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Réponse à Recommandation | Doc. 12364 | 27 septembre 2010

Contribution du Conseil de l’Europe au développement de l’espace européen de l’enseignement supérieur

Auteur(s) : Comité des Ministres

Origine - adoptée à la 1091e réunion des Délégués des Ministres (16 septembre 2010) 2010 - Quatrième partie de session

Réponse à Recommandation: Recommandation 1892 (2009)

1. Le Comité des Ministres a examiné avec attention la Recommandation 1892 (2009) de l’Assemblée parlementaire sur la « Contribution du Conseil de l’Europe au développement de l’espace européen de l’enseignement supérieur ». Il l’a portée à l’attention des gouvernements des Etats membres et l’a communiquée pour information et commentaires éventuels au Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche (CDESR), au Comité européen des droits sociaux (CEDS) et au Comité gouvernemental de la Charte sociale européenne. Les trois comités ont fourni des éléments d’information pertinents sur différents aspects de la recommandation, que le Comité des Ministres porte à l’attention de l’Assemblée en annexe à la présente réponse.
2. Le Comité des Ministres note le vif intérêt que l’Assemblée porte au développement et à la mise en œuvre d’un espace européen de l’enseignement supérieur (EEES) et salue le soutien qu’elle apporte à la contribution du Conseil de l’Europe en la matière. Il note avec intérêt l’invitation qui est faite aux parlements nationaux de s’intéresser aux politiques de l’enseignement supérieur en général et à l’espace européen de l’enseignement supérieur en particulier (paragraphe 5 de la recommandation).
3. 2010 marque une étape importante de l’action du Processus de Bologne qui a débouché sur la mise en place de l’EEES. Le Comité des Ministres reconnaît que ce développement ne marque pas une pause ou la fin d’un processus ; la mise en place de l’EEES constitue plutôt un appel en faveur d’autres évolutions de l’enseignement supérieur en Europe. Il se félicite de la contribution substantielle que le Conseil de l’Europe a apportée à l’EEES en lui fournissant les bases juridiques et politiques nécessaires à la poursuite de son développement en Europe et à son rayonnement vers d’autres pays. Au travers de la Convention culturelle européenne et de son programme d’enseignement supérieur, le Conseil de l’Europe joue un rôle important en vue d’assurer que, tel qu’il est mentionné au paragraphe 7, « Les Etats non membres de l’Union européenne ne doivent pas être oubliés ». Le Comité des Ministres est conscient que le développement continu de cet espace bénéficiera d’une coopération entre les pouvoirs publics, les établissements d’enseignement supérieur, les étudiants, le personnel et les institutions et organisations internationales. Le Comité des Ministres partage également l’avis de l’Assemblée selon lequel « depuis des siècles, la liberté académique et l’autonomie des universités ont été des éléments décisifs dans la création des universités en Europe et l’admission des étudiants venant de l’étranger » (paragraphe 4). A cet égard et se référant aux paragraphes 15.5 et 15.6 de la recommandation, le Comité des Ministres informe l’Assemblée qu’il a entamé une réflexion sur la refonte de la structure du programme du Conseil de l’Europe en matière d’éducation, qui vise à prendre en compte la dimension non gouvernementale tout en exploitant au mieux les ressources budgétaires disponibles. C’est également dans cet esprit que devra être considérée la proposition de lancer une campagne européenne telle que mentionnée au paragraphe 15.1 de la recommandation.
4. Au sujet de l’appel formulé par l’Assemblée au paragraphe 15.2 de sa recommandation, le Comité des Ministres informe l’Assemblée qu’en 2009 la Belgique et l’Espagne ont ratifié la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE n° 165) du Conseil de l’Europe/UNESCO. Il invite la Grèce et l’Italie ainsi que les Etats non membres intéressés à envisager dès que possible la ratification de la convention.
5. Le Comité des Ministres a pris note des recommandations aux paragraphes 15.3 et 15.4 d’analyser les instruments actuels du Conseil de l’Europe pour garantir les droits sociaux des étudiants et encourager la mobilité académique. Il observe que le CDESR envisage de proposer en temps utile d’éventuels amendements à l’Accord européen sur le maintien du paiement des bourses aux étudiants poursuivant leurs études à l’étranger (STE no 69). Par ailleurs, le Secrétaire Général a annoncé dans ses propositions de priorité pour 2011, son intention de mener dans le cadre de la réforme du Conseil de l’Europe, un examen critique de la pertinence des conventions de l’Organisation.
6. S’agissant de la demande de l’Assemblée d’analyser la nécessité d’amender la Charte sociale européenne révisée (STE no 163) pour garantir les droits sociaux, dont l’accès à l’enseignement supérieur, telle que formulée au paragraphe 15.3 de la recommandation, le Comité des Ministres estime que le texte de la Charte contient les éléments fondamentaux suffisants sur lesquels l’espace européen de l’enseignement supérieur peut d’ores et déjà largement s’appuyer pour son développement. Il n’exclut pas la possibilité d’amender ultérieurement le texte actuel sur certains aspects spécifiques de l’enseignement supérieur, mais estime que de tels aménagements ne sont pas nécessaires aujourd’hui.
7. Le Comité des Ministres prend note de la suggestion formulée par l’Assemblée aux Etats membres qui accueilleront les futures conférences ministérielles du processus de Bologne de doter l’espace européen de l’enseignement supérieur d’un secrétariat plus stable au sein du Conseil de l’Europe (paragraphe 16.3). Il informe l’Assemblée que les discussions au sein du Groupe de Suivi du Processus de Bologne ont montré qu’il n’existe pas de soutien à cette proposition parmi les membres du Processus de Bologne. Ainsi les Ministres, dans leur communiqué de Leuven/Louvain‑la-Neuve, ont confirmé que la solution actuelle, qui fait que le secrétariat est fourni par le pays hôte de la prochaine conférence, devrait être maintenue. Le Comité des Ministres ne peut, par conséquent, apporter son soutien à la recommandation sur ce point spécifique.

