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Rapport | Doc. 11632 | 13 juin 2008

La lutte contre les atteintes à l’environnement en mer Noire

(Ancienne) Commission de l'environnement, de l'agriculture et des questions territoriales

Rapporteur : M. Laurenţiu MIRONESCU, Roumanie

Résumé

La mer Noire, jadis un lieu de pêche très productif, est aujourd’hui proche du désastre écologique à la suite de la surexploitation de ses ressources, à l’eutrophisation et au déversement de substances toxiques dans l’eau. La pollution est due principalement aux cours d’eau, le plus souvent pollués, qui s’y jettent et aux activités des villes côtières, des ports et des industries présentes sur les rives. L’Assemblée parlementaire estime que le Conseil de l’Europe doit prendre des mesures pour que la situation environnementale de la région s’améliore d’une manière immédiate et sensible, et demande aux Etats concernés de prendre le plus rapidement possible les mesures qui s’imposent. L’Assemblée souligne également la nécessité de développer la coopération à l’échelon régional et soutient, dans ce contexte, la création d’une eurorégion de la mer Noire.

A. Projet de recommandation

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1. La mer Noire est une zone d’une importance vitale pour l’Europe, compte tenu de sa situation géographique et de ses caractéristiques socio-économiques, culturelles et environnementales. Elle se situe, en effet, à la fois aux confins de l’Europe géographique (Conseil de l’Europe) et de l’Union européenne, et constitue un trait d’union entre des cultures et des religions différentes.
2. La mer Noire était jadis un lieu de pêche très productif. L’industrialisation et l’explosion démographique dans la région ont engendré la surpêche, l’eutrophisation et le déversement de substances toxiques et radioactives dans la mer. A présent, ce milieu aquatique, qui était autrefois une source importante de nourriture et un espace de loisirs, risque de devenir le théâtre d’une catastrophe écologique sans pareil.
3. C’est pourquoi la coopération peut et doit être développée entre les pays riverains, que ce soit au niveau national, régional ou local, pour lutter contre les atteintes à l’environnement et améliorer le bien-être des habitants des pays riverains.
4. L’Assemblée parlementaire rappelle que des structures de coopération dans la région de la mer Noire – dont certaines concernent des domaines bien plus larges que celui de l’environnement – existent déjà. Au niveau gouvernemental on peut citer la Coopération économique de la mer Noire (CEMN), qui a aussi une dimension parlementaire – l’Assemblée parlementaire de la Coopération économique de la mer Noire (l’APCEMN) –, la Communauté énergétique de l’Europe du Sud-Est, le Centre régional sur l’énergie de la mer Noire (BSREC), la Commission sur la protection de la mer Noire contre la pollution (Commission de la mer Noire), etc., et, au niveau régional, la Commission régionale des Balkans et de la mer Noire, qui a pour objectif d’encourager le dialogue et la coopération entre les échelons administratifs subnationaux.
5. L’Assemblée regrette toutefois que la Déclaration de Bucarest, signée en 1985 par les pays traversés par le Danube, visant à évaluer et à contrôler le niveau de pollution de cette voie d’eau, n’ait pas eu d’effets concrets, malgré son renforcement en 1994.
6. L’Assemblée rappelle que les six Etats riverains de la mer Noire (Bulgarie, Fédération de Russie, Géorgie, Roumanie, Turquie et Ukraine) ont signé et ratifié la Convention pour la protection de la mer Noire contre la pollution (Bucarest, 1992), instaurant le cadre nécessaire à un contrôle plus efficace de la pollution ainsi qu’à la reconstitution et à la conservation des ressources de la mer.
7. L’Assemblée rappelle également que l’Union européenne est en train de développer l’initiative «Synergie mer Noire», dans le cadre de sa politique européenne de voisinage. Cette initiative concerne entre autres l’environnement, la politique maritime et la pêche, et s’appuie particulièrement sur la coopération transfrontalière.
8. L’Assemblée constate que les problèmes de nature environnementale de la mer Noire ont des causes multiples. Les cours d’eau qui s’y jettent charrient des métaux lourds, des composés organiques synthétiques, des hydrocarbures, des nutriments, des eaux usées non traitées et des radionucléides provenant de Tchernobyl. Les barrages construits sur ces cours d’eau ainsi que les besoins en eau douce pour l’agriculture et les activités domestiques ont considérablement réduit la quantité d’eau douce qui se déverse dans la mer, ce qui aggrave les problèmes existants et altère la salinité de l’eau. Certaines villes côtières représentent une source supplémentaire d’eaux usées non traitées, tandis que les ports sont largement responsables à la fois de la pollution par le pétrole et de l’importation d’espèces allogènes. La surexploitation des ressources halieutiques de la mer Noire a conduit à l’extinction commerciale de 21 espèces de poissons sur 26.
