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Rapport | Doc. 11687 | 11 juillet 2008

L’OCDE et l’économie mondiale

(Ancienne) Commission des questions économiques et du développement

Rapporteure : Mme Anna LILLIEHÖÖK, Suède

A. Projet de résolution

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1. L’Assemblée parlementaire élargie, composée de délégations des Etats membres de l’OCDE et du Conseil de l’Europe ainsi que du Parlement européen, a passé en revue et débattu les activités en cours et le programme de travail de l’OCDE, notamment pour ce qui concerne la situation économique mondiale, à la lumière du rapport annuel de l’OCDE de 2008, du rapport de la commission des questions économiques et du développement de l’Assemblée, ainsi que des contributions d’autres commissions de l’Assemblée dans les domaines de l’environnement et de l’agriculture, de l’éducation et de la science, des migrations, des questions sociales et de la santé.
2. Au vu des difficultés qui ont grevé la plupart des économies avancées en 2007 et 2008, la performance globale a été à ce jour meilleure que prévue, selon l’OCDE, qui invoque, entre autres raisons, le fait que les demandes en faveur de réformes structurelles prônées par l’OCDE ont porté leurs fruits et, si elles sont poursuivies, devraient continuer d’aider à préserver la stabilité. En outre, les interventions des banques centrales ont aidé à maintenir la liquidité. Malgré cela, mi-2008, la situation économique mondiale se caractérisait toujours par des turbulences sur les marchés financiers, le refroidissement des marchés immobiliers et la flambée des cours des matières premières. C’est pourquoi, selon les Perspectives économiques de l’OCDE publiées en juin 2008, la plupart des économies de l’OCDE peuvent s’attendre à plusieurs trimestres de croissance faible, tandis que l’inflation globale (qui comprend les prix des produits alimentaires et de l’énergie) devrait rester élevée pour quelque temps encore. Toutefois, l’OCDE est consciente de la nature risquée des prévisions dans un climat économique particulièrement instable. C’est pourquoi elle conseille aux décideurs politiques de prendre en compte les possibles répercussions d’évolutions dans les pays non membres de l’OCDE et sur les marchés financiers, la hausse des cours de l’énergie et du coût du crédit ainsi que d’autres pressions inflationnistes.
3. La crise financière qui continue de secouer l’économie mondiale depuis la publication de l’évaluation de l’OCDE de milieu d’année montre à quel point les perspectives d’évolution restent incertaines. Parmi les institutions financières les plus puissantes au monde, certaines se sont effondrées ou demeurent vulnérables non seulement aux effets de la crise des prêts hypothécaires dits subprimes, mais aussi aux chocs liés à la vaste et complexe gamme d’instruments financiers conçus et mis sur le marché ces dernières années par ces institutions. La confiance dans la capacité des gouvernements à défendre les grands intérêts économiques et financiers des citoyens par une réglementation appropriée a été ébranlée. En outre, bien que les mesures prises par les gouvernements et par les banques centrales pour empêcher un effondrement systémique semblent pour l’heure avoir trouvé un juste équilibre, des doutes ont été émis quant à leur engagement croissant pour secourir des institutions financières privées aux dépens des contribuables. Par conséquent, il est urgent encore aujourd’hui de renforcer les réglementations des marchés financiers. L’Assemblée élargie exhorte l’OCDE et d’autres institutions tels le FMI et la Commission européenne à intensifier rapidement leurs efforts en la matière afin d’éviter de futurs remous sur les marchés financiers.
4. Dans ce contexte, l’Assemblée élargie se réjouit du projet de l’OCDE en matière d’éducation à la finance ainsi que des lignes directrices et bonnes pratiques élaborées en liaison avec ce projet, qui visent à élever le niveau de compréhension de la finance chez les consommateurs, confrontés à des marchés et produits financiers de plus en plus complexes.
5. L’OCDE n’est pas favorable à l’introduction de mesures destinées à compenser les hausses des prix des produits alimentaires et de l’énergie, faisant valoir que l’offre et la demande sur ces marchés peuvent être mieux équilibrées par le biais de bons signaux sur les prix. Selon l’OCDE, l’impact sur les groupes de population à faible revenu serait mieux atténué par le biais d’un système bien conçu de taxation et de transferts sociaux. L’Assemblée élargie invite instamment les gouvernements des Etats membres à éviter les mesures qui aboutiraient à des distorsions sur les marchés. Dans l’esprit du rapport Perspectives économiques de l’OCDE et à la lumière de l’état de l’économie mondiale, il est essentiel d’adopter des mesures qui permettent de stimuler l’offre de denrées alimentaires à moyen terme et qui envisagent la consolidation de l’infrastructure de base (transports, énergie et irrigation) et les investissements technologiques dans le secteur agricole.
6. Quoi qu’il en soit, l’Assemblée élargie est consciente que l’instabilité économique et financière peut à son tour menacer la stabilité politique, surtout dans les pays les plus pauvres de notre planète, où des pénuries alimentaires ont déclenché des manifestations, et même des émeutes. Il est même possible qu’elle aggrave les pressions migratoires incontrôlées. Pour des raisons économiques et démographiques, la migration internationale va se poursuivre. C’est pourquoi l’Assemblée élargie incite les pays de l’OCDE à augmenter leur assistance en faveur des pays les plus durement touchés dans l’immédiat; à adopter une approche directive autant que novatrice pour définir, administrer et orienter le phénomène migratoire afin qu’il réponde aux intérêts des pays d’origine et d’accueil des migrants; à éviter une rupture des apports d’aide aux populations touchées par les conflits ou les catastrophes dans les zones recevant habituellement une aide humanitaire; à intensifier leur assistance technique coordonnée en vue d’améliorer la productivité agricole dans ces pays de toute urgence, à créer un environnement plus favorable aux investissements agricoles; et à faire en sorte de tenir leurs engagements au titre de l’aide publique au développement.
7. En particulier, l’Assemblée élargie estime que les migrations ont joué, et continueront de jouer, un rôle important pour les économies des pays de l’OCDE, ainsi que pour le développement économique des pays d’origine des migrants. L’une des conditions préalables est cependant que les migrants soient bien intégrés dans leur société d’accueil et dans le monde du travail. Pour cela, les migrants et leur famille doivent apprendre la langue du pays d’accueil ainsi que son histoire, et apprendre aussi à promouvoir activement et à respecter les valeurs démocratiques fondamentales et les lois du pays d’accueil, notamment en matière de droits de l’homme.
8. L’Assemblée élargie souligne une fois encore qu’il est important d’éliminer les obstacles au commerce international des denrées agricoles et des produits industriels ainsi que dans les services, notamment en vue d’améliorer l’accès des produits des pays en développement aux marchés des économies développées. Par conséquent, si elle déplore l’échec des négociations ministérielles de l’Organisation mondiale du commerce en juillet 2008, elle estime qu’il convient de préserver les progrès réalisés jusqu’ici dans le cycle de Doha et de redoubler d’efforts pour relancer les négociations en vue d’aboutir à des résultats positifs profitables à l’ensemble des parties. L’Assemblée élargie note que, selon le consensus de Copenhague de 2008, sur lequel se sont entendus quelques-uns des principaux économistes mondiaux, la conclusion du cycle de Doha pourrait, ce sont là des chiffres réalistes, augmenter les revenus de 3000 milliards de dollars par an, dont plus de 80% iraient au monde en développement, ce qui constituerait donc un retour particulièrement élevé par rapport aux coûts engagés. L’Assemblée élargie se félicite également des efforts conjoints de l’OCDE et de l’OMC pour promouvoir l’aide en faveur du commerce (aid for trade) – où les projets des donateurs sont conçus pour accroître la capacité des pays en développement à tirer le meilleur profit des opportunités commerciales.
9. L’Assemblée élargie note l’impact de plus en plus fort des fonds souverains, ces véhicules d’investissement qui permettent aux Etats d’investir leurs réserves en devises. Elle se réjouit de la Déclaration de l’OCDE sur les fonds souverains et les politiques des pays d’investissement, ainsi que des travaux du Fonds monétaire international concernant les meilleures pratiques volontaires pour les fonds souverains et de ceux menés par l’Union européenne; en effet, ce sont là des travaux importants vers une manière, parmi d’autres, de résoudre des tensions nées de la nécessité pour les gouvernements des pays d’investissement de préserver un climat général des investissements ouvert et transparent tout en tenant compte de préoccupations légitimes liées à la sécurité nationale.
10. Malgré un ralentissement des perspectives de la croissance mondiale, les prix de l’énergie ont continué de grimper, reflétant la faiblesse du dollar américain qui est la devise de facturation pour le pétrole et le gaz, l’incertitude géopolitique, les préoccupations liées à la sécurité, la demande en hausse de la part des économies émergentes, le sous-investissement chronique dans la production et la distribution ainsi que les projections de la demande sur le long terme. Selon l’Agence internationale de l’énergie, si les gouvernements s’en tiennent à leurs politiques actuelles, les besoins mondiaux en énergie augmenteront de plus de 50% d’ici à 2030. Pour réduire la demande, l’élément clé est une plus grande efficience énergétique, la diversification des sources d’énergie étant également essentielle. L’Assemblée élargie demande aux gouvernements d’accélérer le développement de technologies énergétiques novatrices pour parvenir à l’efficacité énergétique et relever les défis mondiaux en la matière, tels l’énergie propre, le changement climatique et le développement durable. En outre, l’Assemblée élargie invite les gouvernements à prendre en compte systématiquement l’impact environnemental de toutes les mesures liées à l’énergie. Elle insiste également pour que l’OCDE accélère sa recherche, en particulier sur l’impact économique et écologique des biocarburants et qu’elle examine soigneusement tous les effets secondaires de leur développement. L’Assemblée élargie incite les Etats membres à consolider les institutions et mécanismes de dialogue nationaux et régionaux en matière d’énergie, afin de renforcer la coopération internationale dans le secteur énergétique, pour parvenir à un développement durable.
11. L’Assemblée élargie se félicite des travaux de l’OCDE relatifs à l’éducation et encourage cette organisation à poursuivre ses études sur l’efficacité de l’enseignement et des processus d’apprentissage, en vue de formuler des propositions tendant à renverser la tendance actuelle à un accroissement des dépenses qui n’améliore en rien les résultats de l’enseignement. Il est indispensable d’accroître l’efficacité des processus d’apprentissage pour remédier à l’insuffisance des compétences des adultes et assurer la durabilité d’un apprentissage approprié durant toute la vie, de même que la pérennité des systèmes d’éducation. Dans le cadre des études de l’OCDE sur l’éducation, une attention particulière devrait être consacrée à l’e-éducation et à la familiarisation avec l’internet afin de réduire le fossé numérique – qui ne cesse de croître – et, par là même, le fossé intergénérationnel. L’Assemblée élargie encourage les autorités de l’éducation des Etats membres du Conseil de l’Europe à étudier d’urgence les moyens dont elles disposent pour réduire l’inefficacité de leurs systèmes nationaux d’enseignement primaire et secondaire, et pour accroître les investissements dans l’enseignement supérieur, selon ce que préconise l’OCDE dans son rapport 2008 Réformes économiques: objectif croissance.
12. Les problématiques liées au changement climatique exigent la coopération la plus large possible entre les Etats, qui doivent participer à l’élaboration d’une réponse internationale efficace et appropriée, conformément à leurs responsabilités, à leurs capacités et en fonction des conditions sociales et économiques prévalant chez chacun. Notre planète devra faire face à un coût économique, social et écologique gigantesque si nous ne progressons pas dans l’élaboration de politiques qui nous permettront de nous adapter aux effets du changement climatique, et d’en pallier les conséquences; à cet égard, les pays de l’OCDE ont une responsabilité historique à assumer. L’Assemblée élargie se réjouit des récents travaux de l’OCDE sur les aspects économiques du changement climatique et encourage vivement l’OCDE à s’intéresser aussi aux études scientifiques en rapport avec les nouveaux défis planétaires: la sécurité alimentaire mondiale, les applications technologiques à grande échelle du génie génétique et par-dessus tout les effets dramatiques potentiels du changement climatique mondial sur l’accès aux besoins vitaux que sont la nourriture, l’énergie, et en particulier l’eau. Aujourd’hui, le défi urgent est de veiller à ne pas casser la croissance économique, afin de soutenir des progrès économiques et sociaux équitables, tout en réduisant au minimum les nuisances pour l’environnement. L’OCDE souligne que les instruments du marché comme les taxes sur le carbone, les échanges de droits d’émission de carbone et la suppression des subventions à la consommation d’énergie sont déterminants pour lutter contre le changement climatique, parallèlement à d’autres instruments comme l’investissement dans les technologies propres. Selon les Perspectives de l’environnement de l’OCDE à l’horizon 2030, publiées en mars 2008, les émissions mondiales de gaz à effet de serre peuvent être stabilisées à 450 parties par million pour un coût de 0,5% du PIB mondial en 2030 et de 2,5% du PIB en 2050. Si les nouvelles estimations des coûts par l’OCDE, qui doivent être publiées vers la fin de cette année, devaient vraisemblablement être plus élevées, les estimations pour le coût lié à l’inaction sont également revues actuellement à la hausse, et c’est pourquoi il reste économiquement rationnel d’agir au plus tôt. Le PIB mondial devrait doubler d’ici à 2030 et tripler d’ici à 2050. Pour cela, il faudra donner la priorité aux technologies efficaces qui existent déjà; introduire immédiatement des politiques d’efficience énergétique basées sur des technologies innovantes, et une tarification des émissions mondiales qui débuteraient à un peu plus de 2 dollars par tonne d’émission pour atteindre 150 dollars par tonne en 2050. L’Assemblée élargie invite vivement les gouvernements à étudier sérieusement les recommandations de l’OCDE à cet égard.
13. L’Assemblée élargie salue les travaux de longue haleine qui ont fait de la Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales un succès, les 30 Etats membres de l’OCDE et 7 autres gouvernements étant devenus parties à cet instrument. Comme le Conseil de l’Europe, l’OCDE voit dans la corruption la principale menace actuelle à l’encontre de la bonne gouvernance, de la responsabilisation et du développement économique durable. L’Assemblée élargie félicite donc l’OCDE d’avoir étendu le champ de ses activités dans ce domaine, notamment par le développement de toute une gamme d’outils de lutte contre la corruption et de recommandations liées à la fiscalité, à l’éthique d’entreprise, aux crédits à l’exportation et à l’aide au développement. L’Assemblée élargie incite les Etats membres à prendre des mesures préventives couvrant notamment des codes de conduite pour les agents publics et des normes sur les conflits d’intérêts, ainsi qu’à mettre en place des formations pour promouvoir l’utilisation de ces codes et normes, et des sanctions en cas de non-respect de leurs dispositions.
14. L’Assemblée élargie note que les négociations sont en cours entre l’OCDE et les pays ayant fait acte de candidature pour l’accession à cette organisation (le Chili, l’Estonie, Israël, la Fédération de Russie et la Slovénie) et que l’OCDE renforce actuellement ses relations avec ceux qui bénéficient d’un engagement renforcé (le Brésil, l’Inde, l’Indonésie, la République populaire de Chine et l’Afrique du Sud) ainsi qu’avec des pays présentant un intérêt stratégique pour l’OCDE en Asie du Sud-Est, et souhaiterait inviter l’OCDE à réserver l’accession à ceux de ces candidats qui respectent pleinement la démocratie, les droits de l’homme et le droit international.
15. Enfin, l’Assemblée élargie décide de modifier son Règlement (voir annexe ci-dessous), dont la dernière modification avait été introduite par la Résolution 1467 (2005), pour le mettre en conformité avec le Règlement de l’Assemblée, qui a été modifié à de nombreuses reprises depuis lors.

Annexe

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Modification du Règlement relatif aux débats élargis de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’OCDE

1. Le Règlement relatif aux débats élargis de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’OCDE a été adopté en 1992 et modifié en 1994 et 2005. Il figure aux pages 218 à 231 de l’édition de 2008 du Règlement de l’Assemblée.
2. Le Règlement de l’Assemblée a été modifié à de nombreuses reprises depuis 2005, pour intégrer par exemple de nouvelles dispositions sur la représentation équilibrée des sexes et la durée du temps de parole.
3. Au vu de ce qui précède, le Règlement de l’Assemblée relatif à l’Assemblée élargie est modifié comme suit:
  • partie II.2, ajouter: «et prendre en compte autant que faire se peut la nécessité d’une représentation équilibrée des sexes»;
  • partie V.5, deuxième phrase, remplacer le membre de phrase «8 minutes pour introduire le débat et 4 minutes pour le résumer» par le membre de phrase «13 minutes pour présenter le rapport et répondre aux orateurs»;
  • partie VI.3, dernière phrase, remplacer le membre de phrase «deux heures avant l’ouverture du débat» par le membre de phrase «une heure avant la fin prévue de la séance précédant celle où le débat doit commencer»;
  • partie VI.5, remplacer les mots «son auteur» par les mots «un de ses auteurs ou un autre membre parlant en sa faveur»;
  • partie VI.5, remplacer les mots «1 minute» par les mots «30 secondes»;
  • partie VI.6, remplacer les mots «l’auteur de l’amendement et un orateur contre» par les mots «un des auteurs de l’amendement ou un autre membre parlant en sa faveur, un orateur contre, et le rapporteur ou le président de la commission des questions économiques et du développement»;
  • partie VII, dans la dernière phrase, remplacer les mots «1 minute» par les mots «30 secondes»;
  • partie VIII.2, dans la première phrase, remplacer le mot «trente» par le mot «soixante»;
  • partie IX.1, dans la note de bas de page 1, remplacer les mots «établis suffisamment à l’avance pour être soumis à la réunion élargie de la commission des questions économiques et du développement qui se tient la veille du débat élargi», par les mots «soumis par écrit dans les deux langues officielles au chef du secrétariat de la commission des questions économiques et du développement au moins 17 heures avant le début prévu de la réunion élargie que cette commission tient la veille du débat élargi, autrement dit au plus tard le lundi à 15 h 30 si la réunion de la commission élargie se tient le mardi à 8 h 30».

B. Exposé des motifs, par Mme Lilliehöök

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1. Contexte

1. En octobre 2008, à Strasbourg, l’Assemblée parlementaire élargie du Conseil de l’Europe tiendra son débat annuel sur «L’OCDE et l’économie mondiale». Pour préparer ce débat, le présent projet de rapport fait une synthèse des principaux thèmes et questions abordés durant les réunions de la rapporteuse au siège de l’OCDE au cours du premier semestre 2008. Approuvé provisoirement par la commission des questions économiques et du développement à sa réunion du 20 juin, ce projet sera diffusé aux délégations nationales pour commentaires et soumis, après une nouvelle révision, pour adoption définitive par la commission puis par l’Assemblée parlementaire élargie en octobre 2008.
2. La rapporteuse aimerait remercier les représentants de l’OCDE qui ont consacré leur temps et mis leur expertise au service de ce projet afin que ce rapport puisse voir le jour. Dans un contexte économique marqué par des gros titres alarmistes et des indicateurs erratiques, la rapporteuse a trouvé particulièrement stimulantes et utiles ces sessions de travail, qui ont abordé une large palette de sujets, avec les représentants de l’OCDE. Elle espère donc que ce rapport présentera une perspective claire, même si la prudence est forcément de mise dans ce contexte. Le rapport commence par une synthèse des facteurs critiques qui influent actuellement sur les perspectives économiques, puis fait le point sur les évolutions dans les pays membres de l’OCDE, ainsi que dans certaines économies émergentes clés 
			(1) 
			La
rapporteuse s’est largement appuyée sur des données contenues dans
les Perspectives économiques de l’OCDE publiées
en décembre 2007 et en juin 2008, ainsi que dans les évaluations
intérimaires de mars et de septembre 2008. Elle prend l’entière
responsabilité des éventuelles erreurs ou mauvaises interprétations..
3. Cette année, le rapport s’attachera également en particulier aux évolutions sur les marchés financiers, et analysera dans ce cadre la nécessité d’une meilleure réglementation et d’une éducation financière plus approfondie, puis fera une analyse critique de l’essor des fonds souverains. En conclusion, il fera le point sur des thèmes abordés lors de récents rapports, notamment les perspectives d’une conclusion heureuse du cycle commercial de Doha, les progrès dans l’efficacité de la fourniture de l’aide internationale, une mise à jour des travaux de l’OCDE en matière de lutte contre la corruption et l’état de la situation en ce qui concerne l’ouverture de l’OCDE à de nouveaux Etats membres.

