1. Introduction
1. Berceau de cultures, de civilisations et des trois
principales religions monothéistes, la Méditerranée a été et reste
un carrefour d’échanges culturels, humains et économiques, un pont
entre des civilisations et entre trois continents. Cependant, la
stabilité politique et la subsistance socio-économique d’une population
en augmentation rapide dépendent fortement des rares ressources
naturelles locales et de la viabilité d’un environnement naturel
méditerranéen extrêmement riche et diversifié, mais aussi extrêmement
vulnérable.
2. Le présent rapport vise à présenter des propositions concrètes
afin de consolider la coopération politique dans le domaine du développement
durable. Il tient compte des précédents travaux de l’Assemblée parlementaire
qui présentent un intérêt pour la région méditerranéenne, et qui
ont conduit à l’adoption de textes comme, par exemple: la
Résolution 1197 (1999) sur la paix, la stabilité démocratique et le développement durable
dans les bassins de la Méditerranée et de la mer Noire: rôle de
la coopération interparlementaire; la
Recommandation 1558 (2002) sur la pêche dans les mers semi-fermées d’Europe; la
Recommandation 1630 (2003) sur l’érosion du littoral de la mer Méditerranée: conséquences
pour le tourisme; la
Résolution
1556 (2007) sur la politique agricole et rurale euro-méditerranéenne;
la
Résolution 1693 (2009) sur l’eau: un enjeu stratégique pour le Bassin méditerranéen;
la
Résolution 1731 (2010) et la
Recommandation
1919 (2010) «Euro-Méditerranée: pour une stratégie du Conseil de
l’Europe».
3. Les travaux en cours de la commission de l’environnement,
de l’agriculture et des questions territoriales sur le changement
climatique, la biodiversité, l’évaluation des progrès de la mise
en œuvre de la Convention de Berne, la gestion de l’eau, le secteur
de l’énergie, la pêche, la réforme agricole, la sylviculture, la
prévention des catastrophes naturelles et la crédibilité des études
sur l’environnement apportent des éléments complémentaires au rapport.
4. Au niveau mondial, 2010, Année internationale de la biodiversité,
est une étape importante pour jeter les bases d’un avenir caractérisé
par de faibles émissions de CO2, grâce au
consensus des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur
les changements climatiques. A la suite des résultats mitigés des négociations
à haut niveau menées à Copenhague (COP-15) en décembre 2009, il
sera essentiel de prendre des engagements politiques et économiques
fermes pour limiter les effets des changements climatiques, empêcher
un réchauffement supérieur aux 2°C envisagés et remédier aux effets
de la dégradation de l’environnement sur notre planète. Les menaces
croissantes qui pèsent sur les écosystèmes fragiles, comme ceux
de la région méditerranéenne, sont des exemples éloquents qui devraient
inspirer l’action politique.
2. Vulnérabilité
de l’environnement méditerranéen
2.1. Caractéristiques
du Bassin méditerranéen
5. La Méditerranée, qui est la plus vaste mer semi-fermée
d’Europe, se caractérise par une zone littorale et un plateau continental
étroits, et par un bassin versant de petite taille, en particulier
dans sa partie nord. Le canal de Sicile, qui sépare le bassin ouest
du bassin est, marque une frontière géographique et hydrologique entre
ces deux bassins.
6. La Méditerranée s’étend sur 2 500 000 km2,
avec une profondeur moyenne de 1 500 m – le point le plus profond
se situant à 5 000 m en mer Ionienne, entre la partie inférieure
de la «botte» italienne et la Grèce. Elle est reliée à l’océan Atlantique
par le détroit de Gibraltar, à la mer Rouge et à l’océan Indien
par le canal de Suez, et à la mer Noire par les Dardanelles et la
mer de Marmara. Ses principales mers intérieures sont les mers Adriatique,
Egée, Ionienne et Tyrrhénienne.
7. La Méditerranée se caractérise par des températures élevées
(minimum annuel de 12°C qui peut atteindre 25°C en été), ce qui
induit des taux métaboliques élevés. Il s’agit de la plus salée
de mers européennes. L’évaporation étant plus importante que les
précipitations et les eaux de ruissellement, le déficit d’eau douce
se situe autour de 2 500 km³ par an. La Méditerranée est soumise
à des micromarées d’une amplitude de moins de 50 cm, qui réduit
le potentiel de dilution et de dispersion des déchets solubles et
sous forme de particules.
8. Pauvre en nutriments (milieu oligotrophique), cette mer a
une production primaire et une biomasse de phytoplancton faibles.
La production primaire en mer ouverte est limitée en phosphore,
à la différence de la plupart des océans de la planète, qui sont
généralement limités en azote. L’eau est donc particulièrement transparente
et permet une pénétration profonde de la lumière dans la colonne
d’eau, donc une photosynthèse à de grandes profondeurs.
9. La diversité biologique de la Méditerranée est très riche.
Sa faune et sa flore font partie des plus variées du monde, en particulier
dans les zones côtières, avec un taux élevé d’espèces endémiques
(28 %). Cette mer abrite un large éventail de vie marine sur fond
d’abondantes prairies sous-marines, de monts sous-marins et de fosses
pouvant atteindre des profondeurs de 5 000 m. La Méditerranée représente
moins de 1 % des mers de la planète alors qu’elle abrite près de
9 % de l’ensemble de la vie marine, avec plus de 10 000 espèces identifiées
à ce jour. La diversité des mammifères est particulièrement riche
le long de la côte africaine et entre la France et l’Italie, dans
des zones où s’élèvent les eaux fraîches qui amènent des nutriments
vitaux à la surface.
