporteur: M. Tony Lloyd, Royaume-Uni, Groupe socialiste


Résumé


A l'ouverture de la première partie de session de 2006 de l'Assemblée parlementaire, le lundi 23 janvier 2006, les pouvoirs de la délégation azerbaïdjanaise ont été contestés pour des raisons substantielles, en vertu de l'article 8 de son Règlement, à propos des élections législatives du 6 novembre 2005.

Dans sa Résolution 1456 (2005) sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Azerbaïdjan, l'Assemblée avait prévenu les autorités que les élections législatives de 2005 seraient un test décisif pour la crédibilité démocratique du pays. Les élections législatives qui se sont déroulées le 6 novembre 2005 – comme malheureusement tous les scrutins organisés en Azerbaïdjan depuis son adhésion au Conseil de l'Europe en 2001 – n'ont pas répondu aux normes internationales.

Le rapport propose une série de mesures que l'Azerbaïdjan devrait entreprendre d'urgence pour rétablir la confiance dans le processus démocratique avant les nouvelles élections qui se tiendront le 13 mai dans les 10 circonscriptions dans lesquelles les résultats ont été annulés.

Il propose que l'Assemblée ratifie les pouvoirs de la délégation parlementaire de l'Azerbaïdjan. Par ailleurs, la Commission de suivi devrait soumettre à l'Assemblée, lors de sa partie de session de juin 2006, un rapport sur les progrès enregistrés dans tous les domaines mentionnés dans ce rapport pour examiner si l'Article 9 du Règlement sur l'examen des pouvoirs précédemment ratifiés pour des raisons substantielles doit être appliqué.


I.Projet de résolution

1.        A l'ouverture de la première partie de session de 2006 de l'Assemblée parlementaire, le lundi 23 janvier 2006, les pouvoirs de la délégation azerbaïdjanaise ont été contestés pour des raisons substantielles, en vertu de l'article 8 de son Règlement, à propos des élections législatives du 6 novembre 2005.

2.        Dans sa Résolution 1456 (2005) sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Azerbaïdjan, l'Assemblée avait prévenu les autorités que les élections législatives de 2005 seraient un test décisif pour la crédibilité démocratique du pays, car depuis son adhésion au Conseil de l'Europe en 2001, aucun des votes précédents organisés en Azerbaïdjan n'avait répondu aux normes démocratiques fondamentales.

3.        L'Assemblée regrette profondément que les élections législatives qui se sont déroulées en Azerbaïdjan le 6 novembre 2005 ne satisfassent toujours pas aux normes internationales. Les violations les plus inacceptables constatées par la commission ad hoc qui a observé les élections, sont l'intimidation et les arrestations arbitraires de candidats de l'opposition et de leurs partisans; les obstacles au droit de réunion pacifique; le recours disproportionné à la force de la police pour disperser les rassemblements non autorisés; l'ingérence d'autorités locales dans le processus électoral; l'abus de ressources administratives; le bourrage des urnes; et des violations graves lors du décompte et de la présentation des résultats. Le parti pris des médias et le manque d'impartialité des commissions électorales ont aussi contribué à créer des conditions contraires à des élections libres et équitables.

4.        L'Assemblée déplore le recours excessif à la force de la police pour disperser un rassemblement post-électoral de l'opposition à Bakou, le 26 novembre 2005. Les moyens employés contre des manifestants pacifiques comptant de nombreuses femmes et enfants sont inacceptables dans une société civilisée.

5.        L'Assemblée relève que la commission électorale centrale et la Cour constitutionnelle ont invalidé les résultats dans 10 circonscriptions (sur 125), où de nouvelles élections auront lieu le 13 mai. Elle a aussi noté que les chefs du pouvoir exécutif de trois régions ont été relevés de leurs fonctions et qu'un petit nombre d'affaires pénales sont pendantes devant les tribunaux.

6.        Les mesures administratives et juridiques ne peuvent toutefois compenser le grave dommage causé par les violations: en effet, tout le processus démocratique a été sapé, le dialogue politique a été compromis et le parlement nouvellement élu n'a pas l'aval démocratique du peuple azerbaïdjanais.

