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Avis | Doc. 12736 | 03 octobre 2011

La demande de statut de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire présentée par le Conseil national palestinien

Commission sur l'égalité des chances pour les femmes et les hommes

Corapporteur : Mme Carina HÄGG, Suède, SOC

Corapporteur : Mme Carina HÄGG, Suède, SOC

Origine - Renvoi en commission: décision du Bureau, Renvoi 3729 du 24 janvier 2011. Commission saisie du rapport: commission des questions politiques. Voir Doc. 12711. Avis approuvé par la commission le 3 octobre 2011. 2011 - Quatrième partie de session

A. Conclusions de la commission

(open)
1. La commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes partage la conclusion de la commission des questions politiques selon laquelle le Conseil national palestinien devrait obtenir le statut de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire.
2. Elle est aussi d’avis que l’obtention d’un tel statut peut encourager l’avancée de la démocratie, de l’Etat de droit et du respect des droits de l’homme dans les territoires sous l’autorité de l’Autorité nationale palestinienne (ANP).
3. La commission apprécie l’intégration d’une perspective de genre dans le rapport et le projet de résolution, en particulier au paragraphe 12.5. Ce paragraphe fait référence à l’égalité des chances, la non-discrimination, et l’égalité entre les femmes et les hommes en général, comme étant des questions d’une importance cruciale pour renforcer la démocratie, l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans les territoires palestiniens.
4. La polygamie constituant une violation des droits humains, la commission estime qu’elle devrait être mentionnée au paragraphe 12.5 du projet de résolution parmi les formes de discrimination auxquelles il faut mettre un terme dans la loi et dans la pratique, si nécessaire par une révision de la législation. Des considérations similaires s’appliquent à l’absence d’égalité dans le droit de la famille, en particulier eu égard à la position discriminatoire des femmes dans le mariage et le divorce.

B. Proposition d’amendement au projet de résolution

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Amendement A (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, paragraphe 12.5, remplacer les mots «les mariages interreligieux» par les mots:

«le mariage, le divorce, la polygamie».

C. Exposé des motifs par Mme Hägg, rapporteure pour avis

(open)

1. Egalité entre les femmes et les hommes et droits des femmes par rapport au statut de partenaire pour la démocratie

1. L’égalité entre les femmes et les hommes est une pièce maîtresse de la procédure d’obtention du statut de partenaire pour la démocratie.
2. La demande de statut doit contenir une référence explicite à la volonté du parlement candidat d’adhérer aux valeurs du Conseil de l’Europe que sont la démocratie pluraliste et paritaire, l’Etat de droit et le respect des droits humains et des libertés fondamentales. Elle doit aussi comprendre un engagement à encourager la participation équilibrée des femmes et des hommes dans la vie publique et politique 
			(1) 
			Article 60.2
du Règlement de l’Assemblée..
3. La délégation parlementaire bénéficiant du statut de partenaire pour la démocratie doit aussi, dans la mesure où le nombre de ses membres le permet, être composée de façon à assurer une représentation équitable des partis ou groupes politiques existant dans ce parlement, et à comprendre un pourcentage de membres du sexe sous-représenté au moins égal à celui que compte le parlement, et en tout état de cause, un représentant de chaque sexe 
			(2) 
			Article 60.4 du Règlement
de l’Assemblée..
4. En ma qualité de rapporteure de la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, je rends compte dans le présent avis de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les territoires sous l'autorité de l’Autorité nationale palestinienne, en mettant en évidence les progrès accomplis et les problèmes à résoudre.

2. Représentation des femmes en politique

2.1. Au niveau parlementaire

5. Les femmes représentent 7,5 % du Conseil national palestinien (56 membres sur 744). Grâce à un système de quotas, la proportion est plus élevée (environ 13 % et 17 membres sur 132) dans le Conseil législatif palestinien, qui fait partie du Conseil national palestinien. La loi sur les élections législatives (loi no 9 de 2005) a introduit un système de quotas: les partis politiques doivent compter au moins une femme sur les trois premiers candidats de la liste, au moins une femme sur les quatre candidats suivants, et une femme tous les cinq noms pour le reste de la liste.
6. Aucune des 14 commissions parlementaires du Conseil national palestinien ne traite spécifiquement des droits des femmes et de l’égalité des sexes. Ceux-ci s’inscrivent dans le cadre du mandat de la commission des questions sociales.