2. Introduction: des perspectives incertaines pour l’économie mondiale

4. Depuis l’an dernier où le rapporteur précédent présentait une situation positive et la poursuite d’une croissance non inflationniste, beaucoup de choses ont changé dans l’économie mondiale. L’an dernier, il semblait que les conséquences des hausses des prix de l’énergie seraient limitées et que, loin d’être en panne, la croissance économique mondiale était en phase de rééquilibrage. Or, les années 2007-2008 ont apporté leur lot de chocs, distincts certes, mais néanmoins interconnectés: une correction brutale des marchés de l’immobilier américains, qui a déclenché une contraction mondiale du crédit et une perte de confiance persistante dans les marchés financiers, parallèlement à une menace inflationniste croissante, alors que les cours du pétrole et des matières premières continuent de monter, tirés par un dollar américain affaibli, et qu’à l’effet de ces divers facteurs viennent s’ajouter des hausses brutales des cours mondiaux des produits alimentaires.
5. Il n’est pas possible pour l’instant d’évaluer clairement l’impact et la durée de ces chocs. Etant donné les pressions conflictuelles qu’ils font peser sur les décideurs politiques, certains commentateurs y ont vu une «tempête parfaite», et une récession économique serait dès lors difficile à éviter. De fait, en mars, bon nombre étaient convaincus que les Etats-Unis étaient entrés en récession, même en l’absence du critère habituel de deux trimestres successifs de croissance négative. Le 3 mars, le financier de légende Warren Buffett déclarait que, si les conditions ne sont absolument pas comparables à celles des années 1970, c’est une question de bon sens: les Etats-Unis sont en récession 
			(2) 
			Voir
le site http://business.timesonline.co.uk/tol/business/industry_sectors/
banking_and_finance/article3476265.ece., et, dans un sondage d’opinion mené peu de temps après par le Wall Street Journal, 71% des hommes d’affaires américains étaient d’accord avec lui 
			(3) 
			Voir le site <a href='http://money.cnn.com/2008/03/13/news/economy/recession/'>http://money.cnn.com/2008/03/13/news/economy/recession/</a> index.htm?postversion=2008031315..
6. Dans son bulletin intérimaire, paru le 20 mars, l’OCDE reconnaissait que les secteurs les plus touchés de l’économie subissaient déjà un «effet de récession». Elle révisait à la baisse ses prévisions de croissance à court terme pour la plupart des grandes économies, indiquant que les perspectives se sont dégradées plus que les projections ne le laissaient entendre dans son rapport semestriel publié en janvier. En particulier, selon l’OCDE, les mesures de l’inflation montraient une tendance à la hausse et dépassaient le niveau de confort dans bon nombre d’économies, l’OCDE notant par ailleurs que l’économie américaine louvoyait désormais, même si la contraction n’était pas nette. L’économiste en chef de l’OCDE semblait penser qu’il existait un risque «relativement élevé» de véritable récession aux Etats-Unis, notant que la simple impression d’une récession influe déjà sur le sentiment des consommateurs comme des économies.
7. Même si, au moment de son rapport de décembre 2007, l’OCDE avait déjà abaissé ses prévisions de croissance, en mars elle était encore en mesure d’exprimer une confiance raisonnable. Elle faisait valoir que, dans l’ensemble, la croissance du commerce mondial demeurait exceptionnellement dynamique, avec, pour l’an dernier, un niveau de 7,1% et une projection de 8% pour 2008 (chiffre revu à 6,3% en juin). Parmi les membres de l’OCDE, la croissance du PIB en 2007 a été de 2,7% (soit l’équivalent de la croissance moyenne entre 1995 et 2004) et l’on s’attendait à ce qu’elle atteigne les 2,3% en 2008. Pour l’ensemble de la zone OCDE, en janvier, l’inflation demeurait autour des 2,3% alors que l’on s’attendait à ce que le chômage continue de régresser, pour atteindre les 5,3% d’ici à 2009.
8. Les Perspectives économiques de l’OCDE de juin 2008 prédisaient plusieurs semestres de croissance atone pour la plupart des économies de l’OCDE. La croissance pour la zone OCDE y était revue à la baisse (de 1,8% en 2008 à 1,7% en 2009). En outre, l’inflation pourrait, selon cette même source, demeurer élevée pour quelque temps encore. Ses projections pour la zone OCDE en 2008 étaient relevées à 3%, malgré un recul pour 2009 à 2,1%. Cette moyenne reflétait bien entendu des niveaux de croissance moins élevés au Japon qu’aux Etats-Unis et en particulier dans la zone euro. Le recul du chômage prévu auparavant ne devait pas se matérialiser: l’estimation de l’OCDE était révisée, avec un chômage de 5,7% de la main-d’œuvre en 2008 et de 6% en 2009. Il était également prévu un ralentissement de la croissance du commerce mondial (6,3% en 2008), suivi d’une légère reprise en 2009 à 6,6%. Les Perspectives économiques de l’OCDE de juin 2008 reconnaissaient que la situation économique actuelle est particulièrement agitée, avec une large distribution du risque autour des projections. Dans ce contexte, la politique économique dans les pays de l’OCDE doit prendre en compte l’importance croissante des évolutions dans les économies non membres de l’OCDE, la possibilité d’une tendance à la hausse des attentes en matière d’inflation et l’incertitude concernant les conséquences sur la croissance et l’inflation de la situation sur les marchés financiers.
9. Malgré cela, les 4 et 5 juin 2008, les ministres de l’OCDE sont convenus à leur Conseil annuel que la performance globale avait été meilleure que prévue, et ont appelé à poursuivre une étroite coordination des politiques pour faciliter le redressement attendu. Pour ce qui est des marchés financiers, ils ont indiqué que la situation s’était améliorée depuis mars mais que les conditions actuelles du crédit limitent l’investissement. Ils ont noté que les prix des matières premières ont flambé et tiré l’inflation globale, mais qu’ils pourraient ne pas augmenter davantage au cours du prochain trimestre. Cependant, ils sont demeurés préoccupés par les pressions inflationnistes et des signes que les attentes en matière d’inflation soient tirées à la hausse. Ils ont convenu qu’il faut suivre de près les soldes budgétaires, en particulier lorsque des pressions inflationnistes persistent, et qu’il conviendrait de poursuivre les réformes structurelles. Concernant le marché de l’immobilier, l’on s’attend dans la plupart des pays de l’OCDE à la poursuite du ralentissement.
10. Selon la dernière évaluation économique intérimaire de l’OCDE, en date du 2 septembre 2008:
«1. La tempête sur les marchés de capitaux, le repli des marchés immobiliers et la cherté des matières premières continuent de peser sur la croissance mondiale tout en évoluant rapidement:
– les banques semblent avoir inscrit à leur bilan l’essentiel des pertes liées aux titres adossés à des prêts immobiliers à haut risque. Les perturbations financières persistantes semblent de plus en plus refléter des signes de faiblesse de l’économie réelle, faiblesse elle-même en partie induite par la diminution de l’offre de crédit et la baisse du prix des actifs. La profondeur et l’ampleur définitives de la crise financière sont cependant encore incertaines, le risque éventuel de nouvelles pertes sur les opérations de financement du logement et de la construction restant préoccupant;
– le repli des marchés du logement se poursuit, la réduction de l’offre de crédit accentuant sans doute les pressions en ce sens. Aux Etats-Unis, le prix des logements continue de baisser, ce qui fait planer la menace de défaillances et de confiscations supplémentaires qui risquent elles-mêmes de peser sur les prix et d’amplifier les pertes sur prêts. En ce qui concerne la construction, cependant, on perçoit quelques signes de stabilisation, les permis de construire et les ventes de logements neufs ayant cessé de baisser et le parc de logements invendus diminuant. En Europe, le recul des prix et de l’activité dans le secteur de la construction semble gagner le Danemark, l’Irlande, l’Espagne et le Royaume-Uni, tandis que la décrue sensible des volumes de transaction semble annoncer des reculs ailleurs;
– le prix du pétrole s’est inscrit en baisse par rapport aux pics atteints vers le milieu de l’année, et ce sous l’effet d’un ralentissement de la demande et d’une production record des pays de l’OPEP. Sur le front de l’offre de pétrole, la situation reste cependant tendue, ce qui contribue à l’instabilité des prix. Les prix des autres produits de base, notamment de l’alimentation, semblent plus stables tout en se situant à des niveaux élevés. Les prix des denrées alimentaires vont sans doute connaître une détente dans la période qui vient, la sécheresse se terminant dans certains pays exportateurs et la production commençant à se redresser dans le secteur de l’alimentation.
2. S’appuyant sur des indicateurs conjoncturels, les modèles de projection à court terme de l’OCDE laissent entrevoir une phase de faiblesse de l’activité jusqu’à la fin de cette année. Toutefois, l’expérience limitée que l’on a de certains des principaux déterminants de la conjoncture actuelle, ainsi que les incertitudes entourant certaines influences spécifiques, contribue à donner une image particulièrement floue de la situation. Aux Etats-Unis, l’incertitude relative à la gravité de cette phase de faiblesse touche en particulier à la vitesse à laquelle les effets des mesures temporaires de stimulation budgétaire vont se dissiper. Dans la zone euro et dans ses trois principales économies ainsi qu’au Royaume-Uni, l’activité devrait globalement stagner. Au Japon enfin, on ne s’attend qu’à un rebond partiel après la baisse du PIB enregistrée au deuxième trimestre.
3. Les fortes hausses des prix de l’énergie et de l’alimentation ont relancé l’inflation globale et rogné sur les revenus réels des consommateurs dans toute la zone de l’OCDE. Les mesures statistiques de l’inflation sous-jacente se sont aussi orientées à la hausse dans la plupart des grandes économies de l’OCDE, reflétant en partie la diffusion de prix plus élevés des matières premières. Jusqu’ici, les augmentations de salaires semblent avoir été globalement maîtrisées. Si les prix des matières premières demeurent à leurs niveaux récents, en repli dans le cas du pétrole, on peut s’attendre à une certaine modération de l’inflation tant globale que sous-jacente.
4. Les économies du G-7 présentent des conditions différentes au regard de l’action des pouvoirs publics. Aux Etats-Unis, l’inflation sous-jacente est forte mais ne semble plus s’accélérer et le phénomène grandissant de sous-emploi des capacités constituera un facteur de désinflation. Compte tenu des conditions défavorables induites par les contraintes financières, cela semble légitimer les mesures actuelles d’expansion. L’inflation sous-jacente augmente régulièrement dans la zone euro depuis un certain temps, ce qui indique qu’il faut réduire les tensions sur les capacités. En conséquence, pour le moment, il ne paraît guère utile de changer les orientations actuelles de politiques économiques. Si la nécessité d’assouplir ou de durcir les conditions macroéconomiques venait à se faire jour, c’est la politique monétaire qui devrait constituer l’instrument privilégié à cet effet. Au Japon, différents indicateurs de l’inflation sous-jacente diffusent des signaux contrastés, tandis que la détérioration du moral des chefs d’entreprises ainsi que la nécessité de se prémunir contre le risque de déflation plaident en faveur d’un maintien du statu quo monétaire.»
11. Votre rapporteuse pense que la crise financière qui a secoué l’économie mondiale depuis la publication de cette évaluation intérimaire montre combien les perspectives économiques sont incertaines. Certaines des institutions financières les plus puissantes au monde ont fait faillite ou ont été brutalement secouées et demeurent vulnérables non seulement aux répercussions de la débâcle concernant les prêts hypothécaires à risque, mais peut-être aussi à d’autres chocs liés à la gamme complexe et étendue d’instruments financiers imaginés et commercialisés par ces institutions ces dernières années. La réponse politique à cette crise en pleine évolution a été de tenter de restaurer la confiance, avec une marge de manœuvre étroite pour, d’une part, assouplir le crédit et les liquidités ainsi que pour stimuler la demande par des mesures de réductions fiscales afin de minimiser la menace de récession et le spectre d’autres faillites et, d’autre part, donner un tour de vis sur le front monétaire pour limiter les emprunts hémorragiques et les pressions inflationnistes résurgentes. Les actions des pouvoirs publics et des banques centrales en vue de chercher à prévenir un effondrement du système tout entier semblent avoir trouvé le bon équilibre jusqu’ici, même si l’on peut se demander s’il est juste qu’ils s’impliquent autant dans le sauvetage d’institutions financières privées aux frais du contribuable, étant donné notamment l’impression de plus en plus persistante que la nécessité d’une intervention urgente peut s’aviver, du fait des pertes qui s’accumulent et des dévaluations d’actifs. Toutefois, il faut de toute urgence réglementer davantage les marchés financiers, et l’on espère que l’OCDE, ainsi que d’autres institutions telles que le FMI, monteront très vite au créneau sur ce point en vue d’éviter à l’avenir les tempêtes financières qui ont caractérisé ces dernières années.

3. Le point sur les économies clés

3.1. Les Etats-Unis

12. Au cours de ces quelques dernières années, la consommation privée a apporté une contribution de plus en plus importante au soutien de la croissance du PIB américain, ce qui a permis de compenser en partie l’impact d’un marché de l’immobilier en rapide déclin. Durant 2006 et 2007, le revenu disponible a connu une forte hausse, en partie grâce au versement de primes, au déblocage des stock-options et aux prêts immobiliers, une aubaine qui a soutenu la consommation nationale, alors même que la crise financière commençait à se faire sentir l’été dernier. Le commerce extérieur a également contribué à la croissance, les exportations étant tirées par la demande des pays émergents et par un dollar faible, ce qui a permis d’assainir quelque peu le déficit en compte courant des Etats-Unis, redescendu à 5,3% du PIB en 2007 et qui devrait, selon les estimations, s’établir à 5% en 2008.
13. Dans l’ensemble, la croissance américaine durant 2007 a été de 2,2%, contre 2,9% en 2006. Dans les prévisions de juin de l’OCDE, selon les projections, la croissance devait s’établir autour des 1,2% en 2008 et 1,1% en 2009, à mesure que s’aggravent les effets de la crise du logement, du resserrement du crédit et de la hausse des cours des matières premières.
14. L’un des indicateurs clés pour les perspectives économiques américaines est le marché de l’immobilier. Courant 2007 et 2008, les prix ont connu une décélération brutale, avec des pertes dans de nombreuses régions – une tendance qui s’est poursuivie. Cependant, comme l’a noté l’OCDE dans son évaluation intérimaire de septembre 2008 (voir paragraphe 10 ci-dessus), l’augmentation des stocks de logements invendus et le recul des mises en chantier de construction neuves pourraient avoir assaini la situation. L’effet domino de la crise immobilière est bien connu; les marchés financiers demeurent agités, les banques hésitant à se prêter les unes les autres, ce qui entraîne des crises de confiance dans des institutions spécifiques, avec des retombées dans le secteur de l’assurance, en particulier, et des marchés boursiers en général. Tout cela restreint l’offre de crédit aux ménages et aux entreprises, mais les efforts incessants de la Réserve fédérale américaine semblent avoir réussi à éviter une véritable récession.
15. La consommation et les perspectives d’emploi ont reculé. La croissance de la consommation des ménages devrait passer de 2,9% l’an dernier à 1,2% en 2008, et tomber à 0,4% l’an prochain. La croissance de l’emploi dans le secteur privé a connu un ralentissement marqué durant 2007, avec de fortes pertes dans la production, le bâtiment et les services financiers; au premier semestre 2008, l’emploi dans le secteur privé a reculé pendant cinq mois consécutifs. De janvier à août, 605 000 emplois ont été perdus au total. Dans l’ensemble, le chômage a reculé durant 2007, et l’on s’attend à ce qu’il remonte à au moins 5,4% cette année et 6,1% l’année prochaine.
16. L’inflation sous-jacente, comme le note l’évaluation intérimaire de l’OCDE de septembre, est élevée mais ne s’est pas aggravée – en partie grâce à une baisse de l’activité et à une pression à la baisse sur les marchés de l’emploi, mais aussi du fait que, malgré le dollar faible, de nombreuses importations proviennent de pays à bas coûts. Même si l’inflation brute a passé la barre des 3% en 2007, tirée par les prix du pétrole et des produits alimentaires, l’inflation sous-jacente est restée stable, autour des 2%. En mars 2008, la Banque centrale a réduit son taux directeur à 2,25% (et à 2% en avril, sans changements depuis) – soit un recul de 3% sur six mois – ce qui, selon l’OCDE, devait être considéré comme une réponse politique temporaire destinée à rassurer les marchés et à améliorer la distribution du crédit dans toute l’économie. Si les réductions étaient trop importantes ou duraient trop longtemps, cependant, il pourrait y avoir un risque d’inflation – et, si l’on en croit les derniers chiffres, dont il ressort que l’inflation brute américaine se situe désormais autour des 5,4%, la prudence s’impose. Dans ses Perspectives économiques de juin 2008, l’OCDE recommande que la politique monétaire américaine s’en tienne à sa position actuelle, accommodante, jusqu’à ce que la reprise se soit solidement enracinée, mais que les taux d’intérêts soient remontés rapidement dès que les conditions se seront normalisées.
17. Le déficit public américain devrait passer de 3% du PIB en 2007 à 5,8% en 2008, en partie du fait de recettes fiscales en diminution. La latitude budgétaire du gouvernement est donc limitée. Cela est d’autant plus vrai que la sécurité sociale n’a jamais été aussi durement sollicitée, la première vague des baby-boomers prenant sa retraite, sans qu’aucune réforme significative du système n’ait été introduite.
18. Le train de mesures budgétaires américaines composé de chèques correspondant à une réduction d’impôt provisoire qui ont commencé à être expédiés en mai 2008 ainsi que d’incitations temporaires en faveur de l’investissement auront un impact à court terme sur l’activité économique qui devrait se faire sentir essentiellement aux deuxième et troisième trimestres de 2008. Et bien que l’affaiblissement progressif du dollar signifie que la croissance des exportations ne devrait ralentir que modérément, alors que la réduction des dépenses intérieures devrait contenir l’effet inflationniste d’importations plus chères, l’amélioration que cela devrait entraîner dans le solde en compte courant sera limitée, du fait du ralentissement des arrivées de flux d’investissements – les Etats-Unis devraient afficher un déficit net d’investissements d’ici au début de 2009.
19. Globalement, l’OCDE s’attend à ce que, malgré une contribution toujours positive des exportations américaines, la croissance stagne virtuellement pendant le reste de 2008. L’activité devrait se reprendre progressivement en 2009. Si les prix des matières premières s’assagissent, les pressions inflationnistes devraient finir par se calmer du fait d’un écart de production et du taux de chômage plus élevé (6%). Toutefois, la reprise pourrait être menacée si la tempête financière persiste.