7.        L'attitude de l'opposition, qui entend boycotter les séances parlementaires et les nouvelles élections, n'est pas non plus constructive et n'aidera en rien au développement du processus démocratique. L'Assemblée considère que la place de l'opposition est au parlement, pas dans la rue, et elle invite donc instamment l'opposition à revoir ses décisions.

8.        Les élections libres et équitables sont le fondement de la démocratie et constituent l'un des principaux engagements et obligations de tout pays partageant en qualité d'Etat membre les valeurs et normes du Conseil de l'Europe. La manière dont se sont déroulées les élections de novembre montre clairement que l'Azerbaïdjan ne parvient toujours pas à honorer ses engagements vis-à-vis du Conseil de l'Europe. Cette attitude doit être sanctionnée.

9.        Pour rétablir la confiance dans le processus électoral et, plus généralement, démocratique, l'Azerbaïdjan doit veiller à ce que les nouvelles élections qui se tiendront dans les 10 circonscriptions soient pleinement conformes aux principes démocratiques. A cet effet, il lui faut prendre d'urgence les mesures suivantes:

9.1.        les enquêtes sur la fraude électorale devront être menées d'une manière parfaitement impartiale et professionnelle, sans aucune pression politique ou administrative;

9.2        les résultats de ces enquêtes devront être rendus publiques et la justice devra être administrée d'une manière également impartiale et professionnelle, sans aucune pression politique ou administrative;
9.3.        le parlement nouvellement élu devra amender la législation électorale dans le sens des recommandations de la Commission de Venise, en particulier en ce qui concerne la composition des commissions électorales;

9.4.        la liberté de réunion devra être pleinement garantie;

9.5.       le pluralisme des médias dans les médias électroniques et la liberté d'expression devront aussi être pleinement garantis.

10.       L'Assemblée conclut que la conduite des élections législatives de 2005 en Azerbaïdjan tombe sous le coup des dispositions de l'Article 8.2.b du Règlement de l'Assemblée – «le manque de respect persistant des obligations et engagements».

11.       L'Assemblée décide de ratifier les pouvoirs de la délégation parlementaire de l'Azerbaïdjan.

12.       L'Assemblée décide d'observer les nouvelles élections du 13 mai 2006. Elle charge sa Commission de suivi de soumettre à l'Assemblée lors de sa partie de session de juin un rapport sur les progrès enregistrés dans tous les domaines mentionnés au paragraphe 9 de la présente Résolution. Sur la base de ce rapport, l'Assemblée examinera s'il convient d'appliquer l'Article 9 du Règlement en vue de reconsidérer les pouvoirs précédemment ratifiés pour des raisons substantielles.

II.       Exposé des motifs

1.        Action de l'Assemblée

1.       A l'ouverture de la première partie de session de 2006 de l'Assemblée parlementaire, lundi 23 janvier 2006, les pouvoirs de la délégation azerbaïdjanaise ont été contestés pour des motifs substantiels conformément à l'article 8 de son Règlement, eu égard aux élections parlementaires qui se sont déroulées le 6 novembre 2005. L'Assemblée a renvoyé le rapport à la Commission de suivi pour rapport et à la Commission du Règlement et des Immunités pour avis.

2.       Depuis son adhésion à l'Organisation en 2001, aucun des votes précédents organisés en Azerbaïdjan n'a répondu aux normes démocratiques les plus fondamentales. C'est la raison pour laquelle, en juin 2005, dans sa Résolution 1456 (2005) sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Azerbaïdjan, l'Assemblée avait déjà prévenu les autorités que les élections législatives qui se tiendraient en novembre 2005 seraient «un test décisif pour la crédibilité démocratique du pays».

3.       Le Bureau de l'Assemblée a mis en place une commission ad hoc pour l'observation de ces élections, présidée par M. Platvoet (Pays-Bas, GUE). Au total, 50 membres de l'Assemblée ont observé les élections législatives qui ont eu lieu le 6 novembre 2005.