Annexe 1 à la réponse

(open)

Commentaires du Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche (CDESR)

1. Le Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche (CDESR) se félicite de l’intérêt que l’Assemblée parlementaire porte à l’espace européen de l’enseignement supérieur (EEES) et du soutien qu’elle apporte à la contribution du Conseil de l’Europe à cette initiative. Il note avec satisfaction que cette recommandation de l’Assemblée parlementaire est la deuxième sur le sujet après la Recommandation 1620 (2003) et que l’Assemblée a examiné un aspect essentiel de l’EEES dans la Recommandation 1762 (2006) sur la « Liberté académique et l’autonomie des universités ». Le CDESR souscrit pleinement à l’invitation faite aux parlements nationaux de s’intéresser aux politiques de l’enseignement supérieur en général et à l’espace européen de l’enseignement supérieur en particulier (paragraphe 5).
2. Comme indiqué au paragraphe 7, 2010 est une étape importante qui rend la recommandation particulièrement opportune. Le fait que cette année, le Processus de Bologne débouche sur la mise en place de l’EEES ne doit pas être interprété comme une pause dans le processus ni comme son achèvement. La mise en place de l’EEES est une invitation à poursuivre le développement de l’enseignement supérieur en Europe et la recommandation montre en quoi la contribution du Conseil de l’Europe est essentielle à cet égard. Dans ce contexte, le CDESR souligne l’importance du développement continu de l’EEES à travers la coopération entre les pouvoirs publics, les établissements d’enseignement supérieur, les étudiants, le personnel et les institutions et organisations internationales.
3. Le développement de l’EEES a placé les politiques relatives à l’enseignement supérieur au centre de l’élaboration des politiques européennes et par ses contributions substantielles au Processus de Bologne, le Conseil de l’Europe a marqué l’EEES de son empreinte. Comme indiqué dans la recommandation, les initiatives et les instruments juridiques du Conseil de l’Europe ont joué un rôle important dans le développement de l’EEES. La Convention du Conseil de l’Europe/UNESCO sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE no 165) demeure le seul instrument contraignant pour l’EEES. Le fait que tous les membres de l’espace, à l’exception de la Grèce et de l’Italie, l’aient ratifiée montre à quel point elle est importante. Parallèlement, elle joue un rôle majeur en favorisant le développement de bonnes pratiques dans la reconnaissance des qualifications entre l’EEES et d’autres parties du monde, à la fois parce qu’elle sert de guide de bonne pratique et parce qu’elle a été signée ou ratifiée par un certain nombre de pays en dehors de l’EEES, comme l’Australie, le Bélarus, le Canada, les Etats-Unis, Israël, le Kazakhstan 
			(1) 
			Lors de la réunion
des ministres du Processus de Bologne, les 11 et 12 mars 2010, à
l'occasion de laquelle ils ont marqué l'établissement de l'espace
européen de l’enseignement supérieur (EEES), le Kazakhstan a été
accueilli comme membre de l'EEES., le Kirghizistan et la Nouvelle-Zélande.
4. La Convention culturelle européenne (STE no 18) sert de cadre institutionnel à l’EEES, dans la mesure où les membres de l’espace doivent en être parties (paragraphe 6) et où les autorités politiques doivent aussi s’engager à donner effet aux objectifs et aux politiques de l’EEES au niveau national. En 2003, le Conseil de l’Europe a joué un rôle important en modifiant le cadre de l’EEES au profit non plus de la participation à des programmes précis de l’Union européenne mais de l’adhésion de la Convention culturelle européenne. Cet important changement a donné à l’EEES sa véritable dimension européenne avec l’adhésion de l’Albanie, d’Andorre, de la Bosnie‑Herzégovine, du Saint-Siège, de la Russie, de la Serbie et de « l’ex-République yougoslave de Macédoine » en 2003, de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan, de la Géorgie, de la Moldova et de l’Ukraine en 2005, du Monténégro en 2007et du Kazakhstan en 2010. Le Conseil de l’Europe a donc joué un rôle essentiel en s’assurant, comme indiqué au paragraphe 7, que « les Etats non membres de l’Union européenne ne doivent pas être oubliés ». Seuls trois Etats parties à la Convention culturelle européenne ne sont pas, aujourd’hui, membres de l’EEES, qui a aussi suscité un grand intérêt dans d’autres pays.
