Doc. 11109
15 décembre 2006

La situation des travailleurs migrants dans les agences de travail temporaire (ATT)

Rapport
Commission des migrations, des réfugiés et de la démographie
Rapporteur : M. Doug HENDERSON, Royaume-Uni, Groupe socialiste


Résumé

L'emploi de migrants par l'intermédiaire d’agences de travail temporaire (ATT) s'est rapidement développé ces dernières années en réaction à la mondialisation et à la nécessité croissante d'adapter les conditions de travail. Certes, ces services présentent de nombreux avantages pour le marché européen du travail mais certains employeurs recourent à la main-d'œuvre des ATT pour réduire les coûts et augmenter la flexibilité aux dépens des normes de travail nationales et des droits fondamentaux des travailleurs.

S'agissant des normes internationales à appliquer, le rapport rappelle les dispositions de l'article 19 de la Charte sociale européenne révisée, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, les Conventions de l'OIT sur les travailleurs migrants et les agences d'emploi privées (143 et 181), les protocoles de Palerme et la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant ainsi que la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains.

L'Assemblée recommande aux Etats membres du Conseil de l'Europe de consacrer le principe d'égalité de traitement pour les travailleurs migrants temporaires en termes de salaires, de conditions de travail et de droits sociaux ; de réglementer l'activité des agences de travail temporaire par le biais de systèmes d'enregistrement et de licences ; d'affecter davantage de ressources aux inspections nationales du travail et d'appliquer des sanctions aux ATT et aux entreprises utilisatrices en cas de violation des dispositions réglementaires.

A.       Projet de résolution

1.       La mobilité croissante des travailleurs et des services, tant dans le Marché intérieur européen qu’entre les pays de la CEI, aboutira inévitablement à une modification du paysage de l'emploi dans une Europe élargie. Les problèmes qui se posent pour le recrutement régulier et irrégulier, bien que de nature différente, ne devraient que s’aviver du fait de la croissance du secteur du recrutement temporaire national et transnational.

2.       La pauvreté, l'absence d'État de droit, le nivellement par le bas des normes de travail, la présence de groupes criminels et le phénomène de la corruption dans certains pays, en particulier en Europe de l'Est et dans de nombreux pays de la CEI, sont autant de facteurs qui contribuent à augmenter le recrutement irrégulier, le travail forcé et la traite des êtres humains.

3.       Le recrutement temporaire transnational, régulier et irrégulier, augmente également en Europe centrale et orientale, avec l'arrivée de main-d’œuvre à bas prix venue de pays plus à l’Est et du Sud-Est.

4.       En Europe centrale et orientale, le recrutement par des agences de travail temporaires légitimes n’est apparu que récemment. Sans partenaires sociaux capables d'instaurer une autorégulation efficace, il faudra légiférer pour asseoir la réputation de cette forme d'emploi tant auprès des sociétés utilisatrices que des candidats à un emploi par ce biais. Une réglementation forte et des mécanismes permettant de la faire appliquer (avec un système de licence et des inspections du travail) pourraient contribuer à légitimer l'activité des agences de travail temporaire lorsque le secteur démarre à peine.

5.       Dans le contexte de l'Union européenne, les problèmes sont de nature différente ; il s’agit de réglementer l’essentiel des activités des agences de travail temporaire afin de préserver les normes du travail et de permettre à tous d'opérer dans des conditions égalitaires dans le marché intérieur.

6.       Le Royaume-Uni, l'Irlande et la Suède ont appliqué une politique de la porte ouverte en ce qui concerne l'emploi de travailleurs provenant des nouveaux Etats membres de l’Union européenne, au moment de l’élargissement de l’Union européenne à 25. Des accords transitoires doivent à présent être conclus avec la Bulgarie et la Roumanie. Il est donc nécessaire d'établir des règles claires et de rechercher une plus grande harmonisation au sein du marché intérieur. À cet égard, l'Assemblée parlementaire se réjouit des efforts déployés par le Parlement européen et le Conseil européen pour parvenir à un consensus sur la future Directive sur les Services.

7.       Certains Etats membres du Conseil de l’Europe ont déjà adopté des règles garantissant que les travailleurs migrants temporaires, en termes de salaires, de conditions de travail et de droits sociaux, bénéficient de l’égalité de rémunération par rapport à la main-d’œuvre locale dans leurs pays respectifs. Il est donc important - en particulier du fait de l'augmentation actuelle et prévisible des activités des agences de travail temporaire - que, dans tous les Etats membres du Conseil de l'Europe, des règles de base existent pour garantir l'égalité de traitement et les droits de base des travailleurs temporaires et migrants.

8.       L'article 19 de la Charte sociale européenne révisée donne déjà des orientations pour certaines des normes de base encadrant la protection et l'assistance aux travailleurs migrants et leurs familles, en prévoyant que ceux-ci ne doivent pas recevoir un traitement moins favorable que celui réservé aux résidents nationaux pour ce qui concerne la rémunération et les conditions de travail, l'affiliation syndicale, le droit à bénéficier des dispositions de convention collective, et le droit au logement.

9.       En outre, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, les Conventions de l’OIT sur les travailleurs migrants (C143) et les agences d’emploi privées (C181), les Protocoles de Palerme et la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant ainsi que la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE n° 197) sont d'autres instruments normatifs qui offrent un bon cadre de coopération et d'action conjointe aux Etats membres du Conseil de l'Europe et au-delà.

10.       En outre, l'Assemblée rappelle sa Résolution 1509 (2006) et sa Recommandation 1755 (2006) sur « les droits de l'homme des migrants en situation irrégulière » ainsi que sa Résolution 1501 (2006) et sa Recommandation 1748 (2006) sur « la migration de travail en provenance de pays d'Europe centrale et orientale : état présent et perspectives ».

11.       Enfin, l'Assemblée se félicite de la décision du Comité européen sur les migrations (CDMG) de focaliser sa prochaine 8e Conférence des ministres européens chargés de la migration et des questions d'intégration sur le thème de la migration de travail et du codéveloppement. La Conférence ministérielle sera l'opportunité de renforcer les mécanismes de coopération entre les pays d'origine, de transit et de destination afin d'améliorer ensemble la réglementation et la gestion des migrations économiques en Europe.

12.       À la lumière de ce qui précède, l'Assemblée parlementaire invite les Etats membres du Conseil de l'Europe :

12.1.       à signer, ratifier et mettre en œuvre la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, les Conventions de l’OIT sur les travailleurs migrants (C143) et les agences d’emploi privées (C181) ainsi que les Protocoles de Palerme ;

12.2.       à signer, ratifier et mettre en œuvre la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant (STCE n° 93) et la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE n° 197) ;

12.3.       à signer, ratifier et mettre en œuvre la Charte sociale européenne révisée ( STCE n° 163) et son article 19 ;

12.4.       à faire appliquer la législation et les réglementations du travail existantes en ce qui concerne le recrutement de main-d’œuvre transnationale et la protection des travailleurs migrants ;

12.5.       à consacrer le principe d'égalité de traitement pour les travailleurs temporaires et les travailleurs migrants opérant sur le marché du travail national ;

12.6.       lorsqu'il n'existe pas déjà des mécanismes pour ce faire, à mettre en place une réglementation destinée aux fournisseurs de travail (agences de travail temporaire) par le biais de systèmes d'enregistrement et de licences ;

12.7.       à promouvoir l’instauration d’une autorégulation et élaborer des codes de conduite nationaux ;

12.8.       à établir la responsabilité claire des agences de travail temporaire et des entreprises utilisatrices ;

12.9.       à appliquer des sanctions dissuasives et proportionnelles à la fois aux agences de travail temporaire et aux entreprises utilisatrices en cas de violation des dispositions réglementaires ;

12.10.       établir une coopération entre les inspections du travail, les syndicats, les agences de travail temporaire, les ONG et la police en vue d'identifier les chefs de gangs et les pratiques abusives qui violent les réglementations nationales en matière de droit du travail ;

12.11.       à affecter davantage de ressources aux inspections nationales de travail ;

12.12.       à poursuivre les efforts pour traiter le problème de la migration irrégulière ;

12.13.       à instaurer une coopération internationale entre les inspections du travail, la police et les garde-frontières ;

12.14.       à faire en sorte que les travailleurs migrants puissent accéder facilement aux informations sur leurs droits et sur les normes nationales en matière de droit du travail ;

12.15.       à permettre aux travailleurs migrants de faire plus facilement valoir leurs droits par une assistance juridique et le recours à un Service d’Ombudsman;

12.16.       à encourager les syndicats à faire participer les travailleurs migrants et à défendre les droits de ces derniers.

B.       Projet de recommandation

1.       L'Assemblée parlementaire se réfère à sa Résolution ….. (2006) sur la situation des travailleurs migrants dans les agences de travail temporaire (ATT).

2.       Par conséquent, l’Assemblée recommande que le Comité des Ministres charge les comités intergouvernementaux pertinents de développer les programmes de coopération avec l'Organisation internationale du travail (OIT) et l'Union européenne pour :

2.1.        étudier les tendances existantes en matière de pratiques abusives dans le recrutement transnational de travailleurs temporaires ;2

2.2.       aider les Etats membres, en particulier non membres de l’Union européenne, à développer et à mettre en œuvre des stratégies pour lutter contre le recrutement irrégulier et la traite de travailleurs ;

2.3.       aider les Etats membres, en particulier non membres de l'Union européenne, à réglementer le recrutement de main d’œuvre et à appliquer des mécanismes efficaces pour le faire respecter (inspection du travail, sanctions dissuasives, amendes avec éventuellement poursuites pénales) ;

2.4.       aider les Etats membres à élaborer des campagnes d'information concernant les droits des travailleurs migrants et leurs conditions de travail.

C.       Exposé des motifs, par M. Doug Henderson, rapporteur

I.       Introduction

1.       La plupart des pays sont concernés par la migration, que ce soit en tant que pays de départ, de transit ou d’accueil, ou encore une combinaison des trois. L’augmentation de la mobilité liée à la migration internationale est désormais une caractéristique inhérente à la mondialisation.

2.       A l’heure actuelle, on compte près de 200 millions de migrants, soit environ 3 % de la population mondiale. Même si cette proportion ne semble pas si importante, la présence et la visibilité des migrants en termes sociaux, économiques et politiques sont considérables, notamment si l’on pense au nombre de migrants en situation irrégulière qui ne sont pas recensés.

3.       De nos jours, les flux migratoires sont essentiellement composés de travailleurs migrants – en situation régulière ou irrégulière – nombre d’entre eux faisant appel à des agences de travail temporaire (ATT) de toutes sortes.

4.       Le présent rapport couvre deux situations très différentes en Europe : d'une part, certains cas de traitement discriminatoire dont font l'objet les travailleurs migrants dans le marché intérieur européen, marché pourtant de plus en plus réglementé ; et, d'autre part, des cas de violation de droits de l'homme qui sont la conséquence d'un recrutement illicite et clandestin de main-d’œuvre (traite des êtres humains et esclavage), essentiellement dans les pays non membres de l'Union européenne, du fait de marchés du travail non réglementés.

