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Réponse à Recommandation | Doc. 12449 | 17 décembre 2010

Les femmes et la crise économique et financière 

Auteur(s) : Comité des Ministres

Origine - adoptée à la 1101e réunion des Délégués des Ministres (8 décembre 2010) 2011 - Première partie de session

Réponse à Recommandation: Recommandation 1911 (2010)

1. Le Comité des Ministres prend note avec intérêt de la Recommandation 1911 (2010) de l’Assemblée parlementaire sur « Les femmes et la crise économique et financière» qui souligne combien il est important de combler le fossé entre l’égalité de jure et l’égalité de facto entre les femmes et les hommes, notamment en ce qui concerne les postes de direction et de prise de décision dans la crise économique et financière actuelle. Il a porté cette recommandation à l’attention des gouvernements et l’a également transmise au Comité européen pour la cohésion sociale (CDCS), au Comité européen des droits sociaux (CEDS), au Comité gouvernemental de la Charte sociale européenne et au Comité directeur pour l’égalité entre les femmes et les hommes (CDEG), pour information et commentaires éventuels.
2. Le Comité des Ministres reconnaît comme l’Assemblée que les progrès enregistrés par le passé par les femmes ne devraient pas être anéantis en raison de la crise économique et financière. Il partage également le point de vue que les Etats membres devraient promouvoir l’équilibre entre les sexes dans les postes de direction et de prise de décision. Il rappelle son avis concernant l’élaboration d’un nouveau protocole à la Convention européenne des droits de l'homme, selon lequel il existe des instruments du Conseil de l'Europe qui offrent déjà un cadre juridique pour lutter contre toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et proposent des normes et des mécanismes pour réaliser l’égalité entre les femmes et les hommes. Il y a notamment l’interdiction générale de toute discrimination, qui découle du Protocole n° 12 à la Convention européenne des droits de l'homme. En outre, l’article E de la Charte sociale européenne révisée prévoit que la jouissance des droits reconnus dans la Charte doit être assurée « sans distinction fondée sur le sexe » et l’article 20 de la Charte révisée garantit le droit à l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession.
3. Dans sa déclaration intitulée « Faire de l’égalité entre les femmes et les hommes une réalité dans les faits », adoptée le 12 mai 2009 à l’occasion de la 119e Session ministérielle, le Comité des Ministres demandait instamment aux Etats membres de s’engager fermement à combler le fossé entre l’égalité en fait et en droit. Il définissait clairement dans ce texte les mesures à prendre pour parvenir à cet objectif et invitait le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe à superviser et à évaluer tous les trois ans les progrès de la mise en œuvre des politiques d’égalité entre les femmes et les hommes.
4. Le Comité des Ministres constate par ailleurs que la recommandation de l’Assemblée va dans le sens des priorités de la Résolution « Combler le fossé entre l’égalité de jure et l’égalité de facto pour réaliser une véritable égalité entre les femmes et les hommes » et du Plan d’action « Relever le défi de la réalisation de l’égalité de jure et de l’égalité de facto entre les femmes et les hommes », qui ont été adoptés par la 7e Conférence du Conseil de l'Europe des ministres responsables de l’égalité entre les femmes et les hommes (Bakou, 24‑25 mai 2010). La résolution demande aux Etats membres d’« abroger dans la législation nationale toutes les dispositions discriminatoires contraires à l’égalité entre les femmes et les hommes et mettre en place les mécanismes nécessaires à l’application et au contrôle de la législation, notamment par l’enregistrement de plaintes en cas de violation », de « signer et ratifier tous les instruments juridiques internationaux pertinents tels que le Protocole n° 12 à la Convention européenne des droits de l'homme » et aussi d’« encourager l’indépendance économique des femmes et leur autonomisation en garantissant le respect de l’égalité des chances sur le marché du travail et dans la vie économique ». La priorité I du plan d’action traite de l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes et des actions positives, tandis que la priorité III concerne la participation égale des femmes et des hommes à la vie politique, publique et économique, y compris à la prise de décision. Le 29 septembre 2010, le Comité des Ministres a décidé que la résolution et le plan d’action mentionnés précédemment seraient pris en compte dans les futurs travaux du Conseil de l'Europe dans le domaine de l’égalité des sexes.
5. Enfin, le Comité des Ministres souhaite attirer l’attention de l’Assemblée sur ses réponses aux recommandations suivantes de l’Assemblée : la Recommandation 1899 (2010) « Augmenter la représentation des femmes en politique par les systèmes électoraux », la Recommandation 1907 (2010) sur « Le fossé salarial entre les femmes et les hommes » et la Recommandation 1909 (2010) « Associer les femmes à la prévention et au règlement des conflits non résolus en Europe ». Chacune de ces réponses réaffirme l’engagement du Comité des Ministres à assurer l’égalité de facto entre les femmes et les hommes dans les Etats membres du Conseil de l'Europe.