4.       Lors de sa réunion le 25 novembre 2005, le Bureau a approuvé et déclassifié le rapport de la commission ad hoc et «a pris note que les co-rapporteurs de la Commission du suivi sur l'Azerbaïdjan doivent se rendre dans le pays dès que possible et a demandé à M. Platvoet de les accompagner en sa capacité de Président de la commission ad hoc». Les rapporteurs se sont rendus dans le pays le 2 décembre 2005; ils ont fait rapport au Bureau le 12 décembre 2005. Lors de cette réunion, il a été convenu qu'ils devaient retourner dans le pays avant l'organisation des nouvelles élections partielles que le Bureau a décidé d'observer.

2.        Les élections législatives en Azerbaïdjan

5.       L' Assemblée a adopté la Résolution 1456 (2005) dans laquelle elle se déclare vivement préoccupée par le fait que, quelques mois seulement avant les élections, des droits fondamentaux comme la liberté de réunion, la liberté d'expression et le droit à un procès équitable ne soient pas garantis. L'Assemblée était pareillement préoccupée par la persistance de la détention arbitraire de dirigeants et militants de l'opposition, l'absence de pluralisme des médias électroniques, les nombreuses imperfections de la législation électorale et les insuffisances de la réforme des institutions démocratiques du pays.

6.       A l'heure actuelle et suite à l'adoption de la Résolution 1456 (2005), les autorités ont pris un certain nombre de mesures pour améliorer la situation. Après presque trois années d'interdiction totale, les rassemblements de l'opposition sont de nouveau autorisés depuis juin 2005; plusieurs ont eu lieu dans la capitale et en région. La télévision publique a commencé à émettre à temps pour la campagne électorale. Le Code électoral a été amendé en vue d'améliorer la transparence du processus de vote, de stipuler l'impartialité des commissions électorales et d'indiquer dans le détail les droits et obligations des parties prenantes. La télévision publique et la télévision financée par l'Etat ont alloué un temps d'antenne gratuit aux partis politiques et organisé des débats télévisés à intervalles réguliers. Le processus d'inscription ayant été simplifié, un nombre record de candidats (environ 2000) ont pu se présenter pour les 125 sièges du parlement.

7.       Cela étant, selon l'opposition, les instances exécutives auraient souvent sérieusement entravé l'organisation de ses rassemblements: dans la capitale, à Bakou, la plupart des lieux autorisés pour les manifestations étaient situés à la périphérie de la ville; les personnes venant des régions pour se rendre aux manifestations étaient arrêtées en chemin par la police et renvoyées chez elles; dans certaines régions, les autorités locales ont souvent refusé d'autoriser les rassemblements et les participants ont fait l'objet de mesures et manœuvres d'intimidation. La commission pré-électorale de l'Assemblée a condamné «la violence et la brutalité exagérées, frisant la cruauté délibérée dont ont fait montre les forces de police pour disperser les rassemblements non autorisés». La chaîne publique (ITV) a été créée en parallèle avec la chaîne d'Etat (AZ TV), au lieu de la remplacer. La commission ad hoc du Bureau qui a observé les élections a relevé un parti pris manifeste en faveur du parti au pouvoir sur les deux chaînes, bien que plus appuyé sur la chaîne d'Etat. D'importantes recommandations de la Commission de Venise et du BIDDH concernant la législation électorale, comme de veiller à la composition équilibrée des commissions électorales, n'ont pas été mises en œuvre.

8.       Deux ou trois timides tentatives d'engager le dialogue entre le parti au pouvoir et l'opposition ont abouti à une impasse. Le climat est resté extrêmement tendu, l'opposition affichant ouvertement sa couleur "orange" en essayant d'imiter la révolution orange d'Ukraine, face aux soupçons exagérés des autorités redoutant d'éventuelles violences et provocations. La campagne pré-électorale a aussi été marquée par l'ingérence des autorités locales dans le processus électoral et l'usage abusif des ressources administratives par les représentants locaux, le harcèlement et la détention arbitraire des candidats de l'opposition et de leur personnel de campagne.

