1. Introduction
L’histoire est comme un
couteau: le couteau sert à couper du pain, mais il sert aussi à
tuer, Marc Bloch
1. Lors de sa réunion du 1er octobre
2007, le Bureau de l’Assemblée a décidé de consulter la commission de
la culture, de la science et de l’éducation sur une proposition
de recommandation relative à «Une étude sur l’enseignement de l’histoire
en Bosnie-Herzégovine». La commission a procédé à un échange de
vues approfondi lors de sa réunion du 14 novembre et a décidé que
la question de la multiplicité des perspectives dans l’enseignement
de l’histoire dans les zones de conflit et de postconflit était
d’actualité et qu’elle méritait un débat de l’Assemblée. Suivant
ce conseil, le Bureau a renvoyé la proposition à la commission le
21 janvier 2008. On m’a confié la tâche d’en être le rapporteur
le 22 janvier 2008.
2. Pour élaborer ce rapport, j’ai participé au Séminaire de Sarajevo
du Conseil de l’Europe, organisé à l’intention des enseignants,
sur les nouveaux manuels scolaires (mars 2008), à la Conférence
George Mitchell de Belfast sur le processus de paix irlandais (2008),
à la visite de la délégation du Parlement du Royaume-Uni à Hazelwood
College (Belfast) sur l’éducation intégrée (mai 2008), à la Conférence
de Bristol de l’Association européenne des enseignants d’histoire
(EUROCLIO) (2008), à la 8e Conférence européenne des ministres de la
Jeunesse «L’avenir de la politique de jeunesse du Conseil de l’Europe:
Agenda 2020» (Kiev, Ukraine, octobre 2008) et à la Conférence d’Istanbul
du Conseil de l’Europe sur «Mondialisation et images de l’autre: défis
et nouvelles perspectives pour l’enseignement de l’histoire en Europe»
(novembre-décembre 2008).
3. J’ai aussi rencontré la Commission de l’éducation de l’exécutif
nord-irlandais à Stormont (mai 2008) et participé aux activités
suivantes de la commission de la culture, de la science et de l’éducation:
rencontre d’une délégation avec la Commission de la culture et de
l’éducation du Parlement européen sur le thème de ce rapport (Bruxelles,
septembre 2008), visite au musée du Soulèvement de Varsovie (septembre
2008) et réunion de la sous-commisison ad hoc au Cap-Vert (octobre-novembre
2008). Lors des sessions plénières de l’Assemblée à Strasbourg,
j’ai pu interroger sur cette question les présidents de la Bosnie-Herzégovine
et de Chypre ainsi que le leader de la communauté chypriote turque.
4. Je souhaite remercier les experts Louisa Black et Alan McCully,
les agents du Conseil de l’Europe Gabriella Battaini-Dragoni, Christopher
Grayson, João Ary, Jean-Pierre Titz, Tatiana Minkina-Milko, et Emir Adzovic
du Bureau du Conseil de l’Europe à Sarajevo.
2. Synthèse
5. Le monde d’aujourd’hui est un monde aux dynamiques
en pleine évolution sous l’influence des phénomènes migratoires,
à la fois d’émigration et d’immigration. Dans ce contexte, notre
sentiment d’identité nationale se trouve profondément ébranlé. Par
ailleurs, plusieurs pays sont confrontés à des différends religieux
ou territoriaux qui alimentent des conflits qui perdurent. Aussi
les responsables politiques, les groupes communautaires, les éducateurs
et les élèves ont-ils tous un rôle essentiel à jouer pour tenter
de minimiser l’impact de ces facteurs à l’avenir et d’optimiser
les possibilités de paix. Il y a des enseignements à tirer et des leçons
à échanger. Le message fondamental qui sous-tend cette action éducative
et locale est la nécessité d’améliorer la compréhension de soi en
renforçant la confiance en soi, afin de favoriser le respect de
soi et de la différence.
6. Le Conseil de l’Europe a joué un rôle central dans la réalisation
de cet objectif en rassemblant l’expérience de divers pays. Il a
ensuite cherché à diffuser les meilleures pratiques au sein des
Etats membres et entre les Etats membres. Il garantit la continuité
dont on a tant besoin quand on poursuit des travaux si sensibles,
en plaçant tous les participants sur un pied d’égalité; il assure
en outre la transparence de la coopération, met en place de grands
espaces de discussion et favorise la création d’un climat de confiance, tellement
important pour l’ensemble du processus. Tout cela doit être reconnu
et défendu par les responsables dans leurs politiques, comme le
préconisait déjà l’Assemblée en 1996. Le Sommet des chefs d’Etat
et de gouvernement du Conseil de l’Europe en 1997 a insisté sur
l’importance de la coopération au niveau régional pour la stabilité
et la sécurité de l’Europe.
7. Les pays en conflit n’en sont pas tous au même stade. Certains
sont encore dans la phase de violence active, alors que d’autres
sont prêts à entamer des négociations ou à conclure des accords
de paix. La résolution des conflits est un processus. Chaque pays,
chaque partie de la société évolue à son propre rythme. Parfois
la population devance les politiques, parfois c’est l’inverse qui
se produit. N’importe quel pays en conflit doit avant tout manifester
sa volonté de paix. C’est en examinant divers pays en conflit et
la phase dans laquelle ils se situent que nous pouvons nous assurer
de la nécessité de prendre des mesures pour restaurer la paix, le
respect et la compréhension mutuels. En s’intéressant au fanatisme
et au sectarisme au lieu d’en faire abstraction, le risque est moindre
que les générations futures rouvrent de telles hostilités. Et c’est
sur l’éducation des nouvelles générations que porte le présent rapport:
«Si nous voulons parvenir à une paix réelle dans le monde, il nous
faut commencer par les enfants» (Mahatma Gandhi).
8. La question de savoir «ce qui peut être enseigné» s’inscrit
également dans le cadre d’un processus. D’après l’expérience acquise
au plan international, si l’on veut rassembler les responsables
politiques, il faut commencer par renforcer la confiance qu’ils
ont les uns dans les autres, et ce processus, qui doit être très «prudent»
au début, évolue avec le temps. Cette approche est tout aussi valable
pour les enseignants. Le système politique qui choisit l’orientation
des mesures éducatives doit leur permettre de réfléchir différemment. Ils
ont besoin d’un soutien au niveau politique, mais aussi de formations,
de moyens et d’une protection, pour être en mesure d’assumer de
nouvelles responsabilités en toute confiance.
9. Une fois le processus de paix entamé sur le plan politique,
il doit se répercuter au niveau des politiques éducatives afin de
toucher les enseignants et les apprenants. La politique et l’enseignement,
dans leur forme actuelle, peuvent ne pas avoir l’expertise suffisante
pour opérer le changement radical dont ils ont besoin pour renaître
sous une forme nouvelle. Il est donc essentiel de parvenir à mettre
en place une collaboration avec les organisations internationales
pour bénéficier de leur expérience.
10. La première leçon à tirer consiste à accepter qu’il n’existe
pas de «vérité unique», et qu’il est bon d’envisager les choses
selon différentes perspectives. Cette démarche bouscule les idées
préconçues que nous avons construites au sein de nos familles et
de nos communautés, consciemment ou non. Les élèves peuvent apprendre
à respecter la différence s’ils en ont la possibilité, c’est-à-dire
si on leur présente les grands événements historiques selon plusieurs
sources et plusieurs perspectives. L’apprentissage par le biais
de méthodes interactives qui proposent de multiples perspectives
basées sur des informations factuelles favorise le développement
de l’esprit critique. Les élèves sortent du système éducatif avec
un esprit libre, créatif et curieux, c’est-à-dire une valeur ajoutée
importante qu’ils acquièrent en «analysant les faits». Cette capacité
à analyser les questions sensibles répond à un futur besoin essentiel
des employeurs dans de nombreux secteurs.