5.       Si les activités des agences de travail temporaire dans des pays de l'UE sont réglementées par les dispositions législatives nationales et communautaires, ou par l'autorégulation sous la forme de codes de conduite acceptés, il reste néanmoins nécessaire de renforcer l'inspection du travail et le contrôle des licences pour veiller à l'égalité de traitement et au respect des normes du travail.

6.       Sur le marché de l'emploi en dehors de l'UE, en particulier en Europe de l'Est, les agences de travail temporaire commencent à peine à émerger. Le manque de réglementation, de structures de recrutement et de mécanismes d'application de la loi (interventions policières, inspection du travail, système d'autorisation etc.) crée donc un terreau fertile pour les activités criminelles, le travail non déclaré et l'exploitation des travailleurs migrants.

7.       À l'évidence, les mesures proposées pour s'attaquer à ces deux situations fort différentes ne sont pas les mêmes.I

II.       Le marché de l'emploi européen et les avantages des ATT

8.       L’accès à de la main-d’œuvre détachée par le biais des agences de travail temporaire (ATT) a connu une croissance rapide ces dernières années en réaction à la mondialisation en général ainsi qu’à la nécessité croissante d’adapter les conditions nationales des marchés de l'emploi. Ces services présentent plusieurs avantages pour le marché de l'emploi européen. Le plus évident est une plus grande mobilité de la main-d’œuvre dans le marché intérieur de l'UE - un marché qui compte en gros 460 millions d'habitants dans les 25 nations qui composent l'UE et les trois pays de l’EEE-AELE. Une bonne utilisation des services proposés par les ATT permet de contribuer significativement à satisfaire les demandes accrues de main-d’œuvre mobile sur le marché intérieur de l'UE, ce qui peut stimuler la croissance économique et la rentabilité grâce à une plus grande compétitivité.

9.       Les ATT présentes plusieurs avantages pour les marchés de l’emploi. Elles contribuent depuis le départ à une plus grande mobilité de la main-d’œuvre par divers canaux légitimes. Elles répondent aux besoins qui ne sont pas couverts de manière adéquate par les agences publiques de l'emploi du fait de la complexité croissante de l'interface entre la demande et l’offre de compétences. Elles ont fait émerger les vacances de postes sur le marché ouvert, et permis ainsi de réduire la durée nécessaire pour les pourvoir. Souvent, les ATT sont très réactives aux tendances des besoins du marché de l'emploi et sont donc en mesure d'éviter les retards et les déséquilibres que l'on connaissait parfois dans le passé. Ces agences ont aidé le marché à faire correspondre l'offre et la demande de compétences grâce à des méthodes de sélection et de recrutement adaptées.

10.       Les ATT ont également contribué à réduire l'attente entre deux emplois pour les travailleurs, à qui elles ont permis d'être davantage mobiles. Elles ont constitué une passerelle entre le chômage et l'emploi permanent, grâce à des contrats de durée déterminée, permettant aux chômeurs et aux jeunes en première demande d’emploi de s'intégrer progressivement sur le marché de l'emploi. Des études récentes ont conclu que les ATT proposent une trajectoire fiable pour l'intégration des immigrants au marché de l'emploi. En bref, elles ont introduit une importante flexibilité de la main-d’œuvre permettant de répondre aux demandes des travailleurs et des entreprises utilisatrices.

III.       Les données du problème

i.       Exemples de recrutement discriminatoire de main-d’œuvre temporaire dans le Marché intérieur européen

11.       Toutefois, certaines entreprises utilisent actuellement les agences de travail temporaire pour réduire les coûts et augmenter la flexibilité, aux dépens des normes de travail nationales et des droits fondamentaux des travailleurs.

12.       Selon la Confédération européenne des syndicats (CES), les activités des agences de travail temporaire sont particulièrement « sujettes » aux abus des droits des travailleurs migrants ; à la concurrence déloyale ; et à l'exploitation. Certaines agences de travail temporaire tentent de contourner les droits essentiels des travailleurs et de les obliger à signer des contrats d'embauche qui permettent à l'employeur de verser des salaires bien plus faibles que ceux pratiqués dans le pays d'accueil ; d'exiger un temps de travail plus long que la normale ; de contourner les éléments de rémunération traditionnels tels que les congés et la rémunération des heures supplémentaires.

13.       Les cas de non-respect des normes communautaires sont nombreux ; certains sont d’ailleurs cités en annexe I. Selon la CES, les travailleurs venant des nouveaux États membres de l’UE sont encore plus exposés aux abus, sans même parler des travailleurs sans-papiers provenant de pays tiers.

14.       Lors de l’audition de la Commission (Bruxelles, 21 mars 2006), le Centre irlandais pour les droits des migrants a présenté l’exemple d'un cas d’exploitation et de travail forcé dont ont été victimes 15 travailleurs de Lettonie et d'Ukraine, qui avait été embauchés dans une ferme reculée d'Irlande qui cultive des champignons. Le groupe est arrivé en Irlande par le biais d'agences locales de l'emploi en Lettonie et en Ukraine, qui leur avaient extorqué de 1 800 à 2 500 € pour les informations, les frais de traitement et l'obtention d'un permis de travail. La majorité des membres du groupe ont emprunté de l'argent à la famille, à des amis et à des prêteurs sur gages usuriers pour régler ce montant, et, en conséquence, s'étaient endettés avant même d’arriver en Irlande.

15.       Pour certains d'entre eux, l'employeur était allé en Ukraine afin de sélectionner personnellement les ouvriers particulièrement vulnérables (ne parlant pas l'anglais ; peu aptes à s'exprimer ; sans expérience du secteur agricole etc.). Aucun des ouvriers n'a reçu d’information des « agences de l'emploi » concernant l'Irlande, le lieu où ils allaient travailler, leurs droits, ni aucune information concernant la procédure pour l'obtention du permis de travail. Les «agences» avaient publié dans les journaux locaux des petites annonces mentionnant des numéros de licences, mais il était difficile de savoir si cette licence avait bel et bien été délivrée par les Services de l'emploi pour les autoriser à exercer des activités d'agence de travail temporaire.

16.       Les conditions de travail décrites par ces ouvriers ont montré qu'à l'évidence l'employeur avait violé de nombreuses dispositions du droit du travail irlandais et qu'ils s'étaient fait exploiter sur leur lieu de travail : en moyenne, ils travaillaient de 10 à 17 heures par jour et, dans certains cas, 100 heures par semaine. Ce n'était qu'avec beaucoup de difficultés qu’ils pouvaient obtenir une journée de repos. L'on a rapporté également le cas de personnes qui ont dû travailler en contact avec des produits chimiques avec pour conséquence, des allergies, des pertes de cheveux, des lésions cutanées, des nausées et des problèmes respiratoires. Pour tout logement, ces ouvriers n'avaient qu'une couchette dans une dépendance reconvertie en deux chambres, où ils logeaient à six. Pour la plupart, ces ouvriers se sont retrouvés sans papiers, parce que l'employeur n'a pas fait les démarches pour renouveler leur permis, les mettant par là même en situation de dépendance, d'exclusion et d'extrême vulnérabilité. À leur départ de la ferme, ils se sont retrouvés sans permis, sans emploi, sans argent et sans logement.

17.       Le Centre irlandais pour les droits des migrants s'est employé pendant deux ans à soutenir ces ouvriers afin de régulariser leur situation juridique et aussi de faire valoir leurs droits. 13 membres du groupe ont saisi la justice à l’encontre de leurs anciens employeurs devant le Labour Relations Commission and Employment Appeals Tribunal (équivalent du Tribunal des prud'hommes). L'employeur a fini par proposer un dédommagement à l'amiable. D'après le Centre irlandais pour les droits des migrants, ce cas d'exploitation sur le lieu de travail n’est pas isolé en Irlande. Cet état de fait est particulièrement fréquent dans les secteurs les plus mal payés et les moins bien réglementés du marché du travail.

18.       Le ministère irlandais de l’Entreprise, du Commerce et de l’Emploi a fait part au rapporteur1 d’inquiétudes sur les méthodes qui seraient pratiquées par certains employeurs dans le secteur de la culture du champignon. Le service d’inspection du Ministère a lancé une campagne sur le sujet au cours de l’année 2006. L’Irlande dispose d’un ensemble complet de lois relatives à l’emploi, appliquées par l’Employment Appeals Tribunal (équivalent du Tribunal des prud'hommes), le Labour Court (Tribunal du travail), le Rights Commissioner Service (Service du Commissaire aux droits de l’homme) et l’inspection du travail. En outre, le gouvernement irlandais est à l’origine du récent Social Partnership Agreement « Towards 2016 » (accord de partenariat social), qui énonce un ensemble d’engagements sur les normes et la conformité en matière d’emploi. Les parties signataires de « Towards 2016 » se sont mises d’accord sur la nécessité d’améliorer la réglementation relative aux agences de travail temporaires et aux travailleurs temporaires. La nouvelle législation, qui sera publiée avant fin 2006, consolide le système des agences de travail temporaire et exige que celles établies et/ou exerçant leur activité en Irlande soient titulaires d’une autorisation. Les nouvelles lois mettront également en place le Code de conduite relatif au fonctionnement des agences d’emploi. Ces dispositions s’appuient sur les normes décrites dans la Convention OIT No.181.

ii.       Recrutement de travailleurs migrants en dehors de l'UE

19.       En 2003, dans le cadre du Programme d'action spécial de l’OIT visant à lutter contre le travail forcé, une étude a été menée parmi les travailleurs migrants de retour dans leur pays en Albanie, en Moldova, en Roumanie et en Ukraine. Cette étude montre que le recrutement joue un rôle central dans ces formes modernes de travail forcé lorsque, par exemple, les travailleurs sont maintenus dans une situation d'endettement où ils ne peuvent rembourser les frais de recrutement. La moitié des migrants de retour au pays qui ont répondu à l'étude avaient connu des formes de coercition lorsqu'ils travaillaient à l'étranger, par exemple des violences physiques et sexuelles, la restriction à la liberté de mouvement ou la confiscation des papiers d'identité, assorties de menaces. Seules 12 % des personnes ayant répondu dans le cadre de cette étude étaient passées par des agences officielles de l’emploi.

20.       Selon l’International Association Labour Migration (IALM) (Association internationale Migration économique), un réseau d'agences de l’emploi privées en Fédération de Russie, on compte environ 5 millions de travailleurs en situation irrégulière en Fédération de Russie, un million en Ukraine et 15 millions en Asie centrale, qui transitent vers la Fédération de Russie. C'est là un secteur très lucratif pour les groupes criminels. Aujourd'hui, la Fédération de Russie a un système complexe de recrutement à la fois par le biais d'un système légal d’ATT ayant pignon sur rue et d'un système informel dans l'économie grise. On compte environ 190 ATT en Fédération de Russie et 400 en Ukraine. Seules 10 % sont organisées en réseau. Depuis 2005, le gouvernement fédéral russe applique le régime de la libre circulation sans visa pour les pays de la CEI, ce qui a certes permis de rendre les travailleurs plus mobiles, mais a par ailleurs ouvert la porte à des activités criminelles, au travail non déclaré et l'exploitation des travailleurs migrants, du fait du manque de cadre juridique et d'un mécanisme permettant d'appliquer la loi.

