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Rapport | Doc. 12513 | 01 février 2011

Education contre la violence à l'école

Commission de la culture, de la science et de l'éducation

Rapporteur : M. Gvozden Srećko FLEGO, Croatie, SOC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 11889, Renvoi 3559 du 29 mai 2009. 2011 - Deuxième partie de session

Résumé

En Europe, un nombre trop élevé d’écoles continuent de se trouver confrontées à de très graves actes de violence. Les incidents comprennent des attaques perpétrées par des élèves avec ou sans armes, des brimades et du harcèlement entre élèves, de la violence sexuelle, des actes d’hostilité et même des agressions d’enseignants par des élèves, ainsi que le recours à la violence par des enseignants à l’encontre d’élèves. A cet égard, il est de la plus haute importance de traiter la violence le plus tôt possible dans la vie scolaire et d’introduire et de développer l’éducation contre la violence à l’école. Il est nécessaire d’agir à différents niveaux et d’impliquer tous les acteurs clés, en particulier familles, enseignants et élèves.

Dans ce but, l’Assemblée parlementaire souhaite encourager l’élaboration et la mise en œuvre effective de politiques éducatives proactives de lutte contre la violence à l’école et dans la société en général, fondées sur des lignes directrices cohérentes.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 4 novembre
2010.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire est vivement préoccupée par le fait que, en Europe, un nombre trop élevé d’écoles continuent de se trouver confrontées à de très graves actes de violence. Les incidents comprennent des attaques perpétrées par des élèves avec ou sans armes, des brimades et du harcèlement entre élèves, de la violence sexuelle, des actes d’hostilité et même des agressions d’enseignants par des élèves, ainsi que le recours à la violence par des enseignants à l’encontre d’élèves.
2. Bien que de tels événements puissent demeurer sporadiques, l’Assemblée estime qu’ils méritent la plus grande attention car ils produisent toujours des effets très importants – sinon dramatiques – sur les personnes impliquées et sur leur entourage immédiat, provoquant des sentiments d’impuissance, de crainte et d’insécurité. Ils sont un signe inquiétant que, en dépit des efforts considérables, le phénomène de la violence à l’école et dans la société en général n’a pas été traité comme il se devait.
3. Humanisme, comportement non violent, tolérance et respect mutuel sont des valeurs fondamentales communes soutenues par le Conseil de l’Europe depuis sa fondation, il y a soixante ans et, depuis longtemps, l’Organisation met un point d’honneur à combattre tous les types de violence, en particulier lorsque les enfants en sont victimes.
4. Des garanties fondamentales sont prescrites par les articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5) et par la Charte sociale européenne révisée (STE no 163). A l’article 17, cette dernière stipule que les enfants et les adolescents seront protégés contre la négligence, la violence ou l’exploitation, en vue de leur assurer l’exercice effectif du droit de grandir dans un milieu favorable à l’épanouissement de leur personnalité et au développement de leurs aptitudes physiques et mentales.
5. L’Assemblée a traité ces questions dans bon nombre de textes, notamment la Recommandation 561 (1969) sur la protection des mineurs contre les mauvais traitements, la Recommandation 1666 (2004) sur l’interdiction du châtiment corporel des enfants en Europe, la Recommandation 1778 (2007) sur les enfants victimeset l’éradication de toutes les formes de violence, d’exploitation et d’abus, la Recommandation 1905 (2010) et la Résolution 1714 (2010) sur les enfants témoins de violence domestique et, enfin, la Recommandation 1934 (2010) sur les sévices infligés à des enfants placés en établissementet la garantie d’une protection pleine et entière des victimes.
6. Des normes pour la protection des enfants contre la violence figurent également dans la Recommandation du Comité des Ministres no R (79) 17 sur la protection des enfants contre les mauvais traitements, la Recommandation no R (85) 4 sur la violence au sein de la famille et la Recommandation CM/Rec(2009)10 sur les stratégies nationales intégrées de protection des enfants contre la violence.D’autre part, l’Assemblée rappelle la Recommandation de politique générale no 10 de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance sur la lutte contre le racisme et la discrimination raciale dans et à travers l’éducation scolaire.
7. La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, adoptée en 1989, garantit le développement harmonieux et sans danger de chaque enfant, et son article 19 porte explicitement sur la protection de l’enfant contre la violence. L’Assemblée se félicite, dans ce contexte, des travaux menés par la représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants.
8. L’Assemblée rappelle que, en vertu de l’article 26 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’«éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et au renforcement du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elle doit favoriser la compréhension, la tolérance et l’amitié entre toutes les nations et tous les groupes raciaux ou religieux».
9. Malgré une condamnation universelle, la violence semble malheureusement être un aspect des relations humaines très difficile à éradiquer. Elle se rencontre partout, entre les individus et les groupes, de même qu’au sein des familles, des groupes sociaux et de la société. Elle peut se manifester par une agression physique directe ou prendre des formes psychologiques moins évidentes mais tout aussi pernicieuses. La violence à l’école et la violence dans la société sont étroitement liées; aussi n’est-il pas surprenant de rencontrer également au sein de l’environnement scolaire diverses formes de violence.
10. Pour autant, l’Assemblée continuera de lutter avec la plus grande détermination contre toutes les formes de violence, en particulier celle visant les enfants et les adolescents. A cet égard, il est de la plus haute importance de traiter la violence le plus tôt possible dans la vie scolaire des enfants et d’introduire et/ou de développer l’éducation contre la violence à l’école.
11. Les transformations radicales intervenues dans les politiques de l’éducation montrent qu’il est possible d’obtenir des résultats et de changer les mentalités: les méthodes d’enseignement autoritaires ont progressivement cédé le pas à un style non autoritaire, qui promeut souvent une approche critique de l’autoritarisme. Ces changements se retrouvent au sein des relations parent-enfant et de la société en général.
12. De nombreux pays ont mené des études sur la violence à l’école et plusieurs gouvernements ont mis en place des programmes nationaux pour lutter contre ce type de violence. L’Assemblée tient aussi à saluer les travaux réalisés dans ce domaine par le Réseau européen des médiateurs pour enfants. Quoique les résultats soient encourageants, un regain d’efforts s’impose pour réduire la violence à l’école.
13. Si ce problème n’est pas traité comme il se doit, les coûts sociaux et financiers résultants dépasseront nettement ceux nécessaires à la mise en place de programmes plus vastes pour traiter la violence efficacement, sans parler de la souffrance humaine inacceptable des enfants qui sont et ont été exposés à la violence.
14. Il est crucial, bien entendu, que la violence soit interdite et que les actes de violence tombant sous le coup de mesures pénales ou disciplinaires soient soumis à des autorités de répression et que des sanctions correspondantes soient prononcées et appliquées. Reste que les sanctions sont l’ultime recours, pas un remède. Une action préventive et le soutien des victimes sont encore plus nécessaires. Il ne faut pas oublier que les enfants violents sont les plus susceptibles d’être eux-mêmes des victimes. De surcroît, il faut garantir la plus grande transparence, tout en respectant la dignité et la vie privée des victimes.