11. Selon Making Peace with the Past
, «c’est précisément la capacité
à faire la distinction entre la vérité et les mensonges du passé
qui peut induire le rétablissement de la confiance nécessaire à
un avenir politique stable». Il s’agit donc d’une situation «gagnant-gagnant»,
favorable tant aux hommes politiques qu’à la population, pour autant
qu’elle soit adoptée.
12. Cependant, il faut délibérément prendre la décision de mettre
en œuvre cette initiative, et l’impulsion doit venir à la fois des
politiques et des enseignants qui le souhaitent. Se mettre à la
place de l’autre ne veut pas dire «renier» ses propres convictions,
réécrire l’histoire ou minimiser les traumatismes vécus par telle
ou telle communauté. Certaines personnes n’ont pas pu faire ce pas
au cours de l’enquête qui a été réalisée dans le cadre du présent
rapport, ce qui souligne la nécessité d’expliquer la notion de perspectives
multiples, mais justifie aussi la rédaction du rapport et les suites
qu’il convient de lui donner.
13. Comme le disent les mots peints sur le mur du Garrick Bar
à Belfast: «Un peuple qui garde un œil sur le passé est sage; un
peuple qui garde les deux yeux sur le passé est aveugle.»
14. Les dirigeants politiques doivent donc reconnaître que l’histoire
joue un rôle positif dans la société et favorise l’évolution des
mentalités à tous les niveaux.
Travaux antérieurs de l’Assemblée sur la question
15. Dans sa Recommandation 1283 (1996) relative à l’histoire
et à l’apprentissage de l’histoire en Europe, l’Assemblée déclare:
«L’histoire a aussi un rôle politique clé à jouer dans l’Europe
d’aujourd’hui. Elle peut favoriser la compréhension, la tolérance
et la confiance entre les individus et entre les peuples d’Europe.
Elle peut aussi devenir une force de division, de violence et d’intolérance.
L’enseignement de l’histoire peut être un instrument pour soutenir
la paix et la réconciliation dans les zones de conflit et de postconflit
ainsi que la tolérance et la compréhension pour faire face aux phénomènes
des migrations, de l’immigration et des changements démographiques.»
16. «La connaissance de l’histoire devrait être une part essentielle
de l’éducation des jeunes. Son enseignement devrait permettre aux
élèves d’acquérir la capacité intellectuelle d’analyser et d’interpréter l’information
d’une manière critique et responsable, de saisir la complexité des
sujets et d’apprécier la diversité culturelle.»
17. «Les établissements scolaires doivent reconnaître les différentes
façons de traiter les mêmes sujets dans différents pays, et cela
peut être développé comme une base pour des échanges scolaires.»
18. Dans son rapport d’information sur l’éducation en Bosnie-Herzégovine
(voir
Doc. 8385 (1999)), l’Assemblée note que «les problèmes les plus
aigus sont liés au récent conflit, mais l’enseignement de l’histoire concernant
les Balkans est problématique dans son ensemble. Les questions les
plus difficiles concernent les versions concurrentes de la “vérité”
et de la responsabilité des événements historiques, avec le danger
évident que l’enseignement de l’histoire soit utilisé comme vecteur
de propagande nationaliste». Elle recommande «un moratoire de cinq
ans sur l’enseignement du récent conflit».
19. Un an plus tard, dans sa
Recommandation 1454 (2000), l’Assemblée déplore l’absence de progrès. Tout en notant
le refus des communautés concernées, elle continue de faire pression
pour «l’acceptation d’un moratoire sur l’enseignement du dernier
conflit pour permettre aux historiens de toutes les communautés
en Bosnie-Herzégovine, avec le soutien d’experts internationaux,
de développer une approche commune.»
3. L’enseignement
de l’histoire
20. L’histoire est une discipline fondamentale qui, si
elle dispose de ressources et de moyens suffisants, peut être l’occasion
pour les apprenants de commencer à se demander «qui ils sont», et
par conséquent «qui sont les autres». Le contenu de l’enseignement
de l’histoire et la manière dont elle est enseignée sont deux questions
distinctes mais interdépendantes. En effet, la définition de l’histoire
constitue un champ d’étude à elle seule. Dans de nombreux pays,
une loi interdit de révéler au grand public les dossiers du gouvernement avant
une période de trente ans; il est donc impossible de disposer, avant
l’échéance de ce délai, de tous les éléments d’information relatifs
à certains événements, et l’on peut avancer que le passage du temps
apaise les réactions à vif à certains événements. En examinant notre
passé commun, par le biais de divers récits, nous pouvons voir comment
ce passé a influencé ce que nous sommes devenus. Cette rétrospective
peut également nous aider à apprécier notre interdépendance à l’heure
de la mondialisation. En bref, cette démarche peut nous prouver
que nous avons bien plus en commun que ce qui nous sépare.
21. La compréhension et le respect de la diversité sont étroitement
liés à l’enseignement de l’histoire dans les pays en conflit, à
la fois au niveau du contenu du programme et de la manière dont
il est présenté. Les recherches menées pour le présent rapport ont
montré que de nombreux pays au passé difficile ont eu tendance à
éviter d’aborder à l’école certains événements historiques, et ce,
encore aujourd’hui (au Cap-Vert par exemple, l’histoire n’est enseignée
qu’à partir de la proclamation de la République en 1975, mais la population
sait qu’elle va bientôt devoir faire face à son passé colonial).
On peut avancer qu’une «solution irlandaise à un problème irlandais»
n’est pas forcément saine, quel que soit le pays concerné. Dans
de nombreux pays postsoviétiques et d’autres encore, les écoles
ont utilisé des manuels très sectaires, qui abordent les questions
sensibles mais en diabolisant «les autres». Cette diabolisation
est encore plus véhémente quand les séquelles du conflit demeurent
palpables. Quand une seule approche de la «vérité» historique était
présentée pour des raisons politiques, les enseignants se sont entendus
pour veiller à ne pas encourager les élèves à mettre en doute ce
principe.
22. Faire abstraction du passé est tout aussi dangereux que de
n’en connaître qu’une version partisane, comme on le voit dans les
nombreuses régions en conflit partout dans le monde. C’est pourquoi
la notion de perspectives multiples sur la base d’informations factuelles
a acquis une certaine crédibilité dans le cadre de notre lutte pour
concilier le passé que nous ne pouvons pas modifier, le présent
que nous vivons et le futur que nous voulons bâtir pour nous-mêmes
et les autres. Enseigner l’histoire en ayant recours à plusieurs
sources d’informations vise à amener les élèves à envisager les
questions sensibles d’un point de vue plus ouvert et plus curieux.
Cette approche favorise l’esprit critique et la créativité.
23. Si la notion de perspectives multiples – au sens d’une utilisation
de plusieurs sources d’information primaires et secondaires – correspond
à la manière dont l’histoire devrait être enseignée, alors il nous
reste à répondre à la question du «quoi» et du «quand». Cette question
est également liée à celle de savoir à qui s’adresse l’enseignement
de l’histoire. Comme l’ont montré les recherches menées pour le
présent rapport, les personnes ayant le plus besoin d’aide pour
réduire les clivages sont celles qui se trouvent au plus près des réalités
du conflit. Tandis que pour de nombreuses classes sociales le conflit
ne perturbe aucunement leur vie quotidienne, d’autres, au contraire,
vivent la violence et la peur au quotidien. Ces derniers évoluent
au sein de familles et de communautés qui interprètent leur situation
selon leur point de vue, c’est-à-dire de manière partisane.
