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Résolution 1441 (2005)

Les défis du développement dans les îles de l’Europe

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 6 juin 2005 (voir Doc. 10465, rapport de la commission des questions économiques et du développement, rapporteur : M. Hunault).

1. Les îles de l’Europe comptent plus de 14 millions d’habitants, et près de 80 millions si l’on y ajoute les îles qui forment un Etat. Leur taille, leur situation géographique, la distance qui les sépare de la terre ferme, leurs ressources, leurs tendances démographiques, leur niveau d’autonomie et le niveau global de leur développement varient énormément. De par leur position excentrée et souvent assez isolée, les îles et leurs habitants sont confrontés à de nombreux défis en matière de développement – des défis d’autant plus réels que l’on est dans un contexte de concurrence mondiale et qu’il est nécessaire de préserver des identités, traditions et paysages locaux uniques.
2. L’on s’accorde désormais de plus en plus à reconnaître que les îles méritent un traitement à part du fait de contraintes socio-économiques spécifiques en matière de développement, par exemple des ressources et marchés locaux limités, des liaisons de transport souvent précaires et onéreuses avec la terre ferme, des coûts de la vie plus élevés et un environnement naturel vulnérable. L’Union européenne, dont les Etats membres comptent un nombre particulièrement important d’îles, a reconnu la nécessité de mieux relier les régions insulaires au continent, de promouvoir le développement des îles en vue de réduire les disparités entre les régions et de remédier aux «handicaps structurels permanents» dont souffrent les régions insulaires. Elle a mis en place une aide par le biais des projets MEDA en Méditerranée, des fonds structurels et régionaux, de la Politique agricole commune et de programmes pour les territoires les plus éloignés. Toutefois, du fait du récent élargissement de l’Union européenne, l’allocation de l’aide en faveur des îles pourrait changer radicalement.
3. Etant donné que, dans leur grande majorité, les îles de l’Europe dépendent pour leur survie d’un tout petit nombre d’activités économiques, quand ce n’est pas d’une activité unique (structure en «monoactivité») – la pêche, pour l’essentiel au nord du continent, ou le tourisme, en particulier dans les îles méditerranéennes et méridionales –, leur exposition aux fluctuations des marchés mondiaux, et donc leur vulnérabilité, sont particulièrement prononcées. Il devient dès lors vital de diversifier davantage les économies insulaires et d’utiliser de manière rationnelle les ressources locales (tant humaines que naturelles).
4. L’Assemblée parlementaire est persuadée que, dans ce contexte, le développement durable constitue la meilleure stratégie pour l’intégration des îles aux marchés européens et mondiaux, car il permet de préserver un équilibre entre l’efficience économique, l’équité sociale et la conservation de l’environnement.
5. Le tourisme demeure l’un des secteurs économiques principaux dans la plupart des régions insulaires. A condition d’être développé de manière saine pour utiliser au mieux les ressources insulaires limitées, il peut fournir une source stable de revenus aux populations locales. Cela implique cependant de trouver le juste équilibre entre les aspects qualitatif et quantitatif du développement du tourisme. L’Assemblée rappelle donc avec insistance qu’il est important de déterminer et de respecter la «capacité d’accueil» de chaque île en préalable à la mise en œuvre d’un développement équilibré du tourisme sur le long terme. En outre, elle estime que la diversification de l’offre touristique est également impérative pour permettre de mieux répartir les flux de touristes selon les saisons et les sites.
6. Les activités liées à la pêche revêtent une grande importance pour les économies insulaires, car elles assurent notamment des moyens de subsistance et une sécurité alimentaire durables. L’Assemblée rappelle donc qu’elle est préoccupée par la surpêche, qui réduit les stocks, préoccupation qu’elle avait déjà exprimée auparavant dans sa Recommandation 1558 (2002) sur la pêche dans les mers semi-fermées d’Europe et dans sa Résolution 1283 (2002) sur la préservation et la gestion des ressources de la pêche. La demande de poisson augmentant constamment, l’Assemblée invite les Etats membres du Conseil de l’Europe et en particulier leurs régions insulaires à poursuivre le développement de l’aquaculture dans l’esprit de sa Résolution 1208 (1999) sur les défis, les avantages et le développement de l’aquaculture extensive.
7. Pour les raisons évoquées ci-dessus, il est fréquent que les îles de l’Europe aient des besoins d’investissement plus élevés que ceux d’autres régions du continent. A cet égard, l’Assemblée estime que certains domaines d’activité exigent de la part des décideurs politiques et des investisseurs une attention particulière en vue de conforter le développement des îles et d’améliorer la qualité de vie dans les sociétés insulaires. Il convient notamment :
de diversifier les possibilités d’emploi en développant le secteur des services (notamment pour ce qui est d’un tourisme de qualité, par exemple le tourisme culturel et le tourisme vert, ainsi que le téléenseignement et le télétravail) ;
de mettre en place un soutien spécial pour la création et la croissance des petites et moyennes entreprises, en leur donnant davantage accès aux facilités de microcrédits et à des services de conseil commercial ;
d’établir, ou de renforcer le cas échéant, des stratégies intégrées d’aménagement du territoire qui favorisent le respect des principes essentiels de protection de l’environnement dans toutes les activités économiques et l’aménagement urbain. En effet, bon nombre d’îles bénéficient d’un cadre naturel sans équivalent constituant un élément central de leur identité autant qu’un avantage concurrentiel clé ;
de mettre en place des systèmes innovants de gestion de l’eau, de l’énergie et des déchets, grâce à des projets pilotes et en recourant davantage aux sources d’énergies renouvelables et au recyclage des déchets ;
d’améliorer les liaisons de transport avec le continent et entre les îles elles-mêmes (par une sécurité accrue et des moyens de transport multimodaux), de moderniser les ports et de mettre davantage l’accent sur les transports en commun dans les îles ;
de recourir à des mesures de soutien spéciales, y compris en matière de fiscalité, pour stimuler l’investissement et faire en sorte que les îles soient habitées ;
d’utiliser plus largement les fonds structurels et de cohésion de l’Union européenne pour renforcer l’investissement dans les infrastructures.
8. Alors que l’Union européenne élargie s’engage actuellement dans une révision de l’ampleur de ses fonds structurels et de cohésion, et des critères d’attribution des aides qu’ils véhiculent, l’Assemblée l’invite à étudier la possibilité d’établir une politique communautaire intégrée pour les régions insulaires et à instaurer une facilité de financement spéciale ou un fonds spécifique pour stimuler l’investissement dans les régions insulaires en ce qui concerne les domaines d’activité prioritaires énumérés plus haut, afin de compenser les désavantages compétitifs dont souffrent les îles et d’améliorer leurs perspectives pour un développement plus harmonieux. L’Assemblée invite aussi les Etats membres du Conseil de l’Europe qui comptent des régions insulaires sur leur territoire à soutenir les propositions formulées dans les paragraphes 5 à 8 de la présente résolution et à élaborer des plans d’action nationaux pour la mise en œuvre de ces propositions.