2.2. Au niveau du gouvernement

7. Après l’établissement de l’Autorité nationale palestinienne en 1994, de nombreuses équipes de négociation ont été officiellement transformées en ministères. La Commission technique des questions féminines a présenté une proposition visant à créer un ministère de la Condition féminine, mais la proposition n’a pas été acceptée à l’époque.
8. Une unité pour l’égalité des sexes a été établie en 1996 pour coordonner le travail des différentes équipes pour l’égalité des sexes présentes au sein des différents ministères. Le ministère de la Condition féminine a été créé en 2003, après presque une décennie de mobilisation de la part de la Commission technique des questions féminines. Ses principaux objectifs consistent à réduire les inégalités entre les sexes et à améliorer la condition féminine, notamment en créant une nouvelle législation ou en modifiant la législation existante. Compte tenu du contexte politique très instable, la mission de ce ministère est particulièrement difficile.
9. A l’heure actuelle, cinq femmes occupent un poste de ministre d’Etat. Leurs portefeuilles sont l’éducation, la culture, la condition féminine, le tourisme, et les affaires sociales.

2.3. Au niveau local

10. En vertu de la loi no 10 de 2005 sur l’élection des conseils municipaux, toutes les listes doivent inclure une femme parmi les cinq premiers candidats et une autre femme dans les cinq candidats suivants. La loi stipule aussi qu’au moins deux femmes sont présentes dans chaque conseil municipal comptant un maximum de 13 membres, et trois femmes dans les conseils comportant 15 membres. Entre 2004 et 2005, les dernières élections de représentants au niveau local se sont déroulées en quatre étapes (chacune couvrant un ensemble de localités). La proportion des femmes élues a varié entre 17 % et 21 %, en partie par la voie du processus électoral normal et en partie par la voie des quotas réservés. Il apparaît clairement que les quotas ont contribué à renforcer la représentation des femmes au niveau local. Dans une ville, Ramallah, une femme a été élue présidente de la municipalité.
11. Selon une étude sur les femmes membres de conseils municipaux en Cisjordanie, la plupart d’entre elles (60 %) ont déclaré que leurs motivations pour se présenter aux élections étaient liées à leur volonté de défendre les droits des femmes, tandis que 26,7 % étaient motivées par un intérêt dans la politique en général 
			(3) 
			Ministère
de la Condition féminine, 2009..

2.4. Dans les partis politiques

12. Les femmes représentent 25 % du Congrès général du Fatah, 0 % de son comité central (en 2009), 33 % de son conseil révolutionnaire, et 11 % de son conseil élargi. Au Front populaire, les femmes composent 10 % du comité central général, 20 % du comité sous-central, 11 % de la direction des sections et 10,2 % du congrès des sections. Au Front démocratique, les femmes représentent 19,5 % du comité central de la Cisjordanie et 16,5 % dans la bande de Gaza; 18 % de la Direction centrale de la Cisjordanie et 13 % dans la bande de Gaza; 17 % des membres des comités de section en Cisjordanie et 9 % dans la bande de Gaza; et 6 % du bureau politique. Dans l’Union démocratique palestinienne (FIDA), les femmes représentent 30 % du bureau exécutif et 19 % du comité central. Les femmes composent aussi 20 % du comité central du Front palestinien de lutte populaire, et en moyenne 25 % de toutes les structures du Front arabe palestinien. Aucune statistique n’est disponible sur la proportion de femmes dans les partis islamistes 
			(4) 
			Ministère de la Condition féminine, Cross-Sectoral National
Gender Strategy Booklet: Promoting Gender Equality and Equity 2011-2013..

