Imprimer
Autres documents liés
Réponse à Recommandation | Doc. 11690 | 21 juillet 2008
Listes noires du Conseil de sécurité des Nations Unies et de l’Union européenne
1. Le Comité des Ministres
a porté la recommandation à l’attention des gouvernements des Etats membres,
qui pourront ainsi en tenir compte lorsqu’ils agissent dans le cadre
des Nations Unies ou, le cas échéant, de l’Union européenne.
2. Le Comité des Ministres à également sollicité les commentaires
du Comité des conseillers juridiques sur le droit international
public (CAHDI), du Comité d’experts sur le terrorisme (CODEXTER)
et du Comité directeur pour les droits de l’homme (CDDH). Leurs
avis, que le Comité des Ministres endosse entièrement, figurent
en annexe. L’Assemblée voudra bien s’y référer, pour y trouver des
indications détaillées sur les différentes initiatives entreprises.
Les questions soulevées par la recommandation sont constamment à
l’étude au Conseil de l’Europe, notamment au sein du CAHDI et du
CODEXTER. Ainsi, en 2004, une base de données restreinte a été établie
par le CAHDI contenant les contributions nationales des Etats membres
et observateurs dudit comité, ainsi que celle de l’Union européenne,
sur la mise en œuvre sur le plan national des sanctions des Nations
Unies en matière de lutte contre le terrorisme et de respect des
droits de l’homme. Quant au CODEXTER, il prend cette matière en
compte en assurant un suivi efficace de la «feuille de route» pour
la contribution du Conseil de l’Europe à la mise en œuvre de la
Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies.
3. D’une manière générale, le Comité des Ministres souligne l’importance
dans la lutte contre le terrorisme des sanctions ciblées contenues
dans les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies adoptées
en vertu du chapitre 7 de la Charte des Nations Unies, ainsi que
de la mise en œuvre de ces sanctions. Cela dit, le Comité des Ministres
réaffirme qu’il est essentiel que ces sanctions soient entourées
des garanties procédurales nécessaires, comme indiqué dans ses «Lignes
directrices sur les droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme»
du 11 juillet 2002. Le Comité des Ministres encourage tous les Etats
membres du Conseil de l’Europe à soutenir les efforts actuels visant
à améliorer encore le système international de sanctions ciblées,
notamment en ce qui concerne les procédures équitables et transparentes
pour l’inscription de personnes et d’entités sur les listes, pour
leur radiation de ces listes ainsi que pour l’octroi de dérogations
pour raisons humanitaires.
4. Le point de vue du Conseil de l’Europe est porté à l’attention
des Nations Unies et de l’Union européenne par des échanges réguliers
entre ces organisations et le CAHDI. Le Conseil de l’Europe tiendra
des échanges de vues avec ces organisations sur la relation entre
les sanctions ciblées et la conformité aux engagements relatifs
aux droits de l’homme, notamment après que la Cour de justice aura
rendu ses arrêts dans les différentes affaires concernant les sanctions
ciblées actuellement pendantes devant la Cour.
Annexe 1 – Avis du Comité des conseillers juridiques sur le droit international public (CAHDI)
(open)1. Le 6 février
2008, les Délégués des Ministres ont transmis au Comité des conseillers
juridiques sur le droit international public (CAHDI) la Recommandation 1824 (2008) de l’Assemblée pour information et commentaires éventuels
avant le 15 avril 2008. Les Délégués des Ministres ont également
transmis cette recommandation au Comité directeur pour les droits
de l’homme (CDDH) et au Comité d’experts sur le terrorisme (CODEXTER).
2. Le CAHDI a examiné la recommandation mentionnée cidessus et
adopté les commentaires suivants à sa 35e réunion (Strasbourg, 6-7
mars 2008), lesquels portent sur les aspects de la recommandation
relevant notamment du mandat du CAHDI (droit international public).
3. Dans la Recommandation
1824 (2008), l’Assemblée recommande au Comité des Ministres d’inviter:
a. le Conseil de sécurité des Nations Unies et le Conseil de l’Union européenne à réexaminer leurs régimes de sanctions ciblées et à mettre en œuvre des améliorations de fond et de procédure visant à préserver les droits fondamentaux individuels et la prééminence du droit, dans l’intérêt de la crédibilité de la lutte internationale contre le terrorisme, et notamment un mécanisme efficace et complet de recours contre les sanctions édictées par les organes des Nations Unies et de l’Union européenne;
b. les Etats membres du Conseil de l’Europe qui siègent, à titre permanent ou non, au Conseil de sécurité des Nations Unies, ou font partie de l’Union européenne, à user de toute urgence de leur influence au sein de ces instances internationales afin qu’elles améliorent leurs régimes respectifs de sanctions ciblées pour garantir le respect des droits de l’homme et de la prééminence du droit;
c. les Etats membres du Conseil de l’Europe qui siègent, à titre permanent ou non, au Conseil de sécurité des Nations Unies, ou font partie de l’Union européenne, à respecter les décisions de justice relatives à l’inscription sur les listes noires et à présenter les mesures mises en œuvre afin de mettre un terme aux irrégularités relevées dans le rapport de l’Assemblée.
