1. Introduction
1. En Europe, selon les statistiques disponibles, une
femme sur quatre ou sur cinq a subi des violences physiques au moins
une fois dans sa vie; 12 à 16 % des femmes ont fait l’expérience
de sévices domestiques après l’âge de 16 ans
. A
l’échelle du continent européen, cette violation des droits de l’homme
affecterait près de 80 millions de femmes. Face à l’étendue et à
la gravité de ce phénomène, les chefs d’Etats et de gouvernement
des Etats membres du Conseil de l’Europe, suivant les demandes exprimées
par l’Assemblée parlementaire en 2002 et 2004
,
ont inscrit dans le Plan d’action du 3e Sommet de Varsovie une campagne paneuropéenne
pour combattre la violence à l’égard des femmes, y compris la violence
domestique. Cette campagne paneuropéenne a été lancée le 27 novembre
2006 au Sénat espagnol et a été clôturée le 11 juin 2008 à Strasbourg,
au siège du Conseil de l’Europe.
2. De juin 2006 à juin 2008, suivant sa
Résolution 1512 (2006), l’Assemblée
parlementaire a mis en œuvre la dimension parlementaire de la campagne
du Conseil de l’Europe pour combattre la violence à l’égard des femmes,
y compris la violence domestique. J’ai été chargé de préparer en
octobre 2007 un rapport d’évaluation à mi-parcours de la campagne
,
dans lequel l’Assemblée parlementaire a identifié sept mesures législatives phares
que les parlements nationaux des Etats membres ont été invités à
adopter et/ou à superviser.
3. La commission sur l’égalité des chances pour les femmes et
les hommes m’a chargé de préparer le rapport final d’évaluation
de la dimension parlementaire de la campagne du Conseil de l’Europe.
Je m’attacherai à démontrer dans quelle mesure cette campagne a
contribué à mobiliser et impliquer les parlements nationaux et à
modifier les lois dans plusieurs Etats membres. Comme l’a souligné
Mme Sabuni, ministre pour l’Intégration
et l’Egalité entre les femmes et les hommes de la Suède au nom de
la présidence suédoise du Comité des Ministres
,
la conférence de clôture de la campagne a marqué «la fin du début»
de l’action du Conseil de l’Europe pour combattre la violence à
l’égard des femmes, y compris la violence domestique. Aussi souhaiterais-je,
dans un deuxième temps, mettre en avant les actions futures que pourraient
entreprendre l’Assemblée parlementaire et les parlements nationaux
dans ce domaine.
2. «Les parlements unis pour combattre
la violence domestique contre les femmes»: bilan d’une expérience
sans précédent au sein de l’Assemblée parlementaire
Mise en réseau des parlements
4. La mise en œuvre de la dimension parlementaire de
la campagne a reposé sur la mise en réseau des parlements nationaux
des Etats membres et des parlements ayant le statut d’observateur
auprès de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE).
Par la nomination de 56 parlementaires de référence, les parlements
impliqués dans la campagne ont marqué leur engagement à éradiquer
la violence domestique. Au sein de leur parlement, dans leur circonscription
électorale, les parlementaires ont multiplié les actions pour briser
le silence. De nombreuses actions de sensibilisation ont été menées
.
L’Union interparlementaire, le Parlement européen et le Conseil
nordique ont été pleinement associés à la mise en œuvre de la campagne.
Les parlementaires de référence ont eu des contacts réguliers (réunions
de coordination du 19 octobre 2006 et des 4 et 5 juin 2007, et conférence
finale du 30 avril 2008) pour confronter leurs expériences. Ce
travail en réseau a été renforcé par la mise en place de six groupes
régionaux
qui
se sont réunis à l’automne 2007 à Strasbourg, à Helsinki, à Vienne,
à Sofia et à Paris.