3.2. Les économies asiatiques

20. La croissance du Japon a connu un certain ralentissement – passant de 2,4% en 2006 à 2,1% l’an dernier –, mais le pays est toujours en phase de reprise, la reprise la plus longue de toute son histoire depuis la fin de la seconde guerre mondiale, et on s’attend pour 2008 à une croissance de 1,7%. Les exportations continueront de jouer un rôle puissant, malgré l’appréciation du yen, la demande régionale compensant un marché américain plus lent, et l’emploi a chuté à son plus bas niveau depuis 1998.
21. La tendance à la baisse des salaires constatée en 2007 s’est inversée cette année, avec une rémunération plus élevée pour les travailleurs à plein-temps et la fin d’une tendance à proposer de préférence des emplois à temps partiel moins bien rémunérés. Cependant, les prix à la consommation ont augmenté, reflétant une hausse des prix de l’énergie et des denrées alimentaires. L’inflation s’est accélérée, passant de 0,1% en 2007 à plus de 1% au premier trimestre de 2008, même si l’inflation sous-jacente (hors prix volatils de l’énergie et des denrées alimentaires) est demeurée proche de zéro et ne devrait augmenter que lentement.
22. Avec la persistance d’une inflation sous-jacente faible, les taux d’intérêt au Japon ont été maintenus à 0,5% depuis le début de 2007. L’OCDE estime qu’il s’agit là d’une position sage, et suggère que les taux soient conservés à ce niveau, dans ce contexte.
23. En juin, on pensait que le Japon connaîtrait un ralentissement du taux de croissance de son PIB, qui se situerait à environ 1,25% durant le restant de l’année pour remonter en 2009 à juste au-dessus de 1,5%. Les risques fondamentaux pour ce scénario sont que les marchés d’exportation peuvent se révéler fragiles du fait du ralentissement de la croissance mondiale et de l’appréciation du yen. Toutefois, la demande intérieure semble suffisamment dynamique pour éviter une récession, et est stimulée par un rebond dans l’investissement résidentiel, une forte rentabilité sous-jacente des entreprises qui entraîne davantage d’investissements d’affaires et une tendance positive qui se maintient en matière de hausse des salaires.
24. La croissance en Corée, qui a rebondi après une période difficile pour s’établir à 5,1% en 2006, est demeurée ferme à 5% en 2007 mais l’on s’attend à ce qu’elle recule à environ 4,3% cette année, alors que la croissance des exportations passerait de 12,1% en 2007 à 8,6% en 2008. La croissance de l’emploi s’est ralentie et les revenus des ménages sont de plus en plus érodés par une forte inflation des prix à la consommation, de 3,8% au premier trimestre de 2008 contre 2,5% en 2007, tirée par les hausses brutales des cours du pétrole et par la dépréciation du won. Mais, selon les projections, l’inflation devrait s’assagir et retrouver les fourchettes visées.
25. Le marché immobilier reste en berne, avec des carnets de commandes de logements neufs qui font grise mine et un stock d’appartements invendus à son plus haut point depuis 1996. En août 2008, le gouvernement a annoncé des mesures pour relancer le marché de l’immobilier, mais l’inquiétude demeure concernant les répercussions sur les banques des défauts de paiement des opérations de financement immobilier et prêts hypothécaires.
26. La croissance de la Corée devrait rebondir à 5% en 2009 pour se situer très près de son niveau potentiel, grâce à des réductions d’impôts prévues pour relancer l’investissement d’affaires et grâce à un regain d’exportations dû à une hausse de la demande étrangère et à un taux de change plus bas. La Corée devrait tirer profit des perspectives plus favorables de coopération économique sur la péninsule de Corée, et de la mise en œuvre de son accord de libre-échange avec les Etats-Unis. L’OCDE conseille, pour maximiser les perspectives de renouer avec la croissance, de prendre des mesures réglementaires et de réforme en vue de renverser la tendance au recul des investissements directs étrangers, de prendre des mesures pour éviter tout ralentissement grave sur le marché de l’immobilier, et de veiller à ce que la politique des taux d’intérêt soit orientée pour contenir l’inflation et l’adoption de réformes visant à stimuler la productivité, en particulier dans le secteur des services.
27. Après un bref ralentissement en 2006, la croissance de la Chine s’est une fois encore accélérée pour atteindre les 11,9% en 2007, et une demande intérieure robuste a partiellement compensé une certaine modération de la croissance des exportations, la demande intérieure et l’investissement sont demeurés robustes, de sorte que la croissance du PIB chinois devrait s’établir autour des 10% cette année et à 9,5% l’année prochaine. L’excédent en compte courant continue de monter, mais pas tout à fait au même rythme étant donné le boom des importations: il était de 354,7 milliards de dollars en 2007, et devrait atteindre les 435,8 milliards de dollars d’ici à 2009.
28. Le prix à la consommation a connu une hausse brutale: de 5% en 2007, elle est passée à 8,7% en février 2008, avec une moyenne attendue de 6,4% cette année, son plus haut niveau sur une décennie, et plus du double du niveau officiel visé. Une bonne partie de la situation peut s’expliquer par les prix des produits alimentaires, les prix officiels des produits pétroliers étant ajustés à la hausse, ainsi que d’autres coûts qui commencent également à augmenter. Face à cela, les salaires dans les villes ont augmenté de quelque 20% durant la première moitié de 2007. Mi-2008, les revenus des salariés étaient au plus haut depuis douze ans, et les salaires continuent d’augmenter plus vite que le revenu national.
29. Le gouvernement s’efforce de ralentir l’économie. Plusieurs hausses des taux d’intérêt sont intervenues, ainsi qu’un réajustement à la hausse de la devise chinoise – de 4,5% en tout par rapport au dollar au cours des cinq premiers mois de 2008, ce qui, selon l’OCDE, reste insuffisant pour une appréciation effective. Et ce, malgré les efforts visant à limiter l’offre de monnaie par les banques commerciales et de mettre un terme à la hausse permanente des réserves chinoises en devises.
30. Des politiques budgétaires plus strictes sont également en cours de mise en place. L’an dernier, les recettes publiques ont augmenté beaucoup plus rapidement que les dépenses, et le budget national a atteint un excédent de 0,7% du PIB; l’excédent du système de sécurité sociale a encore augmenté, reflétant des salaires en pleine euphorie, et des taxes ont été imposées sur certaines exportations gourmandes en énergie, d’autres exportations jusque-là exonérées de TVA ayant vu cette exonération supprimée. L’un dans l’autre, l’excédent budgétaire combiné devrait, selon les estimations, avoir dépassé les 2% du PIB en 2007. Des salaires et une inflation en hausse devraient contribuer à freiner l’économie, en pénalisant la compétitivité des exportations. Même avec ces éléments, l’OCDE pense que les politiques macroéconomiques doivent continuer de se focaliser sur la lutte contre le risque de surchauffe.
31. L’économie chinoise est donc confrontée à deux risques antithétiques: si l’économie mondiale connaît un ralentissement significatif, cela devrait contribuer à résoudre certains déséquilibres intérieurs, mais remettre en question le progrès du développement et la création d’emplois nécessaire pour surmonter la pauvreté et stimuler les migrations rurales. En revanche, si l’économie résiste au ralentissement actuel, la Chine pourrait connaître une surchauffe inflationniste significative, qui encouragerait la spéculation à court terme, menacerait les prix des actifs et mettrait à mal les bilans des banques chinoises.
32. Dans les trente années qui ont suivi son indépendance, l’Inde a connu en moyenne une croissance de 1,75% par an, qui, début 2007, a atteint les 10%, soutenue par des afflux massifs d’investissements étrangers, une forte production industrielle et la reprise du secteur agricole. L’élément récent sans doute le plus frappant a été le comportement des investisseurs étrangers, les études suggérant que l’Inde est désormais la deuxième destination la plus prisée pour les investissements directs à l’étranger (IDE) et, dans les secteurs de l’électronique et des télécommunications, l’investissement a doublé. Globalement, les niveaux d’IDE ont atteint 20% du PIB de l’Inde, confirmant la position de l’OCDE selon laquelle les réformes ont progressivement orienté l’économie indienne vers un système basé sur les lois du marché. Toutefois, la croissance s’est ralentie durant 2007, s’établissant à 8,5% au cours du dernier trimestre, en partie comme conséquence d’une politique monétaire plus stricte.
33. Quoi qu’il en soit, l’inflation des prix à la consommation et celle des prix de gros est repartie à la hausse, l’une et l’autre atteignant les 8% au printemps 2008, l’inflation des prix de gros étant, quant à elle, estimée à 12,4% en août. Des prix du pétrole et des matières premières en hausse devraient selon toute vraisemblance assainir le déficit actuel en compte courant, qui devrait remonter à 2% du PIB en 2008. De forts investissements ont contribué à contrebalancer un léger ralentissement de la demande des consommateurs en 2007, en particulier dans des secteurs consommateurs de crédit, à mesure que les initiatives étaient prises pour redresser la situation. Mais, au début de 2008, il était clair que la production industrielle avait reculé, même si la production agricole était florissante.
34. Les avancées de l’Inde en 2006 en matière budgétaire se sont poursuivies en 2007, le déficit combiné de l’administration centrale et de l’Etat ayant reculé de 6,4% à 5,4% du PIB, et le gouvernement prévoit que cette baisse va se poursuivre cette année (4,5%). C’est là une performance remarquable, même si l’on doit garder à l’esprit que les subventions hors budget aux pétroliers, distributeurs alimentaires et fabricants d’engrais ne sont pas incluses, ni une prime aux fonctionnaires qui va être versée sur le budget de 2008 et représente 0,9% du PIB. L’OCDE prévient que la prime ainsi que les annulations de dettes pour les petits exploitants agricoles devraient être introduits progressivement pour éviter un choc budgétaire. En outre, une taxe à la valeur ajoutée, d’application nationale, devrait remplacer les taxes indirectes actuelles de l’Etat et des syndicats.
35. Entre-temps, les conditions monétaires se sont durcies durant 2008, alors que le taux de change est resté relativement stable face au dollar, après une appréciation de 12% de la roupie en 2007. Cet élément, avec une inflation en hausse, contribue à creuser le déficit commercial. La politique monétaire nationale a visé à neutraliser les effets des arrivées croissantes de capitaux et de la résurgence de l’inflation, et la Banque de réserve indienne a relevé à trois reprises son taux d’intérêt directeur dans le courant de l’été 2008, le portant ainsi à 9% le 29 juillet dernier, son niveau le plus élevé des sept dernières années. Malgré cela, la croissance de l’Inde ne devrait se ralentir que légèrement, pour s’établir autour des 7,8% en 2008.
36. Pour conforter l’économie sur le long terme, l’OCDE a encouragé l’Inde à réduire son déficit, à laisser davantage de latitude à l’investissement privé, à continuer d’abaisser les barrières tarifaires et à réduire la charge administrative pesant sur les entreprises. En outre, il conviendrait de trouver une solution aux pratiques restrictives en matière d’emploi, de promouvoir l’emploi à long terme et de placer en particulier l’accent sur les services publics renforcés, notamment dans l’éducation et les infrastructures nationales. Selon l’OCDE, la réaction impressionnante de l’économie aux réformes déjà mises en œuvre devrait encourager les décideurs politiques à poursuivre la libéralisation, qui permettra d’engendrer un surcroît de croissance et de réduire plus vite la pauvreté.

3.3. La zone euro

37. La reprise économique évoquée dans le rapport de l’an dernier s’est ralentie en 2008. De 2,9% en 2006, la croissance est retombée à 2,6% l’an dernier, et devrait s’établir autour des 1,7% en 2008, et de 1,4% l’année suivante. Les Perspectives économiques de l’OCDE de juin font état d’un recul brutal de la croissance du PIB, passant d’un inattendu 3,1% au premier trimestre de 2008 dû à des facteurs temporaires en Allemagne à 0,2% au deuxième trimestre, pour repartir à 1,1% au troisième et se maintenir à 1,2% durant le dernier trimestre, mais en hausse régulière après cela.
38. Des taux d’intérêt plus élevés, une devise forte, des marchés du crédit plus tendus et des prix en hausse ont déjà réduit le rythme de la croissance en 2007 et pénalisé la vente au détail dans la zone euro. Les augmentations des taxes sur la consommation, en particulier en Allemagne, ont également eu des conséquences. Ces éléments conjugués ont ralenti les marchés de l’immobilier encore actifs, et exacerbé les problèmes dans les pays où le marché de l’immobilier était déjà en phase de reflux. En Irlande, les prix des logements baissent depuis le deuxième semestre de 2006, et les investissements dans l’immobilier ont connu une chute brutale; en Espagne aussi, le ralentissement a été sévère, et les permis de construire pour des constructions résidentielles ont plongé. Au Danemark, aux Pays-Bas et dans une moindre mesure en France, les plus-values spectaculaires d’il y a encore quelques années ont été remplacées par des hausses modérées, voire une stagnation sur le marché.
39. L’investissement et les exportations ont été au cœur de la récente croissance dans la zone euro. En général, ils se sont bien tenus face à l’incertitude internationale qui règne, et l’on a constaté des gains de compétitivité. L’investissement en Allemagne a été particulièrement fort au premier trimestre de 2008 et la croissance des exportations allemandes s’est bien tenue face à l’appréciation de l’euro et à une demande plus faible des Etats-Unis, en partie parce que le coup avait été supporté par les pays producteurs de pétrole et du fait d’une demande soutenue du reste de l’Europe. L’Allemagne représente environ un tiers de l’ensemble des exportations de la zone euro et ses excédents commerciaux permanents contribuent à équilibrer les déficits souvent conséquents d’autres membres de la zone euro tels que la Grèce, le Portugal et l’Espagne.
40. Un complément de croissance pour la zone euro dépendra de la résilience de la demande intérieure. Bien qu’elle ait été freinée par un resserrement de l’octroi des crédits, une inflation en hausse et un marché de l’immobilier en panne, elle sera stimulée à mesure que les emplois continuent à se créer et que les salaires connaissent une croissance modeste. Globalement, la zone euro a enregistré un chômage de 7,4% en 2007, en amélioration par rapport aux 8,2% de 2006. Toutefois, les pressions sur les coûts se sont désormais avivées et la croissance de la productivité a marqué le pas, outre que les coûts unitaires de la main-d’œuvre augmentent désormais d’environ 2% l’an. L’OCDE prévoit donc que le chômage commencera de refluer cette année et l’an prochain.
41. Les tendances démographiques ont eu cependant une influence, avec une diminution des nouvelles entrées sur le marché de l’emploi. En Italie, par exemple, l’augmentation de la population en âge de travailler est due presque entièrement à l’immigration, tandis qu’en France une croissance modérée de l’emploi dans le secteur privé a été suffisante pour compenser le recrutement plus lent dans le secteur public. Dans le même temps, la participation au marché de l’emploi a connu une augmentation, particulièrement forte chez les femmes et les travailleurs plus âgés, mais certains signes montrent qu’un marché de l’emploi «à deux vitesses» est encore en place, avec un chômage des jeunes et des travailleurs peu qualifiés encore très élevé par rapport aux normes internationales. C’est pourquoi, malgré l’amélioration générale, l’OCDE préconise de poursuivre les réformes, tant dans les pays où des pratiques restrictives freinent l’accès à l’emploi que dans ceux où des marchés du travail tendus ont commencé à freiner la croissance.
42. La hausse des prix du pétrole et des produits alimentaires a tiré vers le haut l’inflation dans la zone euro. Les Perspectives économiques de l’OCDE de juin prévoyaient que l’inflation atteigne 3,4% en 2008, avant de commencer à reculer pour redescendre aux 2% visés par la BCE (avec une prévision d’inflation à 2,4% en 2009). Pour l’OCDE, les orientations politiques actuelles sont appropriées, le taux d’intérêt directeur étant à 4,25%, à son plus haut niveau depuis sept ans. A l’évidence, toutefois, il convient toujours de rester prudent face aux conséquences potentielles de la crise financière de septembre sur les perspectives de la croissance, alors qu’à mesure que l’inflation reflue, les pressions se font sentir pour une baisse des taux d’intérêt.
43. Entre 2005 et 2007, la reprise a permis d’améliorer notablement les positions budgétaires, le déficit budgétaire structurel ayant diminué de 1,5%. L’OCDE juge qu’une partie de cette évolution est due à la réforme structurelle, mais qu’une grande part pourrait être attribuée à des hausses cycliques de recettes, et prévient qu’il convient de poursuivre les efforts dans le sens d’une consolidation budgétaire. Quoi qu’il en soit, dans le cycle baissier, l’on devrait laisser les stabilisateurs automatiques (recettes fiscales en baisse, hausse des transferts et baisse des importations qui tendent à amortir la demande) faire leur travail.
44. L’OCDE souligne que, malgré certaines améliorations, bon nombre de pays européens sont encore fortement endettés sur le plan structurel – en France, par exemple, la dette représente au moins les deux tiers du PIB – et qu’il faut faire davantage si les pays entendent faire face à la tendance démographique au vieillissement des populations, en Italie tout particulièrement. A cet égard, l’OCDE préconise la mise en œuvre rigoureuse de la récente réforme des pensions en Grèce, ainsi qu’une réforme globale de son système de soins de santé, et se félicite des progrès marqués par le Portugal – où une réforme de fond des contrats des fonctionnaires, des systèmes de santé et des systèmes de pension devrait consolider les perspectives de croissance.
45. Durant le reste de 2008, le principal risque externe pour la zone euro est la gravité et la durée du ralentissement dans l’environnement externe, en particulier aux Etats-Unis, son effet sur la solidité de l’euro et sur les exportations. Ces effets seront particulièrement graves s’ils se propagent sur les marchés mondiaux et réduisent la demande des marchés émergents, où les exportateurs européens sont particulièrement bien implantés. Il y a également un risque qu’un regain de turbulences sur les marchés financiers, l’inflation et les restrictions des crédits créent des difficultés générales à obtenir des prêts bancaires, avec des répercussions sur les dépenses des consommateurs et un surcroît de détérioration de certains marchés immobiliers. En réaction, l’OCDE suggère que les pays de la zone euro agissent pour renforcer le fonctionnement du marché intérieur, ce qui renforcerait les perspectives de croissance et améliorerait le fonctionnement de l’Union monétaire; en outre, il pourrait certainement être utile de passer en revue le système de supervision financière en place actuellement, qui est fragmenté.

3.4. Le Royaume-Uni

46. En 2007, la croissance a été supérieure au niveau des tendances, passant de 2,8% à 3,1%; cependant un brutal ralentissement est attendu pour cette année, l’OCDE révisant ses prévisions de 1,8% en juin dernier, qu’elle ramène maintenant à 1,2% en septembre. De fait, elle prévoit que le PIB va en réalité se contracter de 0,3% au troisième trimestre et de 0,4% au quatrième trimestre, ce qui ferait du Royaume-Uni le seul pays membre de l’OCDE à plonger en récession (la récession étant définie techniquement comme la situation après deux trimestres consécutifs de croissance négative).
47. La force du secteur des services, et une demande intérieure résiliente, ont contribué à maintenir le rythme économique pendant une bonne partie de l’an dernier, et ont compensé un recul des investissements et un ralentissement croissant du marché de l’immobilier. Mais l’activité sur ce secteur a continué de se ralentir en 2008: alors que les conditions d’octroi des crédits se resserrent, les accords d’hypothèques se sont réduits de manière sensible, et les prix ont connu en général un recul, ce qui a dissipé une partie des effets de richesse et de la valeur des biens en garantie, avec un ralentissement significatif de la croissance de la consommation et de l’investissement résidentiel.
48. Malgré ce contexte, et alors que les augmentations salariales demeurent modérées, l’inflation des prix à la consommation s’est accélérée en 2008, atteignant les 4,7% en août, tirée par les prix de l’énergie et des denrées alimentaires. Parmi les autres facteurs ayant contribué à ce phénomène, on citera le recul de 16% du taux de change effectif entre juillet 2007 et août 2008 et des marges bénéficiaires serrées dans le secteur de la vente au détail, les principaux acteurs du marché devant répercuter des hausses de coûts sur les consommateurs. Malgré cela, l’OCDE estime que l’inflation va refluer courant 2009 pour se rapprocher des niveaux visés, et le chômage devrait augmenter, passant de 5,5% à 5,8%. Pour éviter un blocage en termes d’attentes de l’inflation, elle recommande de maintenir le cap sur les taux d’intérêt directeurs (la Banque d’Angleterre l’a maintenu à 5% en septembre), même si d’autres baisses pourraient se révéler nécessaires à mesure que l’économie se ralentit.
49. Le déficit budgétaire du Royaume-Uni devrait atteindre les 3,8%, étant donné le ralentissement substantiel dans les recettes fiscales qui reculeront très légèrement l’année prochaine pour descendre à 3,7%, à mesure que des programmes de dépenses plus stricts commencent à porter leurs fruits. Toutefois, avec un endettement net approchant sans doute des 40%, l’OCDE prévient que le gouvernement risque de devoir appliquer une politique fiscale beaucoup plus stricte. Elle suggère que le Royaume-Uni évalue avec précaution les futures recettes fiscales, et prenne des mesures supplémentaires pour réduire le déficit fiscal, s’il veut atteindre sa «règle d’or» et ses objectifs à moyen terme pour investir durablement. Afin de donner une bouffée d’oxygène au marché de l’immobilier, l’OCDE suggère que le gouvernement s’engage vers une rationalisation des réglementations applicables en matière d’urbanisme et étudie des mesures plus incitatives pour les constructions neuves. En particulier, l’OCDE recommande de redéfinir les limites d’urbanisme des «ceintures vertes», comme le préconisait récemment le rapport du Barker Review.