24. Il faut tirer des leçons du fait que la différence d’opinions
entre les sexes s’inscrit dans ce par quoi ils se sentent chacun
concerné. Quand on leur a demandé de citer des événements historiques
marquants, des étudiants ont évoqué en premier «l’étendue de l’injustice
et les pertes humaines engendrées (indépendamment de la communauté
touchée)», et la nécessité d’observer un «devoir de mémoire». Les
filles privilégient les thèmes «de la mémoire, de la coopération
et de l’inégalité», alors que les garçons s’intéressent davantage
au «conflit communautaire ou aux origines politiques et démographiques
de l’Etat»
.
25. Si l’école ne tient pas compte du monde qui l’entoure, elle
nie le besoin fondamental de ses élèves les plus vulnérables, à
savoir inscrire dans un contexte plus large la représentation restreinte
des événements qui leur est proposée dans leur communauté. S’ils
ont créé des «havres de sécurité» pour les enfants le temps d’une
journée scolaire, ils sont aussi coupables «d’abandonner le terrain
aux exploiteurs de l’histoire»
.
26. L’histoire moderne ne s’est pas déroulée en vase clos – pas
plus que le reste de l’histoire, d’ailleurs. Il convient donc de
la replacer dans un contexte élargi, de façon à rattacher les questions
identitaires d’ici et maintenant à une réalité plus large, qui s’étend
au-delà des frontières nationales. Cette approche va conduire les
prochaines générations à envisager les événements selon la perspective
des «autres». Ce faisant, elles commenceront à éliminer petit à
petit les restes de fanatisme et de sectarisme. Avoir confiance
dans sa propre identité, et dépasser le cadre de l’introspection,
qui est plus confortable aussi bien pour les enseignants que pour
les élèves, est un défi qui vaut la peine d’être relevé mais qui
doit être soutenu par des mesures politiques.
27. D’après les études récentes, et contrairement à ce que pensent
les enseignants, les élèves souhaitent vivement qu’on leur présente
une vue d’ensemble des événements en classe. En prenant le cadre
de vie des enfants comme point de départ du cours d’histoire, l’enseignant
éveille leur imagination mais attire peut-être aussi l’attention
négative de leur famille. En s’intéressant d’abord à des sujets
non polémiques puis à des questions plus récentes, il peut repousser
certaines limites qui doivent être bousculées. Trop souvent cependant,
comme il s’agit d’événements historiques qui nous mettent mal à
l’aise, nous préférons éviter de les évoquer. En agissant ainsi,
nous faisons preuve d’intolérance ou de sectarisme, et c’est pourquoi
nous devons nous remettre en question dans ce nouveau contexte.
28. Nous devons nous mobiliser en tant que politiques et enseignants
pour appeler à un véritable changement, à une réelle tolérance et
à des progrès concrets en faveur du respect de la diversité et de l’acceptation
de la différence. Cette voie est la seule qui puisse mener les générations
futures à la paix. En fait, au vu des statistiques sur le profil
d’âge des professeurs d’histoire en Europe (60 % partiront à la
retraite au cours des dix prochaines années), le moment est peut-être
le bon, dans un contexte de changements politiques, pour aller à
la rencontre du nouveau corps enseignant et lui proposer des méthodes
d’enseignement novatrices.
4. L’exemple de l’Irlande
29. «Le conflit qui a secoué l’Irlande du Nord de 1969
au début du XXIe siècle a été de loin l’un des pires qu’ait connus
l’Europe depuis la seconde guerre mondiale» (3 665 morts jusqu’en
2002)
.
30. «Bon nombre d’observateurs occidentaux en ont conclu que la
complexité du conflit nord-irlandais et l’obsession de la religion
et de l’histoire du XVIIe siècle en avaient fait une région anachronique,
reculée dans le temps»
(Morrow).
31. A présent, les deux communautés d’Irlande du Nord, qui se
définissent comme britannique ou irlandaise, existent, encadrées
par un processus de paix souvent cité en exemple à d’autres régions
en proie à des conflits.
32. «L’efficacité de l’accord tient à ce qu’il nous offre un cadre
véritablement intégré qui se saisit des questions cruciales d’identité
et d’appartenance. Il crée en outre un cadre institutionnel capable
de gérer les principaux échanges relationnels sur ces îles, ainsi
que de nouvelles institutions qui tentent de résoudre le legs historique
d’aliénation par rapport à l’Etat»
.
33. Leur gouvernement décentralisé est un exécutif au pouvoir
partagé fondé sur le système D’Hondt. Ainsi, toutes les parties,
quelles que soient leurs divergences, sont tenues de collaborer
et de s’accorder sur la direction à donner à la vie politique.
34. Un regard sur les événements récents permet de comprendre
à quel point la situation a évolué: au début de l’année 2008, le
ministre unioniste de la Culture, Edmond Poots, a assisté à un match
de football gaélique dans le Nord; le ministre Eamon O Cuiv a financé,
à hauteur de 250 000 euros, la construction de salles orangistes
dans les zones frontalières de la république; le ministre républicain
Conor Murphy a animé une séance de questions-réponses à l’académie
de Ballymena (un lycée protestant) – la première question posée était:
«Je veux bien m’engager en politique, mais confirmez-vous que je
doive d’abord être un terroriste?»; 200 élèves venus de six écoles
de Ballymena ont effectué une visite au Parlement irlandais dans
des groupes mixtes. De telles actions et réactions n’étaient même
pas imaginables il y a quelques années seulement.
35. La diversité ethnique des communautés qui forment l’île a
elle aussi évolué, mais contrairement au passé où la question pertinente
consistait à savoir si untel était protestant ou catholique, l’on
se demande avec un brin d’humour si certains de nos tout nouveaux
citoyens sont «catholiques musulmans/hindis/juifs, ou «protestants
musulmans/hindis/juifs». Alors que les dissensions politiques s’atténuent,
nous constatons que beaucoup reste à faire pour venir à bout des
anciennes et nouvelles formes de fanatisme et de sectarisme. Nombreux
sont les habitants de la république qui pensent que ces comportements
sont concentrés dans le Nord. Cependant, la compréhension mutuelle
entre les personnes avec qui nous partageons l’île et notre place commune
dans l’histoire de l’Europe et du monde n’est pas toujours aussi
bonne que nous voudrions le croire. L’île d’Irlande dispose de compétences
de haut niveau en matière de résolution de conflits, mais elle doit encore
beaucoup apprendre avant d’éprouver un quelconque sentiment d’autosatisfaction.
36. Il n’a pas été facile d’en arriver là. Mais il est également
évident que la lutte est loin d’être terminée, compte tenu de la
persistance du sectarisme, du fanatisme et de la construction de
«murs de la paix» (il en existe 83 à ce jour, contre 18 seulement
en 1990). En réalité, comme c’est le cas pour toute fin de conflit,
le processus a mis du temps et n’est pas encore arrivé à son terme.
«Comment les historiens parviendront-ils à comprendre ce qui s’est
passé, si nous qui avons vécu cette époque n’arrivons toujours pas
à en finir?» Voilà une question pertinente et récurrente, soulignant
la différence entre l’évènement au moment où il se produit et l’évènement
ayant eu lieu et considéré avec le recul de l’histoire.