3. Egalité entre les femmes et les hommes en droit

3.1. Déclaration d’indépendance et Loi fondamentale

13. Le droit public dans les territoires palestiniens repose sur la Loi fondamentale de 2002, considérée comme une Constitution temporaire, qui devra être remplacée par le dernier projet de Constitution lors de l’établissement d’un Etat palestinien.
14. L’article 9 de la Loi fondamentale consacre le principe d’égalité, en stipulant que les Palestiniens sont égaux devant la loi et la justice, sans discrimination fondée sur l’appartenance ethnique, le sexe, la couleur de peau, la religion, les opinions politiques ou le handicap. La Déclaration d’indépendance de 1989 proclame également le principe d’égalité entre les hommes et les femmes, et évoque un partenariat entre les hommes et les femmes dans la poursuite du développement. Le texte rend un «hommage spécial au courage des femmes palestiniennes», et proclame que la gouvernance du futur Etat palestinien «sera fondée sur les principes de justice sociale, d’égalité et de non-discrimination dans les droits publics pour les hommes ou les femmes».

3.2. Droit privé et pénal

15. Le cadre juridique des territoires palestiniens est fragmenté et complexe, car un éventail de systèmes juridiques coexistent. En vertu des Accords d’Oslo de 1993, l’Autorité nationale palestinienne a des pouvoirs exécutifs et législatifs, mais ils sont limités et incomplets. La législation édictée par l’ANP coexiste ainsi avec celle d’Israël dans les territoires, parallèlement au droit égyptien dans la bande de Gaza et au droit jordanien en Cisjordanie. Certaines règles héritées des anciens gouvernants britanniques et ottomans sont également en vigueur.
16. Si les lois égyptiennes et jordaniennes ont connu un processus de réformes qui les a rendues plus progressistes s’agissant de la condition des femmes, les lois appliquées dans les territoires palestiniens n’ont pas évolué. En outre, tandis que les tribunaux civils statuent sur les affaires civiles et pénales conformément à ces systèmes, les questions afférentes au statut personnel et au droit de la famille sont jugées par les tribunaux de la charia qui appliquent le droit islamique.
17. La fragmentation du système juridique porte atteinte à l’Etat de droit et à la condition des femmes, car elle fait obstacle à leur accès à la justice. Cela rend plus difficile pour les défenseurs des droits des femmes de canaliser leurs efforts de sensibilisation.

3.3. Législation sur la nationalité

18. A l’heure actuelle, il n’y pas de code de la nationalité palestinienne. Les droits de nationalité sont régis par les Codes de la nationalité jordanien et égyptien, respectivement appliqués en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Les deux codes sont discriminatoires, puisque les femmes palestiniennes ne peuvent pas transmettre leur nationalité à leur mari ou à leurs enfants et, en principe, elles perdent leur nationalité si elles épousent un non-Palestinien.

3.4. Droit de la famille

19. Le droit de la famille contient des normes et des principes discriminatoires à l’égard des femmes. Pour se marier, une femme doit avoir la permission d’un tuteur masculin ou wali. Aux termes du droit jordanien et égyptien, les femmes ont le droit de garder leur nom de jeune fille après le mariage et peuvent choisir d’adopter le nom de leur mari ou pas. Or, dans la pratique, le nom des femmes est automatiquement changé sur le passeport palestinien au mariage.
20. Il existe une discrimination flagrante eu égard à la réglementation relative au divorce. Pendant qu’un homme peut divorcer unilatéralement et verbalement (en répétant trois fois la formule «Je divorce de toi»), les femmes doivent recourir à l’appareil judiciaire. Des différences résident également dans le droit de garde des enfants, car une femme divorcée conserve normalement la garde de ses enfants uniquement jusqu’à ce qu’ils aient 10 ans (pour les garçons) ou 12 ans (pour les filles). Elle perd également son droit de garde si elle se remarie. Pendant le mariage, seul le père est considéré comme le tuteur légal des enfants du couple.
21. La polygamie est légale dans les territoires palestiniens sous les formes autorisées par le droit islamique (un homme musulman peut prendre jusqu’à quatre épouses), à l’exception de Jérusalem-Est où le droit israélien l’interdit. Si moins de 4 % d’hommes avaient plusieurs femmes en Cisjordanie et dans la bande de Gaza en 1997 
			(5) 
			Bureau
central palestinien des statistiques., il n’en demeure pas moins que la polygamie n’est pas conforme aux droits humains.
22. Les femmes subissent une discrimination dans le droit successoral, car les parts sont calculées en fonction de règles détaillées du droit islamique, appliquées à la fois aux musulmans et aux chrétiens. Les parts des femmes sont généralement plus réduites que celles des hommes. Une fille, par exemple, hérite de la moitié de ce dont hérite un fils.
23. La réforme du droit de la famille constitue l’un des enjeux essentiels pour améliorer la condition de la femme dans les territoires. La Stratégie nationale intersectorielle pour l’égalité des sexes lancée par le ministère de la Condition féminine, avec l’appui d’ONU Femmes pour la période 2011-2013, s’est fixé comme objectif stratégique numéro un de permettre aux femmes de jouir de droits familiaux et civils garantissant l’égalité et l’équité. L’un des buts de cette stratégie est de prendre toutes les mesures juridiques, législatives et opérationnelles pour affirmer le principe d’égalité et d’équité entre les femmes et les hommes en matière de statut personnel et de droits civils.