9. L’Assemblée note que, chaque année, le Danube déverse à lui seul dans la mer Noire environ 280 tonnes de cadmium, 60 tonnes de mercure, 900 tonnes de cuivre, 4500 tonnes de plomb, 6000 tonnes de zinc, 1000 tonnes de chrome et 50 000 tonnes d’hydrocarbures. Les autres principaux cours d’eau qui s’y jettent (Dniepr, Dniestr, Don, Kouban, Yuzhnyy et Belaïa) déversent annuellement environ 87 tonnes de cadmium, 1 500 tonnes de cuivre, 825 tonnes de plomb et 2 600 tonnes de zinc supplémentaires. Ces cours d’eau sont également la source d’une quantité considérable de nitrate et de phosphore qui engendrent la prolifération des algues et du plancton, une diminution des concentrations d’oxygène dissous et une forte baisse des stocks de poissons, conduisant à des modifications de la chaîne alimentaire.
10. L’Assemblée estime, par conséquent, que le Conseil de l’Europe doit prendre des mesures pour faciliter le renforcement de la coopération autour de la mer Noire aux niveaux national, régional et local, car tous les pays riverains sont membres de l’Organisation.
11. Dans ce contexte, elle se félicite de l’initiative du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe de créer une nouvelle eurorégion de la mer Noire, sur le modèle de l’Eurorégion adriatique. Une telle structure devrait, entre autres, promouvoir la coopération entre les pays de la mer Noire aux niveaux local et régional, contribuer à la promotion du développement durable, renforcer les capacités de gestion des autorités locales et encourager l’échange d’expériences entre les pouvoirs locaux et régionaux pour mettre en œuvre des projets communs, etc.
12. L’Assemblée demande par conséquent au Comité des Ministres d’inviter les Etats membres du Conseil de l’Europe concernés:
12.1. à encourager, et si possible à aider financièrement, les villes côtières de la mer Noire à moderniser leurs systèmes d’évacuation des eaux usées;
12.2. à encourager les ports de la mer Noire à moderniser les installations portuaires pour que la pollution en hydrocarbures provenant de ces installations soit fortement diminuée;
12.3. à améliorer la coopération et l’intégration en matière de surveillance maritime, pour aboutir à un contrôle meilleur de la pollution des principales voies maritimes;
12.4. à veiller à réduire d’une manière significative le niveau de pollution des rivières et des fleuves se jetant dans la mer Noire;
12.5. à s’abstenir d’activités qui mettent en danger l’environnement des espaces protégés autour de la mer Noire et à mettre fin à celles qui sont en cours, notamment le «projet de canal Danube-mer Noire», dans la partie ukrainienne du delta du Danube;
12.6. à promouvoir le tourisme sain sur le pourtour de la mer Noire, dans le plein respect du patrimoine naturel;
12.7. à encourager le développement de l’utilisation de sources d’énergie renouvelable, telles que les énergies solaire, éolienne et marémotrice, dans la région de la mer Noire;
12.8. à soutenir les collectivités locales dans leurs efforts de gestion de la mer selon le principe du développement durable, ainsi que dans leurs projets de coopération transfrontalière;
12.9. à mieux contrôler l’industrie halieutique et à entreprendre des actions concertées pour aider les stocks de pêche en mauvais état à se reconstituer;
12.10. à renforcer l’application des accords en matière d’environnement dans la région et à introduire l’obligation des évaluations environnementales dans tous les projets régionaux;
12.11. à procéder à toutes les réformes législatives nécessaires pour assurer une coopération fructueuse à l’échelon régional et, dans ce contexte, à œuvrer pour la création d’une eurorégion de la mer Noire.

B. Exposé des motifs, par M. Laurenţiu Mironescu

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1. Brève description de la région de la mer Noire et problèmes majeurs

1. La mer Noire est une zone d’une importance vitale pour l’Europe, compte tenu de sa situation géographique et de ses caractéristiques socio-économiques, culturelles et environnementales: elle se situe aux confins de l’Europe géographique (Conseil de l’Europe) et de l’Union européenne, et constitue un trait d’union entre les différentes cultures et religions. La coopération peut et doit être développée à la fois entre les pays et entre les collectivités locales et régionales autour de la mer Noire, afin d’améliorer le bien-être des habitants de la région, notamment du point de vue environnemental, mais aussi pour renforcer la stabilité et contribuer à la croissance économique générale.