37. Dans l’optique «ici et tout de suite», il est facile de dire
que tout récit des événements doit être fait par une personne ayant
à sa disposition d’innombrables sources et ressources. Ceux qui
ont vu les deux partis politiques «extrémistes» du refus réunis
à la tête d’un exécutif de coalition, tandis que les deux partis d’opposition
traditionnellement «favorables à la paix» sont minoritaires dans
ce gouvernement autonome, soutiendront fermement le concept de «multiéclairage»
comme approche de l’enseignement de l’histoire. Il permet une analyse
objective des événements et augmente les aptitudes des apprenants
à aborder le futur ensemble dans une société encore plus diverse.
38. Briser les barrières est un impératif politique. Dans certains
cas, les interactions au niveau communautaire ont été plus fortes
qu’au niveau politique. Les fonds du Programme européen pour la
paix et la réconciliation (essentiellement concentré sur les pays
frontaliers) ont permis de réaliser des projets transfrontaliers
et intercommunautaires de grande et de petite envergure depuis le
début du processus de paix. Cependant, bon nombre de communautés
ne se connaissent pas et, par conséquent, ne se font pas confiance. Un
leadership politique et religieux est aussi impératif dans les salles
de classe qu’au sein des communautés, pour faire entendre le message
de la tolérance.
39. L’idée de réunir des personnes d’origines diverses gagne progressivement
les écoles et les élèves. A Omagh, un groupe d’écoles de confessions
différentes s’est récemment proposé de partager le même campus.
Même si cette initiative pourrait être perçue comme un nouveau rejet
de l’intégration totale, nous devons reconnaître qu’elle a le double
mérite d’être adaptée à la situation économique actuelle et de permettre aux
enfants de se rencontrer plus facilement. La visite du ministre
républicain à une école unioniste a peut-être été l’occasion pour
certains élèves de rencontrer un catholique pour la première fois,
peu importe qu’il soit républicain. Je suis convaincu que des initiatives
de ce genre deviendront monnaie courante et mettront ainsi fin à
la diabolisation de «l’autre côté». C’est en se parlant que les
gens arrivent à découvrir les croyances et les valeurs des uns et
des autres. En tolérant la différence, nous pourrons nous rendre
compte du pourcentage plus élevé de choses que nous avons en commun.
Les leçons d’histoire ont besoin de cet élément de contact préliminaire
qui bouscule les limites du confortable.
40. En Irlande du Nord, l’évolution de la situation politique
s’est accompagnée de profonds changements dans les programmes scolaires.
Le caractère essentiellement ségrégationniste du système éducatif
se reflétait même dans les matières enseignées, comme l’histoire.
Le programme proposé à l’élève variait considérablement selon qu’il
fréquentait un établissement catholique ou protestant. Aujourd’hui,
les autorités essaient non seulement d’élargir les thèmes politiques
abordés par les élèves divisés, mais également d’introduire des
thèmes neutres, tels que les œuvres du poète Seamus Heaney, lauréat
du prix Nobel. L’apparition dans les «autres» écoles de thèmes qui
n’étaient pas traditionnellement enseignés est un signe d’évolution.
41. De simples choses comme l’importance de personnalités protestantes
ayant appartenu au Mouvement indépendantiste irlandais sont souvent
perdues dans le mode d’identification actuel, qui met l’accent sur
la religion, définissant les nationalistes/républicains comme des
catholiques et les unionistes/loyalistes comme des protestants.
De même, l’insurrection de 1916 est considérée par certains comme
le comportement antipatriotique d’un petit groupe d’Irlandais envers
la Grande-Bretagne, alors qu’elle était engagée dans une guerre.
En fait les Irlandais s’insurgeaient contre le colonialisme, à l’instar
des guerres d’indépendance observées dans plusieurs autres parties
du monde de 1914 à 1918. De tels exemples permettent de lier l’histoire
de l’Irlande à celle de l’Europe et du monde, et récusent l’aspect
ségrégationniste de notre histoire. Si la paix continue à régner,
les questions d’identité et de tolérance constitueront une préoccupation
majeure pour tous les habitants de l’île, en particulier les générations
futures qui sont actuellement sur les bancs de l’école.
42. Tout récemment, un projet de collecte et d’exposition des
souvenirs de la Guerre d’indépendance (1920-1921) au camp d’internement
de Ballykinlar, dans le comté de Down, a suscité des réactions négatives.
D’où la nécessité pour nos hommes politiques de faire preuve de
courage pour affronter le passé. Pour «vivre et laisser vivre» et
véhiculer un sentiment de tolérance, nous avons besoin non seulement
d’un changement de programme scolaire et de consignes réglementaires
adressées aux enseignants, mais également d’un leadership politique.
43. Des études démontrent clairement que de nombreux élèves ont
renoncé à étudier l’histoire parce qu’ils la trouvaient trop axée
sur les aspects politiques de notre passé, au détriment des aspects
culturels, sociaux, économiques et bien d’autres. De nombreux pays
luttent contre cette perte d’intérêt pour l’histoire.
44. Mon rapport relatif au cas irlandais
dans le cadre de la commission de
l’éducation), souligne que les changements en cours sont bien accueillis
par les enseignants. Les modifications apportées, ainsi que les réactions
qu’elles ont suscitées, sont exposées en détail dans le rapport
que je viens d’achever sur ce sujet. Il comprend des réactions aux
séances de formation continue organisées et évaluées par le département
de la République chargé de l’éducation et parle des efforts entrepris
même au niveau des inspections départementales, en vue d’harmoniser
les programmes dans toute l’île et au Royaume-Uni, qui enseignent également
des modules sur l’histoire de l’Irlande.
45. Parmi les principaux changements effectués en République d’Irlande,
on note la réduction du contenu des programmes d’histoire pour le
deuxième cycle de l’enseignement secondaire et l’introduction d’éléments non
politiques. La taille réduite des programmes permettra une exploration
plus approfondie des thèmes. Ces derniers transcendent les clivages
communautaires. D’autres changements sont prévus, mais les responsables
du département de l’Education commencent à comprendre l’importance
d’un enseignement fondé sur la multiplicité des perspectives.
46. Nul doute que tout le monde souhaite vivre en paix. L’enseignement
de l’histoire en Irlande peut contribuer à terme à la réalisation
de cet objectif, mais le processus politique doit continuer à faire
progresser la réforme de l’éducation. Le mode de gouvernement pratiqué
au Nord représente un défi majeur dans ce processus, mais recèle
également un énorme potentiel.
5. Bosnie-Herzégovine
47. En dépit de son adoption en 1989, l’Acte de réforme
de l’éducation introduisant l’éducation intégrée en Irlande du Nord,
que j’ai mentionné plus haut, a été très peu suivi d’effet. Il n’y
a pas longtemps, un certain nombre d’écoles de confessions différentes
ont émis l’idée controversée de partager un même campus. Il était prévu
que chaque école conserverait son identité, mais utiliserait les
mêmes installations que les autres. C’est un des rares signes d’évolution
dans une société qui a toujours été très marquée par la ségrégation.
En revanche, la ségrégation sociale en Bosnie-Herzégovine est plus
récente. En Irlande, d’aucuns pensent que la solution au conflit
consisterait à mettre fin à cette ségrégation entretenue par une
bonne partie du budget de l’exécutif. Il était intéressant d’écouter
le président Silajdžić lorsqu’il se disait navré que certaines personnes déclarent
ouvertement que l’on s’achemine vers une société ségrégationniste
en Bosnie-Herzégovine. Il envisage la mise en application de l’annexe
4 de l’Accord de Dayton et reconnaît que beaucoup reste à faire pour
mettre fin à ce qui s’apparente déjà à un apartheid. En réponse
à une question que je lui ai posée lors de la réunion de la session
de l’Assemblée en septembre 2008, il a lancé un appel à l’aide:
«J’exhorte les institutions comme celle-ci, ainsi que les organes
qui la composent, à nous aider à mettre fin à cette pratique; tel
est probablement le souhait de la majorité des habitants de la Bosnie-Herzégovine.»