5. Sous l’impulsion de l’Assemblée parlementaire, des actions
paneuropéennes ont été relayées dans les parlements nationaux: adoption
d’une déclaration solennelle contre la violence domestique le 25
novembre 2006, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination
des violences envers les femmes, organisation d’auditions parlementaires
pour célébrer la Journée internationale de la femme (8 mars 2007), lancement
d’une initiative visant à impliquer les hommes pour combattre la
violence à l’égard des femmes autour du 25 novembre 2007
.
Mobilisation des parlements et interaction avec les travaux
de l’APCE et du Conseil de l’Europe
6. La mobilisation des parlements pour mettre en œuvre
la dimension parlementaire de la campagne a été facilitée par la
mise à disposition d’outils de communication proposés par l’APCE
et déclinés par plusieurs parlements nationaux: le «Manuel à l’usage
des parlementaires» – guide pratique de la promotion de la lutte contre
la violence domestique – est à présent disponible en 11 langues
grâce au soutien apporté par les parlements nationaux. Un support
visuel et du matériel promotionnel (posters, dépliants, rubans blancs)
ont été proposés aux parlementaires de référence qui ont pu adapter
le matériel et la ligne graphique dans leur langue nationale.
7. Il faut noter que, grâce aux quatre parties de session organisées
chaque année à Strasbourg, l’APCE a été en mesure d’assurer le lien
entre l’action des parlementaires de référence et les délégations
nationales auprès de l’APCE qui ont été régulièrement informées
des actions en cours, en particulier au moyen d’un site web et de
six bulletins d’information publiés de janvier 2007 à avril 2008
.
Les présidents des délégations nationales ont contribué à mobiliser
les parlementaires et à relayer le message du Conseil de l’Europe
dans leur parlement
. Par la mobilisation
de ressources, par un soutien politique sans faille à la campagne
du Conseil de l’Europe
, par les prises de position de ses Présidents,
René van der Linden puis Lluís Maria de Puig, l’Assemblée parlementaire
a fermement dénoncé la violence à l’égard des femmes et a fait de
ce thème une question prioritaire depuis 2006.
8. Pour mettre en œuvre la dimension parlementaire de la campagne,
l’APCE a souhaité développer une coopération entre les parlements
nationaux et les gouvernements ainsi que les élus locaux et régionaux.
A ce titre, la rencontre des parlementaires de référence et des
contacts gouvernementaux de la campagne, le 5 juin 2007, a souligné
la nécessité de renforcer les coopérations entre les différents
acteurs au niveau national pour s’assurer que des mesures efficaces
soient adoptées et mises en œuvre dans chaque Etat membre. L’APCE a
également souhaité associer à ses travaux les organisations non
gouvernementales, qui sont des maillons essentiels pour identifier
et secourir les victimes, et mettre en place des programmes de prévention.
Une coopération fructueuse a notamment été développée par l’APCE
et par les parlements nationaux avec Amnesty International, la campagne
du Ruban blanc (Royaume-Uni), le Réseau WAVE (Femmes contre la violence
en Europe), le Regroupement «égalité-parité» des OING dotées du
statut participatif auprès du Conseil de l’Europe et le Lobby européen
des femmes.