2.2. Effets du changement
climatique en Méditerranée et prévisions en la matière
10. La région méditerranéenne est connue pour son climat
particulièrement doux, aux températures constantes et modérées.
La répartition des précipitations est plus imprévisible: elles peuvent
atteindre 1 200 mm par an à Gênes (Italie) ou seulement 100 mm par
an à Djerba (Tunisie).
11. Les statistiques disponibles révèlent une hausse des températures
de près de 2°C depuis 1970 dans la région sud-ouest de l’Europe
(Espagne et sud de la France). En Afrique du Nord, les températures
sont aussi en hausse, mais on ne dispose pas de données exhaustives
pour quantifier ce changement. Les précipitations ont chuté de 20 %
dans plusieurs régions d’Europe du Sud.
12. Les scientifiques prévoient une hausse de la température de
l’air de 2,2 à 5,1°C en Europe du Sud d’ici à la fin du XXIe siècle
par rapport à la fin du XXe siècle, en
plus d’une chute brutale des précipitations (jusqu’à 27 %) et de
changements dans la répartition des précipitations, qui risquent
d’accroître la fréquence des épisodes de sécheresse et une élévation
possible du niveau des eaux de 35 cm, selon une étude du Plan d’action
pour la Méditerranée du Programme des Nations Unies pour l’environnement
de 2009.
13. Le changement climatique en Méditerranée aura des répercussions
sur les ressources en eau en raison d’une plus forte évaporation
et d’une baisse des précipitations. L’eau va donc devenir un enjeu
majeur, que ce soit d’ordre politique ou économique, dans la région
méditerranéenne. Le changement climatique influera également sur
la biodiversité en raison de la prolifération de certaines espèces,
de l’extinction d’espèces vulnérables au changement climatique et
de l’apparition de nouvelles espèces. Le réchauffement des eaux profondes,
les inondations à répétition des basses terres côtières et l’accélération
de l’érosion des falaises et des plages modifieront inéluctablement
les habitats naturels. Les sols ne seront pas épargnés par la désertification
accélérée. En outre, l’on assiste à une accélération de la déforestation,
à la suite de la multiplication des feux des forêts et à une présence
accrue de parasites.
14. Les effets du changement climatique se feront ainsi sentir
sur l’agriculture, la pêche, le tourisme, la santé publique, les
infrastructures et les zones côtières, entraînant ainsi des répercussions
importantes sur la vie économique et politique.
3. Croissance démographique,
activité humaine et environnement
15. Le littoral méditerranéen s’étend sur 46 000 km et
parcourt 22 pays. Plus de 400 millions de personnes réparties dans
ces 22 pays vivent dans le Bassin méditerranéen, dont 143 millions
sur la côte. La région attire chaque année environ 175 millions
de visiteurs. La population des pays méditerranéens devrait atteindre
520 à 570 millions d’habitants d’ici à 2030. Il apparaît donc indispensable
de préserver l’environnement de la Méditerranée pour assurer le
bien-être de toutes ces personnes.
16. La diversité géopolitique, culturelle, religieuse, sociale
et économique dans le Bassin méditerranéen est aussi source d’instabilité
politique, de tensions et de conflits, latents ou ouverts, ce qui
nuit souvent à la coopération, avec des conséquences importantes
sur l’environnement.
17. La Méditerranée est une région de déséquilibres économiques
majeurs. Selon les indicateurs de développement, le revenu moyen
(PIB) par habitant dans les pays du sud et de l’est de la Méditerranée
est environ 4,5 fois plus faible que le revenu moyen dans les sept
pays de l’Union européenne
, ce qui représente plus
de 74 % du PIB méditerranéen. Les taux de croissance du PIB dans
les pays du Sud et de l’Est sont beaucoup plus élevés que ceux enregistrés
pour les pays méditerranéens de l’Union européenne, mais jugés faibles
par rapport à la croissance démographique, qui demeure très élevée.
18. La démographie galopante sur le littoral sud et est de la
Méditerranée constitue une menace pour un développement économique
durable de ces pays et est annonciatrice de flux migratoires pour
des populations à la recherche d’emplois et d’une vie meilleure
ailleurs. Dans les années 1950, deux tiers de la population du Bassin
méditerranéen vivaient sur le littoral nord, de l’Espagne à la Grèce,
et le tiers restant sur le littoral est et sud, de la Turquie au
Maroc. En raison des tendances démographiques divergentes du littoral
nord et du littoral sud, ces deux zones ont atteint des niveaux
comparables et, d’ici à 2025, il est prévu que le rapport s’inverse –
un tiers de la population vivra dans la partie européenne de la
Méditerranée et deux tiers vivront dans les parties africaine et
asiatique avec un pourcentage élevé de jeunes, qui ne fera qu’aggraver
les problèmes de chômage et augmenter les pressions migratoires.
Tout porte à croire que d’ici à 2025, 45 % de la population aura
moins de 15 ans dans les parties sud et est contre 24 % au nord.