3.5. Autres économies clés

50. L’économie canadienne, après plusieurs années de croissance supérieure à son potentiel, a connu une brusque décélération à la fin de 2007 du fait d’un ralentissement des exportations et de la production de produits manufacturés. Une demande extérieure plus faible, notamment de la part des Etats-Unis, et une forte appréciation du dollar canadien ont freiné l’activité, et la croissance en 2008 devrait retomber de 2,7% en 2007 à peu ou prou 1,2% cette année. Cependant, elle devrait rebondir au printemps prochain pour renouer avec un taux annuel de 2%, lorsque les facteurs extérieurs se seront améliorés et que les difficultés sur les marchés du crédit seront surmontées.
51. Les fondamentaux économiques du Canada en 2007 étaient sains, l’emploi et la demande intérieure étant soutenus, et la croissance économique stimulée par des termes de l’échange en très nette amélioration du fait des hausses des prix des matières premières. Le marché immobilier est demeuré plutôt solide, la baisse des prix étant jusqu’ici limitée à un petit nombre de villes de l’ouest du pays, tandis que de récents progrès sur les termes de l’échange, des marchés de l’emploi tendus et un faible niveau de chômage ont stimulé les revenus et soutenu la consommation – malgré une performance insuffisante en termes de productivité et des coûts unitaires de main-d’œuvre en rapide augmentation. Cependant, les pressions inflationnistes ont été modérées – les hausses des prix des matières premières ont commencé à s’assagir, les taxes sur les ventes ont été abaissées et le dollar se renforce, autant d’éléments qui contribuent à maintenir les prévisions d’inflation dans la fourchette visée par la banque centrale.
52. Alors que l’économie en ralentissement assure un environnement calme sur le front de l’inflation, l’OCDE estime que la Banque centrale du Canada peut envisager un assouplissement de la politique monétaire, à partir du début de 2009. Globalement, la politique budgétaire doit être empreinte de prudence à tous les niveaux de gouvernement, et il conviendrait de prendre des dispositions pour l’augmentation future des dépenses, à mesure du vieillissement de la population, en épargnant les bénéfices sur les matières premières résultant d’un effet d’aubaine.
53. Les risques principaux pour la perspective économique du Canada seraient une crise prolongée du crédit aux Etats-Unis et un ralentissement, ou une appréciation sensible du cours du dollar canadien, avec son corollaire, une dégradation de la balance extérieure.
54. Le Mexique également a été touché par un ralentissement de la demande américaine, et sa croissance n’a été que de 3,3% en 2007, contre 4,8% l’année précédente. Elle devrait plonger un peu plus en 2008 (2,8%), avant de revenir à 3,3% d’ici à 2009. La demande intérieure a connu une croissance relativement forte en 2007, mais l’impact négatif du commerce extérieur sur la croissance s’est aggravé, car les importations demeurent fortes alors que la croissance des exportations a reculé, et la production pétrolière a souffert de contraintes techniques. C’est pourquoi le déficit en compte courant se creuse, passant de 0,8% du PIB en estimations en 2007 à 1% en 2008 et à 2% en 2009 (estimations).
55. L’emploi a continué son expansion dans le secteur formel, en particulier dans le bâtiment et les services, jusqu’à la fin de 2007, le peso mexicain – lié au dollar américain – étant resté dans une grande mesure stable. Sur fond de fortes hausses du prix des denrées alimentaires, l’inflation a flambé cependant, à 4,6% en taux annuel en avril 2008, et se situe désormais dans la fourchette haute des prévisions du Mexique. La Banque centrale mexicaine a donc relevé ses taux d’intérêt en 2007, puis les a assouplis en 2008, et l’inflation pourrait bien dépasser les 4% en 2008, avant de reculer en 2009. Les IDE comme l’investissement intérieur ont connu de fortes performances, et de récentes réformes fiscales sont attendues pour encourager encore cette tendance.
56. Le changement essentiel apporté à la structure de la fiscalité a été l’introduction d’un impôt minimal sur les revenus des sociétés, introduit en septembre 2007, qui devrait gonfler les recettes fiscales d’environ 1,2% du PIB; avec les changements introduits dans la réglementation du secteur pétrolier, cela entraînera un rééquilibrage approprié des recettes, avec une augmentation substantielle du volet non pétrolier. 2007 a connu un budget équilibré et pour 2008 l’équilibre est visé, avec une hausse des recettes et des dépenses, et une augmentation du financement en faveur des infrastructures, de l’éducation et de la santé. Un fonds pour les infrastructures a été créé en février 2008 pour encourager les programmes d’investissement entamés dans l’année, et en mars des réductions d’impôts et de cotisations sociales ont été accordées.
57. Pour l’avenir, le plus gros risque est que la reprise américaine ne soit pas au rendez-vous, ce qui entraînerait un ralentissement durable des exportations mexicaines.
58. Au Brésil, le rebond de la croissance, qui est sortie de son ralentissement, s’est poursuivi en force en 2007, avec une croissance atteignant les 5,4%. Elle a été tirée par une forte demande du secteur privé, avec une augmentation des crédits, un recul du chômage et des salaires en hausse. L’investissement a également connu une expansion notable, ce qui a contribué à atténuer les contraintes de capacités qui commencent à se faire sentir. Du fait d’une demande plus importante, tous les indicateurs sont au vert en ce qui concerne les importations, en particulier pour les produits et équipements et produits intermédiaires, mais cette tendance a été contrebalancée par la forte performance à l’exportation. Elément encourageant, les données relatives à l’utilisation des capacités et les indicateurs de production industrielle ont remonté de manière substantielle, ce qui suggère des améliorations structurelles dans l’économie. Toutefois, suivant en cela la tendance de la perspective mondiale, la croissance du PIB devrait se ralentir quelque peu durant 2008, et s’établir à 4,8% cette année, puis à 4,5% en 2009.
59. L’inflation a connu une hausse substantielle depuis la mi-2007, tirée par les prix des denrées alimentaires et de l’énergie. Vers la fin de 2007, la Banque centrale a fait marche arrière concernant la réduction des taux d’intérêt du fait d’une croissance persistante de la demande et, en avril 2008, a relevé le taux directeur de 50 points de base, le portant à 11,75%. Les conditions globales sont porteuses, la devise brésilienne étant de plus en plus forte et la Banque centrale continuant d’accumuler des réserves qui, alors qu’elles représentent autour de 200 milliards de dollars, sont supérieures désormais à la dette extérieure du pays. Des mesures ont été prises pour réduire la pression sur le taux de change.
60. Le budget du Brésil pour 2008 a cherché à augmenter les impôts, les dépenses et les salaires. En fait, les dépenses publiques ont connu une forte croissance pendant quelque temps, en particulier pour soutenir la hausse des salaires des fonctionnaires fédéraux, soutenue par des recettes publiques en pleine expansion. Quelques mesures ont été prises pour diminuer la charge de l’impôt, en particulier sur l’investissement, mais le ratio recettes/PIB du Brésil s’est élevé, et l’un des défis que le pays devra relever à moyen terme sera celui de la maîtrise de ses dépenses publiques.
61. La croissance économique de la Pologne a continué sur sa lancée haussière, atteignant 6,6% en 2007, et l’on s’attend à un robuste 5,9% cette année. Elle a été tirée par une forte demande intérieure et par les investissements étrangers, des dépenses publiques élevées et un chômage en recul. En fait, il y a de plus en plus de pénurie de main-d'œuvre; et avec une forte utilisation des capacités dans l’économie, plus des hausses des coûts unitaires de main-d'œuvre, l’inflation a commencé à remonter. L’inflation des prix à la consommation devrait s’établir à 4,5% en 2008 et à 5,5% en 2009. La croissance de la Pologne peut se ralentir en 2009, mais devrait rester au-delà de son potentiel à long terme, autour des 5%, la détérioration actuelle des comptes courants devant se poursuivre.
62. Malgré de récentes améliorations de la position budgétaire de la Pologne, les programmes actuels visant à augmenter les dépenses et à réduire les impôts font peser un risque sur l’objectif du gouvernement de réduire le déficit budgétaire à 2,8% d’ici à 2009. Selon l’OCDE, il est essentiel d’appliquer strictement la planification budgétaire. Elle approuve le programme gouvernemental «50 +» qui vise à faire travailler les travailleurs âgés, notamment en limitant l’accès aux retraites anticipées. Et puisque les taux d’intérêt seront alors le principal instrument qui permettra de contenir à la fois le déficit et l’inflation, le taux directeur en matière de politique d’intérêt devrait atteindre les 7% durant 2008, ce qui peut menacer à terme la forte croissance de la Pologne, et remettre en question son objectif d’entrer dans la zone euro.
63. En République tchèque, la croissance devrait retomber de 6,5% à 4,5% cette année, du fait de la hausse de l’inflation, à 7,5% en année glissante pour le premier trimestre de 2008, qui a laminé les revenus disponibles réels des ménages. Le chômage, qui était de 7,9% en 2005, devrait descendre à 4,6% en 2008 et à 4,4% en 2009. Le marché de l’emploi, qui a tendance à se tendre, exerce un surcroît de pressions inflationnistes, mais d’autres facteurs jouent aussi un rôle, notamment les augmentations de la fiscalité indirecte et l’assouplissement des prix réglementés. Avec des prix des produits alimentaires en hausse et une série d’augmentations d’impôts inspirés par l’Union européenne, les taux d’intérêt ont commencé à remonter à la fin de 2007.
64. La politique monétaire devrait contenir l’inflation dans ce cas, qui devrait être bien plus basse à 2,9% en 2009, alors que la croissance économique devrait retrouver tout son potentiel autour des 5% en 2009. Toutefois, une réduction du déficit des finances publiques demeure difficile: le déficit public pour 2007 était plus bas que celui attendu autour de 1,6% du PIB, malgré les augmentations des dépenses sociales. Pour 2008, les réformes entraînent un degré d’incertitude concernant les recettes et les dépenses, mais le déficit public devrait être de 1,5% en 2008 et de 1,3% en 2009. L’entrée prévue en 2010 dans la zone euro a été repoussée, et aucune échéance n’a été fixée. L’OCDE estime que plusieurs défis essentiels vont devoir être relevés: parvenir à la pleine mise en œuvre des plans de réforme, garantir la pérennité budgétaire dans un contexte de futures pressions démographiques et accroître l’offre de main-d’œuvre tout en améliorant l’éducation afin que les pénuries de main-d’œuvre et de compétences ne pénalisent pas le potentiel de croissance.
65. La Hongrie a été confrontée à une série de problèmes épineux, en particulier concernant les niveaux de dépenses publiques. Les coupes dans les dépenses, des augmentations d’impôts et une consommation privée en recul ont fait stagner la croissance à 1,3% en 2007, contre 3,9% l’année précédente, alors que, pendant ce temps, les prix à la consommation bondissaient de 8%. La production manufacturière est demeurée solide toutefois, les exportations ayant augmenté de plus de 14%, et la croissance économique globale devrait se reprendre durant 2008 et atteindre les 2%, puis les 3,1% en 2009, avec un recul de l’inflation à 6,3% cette année et à 3,7% l’an prochain, en partie du fait de hausses des taux d’intérêt directeurs.
66. Si l’on en croit les indicateurs, les exportations demeureront le principal moteur de la croissance, en stimulant l’investissement. Le principal défi demeure la réussite de la remise à plat des finances publiques, afin de donner davantage de marge de manœuvre pour abaisser les taxes et les prélèvements sociaux, ce qui faciliterait aussi la tâche des autorités monétaires. Le gouvernement prévoit actuellement que le déficit budgétaire devrait reculer de 9,3% en 2006 à 3,5% d’ici à 2009, ce qui faciliterait aussi la tâche des autorités monétaires. Parallèlement à des mesures destinées à réformer le marché du travail, qui devraient assécher le secteur gris de l’économie, tout cela devrait contribuer à stabiliser la croissance à plus long terme. L’OCDE a prévenu également qu’il convient d’éviter toute augmentation rapide des dépenses durant la période électorale précédant les prochaines élections, prévues en 2010.
67. En Fédération de Russie, la croissance, qui aurait dû se modérer en 2007, s’est accélérée du fait de forts investissements et de prix élevés des matières premières, pour atteindre 8,1%. Si l’incertitude concernant les prix de l’énergie rend toute prévision difficile, l’OCDE s’attend à ce que la croissance se ralentisse légèrement, pour descendre à 7,5% cette année, et à 6,5% en 2009. Une part essentielle de la récente performance de la Fédération de Russie a été la flambée des investissements, qui ont augmenté de 22% au cours du premier semestre de 2007, en particulier dans les secteurs de l’énergie et du bâtiment – et, si les investissements garderont le vent en poupe, ce niveau de croissance a cependant fort peu de chances de se maintenir.
68. La demande intérieure, qui a récemment été stimulée par des hausses de salaires et une expansion du crédit, devrait progresser fortement. Au cours des dernières années, la consommation des ménages a connu des augmentations à deux chiffres – ce qui explique que, si les volumes des exportations ont augmenté de 6,4% l’an dernier, ceux des importations ont, eux, augmenté de plus de 27,3%. Malheureusement, l’inflation a également flambé, atteignant peu ou prou 11,9% en 2007 et, selon les prévisions, devrait atteindre 13% cette année, bien au-dessus du plafond de la Banque centrale, fixé à 8%. Une croissance rapide de l’offre de monnaie, un assouplissement budgétaire ainsi que des hausses des prix des denrées alimentaires sont autant de facteurs qui contribuent à ce phénomène.
69. L’OCDE indique que le conflit au sein du gouvernement concernant la politique économique s’est avivé, certaines factions favorisant l’intensification de politiques industrielles incluant la création de nouvelles entités étatiques supplémentaires. Des pressions s’exercent aussi pour davantage d’investissement en interne par le Fonds national pour la sécurité sociale, un fonds souverain conçu à l’origine pour n’investir que dans des actifs étrangers, et le ministère de l’Economie a demandé une taxe à la valeur ajoutée pour stimuler la croissance, tout en étant, cependant, déterminé à limiter le coût budgétaire de nouvelles initiatives. Pour l’OCDE, les tentatives de modernisation et de diversification de l’économie russe se justifient, étant donné la forte volatilité et la stabilité moindre de la croissance qui caractérisent souvent des économies dépendantes des ressources naturelles. Mais l’OCDE tire la sonnette d’alarme à l’encontre de toute prolifération d’interventions coûteuses qui ne font guère qu’introduire des distorsions dans les marchés et que gaspiller des ressources, tout en sapant la pérennité budgétaire et en exacerbant la surchauffe et les pressions pour une véritable appréciation du rouble 
			(4) 
			Perspectives
économiques de l’OCDE, juin 2008.. La confiance des investisseurs sur le long terme dépendra donc essentiellement de réglementations du marché favorables à la concurrence et d’une réduction de l’intervention de l’Etat.
70. Pour l’OCDE, les prix des produits d’exportation en général, et du pétrole et du gaz en particulier, avec des flux entrants nets de capitaux, sont des éléments cruciaux pour que la demande intérieure russe ne perde pas du terrain. Or, ce sont aussi les éléments sur lesquels plane la plus grande incertitude pour l’avenir. L’OCDE estime que la Fédération de Russie aurait tout intérêt à combiner une politique budgétaire neutre avec une politique monétaire orientée plus fermement vers la stabilité des prix et la réforme structurelle pour accroître le potentiel de croissance.

4. Les questions de fond concernant les marchés financiers

4.1. Réglementation et supervision

71. Même si la crise du crédit a eu son origine aux Etats-Unis, et a été déclenchée en premier lieu par les prêts hypothécaires dits «subprimes», ses effets se sont rapidement propagés – dans tous les marchés financiers, et à tous les marchés de la planète. Cela a mis en lumière l’imbrication des marchés aujourd’hui, et a montré comment une série d’événements inattendus peut révéler des faiblesses où des lacunes dans le système, et, dans ce cas, aboutir à la faillite d’une banque régionale en Allemagne, d’une caisse d’épargne immobilière au Royaume-Uni, de banques d’investissement, de prêteurs hypothécaires et d’une société mondiale d’assurance aux Etats-Unis, et aux plusieurs milliards de dollars passés par profits et pertes par les grandes banques dans le monde entier. Tout le monde réclame une action, cela va de soi. Mais que faut-il faire?
72. Si l’on se penche spécifiquement sur l’origine des turbulences, l’OCDE indique que, si la «titrisation» du risque a permis un accès accru au crédit, elle a révélé en même temps des failles sérieuses. D’une part, il est possible qu’elle ait encouragé des abus dans les ventes d’hypothèques et autres crédits – un problème qui peut être réglé par une disposition de réglementation générale. Mais, par la suite, il y a également un manque d’information en ce qui concerne les points de concentration de ce risque dans le système, avec une série de questions: qui détient ces titres risqués? A cela s’ajoute une difficulté sérieuse d’évaluation de ce risque, et donc de réévaluation du prix des actifs concernés. C’est cette accumulation qui a abouti à ce que la situation actuelle se prolonge, et soit pleine d’incertitudes. Aujourd’hui encore, il est difficile de prédire dans combien de temps la situation se sera assainie et quelle sera l’étendue des pertes (les estimations de l’OCDE les évaluent entre 350 et 420 milliards de dollars, celles du FMI à 500 milliards de dollars). Et puisqu’on ne sait toujours pas qui détient quelle part de cette dette, la confiance mutuelle et la confiance dans le marché ont pâti. Du coup, le crédit n’est plus aussi largement distribué, les rumeurs et la spéculation vont bon train et même les institutions au-dessus de tout soupçon sont menacées.
73. L’OCDE suggère que, une fois bien compris les problèmes rencontrés, le cadre réglementaire entourant la titrisation devra faire l’objet d’une analyse approfondie dans le but d’améliorer la gestion de risque et de renforcer la transparence, pour voir s’il est possible, et dans ce cas comment, d’éviter sa défaillance à l’avenir.
74. Pour l’avenir précisément, l’OCDE estime qu’il pourrait être nécessaire de prendre une décision claire concernant quelles activités de «hors bilan», telles que la titrisation de dette de type subprime, doivent être autorisées. Mais, plus largement, comment peut-on garantir une meilleure réglementation des marchés, une supervision plus efficace? L’OCDE fait une série de suggestions:
  • premièrement, elle évoque la nécessité d’une mise à jour et d’une révision permanentes des réglementations financières, étant donné la rapidité avec laquelle les marchés évoluent et les nouveaux produits sont introduits. Cela devrait passer par un effort permanent pour rationaliser le système de supervision lui-même, de sorte qu’il demeure intégré, connecté aux régulateurs dans les autres pays et adapté au marché lui-même. L’OCDE note que le Canada prévoit une analyse réglementaire de l’ensemble de son système financier tous les cinq ans. Elle suggère par ailleurs que, pour ces analyses réglementaires, les décideurs politiques s’inspirent du cadre de Bâle, qui contient des normes acceptées que les régulateurs bancaires peuvent utiliser, en particulier lorsqu’ils créent des réglementations sur la part de fonds propres que les banques doivent cantonner pour se prémunir des risques financiers et opérationnels;
  • dans certains pays, il sera peut-être nécessaire d’introduire des dispositions réglementaires spécifiques pour empêcher les pratiques de prêt prédatrices et améliorer la qualité de l’information des emprunteurs. En outre, il serait bon d’examiner le niveau des frais et commissions qui peuvent être facturés – et se pencher par la même occasion sur les mesures à prendre pour les rendre plus transparents, et faire en sorte qu’ils soient bien compris;
  • les systèmes de garantie des clients ont tous besoin d’être modernisés: dans bon nombre des pays de l’OCDE, les sommes garanties disponibles sont aujourd’hui insuffisantes pour que les clients conservent leur confiance dans les institutions en cas de difficultés, et six membres de l’OCDE ne sont dotés d’aucun mécanisme. Les conséquences de cet état de fait ne sont ressorties que trop clairement récemment au Royaume-Uni, qui est doté d’un modeste système de garantie, et toute une série d’annonces d’urgence ont dû être faites pour tenter de consolider la confiance dans l’établissement de crédit immobilier Northern Rock;
  • le rôle des agences de notation devrait être revu; la tourmente que nous traversons actuellement a soulevé de nombreuses questions quant à leur efficacité en matière d’évaluation du risque, et sur le point de savoir s’il y a suffisamment de concurrence entre elles.
75. Il en va de l’intérêt de tous de parvenir à un bon environnement réglementaire. En tout état de cause, il en va de l’intérêt du secteur financier lui-même; et il est plus important que jamais pour les gouvernements de se doter d’une supervision attentive, alors qu’aujourd’hui les décideurs politiques doivent naviguer à vue entre «l’aléa moral» – la nécessité de ne pas récompenser les institutions qui ont failli, pour ne pas affaiblir l’intégralité du secteur en supprimant tout risque – et la menace de catastrophe pour des consommateurs en situation de détresse. Les pressions politiques que ce type de situation entraîne sont intenses, ce qui amène certains observateurs à se demander si, à une époque où les consommateurs disposent d’investissements privés substantiels, souvent accumulés sur incitation des pouvoirs publics, une banque ou une institution peut être autorisée à faire faillite? Si l’on en juge par la récente expérience américaine, en ajoutant les sauvetages de Bear Stearns, de Fannie Mae, de Freddy Mac et d’AIG, avec les propositions d’apport de 700 milliards de dollars pour que le Trésor américain rachète les actifs risqués et non liquides du secteur financier adossés à des garanties hypothécaires, il semble bien que cela ne soit pas une solution acceptable, du moins lorsqu’on craint un risque d’effondrement de l’ensemble du système et de graves conséquences pour l’économie réelle.

4.2. Education à la finance

76. Cette situation aboutit à un constat: il est d’autant plus important de former les consommateurs afin qu’ils comprennent mieux la finance, et c’est là un thème qui est prioritaire pour l’OCDE. L’évolution des marchés, d’une part, et les évolutions démographiques et sociales, d’autre part, font que les consommateurs sont de plus en plus exposés à des marchés financiers et à des produits complexes – par l’accession à la propriété, l’épargne, les régimes de pension privés, etc. Pourtant, les études menées dans les pays de l’OCDE montrent de manière persistante qu’ils sont peu familiarisés avec les finances – cela va depuis le fait de ne pas prendre conscience de la nécessité d’épargner à une compréhension insuffisante des produits dans lesquels les consommateurs investissent. Fait également préoccupant, il semble fort que les consommateurs tendent à surestimer leurs compétences en matière de finances, les plus vulnérables (groupes à faibles revenus et ayant fait peu d’études) étant ceux qui souvent donnent l’impression d’être les plus béotiens en la matière.
77. Cette situation pose d’importants défis sur le plan politique: comment faire en sorte que même des investisseurs théoriquement sophistiqués comprennent véritablement les risques financiers auxquels ils sont exposés, ou encore comment trouver les moyens de faire en sorte que les consommateurs les plus vulnérables puissent disposer d’un compte en banque (ce qui n’est toujours pas le cas pour 3% à 10% des populations des pays de l’OCDE). Ces défis sont d’autant plus criants pour les dirigeants des économies en développement.
78. Le projet de l’OCDE pour l’éducation à la finance, lancé en 2003, entend analyser les programmes mis en place dans ce domaine dans tous les pays de l’OCDE ainsi qu’un certain nombre de pays non membres sélectionnés, en étudier l’efficacité et apporter un soutien en matière de politique aux gouvernements et autres acteurs qui lancent ce type de programme. En 2005, la première grande étude internationale sur l’éducation à la finance a été publiée (Improving Financial Literacy); elle était assortie d’un ensemble de grands principes pour l’éducation et la sensibilisation à la finance, qui s’appuyaient sur les bonnes pratiques internationales. Ces grands principes promeuvent le rôle des principales parties prenantes (gouvernements, syndicats, institutions financières, employeurs, etc.) et recommandent d’agir dans un certain nombre de domaines, depuis l’épargne et la gestion de l’endettement jusqu’aux plans de retraite privés.
79. En 2006, les ministres des Finances des pays du G8 ont reconnu l’importance que revêt l’éducation à la finance et ont invité l’OCDE à poursuivre l’élaboration de principes directeurs sur ce thème. Les bonnes pratiques pour l’éducation à la finance dans le domaine des retraites privées et de l’assurance ont été publiées au printemps 2008. D’autres travaux sont menés sur la réglementation de la protection des consommateurs dans le domaine des marchés financiers, et plus particulièrement des pensions privées. Les principaux résultats de ces travaux sont les lignes directrices de l’OCDE sur la protection des droits des membres et des bénéficiaires, approuvées en 2004. Actuellement, l’Organisation s’intéresse plus spécialement aux questions relatives à l’éducation à la finance dans le domaine du crédit. L’urgence de cette éducation a été mise en évidence par les récents développements sur les marchés hypothécaires et les marchés du crédit, et notamment par la crise des subprimes. Un recueil de bonnes pratiques de l’OCDE sur l’éducation et la sensibilisation à la finance concernant le crédit sera achevé d’ici à la fin de 2008.
80. Comme les années précédentes, l’OCDE continue de promouvoir la coopération internationale en matière d’éducation à la finance. En 2008, elle est particulièrement active sur ce front, organisant trois conférences à haut niveau pour mettre en avant l’importance de l’éducation à la finance et les développements dans ce domaine (aux Etats-Unis en mai, au Mexique en juillet et en Indonésie en octobre). Pour renforcer les échanges d’informations et encourager la coopération entre les principaux acteurs internationaux de l’éducation à la finance, l’OCDE a aussi récemment mis en place le Réseau international d’éducation à la finance (International Network on Financial Education), plate-forme d’échange d’informations, y compris sur les bonnes pratiques nouvelles, ainsi qu’un Portail international de l’éducation à la finance (International Gateway for Financial Education) qui sert d’organe centralisé international pour les programmes et les questions d’éducation à la finance dans le monde entier.