Promotion de standards législatifs minimaux dans tous
les Etats membres du Conseil de l’Europe
9. Lutter contre la violence domestique faite aux femmes
exige une volonté politique ferme de l’ensemble des décideurs et
de nombreuses actions de sensibilisation pour faire changer les
attitudes et les mentalités. Mais, sans l’adoption de normes juridiques,
ce combat est vain. L’adoption des lois – et la supervision de leur mise
en œuvre – constitue le cœur du travail parlementaire. La Recommandation
Rec(2002)5 sur la protection des femmes contre la violence, adressée
par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe aux Etats membres,
constitue une excellente base de travail pour définir des normes
et des standards. L’Assemblée parlementaire, suivant le rapport
que j’ai présenté le 5 octobre 2007, a pour sa part identifié sept
mesures législatives phares considérées comme des standards minimaux
qui devraient être adoptées et/ou supervisées
prioritairement:
«6.6.1. la pénalisation de la violence domestique
à l’égard des femmes, y compris la pénalisation du viol marital;
6.6.2. la reconnaissance que
la violence perpétrée entre (ex-)partenaires constitue une circonstance aggravante;
6.6.3. la création d’un nombre
adéquat de centres d’hébergement d’urgence sûrs;
6.6.4. la possibilité d’éloigner
le conjoint ou le partenaire violent et de prendre des mesures d’injonction à
l’encontre des auteurs de violence;
6.6.5. la garantie d’un accès
effectif à la justice ainsi qu’à des mesures de protection pour
les victimes;
6.6.6. l’affectation de ressources
budgétaires suffisantes pour la mise en œuvre de la loi;
6.6.7. le suivi de l’application
des lois votées par le parlement en matière de lutte contre la violence
faite aux femmes».
10. L’ensemble des parlements nationaux a été sollicité au moyen
d’un questionnaire, et les résultats transmis par 39 parlements
des Etats membres ainsi que le Canada ont été présentés lors de
la Conférence finale de Vienne
.
Sans reprendre in extenso les résultats de cette enquête, quelques
tendances peuvent être identifiées au vu des réponses recueillies:
- la violence domestique à l’égard
des femmes est qualifiée d’infraction pénale dans deux tiers des
Etats membres. Plusieurs Etats membres n’incriminent pas spécifiquement
le «viol marital» ;
- l’éloignement du conjoint violent est une mesure prévue
dans deux tiers des Etats, et c’est un développement positif qui
témoigne d’une prise de conscience en Europe du fait que c’est à
l’auteur de violence domestique de quitter le domicile conjugal
ou de rester éloigné de la victime;
- la violence entre partenaires constitue une circonstance
aggravante dans moins de la moitié des Etats;
- les places sûres dans des centres d’hébergement sont insuffisantes
(seules 17 % des délégations nationales estimaient que leur pays
dispose d’une place pour 7 500 habitants au minimum);
- de nombreuses délégations ont éprouvé des difficultés
à évaluer les montants alloués à la lutte contre la violence à l’égard
des femmes. Souvent dispersées, les ressources allouées pour combattre
la violence à l’égard des femmes peinent à être identifiées dans
le budget national;
- enfin, plus de la moitié des délégations ont indiqué que
leur parlement ne dispose pas d’instance chargée de suivre la mise
en œuvre de la loi contre la violence domestique – alors qu’il s’agit
d’une prérogative fondamentale des institutions parlementaires.
11. Il ressort de cette étude qu’aucun Etat européen ne remplit
les sept mesures phares identifiées par l’APCE
.
Cependant, les informations recueillies depuis 2006 indiquent que
la campagne du Conseil de l’Europe a été un élément moteur pour
encourager les parlementaires à initier des procédures d’interpellations au
sein de leur parlement (Liechtenstein, Suède); des procédures législatives,
qui n’ont pu aboutir pour le moment (Lituanie), sont en cours d’examen
(Azerbaïdjan, Arménie) ou ont conduit à l’adoption de loi (Monaco, Slovénie).
S’il faut se réjouir de ces avancées, les investigations menées
nous rappellent que, à l’heure actuelle, les standards minimaux
sont loin d’être remplis. Une conclusion s’impose: il est urgent
d’agir et de rester mobilisés.
3. Perspectives d’actions futures au niveau parlementaire
12. Tous les acteurs impliqués dans la mise en œuvre
de la campagne du Conseil de l’Europe s’accordaient à reconnaître
que la lutte contre la violence à l’égard des femmes ne pourra cesser
avec la fin de la campagne – et c’est également l’avis exprimé par
les participants à la conférence finale de la dimension parlementaire
de la campagne réunis à Vienne le 30 avril 2008, à l’invitation
du Parlement autrichien
.