5. Comme l’Assemblée, le CDESR se félicite des progrès réalisés au cours de la dernière décennie par les Etats participant au Processus de Bologne dans la définition de politiques communes en matière d’enseignement supérieur européen (paragraphe 6). Il rappelle que l’EEES repose sur les valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe, comme en atteste la mention, dans la recommandation, de l’importance de la liberté académique et de l’autonomie institutionnelle sans lesquelles les sociétés ne sauraient être pleinement démocratiques. Le CDESR est aussi convaincu que « la liberté académique et l’autonomie des universités ont été des éléments décisifs dans la création des universités en Europe et l’admission des étudiants venant de l’étranger » (paragraphe 4). Dans ce contexte, il tient à réaffirmer qu’il appuie la suggestion faite dans la Recommandation 1762 de l’Assemblée parlementaire pour que la reconnaissance de la liberté académique et de l’autonomie des universités devienne un critère d’adhésion au Conseil de l’Europe.
6. Le Conseil de l’Europe a fortement contribué aux trois grands domaines de la réforme structurelle qui a caractérisé le développement de l’EEES depuis 1999, en particulier à la reconnaissance des qualifications et à la mise au point de cadres de qualifications, mais aussi à l’amélioration de l’assurance qualité (paragraphe 7). Dans le domaine de la reconnaissance, la convention du Conseil de l’Europe/UNESCO est le seul texte juridiquement contraignant et le Réseau ENIC 
			(2) 
			Réseau européen des
centres nationaux d’information sur la reconnaissance et la mobilité
académiques, commun au Conseil de l’Europe et à l’UNESCO. joue un rôle notable en développant la bonne pratique nécessaire à la mise en œuvre pratique de la convention. Il ressort néanmoins d’une analyse récente des plans nationaux d’action que beaucoup reste à faire pour que le principe fondamental de la convention – le droit à une reconnaissance équitable et opportune des qualifications – devienne une réalité, d’où l’importance de la suggestion faite au paragraphe 13 pour que les parlements nationaux contribuent activement à un débat politique ouvert et analysent leurs exigences et leur législation nationales concernant la création de l’EEES. La participation du Conseil de l’Europe à l’élaboration d’une pratique professionnelle commune en matière d’assurance qualité mérite aussi d’être envisagée.
7. S’agissant des cadres de qualifications, le Conseil de l’Europe est un acteur important depuis l’apparition du concept dans le débat sur la politique européenne en 2003. Il joue, depuis 2007, un rôle moteur en promouvant « l’échange d’expériences dans l’élaboration de cadres nationaux de qualifications » (Communiqué de la Conférence ministérielle du Processus de Bologne tenue à Londres en 2007). C’est ainsi qu’il préside le groupe de travail de Bologne sur les cadres de qualifications et qu’il coopère étroitement avec la Commission européenne (paragraphe 9) qui supervise le Cadre européen des certifications pour l’éducation et la formation tout au long de la vie, adopté en 2008. Le rôle essentiel du Conseil de l’Europe dans ces deux domaines en fait l’un des premiers centres de compétence sur les questions relatives aux qualifications.
8. Parallèlement, le Conseil de l’Europe a souligné la nécessité d’envisager une réforme structurelle par rapport aux objectifs plus larges de l’enseignement supérieur. Si le débat public sur l’enseignement supérieur en Europe tend à se concentrer sur une mission – la consolidation de l’économie – le Conseil de l’Europe a recensé quatre grands objectifs de l’enseignement supérieur qui sont tous aussi importants les uns que les autres et qui se renforcent mutuellement :
  • la préparation à un emploi durable ;
  • la préparation à une vie de citoyens actifs dans des sociétés démocratiques ;
  • le développement personnel ;
  • le développement et la consolidation, par l’enseignement, l’apprentissage et la recherche, d’une base de connaissances approfondie et diversifiée 
			(3) 
			 Recommandation