15. Etant donné la complexité de notre société et la pluralité des facteurs pouvant engendrer la violence, il est nécessaire d’agir à différents niveaux et d’impliquer tous les acteurs clés, en particulier familles, enseignants et élèves, pour lutter efficacement contre la violence à l’école.
16. Les médias diffusent des contenus violents sous de multiples formes depuis des décennies et, depuis lors, l’incidence de ces contenus a toujours fait débat. Avec le développement de nouvelles formes de médias en ligne interactifs, un impact psychologique potentiellement plus fort a été identifié et doit être examiné plus avant. Néanmoins, l’enfant passant de plus en plus de temps à utiliser les médias, leurs effets positifs en tant que moyen d’éducation informelle méritent un examen plus sérieux.
17. En conséquence, l’Assemblée adopte les principes directeurs suivants pour une éducation contre la violence à l’école et invite les parlements membres et observateurs à les approuver au niveau national, à veiller à ce que les autorités gouvernementales compétentes apportent aux écoles un soutien administratif, logistique et financier, et, enfin, à superviser la mise en œuvre de ces principes:
17.1. cadre juridique et pratiques administratives:
17.1.1. des normes pénales et/ou disciplinaires doivent clairement interdire tous les actes commis à l’école pouvant être qualifiés de violents, notamment les châtiments corporels ou humiliants à l’encontre des élèves, la violence exercée par le personnel scolaire sur les élèves, la violence infligée aux élèves par des tiers au sein de l’enceinte scolaire ainsi que le comportement violent d’élèves à l’encontre d’autres élèves, du personnel scolaire ou des équipements scolaires;
17.1.2. des sanctions pénales et/ou disciplinaires doivent être prévues proportionnellement à la gravité de ces actes; toutefois, s’agissant des jeunes auteurs de violence, il faut tenir compte des lignes directrices contenues dans la Recommandation CM/Rec(2008)11 sur les Règles européennes pour les délinquants mineurs faisant l’objet de sanctions ou de mesures, ainsi que du document thématique de 2009 sur les enfants et la justice des mineurs publié par le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe;
17.1.3. tous les actes de violence doivent faire l’objet d’une enquête et d’un procès-verbal et, s’ils présentent un caractère suffisamment grave, doivent être soumis aux autorités de répression compétentes; dans cette perspective, il convient de mettre en place dans l’environnement scolaire des mécanismes adéquats de réception des plaintes;
17.1.4. des procédures administratives en rapport avec les actes de violence à l’école doivent garantir le droit des parents à être pleinement et rapidement informés, ainsi que le droit à la protection de la vie privée des victimes;
17.1.5. les directeurs d’établissements scolaires doivent être tenus professionnellement responsables de la mise en œuvre effective des obligations ci-dessus;
17.2. sensibilisation et formation:
17.2.1. une culture de la démocratie et des droits de l’homme doit être promue à l’école en conformité avec la Charte du Conseil de l’Europe sur l'éducation à la citoyenneté démocratique et l'éducation aux droits de l'homme, adoptée dans le cadre de la Recommandation du Comité des Ministres CM/Rec(2010)7;
17.2.2. la sensibilisation à la réduction de la violence, à la résolution non violente des conflits et aux droits de l’enfant, en particulier à l’école, doit faire partie des programmes scolaires généraux; la violence doit être abordée de différents points de vue et dans différentes disciplines – par exemple, histoire, littérature, médias, arts, musique, sport, sociologie, psychologie, philosophie et religion ou morale;
17.2.3. les enseignants et le personnel scolaire recevront une formation obligatoire pour mieux comprendre les différentes formes de violence (physique, psychologique, verbale et comportementale) et pour apprendre à combattre cette violence et à respecter le droit des enfants à une école non violente;
17.2.4. les programmes de formation du personnel scolaire doivent prendre en compte les besoins spécifiques liés à ses responsabilités, mais aussi les besoins des élèves, en particulier des plus vulnérables;
17.3. mesures de prévention et de soutien:
17.3.1. des mesures rigoureuses de sécurité doivent être prises pour faire respecter l’interdiction d’introduire des armes et de la drogue à l’école, ainsi que pour empêcher les actes criminels dans l’enceinte scolaire;
17.3.2. les méthodes d’enseignement doivent contribuer à traiter les causes de la violence et viser à éviter que des élèves se retrouvent en situation d’isolement ou d’exclusion; à cette fin, l’école doit fournir une aide spécifique aux élèves confrontés à des difficultés – d’apprentissage, physiques, sociales ou autres, réduire les tendances à la compétition dans les cours, favoriser le travail d’équipe, la coopération et la tolérance, et, enfin, donner la possibilité aux élèves de contrôler leurs tensions physiques ou psychologiques de manière non violente par le biais d’activités sportives, musicales et/ou plastiques;
17.3.3. le personnel scolaire doit comprendre des personnes de confiance spécialisées, formées pour aider les élèves ayant subi ou commis des actes de violence à l’intérieur ou à l’extérieur de l’école; en outre, des médiateurs et des psychologues seront à la disposition des élèves, de leurs parents et de leurs enseignants;
17.3.4. au niveau de la circonscription scolaire, des équipes spécialisées dotées de connaissances et d’un savoir-faire fourniront des conseils aux écoles rencontrant des difficultés particulières;
17.4. encourager l’implication des élèves et de leurs familles:
17.4.1. les écoles doivent mettre en place des projets pratiques et des activités extrascolaires sur le problème de la violence à l’école – par exemple, forums, tables rondes et journées ouvertes – qui réuniront enseignants, élèves et parents; une attention particulière sera portée à une approche non sensationnaliste des médias (presse écrite, musique, télévision, films, internet, téléphones mobiles, etc.) vis-à-vis de la violence à l’école et de la violence sociale dans la vie quotidienne (par exemple, violence familiale, violence de groupe et violence criminelle);
17.4.2. l’école doit organiser des programmes bénévoles avec les parents pour les aider à assumer leurs responsabilités parentales ainsi que la pleine reconnaissance et le plein respect des droits des enfants;
17.4.3. pour la mise en œuvre de certains projets et de certaines activités, les écoles doivent envisager de collaborer avec des ONG bénéficiant de connaissances et d’expérience dans le domaine de l’éducation contre la violence;
17.5. suivi et évaluation:
17.5.1. les autorités nationales doivent établir un système pour centraliser des données statistiques sur la violence à l’école et les résultats obtenus au moyen de différentes mesures appliquées pour lutter contre ce phénomène;
17.5.2. des enquêtes nationales doivent être réalisées pour identifier les bonnes pratiques et la coopération entre écoles aux niveaux national et européen doit être encouragée.
18. L’Assemblée invite le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à garantir que les travaux sur les enfants et la violence resteront une priorité de l’Organisation dans ses futurs programmes d’activité.
19. L’Assemblée invite le Conseil mixte pour la jeunesse ainsi que la Conférence des organisations internationales non gouvernementales du Conseil de l’Europe à se joindre aux efforts que l’Assemblée et le Comité des Ministres déploient pour combattre la violence à l’encontre des enfants et la violence à l’école, et ce en organisant des activités dans leurs secteurs respectifs.