En outre, la rapide croissance démographique de la région se produit
au détriment d’un équilibre environnemental essentiel au bien-être
des êtres humains et risque ainsi d’exacerber les disparités socio-économiques.
19. A tout cela s’ajoute le tourisme, qui ne fait qu’amplifier
davantage les pressions démographiques: quelque 175 millions de
touristes se rendent dans la région chaque année, et ce chiffre
devrait passer de 230 à 300 millions de visiteurs par an dans les
vingt prochaines années. La croissance démographique, l’urbanisation
et l’industrialisation extensives, la croissance du tourisme, la
pêche et les pratiques agricoles intensives augmentent les pressions
sur les ressources naturelles (eau, sol, écosystèmes marin et terrestre
et diversité biologique). Toutes les activités humaines menacent
la viabilité de l’écosystème méditerranéen et dégradent l’environnement.
3.1. Agriculture
20. Les pratiques agricoles traditionnelles en Méditerranée
(aridoculture) dépendent essentiellement des précipitations, donc
des ressources naturelles. Les céréales, légumes et agrumes comptent
pour 85 % dans la production agricole méditerranéenne. A l’inverse,
les accroissements de productivité sont plus élevés dans les zones
irriguées, dont la surface a doublé en quarante ans, pour dépasser
26 millions ha en 2005, ce qui représente 20 % des terres cultivées.
Alors que la production totale a fait des progrès spectaculaires
ces quarante dernières années, les facteurs sociaux, environnementaux
et climatiques sont venus compromettre la durabilité des modèles
de production intensive axés sur l’exportation.
21. Les pratiques agricoles tendent à évoluer dans la région méditerranéenne
vers la spécialisation (monoculture) et la production intensive
basée sur l’utilisation d’engrais et de pesticides pour optimiser
la production.
22. La plupart des pays méditerranéens perdent des terres arables
depuis plus de vingt ans. Dans le cas de pays comme l’Egypte, par
exemple, le gain de terres sur le désert «masque» la perte d’anciennes
terres arables due à la progression rapide de l’urbanisation, de
la désertification et de la salinisation.
3.2. Pêche
23. L’abondance et la répartition du poisson et d’autres
ressources marines vivantes (crustacés, mollusques, oursins, coraux)
varient nettement selon la profondeur. La majeure partie de la production biologique
se concentre néanmoins sur le plateau continental, qui s’étend de
la côte jusqu’à une profondeur de 250 m et constitue l’habitat privilégié
d’espèces ayant une valeur marchande et économique. L’étroitesse relative
du plateau limite le potentiel de pêche.
24. Les stocks de poisson ont baissé à des niveaux alarmants et,
selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture,
un grand nombre de pêcheries est menacé. Cela résulte notamment
d’une pêche irresponsable et quasi incontrôlée, comme en témoigne
la chute de 25 % des captures qui a fait suite à l’insuffisance
de régénération et de reproduction de certaines espèces.
25. L’aquaculture s’est également développée depuis les années
1990, en particulier l’élevage de poissons de mer, comme le bar
ou la dorade, et l’«engraissage» du thon, sans que l’on ait étudié
au préalable son impact sur l’environnement.
3.3. Croissance urbaine
26. La concentration de la population sur le littoral
est responsable de constructions diverses qui modifient le front
de mer. Si le littoral est source d’emploi dans les secteurs industriel,
touristique et commercial, l’exode rural et la migration interurbaine
créent aussi des besoins importants en matière de logement et entraînent
une croissance rapide des villes côtières. Sur le pourtour méditerranéen,
deux habitants sur trois vivent aujourd’hui en zone urbaine. Dans
les pays du sud et de l’est de la Méditerranée, la croissance démographique
accélère le rythme de la croissance urbaine, qui concerne plus de
150 millions de citadins. De plus, l’urbanisation est souvent liée
à un système de logement «informel» dynamique, avec des conditions
difficiles d’accès à l’eau, aux installations sanitaires et à d’autres
services urbains de base.
27. Le déversement des eaux usées des villes côtières est l’une
des grandes sources de pollution de la côte méditerranéenne. Ses
répercussions sur l’environnement côtier marin affectent directement
ou indirectement la santé des êtres humains, la stabilité de l’écosystème
marin et l’économie de la zone côtière par son impact sur le tourisme
et la pêche. Il est fréquent que les citadins ne soient pas tous
reliés au système d’égouts, d’où le rejet direct d’eaux usées non
traitées dans la mer.
28. Dans bon nombre de pays méditerranéens, les déchets solides
sont évacués dans des décharges avec peu ou pas de traitement préalable.
Ces décharges sauvages se situent souvent aux abords des villes
ou littéralement sur le front de mer. Dans de nombreux cas, aucune
mesure n’est prise pour contrôler et traiter les jus de décharge
(lixiviats), qui polluent les eaux souterraines et l’environnement
marin côtier aux polluants organiques et aux métaux lourds.
29. Les détritus marins que l’on retrouve dans la mer et sur le
littoral proviennent essentiellement des centres urbains côtiers.
Ces déchets sont générés par l’élimination directe des déchets domestiques
et des infrastructures touristiques, des rejets des décharges, des
rivières et du trafic maritime.