21.       En Fédération de Russie, par exemple, la majorité des travailleurs migrants sont recrutés de manière informelle et les arnaques sont très répandues. Seuls 4 % ont indiqué être passés par des canaux officiels de recrutement.

22.       Les abus dans le processus de recrutement sont également plus fréquents à l'égard des femmes. Celles-ci ont davantage de difficultés à recourir à un canal officiel de recrutement, soit par le biais d'agences de l’emploi privées, soit par celui des services publics de l'emploi. Selon une étude de l’OIT, les femmes victimes de traite et de trafics ont indiqué qu’elles avaient été recrutées par des intermédiaires ou par divers types d'agences de couverture, telles que des agences de mannequins et du spectacle, agences de tourisme ou agences pour les personnels au pair.

23.       Ces exemples illustrent bien les pratiques qui sévissent en marge du marché de l'emploi. La majeure partie du temps, elles échappent à la vigilance de l'inspection normale du travail, puisqu'elles sont menées dans la zone grise entre le crime organisé, l'emploi illégal et le travail de piètre qualité. On ne dispose que de peu d'informations sur la portée de ces activités. De nombreux recruteurs exercent par ailleurs d'autres activités commerciales ou changent de secteur lorsque les coûts des transactions augmentent, habituellement lorsque les contrôles se multiplient. Si les méthodes d’encadrement «douces», par exemple les sanctions administratives, combinées avec des incitations positives, peuvent être suffisantes pour assainir le gros des activités, il convient de déployer davantage d'efforts pour poursuivre en justice ceux qui pratiquent des activités criminelles.

IV.       Normes internationales en ce qui concerne la migration, le recrutement de main-d’œuvre et la traite de travailleurs.

24.       La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990), la Convention de l’OIT sur les travailleurs migrants (C143) et la récente Convention de l’OIT sur les agences de l’emploi privées (C181) forment le cadre normatif général au niveau mondial.

25.       La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille vise à fixer des normes minimales que les Etats parties devraient appliquer aux travailleurs migrants et à leurs familles, quel que soit leur statut au regard des migrations. La Convention donne la définition la plus exhaustive des travailleurs migrants, y compris ceux qui sont sans-papiers, reconnaissant que les travailleurs migrants en situation irrégulière sont fréquemment exploités et confrontés à de graves violations des droits de l'homme, et qu'il faut donc agir de manière appropriée pour prévenir et éliminer les circulations de clandestins et la traite des êtres humains (Article 68) et garantir la protection des droits de l'homme des personnes dans ces situations.

26.       La Convention est innovante en ce qu'elle définit les droits qui s'appliquent à certaines catégories de travailleurs migrants et à leurs familles, notamment aux travailleurs frontaliers, travailleurs saisonniers, travailleurs itinérants, migrants employés pour un projet spécifique et travailleurs indépendants. La Convention inclut également un certain nombre de droits relatifs à des besoins de protection spécifiques étant donné la vulnérabilité des migrants. Ainsi, l'Article 15 protège les travailleurs migrants de toute privation arbitraire de biens leur appartenant, tandis que l'Article 21 prévoit des dispositions protectrices contre la confiscation et les tentatives de destruction de papiers d'identité, de documents autorisant l'entrée sur le territoire, de résidence ou d'établissement sur le territoire national ou de permis de travail.

27.       Les Articles 25 et 26 prévoient respectivement que les travailleurs migrants ont droit à un traitement qui ne doit pas être moins favorable que celui qui s'applique aux ressortissants de l'État d'emploi pour ce qui est de la rémunération et des autres conditions de travail et d'emplois ; et qu'ils ont le droit de participer à des activités syndicales.

28.       La Convention, signée en 1990, est entrée en vigueur en juillet 2003. Parmi les 43 Etats qui l’ont signée ou ratifiée, on n'en compte malheureusement que trois qui soient membres du Conseil de l'Europe (la Bosnie-Herzégovine, la Serbie-Monténégro et la Turquie), et aucun des grands pays industrialisés destinataires de la migration ne l'a signée. Selon Human Right Watch, les pays d'immigration se sont montrés réticents à adhérer à la convention de crainte qu'elle ne donne trop de droits et d’avantages à des travailleurs migrants en situation irrégulière, malgré l'importante contribution que les travailleurs migrants représentent pour leurs économies.

29.       La Convention de l’OIT sur les travailleurs migrants, autre texte international de référence, s’efforce de traiter les migrations en conditions abusives (Articles 1 à 9) et énonce le principe d'égalité des chances pour les travailleurs migrants en situation régulière concernant l'emploi et le travail, la couverture sociale, les droits syndicaux, les droits culturels et les libertés individuelles et collectives (Article 10). Plus spécifiquement, l'Article 12 (g) demande aux Parties signataires de «garantir l'égalité de traitement en matière de conditions de travail entre tous les travailleurs migrants exerçant la même activité quelles que soient les conditions particulières de leur emploi ».

30.       La Convention plus récente de l’OIT (1997) relative aux agences d'emploi privées donne une définition de ces dernières qui est suffisamment large pour couvrir toute une gamme de recruteurs. L'Article 1(c) en particulier fait référence à «d'autres services ayant trait à la recherche d'emplois, qui seront déterminés par l'autorité compétente après consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives, tels que la fourniture d'informations, sans pour autant viser à rapprocher une offre et une demande spécifiques ». Cette définition pourrait englober certaines des agences qui se font passer pour des agences de voyages, de spectacles ou de mannequins et qui servent d'intermédiaires pour la traite des êtres humains.

31.       Selon l’OIT, la législation et les réglementations au niveau national ne font, et c’est regrettable, que rarement mention spécifiquement à ces divers types d'agences. Lorsqu'un système d'octroi de licence est en place, il cible en général des agences d'emploi privées facilement identifiables, tandis que les autres doivent simplement s'enregistrer auprès des autorités publiques pour le tourisme ou comme n'importe quelle autre activité commerciale (agences de voyages, agence de spectacles, agences de mode ou agences de mannequins).

32.       La Convention 181 définit les agences d'emploi privées comme « toute personne physique ou morale ». Ceci peut couvrir les recruteurs individuels puisqu’ils ne se sont pas enregistrés ou qu'ils n'ont pas de licence pour leurs activités. L'Article 2 (2) prévoit : « La présente convention s'applique à toutes les catégories de travailleurs et à toutes les branches d'activité économique », à l'exception des gens de mer. En pratique, toutefois, de nombreuses activités économiques informelles et recruteurs individuels échappent aux réglementations publiques et sont difficiles à superviser.

33.       Même si la Convention et la Recommandation 188 donnent quelques pistes sur les types d'abus qui devraient être éliminées, elles ne donnent que peu d'indications sur la manière de procéder pour ce faire. Il est fait référence aux textes de lois et réglementations, qui prévoient des sanctions, notamment l'interdiction d'activité pour les agences de l'emploi privées coupables de pratiques frauduleuses et d’abus (Article 8).(1)). Le texte ne va pas plus loin en ce qui concerne les sanctions, et on ne voit pas clairement si des sanctions pénales ont été envisagées.

34.       Il est toujours préoccupant que, malgré le large consensus qui régnait durant la rédaction et l'adoption de la Convention 180 et de ses caractéristiques relativement «modernes», un tout petit nombre d'Etats membres du Conseil de l'Europe seulement l’ait ratifiée à ce jour (l'Albanie, la Belgique, la Bulgarie, la République tchèque, la Finlande, la Géorgie, la Hongrie, l'Italie, la Lituanie, la Moldova, les Pays-Bas, le Portugal et l'Espagne).

35.       Les Protocoles de Palerme peuvent permettre des sanctions pénales appropriées et efficaces en cas de pratiques de recrutement frauduleux au niveau international et pourraient être utilisés conjointement aux dispositions de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles ainsi que des deux Conventions C143 et C181 de l’OIT.

36.       Les Protocoles de Palerme (novembre 2000) se composent du Protocole visant à prévenir, supprimer et punir la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, et du Protocole contre le trafic de migrants par terre, air et mer, l'un et l'autre venant compléter la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée. La définition donnée par le Protocole de Palerme de ce qui constitue un trafiquant ou une traite couvre de nombreuses formes de recrutement abusif. Il est demandé aux Etats Parties d'ériger ces activités en infraction pénale lorsqu’elles sont commises sur le plan international (Article 5.1).

37.       En Europe, les principaux pays d’approvisionnement des trafiquants, tels que l'Ukraine et la Moldova, ayant signé et ratifié les Protocoles de Palerme, ont été les premiers à introduire de nouveaux textes législatifs et à poursuivre les trafiquants. Les sanctions ciblent souvent les recruteurs, puisque les employeurs sont à l'autre extrémité de la chaîne du trafic et hors d'atteinte pour les organismes répressifs nationaux dans les pays d'origine.

38.       Il est crucial d'accroître la coopération entre les pays sources et les pays destinataires.

V.       Réglementations au niveau européen : recrutement temporaire de travailleurs

       migrants

39.       Les conventions internationales étant de portée plus générale afin de couvrir des situations de diverses de manière globale, les pays européens ont besoin de mesures plus spécifiques pour réglementer l'essentiel des activités de recrutement temporaire transnational afin d'éviter que les normes du travail soient affaiblies et les acquis sociaux bradés.

40.       Avant d'aborder le processus réglementaire en place au niveau national et au niveau de l'Union européenne, il est nécessaire de faire mention des trois instruments de Conseil de l'Europe concernant l'égalité de traitement pour les travailleurs migrants et la lutte contre la traite des êtres humains.

41.       La Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains récemment adoptée lors du Troisième Sommet de l'Organisation à Varsovie (mai 2005) comporte trois volets : elle vise à 1) prévenir la traite et lutter contre la traite ; 2) protéger les victimes de la traite ; et 3) promouvoir la coopération et l'action internationale contre la traite. La définition de la traite est large et couvre le recrutement aux fins d'exploitation, notamment pour le travail forcé. Les mesures nécessaires de prévention sont de nature législative, administrative, éducative, sociale et culturelle et concernent les décideurs politiques, les pouvoirs publics, la police, la douane, les enseignants, les médias et la société civile. Une attention particulière est portée à la protection, au rapatriement et au retour des victimes. L'Article 18 dispose qu'il faut, en tant que de besoin, prendre les mesures législatives pour ériger ces activités en infraction pénale. L'Article 23 (1-4) prévoit des sanctions effectives, proportionnelle et dissuasives, notamment des amendes, la confiscation de biens et d'actifs, la fermeture des établissements, la privation de liberté et l'extradition.

42.       La Convention du Conseil de l'Europe sur le statut juridique du travailleur migrant (1977) énonce les droits des travailleurs migrants. Elle couvre un domaine similaire à celui de la Charte sociale européenne, bien qu’étant plus spécifique dans sa portée. La Convention est entrée en vigueur en mai 1983.