Annexe 1 à la réponse

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Commentaires du Comité européen pour la cohésion sociale (CDCS)

1. Le CDCS se félicite de la Recommandation 1911 (2010) et souligne le rôle pionnier joué par le Conseil de l’Europe pour garantir une égalité de jure et de facto entre les femmes et les hommes, qui n’est toujours pas mise en œuvre dans plusieurs Etats membres. Il rappelle les travaux de son Comité d’experts sur la sécurité sociale (CS-SS), mentionné ci-dessus à propos de l'opinion sur la Recommandation 1910 (2010) sur « L’impact de la crise économique mondiale sur les migrations en Europe ».
2. Le CDCS souligne que les femmes et les hommes ont été frappés par la récession de manière inégale et que le salaire de la femme est plus important que jamais dans le budget familial du fait de la réduction de la disparité d'emploi liée au genre, conjuguée à l'augmentation du nombre de foyers monoparentaux dont le chef de famille est une femme. Il met en avant la nécessité d’avoir un marché du travail équitable, flexible et respectueux de la famille, qui stimule la croissance économique et exploite tout le potentiel des femmes et des hommes, afin de sortir de la récession mondiale. L'égalité conquise sur le marché du travail ne devrait pas être remise en question par la crise économique et financière.
3. Le CDCS apprécie l'idée d'un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme axé sur l'égalité de facto, mais estime qu’il devrait être suffisant de recourir à des mesures positives, associées au principe du mérite, sans invoquer la nécessité d'une discrimination positive.
4. Le CDCS estime que l'introduction de quotas stricts risque d'aller à l'encontre du principe du mérite et que la possibilité offerte aux partis politiques de recourir à des actions positives devrait permettre à ces derniers de s'attaquer à la sous-représentation des femmes. Les partis devraient décider eux-mêmes comment utiliser au mieux les possibilités que leur offre la législation. Les pays ont des systèmes différents, certains ont sous une forme ou sous une autre des quotas de jure ou de facto. Pour ce qui est de la question des femmes à des postes de direction et de prise de décision, le CDCS pense qu'il est important d'examiner la manière d'améliorer leur représentation, par exemple en favorisant l'égalité dans les conseils d'administration. Par contre, les quotas stricts ne semblent pas être une solution.

Annexe 2 à la réponse

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Commentaires du Comité européen des Droits Sociaux (CEDS)

1. Le Comité des Ministres a invité le Comité européen des droits sociaux (CEDS) à lui transmettre d’éventuels commentaires sur la Recommandation 1911 (2010) de l’Assemblée parlementaire. En réponse à cette demande, le CEDS formule les observations ci-après :
2. La Charte est unique en Europe, non seulement par les droits qu’elle garantit, mais aussi par la double dimension de son mécanisme de contrôle : d’une part, une procédure de contrôle annuel sur la base de rapports nationaux et, d’autre part, une procédure de réclamations collectives permettant aux organisations de la société civile de former des recours. Le CEDS, organe de régulation de la Charte composé de quinze membres indépendants et impartiaux, statue en droit sur la conformité ou non des situations nationales dans le cadre des deux procédures de contrôle.
3. En vertu de son article E, la Charte révisée reconnaît la jouissance des droits figurant dans le traité « sans distinction aucune fondée sur le sexe ». L’existence de cet article sous la forme d’une disposition distincte témoigne de la grande importance accordée par les Etats au principe de non-discrimination dans la réalisation des droits fondamentaux énoncés par la Charte.
4. S’agissant de la protection de droits concernant plus spécifiquement les femmes, l’article 20 de la Charte révisée prévoit le droit à l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession. L’article 4§3 de la Charte reconnaît, par ailleurs, le droit des travailleurs masculins et féminins à une rémunération égale pour un travail de valeur égale. A ce titre, le CEDS renvoie à ses commentaires sur la Recommandation 1907 (2010) de l’Assemblée parlementaire sur « Le fossé salarial entre les femmes et les hommes ».
5. Par ailleurs, la Charte garantit le droit à l’égalité des chances et de traitement entre les travailleurs des deux sexes ayant des responsabilités familiales ainsi qu’entre ces travailleurs et les autres travailleurs (article 27). De plus, l’article 26 de la Charte confère à tous les travailleurs le droit à la dignité dans le travail et engage les Etats à adopter des mesures pour prévenir et sanctionner le harcèlement sexuel.
6. Le CEDS se félicite de l’initiative de l’Assemblée parlementaire en vue de l’adoption de la Recommandation 1911(2010) et réaffirme son engagement afin d’assurer une égalité effective entre les femmes et les hommes. Il souligne la nécessité de combler l’écart entre l’égalité de jure et de facto, tout particulièrement à la suite de la crise économique et financière, menaçant ainsi les avancées modestes obtenues par les femmes dans le passé.
7. Dans sa jurisprudence, le CEDS a souligné que la conformité avec le principe de l’égalité de traitement présuppose la prise en compte positive des différences pertinentes ainsi que la prise des mesures appropriées afin de garantir des opportunités égales à tous. Des mesures positives sont nécessaires afin d’éliminer les inégalités provenant des conséquences sociales de la discrimination historique et des stéréotypes actuels. Elles ne doivent pas être considérées comme des exceptions permises à l’égalité de traitement comme des actes de « discrimination positive ». Une telle approche ne ferait en effet que perpétuer la « norme unique » quant à l’égalité alors même que cette égalité doit être réalisée par le biais de normes adaptées aux réalités masculines.
8. Le partage inégal des responsabilités familiales et domestiques est une raison majeure, non seulement de la discrimination à l´égard des femmes sur le marché de travail dans le contexte de la crise économique et financière, mais aussi de leur participation sociale et politique limitée. De ce point de vue, le CEDS se réfère à la Recommandation 1800 (2007) de l’Assemblée parlementaire sur « La féminisation de la pauvreté » et, tout particulièrement, à la portée de l’article 30 de la Charte révisée (droit à la protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale).
9. Le Comité partage la nouvelle opinion exprimée dans la recommandation au sujet du rôle des femmes dans la création d’un environnement économique et financier plus stable et plus sûr. Il est d’accord avec l’importance accrue d’assurer une participation paritaire des femmes et des hommes à la prise de décision politique et dans les postes de direction, y inclus dans le secteur privé. Le CEDS invite les Etats à prendre des mesures pour s’assurer que les travailleurs ayant des responsabilités familiales ne soient pas discriminés en raison de celles-ci (article 27). Les Etats devraient encourager les initiatives visant à concilier la vie privée et la vie familiale des travailleurs des deux sexes afin d’atteindre une égalité réelle entre ceux-ci.
10. En conclusion, le CEDS invite les Etats membres qui n’ont pas encore accepté les articles 4§3, 20, 26, 27 et 30 et/ou la procédure des réclamations collectives à le faire sans plus tarder, avant le 18 octobre 2011 (date du 50e anniversaire de la Charte), ce qui permettrait aux organisations habilitées de saisir le CEDS de telles réclamations en matière de discrimination fondée sur le sexe.