3.5. Droit du travail

24. Ce domaine juridique est régi par la législation récemment promulguée par l’Autorité nationale palestinienne, la loi no 7. En 2000, cette loi est venue remplacer en Cisjordanie la loi jordanienne sur le travail de 1960, et dans la bande de Gaza la loi égyptienne sur le travail de 1964. Ce nouvel instrument est plus moderne, plus conforme aux normes édictées par l’Organisation arabe du travail (OAT) et l’Organisation internationale du travail (OIT). La loi no 7 interdit toute discrimination fondée sur le sexe et comporte plusieurs dispositions qui protègent les travailleuses avant et après la grossesse. Ces dispositions instituent le droit au congé maternité, l’interdiction de licenciement pour motif de grossesse, et le droit d’exiger des horaires de travail flexibles pour pouvoir allaiter. Les femmes jouissent également de la plénitude des droits en matière de salaires, de rémunérations, de pensions et d’indemnités de fin de service.

3.6. Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW)

25. Le 8 mars 2009, l’Autorité nationale palestinienne a ratifié de manière unilatérale la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW). Bien qu’aucune obligation juridique ne l’oblige à rédiger un rapport périodique au comité de la CEDAW, cette ratification représente un symbole important de son engagement politique à appliquer les dispositions du texte.

4. La condition de la femme dans la société

26. L’écart se resserre entre les femmes et les hommes en matière d’éducation. Dans l’enseignement primaire, des progrès ont été accomplis, et les inscriptions de jeunes filles dans l’enseignement secondaire et tertiaire dépassent celles des garçons. Le nombre de filles qui poursuivent un enseignement professionnel est plus élevé que jamais, puisqu’elles ont représenté 27 % de tous les élèves des écoles professionnelles en 2002, contre 18 % en 1997 
			(6) 
			Banque
mondiale, «West Bank and Gaza Education
Sector Analysis: Impressive Achievements under Harsh Conditions
and the Way Forward to Consolidate a Quality Education System»
(2006)..
27. Dans les territoires administrés par l’Autorité nationale palestinienne, le taux d’analphabétisme était de 9,5 % chez les femmes et de 2,4 % chez les hommes en 2007. Les taux d’analphabétisme les plus élevés ont été enregistrés chez les personnes de 45 ans et plus (50 % des femmes analphabètes et 25 % des hommes).

4.1. Femmes actives et marché du travail

28. Bien qu’elles représentent la majorité des étudiants sur les bancs de l’université, les femmes sont sous-représentées sur le marché du travail des territoires palestiniens. Le taux de féminisation de l’emploi n’était que de 15,1 % en 2009, tandis que le taux de chômage féminin atteignait 23,8 % 
			(7) 
			«Droits
humains des femmes et égalité hommes-femmes dans le Territoire palestinien
occupé», Programme Euromed égalité hommes-femmes, <a href='www.euromedgenderequality.org'>www.euromedgenderequality.org</a>..
29. Les enquêtes sur la population active ne rendent pas bien compte de la nature des emplois féminins: de nombreuses femmes travaillent dans le secteur informel; d’autres pratiquent une activité qu’elles ne considèrent pas elles-mêmes comme un travail, notamment la production de vivres et d’autres produits, la vente ou l’échange de coupons alimentaires, et le volontariat pour des organisations caritatives.
30. Etant donné le fort taux de chômage chez les hommes, et l’impact de la situation politique et des conditions de sécurité sur l’économie, un nombre croissant de femmes deviennent le soutien de la famille. Plusieurs associations ont aussi été créées pour promouvoir l’entrepreneuriat des femmes, parfois par l’octroi de crédits et des aides financières 
			(8) 
			Voir,
par exemple, l’Association des femmes d’affaires palestiniennes, <a href='www.asala-pal.com'>www.asala-pal.com/</a>..