B. Projet de recommandation 
			(2) 
			Projet
de recommandation adopté à l’unanimité par la commission le 4 novembre
2010.

(open)
1. Rappelant sa Résolution … (2011) sur l’éducation contre la violence à l’école, l’Assemblée parlementaire considère que la violence à l’école est une violation des droits de l’enfant. Il est nécessaire d’améliorer la conception des politiques concernant l’éducation contre la violence à l’école et de mieux soutenir la mise en œuvre des politiques nationales visant à neutraliser toute forme de violence à l’encontre des enfants et des adolescents.
2. L’Assemblée estime que, pour créer des synergies propres à renforcer l’incidence des politiques nationales traitant de cette question complexe, une plus grande coopération s’impose au niveau européen et que, à cet égard, le Conseil de l’Europe doit jouer un rôle plus actif.
3. En conséquence, l’Assemblée recommande au Comité des Ministres:
3.1. de soumettre la Résolution … (2011) à ses ministères compétents, en les appelant à prendre en compte les lignes directrices qu’elle contient et à les communiquer à toutes leurs institutions d’enseignement;
3.2. d’inviter, par le biais de ses ministres de l’Education, la prochaine Conférence permanente des ministres européens de l’Education à élaborer, en étroite coopération avec le comité directeur compétent du Conseil de l’Europe, des politiques éducatives globales et proactives contre la violence à l’école et dans la société en général;
3.3. d’aider les Etats membres situés dans des zones de conflit ou de postconflit à élaborer des projets scolaires pratiques contre la violence à l’école, au sein de la famille, dans la société et entre les nations;
3.4. d’aider les Etats membres à promouvoir une culture de la démocratie et des droits de l’homme à l’école en conformité avec la Charte du Conseil de l’Europe sur l'éducation à la citoyenneté démocratique et l'éducation aux droits de l'homme, adoptée dans le cadre de la Recommandation du Comité des Ministres CM/Rec(2010)7;
3.5. de mettre en place une coopération plus étroite avec le Réseau européen des médiateurs pour enfants (ENOC) et son secrétariat à Strasbourg, et leur apporter un soutien direct;
3.6. d’établir une coopération directe avec la Commission européenne en ce qui concerne ses travaux sur une stratégie de l’Union européenne pour les droits de l’enfant, et s’efforcer d’étendre ces efforts à tous les Etats membres du Conseil de l’Europe;
3.7. de coopérer avec la représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants et, dans ce domaine, de mieux coordonner l’action européenne régionale;
3.8. de lancer, par le biais de ses ministres compétents, des plans d’action nationaux contre la violence dans les nouveaux médias, si possible en partenariat avec des agences et des organisations de protection de l’enfance ainsi qu’avec des sociétés de communication et de l’internet.

C. Exposé des motifs, par M. Flego, rapporteur

(open)

1. Introduction

1.1. Mon mandat et l’élaboration du rapport

1. Le 30 avril 2009, des collègues et moi-même avons déposé une proposition de recommandation sur l’éducation contre la violence à l’école (Doc. 11889), renvoyée à la commission de la culture, de la science et de l’éducation pour rapport. J’ai ensuite été nommé rapporteur par la commission le 25 juin 2009.
2. Le 14 octobre 2009, j’ai contacté tous les ministres de l’Education en Europe pour leur demander de me fournir des informations intéressantes sur l’expérience de leurs pays respectifs et de répondre à quatre questions élémentaires:
  • Quelles sont les formes de violence en milieu scolaire repérées comme posant problème?
  • Quelles mesures ont été prises pour remédier à la violence en milieu scolaire?
  • Comment le problème de la violence est-il traité dans les programmes d’enseignement et dans les disciplines enseignées à l’école?
  • Quelles mesures préconiseriez-vous pour lutter contre la violence en milieu scolaire?
3. Ont répondu au questionnaire 28 pays 
			(3) 
			Albanie,
Allemagne, Andorre, Arménie, Autriche, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie,
Chypre, Danemark, Espagne, Estonie, France, Grèce, Hongrie, Italie,
Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Moldova, Monténégro, Norvège, Roumanie,
Royaume-Uni, Fédération de Russie, Slovénie, Suède et Turquie. ; je tiens à les remercier de leurs contributions. Ces réponses sont disponibles sur le site web du Conseil de l’Europe 
			(4) 
			Voir
le site <a href='http://www.coe.int/t/transversalprojects/ children/violence/Flegoreport-violenceatschool.pdf'>www.coe.int/t/transversalprojects/
children/violence/Flegoreport-violenceatschool.pdf</a>.. Leur nombre et leur contenu confirment l’importance de ce sujet ainsi que la nécessité d’une coopération plus étroite en Europe.
4. Le 8 décembre 2009, à Paris, la commission a tenu un échange de vues à ce sujet avec Mme Linda King, représentante de l’UNESCO, et avec M. Wijayananda Jayaweera, directeur de la Division pour le développement de la communication à l’UNESCO.
5. Le 25 janvier 2010, la commission a été informée par Mme Maud de Boer-Buquicchio, Secrétaire Générale adjointe du Conseil de l’Europe, du programme «Construire une Europe pour et avec les enfants» et, dans ce cadre, de l’action spécifique actuellement menée pour combattre toutes les formes de violence à l’encontre des enfants, y compris la violence en milieu éducatif.
6. Le 25 février 2010, à Bruxelles, la Commission européenne a organisé une réunion d’experts sur la violence à l’école – notamment sur les brimades (directes et via l’internet) – dans le cadre de ses travaux «Vers une stratégie européenne sur les droits de l’enfant». J’ai participé comme intervenant à cette rencontre.
7. Enfin, la commission a organisé à Paris, le 10 mars 2010, une audition en présence des personnes suivantes: M. Dan Olweus, professeur de psychologie à l’université de Bergen (Norvège), M. Hugues Feltesse, responsable du bureau du défenseur des enfants à Paris, au nom du Réseau européen des médiateurs pour enfants (ENOC), et, enfin, M. Georges Fotinos, membre du comité français pour l’UNICEF à Paris.
8. Je tiens à exprimer ma reconnaissance à tous ceux qui ont contribué si activement à l’élaboration de ce rapport.