CM/Rec(2007)6 aux Etats membres relative à la responsabilité publique
pour l’enseignement supérieur et la recherche, paragraphe 5. .
9. Dans le cadre de l’EEES, le Conseil de l’Europe défend donc la nécessité pour l’enseignement supérieur de contribuer à la mise en place de sociétés démocratiques fondées sur les droits de l’homme et l’Etat de droit et au développement du dialogue interculturel 
			(4) 
			Voir également la Déclaration
sur le rôle de l’enseignement supérieur dans le renforcement du
dialogue interculturel adoptée par le CDESR en 2006. .
10. Le CDESR fait sienne l’affirmation selon laquelle la réalisation de l’EEES dépend des établissements d’enseignement supérieur et des étudiants qui doivent devenir moteurs et s’approprier les normes européennes en matière d’enseignement supérieur. Dans ce contexte, le CDESR tient à relayer l’idée exposée dans la recommandation selon laquelle il est la seule instance paneuropéenne à laquelle participent, sur un pied d’égalité, des représentants de la communauté universitaire et des représentants des ministères (paragraphe 11) et bénéficie aussi de la participation, en qualité d’observateurs, des principales ONG européennes dans le domaine. Il coopère étroitement avec l’Association européenne des universités (EUA), l’Association européenne des institutions d’enseignement supérieur (EURASHE), l’Organisation étudiante européenne (ESU), l’Internationale de l’Education (EI), le Réseau européen pour la garantie de la qualité dans l’enseignement supérieur (ENQA) et l’Association internationale des universités (AIU), et a mené des activités sur la participation des étudiants à la gouvernance de l’enseignement supérieur. Les activités conjointes du CDESR et du « Steering Committee of the International Consortium for Higher Education, Civic Responsibility and Democracy » des Etats‑Unis, y compris deux grands forums sur l’enseignement supérieur tenus à Strasbourg, témoignent d’une coopération transatlantique précieuse et d’une mise en commun d’expériences sur le rôle des institutions, des personnels et des étudiants dans la gouvernance institutionnelle ainsi que dans le développement du rôle de l’enseignement supérieur par rapport aux questions et aux objectifs sociétaux plus vastes.
11. Le CDESR appuie sans réserve l’appel lancé à la Grèce et à l’Italie pour qu’elles ratifient la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE n° 165) du Conseil de l’Europe/UNESCO (paragraphe 15.2) et note avec satisfaction que la Belgique et l’Espagne ont ratifié la convention en 2009.
12. Le CDESR appuie aussi les recommandations des paragraphes 15.3 et 15.4 d’analyser les instruments actuels du Conseil de l’Europe pour garantir les droits sociaux des étudiants et encourager la mobilité académique. Il s’engage en particulier à envisager de proposer d’éventuels amendements à l’Accord européen sur le maintien du paiement des bourses aux étudiants poursuivant leurs études à l’étranger (STE no 69).
13. Le CDESR prend note de la suggestion que l’EEES nécessite une stabilité plus grande de son secrétariat et que ce dernier pourrait être assuré par le Conseil de l’Europe. Il note que les discussions au sein du Groupe de Suivi du Processus de Bologne ont montré qu’il n’existe pas de soutien à cette proposition parmi les membres du Processus de Bologne. Le CDESR rappelle que les Ministres, dans leur communiqué de Leuven/ Louvain-la-Neuve, ont confirmé que la solution actuelle, qui fait que le secrétariat est fourni par le pays hôte de la prochaine conférence, devrait être maintenue. Le CDESR ne peut pas apporter son soutien à la recommandation sur ce point spécifique.
14. Le CDESR est fermement convaincu que l’EEES est l’une des grandes initiatives paneuropéennes de ces dix dernières années et que la contribution du Conseil de l’Europe a été très utile. Il estime que cette contribution ainsi que la possibilité de participer encore au développement de l’EEES justifient pleinement la recommandation formulée au paragraphe 15.5 d’« allouer plus de ressources au secteur de l’enseignement supérieur du Conseil de l’Europe, y compris au Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche, afin de soutenir davantage le Processus de Bologne et la création de l’espace européen de l’enseignement supérieur ».