4.2. Les femmes dans l’administration publique

31. En août 2008, la part des femmes dans la magistrature et le barreau était de 13,2 % (21 sur 159). En 2009, deux juges femmes supplémentaires ont été nommées, élevant le pourcentage des femmes à 16 %. En 2008, sur les 39 juges exerçant dans la bande de Gaza, cinq seulement étaient des femmes (12,8 %). Mais ce pourcentage a décliné depuis. En Cisjordanie, cependant, 18 juges sur 120 étaient des femmes en 2008 (15 %) et le pourcentage s’est élevé depuis, pour atteindre 16,6 % en 2009.
32. En septembre 2009, il y avait cinq femmes ambassadrices sur les 106 représentants officiels de l’Autorité nationale palestinienne dans le monde 
			(9) 
			Ministère de la Condition féminine,
2009. Les organes diplomatiques sont dénommés ambassades, délégations
ou missions selon la reconnaissance de l’Autorité nationale palestinienne
par le pays d’accueil..

5. Le rôle des femmes dans la réconciliation et la consolidation de la paix

33. Les femmes ont toujours tenu une place importante dans la société palestinienne. Au début du XXe siècle, elles jouaient déjà un rôle dans la lutte nationaliste et contribuaient au bien-être de leur communauté. En 1920, elles ont établi l’Union générale des femmes palestiniennes, destinée à soutenir les femmes dans les territoires occupés et dans la diaspora palestinienne.
34. Le rôle des femmes dans la vie publique a pris un nouvel élan dans les années 1970, à mesure qu’elles s’impliquaient dans la lutte contre l’occupation et prenaient une place déterminante dans la société et l’économie, entre autres choses en créant des coopératives. Dans les années 1980, elles ont aussi participé à la première Intifada.
35. La consolidation de la paix et la cause des femmes sont indissolublement liées dans les territoires palestiniens, car les crises et les conflits touchent les femmes d’une manière disproportionnée.
36. En 1992, lorsque plusieurs équipes techniques ont été formées pour faire aboutir les négociations de paix, la Commission technique des questions féminines a été mise à contribution. Dans le même temps, cette commission entendait participer à l’organisation et à la construction des infrastructures d’un futur Etat palestinien, afin d’intégrer la problématique hommes-femmes dans tous les travaux préparatoires destinés à soutenir le processus de paix, et à fonder des institutions d’Etat en conformité avec le principe d’égalité de tous les Palestiniens, indépendamment du sexe, de la religion ou de l’appartenance ethnique, comme cela est énoncé dans la Déclaration d’indépendance.
37. Les femmes sont particulièrement impliquées dans la consolidation de la paix, y compris au niveau des organisations non gouvernementales, parfois même au-delà des frontières qui séparent les parties en conflit. Pour citer un excellent exemple, deux femmes, Naomi Chazan etSumaya Farhat-Naser, ont pris l’initiative de créer un partenariat entre des organisations de femmes palestiniennes et israéliennes durant la première Intifada. Ce partenariat spécial est baptisé «Le Lien de Jérusalem» 
			(10) 
			<a href='www.batshalom.org/jlink_about.php'>www.batshalom.org/jlink_about.php</a>.. Les deux organisations partenaires conduisent des initiatives séparées pour répondre aux besoins des femmes des deux côtés, mais aussi des projets communs en faveur de la consolidation de la paix.