1.1. Informations générales sur la région

2. La mer Noire est la plus vaste mer intérieure du monde et ses eaux sont anoxiques. Elle s’étend sur une superficie de 461 000 km2 et sa profondeur moyenne est de 1 240 mètres, mais environ 25 % de ses eaux ont une profondeur inférieure à 200 mètres. La mer Noire communique avec la Méditerranée par les Dardanelles, qui est un détroit très peu profond et très étroit.
3. La température de ses eaux de surface varie de 0° à 25° C selon les saisons et la géographie, tandis que les eaux profondes (1 000 mètres) restent à une température constante de 9° C. Au-dessous de 150 mètres de profondeur, les eaux ne contiennent pas d’oxygène mais on observe, en revanche, une forte concentration de sulfure d’hydrogène (H2S).
4. Autrefois, la mer Noire était l’un des lieux de pêche les plus poissonneux, ce qui lui a permis de nourrir facilement les nombreux peuples qui ont vécu sur ses côtes. L’industrialisation et l’explosion démographique dans la région ont engendré la surpêche, l’eutrophisation (apport excessif de nutriments dans un milieu aquatique, favorisant la prolifération des algues et réduisant encore la concentration d’oxygène dissous dans l’eau), et le déversement de poisons chimiques et radioactifs dans la mer. A présent, ce milieu aquatique, qui était autrefois une source importante de nourriture et un espace de loisirs, risque de devenir un lieu toxique et pratiquement dépourvu de vie, le théâtre d’une catastrophe écologique sans pareille.

1.2. Problèmes environnementaux

5. Les problèmes de la mer Noire ont des causes multiples. Les cours d’eau qui s’y jettent charrient des métaux lourds, des composés organiques synthétiques, des hydrocarbures, des nutriments, des eaux usées non traitées et des radionucléides provenant de Tchernobyl. Les barrages construits sur ces cours d’eau ainsi que les besoins en eau douce pour l’agriculture et les activités domestiques ont considérablement réduit la quantité d’eau douce qui sedéverse dans la mer, ce qui aggrave les problèmes existants et altère la salinité de l’eau. Les villes côtières représentent une source supplémentaire d’eaux d’égout non traitées, tandis que leurs ports sont largement responsables à la fois de la pollution par le pétrole et de l’importation d’espèces allogènes. La surexploitation des ressources halieutiques de la mer Noire a conduit à l’extinction commerciale de 21 espèces de poissons sur 26.
6. Chaque année, le Danube vomit à lui seul 280 tonnes de cadmium, 60 tonnes de mercure, 900 tonnes de cuivre, 4500 tonnes de plomb, 6000 tonnes de zinc, 1000 tonnes de chrome et 50 000 tonnes d’hydrocarbures. Les autres principaux cours d’eau qui se jettent dans la mer Noire (Dniepr, Dniestr, Don, Kouban, Yuzhnyy et Belaïa) déversent chaque année, quant à eux, 87 tonnes de cadmium, 1 500 tonnes de cuivre, 825 tonnes de plomb et 2 600 tonnes de zinc. Ces cours d’eau sont également la source d’une quantité considérable de nitrate et de phosphore qui engendrent une prolifération des algues et du plancton, une diminution des concentrations d’oxygène dissous et une forte baisse des stocks de poissons, ce qui conduit à des modifications de la chaîne alimentaire.
7. Il convient également d’examiner le lien inextricable de dépendance entre la mer Noire et ses affluents sous l’angle de l’état environnemental à l’embouchure des affluents. A cet égard, le projet ukrainien d’ouverture d’un canal en eau profonde entre le Danube et la mer Noire sur les bras Chilia et Bystroe du Danube, au cœur du delta protégé par l’UNESCO, est particulièrement préoccupant. Il est probable que ce projet aura un impact transfrontière majeur, ainsi que l’explique le rapport 2006 de la commission d’enquête internationale constituée au titre de la Convention d’Espoo sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement dans un contexte transfrontière de la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe (CENUE). Le projet ukrainien est en effet mis en œuvre au mépris de nombreuses normes internationales, en dépit des appels répétés de différentes organisations internationales. L’Assemblée parlementaire a déjà exprimé son inquiétude au sujet de cette situation dans la Résolution 1444 (2005) sur la protection des deltas européens, dans laquelle elle demande instamment à l’Ukraine, entre autres, «d’arrêter immédiatement les travaux de construction du canal de navigation en eau profonde jusqu’à ce qu’une étude internationale d’impact sur l’environnement ait été réalisée, et de mettre en œuvre les conclusions de cette étude», et «de se conformer aux recommandations des organisations internationales», demandes qui n’ont pas été honorées.
8. Les villes et ports situés sur le pourtour de la mer génèrent aussi une pollution considérable puisque certaines villes, comme Odessa, rejettent directement les eaux d’égouts dans la mer. Dans la baie de Sébastopol, le plus grand port de la mer Noire, la concentration d’hydrocarbures est 100 fois supérieure au taux maximal autorisé par la Fédération de Russie.
9. Une pêche beaucoup trop intensive a conduit à l’extinction commerciale de 21 espèces de poissons, dont le brochet, la perche, la bonite et le tassergal qui étaient encore très abondants en 1970. Les espèces restantes sont menacées non seulement pour des raisons écologiques, mais aussi à cause de la politique de pêche qui continue d’être inadaptée.