48. Un processus visant à régler la question de l’enseignement
de l’histoire en Bosnie-Herzégovine a été enclenché en 1999. En
2001, l’accent a été mis sur la Recommandation Rec(2001)15 du Comité
des Ministres du Conseil de l’Europe relative à l’enseignement de
l’histoire en Europe au XXIe siècle (2001),
qui stipule que l’enseignement de l’histoire devrait «occuper une
place essentielle pour la formation d’un citoyen responsable et
actif et pour le développement du respect de toute sorte de différences,
respect fondé sur une compréhension de l’identité nationale et des
principes de tolérance», et «permettre au citoyen européen de mettre
en valeur son identité individuelle et collective par une connaissance
du patrimoine historique et culturel commun dans ses dimensions
locale, régionale, nationale, européenne et mondiale».
49. En 2002, il a été convenu que 70 % du programme serait identique
pour tous les élèves. Les cantons ont participé au «matériel d’intérêt
national» pour 30 % environ, mais à l’époque cette initiative ne
répondait pas vraiment à une tentative de modernisation du programme.
Elle visait uniquement à le rendre plus acceptable du point de vue
ethnique. Tous les pays sortant d’un conflit sont confrontés à ce
décalage entre les aspirations et la réalité, que ce soit au plan
politique ou éducatif. Or, tout processus a besoin d’être stimulé pour
évoluer à un rythme normal. La Bosnie-Herzégovine n’est pas une
exception.
50. En 2006, le processus des Lignes directrices communes, coordonné
par le Conseil de l’Europe, a débouché sur la rédaction de nouveaux
manuels d’histoire et de géographie. Deux manuels scolaires ont
ainsi été réalisés, qui mettent en œuvre la réforme. 50 % des contributions
au manuel provenaient de sources locales. Ce processus – auquel
participait la mission de l’Organisation pour la sécurité et la
coopération en Europe (OSCE) en Bosnie-Herzégovine (qui assiste
et encourage les autorités locales à la mise en place d’un système
éducatif véritablement intégrateur dans le cadre de son mandat de
réhabilitation postconflit), l’Institut Georg Eckert pour la recherche
internationale sur les manuels scolaires (Allemagne), le Gouvernement
du Canada (fonds du Programme d’initiatives locales (PIL) débloqués
par le bureau de l’Agence canadienne de développement international
(ACDI) à Sarajevo) et surtout des experts originaires de la Bosnie
et de toute l’Europe – doit servir d’exemple de progrès à d’autres
pays.
51. De nouveaux manuels sont en circulation depuis 2007. Ils résultent
d’une nouvelle approche pour mettre en œuvre le programme scolaire.
Se démarquant des tentatives habituelles d’«occultation de matériaux insultants»,
ils proposent de nouveaux contenus et une nouvelle méthodologie.
Les séminaires régionaux (dont la première vague s’est achevée en
juin 2008) sur le Manuel de l’enseignant aident désormais les enseignants
à mettre à profit le potentiel des nouveaux manuels. Cinquante enseignants
d’origines diverses étaient présents au séminaire auquel j’ai pris
part en mars 2008. Ils se sont montrés très ouverts et engagés dans
le processus d’apprentissage de l’histoire fondé sur la multiplicité
des perspectives. Le séminaire en lui-même était un exemple d’enseignement
interactif, car les enseignants ont découvert un nouveau concept pédagogique,
totalement différent de ce à quoi ils étaient habitués (des détails
complets de la réaction des enseignants à cette session de formation
continue sont disponibles).
52. Enseignants et syndicats d’enseignants se font de plus en
plus entendre en Bosnie-Herzégovine. Le pays est fragmenté par nature
et compte au moins 11 syndicats qui, de ce fait, ne peuvent pas
contribuer de manière effective à la prise de décisions. Toutefois,
l’ensemble des séminaires de formation qui se sont tenus jusqu’ici
a bénéficié du soutien total et unanime de tous les ministères de
l’Education et institutions pédagogiques.
53. En 2007, EUROCLIO a publié, grâce à l’appui financier des
Pays-Bas, un guide de ressources, en langues locales, à l’intention
des enseignants. Au séminaire de Sarajevo, tous étaient unanimes
pour reconnaître qu’une telle initiative aurait été vouée à l’échec
il y a six ou sept ans, car les enseignants auraient ressenti la
nécessité de protéger leurs «positions». Il y a très peu de temps
encore, toute «nouvelle» approche aurait engendré une sorte de rébellion.
En mars 2008, les trois groupes présents dans la salle de réunion
ne montraient aucune réticence. Cette évolution des mentalités est
également perceptible chez les élèves. Certains échanges scolaires
et activités intercommunautaires n’auraient pas été possibles il
y a quelques années.
54. Même si je crains qu’il soit difficile d’insuffler une vision
unique pour l’avenir de l’enseignement de l’histoire en raison du
nombre élevé de ministres de l’Education dans le pays, je dois admettre
qu’un travail impressionnant a déjà été accompli et mérite d’être
poursuivi. L’importance d’une réforme de l’éducation est soulignée
dans les propos de Claude Kieffer, directeur de l’Education pour
la Mission de l’OSCE en Bosnie-Herzégovine:
Dans un Etat plurinational, multiconfessionnel et sortant
d’un conflit, qui connaît de surcroît une transition politique,
sociale et économique difficile, l’éducation est peut-être l’élément
primordial pour asseoir la stabilité, la sécurité et la réconciliation.
Une réforme de l’éducation est nécessaire pour que les questions
idéologiques qui avaient mené à la guerre – identité, histoire,
culture, langue, souveraineté, autodétermination, droits des individus
et des groupes – cèdent la place à une nouvelle ère de confiance
et de réconciliation dans l’après-guerre, grâce notamment à un système
éducatif de plus en plus accessible, acceptable et efficace pour
tous les citoyens, sans distinction d’origine ethnique ou de statut.
6. La mer Noire
55. En 1993, les chefs d’Etat européens se sont engagés
à renforcer les programmes visant à combattre les préjugés dans
l’enseignement de l’histoire et à encourager l’adoption d’attitudes
positives réciproques face aux différences d’ordre confessionnel
et culturel. Les recommandations relatives à l’enseignement de l’histoire adoptées
en 2001 par le Conseil de l’Europe ont reconnu l’évolution du contexte
européen et insisté sur la nécessité de préserver l’histoire de
toute influence politique ou idéologique et de veiller à ce qu’elle
ne soit pas manipulée par les politiciens, mais utilisée pour faire
connaître l’identité nationale et découvrir le riche passé des autres
cultures. La recommandation portait sur la compréhension de la différence,
la valorisation de la diversité, le respect d’autrui, le développement
du dialogue interculturel et l’établissement de relations sur la base
de la compréhension mutuelle et de la tolérance.
56. A partir de cette recommandation, des projets ont vu le jour
à divers endroits afin de mettre ces idées en pratique. Au fur et
à mesure que les réalités socioculturelles sont prises en compte,
les événements sont vécus au-delà des frontières nationales et des
limites établies. Un projet, «Initiative de la mer Noire sur l’histoire»
a commencé en 1999. Mais la Bulgarie, la Fédération de Russie, la
Géorgie, Moldova, la Turquie et l’Ukraine étaient toutes parties
prenantes à cette initiative visant la mise en place d’un dossier
pédagogique fournissant à chaque pays son propre matériel pédagogique
ainsi que celui utilisé par ses voisins, de façon à mettre en pratique
la recommandation de 2001. Ce dossier a été publié en 2004.