Annexe 2 à la réponse

(open)

Commentaires du Comité européen des droits sociaux (CEDS)

1. Le Comité des Ministres a invité le Comité européen des droits sociaux (CEDS) à lui transmettre des observations sur la Recommandation 1892 (2009) de l’Assemblée parlementaire. En particulier, dans le paragraphe 15.3 de ce texte celle-ci recommande « d’analyser la nécessité d’amender la Charte sociale européenne (révisée) (STE nº 163) pour garantir les droits sociaux, dont l’accès à l’enseignement supérieur, aux étudiants dans leur propre pays, tout comme aux étudiants poursuivant leurs études à l’étranger, ainsi que les droits sociaux des chercheurs, des enseignants et autres personnels universitaires travaillant à l’étranger ».
2. Le développement de l’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES) peut d’ores et déjà prendre appui sur la Charte sociale. L’enseignement supérieur et sa dimension sociale sont au nombre des sujets envisagés par la Charte telle qu’interprétée par le CEDS.
3. En ce qui concerne l’accès à l’enseignement supérieur, le CEDS a conclu que, compte tenu de l’évolution actuelle des systèmes nationaux qui tend à effacer la frontière entre éducation et formation à tous les niveaux pour les fondre dans une approche axée sur l’acquisition permanente du savoir, la notion de formation professionnelle qui figure à l’article 10 doit être comprise comme englobant, entre autres, l’enseignement supérieur universitaire et non universitaire.
4. A la lumière de la jurisprudence du CEDS élaborée dans le cadre du système des rapports concernant cette disposition (par exemple, Conclusions 2003, France, pp. 138-139), les États doivent instituer des mécanismes aptes à surmonter les barrières socio-économiques et/ou techniques pouvant empêcher ou rendre difficile l’accès à l’enseignement supérieur, ainsi que l’ultérieur accès au marché de travail.
5. Sur le plan de l’accès à l’enseignement supérieur, les obligations positives découlant de la responsabilité publique d’assurer des chances égales en matière d’accès et de financement de l’enseignement supérieur ont conduit le CEDS à déclarer, entre autres, qu’il faut :
  • éviter que les droits d’inscription et autres frais scolaires ne constituent des obstacles financiers pour certains candidats, afin de faciliter l’accès à l’enseignement supérieur sur le seul critère de l’aptitude individuelle ;
  • établir des passerelles entre l’enseignement professionnel secondaire et l’enseignement supérieur, ainsi que mettre en place des mécanismes de validation des savoirs et de l’expérience professionnelle acquis dans le cadre de la formation/activité professionnelle pour obtenir une qualification ou avoir accès à l’enseignement supérieur.
6. L’accès à l’enseignement supérieur des personnes handicapées est traité par le Comité dans le cadre de l’article 15 de la Charte pour les pays qui ont accepté cette disposition (voir, mutatis mutandis, Conclusions XIV-2, Observation interprétative de l’article 10§1, p. 67). Dans cet esprit, à côté des mesures générales relatives à l’égalité d’accès et au traitement équitable des candidats qualifiés (de manière à ce que les obstacles liés à l’origine sociale et au statut économique ne soient pas des facteurs d’exclusion), les États doivent favoriser les opportunités éducationnelles pour les personnes handicapées en prenant notamment des mesures (de soutien, d’accessibilité des locaux, par exemple) de nature à permettre l’intégration de ces personnes dans des filières d’enseignement supérieur qui n’excluent personne (voir Conclusions 2005, Chypre, p. 102). De même, les télécommunications et les nouvelles technologies de l’information doivent être accessibles (Conclusions 2005, Estonie, p. 198) et la langue de signes doit avoir un statut officiel (Conclusions 2003, Slovénie, p. 545). De cette manière, les personnes handicapées, tout comme les autres étudiants, pourront jouir du statut de membres à part entière de la communauté de l’enseignement supérieur (voir Autisme Europe c. France, réclamation nº 13/2002, décision sur le bien-fondé du 4 novembre 2003, §48).