43.       Pour la Convention, dans son Article 1, paragraphe 1, les travailleurs migrants sont des ressortissants des Parties contractantes autorisés à résider sur le territoire d'un autre État membre du Conseil de l'Europe en vue d'y exercer un emploi rémunéré. Cette disposition exclut donc les travailleurs migrants d'Etats membres en dehors du Conseil de l'Europe, ainsi que les travailleurs qui n'ont pas été autorisés à résider dans un autre État du Conseil de l'Europe pour y travailler, par exemple ceux qui sont venus pour étudier, mais ont pris un travail à temps partiel, ou encore les travailleurs migrants en situation irrégulière. Le paragraphe 2 de l'Article 1 exclut un certain nombre de catégories de travailleurs de la portée de la Convention ; il s'agit des gens de mer, des travailleurs saisonniers et des personnes en formation. La Convention vise donc les travailleurs qui entendent s'installer durablement dans un Etat de Conseil de l'Europe différent du leur. L'Article 16 garantit l'égalité de traitement pour les travailleurs migrants par rapport au traitement réservé aux ressortissants des Etats membres, en ce qui concerne les conditions de travail.

44.       L'Article 19 de la Charte sociale européenne révisée prévoit le droit des travailleurs migrants et de leur famille à la protection et assistance. Le paragraphe 19.4 spécifie en outre que les Parties s’engagent à «garantir à ces travailleurs se trouvant légalement sur leur territoire […] un traitement non moins favorable qu'à leurs nationaux en ce qui concerne la rémunération et les autres conditions d'emploi et de travail ; l'affiliation aux organisations syndicales et la jouissance des avantages offerts par les conventions collectives; le logement». L'Article 19 est actuellement examiné et fera l'objet d'un rapport distinct de la Commission en temps opportun.

45.       Au titre de la procédure relative aux réclamations collectives, la Confédération européenne des syndicats (CES), l'Union des industries de la Communauté européenne (UNICE), l'Organisation internationale des employeurs (OIE) et les organisations nationales du patronat, syndicats et ONG reconnues peuvent, en cas de violation de la Charte, saisir Comité européen sur les droits sociaux. Ce mécanisme de suivi vise à renforcer l'application de la Charte sociale européenne sur le plan national.

46.       Au niveau de l'UE, la Charte des droits fondamentaux des travailleurs de l'UE prévoit que la réalisation du marché intérieur doit aboutir à une amélioration des conditions de vie et de travail des travailleurs dans les Communautés européennes (point 7). Cela sera réalisé par une harmonisation des avancées dans ces domaines, essentiellement par des formes d'emploi différentes des contrats permanents par exemple des contrats de travail de durée déterminée, le travail à temps partiel, le travail temporaire ou saisonnier, que l’activité s’exerce sur le territoire national ou soit transnationale.

47.       La réglementation du travail temporaire transnational au sein de l'UE a donc évolué progressivement par le biais de la directive sur le détachement des travailleurs (96/71/CE) et d’orientations adoptées récemment (COM(2006)159 final) ; la négociation en cours sur la proposition de Directive communautaire sur les services (COM(2006)160 final) et enfin, par le biais du débat qui a amené à la proposition, abandonnée, de Directive communautaire sur les conditions de travail pour les travailleurs d'agences d’emploi temporaire (COM(2002)149 ; proposition révisée COM(2002)701).

48.       À la lumière de processus actuel des négociations sur la Directive relative aux services, la Commission européenne a publié, en avril 2006, des orientations sur le détachement de travailleurs dans le cadre d’une prestation de services (COM (2006) 159 final).4

49.       La Directive 96/71/EC sur le détachement de travailleurs prévoit les dispositions contraignantes en vigueur dans le pays d'accueil qui doivent être appliquées aux travailleurs détachés2 en établissant un « socle » de conditions de travail et d'emploi qui doivent être impérativement respectées. Elle définit la fourniture de services transnationaux comme étant soit la réalisation d'un travail par une entreprise, pour son compte et sous sa direction, soit par l'embauche de personnel. Elle a un objectif social clair : que les travailleurs détachés en mission se voient garantir par leur employeur pendant la période de leur mission le respect de certaines règles de protection de l'État membre de l'UE dans laquelle ils exécutent leur mission. Ces règles couvrent notamment:

- la durée maximum de travail et les périodes de repos minimum ;

- les congés payés annuels minimums ;

- les taux salariaux minimum ;

- les conditions d'emploi des travailleurs détachés, en particulier le recrutement de travailleurs par le biais d'agences de travail temporaire ;

- les conditions de santé, de sécurité et d'hygiène sur le lieu de travail ;

- les mesures de protection concernant les conditions de l'emploi pour les femmes enceintes, les enfants et les jeunes.

50.       La Commission a passé en revue la mise en œuvre de la Directive sur le détachement de travailleurs, et a conclu qu'il y a encore énormément de possibilités d'améliorer l'accès à la formation, la coopération administrative et le suivi de l'application de ces dispositions.

51.       Les Orientations clarifient également, sur la base de la jurisprudence de la Cour européenne de Justice, les conditions suivantes applicables aux ATT :

- avoir un représentant sur le territoire du pays hôte ;

- obtenir l'autorisation des autorités compétentes du pays hôte ou être enregistré auprès d'elles;

- déclarer le contrat de mission (déclarer les travailleurs qui ont été détachés, le type de service qu'ils vont fournir, le lieu et la durée pendant laquelle ils seront détachés) ;

- conserver et remplir les documents relatifs à la protection sociale sur le territoire du pays hôte et conformément aux conditions applicables sur ce territoire.

52.       La Cour européenne de Justice a maintenu qu'un certain nombre de conditions supplémentaires que certains Etats membres de l'UE imposent à l'égard du détachement de travailleurs en provenance de pays tiers sont excessives. Au regard de la jurisprudence existante, la Commission européenne a conclu que le pays hôte ne peut pas imposer de formalités administratives ou conditions supplémentaires aux travailleurs détachés provenant de pays tiers lorsque ceux-ci se sont employés dans les conditions légales par le fournisseur de services établis dans un autre État membre de l'UE, sans préjudice du droit du pays hôte de vérifier que ces conditions sont respectées dans l’Etat membre de l'UE où le fournisseur de services est établi.

53.       En outre, la Directive sur le détachement de travailleurs impose des obligations claires en ce qui concerne la coopération entre les administrations nationales, et notamment la création d'une autorité de tutelle qui peut répondre à une demande argumentée sur, par exemple, le fait de savoir si l'entreprise fournissant des services transnationaux est réellement établie dans l'État membre de l'UE d'origine, ou à une demande de justificatifs pour établir si le travailleur est considéré comme « un travailleur » au titre de la législation du pays hôte.

54.       Les Etats membres de l'UE sont tenus de garantir certaines conditions aux travailleurs détachés en mission sur leur territoire, au titre de l'Article 3 de la Directive sur le détachement de travailleurs et de prendre les mesures nécessaires pour empêcher tout comportement illicite de la part des fournisseurs de services. À cet égard, la Cour européenne de Justice a rendu un avis sur un système de responsabilité individuelle et conjointe pour les donneurs d'ordres généraux et principal. Cette condition est une condition fondamentale pour établir une concurrence équitable, qui améliore la manière dont le public perçoit le détachement de travailleurs dans le cadre de la libre circulation transfrontalière des services.

55.       Les travailleurs détachés et les organisations qui les représentent (syndicats, avocats, ONG) devraient avoir la possibilité de saisir directement l'autorité concernée dans le pays hôte, et l'action en justice devrait pouvoir être déclenchée par des plaintes des travailleurs ou de fournisseurs de services concurrents. Cela veut dire que les autorités de supervision et les services d’inspection du travail devraient avoir les ressources et compétences nécessaires pour donner un suivi à ses plaintes. La Commission européenne s'engage à travailler avec les Etats membres de l'UE en vue d'améliorer la coopération transnationale des services d’inspection du travail.

56.       La proposition de Directive sur les conditions de travail pour les employés d'agences de travail temporaire (COM(2002)149, 20 mars 2002) cherchait à aller plus loin que les normes minimales contenues dans la Directive sur le détachement de travailleurs, en établissant le principe de non-discrimination, notamment pour le salaire, entre des travailleurs venant d'agences temporaires et des travailleurs comparables dans l'entreprise utilisatrice. Le principe de non-discrimination existait déjà dans 11 états membres de l'UE (avant l'élargissement de 2004).

57.       La souplesse ainsi instaurée était considérable, puisqu'il était possible de pratiquer des exceptions au principe général de non-discrimination :

- pour des raisons objectives (la non-discrimination ne s'applique que dans des situations comparables) ;

- lorsque des conventions collectives prévoyaient déjà une protection adéquate ;

- lorsque les travailleurs provenant d'agences de travail temporaire avaient un contrat permanent avec l'agence ;

- lorsqu’il n'existait aucun travailleur comparable ni aucune convention collective, applicable soit dans l'entreprise utilisatrice, soit dans l'agence temporaire.

58.       La proposition de Directive de la Commission était motivée par la crainte que les travailleurs détachés par agences de travail temporaire puissent être moins favorablement traités que s'ils avaient été employés par l'entreprise utilisatrice directement.

59.       C'est pourquoi la proposition de directive prévoyait un ensemble supplémentaire de règles pour améliorer la situation des travailleurs temporaires, à savoir : l'accès aux informations relatives aux vacances d'emploi dans l'entreprise utilisatrice ; l'accès aux services sociaux de cette dernière ; l'accès à la formation organisée au sein de l’agence de travail temporaire ou de l'entreprise utilisatrice ; et la représentation des travailleurs au sein de l'agence de travail temporaire, sous réserve d'un certain seuil de travailleurs temporaires employés par cette dernière.

60.       Tout en se disant favorable à une Directive européenne sur le travail par agences, la Confédération internationale des agences d’emploi privées (Euro-Ciett) a fait valoir que la Directive devrait trouver un équilibre entre deux objectives clés : protéger les travailleurs relevant d'une agence de travail temporaire et permettre au secteur du travail temporaire de concrétiser pleinement son potentiel de création d'emplois, conformément aux objectifs de création d'emplois de l'UE. Euro-Ciett insistait sur le fait que la base pour une directive devrait être la nature spécifique de la relation triangulaire entre l'agence, le travailleur temporaire et l'entreprise utilisatrice ; et qu’il fallait reconnaître l'agence, et non l'entreprise utilisatrice, comme l'employeur. C'est pourquoi Euro-Ciett demandait de revenir à la notion d'une période d'intégration des travailleurs temporaires dans l'entreprise utilisatrice, avant de pouvoir comparer avec l'utilisateur.

61.       Le point de dissension et la raison pour laquelle les négociations ont achoppé était essentiellement la définition de la période de qualification (durée minimum de détachement auprès de l'entreprise utilisatrice). Certains Etats membres de l'UE ont fait valoir qu'un travailleur temporaire devrait être détaché pendant au moins un an avant de pouvoir bénéficier d'une protection ; d'autres proposaient une période de six mois, d'autres estimaient que la protection devrait s'appliquer dès le premier jour. Le minimum proposé de six semaines signifiait qu’un grand nombre de travailleurs temporaires ne pourraient de toute façon pas bénéficier d’une protection, étant donné la durée généralement très courte des détachements dans un certain nombre d'Etats membres.