9.       Le Président de l'Azerbaïdjan était certainement conscient des insuffisances et s'est efforcé d'encourager la démocratisation du processus électoral en publiant deux décrets. Le premier, en date du 11 mai 2005, «sur l'amélioration des pratiques électorales», rappelait les principes de base à respecter par le personnel électoral et les principaux acteurs électoraux. L'Assemblée s'est félicitée de ce décret dans la Résolution 1456; la Commission ad hoc du Bureau sur l'observation des élections a toutefois estimé qu' il avait eu une portée assez limitée dans les régions.

10.       Le 25 octobre 2005, le Président a publié un second décret de dernière minute «sur les mesures immédiates à prendre dans le cadre de la préparation et de la tenue d'élections législatives», qui identifiait un certain nombre d'erreurs et de dysfonctionnements dans le processus électoral, par exemple, les problèmes afférents à la distribution des cartes d'électeurs, qui étaient censées prévenir le vote multiple ou l'ingérence dans le processus électoral de l'exécutif local. Le décret instituait un certain nombre de mesures vivement recommandées par le Conseil de l'Europe: en premier lieu, le marquage des doigts des votants à l'encre invisible, la levée de l'interdiction faite aux ONG financées à plus de 30% par des sources étrangères d'observer les élections ainsi que l'élaboration de lignes directrices pour les procédures de réclamation avec le concours des experts du Conseil de l'Europe. Les deux décrets avertissaient en outre les membres de l'exécutif local qu'ils s'exposaient à des sanctions administratives et pénales en cas d'irrégularités graves.

11.       La mission internationale d'observation des élections2 qui a observé les élections législatives en Azerbaïdjan le 6 novembre a conclu qu'elles n'ont pas été conformes à un certain nombre d'engagements souscrits auprès du Conseil de l'Europe et de normes en matière d'élections démocratiques. Elle a relevé certaines améliorations au cours de la période pré-électorale, mais dénoncé parallèlement la détérioration progressive du processus électoral le jour de l'élection, les observateurs ayant évalué négativement le vote dans 13% des bureaux de vote visités. Outre des tentatives d'influer sur le choix des électeurs, elle a également constaté des ingérences de personnes non autorisées dans le processus électoral ou des directives de ces mêmes personnes ainsi que des cas de bourrage d'urnes. 11% des bureaux de vote visités n'ont pas systématiquement suivi les consignes d'encrage des doigts, omettant en particulier de vérifier le marquage sur les doigts des votants; plusieurs bureaux n'ont pas du tout appliqué la procédure. Des observateurs nationaux et même des membres de commissions électorales ont été expulsés des bureaux de vote.

12.       Selon les observateurs, le décompte des voix, notamment les opérations de dépouillement, se sont mal ou très mal déroulés dans 43% des décomptes observés. Ils ont été témoins d'ingérence dans le processus, de falsification des actes de résultats et de manœuvres d'intimidation d'observateurs et de représentants de partis.

13.       La commission ad hoc a conclu que l'étendue des irrégularités et violations constatées au cours du décompte de voix et des opérations de dépouillement était telle qu'elle a fait douter de l'exactitude des résultats préliminaires et, par conséquent, ébranlé la confiance du public en l'impartialité du processus électoral.

14.       La commission ad hoc a indiqué dans son rapport que la crédibilité du scrutin dépendait désormais des procédures de réclamation et d'appel et de la manière dont les autorités et la commission électorale centrale (ci-après CEC) enquêteront et traiteront les irrégularités et violations signalées.

15.       La CEC a reçu 536 plaintes à la date limite du 9 novembre. Elle a invalidé les résultats de 423 bureaux de vote, mais cela n'a conduit qu'à l'annulation des résultats d'ensemble de 4 circonscriptions sur 125. La Cour Constitutionnelle ayant ultérieurement annulé les résultats de 6 autres circonscriptions, de nouvelles élections seront organisées, en application d'un décret présidentiel, dans 10 circonscriptions, le 13 mai 2006. Parallèlement, la Cour a validé les résultats des 115 circonscriptions restantes. Le parlement nouvellement élu a tenu sa séance inaugurale le 2 décembre et élu son nouveau président.