1.2. Objectif du rapport

9. La violence à l’école est devenue l’une des principales difficultés concernant la protection des droits de l’enfant et doit être considérée comme telle.
10. Les médias en Europe rapportent, de temps à autre, des actes de violence graves parmi les élèves, des actes d’hostilité et des agressions perpétrés par des élèves à l’encontre d’enseignants, ces derniers recourant aussi parfois à la violence à l’encontre d’élèves. Ce sont surtout les cas extrêmes de violence physique – tels que des agressions armées ou des violences sexuelles – qui attirent l’attention de l’opinion sur le sujet. Cependant, les incidents de ce type sont très rares et ne sont pas représentatifs du problème de la violence scolaire, dont la portée est beaucoup plus vaste et qui se rencontre principalement dans des situations «ordinaires». Ce phénomène est présent dans tous les pays d’Europe et concerne la majorité des enfants: l’on estime que plus de 60 % des élèves sont victimes de brimades et de violence à l’école 
			(5) 
			Gittins
C. (ed.), Réduction de la violence à
l’école? Un guide pour le changement, Editions du Conseil
de l’Europe, 2006..
11. Les comportements déviants des élèves deviennent de plus en plus inquiétants à mesure qu’ils se banalisent, gagnent en violence et sont le fait d’enfants de plus en plus jeunes. Les actes d’intimidation et les brimades (bullying) entre écoliers restent souvent méconnus ou sous-estimés par les adultes. Enfin, des cas de «conduite inadéquate» parmi les enseignants, et même de châtiments corporels, ont été signalés dans des pays européens.
12. Quelle que soit la forme de la violence, ses effets sont considérables sur l’environnement scolaire. La réussite des enfants ainsi que leur santé émotionnelle sont directement liées au climat de l’école et à la qualité des relations avec les enseignants et les autres élèves. Sans compter que la pratique de la violence provoque des sentiments d’impuissance, de crainte et d’insécurité.
13. Reste que, depuis longtemps, des efforts sont déployés tant au niveau international qu’européen pour combattre la violence perpétrée à l’encontre des enfants et des adolescents, notamment la violence à l’école.
14. La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, adoptée en 1989, garantit le développement harmonieux et sans danger de chaque enfant, et son article 19 porte explicitement sur la protection de l’enfant contre la violence. Il exige des Etats parties qu’ils prennent «toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d’abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle, pendant qu’il est sous la garde de ses parents ou de l’un d’eux, de son ou ses représentants légaux ou de toute autre personne à qui il est confié. Ces mesures de protection doivent comprendre, selon qu’il conviendra, des procédures efficaces pour l’établissement de programmes sociaux visant à fournir l’appui nécessaire à l’enfant et à ceux à qui il est confié, ainsi que pour d’autres formes de prévention, et aux fins d’identification, de rapport, de renvoi, d’enquête, de traitement et de suivi pour les cas de mauvais traitements de l’enfant décrits ci-dessus, et comprendre également, selon qu’il conviendra, des procédures d’intervention judiciaire». Le droit de l’enfant à l’éducation est également consacré par la Convention de l’UNESCO sur la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement (1960), convention qui met l’accent sur l’égalité des chances en matière d’accès à l’éducation et de qualité de l’éducation, tout en soulignant l’importance d’un environnement éducatif sans violence. Plus récemment, le Cadre d’action de Dakar (2000) a associé le droit à une éducation de qualité au droit à un environnement scolaire sain et sûr.
15. Le Conseil de l’Europe s’est toujours intéressé aux questions liées à la protection des droits de l’enfant. Dans sa jurisprudence, la Cour européenne des droits de l’homme a démontré son attachement à la protection effective des droits de l’enfant, notamment en déclarant les châtiments corporels – tant à l’école qu’au sein de la famille – contraires à la Convention européenne des droits de l’homme. A l’article 17, la Charte sociale européenne révisée (1996) exige des Etats qu’ils protègent les enfants et les adolescents contre la violence en général. Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe et l’Assemblée parlementaire ont adopté une série de recommandations sur la reconnaissance et la promotion des droits de l’enfant.
16. En 2006, le Conseil de l’Europe a lancé un projet transversal, «Construire une Europe pour et avec les enfants», afin d’assurer une approche holistique de la protection des droits de l’enfant dans toutes les politiques de l’Organisation. Ce programme, réalisé par le biais de plans triennaux (le dernier a été adopté par le Comité des Ministres en 2008) couvrant les domaines des affaires sociales, juridiques, éducatives et sanitaires, vise à aider une variété d’acteurs à mettre en place des stratégies de lutte contre la violence à l’encontre des enfants. Le combat contre les châtiments corporels et contre la violence à l’école/sur l’internet figure parmi les priorités du projet 
			(6) 
			Discours prononcé
par Maud de Boer-Buquicchio, Secrétaire Générale adjointe du Conseil
de l’Europe, lors de la conférence «Construire une Europe pour et
avec les enfants: vers une stratégie pour 2009-2011», 8-10 septembre
2008..
17. Le Réseau européen des médiateurs pour enfants (ENOC) joue un rôle important dans la protection des droits des enfants. A travers ses membres, il a élaboré des outils pour lutter contre la violence à l’école.
18. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) a élaboré des lignes directrices au moyen de sa Recommandation de politique générale no 10 sur la lutte contre le racisme et la discrimination raciale dans et à travers l’éducation scolaire.
19. Malgré les efforts déployés, le problème de la violence à l’école et, plus généralement, dans la société reste en mal de solution. Le présent rapport entend, par conséquent, mieux faire comprendre la portée et la complexité de ce problème, et faire l’inventaire des politiques et des programmes mis place au niveau national pour l’affronter, et ce afin de déterminer des moyens de le traiter efficacement.