Aussi, je proposerai trois axes de travail.
13. La mise en réseau des parlements nationaux a été un instrument
puissant pour favoriser l’échange d’informations et d’expériences
parlementaires, et pour travailler au niveau subrégional, avec la
mise en place de six groupes régionaux animés par des coordonnateurs
désignés par les parlementaires de référence. Comme le soulignait
le Président de l’APCE, Lluís Maria de Puig, à Vienne, la mobilisation
de l’ensemble des parlements nationaux par leur mise en réseau a
constitué une méthode de travail unique et exemplaire, et certainement
une valeur ajoutée de cette campagne dans le concert des institutions
européennes et internationales. Le Conseil de l’Europe a en effet
été en mesure de cibler tous les parlements nationaux pour relayer
une campagne visant à promouvoir les droits de la personne humaine.
Aussi, en premier lieu, je souhaiterais proposer que cette expérience
puisse être prolongée au sein de l’Assemblée parlementaire, qui doit,
en Europe, continuer à jouer un rôle moteur pour mobiliser les parlements
nationaux sur ce thème.
14. Deuxièmement, la dimension parlementaire de la campagne a
permis de faire émerger des thèmes de travail nouveaux, qui n’ont
pu être traités:
- près de 80
% des parlementaires sont des hommes en Europe. L’implication des
hommes pour combattre la violence à l’égard des femmes, qui a fait
l’objet d’une action spécifique de l’APCE, mérite d’être poursuivie.
Plusieurs pays ont initié la mise en place de réseaux de parlementaires
hommes, s’inspirant du réseau actif au sein du Parlement suédois
depuis 2002. A cet égard, je suis heureux que M. Steingrímur J.
Sigfússon (Islande, GUE), président de la commission sur l’égalité
des chances pour les femmes et les hommes, prépare actuellement
un rapport sur «Impliquer les hommes pour réussir l’égalité entre
les femmes et les hommes» qui permettra d’approfondir et d’élargir
les travaux entamés par l’APCE au cours de la campagne;
- le coût de la violence domestique est également un élément
essentiel. Quelques études sont déjà disponibles et ont évalué le
coût induit par la violence domestique , que ce soit
au niveau des services de santé, de justice, de police. Il faut
cependant aussi prendre en compte les coûts – financiers et humains
– induits indirectement pour la famille et l’économie nationale;
- l’investissement de ressources budgétaires dans la lutte
contre la violence à l’égard des femmes et la promotion de l’égalité
entre les femmes et les hommes doivent devenir des priorités qui
doivent être prises en compte dans l’élaboration du budget national,
au moyen de l’intégration de la dimension de genre dans le budget (gender budgeting). Cela suppose
d’être en mesure d’identifier clairement les ressources allouées
– et d’identifier les objectifs poursuivis. Je salue à cet égard
l’effort fait par les pays scandinaves et les pays Baltes à l’initiative
de Mme Hägg, coordinatrice régionale,
pour identifier les ressources allouées à la lutte contre la violence
à l’égard des femmes ;
- la situation des femmes migrantes confrontées à la violence
domestique et leur accès à des dispositifs de protection doivent
être mieux appréhendés dans les Etats membres du Conseil de l’Europe.
La coopération avec le Centre Nord-Sud du Conseil de l’Europe basée
à Lisbonne serait particulièrement utile pour associer les pays
d’origine à cette réflexion. Je suis heureux que notre collègue,
Mme Nursuna Memecan (Turquie, ADLE),
ait déposé une proposition de recommandation sur ce thème ;
- certains concepts juridiques, tels le stalking (délit de persécution)
ou le féminicide, pourraient également être explorés.
15. Enfin, la mise en place de programmes de coopération et d’assistance,
y compris au niveau parlementaire, pourrait constituer un excellent
moyen pour aider les parlements nationaux à renforcer leur législation,
à élaborer des stratégies parlementaires pour modifier les lois
et en assurer la supervision, et pour favoriser l’échange de bonnes
pratiques. Il me semble important que des pays qui disposent d’une
législation avancée (comme l’Espagne, l’Autriche, la Finlande, les
Pays-Bas) puissent soutenir les efforts des pays les moins avancés.