1.3. Actions entreprises pour sauver la mer Noire

10. Certes, les pays riverains ne sont pas restés indifférents à la détérioration de la mer Noire, mais seules des mesures concertées limitées ont été prises avant le début des années 1990 et, jusqu’à une date récente, la communauté internationale ne s’est guère souciée de la catastrophe écologique. Tout n’est pas perdu, cependant, car de nombreux projets sont actuellement en cours pour sauver la mer Noire.
11. Dès 1959, la Bulgarie, la Roumanie et l’Union soviétique ont mis en œuvre la Convention sur la pêche dans la mer Noire, mais les Etats de la mer Noire ne l’ont pas tous signée. En 1985, les pays traversés par le Danube ont signé la Déclaration de Bucarest afin d’évaluer et de contrôler le niveau de pollution de cette voie d’eau mais, du fait de contraintes économiques et politiques, cette déclaration n’a manifestement pas eu des effets aussi positifs que ce que l’on pouvait espérer, malgré son renforcement en 1994. En 1992, les six Etats riverains de la mer Noire – Bulgarie, Fédération de Russie, Géorgie, Roumanie, Turquie et Ukraine – ont signé la Convention pour la protection de la mer Noire contre la pollution, instaurant le cadre nécessaire à un contrôle plus efficace de la pollution ainsi qu’à la reconstitution et la conservation des ressources de la mer.
12. En 1993, les six Etats riverains de la mer Noire ont signé le Programme relatif à l’environnement de la mer Noire (BSEP). Cette organisation a été parrainée par le Fonds pour l’environnement mondial du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et la Commission européenne, ainsi que par les Gouvernements de la France, de l’Autriche, des Pays-Bas, du Royaume-Uni et du Japon. Les fonds initialement versés pour alimenter le BSEP ont servi à étudier, comprendre et évaluer de manière approfondie la nature et les causes de la destruction.
13. Il y a beaucoup à faire. Les villes et les ports ont besoin de moyens financiers pour moderniser les installations portuaires et le système d’évacuation des eaux usées. Les pays situés dans le bassin hydrographique de la mer Noire doivent tous gérer et contrôler rigoureusement les déchets industriels et agricoles. C’est très onéreux pour ces Etats, dont certains sont aux prises avec de graves difficultés économiques. En outre, il faut discipliner l’industrie halieutique. Un renforcement de la coopération entre tous les acteurs concernés, au niveau tant national que régional, contribuerait à la fois à développer la prise de conscience de ces problèmes dans la région et à améliorer éventuellement la situation environnementale.

2. Initiatives et instruments de coopération existants

14. Des initiatives de coopération dans la région de la mer Noire existent déjà ou sont en cours de lancement. Parmi elles, on peut citer les suivantes:

2.1. Coopération économique de la mer Noire (CEMN)

15. En 1992, 11 Etats (Albanie, Arménie, Azerbaïdjan, Bulgarie, Fédération de Russie, Géorgie, Grèce, Moldova, Roumanie, Turquie et Ukraine) ont signé, à Istanbul, la Déclaration du sommet ainsi que la Déclaration du Bosphore donnant naissance à la Coopération économique de la mer Noire (CEMN).
16. La CEMN a été instaurée à titre de modèle d’initiative politique et économique multilatérale, original et prometteur, destiné à favoriser l’interaction et l’harmonie entre les Etats membres et à garantir la paix, la stabilité et la prospérité en encourageant l’établissement de bonnes relations de voisinage dans la région de la mer Noire. Son siège se trouve à Istanbul, en Turquie.
17. Selon sa charte, la CEMN crée un cadre de coopération dans les domaines suivants: développement économique et commercial, activités bancaires et financières, communications, énergie, transport, agriculture et agroindustrie, soins de santé et médicaments, protection de l’environnement, tourisme, science et technologie, échange de données statistiques et d’informations économiques, collaboration entre les services douaniers et autres autorités chargées du contrôle des frontières, contacts humains, lutte contre le crime organisé, le trafic de drogue, d’armes et de substances radioactives, tous les actes de terrorisme, les migrations clandestines, etc.
18. Avec l’entrée en vigueur de sa charte en 1999, la CEMN a été dotée d’une personnalité juridique internationale et transformée en une organisation économique régionale de plein droit: l’Organisation pour la coopération économique de la mer Noire (OCEMN).
19. Dans le domaine de la protection de l’environnement, la CEMN a établi un plan d’action qui sert de cadre général à la promotion de la coopération entre ses Etats membres. Le plan a notamment pour principaux objectifs de soutenir les efforts de chaque pays pour garantir un environnement propre et sain, contribuer à l’amélioration de la qualité de vie dans la région, promouvoir l’intégration de la protection de l’environnement dans les politiques économiques et sociales nationales, ainsi que préserver et gérer les ressources naturelles de la région, conformément aux principes du développement durable.
20. Les organes apparentés et les centres affiliés à la CEMN sont les suivants: l’Assemblée parlementaire de la coopération économique de la mer Noire (APCEMN), le Conseil du commerce de la CEMN, la Banque commerciale et de développement de la mer Noire, le Centre international d’études sur la mer Noire et le Centre de coordination de la CEMN pour l’échange de données statistiques et d’informations économiques.