62.       Dans le nouveau contexte de l'Union élargie et des possibilités de plus en plus importantes pour les travailleurs temporaires de nouveaux Etats membres de l'UE d'être recrutés sur le plan transnational, la Confédération européenne des syndicats (CES) et les syndicats affiliés demandent à l'UE de rouvrir les négociations afin d'établir des normes minimales et des conditions équitables pour les entreprises, et d'éviter une concurrence par les bas salaires et une dégradation des conditions de travail dans ce secteur.

63.       La récente proposition amendée de Directive communautaire sur les services (COM(2006)160 final) représente un changement radical par rapport au protectionnisme des droits nationaux du travail et de la législation nationale en matière de sécurité sociale, puisqu'elle établit le principe que les normes du pays où le service est rendu doivent s'appliquer, et remplace donc le principe controversé du « pays d'origine ». Ceci crée un contexte favorable pour réévaluer le niveau minimum d'harmonisation en ce qui concerne les missions temporaires dans un contexte national et transnational.

VI.       Réglementation des ATT et autoréglementation dans les Etats membres

64.       Lors de l'audition de la Commission à Bruxelles (21 mars 2006), Euro-Ciett a fait valoir que les agences de travail temporaire fonctionnent déjà dans un cadre légal clair et strict, qui est basé sur le plan international sur la convention 181 de l’OIT, sur la Directive communautaire sur le détachement de travailleurs en mission et, au niveau national, sur un large arsenal de législations du travail et/ou conventions collectives, qui sont inspirées par le principe de l'équilibre entre la protection des travailleurs et de la souplesse du marché de l'emploi.

65.       La Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail a récemment publié un rapport sur le travail par agences temporaires dans une Union européenne élargie (printemps 2006) qui présente dans les grandes lignes la nature et la portée du secteur des agences de travail temporaire ainsi que les différents niveaux de réglementation juridique et d’autorégulation dans les 25 états membres de l’UE, la Bulgarie, Roumanie et la Norvège.

66.       Les données sont, certes, limitées pour les nouveaux Etats membres de l'UE et les pays en voie d'accession, toutefois, les chiffres disponibles pour l'UE à 15 et la Norvège montrent que le secteur est petit en termes relatifs, puisqu'il ne représente que 1 à 2 % de l'emploi dans la plupart des cas. Toutefois, cela représente quelque 2,5 à 3 millions de collaborateurs détachés dans environ 5 000 entreprises, dans un segment qui a un chiffre d'affaires annuel vraisemblablement supérieur à 75 milliards d'euros sur les 16 pays concernés. Pour ce qui est du profil des personnes employées, les agences de travail temporaire sont particulièrement bien implantées dans la production (Autriche, France, Pays-Bas et Portugal) et dans le secteur des services (Espagne, Suède et Royaume-Uni) ; en Belgique, au Danemark, en Finlande et en Italie, les ATT couvrent ces deux secteurs.

67.       Pour ce qui est de la réglementation légale, les pays peuvent être subdivisés en deux grands groupes : la Belgique, le Danemark, la France, l’Allemagne, l'Irlande, les Pays-Bas, la Norvège et le Royaume-Uni se sont depuis longtemps dotés d'un cadre législatif ; dans le deuxième groupe, l'Autriche, le Luxembourg, le Portugal, l’Espagne et la Suède ont adopté une législation spécifique depuis la fin des années 1980 jusqu'aux années 2000. Comme la part de travail assuré par les agences de travail temporaire a augmenté, dans de nombreux cas, la loi a été modifiée en vue d'étendre la protection de l'emploi et de libéraliser les circonstances dans lesquelles on peut recourir à un tel cadre contractuel. On trouvera une présentation résumée de cette évolution à l'Annexe III.

68.       La réglementation légale couvre en général la définition d'un statut juridique du travailleur par agence temporaire ; les mécanismes d'octroi d'autorisation et de supervision nécessaires ; les limites éventuelles auxquelles sont soumises le secteur ou le travail, la durée maximum du contrat et le renouvellement ; ainsi que les mesures de protection de l'emploi pour les travailleurs à titre individuel.

69.       Les Pays-Bas ont été le premier pays d’Europe à introduire le principe d'une autorisation en 1965. Toutefois, la loi sur les intermédiaires du marché de l'emploi, entrée en vigueur en 1998, a aboli ce système d'autorisation établi de longue date ainsi qu’un certain nombre de limitations concernant le placement, la durée maximum, et la capacité de déploiement des employés. D'autres principes n'ont pas été supprimés, tels que l'interdiction d'utiliser des travailleurs d'agences de travail temporaire dans des entreprises utilisatrices en grève, la responsabilité duale de l’entreprise utilisatrice et des agences de travail temporaire pour les versements des contributions sociales et des impôts, et une clause sur l'égalité des salaires pour les travailleurs provenant d'agences de travail temporaire.

70.       Au Danemark, la compétition de plus en plus vive entre les ATT et l'Agence nationale de l'emploi a abouti à l'adoption d'une loi sur la supervision des agences privées de l'emploi (loi n° 249/1968), par la suite intégrée à la loi sur l’échange d’emplois et sur l'assurance chômage (n° 114/1970). Les dispositions prises au titre de cette dernière limitaient le travail temporaire au secteur commercial et administratif. Toutefois, en 1990, le système réglementaire obligatoire a été supprimé et remplacé par une réglementation par le biais de conventions collectives.

71.       En Irlande, la loi sur les agences que le travail de 1971 a introduit un système d'autorisation pour veiller à ce que les ATT aient une réputation bien établie. En 1993, la loi sur le licenciement abusif a étendu la protection contre le licenciement abusif aux travailleurs provenant d'agences de travail temporaire. Au titre de cette loi, ces derniers ont été réputés être des employés de l'entreprise utilisatrice.

72.       En Allemagne, la loi sur l'emploi temporaire de 1972 (Arbeitnehmerüberlassunggesetz) exige un accord écrit entre l'agence et l'entreprise utilisatrice ainsi qu'un accord écrit indiquant les principales conditions d’emploi pour l’employé. La loi restreignait la durée de la mission à trois mois, même si celle-ci a été par la suite progressivement étendue à 24 mois en 2001. Si la révision de la loi en 2002 a aboutit à la suppression des limitations de durées et autres, elle exige des ATT qu'elles garantissent à leur travailleurs le même salaire et les mêmes conditions d'emploi que les employés permanents de l'entreprise utilisatrice, sous réserve d'exceptions autorisées en cas de conventions collectives.

73.       En France, la première législation dans ce secteur a été adoptée en 1972, et, depuis, elle a été modifiée plusieurs fois concernant les raisons autorisées pour le recours aux ATT et la durée des missions. La loi de 2005 sur la cohésion sociale a élargi les activités du secteur des ATT qui peuvent désormais proposer des services de placement aux chômeurs, et proposer des emplois à durée déterminée ou non.

74.       Au Royaume-Uni, la loi sur les agences d’emploi de 1973 a introduit un système d'autorisation, auquel sont venus s’adjoindre des mécanismes permettant le dépôt de plaintes et des mécanismes de sanctions en 1976. En 2003, d'autres dispositions réglementaires ont été adoptées pour répondre à la croissance du secteur des ATT en simplifiant les conditions de manière à augmenter la flexibilité et à réduire les coûts pour les employeurs. Les limitations ont été augmentées en ce qui concerne les salaires, les ATT sont désormais responsables en termes de santé et de sécurité dans l'entreprise utilisatrice, et il est fait obligation aux agences d'informer en détail leurs personnels des termes et conditions de l'emploi proposé.

75.       En Belgique, le cadre réglementaire est assuré par la loi de 1987 sur l'emploi temporaire, l'emploi par agence d’emploi temporaire et le placement de personnel auprès de clients. Cette loi prévoit la protection du travailleur temporaire (considéré comme un travailleur normal qui bénéficie de toute la protection juridique au titre du droit du travail) ; la protection du travailleur permanent (en limitant la durée de la mission) ; et la protection de la société utilisatrice par le biais du système d'autorisation pour les ATT. En pratique, les partenaires sociaux ont un rôle éminent à jouer à la fois par le biais de négociations collectives et en participant à la Commission mixte pour le travail temporaire et au Conseil national de l'emploi.

76.       Au Portugal, le décret loi n° 358.89 couvre les conditions de travail, les salaires et autres droits des travailleurs temporaires, limite la durée des détachements et consacre la responsabilité sociale des ATT. Il a été modifié en 1999 pour inclure un nouveau système d'autorisation, davantage de possibilités pour des placements d'une durée plus longue, une meilleure protection des travailleurs en matière de santé de sécurité, et les ATT sont maintenant tenues de consacrer au moins 1 % du volume du chiffre d'affaires annuel à la formation professionnelle.

77.       En Suède, le secteur des ATT a été très largement traité par le biais de conventions collectives entre les partenaires sociaux et par une autorégulation. Les conventions collectives sont également importantes en Espagne, où le principe de la parité salariale s'applique conformément à l'accord sectoriel de l'entreprise utilisatrice (clients).

78.       En Italie, la loi autorisant le travail par agence de travail temporaire a été adoptée en 1997, elle prévoyait un système de licences et le principe de l'égalité salariale et des droits sociaux au même titre que les salariés permanents de la société utilisatrice. La Finlande et la Grèce ont adopté des législations dans ce domaine en 2001. La Grèce a instauré un comité spécial chargé de conseiller le Ministre du Travail sur l'octroi de licences d'activités à des ATT.

79.       La grande majorité des pays se sont dotés d'un système de licences ou d'enregistrement pour les ATT. La Norvège et la Suède n'en n’ont pas, la Finlande, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ayant, pour leur part, abrogé le leur dans le courant des années 1990. Au Royaume-Uni, le ministère du Commerce et de l'Industrie gère un système d'inspection et de réception des plaintes par le biais de l'inspection des agences de travail temporaire. Dans d'autres pays, la rigueur d'application du système d'autorisation est variable.

80.       En Finlande, aux Pays-Bas et au Portugal, l'un des problèmes majeurs est le rôle de certaines ATT dans la fourniture de main-d’œuvre dans des conditions irrégulières, souvent composée de migrants, ce qui a amené des voix à s'élever pour réclamer des mécanismes plus stricts de licences et des sanctions. Aux Pays-Bas, par exemple, le gouvernement a récemment proposé de réintroduire un système d'autorisation pour ces motifs, même si ces propositions ont été rejetées par la Chambre basse en 2005 à la suite d'objections de la part des employeurs.

81.       11 pays3 prévoient qu'il devrait y avoir égalité dans les conditions d'emploi entre les travailleurs détachés par des agences de travail temporaire et les travailleurs permanents comparables dans l'entreprise utilisatrice.

