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Résolution 1724 (2010) Version finale

Respect des obligations et engagements du Monténégro

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 28 avril 2010 (15e séance) (voir Doc. 12192, rapport de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi), corapporteurs: MM. Gardetto et Holovaty). Texte adopté par l’Assemblée le 28 avril 2010 (15e séance).

1. Depuis son adhésion au Conseil de l’Europe, en 2007, le Monténégro a fait des progrès substantiels dans la mise en œuvre de ses engagements postadhésion et de ses obligations statutaires. A ce jour, il a signé et ratifié 67 conventions du Conseil de l’Europe, honorant ainsi la plupart, mais non la totalité, de ses engagements formels. Il coopère activement avec le Conseil de l’Europe et sollicite régulièrement l’avis de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) dans le processus d’élaboration de ses lois.
2. L’Assemblée parlementaire renvoie aux rapports de ses commissions ad hoc sur l’observation de l’élection présidentielle de 2008 et des élections parlementaires de 2009, et note avec satisfaction que ces élections ont répondu à la quasi-totalité des normes internationales. Elle note toutefois que d’autres avancées démocratiques sont nécessaires, notamment en ce qui concerne le renforcement de la confiance de l’opinion publique dans le processus électoral, l’élimination du flou qui entoure les structures de l’Etat et des partis, ainsi que l’harmonisation du cadre électoral avec les normes du Conseil de l’Europe.
3. L’Assemblée se félicite des progrès réalisés par le Monténégro dans le processus d’intégration européenne. Elle note que, le 15 décembre 2008, le Monténégro a officiellement posé sa candidature à l’Union européenne. Elle suit de près le processus d’élaboration de l’avis de la Commission européenne sur la candidature du Monténégro et espère que la Commission européenne fera pleinement usage des rapports de l’Assemblée et des organes de suivi du Conseil de l’Europe dans la préparation de cet avis. L’Assemblée félicite en outre le Monténégro des nets progrès accomplis dans le respect des critères fixés par la Commission européenne pour la libéralisation des visas, progrès qui ont abouti à l’introduction, à compter du 19 décembre 2009, d’un régime d’exemption de visa pour le Monténégro.
4. L’Assemblée félicite le Monténégro pour les relations de bon voisinage qu’il a établies et qu’il entretient avec les pays de la région. Le Monténégro est un partenaire fiable et constructif, qui joue un rôle stabilisateur dans la région.
5. S’agissant de la mise en œuvre des engagements postadhésion, l’Assemblée note avec satisfaction que le Monténégro a rempli plusieurs engagements souscrits, qui devaient être mis en œuvre dans un délai de deux ans suivant son adhésion au Conseil de l’Europe. Il a notamment adopté en octobre 2007 une nouvelle Constitution, sur laquelle la Commission de Venise a porté un avis globalement positif. En outre, un certain nombre de lois importantes ont été adoptées pour donner effet aux dispositions constitutionnelles et harmoniser la législation interne avec les normes du Conseil de l’Europe. Cependant, il y a également eu des contretemps et les délais prévus à l’origine pour l’adoption des lois relatives aux engagements postadhésion n’ont pas tous été respectés. De plus, quelques engagements importants n’ont pas encore été honorés et l’application de certaines des lois adoptées doit être suivie de près.
6. Compte tenu de ce qui précède, l’Assemblée invite les autorités monténégrines à maintenir la dynamique de réforme actuelle afin de rattraper leur retard et d’achever la mise en œuvre des engagements postadhésion restants.
7. S’agissant de la signature et de la ratification des conventions du Conseil de l’Europe, l’Assemblée:
7.1. note qu’à ce jour le Monténégro a signé et ratifié 67 conventions du Conseil de l’Europe, remplissant ainsi la quasi-totalité de ses engagements formels postadhésion, tout en déplorant que les délais prévus à l’origine n’aient quelquefois pas été respectés;
7.2. encourage les autorités à mener rapidement à son terme le processus de ratification des conventions suivantes, figurant sur la liste des engagements postadhésion:
7.2.1. la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention des cas d’apatridie en relation avec la succession d’Etats (STCE no 200);
7.2.2. la Convention européenne sur l’exercice des droits des enfants (STE no 160);
7.2.3. le Protocole portant amendement à la Convention européenne pour la répression du terrorisme (STE no 190);
7.2.4. la Convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs (STE no 70);
7.2.5. la Convention européenne relative au dédommagement des victimes d’infractions violentes (STE no 116);
7.2.6. la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (STE no 106);
7.3. en outre, l’Assemblée invite les autorités monténégrines à signer et à ratifier rapidement les conventions suivantes, figurant sur la liste des engagements postadhésion:
7.3.1. la Convention européenne sur la nationalité (STE no 166);
7.3.2. la Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre (STE no 82).