57. L’histoire avait été confinée au contexte national des Etats,
et rien ne les incitait jusque-là à dépasser ces limites. Il était
pourtant évident que de nouvelles stratégies étaient nécessaires
pour comprendre le passé afin de mieux aborder l’avenir, et pour
valoriser l’histoire d’autres peuples et le mode de cohabitation
de religions différentes. Ce nouveau projet se voulait dynamique
et non pas statique. Il offrait aux enseignants concernés une courbe
d’apprentissage unique, puisqu’ils étaient appelés à travailler
avec très peu d’informations sur la région. Les sources étaient
éparses, difficiles à localiser et écrites dans 12 langues différentes.
Ce processus de recherche a permis le développement d’un outil pédagogique
dont l’utilité dépassait le cadre du dossier pédagogique. A présent,
des équipes interdisciplinaires composées de spécialistes travaillent
plus régulièrement dans la zone, avec un matériel beaucoup plus
accessible à tous les pays.
58. Un projet englobant la mer Méditerranée est également en gestation.
Il espère bénéficier de l’appui du Centre européen pour l’interdépendance
et la solidarité mondiales (Centre Nord-Sud), mais demeure au stade embryonnaire.
7. L’enseignement
de l’histoire en Europe (dix ans de coopération entre la Fédération
de Russie et le Conseil de l’Europe, 1996-2006)
59. Depuis 1996, la Fédération de Russie a accueilli
des délégués du Conseil de l’Europe, de l’UNESCO, de l’Institut
Georg Eckert de recherche internationale sur les manuels scolaires
et d’EUROCLIO, à l’occasion d’événements auxquels étaient également
présents les ministres régionaux de l’Education. Dix ans de coopération
avec la Fédération de Russie ont permis de se faire une idée globale
de sa diversité culturelle, qui inspire le projet intergouvernemental
du Conseil de l’Europe «L’image de l’autre dans l’enseignement de l’histoire»,
qui est en cours de réalisation et auquel participent les 49 Etats
parties à la Convention culturelle européenne.
60. Andrey Fursenko, ministre de l’Education et de la Science
de la Fédération de Russie, estime que les dix ans de coopération
avec le Conseil de l’Europe ont favorisé «l’élaboration de normes
dans le domaine de l’enseignement de l’histoire et l’évaluation
des connaissances et des aptitudes acquises par les élèves dans l’apprentissage
de l’histoire». Il a salué les programmes internationaux qui ont
aidé les pays à se faire une idée impartiale du passé et du présent
grâce à une réforme de l’enseignement de l’histoire dans les établissements scolaires.
Le ministre a rendu un hommage appuyé aux enseignants, spécialistes
de la méthodologie, chercheurs, auteurs de manuels, éditeurs, experts
nationaux et internationaux, qui ont tous collaboré à ce projet.
Il comportait un volet bilatéral et multilatéral incluant l’Initiative
de la mer Noire, l’Initiative de Tbilissi, et le Programme de coopération
avec le Japon.
61. L’expérience russe couvrait trois périodes et trois thématiques:
- 1996-1999 – Quels sont les objectifs
de l’enseignement de l’histoire? Quel est le rôle des normes dans ce
processus? Comment des éléments régionaux, nationaux et internationaux
peuvent-ils être intégrés? Quel est le rôle des manuels et de la
formation continue?
- 2000-2003 – Accent sur la formation continue au moyen
d’ateliers organisés dans toutes les régions de la République en
vue d’informer les enseignants (par exemple ceux de la République
de Tchétchénie, y compris dans les camps de réfugiés) des nouvelles
méthodes et de créer une plate-forme d’échange de vues entre les
éducateurs de la Fédération de Russie et ceux du reste de l’Europe.
- 2004-2006 – Réflexions sur le dialogue interculturel et
les voies et moyens de l’intégrer dans l’élaboration des ressources
et le processus de formation continue afin que la diversité soit
perçue comme un facteur d’enrichissement. L’activité a été poursuivie
après 2006 en se concentrant sur l’enseignement de la diversité
culturelle par l’histoire, afin de renforcer la cohésion sociale
et la coopération dans la société contemporaine.
8. Chypre
62. A Chypre, comme dans d’autres pays déjà mentionnés,
les objectifs de la Recommandation Rec(2001)15 relative à l’enseignement
de l’histoire en Europe au XXIe siècle ont été adoptés et transmis
aux enseignants ainsi qu’aux formateurs d’enseignants d’histoire,
grâce à la coopération du Conseil de l’Europe avec de nombreux syndicats
d’enseignants et en particulier l’Association pour le dialogue et
la recherche historique (ADRH).
63. En 2004, un programme initial comprenant six activités a vu
le jour grâce au Conseil de l’Europe (la première grâce à la coopération
de la Commission J.W. Fulbright de Chypre et de l’Association pour
le dialogue et la recherche historique). Six cents personnes (formateurs
d’enseignants, représentants d’ONG, spécialistes de la formation
initiale et enseignants d’histoire appartenant à différentes communautés)
ont pris part aux séminaires, ateliers et réunions d’experts. L’objectif
général des rencontres était de créer un vaste forum d’information
sur les nouvelles approches dans l’enseignement de l’histoire et
de contribuer, avec l’ensemble multiculturel du corps enseignant
chypriote, à instaurer la confiance. Elles ont permis d’identifier
les besoins en termes de matériel didactique pouvant être utilisé
au sein de toutes les communautés et le manque d’informations méthodologiques
sur les nouvelles méthodes interactives. Dès le départ, toutes les
activités étaient dirigées par des enseignants chypriotes et adaptées
à leurs propres besoins pédagogiques. Elles étaient par conséquent
pratiques et axées sur les besoins identifiés qui d’ailleurs constituaient
les thèmes des séminaires.
64. Le premier résultat a été la publication, en 2004, d’un ouvrage
intitulé
Multiperspectivity in Teaching
and Learning History en anglais, en grec et en turc
. Il a été bien accueilli par les
enseignants à travers toute l’île. Grâce à la coopération, il combine
des approches novatrices de l’enseignement de l’histoire et les
diffuse à l’échelle nationale et internationale.
65. En 2005, les enseignants chypriotes ont éprouvé le besoin
de se doter de ressources similaires au dossier pédagogique de la
mer Noire. Ils ont estimé qu’il était important de disposer d’un
outil pédagogique complémentaire contenant le matériel source et
son mode d’emploi. Les informations contenues dans les sources ne
devaient pas être identiques au contenu des manuels d’histoire nationaux,
mais plutôt mettre l’accent sur l’histoire culturelle, sociale et
économique de Chypre. Le but était de présenter le multiculturalisme de
Chypre à travers ses modes de vie ruraux et urbains, ses us et coutumes
et son style d’habitat, et de dégager l’impression que le visiteur
étranger se fait de l’île.
66. Tout au long de l’année 2006, des réflexions se sont poursuivies
sur les moyens pratiques de promotion du dialogue interculturel.
Des séminaires et ateliers de formation des enseignants ont été
organisés, et des enseignants d’histoire d’Allemagne, d’Autriche,
du Portugal, de la Serbie et du Royaume-Uni y ont participé afin
d’échanger leurs points de vue et de partager leurs expériences.
67. Les participants ont été particulièrement satisfaits du fait
que les activités étaient évaluées au fur et à mesure qu’elles se
déroulaient, preuve que leur temps était utilisé de façon rationnelle,
car tout ce qu’ils apprenaient leur était aussitôt utile en classe,
notamment pour identifier les sources, développer les réflexes pédagogiques
et planifier les leçons. Cela s’appliquait à toutes les communautés,
sans distinction. En effet, la recherche de thèmes d’intérêt commun
a orienté l’un des ateliers vers le partage de sources entre communautés.