2.2. Commission sur la protection de la mer Noire contre la pollution (Commission de la mer Noire)

21. Agissant sur mandat des six pays qui bordent la mer Noire (la Bulgarie, la Géorgie, la Roumanie, la Féd. de Russie, la Turquie et l’Ukraine) – qui ont signé et ratifié, en 1992, la Convention pour la protection de la mer Noire contre la pollution –, la Commission sur la protection de la mer Noire contre la pollution (la Commission de la mer Noire) applique les dispositions de la convention et les mesures du plan d’action stratégique pour la mer Noire.
22. Ses principales missions consistent à lutter contre la pollution engendrée par les activités terrestres et le transport maritime, à assurer une gestion durable des ressources vivantes du milieu marin et à favoriser un développement humain durable.
23. Le secrétariat de la commission est également établi à Istanbul, en Turquie.

2.3. Communauté énergétique de l’Europe du Sud-Est

24. En matière d’énergie, les pays de l’Europe du SudEst, dont les Etats riverains de la mer Noire, ont les mêmes objectifs: par exemple, d’améliorer les économies générales d’énergie et le rendement énergétique ou encore de réduire une production trop gourmande en énergie par rapport aux normes internationales. On pourrait remédier à la fragmentation actuelle de l’approvisionnement en énergie grâce à la coopération entre les diverses entités concernées et la connexion concrète des réseaux. Par conséquent, une approche régionale de l’approvisionnement en énergie présenterait des avantages notables en termes d’amélioration à la fois de l’utilisation des stocks existants et des capacités de production. Ces deux dernières années, des mesures importantes ont déjà été prises pour atteindre ces objectifs aussi bien dans le secteur de l’électricité que dans celui du gaz naturel.
25. Le «Traité instituant la communauté de l’énergie» a été signé à Athènes le 25 octobre 2005. L’Union européenne et les neuf partenaires de l’Europe du Sud-Est ont créé le cadre juridique nécessaire à l’instauration d’un marché énergétique intégré dont le développement est coordonné par la Commission européenne et le secrétariat de la communauté de l’énergie (établi à Vienne). Le traité est entré en vigueur le 1er juillet 2006.
26. Ses missions principales sont les suivantes:
  • créer un marché énergétique intégré au niveau régional pour les réseaux d’électricité et de gaz naturel, et intégrer ce marché dans le marché plus large de l’Union européenne;
  • établir des règles communes pour la production, le transport et la distribution de l’électricité;
  • établir, de même, des règles communes pour l’approvisionnement en gaz naturel ainsi que pour son transport, sa distribution et son stockage;
  • mettre en place, au niveau national, des autorités faisant office de régulateurs et d’entrepreneurs de transport dans le domaine de l’énergie;
  • établir des plans d’action nationaux et régionaux compatibles concernant le marché de l’électricité et du gaz naturel;
  • installer des mécanismes embryonnaires de règlement des litiges au niveau régional;
  • ouvrir les marchés conformément aux engagements communautaires en prévoyant une période de transition appropriée.

