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Recommandation 1730 (2005)

La gestion privée des biens culturels

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 25 novembre 2005 (voir Doc. 10731, rapport de la commission de la culture, de la science et de l’éducation, rapporteur : Baroness Hooper).

1. Le Conseil de l’Europe a fait œuvre de pionnier dans la conservation du patrimoine culturel européen. Parallèlement à l’UNESCO, il a élaboré un système d’instruments énonçant des normes internationalement reconnues en la matière. Celles-ci comprennent les notions de responsabilité commune, que ce soit celle de l’Europe ou celle de l’humanité, ainsi que de responsabilité de l’Etat.
2. Le Conseil de l’Europe a également cherché à instaurer des partenariats entre les secteurs public et privé pour la protection et l’utilisation durable du patrimoine, par exemple en alertant l’industrie du tourisme, les sociétés de conservation et les propriétaires privés.
3. Si beaucoup de biens culturels (meubles et immeubles) appartiennent à l’Etat, une proportion considérable de ces biens est la propriété de particuliers, de fiducies, d’associations, de fondations, d’églises et autres organisations non gouvernementales, ou de sociétés commerciales.
4. Des initiatives ont été prises récemment en vue de privatiser le patrimoine culturel pour alléger la charge que cette responsabilité fait peser sur l’Etat. Cette tendance a été l’une des caractéristiques majeures du changement de régime en Europe centrale et orientale. Elle a également été mise en lumière par une proposition, présentée en 2002 par le Gouvernement italien, relative à une législation qui devait permettre la vente de biens culturels appartenant à l’Etat.
5. Un autre moyen, peut-être plus intéressant, de décharger en partie l’Etat du fardeau de la conservation a été l’introduction d’une gestion privée du patrimoine culturel. Il y aurait lieu d’évaluer des exemples de cette pratique et d’établir des lignes directrices.
6. Tout en reconnaissant les avantages potentiels de la privatisation et de la gestion privée, l’Assemblée parlementaire est très désireuse de faire en sorte que les démarches précitées n’aient pas pour résultat de diminuer la protection du patrimoine, de dégager l’Etat de sa responsabilité en la matière ou de réduire l’accès aux biens culturels.
7. En particulier, l’Assemblée aimerait signaler les dangers inhérents à la cession de terrains dont le contenu archéologique n’est pas connu, à la mise sur le marché libre, sans en garantir la traçabilité, d’objets sur lesquels les recherches n’ont pas été complètes ou à l’absence d’assurance de responsabilité aux fins de protection et d’entretien.
8. La privatisation comporte, en outre, le risque d’affaiblir la résistance de l’aménagement aux intérêts commerciaux, d’ignorer des valeurs culturelles (par exemple le contexte archéologique) ou d’empêcher la détermination de techniques de conservation appropriées.
9. Des problèmes spécifiques se posent dans les cas de dotation insuffisante pour la conservation du patrimoine, par exemple quand des châteaux sont privatisés sans la propriété foncière garantissant leur viabilité économique, ou lors du retour de biens religieux à des églises qui ne réunissent pas suffisamment de fidèles désireux d’en assurer la conservation.
10. En termes de politique générale, l’Assemblée estime qu’un partenariat dûment équilibré entre les intérêts publics et privés serait préférable à un contrôle exclusif de l’un ou l’autre secteur.
11. En conséquence, l’Assemblée demande au Comité des Ministres :
11.1. de procéder à une étude comparative des responsabilités impliquées par la propriété (publique et privée) du patrimoine culturel (meuble et immeuble) ;
11.2. d’examiner les modèles – établis ou plus récemment apparus – de gestion privée du patrimoine culturel et d’élaborer des lignes directrices sur les meilleures pratiques de partenariat entre les secteurs public et privé ;
11.3. d’encourager les Etats membres du Conseil de l’Europe à faire en sorte que les propriétaires et les gestionnaires privés de biens culturels soient effectivement responsables (directement ou par le biais d’assurances) des biens dont ils ont la charge.