2. Violence à l’école: étendue et complexité du problème

2.1. Formes de violence et «brimades scolaires»

20. La violence fait partie des relations humaines. Elle peut être directe et physique, mais peut aussi revêtir une variété de formes psychologiques. Etant donné la multiplicité des formes et la diversité des acteurs intervenant dans la violence scolaire, ainsi que les différences considérables qui existent entre les perceptions nationales du phénomène, il convient de privilégier la définition la plus large possible de la violence.
21. Du point de vue de la gravité des actes, l’on pourrait parler de «violence» non seulement à propos des comportements agressifs impliquant l’usage de la force, mais également des simples menaces, agressions verbales ou influences indirectes exercées sur la personne au moyen de rumeurs, d’exclusion sociale, de moqueries sur l’internet, etc. Certains pays, tels la France et la Belgique, prennent en compte les dérogations aux règles de politesse («incivilités») 
			(7) 
			Peter
K. Smith, La violence à l’école: perspective
européenne, Londres, 2003., de même que les situations d’abus de pouvoir ou de violence institutionnelle. Quant à son objet, la violence peut être autodestructrice (consommation d’alcool et de drogues), viser un individu (élève ou enseignant), un groupe (violence raciste, sexiste ou en bandes), ou bien être dirigée contre des biens ou une institution (vols, vandalisme) 
			(8) 
			«Une
politique sociale dynamique en faveur des enfants et adolescents
en milieu urbain», rapport de l’Assemblée du 10 septembre 2001 (Doc. 9192)..
22. L’analyse des données fournies par les pays européens montre que la violence verbale et psychologique prime sur les agressions physiques, les dommages matériels arrivant en troisième position. Les agressions verbales sont particulièrement répandues – par exemple, elles prédominent en France, en Allemagne, à Chypre et en Estonie – et visent aussi bien les enfants que les adultes. Dans plusieurs pays, la violence psychologique est directement associée aux brimades.
23. Harcèlement, brimades et persécutions parmi les enfants constituent un phénomène propre aux établissements scolaires – les brimades étant reconnues comme l’un des principaux facteurs négatifs affectant la santé mentale des enfants.
24. Les brimades peuvent se définir comme une situation où l’enfant se trouve exposé, de manière répétée et durable, au comportement agressif d’un ou plusieurs élèves. Ce comportement se caractérise toujours par un rapport de forces inégal entre victime et agresseur (relation dominant/dominé) et par le caractère proactif de l’agression.
25. Les brimades sont un phénomène complexe qui recouvre toutes les formes de comportement violent. Mais ce sont surtout ses aspects psychologiques et d’agression indirecte qui le distinguent et le rendent difficile à déceler: violence physique indirecte (grimaces, gestes obscènes, dégradation des effets personnels), brimades verbales directes (remarques, railleries, taquineries et surnoms blessants, lettres/e-mails malveillants) et indirectes (rumeurs, mensonges, publications de photos et de commentaires sur l’internet), exclusion sociale, extorsion d’argent, etc.
26. De nombreuses recherches montrent l’ampleur et l’impact de cette forme de violence scolaire. Selon une étude internationale HBSC (Health Behaviour in School-aged Children) réalisée en 2008 dans 18 Etats membres du Conseil de l’Europe, un adolescent sur cinq (garçons entre 11 et 15 ans) a été victime de brimades, ce taux dépassant 40 % dans quatre Etats européens 
			(9) 
			W. Craig et al., «A cross-national profile
of bullying and victimization among adolescents in 40 countries», International Journal of Public Health,
2009.. L’on constate des disparités nationales et même locales considérables (moins de 10 % en Suède contre plus de 40 % en Lituanie); selon H. Feltesse, ce phénomène touche 50 % des élèves dans certaines écoles 
			(10) 
			Commission de la
culture, de la science et de l’éducation, échange de vues avec des
experts sur l’éducation contre la violence à l’école, Paris, 10 mars
2010..
27. Les brimades à l’école sont à l’origine de troubles psychologiques à long terme, tant chez les victimes que chez les agresseurs. Les victimes de brimades éprouvent des difficultés à s’adapter socialement et émotionnellement, ainsi qu’à se faire des amis. Souvent ces enfants refusent d’aller à l’école, deviennent anxieux, dépressifs et inaptes à l’apprentissage. Il a été montré qu’une partie considérable des victimes de brimades souffrent de dépression, de manque de confiance en soi et de pulsions suicidaires 
			(11) 
			D. Olweus et S.
Limber, «The Olweus Bullying Prevention Program. Implementation
and evaluation over two decades», The
Handbook of School Bullying: an international perspective,
New York, 2010.. Les auteurs de brimades à l’école primaire peuvent être à l’origine de formes de brimades plus fortes en fin de scolarité et d’actes de violence graves à l’âge adulte 
			(12) 
			J. G.
Freeman et al., «The relationship of schools to emotional health
and bullying», International Journal
of Public Health, 2009.. Enfin, les coûts économiques et sociaux des brimades ne sont pas négligeables. Selon une étude récente, des 160 jeunes adultes (35 ans en moyenne) ayant consulté un psychiatre pour la première fois, la moitié ont été victimes de brimades à l’école 
			(13) 
			D. Olweus et
S. Limber, op. cit..

2.2. Facteurs pouvant générer un comportement violent

2.2.1. Famille

28. Malgré les changements du monde contemporain, les parents jouent le rôle primordial dans l’éducation de l’enfant. Le cadre familial peut favoriser le développement personnel, mais aussi conduire à des comportements déviants. Si un enfant est exposé dans sa famille à un paternalisme prononcé, voire autoritaire, et à des tensions interpersonnelles – ou, même, subit des punitions corporelles –, il risque fort de devenir intolérant et violent à l’école. La condamnation publique de la violence domestique est un processus très lent, même en Europe. A ce jour, 22 Etats membres du Conseil de l’Europe ont explicitement interdit toutes les formes de châtiment corporel à l’encontre des enfants dans toutes les situations 
			(14) 
			«Enfants
victimes: éradiquons toutes les formes de violence, d’exploitation
et d’abus», rapport de l’Assemblée du 21 décembre 2006 (Doc. 11118)..
29. Les mutations économiques et sociales rapides de la société, en particulier la dégradation des conditions de vie des familles pauvres et le changement de la structure familiale traditionnelle, ont eu des répercussions néfastes sur le rôle formateur des parents. Ainsi les familles violentes appartiennent-elles souvent aux couches sociales les plus défavorisées sur le plan économique et socioculturel. Outre la pauvreté et les privations, les experts notent d’autres facteurs de violence scolaire, notamment les disputes et la séparation entre parents, le manque de contrôle et l’absence d’un ou des deux parents pour des raisons professionnelles 
			(15) 
			«Responsabilités
des parents et des enseignants dans l’éducation des enfants», rapport
de l’Assemblée du 22 décembre 2000 (Doc. 8915).. Le métier de parent est peut-être le seul à ne pas être enseigné. Aussi est-il primordial de fournir une assistance aux familles en difficulté ou dont les enfants manifestent des comportements violents. D’une manière générale, renforcer le dialogue avec les parents et améliorer la communication entre école et famille contribueraient à diminuer la violence scolaire.