Le Conseil de l’Europe devrait intégrer la lutte contre la violence
domestique faite aux femmes et d’autres formes de violence fondées
sur le genre dans ses programmes d’assistance et de coopération,
y compris parlementaire, et rechercher des ressources extrabudgétaires
pour financer ces activités.
4. Promouvoir la rédaction d’une convention-cadre
sur les formes les plus sévères et répandues de violence à l’égard
des femmes
16. La commission sur l’égalité des chances pour les
femmes et les hommes de l’APCE considère qu’il n’est plus suffisant
d’adresser une recommandation aux Etats membres pour garantir la
protection des femmes contre la violence domestique. A la suite
des échanges de vues qu’a eus la commission en avril 2008 avec le Commissaire
aux droits de l’homme, Thomas Hammarberg, la Secrétaire Générale
adjointe, Maud de Boer-Buquicchio, et les représentants d’organisations
non gouvernementales, la commission a acquis la conviction qu’un
instrument juridique dans ce domaine est devenu nécessaire pour
assurer la protection des victimes, la poursuite des auteurs de
violence et la prévention de ce fléau.
17. Si un consensus semble se dégager pour reconnaître qu’un instrument
juridique devrait englober les «3 P» (protection des victimes, poursuites
des auteurs, prévention), les positions divergent sur le champ d’une telle
convention. Pour mémoire, les ministres de la Justice ont, lors
de leur 27e Conférence (Erevan, 12-13 octobre 2006), invité le Comité
des Ministres à charger le Comité européen pour les problèmes criminels (CDPC)
à formuler des propositions sur «la nécessité pour le Conseil de
l’Europe d’entreprendre des travaux dans ce domaine, éventuellement
sous la forme d’un instrument international normatif destiné à lutter
contre
la violence intrafamiliale, en
particulier à l’encontre du partenaire»
. La
Task force du Conseil de l’Europe
pour combattre la violence à l’égard des femmes, y compris la violence
domestique, préconise pour sa part la préparation d’un «instrument
juridiquement contraignant dans ce domaine» qui «devrait englober
toutes les formes de violence fondées sur le
genre infligées aux femmes tout au long de leur vie et
inclure par conséquent les filles mineures»
(les parties en italique
ont été soulignées par moi). Au cours de la conférence de clôture de
la campagne (Strasbourg, 10 juin 2008), Nyamko Sabuni, ministre
suédoise pour l’Intégration et l’Egalité entre les femmes et les
hommes, a pour sa part considéré qu’une convention sur la lutte
contre la violence à l’égard des femmes, y compris la violence perpétrée
au nom de l’honneur, serait une contribution importante pour rendre
les droits effectifs
.
18. Suivant la déclaration finale adoptée par les participants
à la conférence finale de la dimension parlementaire de la campagne
(Vienne, 30 avril 2008), la commission sur l’égalité des chances
pour les femmes et les hommes considère qu’un traité international
dans ce domaine devrait intégrer la dimension de genre. Au cours
de cette campagne, la dimension de genre de la violence exercée
contre les femmes n’a en effet cessé d’être soulignée – puisque
la très grande majorité des victimes sont des femmes, que la très
grande majorité des auteurs sont des hommes, et que la violence
domestique à l’égard des femmes découle d’un rapport d’inégalité
entre les femmes et les hommes dans des sociétés encore imprégnées
par les attitudes patriarcales. La commission considère qu’il est
particulièrement important de s’assurer que cette convention pourra
faire l’objet d’un suivi régulier par un mécanisme de monitoring indépendant. Aussi, la
commission suggère que la convention, pour rester un instrument
juridique efficace, se concentre sur les formes les plus sévères
et répandues de violence exercées contre les femmes, en particulier
la violence domestique contre les femmes (entre partenaires ou ex-partenaires,
cohabitant ou non), les agressions sexuelles (y compris le viol
et le «viol marital») et le harcèlement, les mariages forcés, les
crimes dits «d’honneur» et les mutilations sexuelles féminines.
