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Recommandation 1892 (2009) Version finale

Contribution du Conseil de l’Europe au développement de l’espace européen de l’enseignement supérieur

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 20 novembre 2009 (voir Doc. 11977, rapport de la commission de la culture, de la science et de l’éducation, rapporteur: M. McIntosh).

1. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe souligne l’importance d’une dimension européenne dans l’enseignement supérieur qui à la fois favorisera la compréhension entre les peuples européens et permettra d’obtenir, sur le plan éducatif, de meilleurs résultats, répondant mieux aux exigences de notre époque. Dans un monde où le savoir est globalisé et interdépendant, les ressources en hommes instruits sont un facteur essentiel de prospérité et de stabilité sociale, économique et démocratique. Les Etats doivent investir dans les personnes et leur éducation, particulièrement en période de crise économique.
2. La Convention culturelle européenne de 1954 (STE no 18), la Convention de 1997 sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE no 165, ci-après dénommée Convention de reconnaissance de Lisbonne) et le droit fondamental à l’instruction énoncé à l’article 2 du Protocole à la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 9) ont fixé le cadre juridique d’une dimension européenne de l’enseignement supérieur et constituent la base du processus de Bologne.
3. Rappelant sa Recommandation 1620 (2003) sur la contribution du Conseil de l’Europe à l’espace de l’enseignement supérieur, l’Assemblée estime que le lancement officiel de l’espace européen de l’enseignement supérieur en 2010 exige un soutien accru des Etats membres, des parlements nationaux, des établissements d’enseignement supérieur et des étudiants. En outre, elle appelle le Conseil de l’Europe à s’engager plus activement dans l’instauration, à travers l’Europe, de l’espace européen de l’enseignement supérieur d’ici à 2020.
4. Rappelant sa Recommandation 1762 (2006) sur la liberté académique et l’autonomie des universités, l’Assemblée réaffirme sa recommandation adressée au Comité des Ministres selon laquelle ces principes devraient être reconnus comme des libertés fondamentales dans toute l’Europe, parallèlement et au même titre que le droit fondamental à l’éducation. Depuis des siècles, la liberté académique et l’autonomie des universités ont été des éléments décisifs dans la création des universités en Europe et l’admission des étudiants venant de l’étranger.
5. L’Assemblée souligne le pouvoir des législateurs nationaux de fixer les normes de l’enseignement supérieur conformément aux traditions, circonstances et exigences nationales. La création de l’espace européen de l’enseignement supérieur suppose la reconnaissance et le soutien explicites et durables des parlements, et pas seulement des gouvernements de la majorité et de leurs équipes administratives toujours susceptibles d’être remaniés.
6. L’Assemblée se félicite des progrès réalisés au cours de la dernière décennie par les Etats participant au processus de Bologne dans la définition de politiques communes en matière d’enseignement supérieur européen. Tous ces Etats, à l’exception du Saint-Siège, sont membres du Conseil de l’Europe et signataires des conventions susmentionnées, hormis la Grèce qui n’a pas encore signé la Convention de reconnaissance de Lisbonne.
7. Le processus de Bologne deviendra l’espace européen de l’enseignement supérieur en 2010. L’Assemblée soutient fermement cette transformation qui constitue un objectif politique de la plus haute importance pour tous les Etats et les personnes de l’espace européen de l’enseignement supérieur. Il nécessite la consolidation des résultats obtenus dans toute l’Europe. Les Etats non membres de l’Union européenne ne doivent pas être oubliés. L’évaluation de la qualité, la reconnaissance mutuelle des diplômes et autres qualifications donnant accès aux institutions d’enseignement supérieur ainsi que la reconnaissance mutuelle des périodes d’étude suivies et des qualifications obtenues auprès d’établissements d’enseignement supérieur sont des conditions indispensables pour l’instauration de l’espace européen de l’enseignement supérieur.
8. L’Assemblée apprécie les initiatives bénévoles des ministères passés et actuels d’offrir les services d’un secrétariat au processus de Bologne. Elle note avec inquiétude que ces structures de secrétariat dépendent de la disponibilité et des ressources de ministères spécifiques, dont la mission est avant tout de servir les intérêts nationaux, et qu’ils deviennent propriétaires des archives. Si la structure informelle de Bologne a bien servi la cause de l’Europe durant la décennie de développement, il faudra, pour créer l’espace européen de l’enseignement supérieur, un processus de pilotage réformé qui ne soit plus dirigé par les présidences de l’Union européenne changeant tous les six mois, et un processus d’aide fondé sur l’offre bénévole, par les pays hôtes, des services d’un secrétariat qui changerait tous les deux ans.
9. L’Assemblée salue la participation de la Commission européenne au processus de Bologne et les importantes contributions financières de l’Union européenne, par exemple dans le cadre du programme Erasmus, qui viennent en soutien à l’enseignement supérieur, à la formation professionnelle et à l’apprentissage tout au long de la vie, dans le respect du principe de subsidiarité et des compétences nationales de ses Etats membres.