2.4. Centre régional sur l’énergie de la mer Noire (BSREC)

27. Le Centre régional sur l’énergie de la mer Noire (BSREC), institué en 1994 à l’initiative conjointe de la Commission européenne, dans le cadre de son programme SYNERGY, et de 11 Etats de la région de la mer Noire, constitue une autre structure consacrée à la coopération énergétique dans cette région. Actuellement, le BSREC a pour membres l’Albanie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Bulgarie, la Géorgie, la Grèce, la Moldova, le Monténégro, la Roumanie, la Fédération de Russie, la Serbie, la Turquie, l’Ukraine et «l’ex-République yougoslave de Macédoine». Ses activités visent à mettre en œuvre l’acquis de l’Union européenne et à harmoniser les politiques énergétiques des pays de la mer Noire avec celles de l’Union européenne.
28. Les principaux objectifs du BSREC sont les suivants:
  • faciliter la mise en œuvre d’une stratégie intégrée à long/moyen terme visant à assurer la sécurité de l’approvisionnement et le développement durable;
  • promouvoir la réforme du marché, en s’inspirant des directives de l’Union européenne sur l’électricité et le gaz et de la Charte européenne de l’énergie;
  • encourager les investissements dans le secteur énergétique de la région de la mer Noire et les financements possibles;
  • assurer des services de coordination pour les projets financés bilatéralement ou à l’échelon international et intéressant les pays pris individuellement ainsi que la région;
  • faciliter l’accès des institutions et entreprises étrangères et internationales aux secteurs énergétiques des pays de la mer Noire.

2.5. Coopération universitaire

29. En 1992, un groupe universitaire roumain a pris l’initiative de créer la Fondation universitaire de la mer Noire, organisation non politique et à but non lucratif. Depuis lors, ses activités sont axées sur la formation de jeunes chercheurs, économistes, gestionnaires, enseignants ou administrateurs grâce à des cours d’été de niveau universitaire supérieur.
30. La fondation a créé un réseau d’universités de la mer Noire, s’inspirant de ses échanges avec l’Université de la mer Baltique (Uppsala) et de l’Université de la mer Méditerranée (Rome).
31. Le Réseau des universités de la mer Noire (BSUN) regroupe à présent plus de 100 universités. Il s’attache notamment à développer un réseau spécialisé de ressources, de programmes et de projets qui portent sur des questions telles que la protection de l’environnement.

2.6. Coopération interrégionale: la Commission régionale des Balkans et de la mer Noire

32. La Commission régionale des Balkans et de la mer Noire rassemble actuellement 25 régions de Grèce, Turquie, Roumanie, Croatie et Ukraine. Elle a établi des partenariats spéciaux avec des régions serbes, albanaises, bulgares et moldoves.
33. La Commission régionale des Balkans et de la mer Noire a pour objectif d’encourager le dialogue et la coopération entre les échelons administratifs subnationaux. Le but est de constituer un cadre institutionnel durable pour soutenir l’intégration de ces régions; l’activité de la commission est centrée sur le renforcement de la coopération interrégionale et la mise en œuvre de projets communs dans des secteurs comme le transport, l’environnement et le développement économique.
34. Le secrétariat de la commission est installé à Kavala (Grèce).