16.       Selon les informations communiquées par les autorités, certains haut fonctionnaires accusés d'ingérence dans le processus électoral ont été relevés de leurs fonctions (en particulier, les chefs de l'exécutif des régions de Surakhani, Sabirabad et Zakatala) et tous les cas de violation du droit électoral ont été soumis au ministère public pour enquête approfondie. Au total, 17 affaires pénales sont pendantes devant les tribunaux (sur un total de 351 plaintes reçues par le bureau du Procureur général).

17.       Aussi bien l'opposition que plusieurs ONG ont rendu les autorités responsables de la falsification à grande échelle des résultats de l'élection, ce dont ils estiment avoir des preuves tangibles. Selon les ONG qui ont observé les élections et recueilli des preuves solides et suffisantes, dans treize circonscriptions au moins les candidats représentant les partis pro-gouvernement ont été déclarés vainqueurs après manipulation des résultats réels. Au moins deux membres de l'ancienne délégation azerbaïdjanaise auprès de l'Assemblée auraient été élus en de pareilles circonstances. En outre, les résultats de l'élection dans cinq sur dix des circonscriptions invalidées auraient été annulés, parce que les autorités, même en manipulant lesdits résultats, n'auraient pas été en mesure de prévoir la victoire des candidats de l'opposition.

18.       Sept membres de la principale coalition de l'opposition Azadliq ont été élus. Ils ont cependant refusé de siéger au parlement et entendent boycotter l'organisation de nouvelles élections en prétendant qu'ils n'ont pas confiance dans le processus électoral.

19.       Plusieurs rassemblements de l'opposition ont été organisés au lendemain des élections. Le 26 novembre, à la fin d'un rassemblement public qui avait été autorisé par les autorités de 15 heures à 17 heures, les organisateurs ont proposé de le transformer en sit-in pacifique. La police est intervenue environ à 17 h 10 pour disperser la foule. Selon des rapports de l'opposition, confirmés par des observateurs indépendants, le recours à la force par la police à l'encontre de participants pacifiques au nombre desquels beaucoup de femmes et d'enfants était disproportionné et les moyens utilisés (par exemple, canons à eau, matraques) étaient démesurés. La police a fait état de 29 arrestations et de transports de plusieurs personnes dont quatre femmes à l'hôpital. Le communiqué de presse du Bureau de l'OSCE à Bakou a cité des rapports selon lesquels plus de 400 manifestants et plusieurs journalistes auraient été blessés.

20.       Les autorités récusent toutefois les accusations de recours excessif à la force et en rejettent la responsabilité sur les organisateurs du rassemblement qui, selon eux, les auraient provoquées.

21.       L'opposition continue de faire état de problèmes en ce qui concerna la liberté de réunion et du refus persistant de la municipalité de Bakou de l'autoriser à tenir des rassemblements dans des lieux plus centraux.

3.        Conclusions de la commission en ce qui concerne les pouvoirs de la délégation azerbaïdjanaise

22.       L'article 8.2 du Règlement de l'Assemblée dispose que les raisons substantielles pour lesquelles les pouvoirs peuvent être contestés sont:

a. une violation grave des principes fondamentaux du Conseil de l'Europe mentionnés à l'article 3 et dans le préambule3 du Statut; ou

b. le manque de respect persistant des obligations et engagements et le manque de coopération dans le processus de suivi de l'Assemblée.

23.       Les élections libres et équitables forment la base de la démocratie et constituent l'un des principaux engagements et obligations de tout le pays partageant en qualité d'Etat membre les valeurs et normes du Conseil de l'Europe.