10. La réalisation de l’espace européen de l’enseignement supérieur dépend des institutions d’enseignement supérieur et des étudiants. Tous deux, les étudiants et les institutions d’enseignement supérieur, doivent devenir les moteurs et s’approprier les normes européennes d’enseignement supérieur. L’Assemblée rappelle à cet égard la conclusion en 2007 de l’Accord partiel élargi sur le sport. Offrant une plate-forme unique aux Etats et aux associations sportives, il vise à promouvoir le sport par la définition de politiques et de normes, le suivi, le renforcement des capacités et l’échange de bonnes pratiques. Cet accord partiel élargi peut servir d’exemple à suivre pour instaurer une coopération efficace entre les Etats et les parties prenantes non gouvernementales dans le domaine de l’enseignement supérieur, et de forum potentiel en soutien de l’espace européen de l’enseignement supérieur.
11. Tous les signataires de la Convention culturelle européenne sont représentés au Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche du Conseil de l’Europe, respectivement par un représentant du gouvernement et un représentant de la communauté universitaire. L’Assemblée salue cette double représentation qui permet aux Etats de débattre entre eux des politiques, normes et actions, de définir des positions communes et d’assurer leur mise en œuvre aux niveaux des institutions et des gouvernements nationaux. Le Secrétariat du Conseil de l’Europe aide de manière neutre et professionnelle l’ensemble des membres du comité directeur qui en dirigent les travaux.
12. La création de l’espace européen de l’enseignement supérieur doit prendre en compte la mondialisation. Il ne s’agit pas de créer une forteresse européenne ou une tour d’ivoire. C’est pourquoi l’Assemblée est d’avis que la coopération internationale en matière d’enseignement supérieur doit être renforcée. La Convention de reconnaissance de Lisbonne, ouverte à l’adhésion des Etats non européens, constitue un fondement juridique adéquat d’une telle coopération élargie. Les signataires non européens de cette convention devraient également être invités à participer en qualité d’observateurs au Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche.
13. L’Assemblée appelle ses parlements membres à contribuer activement à un débat politique ouvert et à analyser leurs exigences et leur législation nationales concernant la création de l’espace européen de l’enseignement supérieur.
14. L’Assemblée invite l’Association européenne des universités, l’Association européenne des institutions d’enseignement supérieur, l’Union des étudiants d’Europe, l’Observatoire de la Magna Charta Universitatum et d’autres parties prenantes non gouvernementales à étudier d’autres possibilités de renforcer leur action pour la création de l’espace européen de l’enseignement supérieur. L’Assemblée accueille favorablement l’organisation d’une réunion avec ces divers acteurs dans le prolongement de cette recommandation.
15. L’Assemblée recommande au Comité des Ministres:
15.1. de lancer en 2010, avec les ministres en charge de l’enseignement supérieur et de la recherche et les institutions d’enseignement supérieur, une campagne européenne dans tous les Etats membres afin de promouvoir le développement de l’espace européen de l’enseignement supérieur d’ici à 2020;
15.2. d’appeler la Grèce à signer et à ratifier la Convention de reconnaissance de Lisbonne, d’appeler la Belgique, l’Italie et l’Espagne à ratifier cette convention sans délai, et d’inviter les Etats non membres intéressés à introduire une demande d’adhésion à cette convention;
15.3. d’analyser la nécessité d’amender la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163) pour garantir les droits sociaux, dont l’accès à l’enseignement supérieur, aux étudiants dans leur propre pays, tout comme aux étudiants poursuivant leurs études à l’étranger, ainsi que les droits sociaux des chercheurs, des enseignants et autres personnels universitaires travaillant à l’étranger;
15.4. d’analyser la nécessité d’amender l’Accord européen sur le maintien du paiement des bourses aux étudiants poursuivant leurs études à l’étranger (STE no 69) ainsi que l’Accord européen sur le régime de la circulation des personnes entre les pays membres du Conseil de l’Europe (STE no 25) pour soutenir le développement de l’espace européen de l’enseignement supérieur;
15.5. d’allouer plus de ressources au secteur de l’enseignement supérieur du Conseil de l’Europe, y compris au Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche, afin de soutenir davantage le processus de Bologne et la création de l’espace européen de l’enseignement supérieur;
15.6. d’analyser la faisabilité d’un accord partiel élargi qui serait ouvert à l’adhésion des Etats, des associations d’établissements d’enseignement supérieur et des organisations étudiantes, et aurait pour objectif de faciliter la définition de normes et de politiques, le suivi, le renforcement des capacités et l’échange de bonnes pratiques concernant l’espace européen de l’enseignement supérieur.
16. L’Assemblée invite les ministres de l’Autriche et de la Hongrie ainsi que de la Roumanie, qui accueilleront les futures conférences ministérielles du processus de Bologne en 2010 et 2012 respectivement:
16.1. à charger le Secrétariat du Conseil de l’Europe de conserver et de mettre à disposition les archives collectives du processus de Bologne et de l’espace européen de l’enseignement supérieur;
16.2. à détacher temporairement des experts nationaux auprès du Secrétariat du Conseil de l’Europe, afin de créer une synergie avec le secrétariat permanent du Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche et d’autres organes;
16.3. à étudier, avec le Comité des Ministres et les représentants des établissements d’enseignement supérieur et des étudiants, la possibilité d’instaurer un secrétariat plus stable de l’espace européen de l’enseignement supérieur au sein du Conseil de l’Europe;
16.4. à discuter et à coordonner leurs travaux avec les autres membres du Comité directeur de l’enseignement supérieur et de la recherche.