2.2.2. Ecole

30. L’éducation, autre pilier du développement de l’enfant, est à la fois un objectif et un moyen de le réaliser. Non seulement l’école doit assurer la transmission des connaissances, mais elle a pour mission d’améliorer l’état de santé des élèves et de leur garantir un développement équilibré, notamment par la promotion de valeurs telles que le respect d’autrui et de la diversité culturelle 
			(16) 
			«Education
pour le développement équilibré à l’école», rapport de l’Assemblée
du 20 décembre 2005 (Doc.
10767)..
31. L’accomplissement de ces deux fonctions n’est possible que dans une «atmosphère positive» qui encourage les attitudes non violentes chez les élèves ainsi qu’entre enseignants et élèves. Ce climat dépend, en particulier, de l’organisation interne de l’école, de la participation des enfants aux activités scolaires et extrascolaires, de la confiance mutuelle entre enseignants et élèves, et, enfin, de l’exemple donné par le personnel de l’école. Cependant, la réalité est souvent différente.
32. Tout d’abord, la persistance des châtiments corporels rend impossible d’inculquer aux enfants le respect des droits de l’homme. La «survie» de ce type de pratiques est due à l’inviolabilité de la sphère privée de la classe et au silence des élèves sur les faits 
			(17) 
			«En
finir avec la violence à l’école: quelles solutions?», rapport de
réunion d’experts, UNESCO, Paris, 27-29 juin 2007.. D’autre part, avec la démocratisation de la société et des méthodes d’enseignement, les enseignants ont moins de prise sur les enfants; aussi les mesures disciplinaires traditionnelles se révèlent-elles inefficaces face au comportement violent d’élèves aujourd’hui plus agressifs, aussi bien avec leurs pairs qu’avec les adultes. De plus, faute d’expérience en matière de prévention et de gestion des conflits, le personnel scolaire se trouve souvent désemparé face aux conduites agressives.
33. Le manque de moyens dans les écoles compte parmi les principaux problèmes. Il se traduit avant tout par la réduction du nombre des enseignants et, du fait de classes surchargées, par la difficulté de contacts «humains» entre élèves et professeurs. Le manque de moyens se reflète également dans la qualité de la formation du personnel scolaire et, par conséquent, dans la qualité de l’enseignement. Enfin, l’insuffisance du financement est un frein à l’amélioration des équipements et de l’environnement scolaires, amélioration qui favoriserait l’étude et le jeu 
			(18) 
			«Responsabilités des parents», op. cit..
34. L’organisation médiocre du processus éducatif risque de créer des contraintes physiques et affectives considérables, et, par là même, de générer du stress et, finalement, des comportements violents. Selon le rapport sur le développement équilibré à l’école produit par l’Assemblée en 2005, les facteurs favorisant le stress sont, entre autres, une organisation de l’enseignement inadaptée aux biorythmes des élèves et une inadéquation entre méthodes d’enseignement et âge/développement de l’enfant 
			(19) 
			«Education pour le
développement équilibré à l’école», op.
cit..
35. Par ailleurs, les écoles fondées sur un modèle autoritaire et non démocratique, visant à contrôler plutôt qu’à favoriser le sens critique, deviennent un environnement hostile qui décourage la participation des élèves 
			(20) 
			UNESCO, «En finir avec
la violence à l’école», op. cit.. Parmi les autres aspects de la vie scolaire qui favorisent le développement de la violence et des brimades, citons un climat de compétition et de concurrence, un manque d’accompagnement des élèves et une surveillance insuffisante.

2.2.3. Médias

36. Les technologies de l’information posent un nouveau défi à la lutte contre la violence scolaire. Depuis leur avènement, les médias traditionnels reflètent la violence sous toutes ses formes et, à cet égard, leur influence n’a cessé de faire débat. Aujourd’hui, avec l’apparition des médias électroniques, cet impact s’est accru. Internet a permis le développement sans précédent des moyens de communication et d’information, et son influence psychologique est à la mesure de son utilisation massive par les enfants. Par ailleurs, les médias non violents peuvent produire des bons résultats dans le cadre de l’éducation non formelle.
37. Les jeux vidéo véhiculent souvent des images de violence et, surtout, suscitent une conscience de soi démesurée, ainsi qu’une fausse perception des autres et des capacités physiques humaines. Avec de telles mutations cognitives et émotionnelles, recourir à la violence pour résoudre un problème devient presque un comportement «normal».
38. Enfin, les nouveaux moyens de communication et de socialisation offerts par internet et par la téléphonie mobile servent aux jeunes d’instruments de brimade (cyberbullying).
39. Par conséquent, il est très important d’accorder une attention particulière à l’influence des médias et aux contenus potentiellement néfastes pour les enfants. Reste que les médias – en particulier la télévision – peuvent considérablement contribuer à la prévention de la violence scolaire en sensibilisant l’opinion à ce problème.

3. Lutte contre la violence à l’école

3.1. Politiques nationales et programmes nationaux

40. Les réponses des pays au questionnaire adressé par la commission de la culture, de la science et de l’éducation aux ministres de l’Education des Etats membres contiennent des informations précieuses sur les formes de violence identifiées à l’école, sur les mesures antiviolence mises en place, sur le traitement du problème de la violence dans les programmes d’enseignement et, enfin, sur les mesures à envisager.
41. S’agissant de la définition de la violence, la grande majorité des pays a identifié ses principales formes (physiques, verbales, psychologiques). Certains Etats (Chypre, par exemple) ont présenté une analyse relativement détaillée de la structure du comportement violent. Dans un certain nombre de pays, le phénomène des brimades n’est pas encore identifié et, ailleurs, l’accent porte essentiellement sur le harcèlement entre élèves. Seuls quelques Etats ont soulevé la question du rôle joué par les nouvelles technologies dans le comportement violent – avec, par exemple, l’identification de cas de «cyberbullying» (Allemagne, Autriche, Estonie et Luxembourg) ou avec la gestion des contenus internet (par exemple, vérification de la présence de filtres internet dans des établissements scolaires lettons).
42. La plupart des pays ont mis en place des programmes consacrés spécifiquement au thème de la violence scolaire («Une école sans violence» en Bulgarie, 2009, «Une école sans danger 2009-2011» en Estonie, etc.) ou ont intégré un programme dans un cadre plus large (par exemple, à Chypre, des politiques de promotion à long terme de la santé des enfants). Ces mesures privilégient une approche complexe mobilisant les ressources de plusieurs ministères (Education, Justice, Affaires sociales, Santé), associant approche sécuritaire et approche éducative, et agissant à plusieurs niveaux (national et local).
43. Force est de constater qu’il reste encore des Etats où le problème de la violence scolaire est géré du seul point de vue sécuritaire et dissuasif. Les médiateurs de certains pays européens signalent la multiplication des procédures judiciaires et, en général, un recours croissant à une approche répressive du problème. La France, par exemple, a tendance à qualifier de délits mineurs les actes de violence scolaire. En Grèce, les défenseurs des droits de l’enfant constatent que l’administration scolaire ne réagit qu’en cas d’incidents graves et que son intervention se limite à punir les agresseurs 
			(21) 
			UNESCO,
«En finir avec la violence à l’école», op.
cit..
44. S’agissant des programmes scolaires, en dehors des cours d’éducation civique dispensés dans plusieurs pays, le sujet de la violence est traité selon une approche pluridisciplinaire – dans le cadre des cours de langue, d’histoire, de philosophie, etc. Certains pays reconnaissent l’inadéquation de l’enseignement des compétences civiques dans le programme.
45. En l’absence d’une réponse adéquate, tout porte à croire que les brimades risquent de s’amplifier. Ainsi, selon les autorités bulgares, le nombre des victimes de brimades à l’école dans le pays est passé de 17 à 23 % entre 2002 et 2007. Par ailleurs, le taux exceptionnellement bas des cas de brimades et de victimisation dans les écoles scandinaves serait dû à l’existence de politiques nationales en la matière 
			(22) 
			W. Craig et al., op. cit. .
46. En 2009, des chercheurs de Cambridge ont analysé plus de 500 rapports concernant divers programmes antibrimade. Cette méta-analyse a montré l’efficacité de ces programmes pour réduire (de 20 à 23 %) les brimades et la victimisation 
			(23) 
			M. Ttofi et D. Farrington, «What
works in preventing bullying: effective elements of anti-bullying
programmes», Journal of aggression, conflict
and peace research, avril 2009..
47. Des études ont également conclu que les programmes fondés sur la méthode de Dan Olweus pour la prévention des brimades (Olweus Bullying Prevention Program, OBPP) sont très performants 
			(24) 
			Parmi
les autres projets fructueux non fondés sur la méthode d’Olweus,
l’on peut citer les programmes antibrimades en Finlande (Salmivalli,
Kaukiainen et Voerten, 2005) et en Grèce (Andreou et al., 2007), ainsi que les programmes
Kia Kaha (Raskauskas, 2007), KiVa (Salmivalli, Karna et Poskiparta,
2007) et Respect (Ertesvag et Vaaland, 2009).. Ce constat est confirmé par le Colorado Centre for the Study and Prevention of Violence, qui a classé le programme OBPP parmi les douze plus efficaces au monde.
48. Le programme OBPP a été introduit par le Gouvernement norvégien dans les écoles du pays au début des années 1980. Ce programme ne vise pas seulement à réduire les problèmes de brimades latents et manifestes, mais aussi à améliorer les relations interpersonnelles entre les enfants en général. En restructurant l’environnement social des élèves, il élimine les conditions propices aux brimades et entretient un sentiment communautaire parmi tous les acteurs de la vie scolaire. Le programme OBPP, fondé sur le rôle central de l’enseignant, aborde le problème des brimades à trois niveaux: l’école, la classe et l’individu.
49. Selon Olweus, le comportement des adultes à l’école doit suivre quatre principes: 1. adopter une attitude chaleureuse et positive, s’intéresser et participer à la vie des élèves; 2. fixer des limites fermes aux comportements intolérables; 3. recourir à des mesures disciplinaires non violentes et non hostiles en cas de transgression des règles; 4. jouer un rôle d’autorité et d’exemple à suivre 
			(25) 
			D.
Olweus et S. Limber, op. cit..
50. Plusieurs évaluations du programme OBPP ont montré son efficacité et la durabilité des résultats. Une étude réalisée en 1997-1998 a révélé que, sur une année, les brimades ont diminué de 23 % et le nombre des victimes de 36 %, alors que dans les écoles non concernées par le projet, ce taux a augmenté de 4 %. Sur deux ans (2001-2003), le nombre des victimes a baissé d’environ 33 % et celui des agresseurs de 44 %. Enfin, selon une étude pluriannuelle menée à Oslo entre 2001 et 2006, la mise en œuvre du programme sur une période de cinq ans a permis de réduire le nombre des victimes de brimades de 40 %, et le nombre des agresseurs de 50 %. Ces résultats montrent que le programme OBPP produit des effets durables et contribue à changer la «culture» scolaire en renforçant les capacités de l’école à faire face, en permanence, aux brimades.
51. Une autre approche, diamétralement opposée à la philosophie et à la méthode Olweus, recourt aux politiques de tolérance zéro (Zero Tolerance Policies), largement pratiquées aux Etats-Unis depuis les années 1990. Basée sur la dissuasion, elle procède par sanctions sévères (exclusion temporaire, voire définitive) des élèves pour des délits mineurs. Toutefois, l’efficacité de ces politiques quant à la réduction de la violence à l’école a été mise en doute 
			(26) 
			«Are Zero Tolerance Policies
effective in the schools? An evidentiary review and recommendations»,
rapport de l’American Psychological Association, 2008.. Les experts de l’UNESCO placent parmi les programmes de prévention contre-productifs ceux qui privilégient les problèmes de discipline, qui visent les élèves difficiles et qui recourent à des méthodes fondées sur la crainte.