24.       Les dernières élections législatives en Azerbaïdjan s'inscrivent malheureusement dans le droit fil de tous les votes précédents depuis l'adhésion du pays à l'Organisation, c'est-à-dire qu'elles ne sont pas conformes aux normes du Conseil de l'Europe. Ceci représente clairement une situation relevant de la clause de l'article 8.2.b – "le manque de respect persistant des obligations et engagements", une situation qui ne saurait être tolérée plus longtemps.

25.       L'argument des autorités et de nos collègues parlementaires azéris selon lesquels en dépit des insuffisances, ces élections ont été les plus démocratiques de l'histoire récente du pays ne sauraient être acceptés comme excuse. Nous ne saurions souscrire davantage à la justification des violations systématiques fondées sur de prétendues différences culturelles et sur le fait qu'on ne change pas les mentalités du jour au lendemain. Lorsque l'Azerbaïdjan avait demandé à devenir membre du Conseil de l'Europe, il était sans doute persuadé que ces «différences» ne l'empêcheraient pas de remplir l'une de ses obligations les plus fondamentales, à savoir se doter de représentants politiques élus d'une manière libre et démocratique. L'Assemblée ne saurait tolérer une situation dans laquelle les pouvoirs des représentants élus du peuple azéri sont contestés par une grande partie de leur propre population et dans laquelle, de ce fait, tout le processus démocratique est affaibli.

26.       Cela dit, l'opposition porte aussi une grande part de responsabilité. Son boycott des séances parlementaires et des votes ultérieurs n'aide en rien au développement de ce même processus démocratique. L'Azerbaïdjan a grand besoin de renforcer ses institutions démocratiques et le parlement est probablement la principale institution à cet égard; c'est la raison pour laquelle l'opposition doit être au parlement plutôt que dans la rue.

27.       Outre les principes généraux qui s'appliquent à tout Etat membre du Conseil de l'Europe, un point supplémentaire entre en ligne de compte dans le cas azéri. Les énormes profits qui seront générés par les revenus pétroliers peuvent engager le pays dans des voies inconnues et dangereuses, s'ils ne sont pas gérés de manière transparente et démocratique.

28.L'organisation de nouvelles élections ne modifiera pas de manière substantielle l'équilibre politique global au parlement. Les élections sont toutefois importantes du fait que leur organisation est réellement la dernière chance des autorités de démontrer non seulement leur volonté politique, mais aussi leur aptitude politique. Ce qui signifie notamment que:

–       les enquêtes sur la fraude électorale devront être menées d'une manière parfaitement impartiale et professionnelle, sans aucune pression politique ou administrative;

–       les résultats de ces investigations devront être rendus publics et la justice devra être administrée semblablement, de manière impartiale et professionnelle, sans aucune pression politique et administrative;

–       le parlement nouvellement élu devra amender la législation électorale dans le sens des recommandations de la Commission de Venise, en particulier en ce qui concerne la composition des commissions électorales;

–       la liberté de réunion devra être pleinement garantie;

–       le pluralisme des médias dans les médias électroniques et la liberté d'expression devront aussi être pleinement garantis.

29.       Conformément à l'article 8.5 du Règlement de l'Assemblée, Les rapports soumis à l'Assemblée ou à la Commission Permanente conformément aux paragraphes 3 et 4 doivent contenir un projet de résolution proposant dans son dispositif:

a. la ratification des pouvoirs,
b. la non-ratification des pouvoirs,
c. la ratification des pouvoirs, assortie de la privation ou la suspension, applicable aux membres de la délégation concernée, de l'exercice de certains des droits de participation ou de représentation aux activités de l'Assemblée et de ses organes.

30.       A la lumière des conclusions du paragraphe 24 du présent rapport, votre Rapporteur suggère que les pouvoirs de la délégation azerbaïdjanaise ne soit pas ratifiés (Article 8.5.b) en attendant que des progrès convaincants et substantiels aient été accomplis dans tous les domaines susmentionnés.

31.       Pour parvenir aux objectifs mentionnés au paragraphe 28 du présent rapport, la coopération entre l'Assemblée et nos collègues azéris est indispensable. C'est la raison pour laquelle une option alternative et un signe de compromis pourraient consister en la ratification des pouvoirs de la délégation azerbaïdjanaise, mais que les membres de la délégation soient privés de leur droit de vote (Article 8.5.c) en attendant que des progrès convaincants et substantiels aient été accomplis dans tous les domaines susmentionnés.