82.       La distinction entre les Etats membres de l’UE à 15 et les nouveaux Etats membres de l'UE est particulièrement flagrante pour ce qui est de l’autorégulation dans le secteur des agences de travail temporaire. Tous les Etats membres de l’UE à 15 plus la Norvège ont des organisations représentatives du patronat et, à des degrés divers, une organisation syndicale. La presque totalité s'engage dans des négociations collectives au niveau sectoriel, qui assument un important rôle réglementaire lorsque la loi est relativement forte (Belgique et France), servent d'organe de substitution lorsque le pays est doté de dispositions juridiques relativement faibles (Danemark, Pays-Bas), leur rôle se situant quelque part entre les deux pour les autres pays.

83.       Au contraire, aucun des nouveaux Etats membres de l’UE n'a recours à des négociations collectives sectorielles. Ceci explique pourquoi certains d'entre eux qui connaissent actuellement une croissance des ATT4 ont choisi un cadre réglementaire juridique plus ou moins consolidé. Sans partenaires sociaux à même d'appliquer effectivement une autorégulation, il incombe à la loi de garantir la réputation de cette forme d'emploi à la fois pour les entreprises utilisatrices et pour les travailleurs temporaires, et de réduire les objections politiques ou syndicales au secteur des agences de travail temporaire lui-même. Dans ces cas, les dispositions réglementaires contribuent à légitimer l'activité des agences de travail temporaire qui démarrent.

VII.        Comment progresser ?

84.       La mobilité accrue les travailleurs et services tant sur le marché intérieur européen qu’entre les pays de la CEI va inévitablement modifier le paysage de l’emploi dans une Europe élargie. Les problèmes, bien que de nature différente, existent à la fois pour le recrutement selon des conditions régulières et irrégulières, et devraient augmenter du fait de la croissance du secteur de recrutement temporaire national et transnational.

85.       La pauvreté, l'absence d'État de droit, le nivellement par le bas des normes du travail, la présence de groupes criminels et le phénomène de la corruption dans certains pays, en particulier en Europe de l'est et dans de nombreux pays de la CEI, sont autant de facteurs qui contribuent au gonflement du phénomène de recrutement irrégulier, du travail forcé et de la traite des êtres humains. Il est crucial d’instaurer une coopération plus structurée entre les Etats membres du Conseil de l’Europe. La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, les Conventions de l’OIT sur les travailleurs migrants et sur les agences d’emploi privées (143 et 181), les Protocoles de Palerme et la Convention du Conseil de l’Europe sur le statut juridique du travailleur migrant, la Charte sociale européenne révisée et la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains fournissent un bon cadre pour une telle coopération et pour une action conjointe.

86.       L’OIT, le Conseil de l'Europe et l’UE devraient unir leurs forces pour aider ces Etats membres à élaborer et à faire appliquer des stratégies de lutte contre le recrutement dans des conditions irrégulières et la traite des êtres humains. À titre préventif, il conviendrait de mener davantage de recherches concernant les tendances existantes de pratiques abusives et d'organiser des campagnes d'information de plus grande envergure pour les travailleurs migrants et leurs conditions de travail. Des programmes d'assistance sont également nécessaires pour aider à développer une réglementation stricte en matière de recrutement de la main-d’œuvre, pour recourir à des mécanismes de sanctions efficaces concrètement (sanctions dissuasives, amendes pouvant aller jusqu'à des poursuites pénales) et pour instaurer un contrôle plus strict par le biais des inspections de police et du travail.

87.       Euro-Ciett prône l'établissement d'organisations nationales du commerce, le développement d'un dialogue social sectoriel et l'adoption d'une réglementation sur les agences de travail temporaire après consultation avec les partenaires sociaux. L’OIT aide actuellement la Fédération de Russie et l'Ukraine, par le biais de plusieurs projets pilotes, à réglementer progressivement le secteur de recrutement.

88.       Le phénomène du recrutement temporaire transnational, dans des conditions normales ou non, prend également de l'ampleur en Europe centrale et orientale, alors que de la main-d’œuvre moins chère vient du sud-est de l'Europe et de régions extrêmes orientales. La réglementation du fonctionnement des agences de travail temporaire reste un phénomène relativement nouveau.

89.       Dans le contexte de l'UE, les problèmes sont de nature différente, et supposent pour l'essentiel de réglementer le gros des activités des ATT afin de sauvegarder les normes du travail et de créer des conditions d'équité de fonctionnement pour le marché intérieur.

90.       Le Royaume-Uni, l'Irlande et la Suède pratiquent aujourd'hui une politique de la porte ouverte en ce qui concerne l'emploi de travailleurs en provenance des nouveaux Etats membres de l'UE. D'autres pays membres de l'UE à 15 vont bientôt leur emboîter le pas, une fois les périodes transitoires arrivées à leur terme. C'est pourquoi il est nécessaire d'établir des règles claires et une harmonisation minimum au sein du marché intérieur. Il serait donc crucial de parvenir à un compromis satisfaisant sur la Directive Services.

91.       Plusieurs Etats membres de l'UE ont déjà adopté des réglementations garantissant que les travailleurs migrants temporaires reçoivent le même traitement, en termes de salaires, de conditions de travail et de droits sociaux, que la main-d’œuvre locale dans leurs pays respectifs. Il est donc important - en particulier au vu de l'augmentation actuelle et prévisible des activités des ATT - que, dans tous les Etats membres du Conseil de l'Europe, il existe des règles de base garantissant l'égalité de traitement et les droits fondamentaux des travailleurs temporaires et migrants.

92.       Ces règles de base devraient préserver le droit de se syndiquer ou de participer à des activités syndicales ; de participer aux négociations collectives dans le pays d'accueil ; le droit de recevoir un salaire minimum ; les droits en matière de temps de travail et autre conditions de travail ; le droit aux cotisations obligatoires de sécurité sociale ; l'accès à la formation ; la protection en matière de santé et de sécurité sur le lieu de travail ; les dédommagements en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle ; le droit à la faillite ; le droit de porter plainte au titre de la protection des travailleurs ; et la protection des femmes enceintes, ainsi que la protection parentale et le droit au congé parental.

93.       L'Article 19 de la Charte sociale européenne révisée prévoit déjà des principes directeurs pour certaines de ces normes de base. Toutefois, la mise en œuvre de l'Article 19 se base sur le principe de la réciprocité entre les parties signataires, et ne s'applique donc que dans la situation où les deux Etats membres concernés l’ont ratifié. Au niveau de l'UE, ces normes minimales sont prévues par la directive de l'UE sur le détachement de travailleurs.

94.       En outre, l'UE peut, le moment venu, rouvrir les négociations pour progresser dans l'harmonisation des conditions de travail pour les travailleurs détachés par des agences de travail temporaire et pour adopter le principe de la non-discrimination, notamment salariale, entre les travailleurs temporaires et des travailleurs comparables dans l'entreprise utilisatrice.

95.       Il est également nécessaire de légiférer pour veiller à ce que les cotisations salariales soient versées dans le pays hôte selon le système de collecte établi localement, et non dans le pays d'origine des travailleurs, ou dans le pays où est installée l’ATT dont ils relèvent.

96.       Tout en reconnaissant le principe de la confidentialité, les ATT devraient donner aux autorités des pays dans lesquels elles opèrent des engagements en vue du respect de la législation nationale, dans l'esprit de la future Directive Services et autres législations sociales.

VIII.       Conclusions

97.       Les agences de travail temporaire sont des moyens flexibles d'embaucher des travailleurs dans des marchés de l'emploi de plus en plus dynamiques partout en Europe, mais il est nécessaire de se doter d'un cadre réglementaire adapté pour le travail par agence afin d'éviter d’abaisser les normes du travail, de brader les normes sociales et de violer les droits des travailleurs migrants.

98.       Étant donné l'hétérogénéité de l'intégration économique et politique en Europe, le recrutement temporaire transnational devrait être réglementé à trois niveaux différents:-

- recrutement entre Etats membres de l'UE : conformément à la future Directive sur les services ;

- recrutement dans un Etat non européen vers un État de l’UE : en augmentant les compétences des services d'inspection ; et

- recrutement entre Etats membres du Conseil de l'Europe non membres de l'UE : en établissant un système de contrôle et en élaborant progressivement une réglementation du marché de l'emploi et des mécanismes effectifs pour la faire appliquer.

99.       Une volonté politique forte est nécessaire pour parvenir à ces cadres réglementaires ; actuellement, il convient de poursuivre le débat politique sur ce point. La réglementation de la migration irrégulière en Europe est avant toute une question économique et devrait donc passer par une étroite coopération avec les syndicats, les entreprises utilisatrices et les ATT.


ANNEXE I :

Exemples de recrutements présumés discriminatoires de main-d’œuvre temporaire dans le Marché intérieur européen

1.       À l'audition de la Commission sur la situation des travailleurs migrants dans les agences de travail temporaire (Bruxelles, 21 mars 2006), la Confédération européenne des syndicats (CES) a exposé l'exemple de cas supposés de traitements discriminatoires de travailleurs portugais employés par le biais d'agences de travail temporaire néerlandaises dans les secteurs du bâtiment et de l’agriculture. Dans le cas de l’agence de travail temporaire Columbus basée à Bladel (près de Eindhoven), il a été dit que des travailleurs portugais étaient maintenus à l’écart de la population néerlandaise, dans des logements spéciaux avec utilisation obligatoire de moyens de transport de la société de et vers le lieu de travail ; qu’ils recevaient des salaires inférieurs au salaire minimum néerlandais ; ils faisaient beaucoup d’heures de travail ; qu’il leur était difficile de se faire soigner ; et qu’ils étaient de manière générale soumis à des pressions psychologiques (chantage au licenciement arbitraire ; paiement de frais et honoraires exceptionnels non justifiés ; déménagements forcés etc.). 2

2.       Le rapport «Life on the Edge» (Sur le fil du rasoir) publié par la CES au Royaume-Uni donne des exemples de traitement présumé abusif de travailleurs migrants.

3.       Selon la CES, les contrats signés avec des travailleurs recrutés en Pologne par une agence de travail temporaire opérant sur le secteur de la sécurité indiquaient que ces employés devraient travailler au minimum 56 heures par semaines et que ces heures supplémentaires étaient considérées comme nécessaires pour répondre aux besoins du secteur. Aucune mention directe n’était faite au droit légal des travailleurs à travailler au maximum 48 heures par semaine au titre de la Règle 4 des Règles de 1998 sur le temps de travail. Au contraire, une clause manifestement ajoutée au contrat indiquait que la Règle 4 ne s’appliquait pas et que le signataire du contrat « reconnaît qu’il ou elle se verra demander de travailler plus de 48 heures par semaine ». L’employé devait donner un préavis de trois mois en cas de démission. Apparemment, le contrat prévoyait également que l’employé n’aurait droit à aucune rémunération supplémentaire en dehors du salaire horaire normal de 5,5 £ en cas d’heures supplémentaires au-delà des 56 heures hebdomadaires, même si ces heures étaient travaillées le week-end ou dans des créneaux malcommodes.