30. L’expansion incontrôlée des villes méditerranéennes associée
à l’utilisation excessive de terrains, aux pressions sur les ressources
hydriques, à la pollution des aquifères, à l’insuffisance de traitement
des déchets et à la dégradation des sites du patrimoine culturel
entraîne un effet cumulatif sur l’environnement et la santé publique.
L’urbanisme stratégique et les investissements dans les infrastructures
seront un défi majeur pour l’avenir.
3.4. Tourisme
31. Le tourisme est une activité économique vitale sur
tout le pourtour méditerranéen: la région attire en effet 30 % de
la totalité du tourisme international. Source d’emploi, générateur
de devises et facteur contribuant largement au développement économique
national, le tourisme nécessite cependant, pour être durable, une répartition
plus équitable des richesses qu’il produit et des investissements
stratégiques visant à réduire au minimum ses conséquences sur l’environnement.
32. La concentration spatiale et saisonnière des activités du
tourisme amplifie fortement leur impact sur l’environnement, exerce
des pressions sur les ressources hydriques et sur les environnements
naturels (constructions sur le littoral) et augmente la production
de déchets. Le transport lié au tourisme a aussi des répercussions
majeures sur l’environnement, en particulier la croissance rapide
du transport aérien (jusqu’à 40 %) et routier (52 %); les déplacements
ferroviaires et maritimes demeurent extrêmement faibles en comparaison.
Le développement du tourisme maritime pousse cependant à la construction
de ports et de marinas, qui nécessitent de vastes surfaces et constituent
une menace pour les habitats naturels, notamment dans les zones
spéciales de conservation de la nature.
33. Le tourisme durable nécessite une diversification de l’offre
tout au long de l’année par le développement de l’écotourisme et
du tourisme culturel, urbain et rural, en vue d’optimiser le potentiel
touristique méditerranéen en dehors de la saison estivale et de
réduire au minimum ses impacts sur l’environnement.
34. Il serait souhaitable qu’un système de taxes touristiques
soit généralisé sur le pourtour méditerranéen, dont le montant serait
bénéfique à tous les pays à vocation touristique.
3.5. Trafic maritime
35. Les voies maritimes les plus fréquentées se trouvent
en Méditerranée. On estime que quelque 220 000 navires marchands
de plus de 10 tonnes traversent la Méditerranée chaque année, soit
environ un tiers du commerce maritime mondial. Ces navires transportent
souvent des cargaisons dangereuses dont la perte peut causer de
graves dommages environnementaux.
36. Les accidents laissent la plupart du temps une marque indélébile
sur l’environnement naturel. En outre, chaque année environ 370
millions de tonnes de pétrole sont transportés en Méditerranée (soit
20 % du total mondial) et les déversements accidentels de pétrole
sont fréquents, ce qui peut entraîner à tout moment une marée noire
en Méditerranée. Même si des conventions internationales, en particulier
la Convention internationale pour la prévention de la pollution
par les navires, interdisent certains types de déversements en mer,
le manque d’infrastructures portuaires pour recevoir les déchets
produits en mer reste une source de préoccupation.
37. Il s’avère aujourd’hui nécessaire que la coopération et l’intégration
dans le domaine de la surveillance maritime soient intensifiées,
pour réduire au minimum les risques de pollution par les hydrocarbures.
38. Dans ce sens, il conviendrait de définir le champ de la responsabilité
pénale en cas d’infraction au détriment de l’environnement et d’imposer
de lourdes sanctions pénales aux pollueurs.
3.6. Production industrielle
et commerce international
39. Les améliorations environnementales quantitatives
des processus de production industrielle sont rattrapées par une
forte croissance de la demande due à un volume plus important de
consommation et du commerce international. Cela entraîne une augmentation
des flux de matières premières, d’énergie et de produits. En région
méditerranéenne, les volumes d’échanges commerciaux sont amplifiés.
Cette tendance devrait se poursuivre avec la mise en place progressive
de la zone de libre-échange euro-méditerranéenne. La croissance
correspondante dans les transports et les flux commerciaux aura
inévitablement comme effets secondaires une consommation accrue
et une diminution des ressources.
3.7. Consommation d’énergie
40. Avec ses 400 millions d’habitants, le Bassin méditerranéen
représente 10,2 % de la consommation d’énergie mondiale et 8,2 %
de la consommation d’énergie primaire, largement dominée par les
combustibles fossiles (80 % contre seulement 6 % pour les énergies
renouvelables) et responsable de 8 % des émissions mondiales de
gaz à effet de serre en 2006.
41. La région méditerranéenne détient 5 % des réserves mondiales
de pétrole et de gaz, dont 98 % se trouvent dans quatre pays du
Sud. Les réserves les plus importantes de pétrole sont en Libye,
avec 5 400 Mt; l’Algérie en détient 1 545 Mt, l’Egypte, 524 Mt,
et la Syrie, 400 Mt. Avec les niveaux actuels de production, la durée
de vie de ces réserves est d’environ trente ans pour le pétrole
et de cinquante ans pour le gaz. Ces quatre pays disposent d’une
infrastructure adaptée à la production de pétrole et de gaz et à
l’exportation d’hydrocarbures, principalement vers l’Europe.
42. Les réserves de charbon, concentrées en Grèce et en Turquie,
sont d’environ 9 milliards de tonnes pour l’ensemble de la région.
