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Réponse à Recommandation | Doc. 11489 | 19 janvier 2008
La place de la langue maternelle dans l’enseignement scolaire
1. Le Comité des Ministres
a pris note avec attention de la Recommandation 1740 (2006) de l’Assemblée parlementaire relative à la place de
la langue maternelle dans l’enseignement scolaire. Il partage la préoccupation
de l’Assemblée pour la préservation des langues maternelles des
personnes appartenant aux différents groupes composant les sociétés
européennes, car la diversité linguistique est un des traits de
la vie culturelle de l’Europe et sa valeur inestimable est incontestée.
2. Dans ce domaine, le Comité des Ministres s’appuie pour une
large part sur les travaux du Comité directeur de l’éducation (CDED)
dont les activités contribuent au maintien et à la valorisation
de la diversité linguistique et culturelle en coopérant avec les
Etats membres au développement de politiques pour la promotion d’une
éducation bilingue et plurilingue.
3. Le CDED a mené des projets sur les politiques d’enseignement
bilingue qui ont abouti à l’élaboration d’expertises destinées à
guider les décideurs dans l’établissement de politiques linguistiques
et de législations en la matière. Ces projets ont permis la promotion
d’échanges et de rencontres entre les décideurs et les professionnels
impliqués dans l’enseignement bilingue, ainsi que le recommande
l’Assemblée au paragraphe 12.2 de sa recommandation.
4. En ce qui concerne la proposition formulée par l’Assemblée
«de répertorier les différents modèles et formes d’enseignement
bilingue en Europe» (paragraphe 12.1 de la recommandation), le Comité
des Ministres se réfère à l’analyse préparée par le CDED sur les
enjeux liés à l’enseignement bilingue, qui présente une classification
des principaux modèles de cette forme d’enseignement et apporte
ainsi une contribution à l’objectif défini par l’Assemblée.
5. S’agissant de la mesure préconisée par l’Assemblée au paragraphe 12.3.2
de sa recommandation visant à «favoriser le développement de répertoires
enfantins plurilingues», le Comité des Ministres informe l’Assemblée
que, à la suite des mesures spécifiques préconisées dans sa Recommandation
no R (98) 6 concernant les langues vivantes,
le CDED a conçu des outils pratiques à cette fin, dont le «Cadre
européen commun de référence pour les langues» et le «Portfolio
européen des langues».
6. En complément à l’étude des facteurs culturels et pédagogiques
déterminant la place des langues maternelles dans l’enseignement
scolaire, le Comité des Ministres a adopté un ensemble d’instruments juridiques
pertinents en la matière, parmi lesquels la Charte européenne des
langues régionales ou minoritaires à laquelle l’Assemblée fait référence
à juste titre. La charte, par son système de menu, permet aux Parties
d’adapter leur instrument de ratification à la façon dont elles
accordent une place aux langues régionales ou minoritaires dans
l’enseignement scolaire.
7. Le Comité des Ministres considère cette charte et le mécanisme
de suivi qui l’accompagne comme un instrument important pour la
promotion de la place de la langue maternelle dans l’éducation scolaire. L’évaluation
de sa mise en œuvre par les Etats parties donne lieu régulièrement
à la formulation de recommandations par le Comité des Ministres.
Un volet important de ces dernières porte sur les mesures afférentes
à l’enseignement pratiqué dans les langues régionales ou minoritaires
ou à l’enseignement de ces langues, qui sont la langue maternelle
de la plupart de leurs utilisateurs, ainsi que sur les mesures de promotion
du bilinguisme qui rejoignent pour une large part les considérations
formulées par l’Assemblée.
8. La Convention-cadre pour la protection des minorités nationales
couvre elle aussi certaines des questions traitées par l’Assemblée
dans sa recommandation. Elle engage en effet les Etats parties à promouvoir
les conditions nécessaires au maintien et au développement de la
culture des personnes appartenant aux minorités nationales et la
préservation des éléments essentiels de l’identité de ces personnes, parmi
lesquels figurent leur religion, leur langue, leurs traditions et
leur héritage historique.
9. Le Comité des Ministres tient également à appeler l’attention
de l’Assemblée sur le «Commentaire sur l’éducation au regard de
la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales»,
adopté par le comité consultatif de la convention-cadre en mars
2006, qui présente une synthèse de l’expérience de ce comité durant
le premier cycle de suivi, tout en soulignant certaines des questions
les plus fondamentales qu’il ait eu à traiter au cours de ses travaux.