3.2. Bonnes pratiques et expérience acquise

52. En règle générale, le mieux serait d’aborder le problème de la violence à l’école selon une approche holistique: en impliquant tous les acteurs, à tous les niveaux, et en utilisant tous les moyens à disposition. Les experts soulignent la nécessité de privilégier des mesures proactives et à long terme.
53. Selon l’étude menée par M. Ttofi et D. Farrington 
			(27) 
			M.
Ttofi et D. Farrington, op. cit., voici quels sont les éléments essentiels à la réduction des brimades:
  • la formation des enseignants et des parents;
  • le travail avec les agresseurs et leurs victimes (travail individualisé effectué, la plupart du temps, par des psychologues en collaboration avec les enseignants);
  • le travail entre élèves (médiation, mentorat);
  • une meilleure surveillance des cours de récréation (avec, notamment, identification des «points chauds» et des «heures de pointe» propices aux brimades);
  • la gestion de la classe (techniques de détection et de lutte antibrimades);
  • les méthodes disciplinaires;
  • les conférences à l’école (pour sensibiliser les élèves au phénomène et à l’ampleur des brimades dans leur établissement);
  • les codes de conduite en classe (élaborés ensemble par élèves et enseignants, et souvent affichés à la vue de tous);
  • la politique antibrimade officielle dans chaque école;
  • des supports pédagogiques (dans le cadre du programme scolaire ou de nouveaux cours).
54. L’échange de vues entre la commission de la culture, de la science et de l’éducation et des experts en brimades scolaires a permis de dégager un certain nombre d’éléments spécifiques pouvant contribuer à améliorer les mesures antibrimade.
55. Une définition claire des actes de violence est une condition préalable nécessaire, en particulier pour établir la distinction entre brimades et autres formes de comportement violent, et pour les mettre à l’ordre du jour dans les pays où les brimades scolaires ne sont pas reconnues en tant que telles. Il est également crucial que les effets néfastes des brimades soient admis. Le personnel scolaire hésite souvent à admettre l’existence des brimades et à intervenir, le harcèlement et la violence entre élèves étant, en général – et à tort – considérés comme partie intégrante de la vie des enfants.
56. Une meilleure communication sur les problèmes liés aux brimades est nécessaire entre élèves et enseignants. En Estonie, une étude réalisée en 2009 montre que les enfants et les adultes perçoivent la violence différemment: alors que pour les élèves c’est la dimension psychologique qui prime, les enseignants voient avant tout les agressions physiques.
57. L’idée que la résolution du problème de la violence scolaire passe par une coopération étroite entre tous les acteurs de l’éducation de l’enfant (l’école, les parents, les autorités locales, les ONG et l’Eglise) a fait l’objet d’un fort consensus.
58. Les mécanismes de réception des plaintes doivent être simplifiés et renforcés. Selon le médiateur français, les élèves ne savent pas vraiment à qui s’adresser pour parler des brimades. Au Danemark, le Conseil national pour les enfants souligne que les élèves ne sont même pas autorisés à se plaindre sur certaines questions. Il est donc nécessaire de créer des procédures permettant de centraliser les plaintes et de les communiquer officiellement à la direction des écoles concernées.
59. Il est nécessaire de renforcer la coopération internationale en matière de recherche sur les brimades et l’examen systématique des initiatives nationales de prévention afin de répertorier les bonnes pratiques. En outre, une analyse coût-bénéfice des divers programmes contribuera à persuader les décideurs d’en approuver la mise en œuvre.