4.3. La percée des fonds souverains

81. Les «fonds souverains» sont essentiellement des véhicules d’investissement détenus ou contrôlés par les Etats qui sont alimentés par des réserves en devises ou d’autres biens comme les ressources naturelles. Le concept n’est pas nouveau (le premier fonds souverain a été le Kuwait Investment Authority, créé en 1953, bien que le Koweït ne soit devenu un Etat souverain qu’en 1961); ce qui est nouveau, c’est la rapide croissance de ces fonds, tant en nombre qu’en taille. Au cours des cinq dernières années, la Chine, la Russie, le Qatar, l’Australie, la Corée et le Venezuela ont chacun créé leur propre fonds souverain. Les nouveaux fonds gèrent au total, selon des estimations, 3 000 milliards de dollars, dont près de la moitié détenue par des pays qui sont des exportateurs importants de pétrole et de gaz. Alors que l’accumulation mondiale de réserves tourne autour de 1 000 milliards de dollars chaque année, et qu’il est vraisemblable que d’autres fonds vont être créés dans un proche avenir, ce type de véhicule d’investissement est appelé à prendre de plus en plus d’importance sur les marchés financiers.
82. D’après les données du Peterson Institute for International Economics (données fin 2007 ou les plus récentes disponibles) 
			(5) 
			Edwin M. Truman, The Rise of Sovereign Wealth Funds: Impacts
on US Foreign Policy and Economic Interests, témoignage
devant la Commission des affaires étrangères, Chambre des représentants
des EtatsUnis, Washington, 21 mai 2008., les dix fonds souverains les plus importants sont les suivants:
82.1. Abu Dhabi Investment Authority and Council, Abou Dhabi, UAE (1976): 500-875 milliards de dollars des Etats-Unis;
82.2. Government Pension Fund Global, Norvège (1990): 375 milliards de dollars;
82.3. Government Investment Corporation, Singapour (1981): 200-330 milliards de dollars;
82.4. Kuwait Investment Authority (1953), Koweït: 213 milliards de dollars;
82.5. China Investment Corporation (2007), Chine: 200 milliards de dollars;
82.6. Reserve Fund, Fédération de Russie (2008): 128 milliards de dollars;
82.7. Temasek Holdings, Singapour (1974): 110 milliards de dollars;
82.8. Investment Corporation of Dubai, UAE (2006): 82 milliards de dollars;
82.9. Qatar Investment Authority (2005), Qatar: 60 milliards de dollars;
82.10. Libyan Investment Authority (2006), Libye: 50 milliards de dollars.
83. Il est difficile de se faire une idée précise des avoirs de ces fonds. Chacun d’entre eux est géré selon ses propres règles, certains plaçant une partie de leurs avoirs en actifs nationaux ou dédiés à l’investissement national, d’autre détenant des actifs compris dans les réserves gouvernementales. Le plus gros par la taille, cependant, est sans l’ombre d’un doute le fonds souverain de l’Autorité d’investissement d’Abou Dhabi, avec des avoirs d’environ un tiers du total de tous les fonds souverains, suivi par celui de la Norvège, et par celui de Singapour. Parmi les fonds récents, le plus gros par la taille est le fonds de la China Investment Corporation. Le fonds de stabilisation de la Fédération de Russie a été divisé entre un fonds national de protection sociale et un fonds de réserve, avec des avoirs s’élevant respectivement à 32 et 128 milliards de dollars. Bien que le fonds chinois soit conçu pour gérer des actifs d’environ 200 milliards de dollars, la majeure partie de ce montant doit être investie pour recapitaliser les banques chinoises, et il reste uniquement 66 milliards de dollars disponibles pour l’investissement international.
84. Au cours des dernières années, à mesure que ces fonds prenaient de l’importance et étaient gérés de manière plus active, leur impact est devenu plus visible. Les fonds souverains ont montré une tendance à privilégier les types d’investissements de grande qualité, à revenu fixe, ce qui, d’un commun avis, a abouti à un abaissement général des taux d’intérêt à long terme. Maintenant, alors que l’on commence à voir ces fonds changer de politique d’investissement, ces taux d’intérêt pourraient remonter. Les fonds souverains domiciliés dans les pays de l’OCDE ont adopté une approche prudente – mais faisant intervenir des portefeuilles d’actions extrêmement dispersés ainsi que des titres à revenu fixe. Dans les pays émergents, les fonds souverains investissent depuis quelque temps une partie de leurs portefeuilles dans des supports d’investissement alternatifs, notamment l’immobilier et les private equity. Si les investissements de ces fonds sont réorientés sur le marché des titres, les prix des actions devraient être tirés à la hausse. Tout mouvement de ce type sera particulièrement prononcé sur les marchés émergents, où l’on pense que les fonds souverains ont placé une bonne part de leurs actifs, et où l’on manque relativement d’autres investisseurs.
85. Sur les marchés développés, les fonds souverains ont commencé à faire les gros titres avec une série d’investissements annoncés, ou en discussion, dans des activités à haut profil. En particulier, ils ont pris des participations dans les banques qui ont le plus besoin de liquidités: fin janvier, ces investissements ont dépassé les 60 milliards de dollars, 20 milliards de dollars ayant été investis dans les seules banques CitiGroup et Merrill Lynch. Ils se concentrent également sur les capitaux privés, le fonds d’Abou Dhabi investissant dans le groupe Carlyle, et le groupe britannique Apax ayant vendu une participation de 10% à un syndicat de fonds. En outre, certains signes laissent à penser que les entreprises de gestion financière privée vont de plus en plus se tourner vers les fonds souverains pour trouver un financement. En février, Guy Hands du groupe Terra Firma a déclaré que, les banques étant incapables de souscrire des méga-contrats, il va falloir commencer à lever des fonds auprès des fonds de pension, les fonds souverains et même sur les marchés mondiaux de devises 
			(6) 
			Voir
le site http://business.timesonline.co.uk/tol/business/industry_sectors/
banking_and_finance/article3446062.ece.. Les fonds souverains et les fonds de pension sont depuis longtemps les principaux investisseurs dans les private equity. La nouveauté est qu’ils semblent monter dans la chaîne de valeur, avec des prises de participation dans les sociétés de gestion et, de plus en plus, la poursuite de stratégies d’investissement propres.
86. La logique commerciale de cette évolution est indéniable, et les fonds souverains peuvent apporter d’importants bénéfices aux marchés internationaux; de fait, ils ont contribué à la stabilité au cours de la récente période de volatilité par des sources d’investissements étrangers qui faisaient cruellement défaut à bon nombre de pays de l’OCDE. D’après le rapport d’avril 2008 de l’OCDE sur les fonds souverains et les politiques des pays, les fonds souverains aident à recycler l’épargne au niveau international et affichent dans l’ensemble un bon bilan en tant qu’investisseurs à long terme; ils contribuent au développement économique des pays d’origine et, dans les pays d’accueil, entraînent les effets positifs qui sont généralement associés aux investissements étrangers, notamment en stimulant l’activité commerciale et la création d’emplois. Toutefois, l’OCDE admet que le rôle croissant des fonds souverains soulève des questions, en particulier celle du bon fonctionnement des marchés financiers et les préoccupations légitimes des pays d’accueil quant à la protection de la sécurité nationale. L’OCDE reconnaît que le problème est aggravé par un manque de transparence et souligne que, quand de nouveaux acteurs apparaissent sur la scène financière internationale, les protagonistes doivent apprendre à se connaître.
87. Une telle situation est à l’évidence incompatible avec un environnement commercial où la pratique de la bonne gouvernance est une part cruciale du développement social. Le fonds norvégien est largement reconnu comme un modèle réussi de transparence; il s’est doté d’un code de conduite public, publie son processus de gouvernance tout comme sa stratégie d’investissement et garantit que ses opérations feront l’objet d’un reporting ouvert et accessible. Parmi les gros fonds souverains en dehors de la zone de l’OCDE, le fonds Temasek Holdings est sans doute celui qui présente le plus haut degré de transparence. Le fonds du Koweït, lui aussi, déploie des efforts significatifs pour parvenir à la transparence, et il semble que d’autres fonds tiennent compte de ces préoccupations.
88. Il convient de faire preuve d’équité dans les attentes vis-à-vis des fonds souverains. En d’autres termes, les normes en matière de divulgation doivent matérialiser des attentes comparables pour des investisseurs comparables et répondre aux besoins divers (et parfois antagoniques) des individus et des organisations touchés par les opérations des fonds souverains (par exemple les gouvernements hôtes, les investisseurs, les autres parties prenantes et les citoyens des pays d’origine). Certains arguments militent pour assujettir les fonds souverains aux mêmes obligations de divulgation que d’autres entités commerciales, par exemple pour ce qui est de révéler qui sont les partenaires et co-investisseurs. Mais l’OCDE signale que se mettre à privilégier le protectionnisme des investissements risque d’être contre-productif, en particulier actuellement. Il y va donc de l’intérêt des fonds souverains comme des bénéficiaires potentiels des investissements de parvenir à s’entendre sur des pratiques et les normes de fonctionnement – et l’OCDE est l’un des organismes internationaux qui s’occupent aujourd’hui de cette question.
89. A la suite d’une demande des ministres des Finances du G7 et d’autres membres de l’OCDE en octobre 2007, les pays de l’OCDE et leurs partenaires s’efforcent maintenant de répondre à ces préoccupations sans imposer de restrictions inutiles aux investissements internationaux.
90. L’OCDE souhaite éviter toute réaction discriminatoire à l’encontre d’investissements contrôlés par des gouvernements étrangers, et reste engagée à long terme en faveur de la promotion de la liberté de l’investissement (par exemple par le biais de ses Codes de libéralisation et de l’Instrument de traitement national dans la Déclaration sur l’investissement international et les entreprises multinationales).
91. Des représentants des pays de l’OCDE et leurs partenaires non membres de cette organisation travaillent donc actuellement à veiller à ce que les réponses politiques aux préoccupations de sécurité nationale soient cohérentes avec les accords nationaux existants, et que toute restriction aux investissements réponde aux principes de proportionnalité, de transparence, de prévisibilité et de responsabilisation. Jusqu’ici, l’OCDE a examiné des mesures d’investissement actuellement utilisées par les gouvernements et identifié un ensemble de principes fondamentaux pour minimiser leur impact sur les activités légitimes.
92. Entre-temps, les fonds souverains eux-mêmes sont encouragés à améliorer leur gouvernance et leur transparence afin que leurs activités soient mieux acceptées. Cela devrait contribuer à répondre aux soupçons que leurs stratégies d’investissement pourraient être autant politiques que commerciales – et leurs activités nuisibles, non seulement en termes de contrôle externe, mais aussi pour le fonctionnement de marchés locaux efficaces.
93. Il semble bien que ce débat public soit effectivement en train de modifier les comportements des fonds souverains. La Société d’investissement de la Chine a récemment confirmé qu’elle élabore actuellement une charte de principes, indiquant qu’elle sera gérée selon des principes commerciaux et indépendante du gouvernement. En mars, le secrétaire américain du Trésor a rencontré des représentants d’Abou Dhabi et de Singapour, qui ont confirmé que leurs fonds refuseraient «les objectifs liés à des considérations géopolitiques». Ils ont accepté d’accroître les éléments mis à disposition du public dans des domaines tels que leur objet social, leurs objectifs et leur retour sur investissement – et de mettre en place des contrôles des risques serrés, ainsi que de respecter les obligations réglementaires et de divulgation des pays dans lesquels ils investissent. Dans les termes mêmes du secrétaire américain au Trésor, les Etats-Unis se réjouissent de recevoir des investissements de fonds souverains et entendent continuer à travailler avec ces deux pays et d’autres pour soutenir les initiatives en cours au FMI et à l’OCDE en vue de développer les meilleures pratiques pour les fonds souverains et les pays où ces derniers investissent.
94. La Commission européenne aussi propose actuellement un ensemble de principes pour la transparence, la prévisibilité et la responsabilisation qui pourraient s’appliquer aux fonds comme aux pays donateurs et bénéficiaires. Concrètement, cela pourrait prendre la forme d’une déclaration annuelle des investissements et actifs d’un fonds, de détails sur la taille de ses ressources et d’informations sur les droits de vote éventuels qu’il exerce. Le Président de la Commission a souligné que celle-ci ne peut pas permettre à des fonds non européens d’être gérés de manière opaque ou utilisés comme outil de stratégie géopolitique, même si les fonds souverains apportent des investissements bienvenus et ne doivent pas être considérés comme un grand méchant loup prêt à tout dévorer. S’exprimant à Oslo, il a comparé le fonds de la Norvège à «l’étalon or», ajoutant qu’il aimerait bien que d’autres s’inspirent de l’exemple de ce fonds et suivent les normes rigoureuses appliquées par ce dernier.
95. L’OCDE indique que, par le canal de son Comité d’investissement, les pays membres et les autres gouvernements participants s’efforceront, par un dialogue permanent et une surveillance renforcée par les pairs, d’aider tous les gouvernements à maintenir l’ouverture des marchés aux investisseurs internationaux tout en préservant la sécurité nationale. L’OCDE continuera également à coordonner ses travaux avec ceux du Fonds monétaire international et de la Commission européenne. C’est pourquoi, à ce stade, il semble probable qu’à terme il soit possible de convenir de pratiques de fonctionnement raisonnables pour les fonds souverains, sans qu’il soit nécessaire de passer par une législation draconienne – tout le monde a, cela ne fait nul doute, intérêt à cela, et l’OCDE joue actuellement un rôle important pour veiller à concrétiser ce potentiel. Il est intéressant de noter que le secteur londonien du patrimoine privé, récemment confronté à certaines préoccupations similaires, a pris l’an dernier l’initiative d’introduire un code de conduite volontaire.

4.4. Les «private equity» et «hedge funds»

96. Il existe bien entendu des différences très nettes entre les modalités de travail dans le secteur de la «private equity» et dans celui des fonds souverains: le premier est, par exemple, ouvertement commercial dans ses activités, avec des partenaires connus et enregistrés, et ses investisseurs sont pour l’essentiel des personnes physiques fortunées, des fonds de pension et d’autres investisseurs institutionnels. C’est aussi un secteur très dépendant des évolutions des marchés financiers. Cependant, les sociétés de gestion de private equity, la transparence des fonds elle-même et le niveau de publicité sur les affaires qu’elles concluent ont donné lieu à des questions.
97. En fait, les fonds de gestion de capitaux privés, tels que les private equity et les hedge funds, ont vu leur taille s’accroître énormément ces dernières années – même s’ils restent très petits par rapport au secteur mondial des fonds commun de placement, et la grande majorité des acquisitions relèvent encore d’entreprises publiques. La division de l’OCDE chargée des questions des entreprises s’est penchée sur le rôle que ces investisseurs activistes peuvent jouer pour promouvoir la bonne gouvernance d’entreprise, et a cherché à savoir s’il existe une supervision efficace pour garantir que les conseils de direction et le management des entreprises poursuivent des objectifs qui vont dans l’intérêt des actionnaires et autres parties prenantes.
98. L’OCDE juge que leur rôle est en général positif. En exerçant les droits des actionnaires de manière proactive et éclairée (par exemple en s’informant de près sur la gestion et les stratégies d’entreprise, les politiques de dividendes et les plans d’acquisition), les capitaux peuvent être affectés de manière plus efficiente dans toute l’économie, ce qui permet de compenser le nombre de plus en plus important d’investisseurs institutionnels «passifs». L’OCDE indique que la performance des entreprises semble nettement s’améliorer après leur acquisition, et que l’impact sur l’emploi n’est pas négatif en soi, même si cet aspect mériterait que l’on s’y attarde. Il convient de noter, également, que les hedge funds ont récemment joué un rôle positif pour stabiliser les marchés mondiaux en rachetant de la dette qu’ils estimaient s’être dépréciée trop brutalement.
99. Ce type d’investisseurs est souvent accusé d’avoir une vision à court terme, de privilégier le retour rapide sur investissement plutôt que de se focaliser sur des stratégies à long terme créatrices de valeur. Mais l’OCDE signale que c’est l’absence même d’une direction stratégique de ce type qui rend souvent les entreprises vulnérables aux initiatives de ces groupes, de sorte que, même s’ils ont un horizon d’investissement limité, leurs objectifs ont des chances d’être compatibles avec une bonne gouvernance d’entreprise. Le Groupe directeur de l’OCDE pour la gouvernance d’entreprise estime que les questions de gouvernance d’entreprise entourant ces investisseurs sont déjà traitées convenablement dans les Principes de gouvernement d’entreprise de l’OCDE, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’élaborer un code international supplémentaire consacré spécialement à ces questions. Les principes traitent déjà de la transparence demandée aux investisseurs institutionnels et de la nécessité d’un marché transparent permettant un contrôle, questions souvent soulevées par les initiatives des hedge funds activistes et les rachats par des private equity. Leur application effective pourrait nécessiter des modifications de la réglementation dans certaines juridictions.
100. Il y a aussi place pour des codes par secteur. Ainsi, les Comités Walker au Royaume-Uni préconisent la publication d’informations semestrielles pour les sociétés en portefeuille appartenant aux sociétés de gestion de private equity, comme c’est déjà le cas pour les entreprises publiques. De plus, il est recommandé aux partenariats de private equity de publier davantage d’informations sur eux-mêmes à l’intention du public et pas seulement de leurs investisseurs. Il existe aussi un ensemble de principes relatifs au comportement des hedge funds, et notamment des normes concernant l’exercice par les hedge funds activistes des droits de vote attachés aux titres empruntés.
101. Certains jugent que ces mesures vont suffisamment loin pour faire taire les critiques, d’autres non, et le débat est loin d’être clos. De l’avis de l’OCDE, l’objectif essentiel des politiques dans ce domaine doit être de veiller à la tenue à jour du cadre réglementaire concernant des questions comme l’information sur l’actionnariat et les règles d’intégrité des marchés. Une plus grande transparence de la part de ces investisseurs activistes sur leurs opérations ne peut qu’aller dans ce sens.

5. Le point sur d’autres sujets d’intérêt

5.1. Les perspectives pour le cycle de Doha

102. Comme les marchés financiers mondiaux, le système de commerce mondial a connu une expansion considérable ces dernières années. Grâce en partie aux efforts du GATT, puis de l’OMC, l’expansion du commerce mondial a servi de locomotive de croissance, dont ont bénéficié à la fois les pays développés et les pays en développement. Et, comme le fait remarquer l’OCDE, en un temps d’incertitude mondiale, il est plus important que jamais que le libre-échange soit affirmé et, autant que faire se peut, étendu. Mais est-ce que cela est possible?
103. Les enjeux sont élevés. Si l’on en croit une analyse présentée pour discussion par certains économistes d’envergure mondiale dans le cadre du Consensus de Copenhague de 2008, la conclusion du cycle de Doha pourrait tout à fait augmenter le revenu mondial de 3 000 milliards de dollars par an, dont 80% iraient au monde en développement, ce qui constitue des dividendes particulièrement élevés. L’OCDE a estimé que les gains dans le secteur des services, exclu des négociations commerciales pendant de nombreuses années mais qui est désormais le secteur économique à la croissance la plus rapide, pourraient bien se monter à 500 milliards de dollars. En outre, elle estime qu’il est possible d’obtenir des gains supplémentaires de 100 milliards de dollars en cas de libéralisation totale des barrières tarifaires pour les produits industriels et les denrées agricoles – et encore autant si les pays pouvaient parvenir à un accord sur la facilitation des échanges. Les pays en développement seraient particulièrement gagnants, puisqu’ils bénéficieraient des deux tiers de ces gains. Et, spécifiquement, Doha constitue une opportunité de se débarrasser des distorsions qui font obstacle à la croissance dans les pays les plus pauvres. En partie du fait que les pays en développement n’étaient pas représentés dans les cycles de négociations antérieurs, les droits de douane sont bien plus lourds sur les produits émanant des pays en développement que ceux appliqués pour les produits de pays riches.
104. Le cycle de développement de Doha de l’OMC connaît des difficultés depuis plusieurs années. Des discussions entre les Etats-Unis et l’Union européenne ont fait la une, en particulier concernant l’agriculture, mais il y a également de nombreux autres domaines de préoccupation avec le groupe des économies émergentes, en particulier sur la réduction des barrières tarifaires. Ainsi, le Brésil est préoccupé par la perspective d’importation de produits manufacturés à bas coût, en particulier en provenance de Chine.
105. Vers le début de 2008, un certain nombre de signaux positifs ont été lancés. Après d’intenses négociations, dans son rapport au Conseil général de l’OMC le 5 février, Pascal Lamy a déclaré: «Nous sommes dans la dernière ligne droite des négociations, et avons entamé le sprint final pour établir les modalités. Je pense que nous sommes globalement d’accord sur l’urgence de ce que nous faisons, et sur les mesures de base que nous devons prendre pour parvenir à un accord.»
106. Des projets de position ont été diffusés, contenant une évaluation mesurée de ce sur quoi l’on pourrait s’entendre en matière de réduction des barrières tarifaires et des subventions, ainsi que les dispositions nécessaires pour concrétiser ces réductions, qui ont servi de base à un possible accord. L’OCDE pense qu’un accord est possible, d’autant que la hausse des prix des produits alimentaires devrait contribuer à apaiser les désaccords concernant les subventions agricoles. Mais elle insiste: aucun cycle commercial n’a jamais été aussi complexe, des concessions seront nécessaires de part et d’autre.
107. Désormais, le temps presse: car, à mesure que les difficultés économiques rendent un accord de plus en plus important, les concessions sont d’autant plus difficiles à accepter, et le passage de témoin à la présidence des Etats-Unis pourrait retarder un accord, à moins que ce dernier ne soit conclu très vite. Malheureusement, les participants à la réunion ministérielle convoquée par l’OMC en juillet ne sont pas parvenus à s’entendre. Le principal problème qui s’est posé était l’insistance avec laquelle l’Inde et la Chine exigeaient que leurs deux pays, mais aussi d’autres pays émergents et en développement se voient autorisés à imposer des tarifs douaniers de protection d’un niveau prohibitif si une vague d’importations agricoles en provenance de pays développés menaçait de submerger les producteurs locaux. Cette position a été rejetée par les Etats-Unis et d’autres pays producteurs de denrées agricoles, de sorte que les négociations ont échoué.
108. En l’absence d’accord, le risque est grand que le monde choisisse de plus en plus des accords bilatéraux et régionaux qui, du fait de leurs exclusions, feront le lit d’un protectionnisme subtil. Les Etats-Unis, par exemple, concluent en ce moment toute une série d’accords bilatéraux, en particulier en Amérique latine, alors qu’en Asie on parle d’un accord de libre-échange réservé à la seule APEC. L’OMC deviendrait alors de plus en plus un centre de différends, où le commerce mondial progresserait par le litige plutôt que par la législation. L’OCDE considère donc que le cycle de Doha est une politique d’assurance à peu de frais contre la résurgence du protectionnisme et des guerres commerciales, et invite vivement les intervenants clés à ne pas laisser passer le fruit à portée de leurs mains de l’architecture mondiale du commerce. Après l’échec des négociations ministérielles de juillet à l’OMC, le Secrétaire général de l’OCDE Angel Gurría, disant que ces négociations avaient ajouté des éléments significatifs à un ensemble de résultats finaux potentiels, a invité vivement les négociateurs à faire le dernier kilomètre sur la voie d’une conclusion réussie d’un accord commercial multilatéral, en particulier alors que l’économie mondiale montre des signes de faiblesse.