7. Dans cette même perspective, sur le plan de l’accès au marché de travail, pour satisfaire aux obligations établies par l’art. 10 de la Charte, le CEDS a également déclaré que les États doivent prendre des mesures visant à faire en sorte que les qualifications obtenues dans l’enseignement supérieur s’inscrivent dans l’optique d’une intégration professionnelle sur le marché de l’emploi. En ce sens, l’enseignement universitaire et l’enseignement supérieur non universitaire sont assimilés à la formation professionnelle dans la mesure où ils permettent aux étudiants d’acquérir les connaissances et aptitudes nécessaires à l’exercice d’une profession.
8. Par ailleurs, sans préjudice des conditions d’obtention des différents diplômes d’enseignement supérieur (par exemple, le système de crédits d’enseignement supérieur dans chaque pays et sa compatibilité avec le dénommé « European Credit Transfer System », devraient faciliter le transfert des acquis d’une université à l’autre dans le cadre des échanges Erasmus ou autres), des qualifications analogues ne devraient pas faire l’objet de différences de traitement constituant des mesures contraires au droit à la non-discrimination dans l’emploi garanti par l’article 1.2 de la Charte (Syndicat national des Professions du Tourisme c. France, Réclamation collective nº 6/1999, décision sur le bien-fondé du 10 octobre 2000, §§ 24-26). Il s’agit là d’une dimension sociale de l’EEES dont la portée pourrait être élargie aux enseignants et autres personnels universitaires travaillant à l’étranger, ainsi qu’aux droits sociaux des chercheurs.
9. De ce point de vue, le CEDS rappelle que l’égalité de traitement en matière d’accès à l’enseignement supérieur doit être garantie aux ressortissants des autres parties résidant légalement ou travaillant régulièrement sur le territoire de la partie intéressée (voir, mutatis mutandis, Conclusions XIV-2, Observation interprétative de l’article 10§1, p. 65). Cela suppose qu’aucune condition de durée de résidence ne soit exigée des étudiants et stagiaires qui résident ou sont autorisés à résider à quelque titre que ce soit, en raison de leurs liens avec des personnes en situation légale de séjour, sur le territoire de la partie concernée avant d’entamer leur formation. A cet effet, les conditions de durée de résidence ou d’emploi et/ou l’application d’une clause de réciprocité sont contraires aux dispositions de la Charte (Conclusions 2003, Slovénie, p. 504).
10. Il reste à noter que la jurisprudence mentionnée du CEDS relative à l’article 10 de la Charte contribue au développement progressif de l’idée d’accès gratuit et élargi à l’enseignement supérieur, dans la ligne de l’article 13§2.c) du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, selon lequel « l'enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et notamment par l'instauration progressive de la gratuité ». Cependant, la généralisation de cette gratuité n’est pas reconnue en tant que telle par ladite disposition ni par le champ d’application personnelle et matérielle de l’article 17 de la Charte, celui-ci portant sur la protection des enfants et des adolescents ainsi que sur le caractère gratuit de l’enseignement primaire et secondaire.
11. En conclusion, le CEDS estime que, en raison des acquis exposés ci-dessus, la Charte n’appelle pas d’aménagement majeur. Il pourrait néanmoins se révéler utile d’amender l’article 10 de la Charte afin d’élargir sa portée d’une façon plus explicite par rapport à d’autres aspects de la dimension sociale de l’EEES (l’organisation des cursus ou les modes de gestion des universités, entre autres) et de la dimension sociale parallèle de l’Espace européen de la recherche (à titre d’exemple, des aspects tels que le recrutement des chercheurs dans les établissements d’enseignements supérieurs ou le retour au pays d’origine des chercheurs ayant effectué un séjour post-doctoral à l’étranger).