4. A titre liminaire, le CAHDI souhaite souligner l’utilité du
système des sanctions ciblées qui doit être préservé et consolidé,
y compris par l’examen des possibilités d’amélioration supplémentaire.
Le comité note en outre que le Conseil de sécurité et l’Union européenne
suivent continuellement ces questions, au sujet desquelles d’importants
progrès ont été accomplis. Le comité souhaite également attirer
l’attention sur les dispositions pertinentes de la Charte des Nations
Unies, constituant le cadre juridique international de l’adoption
et des effets juridiques des sanctions des Nations Unies, et sur
le fait que les questions soulevées font actuellement l’objet d’un
litige, notamment dans le cadre des affaires Yassin
Abdullah Kadi c. Conseil de l’Union européenne et Commission des Communautés européennes et Yusuf
et Al Barakaat International Foundation c. Conseil de l’Union européenne
et Commission des Communautés européennes ,
pendantes devant la Cour de justice des Communautés européennes
et dans lesquelles l’avocat général Maduro a rendu ses conclusions
respectivement les 16 et 23 janvier 2008.
5. En ce qui concerne la recommandation mentionnée au paragraphe
3.a ci-dessus, le CAHDI souhaite rappeler
sa contribution à l’amélioration de la protection des droits de
l’homme dans le cadre du mécanisme de sanctions des Nations Unies
en rapport avec la lutte contre le terrorisme. Depuis mars 2004,
le comité examine la question de la relation entre, d’un côté, les
obligations des Etats de mettre en œuvre les résolutions du Conseil
de sécurité des Nations Unies sur le fondement desquelles les sanctions
sont adoptées, et de l’autre, les obligations de ces mêmes Etats
tirées des traités internationaux en matière de droits de l’homme, en
particulier la Convention européenne des droits de l’homme.
6. Il convient de souligner également que les délégations des
Etats membres et observateurs du CAHDI ont des échanges réguliers
avec les Nations Unies et l’Union européenne, notamment en ce que
les représentants de ces deux institutions participent régulièrement
aux réunions du comité.
7. En ce qui concerne la recommandation formulée au paragraphe
3.b ci-dessus, le CAHDI salue l’adoption
des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies 1730 (2006)
et 1735 (2006), lesquelles vont dans le sens d’une meilleure préservation,
par le mécanisme de sanctions des Nations Unies en matière de lutte
contre le terrorisme, des droits fondamentaux des individus et de
l’Etat de droit, nonobstant le besoin d’examiner les possibilités
d’améliorations supplémentaires. Le comité note également que des
améliorations ont été apportées dans le cadre des procédures de
l’Union européenne dans le but de renforcer les droits fondamentaux
des individus et l’Etat de droit.
8. Quant à la recommandation formulée au paragraphe 3.c cidessus, le CAHDI souhaite rappeler l’adoption
par le Comité des Ministres le 11 juillet 2002, lors de la 804e
réunion des Délégués des Ministres, des «Lignes directrices sur
les droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme», en particulier
le point XIV, qui dispose ceci:
«L’usage des biens appartenant à des personnes ou des organisations soupçonnées d’activités terroristes peut être suspendu ou limité, notamment par des mesures telles que le gel ou la saisie, par les autorités compétentes. Cette décision doit pouvoir faire l’objet d’un recours judiciaire par le ou les propriétaires des biens concernés.»
9. Le Comité souligne ensuite qu’il a initié, en 2004, l’établissement
d’une base de données restreinte contenant les contributions nationales
des Etats membres et observateurs du CAHDI, ainsi que celle de l’Union européenne,
à la mise en œuvre sur le plan national des sanctions des Nations
Unies en matière de lutte contre le terrorisme et au respect des
droits de l’homme. Cette base de données comprend notamment des informations
sur les décisions judiciaires nationales ou les pratiques étatiques
relatives à la relation entre des sanctions visant des personnes
et les droits fondamentaux de ces personnes.
10. Cette base de données permet également l’échange de bonnes
pratiques entre les Etats, allant dans le sens d’une lutte toujours
plus efficace contre le terrorisme et d’une protection des droits
de l’homme toujours plus étendue. En mars 2007, le CAHDI a autorisé
l’accès à la base de données au Comité du Conseil de sécurité, à
sa demande, créé par la résolution
1267 (1999) concernant Al-Qaida, les talibans et les personnes et
entités qui leur sont associées.