5.2. Vers une contraction mondiale du marché de l’énergie?

109. Ces dernières années, nombreux ont été ceux qui prédisaient une modération, voire un recul des cours de l’énergie; bien au contraire, ceux-ci n’ont fait qu’augmenter sans répit, alors même que la croissance mondiale voyait ses perspectives se restreindre. Comme on l’a vu, cet élément est, en soi, est l’un des facteurs clés derrière la morosité des perspectives économiques, et une cause majeure de pressions inflationnistes. Il est toutefois difficile à traiter, étant donné la myriade de raisons qui expliquent la hausse continue des prix, notamment du fait que ceux-ci s’ajustent au regard de la faiblesse du dollar, alors que les factures pétrolières et gazières sont libellées dans cette devise, mais également parce qu’ils reflètent une incertitude géopolitique notable et des préoccupations liées à la sécurité dans les régions du monde d’où provient, et proviendra à l’avenir, une très grande part de la production.
110. A ces facteurs viennent s’ajouter des problèmes récurrents de sous-investissement, comme le fait remarquer l’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’agence de l’énergie de l’OCDE. Des prix bas dans les années 1990, des difficultés politiques pour les investisseurs dans les pays producteurs et la difficulté d’exploiter des champs plus éloignés et inaccessibles expliquent le manque de nouveaux approvisionnements – alors que, en dépit de certaines améliorations dans la distribution, les transports et infrastructures sont encore insuffisants pour faire face aux nouveaux modèles géographiques d’activités économiques, et que des préoccupations écologiques ont contribué à une pénurie de nouvelles capacités pour l’extraction, le raffinage et la génération de courant dans les pays développés. Cependant, peut-être plus que tout autre facteur, la projection de l’offre et de la demande sur le long terme est sans doute l’élément qui tire les prix vers le haut – dans les conditions actuelles, le marché mondial de l’énergie devrait rester tendu dans un avenir prévisible. Cela pourrait représenter une énorme contrainte pour l’économie mondiale et le développement des économies émergentes, ainsi qu’être catastrophique sur le plan de l’environnement.
111. Selon l’AIE, si les gouvernements mondiaux persistent à suivre leurs politiques actuelles, les besoins en énergie de la planète augmenteront de plus de 50% d’ici à 2030. Dans son dernier numéro des Perspectives énergétiques mondiales, elle signale que, loin de décliner, cette tendance à la hausse a en fait augmenté l’an dernier. Et, si la consommation énergétique continue d’augmenter dans le monde, cette augmentation est d’autant plus nette en Chine et en Inde, deux pays sur lesquels le rapport de l’AIE se penche plus particulièrement. Dans ces pays, l’utilisation énergétique devrait plus que doubler entre 2005 et 2030, ce qui compense plus que largement toute tendance mondiale à s’orienter vers des énergies non fossiles, et la consommation de charbon est vraisemblablement celle qui va connaître l’augmentation la plus rapide, tirée en grande partie par la demande de génération d’électricité. De fait, les prix mondiaux du charbon ont pratiquement doublé récemment.
112. Sur cette base, les émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie vont augmenter de 57% entre 2005 et 2030, la Chine étant devenue vraisemblablement le plus gros émetteur de carbone au monde en 2007, et l’Inde devant s’en rapprocher en devenant, d’ici à 2015 environ, le troisième pays plus gros émetteur. D’ici à 2030, les émissions par tête de la Chine seront en passe de rattraper celles des membres européens de l’OCDE.
113. Dans le même temps, l’offre devrait rester limitée. Les pays consommateurs seront de plus en plus dépendants de leurs importations pétrolières et gazières, dont une grande partie provient du Moyen-Orient et de la Fédération de Russie, et les importations nettes de pétrole de la Chine et de l’Inde vont pratiquement quadrupler d’ici à 2030, et dépasseront les importations actuelles combinées des Etats-Unis et du Japon. La production mondiale de pétrole devrait se concentrer davantage dans un petit nombre de pays du Moyen-Orient, même s’il faudra des investissements supplémentaires pour garantir ce scénario. Et, bien que l’on s’attende à ce que la capacité de production des nouveaux gisements augmente au cours des cinq prochaines années, on ne sait vraiment pas si cela suffira à compenser le déclin de production dans les gisements en exploitation. C’est pourquoi l’AIE estime que, dans la période allant jusqu’à 2015, il n’est pas improbable que l’on assiste à une «contraction de l’offre», entraînant une escalade brutale des prix du pétrole.
114. Que peut-on faire face un scénario aussi alarmant? L’AIE indique que si les gouvernements mondiaux pouvaient mettre en œuvre les politiques qu’ils envisagent aujourd’hui, l’augmentation de la demande de pétrole d’ici à 2030 pourrait être réduite de 14 millions de barils par jour, soit l’équivalent de l’intégralité de la production actuelle des Etats-Unis, du Canada et du Mexique. Entretemps, les émissions de CO2 liées à l’énergie verraient leur niveau baisser dans les années 2020 et pourraient être inférieures de près de 20% aux prévisions d’ici à 2030. Pour l’AIE, l’élément clé est l’efficience énergétique, qui, pour elle, est le moyen le plus économique et le plus rapide de maîtriser la demande et les émissions, en particulier en Chine et en Inde. Ainsi, si la Chine adoptait des normes d’efficience plus strictes pour les climatiseurs et réfrigérateurs, d’ici à 2020, elle économiserait le volume de courant produit par le barrage des Trois-Gorges. Les émissions de polluants locaux dans les deux pays, notamment l’anhydride sulfureux et les oxydes d’azote, seraient également réduites de manière très sensible.
115. Mais, même dans ce cas, les émissions mondiales de CO2 auront augmenté de 25% d’ici à 2030. Dans son «Hypothèse de stabilisation à 450», des projections selon lesquelles il serait possible de stabiliser à long terme les gaz à effet de serre à environ 450 parties par million, l’AIE estime qu’il est possible que les émissions mondiales atteignent un pic en 2012 puis déclinent rapidement, passant en dessous des niveaux de 2005, d’ici à 2030. Les économies pourraient être attirées par une amélioration de l’efficience industrielle, les bâtiments et les transports, et par le passage au nucléaire et aux sources d’énergie renouvelable, ainsi que par l’utilisation généralisée de la capture et du stockage de CO2. Toutefois, l’AIE prévient qu’il serait nécessaire pour y parvenir que tous les pays agissent rapidement et vigoureusement sur le plan politique – et qu’il faudrait des avancées technologiques sans précédent, avec les coûts substantiels que cela entraîne. Et même ce modèle serait remis en question si la croissance économique était plus rapide que prévu.
116. Pendant la dernière génération, le monde développé – et en particulier le Japon – a rapidement progressé sur la voie d’une plus grande efficience dans son utilisation de l’énergie et d’une diversification de ses sources énergétiques. Si l’on veut relever les défis évoqués par l’AIE, à l’évidence il faudra poursuivre dans cette voie: mais, en outre, il sera nécessaire de se doter de technologie plus avancée, avec de nouvelles opportunités de marché, ainsi que de nouvelles formes de transfert de technologie, ce que l’on pourrait considérer parfois comme une générosité bien comprise. Pour les gouvernements de l’Europe, dont bon nombre ont montré la voie sur ces questions jusqu’ici, cette forme d’action devrait tomber sous le sens.
117. Lors de la publication du dernier rapport, Nobuo Tanaka, le nouveau directeur de l’AIE, a déclaré que les dix prochaines années seront cruciales pour tous les pays, y compris la Chine et l’Inde, du fait de la rapide extension de l’infrastructure d’offre d’énergie. Nous devons agir dès aujourd’hui pour amorcer une réorientation radicale des investissements en faveur de technologies plus propres, plus efficientes et plus sûres dans le domaine de l’énergie. Il a souligné combien les liens de l’agence avec la Chine et l’Inde sont importants, et a fait de la poursuite de l’amélioration de la coopération l’une de ses priorités – laissant entendre que ces deux pays pourraient, à terme, devenir membres de l’AIE.

5.3. Des solutions pour une planète sous pression

118. Jamais autant qu’aujourd’hui les questions d’approvisionnement énergétique et de protection de l’environnement n’auront été aussi inextricablement liées, et aussi difficiles à concilier. Répondre, d’une part, aux besoins en termes de réduction de la pauvreté, alors que les populations en croissance des pays en développement aspirent à des conditions de vie meilleures, tout en protégeant l’environnement, d’autre part, un facteur crucial pour tous, tel est vraisemblablement le plus grand défi que devra relever notre génération.
119. En mars, l’OCDE a publié ses Perspectives de l’environnement à l’horizon 2030, qui proposent une analyse des tendances économiques et environnementales, et explorent toute une gamme d’initiatives de politique destinées à traiter les problèmes de fond. Selon ce rapport, sans politiques nouvelles, nous risquons de causer des dommages irréversibles à notre environnement et à la base de ressources naturelles nécessaires pour soutenir la croissance économique et le bien-être. Cependant, il indique clairement que des solutions existent, et qu’elles sont tout à fait à notre portée, y compris sur le plan financier.
120. En ce qui concerne le changement climatique, le rapport se fait l’écho des conclusions de l’AIE. La situation devient de plus en plus urgente, le réchauffement climatique se fait déjà sentir et l’on s’accorde à dire qu’il est inévitable qu’il s’aggrave – même si nous avons encore un peu de temps pour éviter le pire de ses effets, qui devrait intervenir dans la seconde moitié de ce siècle. Les Perspectives de l’environnement de l’OCDE à l’horizon 2030 soulignent que les instruments du marché comme les taxes sur le carbone, les échanges de droits d’émission de carbone et la suppression des subventions à la consommation d’énergie sont déterminants pour lutter contre le changement climatique, parallèlement à d’autres instruments comme l’investissement dans les technologies propres. Le rapport signale que le PIB mondial devrait doubler d’ici à 2030, et tripler d’ici à 2050 – et qu’il n’en coûterait qu’environ 0,5% de ce PIB en 2030, et 2,5% en 2050 pour parvenir à stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre à 450 parties par million. Même si un nouveau rapport de l’OCDE, à paraître, fait des estimations des coûts encore plus élevées, il reste économiquement rationnel d’agir au plus tôt car les estimations du coût de l’inaction sont également révisées à la hausse. Soulignant que des politiques d’efficience fondées sur les technologies sont l’une des approches les moins coûteuses, et qu’elles seront d’autant plus efficaces si elles sont entamées immédiatement, avec la participation de tous les pays, le rapport Perspectives de l’environnement de l’OCDE à l’horizon 2030 préconise d’utiliser la mesure incitative consistant à fixer un prix mondial des émissions, qui commencerait à un peu plus de 2 dollars des Etats-Unis par tonne d’émission, et augmenterait progressivement pour dépasser les 150 dollars par tonne en 2050.
121. Le rapport analyse plusieurs domaines où les politiques environnementales et de l’énergie sont, ces dernières années, entrées en conflit. L’un des exemples qui ont fait couler beaucoup d’encre, pour ne parler que de lui, est celui des biocarburants, qui a bénéficié de 15 milliards de dollars de subventions en 2007 dans les pays de l’OCDE, mais dont l’utilisation est de plus en plus controversée, étant donné la pression qu’elle fait peser sur les forêts pluviales et les terrains agricoles. Dans un récent rapport de politique, l’OCDE et l’AIE suggéraient l’une et l’autre que les avantages vantés des biocarburants sont en fait moins intéressants qu’escompté, et que ceux qui se sont concrétisés sont loin d’être homogènes, étant donné l’absence de cadre réglementaire et de politique. Ce document indique qu’il est nécessaire de poursuivre les recherches sur le volet économique des biocarburants, et sur leur impact en général, préconisant en particulier des systèmes pour une meilleure certification et une meilleure mesure de l’intensité en carbone. Dans une approche prospective, ce document invite à étudier soigneusement le potentiel des biocarburants de deuxième génération qui commencent à être commercialisés, en particulier ceux qui peuvent être obtenus de sources autres que les récoltes végétales, par exemple les déchets animaliers. En attendant, il propose des recommandations de réformes politiques pour les gouvernements qui entendent concilier ces problématiques, en particulier dans le secteur du transport.
122. En outre, ce rapport traite des mesures nécessaires pour s’attaquer à l’inondation des côtes, et à la menace que cela entraîne pour de grandes villes, ainsi que sur les infrastructures dont elles dépendent; ensuite, il traite de toute une gamme de problèmes écologiques qui, tout en étant fréquemment associés aux changements climatiques, posent des défis de tous ordres aux décideurs politiques. Ainsi:
  • à mesure que la population mondiale augmentera et verra s’élever son niveau de vie, il faudra intensifier l’utilisation des terres agricoles d’environ 10% d’ici à 2030, si l’on maintient les politiques en vigueur en 2005. L’agriculture continuera donc d’être la principale source de contrainte sur la biodiversité – surtout si l’on tient compte des problèmes croissants de sécheresse et d’érosion des sols dus à la déforestation opérée pendant des années. L’OCDE indique qu’étant donné les politiques actuelles, cela aboutira à la perte des deux tiers des forêts matures en Asie du Sud-Est, d’un quart des forêts en Chine et en Afrique, et d’environ autant en Europe de l’Est et en Australie. Sans même parler des autres conséquences de la déforestation, cela accélérera la perte globale de biodiversité, que certains appellent déjà une «épidémie d’extinction». Ce phénomène a des répercussions graves à long terme pour l’agriculture et le secteur pharmaceutique, entre autres, surtout parce qu’il s’accompagne de la menace d’un effondrement des stocks halieutiques mondiaux, qui font craindre de graves pénuries alimentaires à l’avenir;
  • grâce aux mesures visant à réduire la pauvreté, les espérances de vie ne cessent d’augmenter; or, les répercussions négatives sur la santé de la dégradation de notre environnement se font de plus en plus sentir. La pollution de l’air s’aggrave. Actuellement, le nombre de décès prématurés par million de personnes du fait des pics d’ozone au sol devrait quadrupler d’ici à 2030, et celui des décès prématurés par million dus à des «particules fines» pourrait plus que doubler, pour dépasser les 3 millions par an;
  • d’ici à 2030, si l’on maintient les politiques actuelles, près de la moitié de la population mondiale sera confrontée à de graves problèmes d’eau – l’on parle ici de 3,9 milliards de personnes, contre 2,8 milliards aujourd’hui. La plupart d’entre eux seront dans les pays en développement – et, si environ deux tiers de la population du Brésil, de la Russie, de l’Inde et de la Chine connaissent actuellement des problèmes d’ampleur moyenne à grave d’approvisionnement en eau, ils seront 80% si ces pays ne se dotent pas de meilleurs systèmes de gestion des ressources hydriques.
123. L’OCDE admet qu’il n’y a pas de solution simple à des défis d’une telle ampleur. Toutefois, elle estime que l’application d’un ensemble de politiques peut produire un impact significatif, en particulier si l’on maîtrise les coûts en fondant la politique sur des instruments économiques et basés sur les fonctionnements de marché. Ainsi, elle estime que la pollution véhiculée par l’air pourrait être réduite d’un tiers si les investissements pour la réduction de gaz à effet de serre évoqués plus haut étaient opérés. Parmi les éléments entrant dans les mesures de politique qu’elle privilégie, l’OCDE préconise les taxes vertes, une tarification efficiente de l’eau, des systèmes d’échange d’émission et de pollueur-payeur, des redevances réalistes pour le traitement des déchets, ainsi que l’élimination des subventions nuisibles pour l’environnement telles que celles qui soutiennent les combustibles fossiles et l’agriculture. De telles initiatives doivent, bien entendu, se fonder sur un investissement conséquent dans les infrastructures, pour améliorer les services et leur fourniture, et devront être étayées par des avancées technologiques. Cela entraînera des réglementations et normes plus strictes, mais plus cohérentes, en particulier dans les secteurs du transport et du bâtiment, et encouragera l’investissement dans la recherche et le développement – bien que, pour ce dernier point, il faille auparavant traiter un certain nombre de questions de fond dans le domaine des droits de la propriété intellectuelle.
124. En outre, le rapport de l’OCDE identifie des moyens de mutualiser au niveau planétaire le coût de l’action politique. Il signale que les nations développées ont jusqu’ici été responsables de la majorité des émissions de gaz à effet de serre, mais que, d’ici à 2030, le total des émissions annuelles du Brésil, de la Fédération de Russie, de l’Inde et de la Chine dépassera celles de tous les pays membres de l’OCDE. Comme l’a indiqué le Secrétaire général de l’OCDE, qui s’exprimait à l’occasion du lancement du rapport, il faut comprendre que, pour améliorer notre environnement, il ne suffit pas de décider quoi faire et comment le faire, il faut également savoir qui va payer pour ça. Si tous les pays de la planète unissent leurs efforts, la facture globale sera moins élevée.
125. Le rapport de 2008 sur les perspectives de l’environnement s’intègre dans des travaux de plus grande ampleur menés dans ce domaine par l’OCDE, au nombre desquels l’on citera la réunion ministérielle annuelle de cette année du Conseil de l’OCDE, où le principal thème d’analyse a été l’élément économique du changement climatique, ainsi que le Forum 2008 de l’OCDE. Comme l’indiquait le Secrétaire général, l’OCDE entend développer un socle économique solide pour l’architecture post-Kyoto. Les travaux en cours de l’OCDE sur l’économie du changement climatique doivent apporter une contribution à la Conférence des Parties (COP) 14 de la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique qui sera organisée en Pologne en décembre 2008, et à la COP 15 organisée au Danemark en décembre 2009.

5.4. Stratégie pour l’innovation

126. Le Conseil ministériel de l’OCDE tenu en 2008 a examiné les progrès réalisés concernant la Stratégie pour l’innovation lancée en 2007, dont la finalité est d’améliorer la performance économique et la protection sociale. L’innovation est considérée comme un moyen essentiel pour réaliser ces objectifs. Il convient de comprendre précisément comment l’innovation contribue à ces fins et les systèmes d’innovation modernes fonctionnent dans la pratique. La Stratégie pour l’innovation vise à aider les responsables de l’élaboration des politiques à mettre l’innovation au service d’une croissance et d’un développement durables. Elle se propose d’apporter des éléments rationnels sur le caractère évolutif de l’innovation, les écosystèmes d’innovation et la performance de l’innovation, et de proposer des analyses et des bonnes pratiques en vue de promouvoir l’innovation, d’en rendre compte, de la mesurer et de l’évaluer. Les résultats attendus sont des approches stratégiques cohérentes de la part des pouvoirs publics; une innovation mieux ciblée pour aider à relever les défis mondiaux (comme le changement climatique, la santé et le développement économique); des moyens efficaces d’encourager la création et le renforcement du capital humain. Un rapport final sur la Stratégie pour l’innovation de l’OCDE sera présenté au Conseil ministériel en 2010.
127. Une réunion ministérielle sur l’avenir de l’internet a eu lieu les 17 et 18 juin à Séoul (Corée). Cette réunion, lors de laquelle la Secrétaire Générale adjointe du Conseil de l’Europe, Maud de Boer-Buquicchio, a prononcé une allocution, a appelé l’attention sur l’importance croissante de l’internet pour la croissance économique et la prospérité. A l’issue de la réunion, la Déclaration de Séoul sur le futur de l’économie internet a été adoptée par 39 pays et la Commission européenne 
			(7) 
			Voir
le site <a href='http://www.oecd.org/dataoecd/49/27/40839567.pdf'>http://www.oecd.org/dataoecd/49/27/40839567.pdf</a>..
128. Parmi les messages clés ayant émergé à l’issue de la réunion ministérielle de Séoul sur l’avenir de l’économie d’internet, on peut citer les suivants:
  • les politiques touchant internet ne doivent pas être envisagées comme des politiques sectorielles de petite envergure concernant les télécommunications, mais comme des politiques économiques à part entière reflétant le fait qu’internet est devenu une infrastructure économique fondamentale;
  • internet joue un rôle crucial dans le processus de créativité et d’innovation (en supprimant les obstacles, en élargissant la coopération et l’échange d’idées, autant d’éléments qui sont l’essence même de l’innovation). L’OCDE s’attachera à mieux comprendre ce phénomène, l’un des éléments clés de sa Stratégie pour l’innovation;
  • internet est riche de possibilités considérables pour traiter des défis sociétaux urgents (par exemple les TIC et l’environnement). Une conférence à haut niveau de l’OCDE sur cette question sera organisée en 2009 sous l’égide du Danemark en appui à la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (COP 15).