3. Une eurorégion de la mer Noire

35. Tous les pays riverains de la mer Noire sont membres du Conseil de l’Europe alors que seuls deux d’entre eux (la Bulgarie et la Roumanie) appartiennent à l’Union européenne. Par conséquent, tout en tenant compte des structures de coopération existantes, le Conseil de l’Europe est en mesure de faciliter le renforcement de la coopération au niveau tant national que régional.
36. En 2006, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe a proposé la création d’une nouvelle eurorégion dans la mer Noire, sur le modèle de l’Eurorégion adriatique, qui fonctionne avec succès depuis juin 2006. Cette dernière était aussi une initiative du Congrès, soutenue par l’Assemblée dans sa Résolution 1446 (2005) sur la coopération et le développement durable du bassin de l’Adriatique.
37. Le Congrès a organisé trois conférences importantes sur cette question: à Constanţa (Roumanie) en mars 2006, à Samsun (Turquie) en novembre 2006 et à Odessa (Ukraine) en juin 2007. Des représentants de la commission de l’environnement, de l’agriculture et des questions territoriales de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, qui soutient la nouvelle initiative du Congrès de créer une eurorégion de la mer Noire, ont également participé à ces conférences.
38. La Conférence de Constanţa a mis en évidence la contribution notable de la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (Madrid, 1980) au renforcement de la coopération régionale en Europe et réaffirmé le lien existant entre la coopération régionale transnationale, d’une part, et la stabilité démocratique et le développement durable des régions concernées, d’autre part. Elle a, en outre, souligné que les frontières naturelles ou conventionnelles ne devaient pas empêcher le développement d’échanges, l’établissement de liens et l’instauration d’un dialogue entre les peuples et les civilisations de la mer Noire, afin de promouvoir la coexistence pacifique des sociétés multiethniques et la valeur du multiculturalisme.
39. Les participants à la conférence ont demandé au Congrès de contribuer à la création d’une eurorégion dans le droit-fil de l’Eurorégion adriatique, dotant ainsi les pays riverains de la mer Noire d’un instrument qui permette un dialogue et une coopération efficaces entre les autorités locales et régionales ainsi qu’une approche concertée et intégrée des problèmes de la région. Ils ont, en outre, défini les buts à fixer au projet de l’eurorégion de la mer Noire:
  • promouvoir la coopération entre les pays de la mer Noire aux niveaux local et régional;
  • consolider la stabilité démocratique et promouvoir une bonne gouvernance;
  • contribuer à la promotion du développement durable, y compris à l’amélioration de la cohésion sociale et économique;
  • développer l’établissement de relations mutuelles entre les habitants et les institutions de cette région, en tant que condition préalable à une meilleure connaissance, une meilleure compréhension et une meilleure coopération;
  • faire un meilleur usage des ressources régionales pour renforcer les capacités de gestion des autorités locales;
  • favoriser un échange fructueux d’expériences entre les pouvoirs locaux et régionaux afin de trouver des ressources financières durables pour mettre en œuvre des projets communs, dont les programmes d’assistance élaborés par l’Union européenne;
  • contribuer à la promotion de l’exercice par les citoyens de leur droit de participer à la gestion publique des affaires locales.
40. Les participants à la conférence ont pris acte de l’offre de la Roumanie de financer la création d’un secrétariat permanent de la future eurorégion de la mer Noire.
41. La conférence suivante, qui s’est tenue à Samsun en novembre 2006, a mis l’accent sur la protection de l’environnement, de la biodiversité et de la pêche afin de sauvegarder la durabilité du fragile écosystème marin et des principaux cours d’eau du bassin, et a examiné des questions telles que les investissements dans la production d’énergie renouvelable, la protection de la mer et des cours d’eau du bassin par la prévention des déversements de produits pétroliers et des rejets d’eaux usées, la gestion des risques liés au transport maritime, la gestion intégrée des zones côtières, la promotion du tourisme durable, le développement des initiatives d’échanges interculturels et de cohésion sociale, la gestion des flux migratoires, l’instauration de pratiques de bonne gouvernance destinées à renforcer la stabilité démocratique, l’utilisation rationnelle des ressources régionales pour aider les collectivités locales à s’acquitter de leur mission de gestion, ainsi que la nécessité de procéder à des échanges d’information efficaces afin de trouver des moyens de financer les projets de coopération.
42. La Conférence de Samsun a souligné que le bassin de la mer Noire est une zone où les organisations nationales et internationales, à savoir l’OCEMN et l’Assemblée parlementaire de l’Organisation de coopération économique de la mer Noire (APCEMN), interviennent pour favoriser la coopération économique; elle a toutefois souligné qu’il restait à promouvoir la mise en œuvre, aux niveaux local et régional, d’initiatives conçues à ces niveaux. La mondialisation étant un phénomène qui peut être maîtrisé en renforçant les initiatives de coopération interrégionale, les autorités locales et régionales peuvent contribuer non seu lement à la coopération économique mais aussi aux initiatives multilatérales dans les secteurs environnemental,social et culturel. Les participants à la conférence se sont, en outre, réjouis de la coopération établie avec l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour mener à bien cette initiative
43. En juin 2007, une troisième conférence s’est tenue à Odessa (Ukraine). Elle a souligné l’utilité d’une interaction étroite de l’eurorégion avec l’OCEMN, compte tenu de leur objectif commun, qui est de répondre aux besoins concrets des populations de la région de la mer Noire. La conférence d’Odessa a invité tous les partenaires potentiels de l’eurorégion à contribuer à la définition d’un cadre statutaire approprié pour la future structure de l’eurorégion, en tenant compte des différents échelons de l’administration locale et régionale, et en respectant le cadre institutionnel et juridique des pays concernés. Les participants à la conférence ont demandé au Congrès de coordonner l’élaboration d’un projet de statut de l’eurorégion de la mer Noire en coopération essentiellement avec l’unité technique déjà opérationnelle au sein du Conseil régional de Constanţa.
44. Sur la base des propositions présentées par le Conseil régional de Constanţa et la municipalité d’Odessa, le Congrès a élaboré un avant-projet d’instrument fixant les principes généraux qui s’appliquent à l’eurorégion. Lors de la réunion préparatoire de l’acte constitutif de l’eurorégion de la mer Noire (Strasbourg, 18 mars 2008), les participants ont étudié et amendé le projet d’instrument, en tenant compte de leurs propres points de vue et de l’avis du jurisconsulte du Conseil de l’Europe. Entre autres aspects, ils ont demandé aux autorités de Constanţa de mettre le projet d’instrument modifié en conformité avec la législation roumaine de façon qu’il respecte les exigences procédurales pour que le siège de l’eurorégion se trouve en Roumanie. Ils sont en outre convenus que l’eurorégion aurait trois points de coordination: à Constanţa, à Odessa et à Samsun.
45. Lors de la réunion de Strasbourg, il a été convenu que la conférence de lancement de l’eurorégion se tiendrait à Varna (Bulgarie). Par conséquent, la Conférence de Varna, qui doit se tenir le 26 septembre 2008, sera le dernier événement d’une série de manifestations visant à constituer l’eurorégion de la mer Noire, avant son fonctionnement effectif. Il est également prévu de signer l’acte constitutif de l’eurorégion à cette occasion.