4. Conclusions et recommandations

60. La vitalité et l’avenir d’une société dépendent de sa jeune génération et, en particulier, des conditions dans lesquelles les enfants grandissent. L’environnement scolaire compte parmi les éléments clés de la vie de l’enfant; la possibilité d’étudier dans un environnement sain et sûr est essentielle à son développement équilibré, à son épanouissement personnel et à son avenir de citoyen. La qualité de la vie d’adulte dépend, pour une large part, de la qualité de l’éducation. Les brimades ne peuvent être considérées comme une pratique naturelle des enfants; aussi l’élaboration de programmes antibrimades est-elle une condition nécessaire à un environnement éducatif normal.
61. Les facteurs influant sur la violence scolaire sont multiples, les principaux étant la famille et l’environnement socio-économique dans lequel grandit l’enfant. L’environnement scolaire en soi peut aussi être générateur de violence, non seulement en raison du stress qu’il crée et des inégalités qu’il reproduit, mais aussi de l’absence de dialogue entre élèves et parents. Enfin, l’environnement social au sens large –notamment les médias et les technologies de l’information – exerce une influence indéniable sur les attitudes violentes des enfants.
62. Eradiquer la violence à l’école est une tâche difficile, mais il existe des mesures permettant de prévenir ou de minimiser les comportements violents. Reste que l’école est incapable de traiter ce problème efficacement à elle seule. Une coopération étroite entre les différents acteurs est essentielle.
63. A cet égard, plusieurs projets exigeant le soutien de l’école, des parents et des enfants pour lutter contre la violence ont déjà fait leurs preuves. Ces initiatives pourraient servir d’exemples et être reproduits à l’échelle européenne. Rappelons aussi qu’il faut donner la priorité aux mesures préventives, notamment à l’amélioration des compétences sociales des enseignants.
64. Dans ces conditions et en s’appuyant sur l’expérience de différents pays, il est possible d’envisager un certain nombre d’actions ciblées pour traiter la violence à l’école:

Mise en place, à l’intention des enseignants et du personnel scolaire, de programmes de formation continue sur les techniques de prévention/gestion des comportements violents et sur la création d’organes d’assistance spécialisés:

  • intégrer cette formation aux programmes destinés aux enseignants;
  • créer des programmes de soutien aux écoles – tels que les ateliers de deux jours (brimades, santé émotionnelle) et de cinq jours (communication avec les adolescents) organisés par le ministère de l’Education de Chypre;
  • établir des partenariats avec des ONG spécialisées en formation (par exemple, un contrat entre le Gouvernement français et l’association Génération médiateurs);
  • introduire des «équipes d’intervention de crise» pour aider à résoudre les cas urgents et particulièrement graves (à l’instar du Comité d’intervention direct, à Chypre).

Intégration d’une composante «éducation pour la paix» au programme scolaire, en particulier:

  • introduire un enseignement interdisciplinaire non seulement des droits mais aussi des devoirs des enfants;
  • mettre davantage l’accent sur la promotion de la diversité et sur la richesse qu’elle apporte;
  • utiliser les cours de sciences humaines et sociales pour combattre la violence et ses conséquences.

Amélioration du climat scolaire et du bien-être des élèves:

  • mettre en place des programmes spécialisés (Réseau européen Ecoles-santé, zones d’éducation prioritaire;
  • financer des projets de réaménagement des locaux (revitalisation des cours de récréation, transformation des salles de classe en espaces récréatifs);
  • développer des activités extrascolaires.

Participation des enfants, en tant qu’agents de prévention et de signalisation de la violence:

  • à l’élaboration des politiques: organiser des consultations régulières des enfants (à l’instar, par exemple, des initiatives «Children’s and Young People’s Panel» au Danemark et «Parole aux jeunes» en France), favoriser la participation des enfants à des forums consacrés au problème de la violence scolaire;
  • au fonctionnement des établissements scolaires: conseils de l’école, groupes d’entraide, rédaction de codes de conduite;
  • sensibiliser les enfants aux problèmes liés aux comportements abusifs ou dangereux dès le plus jeune âge – comme, par exemple, dans le cadre du programme irlandais «Stay Safe» (Soyez en sécurité) mis en œuvre dans les écoles primaires.

Amélioration du suivi quantitatif et qualitatif des écoles:

  • remédier au manque ou à l’absence de statistiques officielles dans les écoles (projet chypriote d’observatoire de la violence scolaire);
  • établir des critères pour évaluer les écoles et les programmes de formation des enseignants en termes d’efficacité de la prévention de la violence;
  • réaliser des enquêtes nationales pour identifier les bonnes pratiques, puis en promouvoir la diffusion (ainsi le manuel hongrois Un livre de poche sur la violence à l’école);
  • renforcer les pouvoirs des médiateurs pour l’enfance (ou encourager leur mise en place), notamment en ce qui concerne leur indépendance et leurs capacités de suivi.

Renforcement des liens entre l’école, la famille et la communauté:

  • au moyen d’actions de soutien à la parentalité (initiatives françaises «Ouvrir l’école aux parents pour faciliter l’intégration» et «Réseaux d’écoute, d’aide et d’accompagnement des parents»), en créant des comités consultatifs parents-enseignants;
  • en établissant des partenariats écoles-entreprises et des programmes extrascolaires et sportifs communs;

Organisation de campagnes périodiques de sensibilisation aux dangers de la violence scolaire.

Annexe – Liste des documents de référence:

(open)

Rapport annuel de la représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence à l’encontre des enfants, Assemblée générale des Nations Unies, 2010 (A/65/262), disponible à cette adresse: www.crin.org/docs/2010_SRSG_Report_to_the_GA.pdf

Les brimades à l’école, Editions du Conseil de l’Europe, 1999 (ISBN 978-92-871-3750-0)

Human Rights Education in the School Systems of Europe, Central Asia and North America: A Compendium of Good Practice, Nations Unies, 2009 (HR/PUB/09/3), publication conjointe de l’OSCE/BIDDH, du Conseil de l’Europe et de l’UNESCO, disponible à cette adresse:

www.ohchr.org/Documents/Publications/CompendiumHRE.pdf

von Felitzen C. (dir.), Influences of Meditated Violence, Nordicom, 2009 (ISBN 978-91-89471-81-8)

Rapport de l’expert indépendant pour l’étude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants, Assemblée générale des Nations Unies, 2006 (A/61/299),disponible à cette adresse: www.crin.org/docs/SG_violencestudy_en-1.pdf

En finir avec la violence à l’école: guide à l’intention des enseignants, UNESCO, 2009 (ED.2009/WS/43), disponible à cette adresse: http://unesdoc.unesco.org/images/0018/001841/184162e.pdf

Kane J., Violence à l’école, Commission européenne, 2008 (ISBN 978-92-79-09378-4)

Gittins C., Réduction de la violence à l’école? Un guide pour le changement, Editions du Conseil de l’Europe, 2006 (ISBN 978-92-871-5868-0), disponible à cette adresse:

www.coe.int/t/transversalprojects/children/pdf/ViolenceHandbook_en.pdf

Violence à l’école – Un défi pour la communauté locale, Editions du Conseil de l’Europe, 2004 (ISBN 978-92-871-5325-8)