6. Violence à l’égard des femmes

38. Tandis que les hommes palestiniens subissent des violences liées au conflit, les femmes sont exposées à la violence provenant de sources diverses, notamment le conflit avec Israël, la scission intrapalestinienne et la violence domestique.
39. Une enquête réalisée en 2005 sur la violence domestique a montré que plus de 60 % des femmes avaient subi des violences psychologiques, 23 % avaient été victimes de mauvais traitements et 11 % avaient subi des violences sexuelles 
			(11) 
			Voir note 8..
40. La violence domestique et la violence fondée sur le sexe sont rarement signalées, car les victimes qui tentent d’exercer une action en justice contre leur agresseur, en particulier au sein de leur famille, doivent affronter l’attitude réprobatrice de la société, des intimidations et une mise à l’écart. Les données du Bureau central palestinien des statistiques montrent que seulement 1,2 % des victimes signalent les actes de violence. Les femmes rechignent en général à s’adresser à l’appareil judiciaire, n’étant que marginalement représentées au sein de la magistrature, du barreau et de la police. En outre, l’efficacité et la crédibilité des représentants de la loi au sein de l’Autorité nationale palestinienne sont compromises compte tenu du faible respect de la loi, d’une situation juridique complexe et de la situation politique extrêmement instable. Il en est résulté la résurgence d’une justice informelle fondée sur le droit coutumier, qui discrimine fortement les femmes.
41. Les codes pénaux qui sont actuellement en vigueur dans les territoires ne comprennent aucune disposition spécifique portant sur la violence fondée sur le sexe. L’un des sujets d’inquiétude majeurs est l’existence de règles qui peuvent être considérées comme justifiant les crimes dits «d’honneur», y compris des meurtres. La loi applicable en Cisjordanie comporte des dispositions réduisant la peine pour les agresseurs qui commettent un crime dans un «état de grande fureur», également applicables aux hommes qui tuent leurs parentes dans des circonstances «suspectes». Ces règles s’opposent aux articles 9 et 10 de la Loi fondamentale.
42. La pratique des crimes dits d’honneur n’est pas limitée à la communauté musulmane: sur les 18 victimes identifiées par la Commission indépendante des droits de l’homme (institution nationale de la Palestine chargée de défendre les droits de l’homme) en 2007, plusieurs étaient chrétiennes. «Nous n’avons pas de loi, ni aucun respect pour aucune loi. Nous ne demandons pas seulement un changement du droit et des procédures pénales, mais un changement de tout le système judiciaire», a déclaré en 2005 l’avocate Halima Abu-Sulb du Centre d’aide et de conseil juridiques aux femmes, à Ramallah 
			(12) 
			Rapport
de Human Rights Watch, «A Question of
Security: Violence against Palestinian Women and Girls»,
2006..
43. En 2008, le Conseil des ministres palestiniens a créé un Comité national pour la lutte contre les violences faites aux femmes, dirigé par le ministère de la Condition féminine. Le comité se compose d’un large éventail de membres, notamment des organisations gouvernementales et non gouvernementales représentées par le forum des ONG qui luttent contre les violences faites aux femmes (Al Muntada) et l’Union générale des femmes palestiniennes.
44. Le 11 janvier 2011, le Gouvernement palestinien a approuvé un Plan stratégique national de lutte contre les violences faites aux femmes, qui sera mis en œuvre durant la période 2011-2019. Le plan considère la violence à l’égard des femmes comme étant une question de développement concernant tous les aspects – social, économique et politique – de la société palestinienne. Aux termes de ce plan, la démarche vise à «lutter contre la violence à l’égard des femmes en promouvant le principe de l’Etat de droit fondé sur les droits des femmes, et en améliorant les mécanismes institutionnels de la société palestinienne, afin de protéger et de soutenir les femmes victimes de violences, et de vivre dans une société libérée de toute forme de discrimination et fondée sur l’égalité, la dignité et le respect des droits humains».
45. Le Plan stratégique national est conçu pour compléter la Stratégie nationale intersectorielle pour l’égalité des sexes, dont l’objectif stratégique 3 est de «Réduire toutes les formes de violence à l’égard des femmes palestiniennes». Les mesures ambitieuses mentionnées dans la stratégie englobent: promulguer une loi pour protéger les femmes contre la violence domestique, modifier le Code pénal pour supprimer toute forme de discrimination fondée sur le sexe, modifier la loi afférente aux procédures pénales s’agissant des dispositions sur les poursuites pénales qui font une discrimination entre les femmes et les hommes concernant le dépôt de plaintes. Enfin, adopter toutes les interventions énoncées dans le Plan stratégique national de lutte contre les violences faites aux femmes.