4. Conclusions

46. La création d’une eurorégion de la mer Noire, sur le modèle de l’Eurorégion adriatique, pourrait contribuer notablement à stimuler le processus démocratique, à promouvoir une bonne gouvernance et à renforcer la sécurité et la stabilité dans la région. Elle contribuerait à favoriser le développement durable en renforçant la coopération et la cohésion sociale et économique.
47. L’Assemblée devrait apporter son entier soutien à l’initiative du Congrès visant à créer cette eurorégion et encourager les parlements nationaux à procéder à toutes les réformes législatives nécessaires pour assurer une coopération fructueuse à l’échelon régional.

Commission chargée du rapport: commission de l’environnement, de l’agriculture et des questions territoriales.

Renvoi en commission: Doc. 10674 et Renvoi no 3219 du 29 mai 2006 prolongé jusqu’au 29 novembre 2008.

Projet de recommandation adopté à l’unanimité par la commission le 10 juin 2008.

Membres de la commission: M. Alan Meale (Président), Mme Maria Manuela de Melo (1re Vice-Présidente), M. Juha Korkeaoja (2e Vice-Président), M. Cezar Florin Preda (remplaçant: M. Laurentiu Mironescu) (3e Vice-Président), M. Ruhi Açikgöz, M. Miloš Aligrudić, M. Gerolf Annemans, M. Artashes Avoyan, M. Alexander Babakov, M. Tommaso Barbato,

M. Rony Bargetze, M. Fabio Berardi, M. Ivan Brajović, Mme Pikria Chikhradze, M. Valeriu Cosarciuc, M. Taulant Dedja,

M. Hubert Deittert, M. Miljenko Dorić, M. Tomasz Dudziński, M. József Ekes, M. Savo Erić, M. Bill Etherington, M. NigelEvans, M. Iván Farkas, Mme María Emelina Fernández Soriano (remplaçant: M. Gabino Puche), M. Adolfo Fernández Aguilar, M. György Frunda (remplaçant: M. Attila Bela LadislauKelemen), Mme Eva García Pastor, M. Zahari Georgiev, M. Konstantinos Gioulekas, M. Peter Götz, M. Rafael Huseynov, M. Jean Huss, M. Fazail İbrahimli, M. Ilie Ilaşcu, M. Ivan Ivanov, M. Bjørn Jacobsen, M. Gediminas Jakavonis, Mme Danuta Jazłowiecka, M. Stanisław Kalemba (remplaçant: M. Łukasz Zbonikowski), M. Haluk Koç, M. Gerhard Kurzmann, M. Dominique Le Mèner, M. François Loncle, M. Aleksei Lotman, Mme Kerstin Lundgren, M. Theo Maissen, M. Yevhen Marmazov, M. Bernard Marquet, M. José Mendes Bota, M. Stefano Morselli, M. Pasquale Nessa, M. Tomislav Nikolić, Mme Carina Ohlsson, M. Joe O’Reilly, M. Germinal Peiro, M. Ivan Popescu, M. Jakob Presečnik, M. JeffreyPullicino Orlando, Mme Adoración Quesada Bravo, M. Dario Rivolta, M. René Rouquet, Mme Ana Rugāte, M. Fidias Sarikas, M. Hermann Scheer, M. Andreas Schieder, M. Steingrímur J. Sigfússon, M. Hans Kristian Skibby, M. Ladislav Skopal, M. Rainder Steenblock, M. Valeriy Sudarenkov, M. Vilmos Szabó, M. Vyacheslav Timchenko, M. Bruno Tobback (remplaçant: M. Daniel Ducarme), M. Nikolay Tulaev, M. Tomas Úlehla, M. Mustafa Ünal, M. Henk van Gerven, M. Rudolf Vis, M. Harm Evert Waalkens, M. Hansjörg Walter, M. Blagoj Zasov, Mme Roudoula Zissi.

N.B. Les noms des membres présents à la réunion sont indiqués en gras.

Voir 20e séance, 23 juin 2008 (adoption du projet de recommandation); et Recommandation 1837.