4.       La CES a cité un autre exemple : une agence qui fournissait essentiellement de la main d’œuvre migrante au secteur de l’hôtellerie et de la restauration, maintenait que les 4,5 £ de l’heure payées à une femme de chambre étaient une rémunération acceptable sur le plan de la législation nationale relative au salaire minimum5, puisqu’il s’agissait du taux applicable aux « personnes en formation ». Un taux horaire de développement d’au moins 4,10 £ peut s’appliquer pour des employés suivant une formation accréditée, autrement dit un cours qui aboutit à une qualification externe reconnue. Toutefois, dans ce cas, l’agence avait semble-t-il simplement « téléphoné à la direction de l’hôtel pour lui demander de lui faire une faveur en formant [Mme B] pour l’aider.

5.       Il a également été rapporté qu’une employée temporaire travaillant dans une entreprise agroalimentaire a constaté qu’elle travaillait régulièrement en travail posté par rotation de 12 heures, 5 fois par semaines, avec une pause d’une heure durant chaque tranche de 12 heures. Pour cela, elle recevait apparemment 150 £ par semaine. N’ayant pas reçu de fiches de paie, elle n’a pas été en mesure d’expliquer quelles déductions avaient été prélevées sur son salaire.

6.       Un groupe de travailleurs de République tchèque se serait engagé auprès d’une agence temporaire qui leur aurait proposé un taux horaire intéressant et promis de trouver une solution à leur problème de logement. A leur arrivée au Royaume-Uni, ils auraient toutefois reçu un document indiquant un taux horaire inférieur au salaire minimum national. Sans connaissance de l’anglais, ni logement, ni de moyens de rentrer chez eux, ils ont signé le contrat proposé. Les travailleurs qui se sont plaints se sont retrouvés sans travail, ont été expulsés de leur logement, et certains ont même été agressés physiquement.


ANNEXE II : Liste des ratifications par les Etats membres du Conseil de l’Europe

1.       Convention internationale sur la Protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990)

Participant 

Signature 

Ratification, Accession (a), Succession (d) 

Bosnie-Herzégovine 

.

13 déc. 1996 a 

Serbie

11 nov. 2004 

.

Turquie 

13 jan. 1999 

27 sept. 2004 

2.       Convention de l’OIT sur les travailleurs migrants (143)6

Ratifications par pays

Date

de Ratification

Statut

Albanie

12/09/2006

ratifié

Arménie

27/01/2006

ratifié

Bosnie-Herzégovine

02/06/1993

ratifié

Chypre

28/06/1977

ratifié

"Ex-République yougoslave de Macédoine"

17/11/1991

ratifié

Italie

23/06/1981

ratifié

Norvège

24/01/1979

ratifié

Portugal

12/12/1978

ratifié

Saint-Marin

23/05/1985

ratifié

Serbie

24/11/2000

ratifié

Slovénie

29/05/1992

ratifié

Suède

28/12/1982

ratifié

3.       Convention de l’OIT sur les agences d’emploi privées (181)7

Ratifications par pays

Date de la

Ratification

Statut

Albanie

30/06/1999

ratifié

Belgique

28/09/2004

ratifié

Bulgarie

24/03/2005

ratifié

Espagne

15/06/1999

ratifié

Finlande

25/05/1999

ratifié

Géorgie

27/08/2002

ratifié

Hongrie

19/09/2003

ratifié

Italie

01/02/2000

ratifié

Lituanie

19/03/2004

ratifié

Pays-Bas

15/09/1999

ratifié

Portugal

25/03/2002

ratifié

République de Moldova

19/12/2001

ratifié

République tchèque

09/10/2000

ratifié

4.       Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale (Convention de Palerme), 2000

Pays

Signature

Ratification, Acceptation (A), Approbation (AA), Accession (a)

Albanie

12 décembre 2000

21 août 2002

Allemagne

12 décembre 2000

14 juin 2006    

Andorre

11 novembre 2001

 

Arménie

15 novembre 2001

1er juillet 2003

Autriche

12 décembre 2000

23 septembre 2004

Azerbaïdjan

12 décembre 2000

30 octobre 2003

Belgique

12 décembre 2000

11 août 2004

Bosnie-Herzégovine

12 décembre 2000

24 avril 2002

Bulgarie

13 décembre 2000

5 décembre 2001

Chypre

12 décembre 2000

22 avril 2003

Communauté européenne

12 décembre 2000

21 mai 2004 AA

Croatie

12 décembre 2000

24 janvier 2003

Danemark 2

12 décembre 2000

30 septembre 2003

Espagne

13 décembre 2000

1er mars 2002

Estonie

14 décembre 2000

10 février 2003

"Ex-République yougoslave de Macédoine"

12 décembre 2000

12 janvier 2005

Fédération de Russie

12 décembre 2000

26 mai 2004

Finlande

12 décembre 2000

10 février 2004

France

12 décembre 2000

29 octobre 2002

Géorgie

13 décembre 2000

5 septembre 2006  

Grèce

13 décembre 2000

    

Hongrie

14 décembre 2000

    

Irlande

13 décembre 2000

   

Islande

13 décembre 2000

    

Italie

12 décembre 2000

2 août 2006   

Lettonie

13 décembre 2000

7 décembre 2001

Liechtenstein

12 décembre 2000

    

Lituanie

13 décembre 2000

9 mai 2002

Luxembourg

13 décembre 2000

    

Malte

14 décembre 2000

24 septembre 2003

Monaco

13 décembre 2000

5 juin 2001

Monténégro 3

   

23 octobre 2006 d

Norvège

13 décembre 2000

23 septembre 2003

Pays-Bas 4

12 décembre 2000

26 mai 2004

Pologne

12 décembre 2000

12 novembre 2001

Portugal

12 décembre 2000

10 mai 2004

République de Moldova

14 décembre 2000

16 septembre 2005    

République tchèque

12 décembre 2000

    

Roumanie

14 décembre 2000

4 décembre 2002

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

14 décembre 2000

9 février 2006    

Saint-Marin

14 décembre 2000

    

Serbie

12 décembre 2000

6 septembre 2001

Slovaquie

14 décembre 2000

3 décembre 2003

Slovénie

12 décembre 2000

21 mai 2004

Suède

12 décembre 2000

30 avril 2004

Suisse

12 décembre 2000

27 octobre 2006    

Turquie

13 décembre 2000

25 mars 2003

Ukraine

12 décembre 2000

21 mai 2004

Source : Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, http://www.justiceinitiative.org

Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (Protocole de Palerme), 2000

Pays

Signature

Ratification, Acceptation (A), Approbation (AA), Accession (a)

Albanie

12 décembre 2000

21 août 2002

Allemagne

12 décembre 2000

14 juin 2006  

Arménie

15 novembre 2001

1er juillet 2003

Autriche

12 décembre 2000

15 septembre 2005  

Azerbaïdjan

12 décembre 2000

30 octobre 2003

Belgique

12 décembre 2000

11 août 2004

Bosnie-Herzégovine

12 décembre 2000

24 Avril 2002

Bulgarie

13 décembre 2000

5 décembre 2001

Chypre

12 décembre 2000

6 août 2003

Communauté européenne

12 décembre 2000

6 septembre 2006 AA  

Croatie

12 décembre 2000

24 janvier 2003

Danemark 1

12 décembre 2000

30 septembre 2003

Espagne

13 décembre 2000

1er mars 2002

Estonie

20 septembre 2002

12 mai 2004

"Ex-République yougoslave de Macédoine"

12 décembre 2000

12 janvier 2005

Fédération de Russie

12 décembre 2000

26 mai 2004

Finlande

12 décembre 2000

7 septembre 2006 A  

France

12 décembre 2000

29 octobre 2002

Géorgie

13 décembre 2000

5 septembre 2006  

Grèce

13 décembre 2000

  

Hongrie

14 décembre 2000

  

Irlande

13 décembre 2000

  

Islande

13 décembre 2000

  

Italie

12 décembre 2000

2 août 2006  

Lettonie

10 décembre 2002

25 mai 2004

Liechtenstein

14 mars 2001

  

Lituanie

25 avril 2002

23 juin 2003

Luxembourg

13 décembre 2000

     

Malte

14 décembre 2000

24 septembre 2003

Monaco

13 décembre 2000

05 juin 2001

Monténégro 2

     

23 octobre 2006 d

Norvège

13 décembre 2000

23 septembre 2003

Pologne

4 octobre 2001

26 septembre 2003

Portugal

12 décembre 2000

10 mai 2004

République de Moldova

14 décembre 2000

16 septembre 2005  

République tchèque

10 décembre 2002

  

Roumanie

14 décembre 2000

4 décembre 2002

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

14 décembre 2000

9 février 2006      

Saint-Marin

14 décembre 2000

  

Serbie

12 décembre 2000

6 septembre 2001

Slovaquie

15 novembre 2001

21 septembre 2004

Slovénie

15 novembre 2001

21 mai 2004

Suède

12 décembre 2000

1er juillet 2004

Suisse

2 avril 2002

27 octobre 2006  

Turquie

13 décembre 2000

25 mars 2003

Ukraine

15 novembre 2001

21 mai 2004

Source : Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, http://www.justiceinitiative.org

Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer (Protocole de Palerme), 2000

Pays

Signature

Ratification, Acceptation (A), Approbation (AA), Accession (a)

Albanie

12 décembre 2000

21 août 2002

Allemagne

12 décembre 2000

14 juin 2006  

Arménie

15 novembre 2001

1er juillet 2003

Autriche

12 décembre 2000

  

Azerbaïdjan

12 décembre 2000

30 octobre 2003

Belgique

12 décembre 2000

11 août 2004

Bosnie-Herzégovine

12 décembre 2000

24 avril 2002

Bulgarie

13 décembre 2000

5 décembre 2001

Chypre

12 décembre 2000

6 août 2003

Communauté européenne

12 décembre 2000

6 septembre 2006 AA  

Croatie

12 décembre 2000

24 janvier 2003

Danemark

12 décembre 2000

  

Espagne

13 décembre 2000

1er mars 2002

Estonie

20 septembre 2002

12 mai 2002

"Ex-République yougoslave de Macédoine"

12 décembre 2000

12 janvier 2005

Fédération de Russie

12 décembre 2000

26 mai 2004

Finlande

12 décembre 2000

7 septembre 2006 A  

France

12 décembre 2000

29 octobre 2002

Géorgie

13 décembre 2000

5 septembre 2006  

Grèce

13 décembre 2000

  

Hongrie

14 décembre 2000

  

Irlande

13 décembre 2000

  

Islande

13 décembre 2000

  

Italie

12 décembre 2000

2 août 2006  

Lettonie

10 décembre 2002

23 avril 2003

Liechtenstein

14 mars 2001

  

Lituanie

25 avril 2002

12 mai 2003

Luxembourg

12 décembre 2000

  

Malte

14 décembre 2000

24 septembre 2003

Monaco

13 décembre 2000

5 juin 2001

Monténégro 1

    

23 octobre 2006 d

Norvège

13 décembre 2000

23 septembre 2003

Pays-Bas 2

12 décembre 2000

27 juillet 2005 A  

Pologne

4 octobre 2001

26 septembre 2003

Portugal

12 décembre 2000

10 mai 2004

République de Moldova

14 décembre 2000

 16 septembre 2005 

République tchèque

10 décembre 2002

  

Roumanie

14 décembre 2000

04 décembre 2002

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

14 décembre 2000

09 février 2006      

Saint-Marin

14 décembre 2000

  

Serbie

12 décembre 2000

6 septembre 2001

Slovaquie

15 novembre 2001

21 septembre 2004

Slovénie

15 novembre 2001

21 mai 2004

Suède

12 décembre 2000

6 septembre 2006  

Suisse

2 avril 2002

27 octobre 2006  

Turquie

13 décembre 2000

25 mars 2003

Ukraine

15 novembre 2001

21 mai 2004

Source : Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, http://www.justiceinitiative.org

5.       Convention du Conseil de l’Europe relative au statut juridique du travailleur migrant, 1977

Pays 

Signature

Ratification

Entrée en

vigueur

Notes

R.