43. Pour ce qui est des énergies renouvelables, la Méditerranée
bénéficie d’un fort potentiel sous-exploité, en particulier solaire
et éolien. La part du bouquet d’énergies renouvelables reste modeste,
avec seulement 6 % de la fourniture d’énergie primaire.
4. Les initiatives
menées au niveau international
44. Au fil des ans, la dégradation de l’environnement
en Méditerranée a sensibilisé de plus en plus le public, qui a attiré
l’attention des politiciens en leur demandant de prendre des mesures
visant à assurer la stabilité et la durabilité socio-économiques
de la région.
4.1. Coopération politique
45. Dans les années 1990, l’Union européenne a commencé
à concevoir activement une politique conjointe structurée pour la
région méditerranéenne avec le lancement d’un partenariat euro-méditerranéen
connu sous le nom de «processus de Barcelone» (et par la suite sous
l’abréviation PAM). Son but était d’encourager la paix et la stabilité
dans la région par l’établissement d’un dialogue politique basé
sur le respect de valeurs partagées, telles que la démocratie et
l’Etat de droit. Ce partenariat était axé sur trois domaines d’activité:
un dialogue lié à la politique et à la sécurité; un partenariat
économique et financier; et l’établissement progressif d’une zone
de libre-échange et d’un partenariat social, culturel et humain
visant à favoriser la compréhension mutuelle et les contacts entre
les organisations de la société civile. En 2003, à la veille de
son élargissement, l’Union européenne a mis au point une politique
européenne de voisinage incluant les pays méditerranéens et d’Europe
de l’Est.
46. Malheureusement, les résultats du processus de Barcelone et
de la politique européenne de voisinage n’ont pas répondu aux attentes.
En 2008, sous la présidence française de l’Union européenne, M.
Sarkozy a lancé l’initiative de mettre en place l’Union pour la
Méditerranée, composée des 27 Etats membres de l’Union européenne
et de 16 pays partenaires du sud et de l’est de la Méditerranée,
dans le but de donner un nouveau souffle au partenariat euro-méditerranéen.
Tout en conservant l’acquis du processus de Barcelone, l’Union pour
la Méditerranée vise à offrir une gouvernance plus équilibrée et
une meilleure visibilité à ses citoyens, ainsi qu’un engagement
à réaliser des projets concrets régionaux et transnationaux. Six
projets prioritaires ont été définis, à savoir la dépollution de
la mer Méditerranée, la création d’autoroutes maritimes et terrestres,
le lancement d’initiatives de protection civile destinées à lutter
contre les catastrophes d’origine naturelle et humaine, le développement
des énergies alternatives par l’élaboration d’un plan solaire méditerranéen,
l’accès aux sources de financement pour les petites et moyennes
entreprises et la création d’une université euro-méditerranéenne.
47. Toutefois, malgré l’ambition affichée, les résultats concrets
de l’activité de l’Union pour la Méditerranée se font encore attendre.
48. La diplomatie parlementaire revêt une importance particulière
dans le Bassin méditerranéen. L’Assemblée parlementaire a collaboré
avec l’Assemblée parlementaire de la Méditerranée, depuis la création de
cette dernière en 2006, sur toute une série de sujets méditerranéens
présentant un intérêt commun pour les deux assemblées, comme la
protection de l’environnement, la gestion des catastrophes et le
rôle des collectivités territoriales. En effet, 15 Etats membres
du Conseil de l’Europe sont aussi membres de l’Assemblée parlementaire
de la Méditerranée.
49. Il existe aussi une autre institution parlementaire qui met
l’accent sur la coopération dans le Bassin méditerranéen: l’Assemblée
parlementaire euro-méditerranéenne, où les 27 pays de l’Union européenne
sont représentés. Cependant, au sein de cette assemblée, les 16
Etats de l’Est et du Sud se voient accorder seulement un tiers des
voix – tandis qu’au sein de l’Assemblée parlementaire de la Méditerranée,
qui comprend les Etats riverains de la Méditerranée (nord et sud),
l’équilibre Nord-Sud respecte le principe d’égalité.
50. Il convient de souligner également l’importance de la coopération
internationale au niveau local, sur des sujets précis et avec un
potentiel bien plus élevé d’arriver à des résultats concrets avec
des effets bénéfiques rapides sur l’environnement. Un exemple, à
cet égard, est l’accord entre la France, l’Italie et Monaco relatif
à la protection de l’environnement marin et côtier d’une zone de
la mer Méditerranée, signé en 1976 à Monaco.