Annexe 3 à la réponse

(open)

Commentaires du Comité gouvernemental de la Charte sociale européenne

1. Le Comité des Ministres (1073e réunion, 9 décembre 2009) a invité le Comité gouvernemental de la Charte sociale européenne à faire des commentaires sur la Recommandation 1892 (2009) de l’Assemblée parlementaire.
2. Le Comité gouvernemental prend note de la Recommandation 1892 (2009) et se félicite d’avoir l’opportunité d’examiner ce texte important.
3. Le Comité gouvernemental se réfère, plus particulièrement, au paragraphe 15.3 de ce texte, dans lequel l’Assemblée recommande au Comité des Ministres « d’analyser la nécessité d’amender la Charte sociale européenne (révisée) (STE nº 163) pour garantir les droits sociaux, dont l’accès à l’enseignement supérieur, aux étudiants dans leur propre pays, tout comme aux étudiants poursuivant leurs études à l’étranger, ainsi que les droits sociaux des chercheurs, des enseignants et autres personnels universitaires travaillant à l’étranger ».
4. Tout d’abord, le Comité gouvernemental rappelle que, à ce jour, la Charte sociale européenne est signée par les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe ont signée et que 43 d’entre eux l’ont ratifiée.
5. La Charte est un des traités clés du Conseil de l’Europe en matière de droits de l’homme fondamentaux. Elle garantit tout un ensemble de droits sociaux fondamentaux, dont l’enseignement supérieur, auquel il est fait référence dans le texte même de ce traité, notamment sous les articles 10 et 15.
6. Dans le cadre de l’article 10, les Etats parties s’engagent notamment « à accorder des moyens permettant l’accès à l’enseignement technique supérieur et à l’enseignement universitaire d’après le seul critère de l’aptitude individuelle ».
7. Le Comité européen des droits sociaux (CEDS) conclut dans sa jurisprudence que, compte tenu de l’évolution actuelle des systèmes nationaux tendant à effacer la distinction entre éducation et formation à tous les niveaux pour fondre ces notions dans une approche axée sur l’acquisition permanente des connaissances ; la notion de formation professionnelle qui figure à l’article 10 doit être comprise comme englobant, entre autres, l’enseignement supérieur universitaire et non universitaire.
8. A la lumière de la jurisprudence du CEDS, les États doivent instituer des mécanismes aptes à surmonter les barrières socio-économiques et/ou techniques pouvant empêcher ou rendre difficile l’accès à l’enseignement supérieur, ainsi que l’accès subséquent au marché de travail.
9. L’accès à l’enseignement supérieur des personnes handicapées est traité dans le cadre de l’article 15 de la Charte. Dans cette perspective et en plus des mesures générales relatives à l’égalité d’accès et au traitement équitable des candidats qualifiés (visant à s’assurer que les obstacles liés à l’origine sociale et au statut économique ne soient pas des facteurs d’exclusion), les États doivent promouvoir les opportunités éducationnelles pour les personnes handicapées, notamment en prenant des mesures de soutien, d’accessibilité des locaux, par exemple, de nature à permettre l’intégration de ces personnes dans des filières de l’enseignement supérieur.
10. Enfin, le Comité gouvernemental souhaite rappeler qu’il a examiné en 2004 une proposition de protocole additionnel à la Charte relatif au « droit à l’enseignement supérieur ». A cette date, le Comité gouvernemental avait considéré qu’un tel protocole n’était pas réellement nécessaire, en particulier parce que les éléments pertinents de ce droit étaient déjà couverts de façon adéquate par le traité existant et par la jurisprudence du CEDS.
11. En conclusion et au vu de ce qui précède, le Comité gouvernemental considère que le texte de la Charte sociale européenne (révisée) contient les éléments fondamentaux de base suffisants sur lesquels l’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES) peut d’ores et déjà s’appuyer pour son développement. Tout en reconnaissant que l’enseignement supérieur est un facteur clé pour la stabilité et le bien-être de la société au niveau social, économique et démocratique, et tout en n’excluant pas la possibilité d’une nécessité d’amender ultérieurement la Charte en ce qui concerne certains aspects spécifiques de l’enseignement supérieur, le Comité gouvernemental ne considère pas que de tels amendements s’avèrent présentement nécessaires.