32.       Dans les deux cas, l'Assemblée devra revenir à la question après l'organisation de nouvelles élections le 13 mai, c'est-à-dire, au plus tôt, durant sa partie de session de juin.

* * *

Commission chargée du rapport: commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi)

Renvoi en commission: Décision de l’Assemblée du 23 janvier 2006, article 8, paragraphe 2b du Règlement

Projet de résolution adopté par la Commission le 24 janvier 2006 avec 31 voix pour, 3 voix contre et 8 abstentions.

Membres de la commission: M. György Frunda (Président), Mme Hanne Severinsen (1ère Vice-Présidente), M. Mikko Elo (1er Vice-Président), M. Tigran Torosyan (3ème Vice-Président), M. Pedro Agramunt, M. René André, M. Birgir Ármannsson, M. Giuseppe Arzilli, M. Jaume Bartumeu Cassany, Mme Mertixell Batet, Mme Gülsün Bilgehan, Mme Mimount Bousakla, M. Luc Van den Brande, M. Patrick Breen, Mme Beáta Brestensktá, M. Milos Budin, M. Mevlüt Çavusoglu, M. Doros Christodoulides, Ms Lise Christoffersen, M. Boriss Cilevics, M. Georges Colombier, M. Joseph Debono Grech, M. Juris Dobelis, Mme Josette Durrieu, M. Mátyás Eörsi, M. Jean-Charles Gardetto, M. József Gedei, M. Marcel Glesener, M. Charles Goerens, M. Stef Goris, M. Andreas Gross, M. Alfred Gusenbauer, M. Michael Hagberg, M. Michael Hancock, M. Andres Herkel, M. Elmir Jahic, M. Erik Jurgens, M. Evgeni Kirilov, M. Konstantin Kosachev, Mme Darja Lavtižar-Bebler, Mme Sabine Leutheusser-Schnarrenberger, M. Eduard Lintner, M. Tony Lloyd, M. Mikhail Margelov, M. Bernard Marquet, M. Frano Matušic, M. Miloš Melcák, Mme Nadezhda Mikhaila, M. Neven Mimica, M. Paschal Mooney, M. João Bosco Mota Amaral, M. Zsolt Németh, M. Ibrahim Özal, M. Theordoros Pangalos, M. Leo Platvoet, Ms Maria Postoico, M. Christos Pourgourides, M. Anatoliy Rakhansky, M. Johannes Randegger, M. Dario Rivolta, M. Armen Rustamyan, Mme Katrin Saks, M. Rudy Salles, M. Kimmo Sasi, M. Adrian Severin, M. Samad Seyidov, M. Vitaliy Shybko, M. Leonid Slutsky, M. Michael Spindelegger, Mme Elene Tevdoradze, M. Egidijus Vareikis, M. Miltiadis Varvitsiotis, M. José Vera Jardim, Mme Birute Vesaite, M. Oldrich Vojír, M. David Wilshire, Mme Renate Wohlwend, M. Emanuelis Zingeris.

N.B. Les noms des membres qui ont participés à la réunion sont indiqués en gras.

Secrétariat de la commission: Mme Ravaud, Mme Theophilova-Permaul, Mme Odrats.


1 Cette version révisée concerne uniquement le résumé.

2 Commission ad hoc pour l'observation des élections parlementaires en Azerbaïdjan du Bureau de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, OSCE/BIDDH, Assemblée parlementaire de l'OSCE, le Parlement Européen et l'Assemblée parlementaire de l'OTAN.

3 Le préambule du Statut, paragraphe 3: «Inébranlablement attachés aux valeurs spirituelles et morales qui sont le patrimoine commun de leurs peuples et qui sont à l'origine des principes de liberté individuelle, de liberté politique et de prééminence du droit sur lesquels se fonde toute démocratie véritable».