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Recommandation 1851 (2008)

Les métiers artisanaux et le savoir-faire de la conservation du patrimoine culturel

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 28 novembre 2008 (voir Doc. 11761, rapport de la commission de la culture, de la science et de l’éducation, rapporteur: Baroness Hooper). Voir également la Résolution 1638 (2008).

1. La conservation du patrimoine culturel dépend d’un large éventail de savoir-faire. Celui-ci va des techniques de base employées dans la construction classique et contemporaine à l’analyse scientifique, en passant par la gestion de projets. Il convient d’identifier la diversité de ce savoir-faire, de former le personnel compétent et d’organiser toute une équipe pour l’amener à travailler ensemble à la conception et à l’exécution de projets de conservation.
2. Le succès de ces projets de conservation dépend essentiellement d’un soutien en termes de crédits et de manifestations d’intérêt. Cette garantie s’impose à tous les stades, y compris lors du suivi et de la mise en oeuvre d’un entretien approprié.
3. Le savoir-faire en matière de conservation peut être hautement spécialisé et les matériaux – tels que la pierre provenant de certaines carrières, le bois séché, le chaume ou l’ardoise – difficiles à se procurer. La coopération intraeuropéenne a beaucoup à apporter en ce qui concerne l’expérience, les matériaux et la mise en commun des connaissances et du savoir-faire.
4. La conservation a été menacée par la disparition de main-d’oeuvre spécialisée et de savoir-faire quant à l’usage de matériaux traditionnels comme la chaux. Il faut donc se féliciter de la reconnaissance croissante de la valeur des métiers manuels. L’intégration des aspects manuels et intellectuels de la conservation est à encourager dans tous les cours de formation.
5. Conformément à la Recommandation 1621 (2003) sur la promotion de l’histoire de l’art en Europe, l’Assemblée parlementaire estime que les architectes et les promoteurs doivent être au courant des techniques, du savoir-faire et des matériaux traditionnels, et en tenir compte dans les projets de restauration.
6. Cette entreprise devrait être passionnante et attirer des personnes plus jeunes, plus dynamiques (avec une plus grande attention à l’équilibre des sexes), mais aussi mobiliser l’expérience et l’intérêt des générations plus anciennes. Cette entreprise s’inscrit dans le processus vivant de conservation et d’appréciation grâce auquel notre patrimoine peut survivre valablement. Elle vaut pour le patrimoine bâti (édifices et ponts), les jardins et les paysages, pour le patrimoine mobilier que représentent les peintures, les sculptures, les instruments de musique et les livres, ainsi que pour le patrimoine mobile constitué par les véhicules terrestres, bateaux et aéronefs.
7. L’Assemblée souligne l’importance que les projets de conservation peuvent avoir pour les métiers, l’industrie et l’économie sur les plans local et régional.
8. La durabilité et l’efficacité énergétique doivent être ajoutées aux facteurs qui entrent en ligne de compte dans la conservation. Les règlements en matière de sécurité et de risque incendie prêtent davantage à controverse, par exemple en ce qui concerne l’obligation de ménager des issues de secours et un accès pour personnes handicapées aux bâtiments historiques ou de régler la hauteur des ponts des voiliers traditionnels. Des séminaires pourraient s’avérer utiles dans ces domaines.
9. L’Assemblée est heureuse d’avoir été associée à la création, en 1977 à Venise, d’un Centre européen de formation d’artisans pour la conservation du patrimoine architectural et elle a suivi avec intérêt, puis inquiétude, et maintenant avec un regain d’enthousiasme l’évolution de ce projet pilote. Elle demande au Comité des Ministres d’accorder la reconnaissance du Conseil de l’Europe au nouveau Centre européen pour les métiers du patrimoine, établi à Thiene (Italie), et de favoriser d’autres initiatives internationales, telles que le centre de formation à la réhabilitation du patrimoine architectural d’Avignon (France), le centre de formation aux métiers du patrimoine de Görlitz (Allemagne) ou le centre international de conservation du patrimoine bâti de Bontida (Roumanie).
10. L’Assemblée a également pris part à la création, en 1987, de la Fondation européenne pour les métiers du patrimoine, dont le but est de comprendre tous ces métiers. L’Assemblée demande au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe de veiller à ce que soit clarifié le statut juridique de l’institution en question pour permettre à celle-ci de viser à développer un réseau européen de métiers du patrimoine et lui fournir des informations pratiques et visibles en complément des bases de données du Conseil de l’Europe, connues sous les noms de HEREIN et Compendium, qui ont trait aux politiques culturelles des Etats membres.
11. L’Assemblée voudrait donner aux artisans et autres professionnels des informations leur permettant d’évaluer les mérites de certains produits et matériaux, et de percer les arcanes des anciennes guildes. La coopération entre secteur public et secteur privé s’impose pour que la conservation se fasse dans le respect des meilleures normes possibles, et il faut que le marché s’ouvre. Le secteur privé, y compris les propriétaires désireux de gérer leur bien ou d’y travailler eux-mêmes, ne doit pas être exclu de ce partenariat. Le Comité des Ministres devrait encourager un débat ouvert et informé sur les principes et la pratique de la conservation, ainsi que sur les techniques et produits de cette dernière, et la manière de les évaluer.
12. L’Assemblée tient aussi à voir se poursuivre l’action concertée entre le gouvernement et les secteurs privé et bénévole dans le développement des compétences et des connaissances spécialisées que nécessite la conservation du patrimoine, y compris pour son entretien et son maniement. Elle se félicite de la création, en 1992, de l’Association européenne des entreprises de restauration du patrimoine architectural (AEERPA), mais voudrait que l’on fasse participer bien davantage les entreprises de restauration responsables et que l’on promeuve, en particulier, leur création et leur développement en Europe centrale et orientale.
13. Enfin, l’Assemblée recommande que le Comité des Ministres entreprenne une étude du savoir-faire disponible sur le plan national pour ce qui est de la conservation, en coopération avec l’Union européenne, le Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels (ICCROM) et d’autres institutions spécialisées ou organismes professionnels, de même qu’avec des ONG, en vue d’élaborer une stratégie européenne de gestion concertée de la conservation du patrimoine à laquelle prennent part des artisans, des architectes et des promoteurs, et incluant la reconnaissance des qualifications professionnelles.