4.2. La Convention de
Barcelone et ses protocoles
51. La Convention pour la protection de la mer Méditerranée
a été signée à Barcelone en février 1976. Depuis son entrée en vigueur
en 1978, elle a donné lieu à une série de protocoles. En 1995, elle
a été revue en grande partie, pour être mise en harmonie avec les
principes de la Déclaration de Rio et de la Convention des Nations
Unies sur le droit de la mer. De la même manière, la plupart des
protocoles ont subi des changements majeurs. Le système juridique
actuel de Barcelone comprend les instruments suivants:
- la Convention sur la protection
du milieu marin et du littoral de la Méditerranée (en vigueur depuis
2004);
- le Protocole relatif à la prévention et à l’élimination
de la pollution de la mer Méditerranée par les opérations d’immersion
effectuées par les navires et aéronefs ou d’incinération en mer
(le Protocole «Immersions»), amendé en 1995 (amendements pas encore
en vigueur);
- le Protocole relatif à la coopération en matière de prévention
de la pollution par les navires et, en cas de situation critique,
de lutte contre la pollution de la mer Méditerranée (le Protocole
«Prévention et situations critiques») (en vigueur depuis 2004);
- le Protocole relatif à la protection de la mer Méditerranée
contre la pollution provenant de sources et activités terrestres
situées à terre (le Protocole «Tellurique») (entré en vigueur en
2008);
- le Protocole relatif aux aires spécialement protégées
et à la diversité biologique en Méditerranée (le Protocole «ASP
et diversité biologique») (en vigueur depuis 1999);
- le Protocole relatif à la protection de la mer Méditerranée
contre la pollution résultant de l’exploration et de l’exploitation
du plateau continental, du fond de la mer et de son sous-sol (le
Protocole «Offshore») (adopté en 1994, pas encore en vigueur);
- le Protocole relatif à la prévention de la pollution de
la mer Méditerranée par les mouvements transfrontières de déchets
dangereux et leur élimination (le Protocole «Déchets dangereux»)
(en vigueur depuis 2008);
- le Protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières
de la Méditerranée (le Protocole «GISC») (adopté en 2008, pas encore
en vigueur).
52. La plupart des pays ont ratifié la Convention de Barcelone,
preuve de leur bonne volonté de progresser dans ce sens. Malheureusement
aucune action concrète n’a vu le jour et l’on estime que la convention
n’a pas rempli ses objectifs.
4.3. Les travaux menés
par le Conseil de l’Europe
53. Le Conseil de l’Europe est la seule organisation
internationale rassemblant tous les acteurs du Bassin méditerranéen.
Il dispose de plusieurs mécanismes dans le domaine du développement
durable, qui pourraient être ouverts à la coopération avec les pays
méditerranéens du Sud et de l’Est, à savoir:
- la Convention relative à la conservation de la vie sauvage
et du milieu naturel de l’Europe (STE no 104 («Convention
de Berne»), ratifiée par le Maroc et par la Tunisie. Elle a pour
objet d’assurer la conservation de la flore et de la faune sauvages
et de leurs habitats naturels et de promouvoir la coopération européenne
dans ce domaine;
- la Stratégie paneuropéenne pour la diversité biologique
et paysagère, mise en place en 1995 à la suite du Sommet de la Terre
de Rio et de l’adoption de la Convention des Nations Unies sur la
diversité biologique. Approuvée par 54 pays d’Europe, d’Europe orientale
et d’Asie centrale, elle complète les travaux entrepris dans le
cadre de la Convention de Berne. Son principal objectif est de trouver
une réponse cohérente au déclin de la diversité biologique et paysagère
en Europe et d’intégrer la conservation et la durabilité de la biodiversité
dans les activités d’autres secteurs tels que l’agriculture, la
sylviculture, la pêche, l’industrie, le transport et le tourisme.
Les activités pourraient encore être plus larges si elles incluaient
la coopération avec les pays du Bassin méditerranéen;
- l’Accord européen et méditerranéen sur les risques majeurs,
créé en 1987, en tant que plate-forme de coopération entre les pays
d’Europe et ceux du sud de la Méditerranée dans le domaine des risques naturels
et technologiques majeurs. Son domaine d’action englobe la connaissance
des aléas, la prévention des risques, la gestion des crises ainsi
que l’analyse postcrise et la réhabilitation. L’accord est «partiel»,
car tous les Etats membres du Conseil de l’Europe n’y ont pas adhéré,
mais il est «ouvert» aux pays non membres et compte aujourd’hui
parmi ses membres à part entière l’Algérie, le Liban et le Maroc;
- la Conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables
de l’aménagement du territoire.
54. Au niveau de l’Assemblée parlementaire, la commission de l’environnement,
de l’agriculture et des questions territoriales envisage d’organiser,
à la suite du 5e Forum mondial de l’eau
d’Istanbul (mars 2009), une conférence visant à faire le point sur
les actions concrètes menées par les Etats en ce qui concerne le
droit à l’accès à l’eau et à préparer les thèmes à mettre en avant
pour le 6e Forum mondial de l’eau, qui
se tiendra à Marseille en 2012.
55. Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux s’efforce également
depuis longtemps de collaborer avec des partenaires des Etats non
membres de la région méditerranéenne afin de promouvoir la démocratie
locale et la bonne gouvernance. Il a aidé les collectivités locales
de plusieurs pays du Maghreb et du Proche-Orient à se doter de structures
plus modernes et plus démocratiques. Le premier de ces pays est
le Maroc, où il a soutenu la création d’une association nationale
des collectivités locales. Il a récemment mis en place un nouveau
groupe de travail des villes et provinces de la région euro-méditerranéenne
pour renforcer la démocratie locale dans ces pays et définir la
stratégie du Congrès dans la région. En 2010, il a commencé à épauler
les autorités marocaines dans la mise en œuvre de l’initiative de
régionalisation lancée par le roi du Maroc.
4.4. Plan d’action pour
la Méditerranée
56. Le Plan d’action pour la Méditerranée (PAM) a été
signé en février 1975 en complément de la Convention de Barcelone.