Ce document précise qu’au vu des multiples buts de l’éducation et
de la multitude des situations existantes, il n’existe pas, dans
ce domaine, de solutions valables pour tous les cas de figure. Il
souligne également, ainsi que le relève l’Assemblée, qu’une concertation
permanente avec les personnes et les groupes concernés est essentielle
pour la mise au point de programmes d’enseignement linguistique
performants.
10. A l’article 14 de la convention-cadre est inscrit l’engagement
des Parties à reconnaître le droit de toute personne appartenant
à une minorité nationale à apprendre sa langue minoritaire ainsi
qu’à s’efforcer d’assurer à ces personnes, là où certaines conditions
sont réunies, dans la mesure du possible et dans le cadre de leur
système éducatif, la possibilité d’apprendre la langue minoritaire
et de recevoir un enseignement dans cette langue. Il s’agit là de
la reconnaissance d’un des principaux moyens, pour ces personnes,
d’affirmer et de préserver leur identité. A ce propos, le Comité
des Ministres tient à appeler l’attention de l’Assemblée sur le
rapport du «Séminaire sur les garanties juridiques internationales
relatives à la protection des minorités nationales et les problèmes
de mise en œuvre. Aspect thématique – les minorités et l’éducation»,
tenu à Strasbourg le 18 octobre 2006 .
11. Cela étant, le Comité des Ministres note que la recommandation
de l’Assemblée traite de sujets qui vont au-delà de la protection
des langues minoritaires proprement dites et couvre l’enseignement
de − et dans − la langue maternelle en général. L’interprétation
du champ d’application de la convention-cadre et de la Charte européenne
des langues régionales ou minoritaires par les Etats parties exclut
un certain nombre de groupes et/ou de langues auxquels la recommandation
fait référence. Le Comité des Ministres tient toutefois à appeler l’attention
de l’Assemblée sur le fait que l’usage du terme «langue maternelle»
pourrait être problématique dans certains contextes, tels que dans
des familles bilingues et parmi des minorités qui utilisent une
troisième langue, qui n’est ni la langue officielle, ni la langue
traditionnellement utilisée par ladite minorité.
12. S’agissant du paragraphe 5 de la recommandation de l’Assemblée,
le Comité des Ministres considère le principe selon lequel il est
du devoir de tout jeune Européen d’apprendre une langue officielle
de l’Etat dont il est citoyen résident, comme un facteur important
de cohésion sociale et d’intégration. Par conséquent, l’objectif
premier d’une politique linguistique concernant les enfants de migrants
doit être d’assurer, aussi rapidement et efficacement que possible,
leur intégration dans le système et la vie scolaire du pays d’accueil, afin
de favoriser ultérieurement leur intégration dans la société et
dans la vie active. Le CDED a également initié un projet visant
à aider les jeunes apprenants à mieux maîtriser la/les langue(s)
de l’enseignement scolaire, condition indispensable à la réussite
de leurs études, à l’intégration et à la cohésion sociale. La politique
linguistique devrait également, dans la mesure du possible, favoriser
les liens de l’enfant de migrants avec son pays d’origine ou celui
de ses parents. C’est l’idée maîtresse de la Recommandation no R (84) 7
du Comité des Ministres sur le maintien des liens culturels des
migrants avec les pays d’origine et les facilités de loisirs. Cette
approche est reprise par l’article 19.12 de la Charte sociale européenne
révisée qui stipule: «[Les Parties s’engagent] à favoriser et à
faciliter, dans la mesure du possible, l’enseignement de la langue maternelle
du travailleur migrant à ses enfants.»
13. Cette approche a été prise en compte dans les travaux menés
par le Comité européen sur les migrations (CDMG) pour l’élaboration
du projet de recommandation relatif à l’intégration des enfants
de migrants. Ce texte, qui a été parachevé et sera prochainement
examiné par le Comité des Ministres, préconise la mise en place
par les Etats membres de mesures visant à aider les enfants à acquérir
la maîtrise nécessaire de la langue d’enseignement tout en promouvant,
autant que faire se peut, l’acquisition et le maintien de leur langue maternelle.
14. Le Comité des Ministres tient à rappeler les priorités établies,
en mai 2005, par le 3e Sommet des chefs d’Etat
et de gouvernement, en matière de cohésion sociale, d’éducation
et de culture, ainsi que les orientations de la Stratégie de Faro,
et encourage par conséquent les Etats membres qui ne l’ont pas encore
fait à envisager la signature ou la ratification des instruments
pertinents adoptés par le Conseil de l’Europe et par l’UNESCO.