11. Enfin, le CAHDI poursuit sa réflexion et ses travaux dans
le domaine.
Annexe 2 – Avis du Comité d’experts sur le terrorisme (CODEXTER)
(open)1. Le 6 février
2008, les Délégués des Ministres ont transmis la Recommandation 1824 (2008) de l’Assemblée au Comité d’experts sur le terrorisme
(CODEXTER), pour information et commentaires éventuels avant le
15 avril 2008. Les Délégués des Ministres ont également transmis
cette recommandation au Comité des conseillers juridiques sur le
droit international public (CAHDI) et au Comité directeur pour les
droits de l’homme (CDDH).
2. Le CODEXTER a examiné la recommandation susmentionnée lors
de sa 14e réunion (Strasbourg, 7-9 avril 2008), ayant à l’esprit
les avis et les commentaires déjà rendus par le CAHDI et le CDDH,
et a adopté les commentaires suivants.
3. Tout d’abord, le CODEXTER souligne que le régime de sanctions
ciblées a été instauré par le Conseil de sécurité des Nations Unies
sur la base des dispositions pertinentes de la Charte des Nations
Unies, laquelle constitue le cadre juridique international de l’adoption
et des effets juridiques des sanctions, et apporte – en tant qu’important
et unique outil universel – une considérable valeur ajoutée à la
lutte internationale contre le terrorisme. Il doit être préservé
et consolidé conformément aux dispositions pertinentes susmentionnées
de la charte, notamment son article 25 et son chapitre VII, nonobstant
le besoin d’examiner les possibilités d’améliorations supplémentaires
visant à renforcer la crédibilité ainsi que l’efficacité du régime
de sanctions ciblées.
4. Dans le même temps, le CODEXTER souligne le besoin de maintenir
et de renforcer les principes des droits de l’homme et de l’Etat
de droit, lesquels sont nécessaires afin de protéger les droits
des individus listés, lorsque le régime de sanctions ciblées est
appliqué. A cet égard, le CODEXTER salue les améliorations significatives
qui ont déjà été introduites au travers de l’adoption des Résolutions 1730 (2006) et 1735 (2006) du Conseil de sécurité. Le CODEXTER insiste
également sur l’importance de mettre en œuvre et d’examiner les
possibilités d’améliorations supplémentaires du régime de sanctions
ciblées, y compris des procédures équitables et transparentes pour
l’inscription de personnes et d’entités sur les listes, pour leur
radiation de ces listes ainsi que pour l’octroi de dérogations pour
raisons humanitaires.
5. Le CODEXTER se félicite de la coopération constante du Conseil
de l’Europe avec le Comité du Conseil de sécurité créé par la Résolution 1267 (1999) concernant Al-Qaida, les talibans et les personnes et
entités qui leur sont associées. Le CODEXTER suit étroitement les
développements dans ce domaine, y compris les procédures judiciaires
pendantes concernant la mise en œuvre par l’Union européenne des
sanctions prises dans le cadre du régime de la Résolution 1267 (1999) .
6. De plus, le CODEXTER souhaite rappeler que, en tant qu’organisation
régionale, le Conseil de l’Europe s’est engagé à faciliter la mise
en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies,
à savoir les Résolutions
1267 (1999), 1373 (2001) et 1624 (2005), et la Stratégie antiterroriste
mondiale des Nations Unies dont le paragraphe 15 encourage le Comité
du Conseil de sécurité mentionné au paragraphe 5 à «continuer de
s’employer à renforcer l’efficacité de l’interdiction de voyager
prévue par le régime de sanctions de l’Organisation des Nations
Unies visant Al-Qaida, les talibans et les personnes et entités
qui leur sont associées, et pour s’assurer, à titre prioritaire,
du recours à des procédures équitables et transparentes pour l’inscription
de personnes et d’entités sur les listes du comité et pour leur
radiation de ces listes ainsi que pour l’octroi de dérogations pour
raisons humanitaires. A cet égard [la stratégie] encourage les Etats
à échanger des informations, notamment en diffusant largement les
notices spéciales Interpol-Nations Unies relatives aux personnes
visées par ce régime de sanctions».
7. A cet effet, le CODEXTER souhaite rappeler la Recommandation
CM/Rec(2007)1 du Comité des Ministres aux Etats membres relative
à la coopération contre le terrorisme entre le Conseil de l’Europe
et ses Etats membres, et l’Organisation internationale de police
criminelle (OIPC-Interpol). Le CODEXTER a évalué la mise en œuvre
de cette recommandation lors de sa réunion d’octobre 2007 sur la
base d’informations fournies par Interpol concernant l’utilisation
par les Etats membres du Conseil de l’Europe des outils d’Interpol contre
le terrorisme. A cette occasion, le CODEXTER a souligné l’importance
d’une utilisation régulière des outils et bases de données d’Interpol,
tels que mentionnés dans le paragraphe dispositif de la recommandation,
ainsi que des autres outils offerts par Interpol.
