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Résolution 1696 (2009) Version finale
Engagement des diasporas européennes: le besoin de réponses gouvernementales et intergouvernementales
1. Les migrations en provenance des
autres continents et de l’Europe de l’Est vers l’Europe de l’Ouest
ont toujours existé et continueront à se développer tant que persisteront
des différences entre les niveaux de vie, les revenus et les situations
politiques. Toutefois, les politiques visant à répondre aux nombreux
défis et à exploiter les nombreuses possibilités offertes par ces
mouvements tardent à suivre les évolutions.
2. Cela fait quinze ans que l’Assemblée parlementaire travaille
sur la question des Européens vivant à l’étranger et de leurs liens
avec leurs pays d’origine. Elle regrette que la question particulière
de l’établissement de liens avec les communautés des diasporas européennes
n’ait pas fait l’objet d’une politique spécifique.
3. L’Europe a toutefois de plus en plus conscience que la mobilité
de la main-d’œuvre, si elle est bien gérée, peut être profitable
à la fois aux pays de destination et aux pays d’origine. La question
de savoir comment gérer au mieux la mobilité, les identités multiples
et la diversité d’une façon qui permette de maximiser l’engagement
des diasporas à la fois dans les pays d’origine et dans les pays
d’accueil, constitue un défi que les gouvernements doivent aujourd’hui
relever.
4. L’Assemblée estime qu’il est essentiel d’établir et de maintenir
un juste équilibre entre le processus d’intégration dans les sociétés
d’accueil et les liens avec le pays d’origine. Elle est convaincue
que, en considérant les migrants non pas uniquement comme des travailleurs
ou des acteurs économiques, mais aussi comme des acteurs politiques,
on sera mieux à même de reconnaître leur capacité à promouvoir et
à diffuser les valeurs démocratiques. Le droit de voter et le droit
de se présenter aux élections dans les pays d’accueil ainsi que
la possibilité de participer aux organisations non gouvernementales
européennes dirigées de manière démocratique permettront aux diasporas
de soutenir l’instauration d’un système de gouvernance démocratique
et responsable dans les pays d’origine. C’est pourquoi il convient
d’encourager les politiques visant à accorder aux migrants les droits
et les obligations en tant que citoyens ou résidents des deux pays.
5. L’Assemblée regrette que, malgré les appels qu’elle lance
depuis de nombreuses années en faveur de la révision des modèles
existants en matière de relations entre les expatriés et leurs pays
d’origine, les relations entre les Etats membres du Conseil de l’Europe
et leurs diasporas soient encore loin d’être harmonisées. De nombreux
Etats membres d’Europe centrale et orientale commencent seulement
à reconnaître le potentiel de développement et les autres avantages
inhérents à un engagement plus institutionnalisé de leurs diasporas,
notamment dans le contexte de l’actuelle crise économique mondiale.
6. L’Assemblée réitère qu’il est dans l’intérêt des Etats membres
de veiller à ce que leurs diasporas continuent d’exercer activement
leurs droits liés à la nationalité et contribuent de diverses manières
au développement politique, économique, social et culturel de leur
pays d’origine. Elle est convaincue que la mondialisation et l’immigration
croissante peuvent avoir de nombreux effets positifs dans les pays
d’accueil en contribuant à la construction de sociétés diversifiées,
tolérantes et pluriculturelles.
7. L’Assemblée reconnaît que les Etats sont investis d’une responsabilité
particulière à l’égard de leurs communautés d’expatriés là où celles-ci
représentent une minorité nationale significative dans un autre
Etat. Toutefois, elle désapprouve toute forme de manipulation politique
des diasporas, notamment en vue de promouvoir des politiques expansionnistes.
L’Assemblée, par exemple, maintient que toute délivrance de passeports
à grande échelle devrait être réglementée par des accords bilatéraux
entre les Etats concernés et être conforme aux principes du droit
international.
8. A la lumière de ce qui précède, l’Assemblée invite les Etats
membres du Conseil de l’Europe à se concentrer sur l’élaboration
de politiques de migration complètes qui considèrent les diasporas
comme des vecteurs de développement, à promouvoir le rôle institutionnel
des diasporas par le biais d’un dialogue et d’une consultation régulière,
et à offrir des incitations politiques aux diasporas ou à ceux d’entre
leurs représentants qui souhaitent participer activement au développement
de leur pays d’origine.