Il a pour principaux objectifs d’aider les pays méditerranéens à
évaluer et à maîtriser la pollution marine, à formuler des politiques
nationales en matière d’environnement, à améliorer les capacités de
leurs gouvernements à mieux définir les options de rechange pour
les modèles de développement et à procéder à des choix plus rationnels
pour l’affectation de ressources.
57. Bien qu’à l’origine le PAM ait concentré ses efforts sur la
lutte contre la pollution marine, l’expérience a vite confirmé que
les tendances socio-économiques, associées à une planification et
une gestion médiocres du développement, étaient la cause de la plupart
des problèmes environnementaux. C’est pourquoi le PAM est progressivement
passé à une planification et à une gestion intégrée des zones côtières
comme moyen indispensable de recherche de solutions.
58. La Phase II du PAM, aujourd’hui connue sous le nom de «Plan
d’action pour la protection du milieu marin et le développement
durable des régions côtières de la Méditerranée», a été approuvée.
Pour la décennie à venir, le PAM a pour priorités essentielles de
réduire la pollution venant de sources situées à terre, de protéger les
habitats marins et côtiers ainsi que les espèces menacées, de rendre
les activités maritimes plus sûres et plus respectueuses du milieu
marin méditerranéen, d’intensifier la planification intégrée des
zones côtières, de surveiller de façon continue la propagation des
espèces envahissantes, de limiter – et d’intervenir sans tarder lorsqu’elle
se produit – la pollution aux hydrocarbures et d’encourager le développement
durable dans la région méditerranéenne.
4.5. Programme d’assistance
technique pour la protection de l’environnement dans la Méditerranée
59. Le Programme d’assistance technique pour la protection
de l’environnement dans la Méditerranée (METAP) a été créé en 1990
au titre de partenariat entre les pays méditerranéens et les donateurs multilatéraux.
A ce jour, il a attiré des investissements équivalents à 1 milliard
de dollars des Etats-Unis, pour couvrir plus de 35 projets. Les
objectifs du METAP consistent à renforcer la structure institutionnelle
et juridique de la gestion de l’environnement, à formuler des politiques
favorables à l’environnement et à prendre l’initiative de projets
allant dans ce sens. Depuis 1990, le partenariat des donateurs dans
le cadre du METAP s’est élargi pour inclure le Fonds pour l’environnement
mondial (Global Environment Facility) de même que plusieurs programmes
de l’Union européenne (l’Instrument européen de voisinage et de
partenariat; Programme d’actions prioritaires à court et à moyen
termes dans le domaine de l’environnement, I, II et III; LIFE Pays
tiers; et Facilité euro-méditerranéenne d’investissement et de partenariat
de la Banque européenne d’investissement).
4.6. Plans d’action
nationaux pour l’environnement
60. Tous les pays situés au nord de la région méditerranéenne
ainsi que l’Egypte, la Tunisie et la Jordanie ont adopté des plans
d’action nationaux tenant compte des préoccupations environnementales
et socio-économiques, des politiques et des cadres législatifs,
de la gestion et des capacités institutionnelles, et des infrastructures
techniques. A court terme, des ressources financières émanant du
budget public annuel sont affectées aux activités mises en œuvre
dans le cadre de ces plans. Des mécanismes financiers à plus long terme
sont également étudiés, affectés ou développés par des plans d’action
nationaux pour l’environnement en vue d’assurer la continuité des
activités. Des efforts sont déployés pour associer le secteur privé,
à un stade précoce, comme partenaire clé dans l’élaboration des
actions proposées.
4.7. Etablissement de
rapports sur l’état de l’environnement
61. Sous la coordination du Centre régional d’activité
du Programme des Nations Unies pour l’environnement, le Plan d’action
pour la Méditerranée établit des rapports bisannuels sur la situation
de l’environnement en Méditerranée, qui décrivent les tendances
majeures en matière de développement durable et/ou non durable.
Ces rapports entendent servir de solide base d’analyse pour les
réunions que tiennent régulièrement les Parties à la Convention
de Barcelone. Les rapports antérieurs font toutefois ressortir un sérieux
manque de données comparables entre les pays de la région Parties
à la Convention.
5. Les problèmes continuent
à peser sur les ressources et sur l’environnement naturel
5.1. Problème des ressources
en eau
62. Dans la région méditerranéenne, 180 millions d’habitants
ont accès à moins de 1 000 m³ d’eau par an (par habitant) et 80
millions de personnes sont confrontées à une insuffisance de ressources
hydriques, avec moins de 500 m³ par an (par habitant). La demande
en eau a doublé au cours des cinquante dernières années (280 km³
par an en 2007), principalement en raison des besoins agricoles
(64 %). Les pertes, les fuites et le gaspillage de l’eau représenteraient
40 % de la consommation totale en eau, en particulier dans le secteur
de l’agriculture.
63. Bien que les pays commencent à déployer des efforts pour limiter
et réduire ces pertes, les tensions qui pèsent sur les ressources
hydriques demeurent importantes, en particulier en Egypte, à Malte,
en Syrie, en Libye et en Israël. Pour répondre à une demande interne
croissante, les pays surexploitent de plus en plus une partie des
ressources non renouvelables (16 km³ par an).
64. Compte tenu des déficits hydriques, il faut désormais redoubler
d’efforts en matière de gestion de l’eau pour réduire les pertes
et utiliser des méthodes d’approvisionnement non conventionnelles
telles que la réutilisation des eaux usées, la désalinisation et
d’autres innovations techniques pour accroître le potentiel exploitable
des ressources hydriques.