D.

A.

T.

C.

O.

Albanie  

                   

Allemagne  

24/11/1977

       

X

       

Andorre  

                   

Arménie  

                   

Autriche  

                   

Azerbaïdjan  

                   

Belgique  

09/02/1978

                 

Bosnie-Herzégovine  

                   

Bulgarie  

                   

Chypre  

                   

Croatie  

                   

Danemark  

                   

Espagne  

24/11/1977

06/05/1980

01/05/1983

             

Estonie  

                   

"Ex-République yougoslave de macédoine"

                   

Finlande  

                   

France  

29/04/1982

22/09/1983

01/12/1983

 

X

X

       

Géorgie  

                   

Grèce  

24/11/1977

                 

Hongrie

                   

Irlande  

                   

Islande  

                   

Italie  

11/01/1983

27/02/1995

01/05/1995

             

Lettonie  

                   

Liechtenstein  

                   

Lituanie  

                   

Luxembourg  

24/11/1977

                 

Malte  

                   

Moldova  

11/07/2002

20/06/2006

01/10/2006

 

X

X

       

Monaco  

                   

Norvège  

03/02/1989

03/02/1989

01/05/1989

 

X

X

       

Pays-Bas  

24/11/1977

01/02/1983

01/05/1983

 

X

X

 

X

   

Pologne  

                   

Portugal  

24/11/197

15/03/1979

01/05/1983

             

République tchèque  

                   

Roumanie  

                   

Royaume-Uni

                   

Russie  

                   

Saint-Marin  

                   

Serbie  

                   

Slovaquie  

                   

Slovénie  

                   

Suède  

24/11/1977

05/06/1978

01/05/1983

             

Suisse  

                   

Turquie  

24/11/1977

19/05/1981

01/05/1983

             

Ukraine  

02/03/2004

                 

6.       Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, 2005

Pays 

Signature

Ratification

Entrée en vigueur

Notes

R.

D.

A.

T.

C.

O.

Albanie  

22/12/2005

                 

Allemagne

17/11/2005

                 

Andorre  

17/11/2005

                 

Arménie  

16/05/2005

                 

Autriche  

16/05/2005

12/10/2006

               

Azerbaïdjan  

                   

Belgique  

17/11/2005

                 

Bosnie-Herzégovine  

19/01/2006

                 

Bulgarie  

22/11/2006

                 

Chypre  

16/05/2005

                 

Croatie  

16/05/2005

                 

Danemark  

05/09/2006

                 

Espagne

                   

Estonie  

                   

Ex-République yougoslave de Macédoine

17/11/2005

                 

Finlande  

29/08/2006

                 

France  

22/05/2006

                 

Géorgie  

19/10/2005

                 

Grèce  

17/11/2005

                 

Hongrie

                   

Irlande  

                   

Islande 

16/05/2005

                 

Italie 

08/06/2005

                 

Lettonie  

19/05/2006

                 

Liechtenstein  

                   

Lituanie  

                   

Luxembourg  

16/05/2005

                 

Malte  

16/05/2005

                 

Moldova  

16/05/2005

19/05/2006

     

X

       

Monaco  

                   

Monténégro  

16/05/2005

   

55

           

Norvège  

16/05/2005

                 

Pays-Bas

17/11/2005

                 

Pologne 

16/05/2005

                 

Portugal  

16/05/2005

                 

République tchèque

                   

Roumanie  

16/05/2005

21/08/2006

               

Royaume-Uni

                   

Russie  

                   

Saint-Marin  

19/05/2006

                 

Serbie  

16/05/2005

   

55

           

Slovaquie  

19/05/2006

                 

Slovénie  

03/04/2006

                 

Suède  

16/5/2005

                 

Suisse

                   

Turquie 

                   

Ukraine  

17/11/2005

                 

ANNEXE III : Réglementation des ATT dans les 15 États membres de l’UE et en Norvège

Pays

Loi d’origine

Amendements

Révisions

NL

1965

 

1998, 1999 : libéralisation

DK

1968

 

1990 : suppression de toutes les réglementations (remplacées par des accords collectifs)

IE

1971

   

DE

1972

Augmentations successives de la durée des contrats de travail temporaire

2002 : révision complète

FR

1972

modifications successives des conditions d’admission et de la durée des contrats

2005 : élargissement du rôle des agences de travail temporaire

 

UK

1973

1976 : applications des mesures d’inspection

1994 : suppression des conditions d’autorisation d’exercer

2003 : simplification et ajout de dispositions sur les droits des travailleurs

 

BE

1976

1987 : adoption de la loi fondée sur la loi temporaire de 1976

2000 : rôle des agences de travail temporaire dans le placement de chômeurs de longue durée

 

NO

1977

 

2000 : autorisation de cumuler les missions en agence de travail temporaire et tout autre travail temporaire

2005 : élargissement de la portée du travail temporaire/en intérim

AT

1988

2002 : santé et sécurité

2005 : élargissement du travail temporaire à la profession d’infirmier/infirmière

 

PT

1989

1996 : amendements secondaires non spécifiés

1999 : augmentation de la durée des contrats, de la formation, de la protection/sécurité sociale

SE

1993

   

ES

1994

 

1999 : Limitations et parité des salaires

LU

1994

   

IT

1997

2003 : élargissement de la portée

 

FI

2001

   

EL

2001

2003 : contribution du dialogue social

 

Source : « Temporary agency work in an Enlarged European Union », rapport de la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, Dublin, 2006.

* * *

Commission chargée du rapport : Commission des migrations, des réfugiés et de la population

Renvoi en commission: Renvoi n° 2989, 07.09.2004.

Projet de résolution et projet de recommandation adoptés à l’unanimité par la commission le 11 décembre 2006,.

Membres de la Commission: M. Mevlüt Çavuşoğlu (Président), M. Jean-Guy Branger (1er Vice-Président), ZZ …………… (2e Vice-Président), M. Doug Henderson (3e Vice-Président), M. Pedro Agramunt, M. Küllo Arjakas, M. Hüseyin-Kenan Aydin, M. Ryszard Bender, M. Akhmed Bilalov, M. Italo Bocchino, Mme Olena Bondarenko, Mme Mimount Bousakla, M. Márton Braun, Lord Burlison (remplaçant: M. Bill Etherington), M. Sergej Chelemendik, M. Christopher Chope, M. Boriss Cilevičs, Mme Minodora Cliveti, M. Ivica Dačić, M. Joseph Debono Grech, M. Taulant Dedja, M. Nikolaos Dendias, M. Abilio Dias Fernandes, M. Karl Donabauer, M. Mats Einarsson, Mme Lydie Err, M. Valeriy Fedorov, M. Oleksandr Feldman, Mme Daniela Filipiová, Mme Margrét Frimannsdóttir, Mme Gunn Karin Gjul (remplaçant: M. Øyvind Vaksdal), Mme Angelika Graf, M. John Greenway, M. Andrzej Grzyb, M. Ali Riza Gülçiçek, M. Michael Hagberg, M. Holger Haibach, Ms Gultakin Hajiyeva, M. Jürgen Herrmann, M. Ilie Ilaşcu, M. Tadeusz Iwiński, M. Mustafa Jemilev (remplaçante: Mme Oksana Bilozir), Mme Corien W.A. Jonker, Mme Eleonora Katseli, M. Dimitrij Kovačič, M. Andros Kyprianou, M. Petr Lachnit, M. Geert Lambert, M. Jean-Marie Le Guen, M. Massimo Livi Bacci (remplaçant: M. Lucio Malan), M. Younal Loutfi, M. Jean-Pierre Masseret, M. Giorgio Mele (remplaçant: M. Pasquale Nessa), Mme Ana Catarina Mendonça, M. Morten Messerschmidt, M. Paschal Mooney, M. Gebhard Negele, Mme Annette Nijs (remplaçant: M. Leo Platvoet), M. Kalevi Olin, M. İbrahim Özal, Mme Maria Josefa Porteiro Garcia, M. Cezar Florin Preda, M. Dušan Proroković, M. Gabino Puche (remplaçant:M. Adolfo Fernández Aguilar), M. Milorad Pupovac, M. Martin Raguž, M. Marc Reymann, M. Alessandro Rossi, M. Samad Seyidov (remplaçant: M. Aydin Mirzazada), M. Luzi Stamm (remplaçante: Mme Rosmarie Zapfl-Helbling), M. Sergiu Stati, Mme Terezija Stoisits, M. Giacomo Stucchi, M. Vilmos Szabó, Mme Elene Tevdoradze, M. Tigran Torosyan, Mme Ruth-Gaby Vermot-Mangold, Mme Iliana Yotova, M. Akhmar Zavgayev, M. Andrej Zernovski, M. Vladimir Zhirinovsky, M. Emanuelis Zingeris.

N.B. Les noms des membres ayant pris part à la réunion sont imprimés en caractères gras.

Secrétaires de la Commission: M. Halvor Lervik, M. Mark Neville, Mme Dana Karanjac


1 Note établie par le Ministère de l’Entreprise, du Commerce et de l’Emploi à la demande de l’Oireachtas Interparliamentary Office, au nom du sénateur Pascal Mooney, en vue d’obtenir des informations sur la situation des travailleurs temporaires migrants en Irlande (27 septembre 2006).

2 Article 2.1 Définition : par « travailleur détaché » on entend un travailleur qui, pour une période limitée, exerce son travail sur le territoire d’un Etat membre autre que l’Etat dans lequel il travaille habituellement.

3 Autriche, Belgique, Finlande, France, Allemagne, Grèce, Italie, Luxemburg, Pays-Bas, Portugal et Espagne (source : “Temporary agency work in an enlarged European Union”, European Foundation for the Improvement of Living and Working Conditions, 2006)

4 République tchèque, Pologne, Roumanie, Slovaquie et Slovénie

5 Le taux horaire minimum national pour des adultes de 22 ans et plus est passé de 4,85 £ à 5,05 £ en octobre 2005.

6 Convention sur les migrations dans des conditions abusives et sur la promotion de l’égalité des chances et de traitement des travailleurs migrants, 1978 (C143)

7 Convention sur les agences d’emploi privées, 2000 (C181)