5.5. Accroître l’efficacité de l’aide au développement

129. Dans la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide, adoptée en mars 2005, les principaux pays donateurs et bénéficiaires de la planète se sont entendus pour réformer la manière dont l’aide était fournie et gérée. La déclaration prenait des engagements en vue d’harmoniser la fourniture de l’aide, en renforçant les stratégies de développement national, en éliminant la duplication des efforts, en simplifiant les politiques des donateurs et en convenant de critères communs et de mesures de performance. Globalement, cette déclaration vise à s’attaquer au défi peut-être le plus crucial pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement: augmenter la capacité des bénéficiaires à utiliser au mieux les nouvelles ressources, par un processus d’appropriation du changement par le pays.
130. L’OCDE soutient ces objectifs par le biais du Comité d’assistance au développement (le CAD), qui réunit les pays responsables de la plus grande part de l’aide publique et les principaux bénéficiaires, et travaille en partenariat avec des institutions internationales telles que la Banque mondiale. Le 14 février, le CAD a rendu publique la dernière édition de son rapport annuel sur la coopération au développement. Dans ce rapport, Richard Manning (président du CAD de juin 2003 à janvier 2008) a fait le bilan des 12 mesures de succès qu’il a établies en 2003. Le score ainsi obtenu montre que des progrès sont marqués, mais qu’il reste encore beaucoup à faire pour améliorer l’efficacité de l’aide et, notamment, de l’aide publique au développement (APD) apportée par les membres du CAD.
131. En 2007, l’APD totale apportée par les membres du CAD est tombé à 103,7 milliards de dollars, soit 8,4% de moins qu’en 2006. Ce recul n’était pas surprenant, puisque l’APD avait été exceptionnellement élevé en 2005 (107,1 milliards de dollars) et 2006 (104,4 milliards de dollars) en raison d’opérations d’envergure pour l’effacement de dette en faveur de l’Irak et du Nigeria. En dehors des aides d’allégement de la dette, l’APD portée au crédit des membres du CAD a augmenté de 2,4%, ce qui signifie que ces derniers sont en retard sur leurs engagements d’atteindre 130 milliards de dollars d’aide d’ici à 2010 (à prix constants de 2004). Bien que les engagements de l’Union européenne soient impressionnants, l’OCDE a critiqué la bureaucratie des efforts communautaires, qui ralentit en conséquence le rythme des dépenses des fonds de l’aide.
132. Mais, comme le note le rapport de 2007 sur la coopération au développement, mesurée en dollars de 2002, l’aide totale fournie a atteint 77,8 milliards de dollars. Même si, sur ce montant, quelque 7 milliards de dollars sont allés à l’Irak, le rapport considère que ce montant représente une réussite significative, respectant le premier des critères de référence fixés en 2002, puisque, pendant des années, ce chiffre tournait autour des 50 milliards de dollars. On note également que l’aide est mieux ciblée, la part de l’aide allant aux pays les plus pauvres de notre planète ayant augmenté de manière sensible, puisqu’elle est passée de 40% en 2002 à 46% en 2006 pour l’aide bilatérale, et de 47% à 49% sur la même période si l’on inclut l’aide multilatérale. Dans l’ensemble, le rapport juge que les pays donateurs comme les pays bénéficiaires ont fait des efforts considérables pour améliorer la qualité et l’efficacité de l’APD.
133. Une part plus importante qu’avant de l’aide n’est pas conditionnelle, et n’est donc pas limitée à l’achat de produits et services auprès du donateur. Les pays bénéficiaires ont donc gagné une plus grande indépendance en augmentant leurs dépenses en faveur des services publics, tels que la santé et l’éducation, et en augmentant leur propre part de contribution financière à des projets de développement. Dans ces secteurs, en particulier, la gestion s’est améliorée et l’on obtient de meilleurs résultats.
134. Toutefois, comme le rapporteur de l’an dernier l’avait fait remarquer, le gros des récentes augmentations de l’aide n’a pas été une «aide programmable»; au contraire, une bonne partie a été accordée sous forme d’allègement de la dette. Et si l’on pouvait se demander dans quelle mesure les stratégies actuellement appliquées récompensent une bonne gestion des projets, une bonne part du recul s’explique par le fait que les pays donateurs s’engagent davantage en faveur de pays en situation de fragilité ou sortant d’un conflit. Il convient également de noter que, si les besoins en aide humanitaire – en particulier dans le cas de catastrophes naturelles – ont augmenté ces dernières années seulement, l’on commence à voir des signes de lassitude chez les donateurs.
135. En outre, malgré les efforts du CAD et d’autres organisations, le secteur de l’aide demeure fragmenté. Avec plus de 280 donateurs (depuis l’Organisation de contrôle des sauterelles du désert pour l’Afrique de l’Est jusqu’au Centre international de la pomme de terre), et les économies émergentes elles-mêmes rejoignant de plus en plus les rangs des pays donateurs, il y a souvent risque de confusion dans les efforts internationaux. En moyenne, un pays bénéficiaire doit traiter avec 18 donateurs différents; ainsi, la Tanzanie a reçu 542 visites de donateurs en 2005, le Viêt Nam 791, et l’Inde a récemment limité à six le nombre des partenaires de l’aide avec qui elle travaille. Cependant, il semble que les pays donateurs prennent ce défi au sérieux: la Suède, par exemple, a récemment pris des mesures pour focaliser son aide, avec un système de «coopération déléguée» accordant une plus grande autonomie à la gestion sur le terrain.
136. Le CAD signale qu’une telle fragmentation coûte cher; les efforts de réduction des «coûts de transaction» entraînés par le fait de travailler ensemble – par exemple pour des études analytiques conjointes – sont actuellement inégaux, et il semble que cela permette d’économiser entre 12 et 80% des coûts. Il y a encore de la marge de manœuvre à ce stade, et il convient également d’améliorer la définition des projets: ainsi, les actions relevant de la «coopération technique» sont encore fortement hétérogènes d’un donateur à l’autre, ce qui rend extrêmement difficile la mesure des éventuels progrès pour mieux coordonner les efforts et favoriser la prise en main par le pays. Quoi qu’il en soit, il convient de poursuivre les efforts pour aligner l’aide sur les systèmes nationaux locaux, garantir l’équité et prévoir des priorités et processus de l’aide qui soient appropriés au contexte.
137. Faisant le point sur les progrès en ce qui concerne les Objectifs du Millénaire pour le développement, le rapport sur la coopération au développement indique être encore en attente d’une bonne partie des données statistiques finales qui sont nécessaires pour tirer des conclusions positives. Les progrès en matière de pauvreté sont encourageants, toutefois, et si les tendances actuelles se poursuivent, l’objectif dans ce domaine sera atteint avant 2015, grâce en particulier à la performance de la Chine et de l’Inde. Ces deux pays comptent encore cependant des centaines de millions de gens vivant en dessous du seuil de pauvreté. Et si l’on peut noter des progrès en accélération et encourageants concernant les autres objectifs, il est encore très peu probable que les Objectifs du Millénaire pour le développement soient atteints d’ici à 2015 dans bon nombre de pays et régions. L’Afrique subsaharienne, suivie par le Pacifique, se détachent comme les régions où l’on note le moins de progrès.
138. En outre, le rapport sur la coopération au développement expose une série de leçons tirées de l’expérience de l’examen par les pairs menée par le CAD. Le CAD a également publié un rapport de synthèse, Pour une gestion efficace de l’aide: 12 leçons à tirer de l’examen par les pairs du CAD, qui identifie des mesures communes apparaissant comme nécessaires pour améliorer la gestion et la fourniture de l’assistance au développement par les membres du CAD. Au vu de ce qui a marché dans le passé, ou qui a échoué, ces publications proposent des orientations pratiques, de première main, pour les pays donateurs comme pour les bénéficiaires.
139. Depuis la publication du rapport sur la coopération au développement, une large alliance de partenaires dans le développement – pays en développement et pays donateurs, économies émergentes, Nations Unies et institutions multilatérales, fonds mondiaux et organisations de la société civile – se sont réunis à l’occasion du 3e Forum à haut niveau sur l’efficacité de l’aide, organisé par l’OCDE et la Banque mondiale, sous l’égide du Gouvernement du Ghana, à Accra, du 2 au 4 septembre 2008. Les participants à ce forum ont adopté l’AAA (Accra Agenda for Action – Agenda d’Accra pour l’action), un ensemble de mesures destinées à progresser plus rapidement en vue d’atteindre les engagements de la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide. Dans le cadre de cet AAA, les pays en développement se sont engagés à prendre en main leur propre avenir, les pays donateurs à mieux se coordonner entre eux, et tous se sont engagés à rendre compte mutuellement, ainsi qu’à leurs citoyens. Les principales actions porteront sur quatre axes:
  • la productivité – les pays donateurs communiqueront des informations à leur pays partenaires trois à cinq ans avant pour ce qui concerne l’aide planifiée;
  • les systèmes nationaux – il faudra, de préférence, utiliser les systèmes nationaux des pays partenaires plutôt que les systèmes des donateurs;
  • la conditionnalité – les pays donateurs passeront de l’établissement de conditions prescriptives prévoyant quand et comment dépenser l’argent de l’aide à des conditions reposant sur les propres objectifs de développement du pays concerné;
  • la moindre utilisation des aides liées – les pays donateurs assoupliront les restrictions qui empêchent les pays en développement de se fournir en biens et services auprès de qui peut leur garantir la meilleure qualité au moindre prix.

«Aid for trade»

140. La Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide insiste sur le fait que, si l’on veut que l’aide soit efficace, il convient d’encourager les pays bénéficiaires à s’approprier les projets; ceux-ci peuvent être intégrés dans les systèmes et stratégies nationaux, et il convient d’harmoniser les efforts des donateurs. Cette approche est synthétisée dans le logo «aid for trade», les projets étant élaborés dans l’objectif précis d’aider les pays à faire davantage de commerce de manière à renforcer les perspectives de croissance et à réduire la pauvreté, et à tirer profit des opportunités créées par les accords de l’OMC. Globalement, sous ce vocable, on trouve des projets qui apportent un appui à la politique commerciale, à la réglementation et au développement, aux infrastructures liées au commerce, à la capacité de production et à l’ajustement lié au commerce. Cette approche prend de l’importance dans la plupart des programmes de donateurs, et a été réaffirmée par la Déclaration ministérielle de l’OMC en 2005 à Hong Kong. La plupart des grands donateurs ont mis ou vont mettre en place des secteurs institutionnels, des équipes spécialisées et des orientations en vue de rendre l’aid for trade plus efficace.
141. En 2006, l’OCDE et l’OMC ont lancé un système commun de monitoring qui se compose d’une supervision mondiale des flux d’aid for trade sur la base des données du système de l’OCDE pour le suivi des créditeurs, et un suivi des pays donateurs et partenaires, sous la forme d’autoévaluations. L’an dernier, les deux institutions ont publié le premier bilan global de l’activité d’aid for trade, présentant des données sur les flux mondiaux d’aid for trade, ainsi que des retours d’expérience de la part aussi bien de pays donateurs que de pays bénéficiaires. L’intérêt de ce système de suivi est qu’il permet de créer des incitations, grâce à une transparence accrue, pour davantage de supervision et un dialogue renforcé (par exemple en braquant un «projecteur» sur les progrès réalisés), en vue de favoriser les synergies entre le commerce et d’autres domaines de politiques économiques dans les pays en développement, ainsi que d’améliorer la cohérence de l’aid for trade avec les stratégies globales dans le domaine – ces deux éléments étant essentiels pour un partenariat efficace entre pays partenaires et pays donateurs. L’un des bons résultats – si ce n’est le meilleur jusqu’ici – de cette initiative est le dialogue renforcé autour du commerce. En d’autres termes, l’initiative a réuni les deux communautés (aide et politique commerciale) afin de les faire travailler plus étroitement et de manière plus cohérente ensemble, pour aider les pays en développement à tirer profit d’une croissance renforcée et une réduction de la pauvreté grâce à la participation au commerce mondial.
142. Entre 2002 et 2005, les donateurs ont engagé en moyenne 21,6 milliards de dollars par an en faveur des catégories de l’aide les plus étroitement associées au concept d’aid for trade. En 2006, le total des engagements pris en faveur de l’aid for trade par les donateurs bilatéraux et multilatéraux a augmenté de plus de 10% en termes réels, passant d’un flux annuel moyen de 20,8 milliards de dollars durant la période de référence 2002-2005 à 23 milliards de dollars en 2006. Une grande part de cette augmentation a été consacrée au financement de programmes régionaux d’aid for trade. Etant donné l’envergure des projets énormes d’infrastructures, l’aide destinée à soutenir les infrastructures économiques se taille naturellement la part du lion dans l’ensemble de l’aid for trade avec 12,2 milliards de dollars en 2006, soit une augmentation de 8,6% en termes réels par rapport à la période de référence 2002-2005. Les activités destinées à renforcer les capacités de production ont également augmenté en 2006, passant à 8,7 milliards de dollars, soit une hausse de 8,7%. L’assistance technique dans le domaine de la politique commerciale et des réglementations a augmenté de près de 60%, atteignant pratiquement un milliard de dollars en 2006. Il est intéressant de noter que, si le montant de l’aid for trade est en augmentation, sa part du budget total de l’aide accuse en réalité un léger recul, les donateurs mettant la priorité sur les projets sociaux. Mais, si le rythme récemment adopté de l’augmentation se maintient, cela permettra d’apporter 8 milliards de dollars supplémentaires par an d’ici à 2010, et les engagements totaux atteindront 30 milliards de dollars.
143. De grandes institutions multinationales et régionales, telles que la Banque mondiale et la Commission européenne, figurent parmi les principaux donateurs dans les projets d’aid for trade et apportent en général environ 50% de leur soutien sectoriel à des activités sur ce créneau. Parmi les pays donateurs, le Japon, l’Italie et le Danemark affichent les mêmes proportions. La ventilation régionale des engagements bilatéraux et multilatéraux en faveur de l’aid for trade montre que l’Asie et l’Afrique reçoivent la plus grande partie du total des flux pour ce type d’aide. Cela n’a rien de surprenant, l’Asie et l’Afrique étant les continents qui présentent la plus forte concentration de pauvres.
144. Le retour d’expérience inclus dans le rapport, tant de la part des pays donateurs que des pays bénéficiaires, suggère que l’aid for trade est extrêmement utile pour focaliser les ressources du développement. De plus en plus, les pays en développement choisissent de faire du commerce un élément constitutif de leur stratégie de développement. Et si bon nombre des défis rencontrés concernent en général le secteur du développement, l’un d’entre eux est remarquable: la dimension régionale. Les contraintes telles que l’insuffisance de cohérence des infrastructures d’un côté et de l’autre des frontières et la bureaucratie ont été fréquemment citées parmi les obstacles, et certains ont suggéré d’utiliser spécifiquement les organismes régionaux tels que l’ASEAN en tant que cadre permettant à ses membres de se hisser au niveau des normes techniques internationales et d’établir des systèmes d’information sur les marchés. Il y a également un besoin général de ressources pour moderniser les services des douanes, et pour l’amélioration de la formation et des compétences.
145. A ce stade, les résultats donnent trop peu d’informations pour pouvoir être réinjectés dans des améliorations de politique, mais le rapport OCDE/OMC devrait être mis à jour régulièrement et fournira, à terme, à la fois des données et des retours d’expériences sur les projets actuellement en cours. Il est à souhaiter que ce rapport stimule le développement, et, au fil du temps, permette d’établir une série spécifique de critères de bonne pratique. En outre, le prochain rapport devrait se concentrer sur l’amélioration de la qualité et de la présentation des chiffres globaux puisqu’il contiendra non seulement les engagements de financement pris par les pays donateurs, mais également le niveau réel de décaissements, qu’il va élaborer des meilleurs indicateurs de performance pour suivre les progrès des pays et qu’il va faire en sorte que les pays partenaires soient davantage impliqués.

5.6. Un engagement international pour lutter contre la corruption – dix ans déjà

146. En novembre 2007, l’OCDE a marqué le 10e anniversaire de la Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, également connue sous le nom de Convention de l’OCDE contre la corruption. Ses signataires – actuellement, l’ensemble des 30 pays membres de l’OCDE plus 7 autres gouvernements – se sont engagés à mettre en œuvre une série exhaustive de mesures légales, réglementaires et politiques conçues pour prévenir, repérer et poursuivre la corruption d’agents étrangers. La convention prévoit également la confiscation des pots-de-vin et de tout profit lié à la corruption. Toutes les parties conviennent également de travailler ensemble à faire en sorte que les objectifs de la convention soient atteints, par exemple par le recueil et le partage des preuves, et en facilitant l’extradition.
147. Cette convention a véritablement fait date dans la lutte contre la corruption, elle a contribué à mobiliser l’opinion publique mondiale et a placé l’OCDE en première ligne pour l’élaboration d’instruments et de protocoles de lutte contre la corruption. Comme pour le Conseil de l’Europe, un étroit partenaire dans ce domaine, pour l’OCDE la corruption est la principale menace pesant aujourd’hui sur la bonne gouvernance, la responsabilisation et un développement économique durable.
148. Et, plus que jamais, ce sont les économies émergentes de notre planète qui ont le plus à perdre de la corruption, puisqu’elles doivent souvent travailler par le biais de structures judiciaires impuissantes, avec une législation pénale incomplète et des mécanismes de contrôle administratif insuffisants. En outre, bon nombre d’entre elles doivent maintenant faire face à un volume de transactions internationales en rapide augmentation, à mesure que la mondialisation et des prix élevés des matières premières tirent une forte croissance, et alors que les efforts internationaux en faveur du développement augmentent tant en volume qu’en complexité.
149. Le Secrétaire général de l’OCDE a en fait décrit la corruption comme le «cancer de la mondialisation». S’exprimant lors des célébrations du 10e anniversaire, il a rendu hommage aux nouvelles lois anticorruption et aux sanctions plus dures introduites par bon nombre de pays au cours des dix dernières années, et s’est félicité de la coordination et la coopération internationales accrues. Mais il a averti que certains pays font encore de la résistance, et que la pression sur les gouvernements pour revenir aux pratiques antérieures est un risque toujours présent. La seule manière d’empêcher cela selon lui est de garantir que chacun joue selon les mêmes règles du jeu. Il a ajouté que nous avions besoin de mesures concrètes et, plus important, d’un engagement politique.
150. Mark Pieth, président du Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption, souligne que, bien que les efforts internationaux pour s’attaquer à ce fléau se soient intensifiés, le problème lui-même s’aggrave. Selon lui, cela s’explique en partie par le fait que des sommes plus importantes traversent les frontières, et aussi parce que la vigilance accrue aboutit à mettre au jour davantage d’affaires. La convention, cependant, a déjà eu un impact considérable qui peut se poursuivre puisque ses signataires figurent au nombre des grands exportateurs. Il signale que, il y a peu de temps encore, les pots-de-vin étaient déductibles des impôts dans plusieurs pays de l’OCDE!
151. Pour faire en sorte que tous les participants mettent en œuvre convenablement la convention, il est recouru à un strict suivi de la performance et à un examen par les pairs. Lors du premier cycle de l’examen, la législation est analysée, et, dans le deuxième, ce sont les procédures répressives qui sont évaluées. Lorsque le Groupe de travail sur la corruption estime qu’il y a des lacunes dans la législation ou dans son application, il formule des recommandations d’amélioration. A la fin de 2006, quelque 27 pays avaient été examinés, y compris tous ceux du G7. Les examens seront terminés pour les neuf pays restants courant 2008, et les rapports faisant suite à l’examen sont accessibles en ligne.
152. L’impact de cette transparence est évident: aujourd’hui, plus d’une centaine d’investigations sur le versement de pots-de-vin à l’étranger sont menées par les signataires de la convention. Comme l’explique Mark Pieth, il ne faut jamais sous-estimer le pouvoir de la pression par les pairs. Les gens, les collègues s’y intéressent, et les pays qui s’efforcent de justifier les pots-de-vin risquent de se retrouver en minorité, voire complètement isolés.
153. Pour étendre le champ d’application de la convention, l’OCDE invite vivement d’autres pays à y adhérer, notamment les économies émergentes, et les candidats à l’accession à l’OCDE sont encouragés à se soumettre à la première phase d’évaluation prévue dans la convention. Pour marquer le 10e anniversaire, les principes directeurs des conventions sont passés en revue, ainsi que les expériences de ceux qui les mettent en œuvre, toutes les parties prenantes au processus étant invitées à s’exprimer sur le sujet.
154. Au cours des dix dernières années, l’OCDE a élargi le champ de ses travaux dans ce domaine. Elle a élaboré toute une série d’outils et d’expertise dans la lutte contre la corruption, liés en particulier à la fiscalité, à la gouvernance et à l’intégrité du secteur public, à la gouvernance commerciale, aux crédits à l’exportation et à l’aide au développement. Mais elle reste focalisée sur la participation entre gouvernements, puisqu’il est crucial, dans la lutte contre la corruption, de mobiliser une véritable volonté politique.
155. Parmi ses principales initiatives, on citera la Recommandation du Conseil de l’OCDE de 2006 sur les pots-de-vin et les crédits à l’exportation bénéficiant d’un appui officiel, la production d’un Manuel de sensibilisation à la corruption à l’intention des contrôleurs des impôts, des Lignes directrices pour la gestion des conflits d’intérêts dans le service public et des Principes directeurs à l’intention des entreprises multinationales. Ces derniers couvrent des problèmes liés à l’éthique dans les affaires, à la divulgation d’informations internationales et à la transparence, et bénéficient de la participation de 39 gouvernements qui encouragent les sociétés locales à y adhérer. Un service de médiation est également prévu (déjà utilisé une centaine de fois). Plus récemment, les Principes pour renforcer l’intégrité dans les marchés publics ont été adoptés pour prévenir la corruption dans ce secteur.
156. En décembre, l’OCDE a été plébiscitée par Transparency International, la principale ONG internationale dans la lutte contre la corruption. Marc Pieth a été retenu comme l’un des deux lauréats du prix annuel de l’intégrité, tandis que le Service de l’OCDE contre la corruption a été nominé pour ses récents travaux avec l’Afrique du Sud. Au début de cette année, l’Afrique du Sud est devenue le premier pays africain à signer la Convention de l’OCDE contre la corruption, et a rejoint le Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption, dont elle est devenue le 37e membre.