La convention devrait au moins garantir l’application des sept mesures
phares identifiées par l’Assemblée pour combattre la violence domestique
à l’encontre des femmes.
19. Enfin, la commission plaiderait pour la préparation d’une
convention-cadre. En effet, les études réalisées par le Conseil
de l’Europe et l’APCE montrent que les Etats membres du Conseil
de l’Europe disposent de législations plus ou moins avancées, dans
des systèmes juridiques divers. S’il est indispensable de se doter d’une
convention, c’est-à-dire d’un instrument juridiquement contraignant
au regard du droit international, l’élaboration d’une convention-cadre
(suivant le modèle de la Convention-cadre pour la protection des minorités
nationales, STE no 157
)
permettrait de proposer des lignes directrices et des dispositions définissant
des objectifs que les Parties contractantes s’engagent à poursuivre
à travers une législation nationale et une action gouvernementale
appropriée.
20. Suivant la suggestion émise par la
Task
force du Conseil de l’Europe pour combattre la violence
à l’égard des femmes, y compris la violence domestique, le rapporteur
appuie la proposition de mettre en place un rapporteur spécial du
Conseil de l’Europe sur les droits des femmes, comme cela a été
demandé par l’APCE dans sa
Recommandation
1838 (2008), «Renforcer l’autonomie des femmes dans une
société moderne et multiculturelle». Sous l’autorité du Commissaire
aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, ce rapporteur spécial
serait chargé du suivi des progrès réalisés en matière de droits
des femmes, y compris dans le domaine de la lutte contre la violence
à l’égard des femmes.
5. Conclusions
21. L’Assemblée parlementaire devrait considérer que,
en raison de l’ampleur de la violence domestique faite aux femmes
qui touche l’ensemble des Etats membres, il est urgent d’agir et
de poursuivre la lutte contre la violence domestique à l’égard des
femmes. La campagne du Conseil de l’Europe «Stop à la violence domestique
faite aux femmes» reposait sur les trois dimensions politiques du
Conseil de l’Europe (parlementaire, gouvernementale, et locale et
régionale), associait les ONG et ciblait le grand public. Elle a contribué
à une meilleure prise de conscience du phénomène et à faire de la
violence à l’égard des femmes, en particulier la violence domestique,
une violation inacceptable des droits de la personne humaine.
22. L’Assemblée souligne le fait que la campagne a permis de réunir
une somme d’informations et d’expériences particulièrement riche,
qui méritera d’être exploitée.
23. L’Assemblée pourrait proposer aux délégations nationales auprès
de l’APCE de nommer un parlementaire de référence chargé de suivre
les développements législatifs en matière de lutte contre la violence
à l’égard des femmes dans son pays et d’en rendre compte régulièrement
à l’APCE.
24. L’Assemblée parlementaire devrait poursuivre et renforcer
sa coopération avec l’Union interparlementaire, le Parlement européen
et le Conseil nordique, notamment dans le cadre de la Campagne des
Nations Unies pour l’élimination de la violence contre les femmes
et les filles (2008-2015).
25. L’Assemblée parlementaire devrait inviter le Comité des Ministres
à rédiger une convention-cadre sur les formes sévères de violences
à l’égard des femmes qui devrait:
- intégrer
la dimension de genre et cibler la spécificité de la violence perpétrée
contre les femmes en raison de leur sexe;
- couvrir les formes les plus sévères et répandues de violence
à l’égard des femmes, en particulier la violence domestique contre
les femmes (entre partenaires ou ex-partenaires, cohabitant ou non),
les agressions sexuelles (y compris le viol et le «viol marital»)
et le harcèlement, les mariages forcés, les crimes dits «d’honneur»
et les mutilations sexuelles féminines.