9. En particulier, l’Assemblée encourage les Etats membres, en
tant que pays d’origine, à adopter les incitations stratégiques
suivantes:
9.1. incitations politiques
et civiles:
9.1.1. développer des institutions et élaborer
des politiques en faveur d’une harmonisation maximale des droits
politiques, économiques, sociaux et culturels des diasporas avec
ceux de la population autochtone;
9.1.2. faciliter l’acquisition ou le maintien des droits de vote
en offrant la possibilité de voter à l’étranger pour les élections
nationales;
9.1.3. faire participer les diasporas à l’élaboration des politiques,
notamment pour ce qui a trait aux questions de nationalité et de
citoyenneté, ainsi que pour ce qui concerne les droits politiques,
économiques, sociaux et culturels;
9.1.4. recueillir des informations sur leurs ressortissants expatriés
et leur permettre de disposer de leur propre représentation sur
la scène politique nationale grâce à la création de ministères pour
la représentation de la diaspora;
9.1.5. charger les ambassades et les consulats à l’étranger de
fournir aux diasporas des services spécifiques et des informations
utiles en vue de renforcer la confiance;
9.1.6. promouvoir la création de réseaux et d’associations des
diasporas en élaborant une feuille de route à cette fin, et rechercher
le moyen de faire participer activement les pays d’origine et les
pays d’accueil à ces réseaux;
9.2. encourager les retours:
9.2.1. mettre en place
des politiques visant à encourager les retours permanents ou temporaires
et promouvoir «l’afflux de cerveaux» (brain
gain);
9.2.2. créer toutes les conditions permettant aux diasporas qui
souhaitent retourner dans leurs pays d’origine d’encourager l’adaptation
et de bénéficier pleinement de leurs avantages fiscaux et autres
avantages économiques ainsi que de leurs droits à la retraite;
9.2.3. faciliter la circulation des diasporas (visas d’entrées
multiples, permis de séjour de longue durée, droit d’entrée pour
les diasporas possédant la nationalité du pays d’accueil);
9.3. encourager les transferts de fonds en mettant en place
des législations et des réglementations proactives qui permettent
d’éviter la double imposition et établissent les cadres juridiques
et réglementaires autorisant un usage efficace des envois de fonds
dans divers domaines d’investissement, en liant les envois de fonds
à d’autres services financiers (comptes d’épargne, prêts, assurance
sociale, etc.);
9.4. promouvoir la création d’entreprises par les diasporas
en proposant des incitations transparentes dans les domaines des
douanes et des importations, en facilitant l’accès à des espaces
économiques spéciaux ainsi qu’à des comptes en devises et en les
informant des possibilités d’investissement;
9.5. développer des politiques de reconnaissance effective
des diplômes et autres certificats obtenus hors du pays d’origine.
10. L’Assemblée encourage les Etats membres, en tant que pays
de destination:
10.1. à revoir leurs
politiques de migration en vue d’accorder aux migrants davantage
de droits et d’obligations, en harmonisant autant que faire se peut
les droits des membres des diasporas non citoyens avec ceux des
citoyens des pays d’accueil;
10.2. à envisager la possibilité d’accorder aux travailleurs
migrants le droit de participer et de se présenter aux élections
locales et régionales après avoir résidé dans le pays pendant une
période de cinq ans;
10.3. à adopter un cadre juridique plus souple qui offre aux
migrants en situation régulière la possibilité de circuler librement
entre leurs pays d’origine et d’accueil, tout en conservant le statut
d’immigrés dans le pays de destination;
10.4. à élaborer des politiques permettant aux migrants de participer
au processus de développement dans le pays d’origine; à promouvoir
les programmes de formation et de qualification de la main-d’œuvre,
les transferts de compétences et de savoir-faire, les apports de
capitaux étrangers et la mise en œuvre de projets de développement
bénéficiant d’une aide;
10.5. à faire participer activement les membres des diasporas
à l’élaboration de programmes d’intégration à l’intention des travailleurs
migrants.
11. L’Assemblée encourage la communauté internationale et particulièrement
l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et l’Organisation
internationale du travail (OIT) à continuer de se pencher sur les questions
liées aux diasporas et au développement. Elle invite notamment les
organisations partenaires concernées:
11.1. à clarifier les différentes notions, classifications et
définitions relatives aux diasporas en vue de les harmoniser à l’échelon
européen, en tenant compte du caractère évolutif et dynamique de
la notion de diaspora;
11.2. à faciliter la collaboration entre les organisations de
diasporas, y compris les organisations professionnelles, et d’autres
organisations non gouvernementales européennes travaillant dans
le domaine du développement par le biais d’incitations telles que
la création de fonds de partenariat qui pourraient permettre la
coopération entre les principales organisations de développement
et les diasporas;
11.3. à encourager la collaboration entre les institutions universitaires
et à soutenir les projets de recherche internationaux liés aux diasporas
et aux questions des liens entre migration et développement.