5.7. Les progrès marqués par le projet de l’OCDE Objectif Croissance

157. Objectif Croissance est une publication annuelle de l’OCDE qui utilise des techniques de benchmarking comparatif pour étalonner la position de chacun des pays membres par rapport à une batterie d’indicateurs liés à la performance et à la politique économique. Lancée en 2005 en réaction à la divergence de plus en plus prononcée entre les taux de croissance et les niveaux de vie apparents entre membres de l’OCDE, elle vise à proposer des recommandations concrètes répondant aux besoins de pays spécifiques, et non à prendre la forme d’un indice de compétitivité.
158. L’an dernier, ce document fixait cinq priorités structurelles pour chaque pays membre, ainsi que pour l’Union européenne, afin d’améliorer le PIB par tête – un facteur qui, comme il ressortait de l’analyse du rapport précédent, est considéré par les auteurs comme représentatif du bienêtre matériel. Ces priorités visent à résoudre les problèmes posés par des politiques qui découragent l’efficience et la productivité – en particulier pour ce qui est des marchés de la main-d’œuvre et des produits, mais également concernant l’éducation, la santé et des services sociaux.
159. l’ensemble, le rapport conclut que les progrès ont été, dans le meilleur des cas, modérés. Il suggère que la reprise économique des quelques dernières années a, de manière générale, freiné l’élan en faveur des réformes, et si certains progrès ont été enregistrés sur la majeure partie des axes prioritaires, les changements restent limités. La plus grande activité a été enregistrée dans le domaine de la productivité de la main-d’œuvre, de nombreux pays ayant pris des mesures pour améliorer l’éducation et la formation, pour faciliter les contrôles à l’entrée et contrôles opérationnels sur les entreprises et réduire les distorsions de marché – même si l’agriculture demeure un secteur difficile. Mais pour ce qui concerne l’utilisation de la main-d’œuvre, beaucoup moins, semble-t-il, est prévu ou a été fait. Les réformes sur le droit du travail pour, par exemple, encourager les travailleurs âgés, proposer la flexibilité du travail ou libéraliser les négociations salariales ont été très insuffisantes. Seuls les secteurs du handicap et de la réforme du régime de sécurité sociale ont connu beaucoup de progrès, accompagnés de certaines mesures visant à encourager les femmes à retravailler. La taxation du travail est un domaine où les progrès ont été rapides.
160. C’est pourquoi, de l’avis de l’auteur, la grande majorité des priorités fixées par le rapport de l’an dernier restent valables. En Europe continentale, où les mesures visant à améliorer le marché de l’emploi représentent la majorité des priorités politiques, les progrès ont été modestes: l’Allemagne, par exemple, a réduit les charges sociales et introduit actuellement des réformes des soins de santé qui vont promouvoir l’efficience; en France, un train de mesures sur des réformes de l’emploi a été adopté par le patronat et les syndicats, et l’Italie a réduit la charge fiscale sur les salaires des employés peu formés. Mais la réglementation liée à l’emploi demeure un frein à la croissance, et le rapport signale que, en Espagne, en Grèce, en République tchèque, au Luxembourg et au Portugal, aucune action significative n’a été entreprise dans ce domaine. Dans d’autres régions, et en particulier dans les pays à faible revenu, augmenter la productivité demeure le défi principal, et c’est pourquoi, dans ces pays, l’accent est placé sur la libéralisation des marchés des produits et des services (il est intéressant de noter que cela vaut également pour le Japon et la Suisse). Les pays anglophones, quant à eux, tendent à afficher une bonne performance des marchés de l’emploi, mais ont tous un même souci: la nécessité de relever leurs niveaux de compétences.
161. Spécifiquement, il est intéressant de revenir sur certains des thèmes clés soulevés par le rapporteur de l’an dernier et d’analyser les progrès marqués dans un certain nombre des pays qui avaient été passés en revue à l’époque:
  • dans bon nombre des pays de l’OCDE, la tendance démographique est au vieillissement, et il faut donc des réformes pour améliorer les perspectives des travailleurs plus âgés, ainsi que pour remettre à plat les systèmes de sécurité sociale et de pensions. En Grèce et en Autriche, les pouvoirs publics sont en phase de consultations sur certaines des questions liées à la retraite qui avaient été soulevées dans le rapport de l’an dernier, alors que la Belgique n’a pris aucune mesure nouvelle excepté la mise en œuvre du Pacte de solidarité de 2005, et que les Pays-Bas ont décidé de ne pas étendre le contrôle d’aptitude au travail aux demandeurs de pensions d’invalidité de plus de 50 ans. Parallèlement, la Norvège s’oriente actuellement vers un départ à la retraite plus flexible, à partir de 62 ans, tandis que la Suède a annoncé des mesures visant à durcir les règles liées à la maladie et à l’invalidité;
  • l’amélioration des opportunités en matière d’éducation est également une priorité largement partagée: en Allemagne, les examens du secondaire sont désormais quasiment universels, alors que l’Australie a augmenté le financement pour le secondaire et ouvert de nouveaux établissements techniques d’enseignement supérieur, et que le Royaume-Uni relève l’âge minimal pour la scolarité obligatoire et élabore actuellement de nouveaux diplômes de formation professionnelle. Aucune action spécifique n’a été engagée en Italie, mais le Gouvernement de la Grèce a adopté une loi globale de réforme des universités, comme en France, aux termes de laquelle le financement des universités a été augmenté, tout comme leur autonomie, les droits de scolarité des étudiants n’ayant pas bougé. L’Autriche n’a pas augmenté les droits de scolarité pour l’enseignement de troisième cycle, en revanche elle prévoit des exonérations pour des personnes qui s’engagent dans un travail social;
  • bon nombre de pays se sont vu conseiller de relever les niveaux de concurrence et d’accès aux services dans les secteurs de réseaux tels que l’énergie et les télécommunications. L’Australie a annoncé l’entrée d’un nouvel opérateur national pour l’électricité et le gaz, tout en encourageant la privatisation de fournisseurs locaux; en Grèce, également, le régulateur du secteur de l’énergie a été renforcé, tandis que la libéralisation des marchés de l’électricité et du gaz est en cours. Les Pays-Bas vont, cette année, complètement séparer le capital des réseaux d’énergie de distribution et des compagnies de fourniture d’énergie, et des appels d’offres concurrentielles sont en cours d’introduction pour les transports publics.
162. Outre son exercice comparatif par rapport à des indices de référence, le rapport Objectif Croissance de cette année contient une série d’études spéciales:
  • la première d’entre elles impliquait de créer une base de données standardisée pour mesurer les heures de travail, afin d’analyser les écarts importants de temps de travail dans les différents pays de l’OCDE, qui vont de près de 2 400 heures par an en Corée à moins de 1400 heures aux Pays-Bas. L’étude suggère en particulier que ces variations expliquent une fraction significative de l’écart des niveaux de revenu par tête entre les Etats-Unis et l’Europe.

Aux Etats-Unis, en moyenne, les salariés travaillent 41 heures par semaine, selon l’étude, avec deux semaines de vacances par an, tandis que les Européens travaillent, eux, en moyenne 38 heures par semaine avec quatre semaines de congés. Cet écart s’explique pour environ la moitié par une semaine de travail plus courte en Europe, ainsi que des plafonds et réglementations obligatoires, qui ont un impact particulier sur les hommes. En outre, l’étude relève que les taux d’imposition marginale sont plus élevés en Europe qu’aux Etats-Unis et estime que cette disparité explique en partie la différence du nombre d’heures travaillées entre les Etats-Unis et les pays européens. En particulier, elle suggère que les taux d’imposition marginale plus élevés découragent tout particulièrement le deuxième membre de la famille salarié, le plus souvent la femme. Ce rapport indique par ailleurs qu’une plus forte syndicalisation entraîne des horaires de travail plus légers pour les hommes, et plus lourds pour les femmes. Bien entendu, les chiffres moyens indiqués cachent des situations très hétérogènes entre les pays européens, même s’il semble que le niveau du travail à temps partiel y soit pour beaucoup: les Pays-Bas sont, sur notre continent, le pays où cette forme de travail est le plus représentée au sein de la main-d'œuvre (près de 45%).

Si l’on regarde la situation dans son ensemble, il est frappant de constater combien les changements ont été profonds depuis les années 1970: à cette époque, les horaires de travail des Européens étaient beaucoup plus lourds que ceux des Américains. Les chiffres aux Etats-Unis sont demeurés relativement stables dans le temps, alors que, en moyenne, en Europe de l’Ouest, les horaires de travail ont reculé d’environ 25%, de sorte que les travailleurs américains sont repassés en tête depuis le début des années 1990. Il est intéressant également de noter que, pour l’OCDE, une bonne part de cette évolution peut être attribuée à des horaires de travail plus courts pour les employés à temps partiel, étant donné que les horaires des salariés à temps plein, par convention considérés comme le noyau dur de la main-d’œuvre, sont loin d’avoir autant diminué.

Cette analyse tendrait à suggérer que les pays européens disposent de deux mécanismes pour augmenter le temps de travail. D’une part, les travailleurs à temps partiel, notamment les femmes, pourraient être incités à travailler plus si certains pays (par exemple les Pays-Bas et l’Allemagne) abaissaient leurs taux d’imposition marginale – le rapport précisant cependant qu’il faudrait prendre en compte des répercussions sociales spécifiques. D’autre part, la réduction des réglementations et des plafonnements à l’emploi à temps plein, qui s’applique particulièrement aux hommes, aurait également une incidence significative. L’étude conclut qu’il se pourrait que les orientations politiques dans ces domaines soient dans de nombreux cas allées trop loin du point de vue social et, dans ces cas-là, les réformes sont susceptibles non seulement d’accroître le PIB par tête, mais aussi le bien-être général;

  • en outre, le rapport se penche sur les moyens d’améliorer l’investissement dans l’enseignement supérieur. Il signale que ce secteur est en général sous pression, du fait du nombre d’étudiants qui augmente rapidement, et qu’un financement public pour la quasi-gratuité ne se justifie pas de manière claire. Il remarque que les étudiants proviennent en majorité de milieux aisés, sont de plus en plus mobiles à l’international et qu’ils peuvent espérer, dans l’ensemble des pays de l’OCDE, une hausse de revenu de 30% à 100%. Le rapport suggère des mécanismes pour augmenter l’investissement, notamment des frais de scolarité plus élevés et la mise en place d’un mécanisme mixte de prêts et de bourses, tout en préservant l’égalité d’accès. Il ouvre également d’autres pistes de réformes, notamment plus d’autonomie dans la sélection des étudiants et la politique du personnel, le recours accru à une évaluation indépendante et un financement reposant sur les résultats à l’arrivée plus que sur les ressources en amont. De plus, il note que des programmes plus courts et plus diversifiés offrent un potentiel accru, puisqu’ils permettraient de réagir avec plus de souplesse aux besoins individuels de formation;
  • une autre étude analyse l’impact de la géographie économique et de l’abolition de la distance qui, pour certains, serait le fruit des nouvelles technologies et de la mondialisation. Le rapport conclut que, si les coûts des télécommunications ont chuté de manière remarquable, et si l’internet influe quelque peu, rien ne permet de dire clairement que le coût du transport des marchandises a reculé par rapport à leur prix. Dans l’ensemble, selon le rapport, l’impact de la distance sur la structure des échanges ne s’est pas atténué au fil du temps. De fait, la «distance par rapport au marché» continue d’affecter de manière significative le PIB par tête d’un pays – avec une pénalisation d’environ 10% pour des pays tels que l’Australie et la Nouvelle-Zélande, et une bonification de peut-être 6% pour des pays tels que la Belgique et les Pays-Bas. Dans le même temps, le rapport note que, lorsqu’un pays est largement doté de ressources naturelles, cela peut avoir une forte incidence sur le PIB par tête (autour de 8%, en estimations, pour la Norvège et de 2% pour l’Australie);
  • dans son étude finale, Objectif Croissance passe en revue la nature du commerce international des services et les niveaux actuels de réglementation intérieure. Le rapport signale que les services sont souvent à l’abri de la concurrence dans les économies de l’OCDE et que, malgré des tentatives de libéralisation de ce secteur, le commerce international des services a, au cours des dernières décennies, à peine augmenté par rapport au commerce de produits. Même si les barrières formelles aux services sont rares dans les pays de l’OCDE, le rapport signale une multitude de réglementations locales diverses, qui limitent l’entrée de prestataires étrangers et rendent plus difficile, et parfois hors de prix, le positionnement de prestataires nationaux sur des marchés étrangers.

163. Le rapport soutient le point de vue selon lequel si tous les pays de l’OCDE s’alignaient sur le niveau le plus léger de réglementations limitant les échanges, en s’inspirant de ce qui est pratiqué dans certains de ses pays membres comme l’Australie, le Canada et le Royaume-Uni, le niveau général du commerce de services pourrait augmenter en moyenne de 90%, et de 140% dans les pays où la réglementation est actuellement la plus lourde tels que l’Italie, la Hongrie et la Turquie. La hausse du PIB par tête entraînée par ces augmentations pourrait être de 2% en moyenne, et autour des 3% pour les pays les plus restrictifs actuellement. Et le rapport indique que le potentiel pourrait bien être encore plus prometteur, puisqu’une concurrence accrue pourrait consolider ces gains de manière dynamique en encourageant l’innovation.
164. Lors du Conseil ministériel tenu à Paris les 4 et 5 juin, les ministres de l’OCDE ont réaffirmé l’intérêt qu’ils portent aux travaux de l’OCDE sur l’économie politique de la réforme, s’appuyant sur des méthodes d’analyse comparative, fondée sur l’observation des faits, et d’examen par les pairs. Ils ont exprimé le souhait que l’OCDE poursuive ses analyses et intensifie son soutien aux gouvernements dans leur processus de réforme interne.
165. Pour citer le résumé établi par la présidente, la ministre française de l’Economie Christine Lagarde: «La présidente a présenté en introduction les stratégies de réforme qu’elle juge efficaces à la lumière de sa propre expérience en mettant l’accent sur le calendrier et la conduite simultanée des réformes. Le Mexique, la Slovénie et la Suède ont fait part de leur expérience de l’économie politique de la réforme des finances publiques et du marché du travail. A l’issue de discussions informelles, les ministres concluent qu’il est souvent utile de présenter un "ensemble" équilibré de réformes pour rallier l’adhésion du public et surmonter la résistance de groupes d’intérêts particuliers. Ils conviennent que des mécanismes consultatifs tels que des commissions ad hoc apportent une aide particulièrement précieuse à l’élaboration d’un programme de réforme ambitieux. Les ministres soulignent l’importance de relayer un message clair s’adressant directement aux citoyens de façon à faire mieux comprendre l’intérêt des réformes. Ils précisent que la manière d’aborder les réformes dépend du contexte national. Dans bien des cas, la constitution de larges coalitions au-delà d’une majorité politique peut être déterminante pour la réussite de leur mise en œuvre.»

5.8. Un nouvel élan en vue de l’élargissement de l’OCDE

166. Depuis sa fondation, l’OCDE prône la participation mondiale et l’ouverture aux pays non membres. A l’époque, les pays membres de l’OCDE représentaient la majeure partie du commerce et du PIB mondiaux, mais aujourd’hui, du fait de la mondialisation, cette position est bien entendu en train d’évoluer – bien que ses 30 membres produisent encore près de 60% des biens et services mondiaux. Depuis quelque temps déjà, l’OCDE s’est engagée dans un processus d’élargissement, et depuis la moitié des années 1990, six nouveaux membres ont été accueillis dans l’organisation. En mai 2007, ce processus est entré dans une nouvelle phase lorsque l’organisation a décidé d’inviter le Chili, l’Estonie, Israël, la Fédération de Russie et la Slovénie à entamer des discussions en vue de leur adhésion et a proposé un «engagement renforcé» en vue d’une possible adhésion du Brésil, de la Chine, de l’Inde, de l’Indonésie et de l’Afrique du Sud, en vue de détendre les relations de l’OCDE, y compris par le biais d’un engagement renforcé, avec certains pays et régions sélectionnés présentant un intérêt stratégique pour l’OCDE, la priorité étant donnée à l’Asie du Sud-Est.
167. Le processus d’adhésion est compliqué, et peut prendre beaucoup de temps, car il passe par des évaluations des politiques et cadre gouvernementaux des pays candidats, ainsi que de la façon dont ils s’accordent aux normes et références de l’OCDE. Les discussions avec les candidats à l’adhésion ont été lancées conformément aux feuilles de route de l’adhésion, établies par le Conseil de l’OCDE. La rapporteuse aimerait insister auprès de l’OCDE pour que l’organisation réserve l’accession à ceux de ces pays qui respectent pleinement la démocratie, les droits de l’homme et le droit international.
168. L’engagement renforcé, entre-temps, vise à obtenir la participation directe et active des membres potentiels aux travaux de l’organisation. Il se compose d’une série d’éléments variés, adaptés au pays considéré, et pouvant prendre la forme de participation à des comités, d’études économiques, d’adhésion à des instruments, d’intégration aux systèmes d’informations et de reporting statistique, d’examen par les pairs dans des secteurs spécifiques et autres initiatives de dialogue politique. Ce processus doit être mutuellement bénéfique, autrement dit apporter une assistance au partenaire dans l’engagement renforcé pour ce qui est de ses efforts en matière de réformes politiques, tout en renforçant également les travaux de l’OCDE. Il s’appuie sur les efforts substantiels de coopération déployés par l’OCDE ces dernières années, tels que le programme OCDE-Russie, lancé en 1996; en fait, aujourd’hui, l’OCDE compte 25 pays et économies non membres participant régulièrement aux activités de multiples comités et groupes de travail importants.

Commission chargée du rapport: commission des questions économiques et du développement.

Renvoi en commission: mandat permanent.

Projet de résolution adopté par la commission élargie le 30 septembre 2008.

Membres de la commission: M. Márton Braun (Président),

M. Robert Walter (Vice-Président), Mme Doris Barnett (Vice-Présidente), Mme Antigoni Papadopoulos (Vice-Présidente), MM. Ruhi Açikgöz, Ulrich Adam, Roberto Antonione, Robert Arrigo (remplaçante: Mme Marie-Louise Coleiro-Preca), Mme Veronika Bellmann, MM. Radu Mircea Berceanu, Vidar Bjørnstad, Luuk Blom (remplaçant: M. Tuur Elzinga), Predrag Bošković, Patrick Breen, Mme Anna Maria Carloni, M. Erol Aslan Cebeci, Mme Elvira Cortajarena Iturrioz, MM. Valeriu Cosarciuc, David Darchiashvili, Joan Albert Farré Santuré, Relu Fenechiu, Zahari Georgiev, Francis Grignon, Mme Arlette Grosskost (remplaçant: M. Alain Cousin), Mme Azra Hadžiahmetović, MM. Norbert Haupert, Stanislaw Huskowski, Ivan Ivanov, Igor Ivanovski, Jan Jambon, Miloš Jeftić, Mme Nataša Jovanović, MM. Antti Kaikkonen, Serhiy Klyuev, Albrecht Konečný, Bronislaw Korfanty, Anatoliy Korobeynikov, Ertuğrul Kumcuoğlu, Bob Laxton, Harald Leibrecht, Mme Anna Lilliehöök, MM. Arthur Loepfe, Denis MacShane, Yevhen Marmazov, Maximiano Martins, JeanPierre Masseret, Miloš Melčák, José Mendes Bota (remplaçant: M. Maximiano Martins), Mircea Mereută, Attila Mesterházy, Alejandro Muñoz Alonso, Mme Olga Nachtmannová, Mme Hermine Naghdalyan, M. Gebhard Negele, Mme Mirosława Nykiel (remplaçante: Mme Danuta Jazłowiecka), M. Mark Oaten, Mme Ganira Pashayeva (remplaçant: M. Sabir Hajiyev), Mme Marija Pejčinović-Burić, MM. Viktor Pleskachevskiy (remplaçant: M. Nikolay Tulaev), Claudio Podeschi, Jakob Presečnik, Maximilian Reimann, Roland Ries (remplaçant: Mme Josette Durrieu), Andrea Rigoni, Mme Maria de Belém Roseira, MM. Rafael Salas Machuca (remplaçant: Mme Maria del Carmen Quintanilla Barba), Giuseppe Saro, Mme Gitte Seeberg, MM. Samad Seyidov, Steingrímur J. Sigfússon, Leonid Slutsky, Serhiy Sobolev, Mme Aldona Staponkienė, MM. Christophe Steiner, Vjačeslavs Stepanenko, Vyacheslav Timchenko, Mme Arenca Trashani, Mme Ester Tuiksoo, MM. Miltiadis Varvitsiotis (remplaçant: M. Aristotelis Pavlidis), Oldřich Vojíř, Konstantinos Vrettos, Harm Evert Waalkens, Paul Wille, Mme Gisela Wurm, Mme Maryam Yazdanfar.

Canada: Sénateur Prud’homme Corée: Mme Song, Mme Bae Japon: Mme Kaneko

Mexique: M. Buganza Salmerón, sénateur Jiménez Macías, M. Soto Sánchez

Voir 33e séance, 1er octobre 2008 (adoption du projet de résolution amendé); et Résolution 1629.