5.2. Ecosystèmes marins
65. Zone sensible de diversité biologique, la Méditerranée
abrite 9 % des espèces marines connues, dont 19 % menacées à la
fois à l’échelon local et mondial. L’emblématique phoque moine méditerranéen
figure parmi les espèces fortement menacées d’extinction, tout comme
certaines espèces de poissons cartilagineux et de requins. 63 %
des poissons et 60 % des mammifères cités dans le Protocole relatif
aux aires spécialement protégées et à la diversité biologique sont
en danger compte tenu des pressions accrues d’activités humaines
(notamment de construction) et de la disparition des lagons et des
prairies sous-marins, de l’érosion côtière, de la surexploitation
des ressources marines par la pêche et de l’introduction d’espèces invasives.
5.3. Ecosystèmes terrestres
naturels
66. Les écosystèmes terrestres naturels de la région
méditerranéenne sont composés de zones forestières et de pâturages.
L’usage traditionnel du bois et des pâturages, composante historique
des économies locales et régionales, disparaît progressivement au
nord, mais demeure essentiel au sud. Ces zones sont désormais plus
largement reconnues comme des biens publics, puisqu’elles protègent
les sols et préservent les ressources hydriques, contribuent à la
lutte contre l’érosion et la désertification, font office de puits
de carbone qui absorbent les gaz à effet de serre et aident à maintenir
la diversité biologique de la faune et de la flore.
67. Malgré cela, les forêts et les zones de pâturage sont exposées
à des risques accrus d’incendies dévastateurs. La fréquence des
incendies augmente au nord de la Méditerranée (600 000 ha en 2007).
Au sud et à l’est, elle demeure limitée mais les recrudescences
sont plus fréquentes (61 000 ha au sud et 80 000 ha à l’est en 2007).
La disparition progressive de la pratique de la pâture, la végétation
excessive et l’augmentation de la durée et de la gravité des épisodes
de sécheresse due au changement climatique multiplient les risques
d’incendies.
5.4. Zones côtières
68. Les zones côtières sont l’atout le plus attrayant
de la Méditerranée, la vitrine d’un patrimoine naturel, culturel
et économique de longue date. Le littoral méditerranéen, qui s’étend
sur environ 46 000 km, compte près de 19 000 km de littoral insulaire.
Rocheux à 54 % et sédimentaire à 46 %, il se compose d’écosystèmes importants
et fragiles tels que des plages, des dunes, des récifs, des lagons,
des marais, des estuaires et des deltas.
69. Ces zones subissent les pressions de plus en plus fortes de
la pollution terrestre, du développement urbain, de la pêche, de
l’aquaculture, du tourisme, de l’extraction des matières premières,
de la pollution maritime et des invasions biologiques marines. Plus
de 40 % de la surface côtière en Méditerranée est aujourd’hui couverte
de constructions, en raison de la rapide croissance démographique
et d’un étalement linéaire des villes et des infrastructures le
long de la côte. De nouvelles constructions et altérations des écosystèmes
côtiers porteraient atteinte à la résistance future du littoral.
6. Conclusions
70. De nos jours, on constate peu de solidarité du Nord
vers le Sud, bien que le Nord soit responsable d’un grand nombre
de projets ayant eu des répercussions environnementales sur le Sud,
comme, par exemple, l’intensification du tourisme dans la région
méditerranéenne ou l’exploitation agricole intensive des terres
sur le pourtour méditerranéen au bénéfice des marchés du Nord.
71. L’une des priorités actuelles de la gestion de l’environnement
dans la région méditerranéenne doit être le renforcement de la législation
nationale et internationale en la matière. Outre la mise en œuvre
et l’application de la législation existante, il est urgent d’appliquer
une approche intégrée axée sur les écosystèmes pour la protection
de l’environnement méditerranéen et de faire face à la pollution
liée au développement urbain, à l’agriculture et aux activités industrielles,
de lutter contre l’exploitation non durable de la pêche et de l’aquaculture
pour soulager les pressions dans les zones côtières, d’adopter des
stratégies de transport plus durables, de réduire la consommation
énergétique et de développer les énergies renouvelables. Ce processus
exige une forte volonté politique, des ressources financières, des
capacités institutionnelles, le transfert des technologies et la
transmission du savoir-faire.
72. Les 15 Etats membres du Conseil de l’Europe qui font partie
des 22 Etats riverains sont directement concernés par l’enjeu de
la sauvegarde de l’environnement en Méditerranée. Sans avoir de
statut formel dans le cadre du processus de Barcelone, le Conseil
de l’Europe et son Assemblée parlementaire ont fait d’importants
efforts à un niveau bilatéral pour établir un partenariat et une
coopération concrète avec les pays du sud et de l’est de la Méditerranée.
73. Dans un contexte politique plus vaste, la paix et la stabilité
dans la région méditerranéenne ne peuvent être assurées à long terme
que sur la base de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat
de droit, comme l’a montré le processus d’intégration européenne
en Europe centrale et orientale. Le Conseil de l’Europe a par conséquent
mis son savoir au service de la Méditerranée – région géopolitique
qui pose le plus de problèmes pour l’application même des principes
et valeurs du Conseil de l’Europe.