Ce côté pratique prouvait que la confiance recherchée était en train
de s’instaurer et s’étendait aux ateliers dirigés par des équipes
de formateurs appartenant à diverses communautés locales et européennes.
La réussite était également visible dans les chiffres, car le séminaire
de décembre 2006 avait enregistré 500 demandes d’inscriptions.
68. Des élèves représentant le «Doves Olympic Movement» ont pris
part au dernier atelier. En général les commentaires à chaud des
principaux acteurs de la salle de cours sont une perspective qui,
bien que négligée, devrait rester au cœur de tous les débats.
69. En janvier 2009, ces travaux ont débouché sur une deuxième
publication trilingue (en anglais, grec et turc) sur
The Use of Sources in Teaching and Learning
History , que la directrice du projet, Tatiana
Minkina-Milko, résume ainsi: «Cette publication présente la philosophie
et la structure qui pourraient servir à l’avenir de base d’un ensemble
supplémentaire de matériels pédagogiques.»
70. Il est nécessaire que les systèmes politiques reconnaissent
la valeur du travail déjà accompli. Compte tenu de l’évolution positive
du climat politique entre les chefs de communautés, les bases du
progrès n’ont pas besoin d’être réinventées, mais plutôt étendues
et soutenues. Lors de la séance plénière de septembre, MM. Christofias
et Talat reconnaissaient en effet le rôle de l’enseignement de l’histoire
dans la consolidation de la paix et de la réconciliation, même si
le «calumet de la paix» comportait également un volet politique.
71. «D’aucuns disent que Chypre est composée de deux “peuples”
– faux, il n’y a qu’un seul peuple, constitué de deux communautés.
(…) Cette année le gouvernement s’est engagé à mettre en œuvre la
réforme de l’éducation. Elle prévoit l’enseignement de la réconciliation.
Nous ne resterons pas muets sur l’ingérence et l’occupation – cela
est un fait. (…) Nous changerons progressivement les livres d’histoire
afin d’éduquer les jeunes de façon plus objective et d’éviter tout
sentiment de haine – ne pas enseigner la haine à l’égard des Chypriotes
turcs. Pour être plus clairs, nous n’éprouvons aucun sentiment de
haine envers le peuple turc – les populations sont toujours innocentes
– les dirigeants sont les seuls coupables des nombreux crimes. Mais
il est évident que nous prendrons des mesures concrètes en vue de
répondre au problème que vous avez soulevé»
.
72. «Nous avons passé notre enfance et notre adolescence sur un
volcan prêt à entrer en éruption d’une minute à l’autre. A présent,
nous sommes soucieux d’assurer un avenir paisible à nos enfants.
Et à cet égard, nous considérons l’avènement d’une paix durable
à Chypre comme une question humanitaire urgente. (…) Les relations
entre les jeunes générations des deux côtés de l’île dépendront
de la solution globale qui sera trouvée ainsi que des moyens prévus
pour la rendre durable. J’ai le plaisir de vous informer que notre
ministre de l’Education a révisé les manuels actuellement utilisés
dans les écoles conformément aux principes et recommandations du
Conseil de l’Europe. Nous espérons que la partie chypriote grecque
interviendra sans tarder pour éliminer de ses manuels tout langage
incitant à l’hostilité et à la haine envers les Chypriotes turcs. Nous
attendons du Conseil de l’Europe qu’il encourage et amène la partie
chypriote grecque à agir dans ce sens»
.
73. L’un des points soulevés par M. Talat et qui revient souvent
dans la plupart des pays, c’est la nécessité d’un enseignement et
de ressources pédagogiques dans la langue maternelle des apprenants: «A
l’exemple de la partie chypriote turque, nous avons offert aux enfants
chypriotes grecs du nord de Chypre la possibilité de recevoir dans
leur langue maternelle, et sans interruption, une éducation scolaire
élémentaire et secondaire dispensée par des enseignants chypriotes
grecs et conforme au programme chypriote grec. Vous devriez encourager
la partie chypriote grecque à honorer ses engagements oraux et écrits
devant les Nations Unies, à savoir la construction d’établissements
secondaires séparés pour les élèves chypriotes turcs et l’offre
d’une éducation en langue maternelle à ces enfants, ce qui constitue
un droit humain fondamental.»
74. Notons cependant qu’il s’agit là d’une tout autre procédure,
engagée aux niveaux politique et pédagogique. Les travaux du Conseil
de l’Europe ont toujours été et devraient rester un élément central
de l’évolution de l’enseignement de l’histoire.
9. Autres initiatives
75. En 1997, le ministère de l’Education de la Géorgie
a commencé la rédaction d’un manuel complémentaire sur «L’histoire
du Caucase» avec le soutien de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan et de
la Fédération de Russie; les autorités roumaines se sont jointes
au projet.
76. En 1998, le projet russo-japonais a été lancé. Il vise à explorer
la manière dont la Russie enseigne l’histoire du Japon et réciproquement.
Un outil didactique supplémentaire intitulé «Histoire et culture
du Japon: Documents et illustrations» a été publié en 2003.
77. En 2006, la «dimension européenne dans l’enseignement de l’histoire»
a produit une compilation de sources historiques sur un CD-ROM contenant
des archives récentes d’Europe orientale.
78. En 2007 a été lancé le projet triennal du Conseil de l’Europe
«L’image de l’autre dans l’enseignement de l’histoire». Ses objectifs
sont de présenter une recommandation du Comité des Ministres, de
préparer un manuel pour les enseignants et d’élaborer des lignes
directrices pour le développement de l’enseignement de l’histoire
dans un contexte multicuturel.
79. L’enseignement de l’histoire devrait avant tout viser à renforcer
le processus de réconciliation, à promouvoir les principes de respect
mutuel et à ouvrir des voies supplémentaires de coopération. En
outre, l’enseignement de l’histoire ne devrait pas se limiter à
la politique, mais englober l’histoire culturelle, économique et
sociale et celle de la vie quotidienne, afin d’offrir une vue d’ensemble
à l’élève pour l’inciter à rechercher la paix et l’unité avec les
autres. Les psychologues ont confirmé que le fait de mettre l’accent
sur les problèmes politiques, notamment les conflits, pourrait engendrer
l’hostilité et la violence chez les élèves.
80. La question des normes dans l’enseignement de l’histoire était
au cœur du débat – quelle personnalité, quel événement ou quelle
interprétation devrait être «retenu(e)» ou «retiré(e)» des programmes.
Un phénomène récent consiste à observer les exigences pédagogiques
relatives à la capacité de l’élève à «traiter l’information et à
l’appliquer à un nouvel environnement social». La question des normes
doit prendre en compte aussi bien ceux qui les établissent que les
enseignants chargés de les appliquer – et «déterminer, avant tout,
le caractère et le niveau de raisonnement, la capacité d’apprentissage
par observation et le niveau de créativité des élèves, plutôt que
le contenu réel des programmes d’histoire».
81. Une commission mixte Russie-Ukraine dirigée par l’académicien
Alexander Chubarayan vient de s’achever (novembre 2008). Chaque
pays participant a rédigé un livre sur son histoire complète, qui
a été traduit dans la langue de l’autre. Cette initiative a déjà
suscité certaines critiques dans les médias, preuve que certains
membres de nos communautés ont encore besoin d’être sensibilisés
sur la nécessité de développer un esprit de compréhension plutôt
que d’hostilité permanente.