8. S’agissant de la réforme constitutionnelle, l’Assemblée:
8.1. se félicite de l’adoption, le 19 octobre 2007, de la nouvelle Constitution sur laquelle la Commission de Venise a porté un avis globalement positif. Elle note que les sept principes minimaux recommandés dans l’Avis 261 (2007) de l’Assemblée semblent être reflétés dans la Constitution de façon satisfaisante;
8.2. estime que la Constitution respecte les recommandations de l’Assemblée relatives à la réforme constitutionnelle, notamment en ce qui concerne l’applicabilité directe des conventions internationales en droit interne, le droit à un recours effectif, le mandat, la procédure de nomination et la garantie de l’indépendance de l’institution du médiateur, l’application des lois en vigueur dans l’attente de l’adoption d’une nouvelle législation, la définition de l’état d’urgence et ses effets juridiques, ainsi que la définition de l’autonomie locale;
8.3. note toutefois que, de l’avis de la Commission de Venise, la formulation de certaines dispositions de la Constitution, en particulier celles traitant des droits de l’homme et des droits des minorités, pourrait être améliorée et rapprochée des termes de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (STE no 5);
8.4. invite par conséquent les autorités monténégrines à continuer à travailler avec la Commission de Venise pour veiller à ce que les dispositions de la Constitution soient transposées dans la législation ordinaire et appliquées de manière à donner plein effet aux normes de protection des droits de l’homme prévues par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
9. S’agissant des institutions démocratiques et du système juridique interne, l’Assemblée:
9.1. note que, ces deux dernières années, les autorités monténégrines ont adopté un grand nombre de lois dans le but de créer un nouveau système juridique moderne, conforme à la nouvelle Constitution et aux normes du Conseil de l’Europe;
9.2. note avec satisfaction que ce travail législatif a été mené en étroite coopération avec la Commission de Venise, tout en regrettant que les recommandations des experts n’aient pas toutes été prises en considération;
9.3. note que le renforcement des capacités du parlement doit se poursuivre afin que les députés puissent jouer un rôle actif dans le processus législatif et assurer un contrôle parlementaire de l’application des lois adoptées;
9.4. regrette que les autorités monténégrines n’aient toujours pas honoré leur engagement spécifique d’adopter une nouvelle loi relative à l’élection des membres du parlement, et que les dernières élections législatives du 29 mars 2009 se soient déroulées conformément à l’ancienne loi électorale, qui ne satisfait pas aux normes du Conseil de l’Europe;
9.5. se félicite de l’adoption, en juillet 2008, de la loi sur le financement des partis politiques, mais déplore le manque de transparence persistant du financement des partis et des campagnes électorales;
9.6. se félicite de l’adoption, en février 2008, du Plan d’action pour la réforme de l’autonomie locale par la Commission mixte entre le pouvoir central et les collectivités locales, et encourage les autorités à poursuivre la mise en œuvre d’une réforme globale en matière de décentralisation;
9.7. se félicite de la mise en place d’un nouveau système de financement du service public de radiodiffusion, garantissant sa pérennité, son bon fonctionnement et son indépendance;
9.8. l’Assemblée invite, par conséquent, les autorités monténégrines:
9.8.1. à adopter dans les meilleurs délais une nouvelle loi relative à l’élection des membres du parlement, en étroite coopération avec la Commission de Venise;
9.8.2. à modifier la loi sur le financement des partis politiques, compte tenu des recommandations des observateurs électoraux, et à accroître la transparence du financement des partis politiques et des campagnes électorales;
9.8.3. à renforcer les capacités du parlement, notamment en le dotant de moyens et de locaux appropriés, et en ayant recours à l’expertise de l’Assemblée et aux possibilités de financement offertes, en particulier dans le cadre de l’instrument de préadhésion de l’Union européenne;
9.8.4. à renforcer les mécanismes de contrôle parlementaire des activités du gouvernement, notamment en ce qui concerne l’application des lois adoptées par le parlement, et à renforcer l’indépendance financière du parlement;
9.8.5. à poursuivre la réforme d’ensemble de l’autonomie locale, en vue de transférer des responsabilités sectorielles aux municipalités, de renforcer leur assise financière et leurs compétences, et d’améliorer l’éthique publique au niveau local.