8. Le CODEXTER souhaite souligner l’importance de s’assurer d’un
suivi efficace de la «feuille de route» pour la contribution du
Conseil de l’Europe à la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste
mondiale des Nations Unies. La «feuille de route» a été préparée
lors de la réunion ad hoc des présidents des comités pertinents
du Conseil de l’Europe sur le terrorisme le 25 avril 2007 et transmise
par le Comité des Ministres aux comités intergouvernementaux et
aux organes de suivi pertinents le 20 juin 2007. Le CODEXTER revoit régulièrement
la mise en œuvre de la «feuille de route» conformément à sa mission
de coordination en matière de terrorisme.
9. Le CODEXTER salue l’entrée en vigueur le 1er mai 2008 de la
Convention du Conseil de l’Europe relative au blanchiment, au dépistage,
à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du
terrorisme (STCE no 198) et souligne l’importance de sa ratification,
ainsi que de celles de la Convention du Conseil de l’Europe pour
la répression du terrorisme (STE no 090) et du protocole portant
amendement à la Convention européenne pour la répression du terrorisme,
dès que possible.
10. Le CODEXTER souligne également l’importance de poursuivre
l’action du Conseil de l’Europe contre le terrorisme, en fournissant
un forum de coordination afin de discuter et d’adopter des normes
régionales et de bonnes pratiques, ainsi qu’en fournissant une aide
à ses Etats membres afin qu’ils améliorent leurs capacités de lutte
contre le terrorisme.
Annexe 3 – Avis du Comité directeur pour les droits de l’homme (CDDH)
(open)1. Le Comité directeur
pour les droits de l’homme (CDDH) demeure convaincu de l’importance
essentielle de respecter les droits de l’homme et les exigences
de l’Etat de droit dans le cadre de la lutte contre le terrorisme,
ainsi que cela a été souligné dans les Lignes directrices adoptées
par le Comité des Ministres en juillet 2002. C’est pourquoi il partage
le souci de l’Assemblée parlementaire, exprimé dans sa Recommandation 1824 (2008) et sa Résolution
1597 (2008), sur le fait que toute sanction ciblée dans le cadre de
cette lutte doit être entourée des garanties procédurales nécessaires.
2. Cela étant, il tient à rappeler le bien-fondé de telles sanctions
en tant que moyens importants dont disposent les Etats membres pour
s’acquitter de leur obligation positive de protéger leurs populations
contre des actes terroristes qui menacent la jouissance des droits
de l’homme, et tout particulièrement du droit à la vie. Dans les
lignes directrices précitées, il est rappelé notamment que: «L’usage
des biens appartenant à des personnes ou des organisations soupçonnées
d’activités terroristes peut être suspendu ou limité, notamment par
des mesures telles que le gel ou la saisie, par les autorités compétentes.
Cette décision doit pouvoir faire l’objet d’un recours judiciaire
par le ou les propriétaires des biens concernés» (Ligne directrice
XIV). Il ne s’agit donc pas de condamner le principe des sanctions
ciblées, mais de s’assurer que, par un encadrement approprié, elles
respectent les exigences des droits de l’homme et de l’Etat de droit.
3. S’agissant des sanctions ciblées édictées par le Conseil de
sécurité des Nations Unies et le Conseil de l’Union européenne,
le CDDH rappelle l’importance de mettre en place des procédures
équitables et d’informer dûment les individus et les entités affectés
des raisons pour lesquelles ils ont été frappés de telles sanctions, ainsi
que de mettre à leur disposition des recours effectifs pour contester
le bien-fondé des sanctions.
4. Le CDDH note que des travaux concernant des procédures équitables
dans le contexte des sanctions ciblées se poursuivent au sein des
Nations Unies et de l’Union européenne. Plus particulièrement:
i. au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies, l’information des personnes et des entités affectées par la désignation du Conseil de sécurité a été améliorée et elles disposent d’un mécanisme de demande de sortie des listes qui n’est plus dépendant du soutien de leur Etat de nationalité ou de résidence;
ii. une réforme des procédures de l’Union européenne a été opérée en 2007 à la suite d’une décision de la Cour européenne de première instance. Les diverses questions font actuellement l’objet de contentieux, notamment auprès de la Cour de justice des Communautés européennes dans l’affaire Kadi c. le Conseil et la Commission et il conviendra d’en attendre l’issue.