7. La situation des femmes dans la bande de Gaza

46. Depuis la victoire électorale du Hamas en 2007, la détérioration de la situation politique et socio-économique ainsi que de la sécurité dans la bande de Gaza a aussi eu des incidences négatives sur la condition des femmes.
47. Malgré le manque de transparence et les difficultés de communication, les défenseurs des droits des femmes à Gaza se plaignent du fait que le Hamas restreint la liberté de mouvement et la libre expression, ce qui fait directement obstacle à leur travail. Dans le même temps, le Hamas applique des mesures et des réformes qui constituent un retour en arrière flagrant eu égard aux droits des femmes dans tous les domaines. Des travaux ont notamment commencé visant à modifier la loi sur le statut personnel et le Code pénal, qui priveraient les femmes de certains droits fondamentaux.
48. La montée du radicalisme à Gaza contribue à accroître les violations des droits des femmes, y compris les crimes dits d’honneur. Les mutilations génitales féminines sont aussi pratiquées à Gaza, notamment près de la frontière égyptienne, mais il n’y a pas de données précises à cet égard 
			(13) 
			Voir note 8.. D’après une étude publiée par le Women’s Affairs Center (WAC), une organisation de protection des droits des femmes basée a Gaza, 88 % des femmes interviewées ont affirmé que leurs droits à l’héritage ont été niés. En outre, environ les deux tiers d’entre elles ont déclaré qu’elles n’ont pas eu recours à la justice pour faire reconnaître leurs droits 
			(14) 
			The Jerusalem
Post, 3 juillet 2010, <a href='www.jpost.com/MiddleEast/Article.aspx?id=170400'>www.jpost.com/MiddleEast/Article.aspx?id=170400</a>.. La presse a aussi fait état de cas de femmes à qui il a été reproché un «manque de pudeur», d’avocates obligées de porter le voile dans les tribunaux et d’étudiantes forcées à le porter à l’école. Le Hamas a été accusé d’avoir ciblé des activistes des droits des femmes 
			(15) 
			Hannah
Wright, «Listen to the Women of Palestine», <a href='www.Guardian.co.uk'>Guardian.co.uk</a>, 13 août
2009, 
			(15) 
			<a href='www.guardian.co.uk/commentisfree/2009/aug/13/palestinian-women-fatah'>www.guardian.co.uk/commentisfree/2009/aug/13/palestinian-women-fatah</a>. mais, par la suite, sous la pression de la société civile et des médias, a nié son implication dans les incidents.
49. La situation des femmes à Gaza se dégrade également du fait de conditions spécifiquement engendrées par le blocus israélien, qui entrave l’accès de la population aux soins de santé, à l’éducation, à l’emploi et à d’autres services de base.

8. Conclusions de la rapporteure

50. Dans le présent avis, j’ai souligné les problèmes multiples auxquels les femmes doivent faire face dans les territoires administrés par l’Autorité nationale palestinienne. Malgré certaines défaillances constatées dans le cadre législatif, il est clair pour moi que les autorités palestiniennes s’attachent à défendre l’égalité entre les femmes et les hommes et à améliorer la condition des femmes. Par conséquent, je partage l’avis de la commission des questions politiques selon lequel le Conseil national palestinien répond aux exigences posées pour obtenir le statut de partenaire pour la démocratie.
51. Cela étant dit, je souhaiterais souligner que l’obtention de ce statut n’est pas une fin mais le début d’un processus. L’Assemblée parlementaire devrait se tenir prête à offrir ses compétences et ses conseils sur les modifications législatives qui rendraient le cadre juridique applicable dans les territoires palestiniens totalement conforme aux normes en matière de droits de l’homme, y compris concernant l’égalité entre les femmes et les hommes.
52. Dans le même esprit, l’Assemblée devrait encourager les autorités palestiniennes à déployer davantage d’efforts pour veiller à l’application effective des politiques et de la législation existantes visant à protéger les femmes et à prévenir la discrimination fondée sur le sexe, car le fossé entre le droit et la pratique est encore trop grand.
53. Enfin, je souhaiterais que des relations rapprochées entre l’Assemblée et l’Autorité nationale palestinienne aident les parlementaires nationaux à avoir une image plus juste des conditions de vie réelles dans les territoires palestiniens, et des multiples problèmes – qu’ils soient d’ordre pratique, culturel, juridique ou politique – qui empêchent les femmes d’avoir une vie normale et de jouir de leurs droits humains.