10. Conclusion
82. La résolution de conflits demeure un processus. La
restauration de la confiance au niveau politique est un processus
au cours duquel il est indispensable de faire preuve de patience,
comme l’a si bien dit le sénateur George Mitchell après le démarrage
du processus de paix en Irlande. La confiance nécessaire pour résoudre les
questions sensibles, aussi bien sur le plan politique qu’éducatif,
s’acquiert également au cours d’un processus. Tous ces processus
sont indispensables pour faire triompher la paix, l’entente et la
tolérance à tous les niveaux de notre société. Même si nous ne pouvons
pas les accélérer, nous ne pouvons pas non plus permettre que ces
processus demeurent statiques. Aucune forme de média (télévision,
radio, journaux, livres et magazines) n’est statique. Toutes sont
des canaux de transmission d’événements actuels, c’est-à-dire de l’«histoire».
Les processus de paix politiques ne peuvent se soustraire à l’exigence
de développer de nouvelles aptitudes et de créer de nouvelles opportunités
pour les générations futures par le biais d’un système éducatif capable
d’aider les élèves à avoir un regard critique sur le type d’informations
transmises et de comprendre que les messages peuvent être véhiculés
aussi bien de façon directe que subliminaire. La réforme de l’éducation
doit être menée par la sphère politique.
83. Tandis que les hommes politiques se surveillent de près et
s’informent pour connaître leurs adversaires, enseignants et élèves
doivent eux aussi avoir la possibilité de se connaître en tant que
personnes et individus pour ne plus être diabolisés. Il est plus
difficile de haïr une personne dont on a vu le visage, qu’une personne que
l’on n’a jamais rencontrée. L’enseignement de l’histoire peut constituer
pour nous un moyen de rencontre. Les enseignants d’histoire suivront
le programme. Il a été prouvé que plus la gamme de choix est variée,
plus il est certain que chaque «côté» choisira ses thèmes favoris
et évitera les plus difficiles. Maintenu à une taille raisonnable,
le programme aura un impact optimal sur les élèves.
84. Son contenu doit être décidé en collaboration avec les enseignants
et autres professionnels. Ceux qui écrivent l’histoire ont également
une importance capitale, car la télévision nous donne de manière
instantanée le reportage des événements actuels. Il est indispensable
que les historiens rédigent l’histoire pour que les élèves aient
le récit des événements à partir de sources primaires et secondaires
telles que les romans historiques, les films, les sites internet,
des échanges avec les élèves d’autres pays grâce à la technologie,
la visite de sites historiques (à l’instar du musée du Soulèvement
de Varsovie) et l’humour des SMS. Par exemple, j’ai récemment appris
l’existence sur Chanel+ d’une série canadienne, «La petite mosquée
dans la prairie», qui utilise l’humour pour abattre les vieux préjugés.
On n’a pas encore pleinement exploité le rôle de l’humour, fondé
sur la connaissance d’autres cultures et le respect mutuel, pour
«apprendre à connaître l’autre».
85. Cela nécessite plus de ressources, une évaluation et un suivi
permanents, mais nous avons déjà vu qu’avec de la volonté, nous
arrivons toujours à nos fins. Nous luttons pour une cause noble,
et sans sous-estimer les défis qui attendent encore ceux qui se
sont engagés dans ce combat, je salue le travail impressionnant
qui a été accompli jusqu’ici – des volumes sont certes en cours
de rédaction, mais beaucoup d’expériences sont réellement vécues
«sur le terrain». Une étude comme celle-ci n’est pas suffisante
pour décrire toutes ces activités, mais donne une vue d’ensemble
d’une petite partie des projets visant à surmonter les défis liés
à l’enseignement de l’histoire dans les zones de conflit et de postconflit.
Laissons le mot de la fin, qui se fait l’écho de l’inscription du
Garrick Bar à Belfast, à Luisa Black, qui a acquis une grande expérience en
la matière: «Si on regarde le passé avec les yeux de l’avenir, on
peut en tirer des conclusions erronées, sauf si on voit vraiment
ce qu’on regarde.»
Commission chargée du rapport: commission
de la culture, de la science et de l’éducation
Renvoi en commission: Doc. 11338 et Renvoi 3400 du 21 janvier 2008
Projet de recommandation adopté
à l’unanimité par la commission le 28 avril 2009
Membres de la commission: Mme
Anne Brasseur (Présidente),
M. Detlef Dzembritzki (1er
Vice-Président), M. Mehmet Tekelioğlu (2e
Vice-Président), Mme Miroslava Němcová (3e Vice-Présidente), M.
Vicenç Alay Ferrer, M. Florin Serghei Anghel,
Mme Aneliya Atanasova, M. Lokman Ayva,
M. Walter Bartoš (remplaçante: Mme Alena Gajdůšková),
Mme Deborah Bergamini, Mme
Oksana Bilozir (remplaçante:
Mme Olha Herasym’yuk), Mme
Guðfinna S. Bjarnadóttir, Mme Rossana Boldi,
M. Ivan Brajović, M. Petru Călian,
M. Miklós Csapody, M. Vlad Cubreacov, Mme Lena Dąbkowska-Cichocka,
M. Joseph Debono Grech, M. Ferdinand
Devínsky, M. Daniel Ducarme, Mme Åse Gunhild Woie Duesund, Mme Anke Eymer, M. Gianni Farina, M. Relu Fenechiu, Mme Blanca
Fernández-Capel Baños, M. Axel Fischer,
M. Gvozden Srećko Flego, M.
Dario Franceschini, M. José Freire Antunes (remplaçant:
M. José Luis Arnaut), Mme
Gisèle Gautier, M. Ioannis
Giannellis-Theodosiadis, M. Martin Graf, M. Oliver Heald, M. Rafael Huseynov, M. Fazail İbrahimli,
M. Mogens Jensen, M. Morgan
Johansson, Mme Francine John-Calame, Mme Flora Kadriu, Mme Liana
Kanelli, M. Jan Kaźmierczak,
Mlle Cecilia Keaveney, Mme
Svetlana Khorkina (remplaçant: M. Igor Chernyshenko), M. Serhii
Kivalov, M. Anatoliy Korobeynikov,
Mme Elvira Kovács, M. József Kozma, M. Jean-Pierre Kucheida,
M. Ertuğrul Kumcuoğlu, Mme
Dalia Kuodytė, M. Markku Laukkanen,
M. René van der Linden, Mme Milica Marković,
Mme Muriel Marland-Militello,
M. Andrew McIntosh, Mme Maria Manuela de Melo, Mme Assunta Meloni
(remplaçant: M. Pier Marino Mularoni),
M. Paskal Milo, Mme Christine Muttonen (remplaçant:
M. Albrecht Konečný), M.
Tomislav Nikolić, M. Edward O’Hara,
M. Kent Olsson, M. Andrey Pantev,
Mme Antigoni Papadopoulos, Mme Zaruhi Postanjyan,
Mme Adoración Quesada Bravo, M. Frédéric Reiss,
Mme Mailis Reps, Mme Andreja Rihter,
M. Nicolae Robu, M. Paul
Rowen, Mme Anta Rugāte, Mme Ana Sánchez Hernández, M. Leander Schädler, M. Yury Solonin, M. Christophe Steiner,
Mme Doris Stump, M. Valeriy Sudarenkov, M. Petro Symonenko,
M. Guiorgui Targamadzé, M. Hugo Vandenberghe, M. Klaas De Vries,
M. Piotr Wach, M. Wolfgang Wodarg
N.B. Les noms des membres ayant participé à la réunion sont
indiqués en gras
Secrétariat de la commission: M. Ary, M. Dossow