26. L’Assemblée parlementaire devrait inviter le Conseil de l’Europe
à intégrer la lutte contre les formes les plus sévères et répandues
de violence à l’égard des femmes dans ses programmes d’assistance
et de coopération (y compris parlementaires), et à rechercher des
ressources extrabudgétaires pour financer ces activités.
Commission chargée du rapport: commission sur l’égalité des
chances pour les femmes et les hommes.
Renvoi en commission: Doc. 11504 et
Renvoi no 3418 du 14 avril 2008.
Projet de résolution et projet de recommandation adoptés à
l’unanimité par la commission le 12 septembre 2008.
Membres de la commission: M. Steingrímur J. Sigfússon (Président), M. José Mendes Bota (1re Vice-Président),
Mme Ingrida Circene (2e Vice-Présidente),
Mme Anna Čurdová (3e
Vice-Présidente), M. Frank Aaen, M. John Austin,
M. Lokman Ayva, Mme Marieluise
Beck, Mme Anna Benaki, Mme Oksana Bilozir, Mme María
Delia Blanco Terán, Mme Olena Bondarenko, M. Predrag Bošcović,
M. Jean-Guy Branger,
M. Igor Chernyshenko (remplaçante: Mme Khorkina), M. James Clappison, Mme Minodora
Cliveti (remplaçante: Mme Găleteanu), Mme Diana
Çuli, M. Ivica Dačić, M. Joseph Debono Grech, M. Marcello Dell’Utri,
M. José Luiz Del Roio, Mme Lydie Err, Mme Catherine
Fautrier, Mme Mirjana Ferić-Vac, Mme Sonia Fertuzinhos,
Mme Alena Gajdůšková, Mme Ruth
Genner (remplaçant: M. Gross),
Mme Claude Greff,
M. Attila Gruber, Mme Carina Hägg, M. Ilie Ilaşcu, Mme Fatme
Ilyaz, Mme Nataša Jovanović, Mme Birgen Keleş, Mme Krista
Kiuru, Mme Irine Kurdadzé, Mme Angela
Leahu, M. Terry Leyden, Mme Mirjana
Malić, Mme Nursuna Memecan, Mme Dangutė
Mikutienė, Mme Ilinka Mitreva, M. Burkhardt
Müller-Sönksen, Mme Christine Muttonen,
Mme Hermine Naghdalyan, Mme Yuliya Novikova, M. Mark Oaten, M. Kent
Olsson, M. Jaroslav Paška, Mme Maria
Agostina Pellegatta, Mme Antigoni Papadopoulos,
M. Claudio Podeschi, Mme Majda
Potrata, Mme Maria del Carmen Quintanilla Barba, M. Frédéric
Reiss, Mme Mailis Reps, Mme Maria
Pilar Riba Font, Mme Jadwiga
Rotnicka, Mme Marlene Rupprecht, Mme Klára Sándor, M. Giannicola Sinisi, Mme Miet
Smet, Mme Darinka Stantcheva,
Mme Tineke Strik, M. Michał Stuligrosz,
Mme Doris Stump,
M. Han Ten Broeke, M. Vasile Ioan Dănuţ Ungureanu,
Mme Tatiana Volozhinskaya,
M. Marek Wikiński, M. Paul
Wille, Mme Betty Williams (remplaçante:
Baroness Gale), M. Gert Winkelmeier,
Mme Karin S. Woldseth,
Mme Gisela Wurm, M. Vladimir Zhidkikh, Mme Anna
Roudoula Zissi.
N.B. Les noms des membres qui ont pris part à la réunion sont
imprimés en gras.
Voir 36e séance, 3 octobre 2008
(adoption du projet de résolution et du projet de recommandation
amendé); et Résolution
1635 et Recommandation
1847.