Annexe 3 à la réponse

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Commentaires du Comité directeur pour l'égalité entre les femmes et les hommes (CDEG)

1. Le CDEG a pris note des recommandations de l’Assemblée parlementaire qui lui ont été transmises par le Comité des Ministres.
2. Il se félicite que ces recommandations rejoignent les priorités fixées par la Résolution « Combler le fossé entre l’égalité de jure et l’égalité de facto pour réaliser une véritable égalité entre les femmes et les hommes » et le Plan d’action « Relever le défi de la réalisation de l’égalité de jure et de l’égalité de facto entre les femmes et les hommes », adoptés par la Conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables de l’égalité entre les femmes et les hommes qui s’est tenue à Bakou, les 24 et 25 mai dernier.
3. Toutes les recommandations spécifiques adressées au Comité des Ministres dans la Recommandation 1911 (2010) sur « Les femmes et la crise économique et financière » ont déjà fait l’objet d’un examen par le CDEG. Ce dernier se réfère notamment à ses réponses apportées à la Recommandation 1899 (2010) « Augmenter la représentation des femmes en politique par les systèmes électoraux » et à la Recommandation 1097 (2010) sur « Le fossé salarial entre les femmes et les hommes ». Le CDEG poursuivra son action en faveur de la réalisation de l’égalité de facto tant dans les Etats membres qu’au sein du Conseil de l’Europe notamment par la mise en œuvre du Plan d’action « Relever le défi de la réalisation de l’égalité de jure et de l’égalité de facto entre les femmes et les hommes » dont la priorité I est l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes et les actions positives, ainsi que de la Résolution « Combler le fossé entre l’égalité de jure et l’égalité de facto pour réaliser une véritable égalité entre les femmes et les hommes ». Cette dernière demande notamment aux Etats membres d’« abroger dans la législation nationale toutes les dispositions discriminatoires contraires à l’égalité entre les femmes et les hommes et mettre en place les mécanismes nécessaires à l’application et au contrôle de la législation, notamment par l’enregistrement de plaintes en cas de violation », de « signer et ratifier tous les instruments juridiques internationaux pertinents tels que le Protocole N°12 à la Convention européenne des droits de l’homme » et également « d’encourager l’indépendance économique des femmes et leur autonomisation en garantissant le respect de l’égalité des chances sur le marché du travail et dans la vie économique ».
4. Eu égard au fait que l’indépendance économique des femmes pourrait être gravement compromise par la crise économique si l’accès à un emploi à plein temps, bien rémunéré, sûr et formel pour les femmes n’était pas garanti, il convient de rappeler que dans certains Etats membres, non seulement un emploi à plein temps, mais aussi à temps partiel, peut garantir un travail bien payé et peut contribuer à l’indépendance économique des femmes (dans le cas présent, le travail à temps partiel représentant moins de 32 heures par semaine).
5. La résolution invite enfin le Comité des Ministres à « prendre toutes les mesures nécessaires à la réalisation des objectifs fixés dans cette résolution et intensifier son action dans tous ses États membres, conformément aux engagements de sa Déclaration « Faire de l’égalité entre les femmes et les hommes une réalité dans les faits ».