10. S’agissant de l’Etat de droit, l’Assemblée:
10.1. se félicite de l’adoption des lois relatives aux tribunaux, au Conseil de la magistrature et au bureau du procureur, rédigées en coopération avec la Commission de Venise;
10.2. se félicite de l’adoption et de la mise en œuvre par les autorités monténégrines de la stratégie et du plan d’action pour la réforme judiciaire, mais déplore le fait que les fonds alloués au fonctionnement de l’appareil judiciaire représentent toujours une part relativement faible du budget de l’Etat;
10.3. se félicite de l’adoption de la loi sur la protection du droit à un procès équitable dans un délai raisonnable, dont la mise en œuvre semble avoir contribué à réduire l’arriéré judiciaire des tribunaux nationaux;
10.4. se félicite de l’adoption du nouveau Code de procédure pénale et du nouveau Code de procédure civile, qui prévoient une possibilité de réexamen ou de réouverture d’une affaire au niveau national à la suite d’un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (la Cour);
10.5. regrette toutefois que les traductions des arrêts de la Cour ne soient pas systématiquement mises à la disposition des juges nationaux et note qu’un système durable de formation initiale et continue sur la jurisprudence de la Cour devrait être mis en place;
10.6. se félicite de la bonne coopération des autorités monténégrines avec le Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) et le Comité d’experts sur l’évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (MONEYVAL) ainsi que des progrès qu’elles accomplissent dans la lutte contre la corruption, le crime organisé et le blanchiment de capitaux, mais note que l’image publique de l’appareil judiciaire et du bureau du procureur pourrait encore être améliorée, notamment en ce qui concerne les risques de corruption;
10.7. l’Assemblée invite, par conséquent, les autorités monténégrines:
10.7.1. à poursuivre la réforme de l’appareil judiciaire et du bureau du procureur en vue de garantir leur pleine indépendance et leur professionnalisme, et d’améliorer ainsi leur image publique;
10.7.2. à continuer à améliorer la situation financière des tribunaux;
10.7.3. à continuer à renforcer les mécanismes actuels de formation initiale et continue des juges à la jurisprudence de la Cour, et à leur fournir systématiquement les traductions des arrêts de cette dernière;
10.7.4. à poursuivre les réformes dans le domaine de la lutte contre la corruption et le blanchiment de capitaux, conformément aux recommandations du GRECO et de MONEYVAL.
11. S’agissant des droits de l’homme, l’Assemblée:
11.1. se félicite des garanties constitutionnelles de l’indépendance de l’institution du médiateur ainsi que des efforts des autorités visant à renforcer la capacité opérationnelle de celle-ci, tout en notant que la loi relative au médiateur pourrait encore être améliorée, conformément à l’avis de la Commission de Venise;
11.2. regrette que les dispositions constitutionnelles sur l’action positive en faveur des minorités n’aient pas encore été transposées dans la législation ordinaire, et que la loi sur les minorités de 2006 contienne une définition des droits des minorités fondée sur la citoyenneté;
11.3. regrette que la loi sur l’interdiction de la discrimination n’ait pas encore été adoptée, tout en notant que des consultations avec la Commission de Venise sont en cours;
11.4. regrette que certains groupes de la société monténégrine, en particulier la communauté lesbienne, gay, bisexuelle et transsexuelle (LGBT), soient souvent victimes de discriminations, d’intimidations et de violences physiques;
11.5. note que le paysage médiatique du Monténégro est varié et actif, tout en déplorant les pressions dont se plaignent des journalistes, celles-ci constituant une entrave à leur liberté d’expression;
11.6. salue les efforts entrepris par les autorités monténégrines pour réformer le système éducatif et donner aux enfants issus des minorités la possibilité d’étudier dans leur langue maternelle et d’assister à des cours sur la culture et les traditions de leurs communautés, dans un esprit de promotion de la tolérance et du respect de l’autre;
11.7. se félicite de l’adoption et de la mise en œuvre de la stratégie pour l’amélioration de la situation des Roms;
11.8. salue les efforts des autorités monténégrines pour assurer l’égalité entre hommes et femmes, tant en droit que dans la famille, la société et l’économie, tout en notant que la représentation des femmes en politique doit être améliorée;
11.9. se félicite de la coopération entre les autorités monténégrines et le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), de la publication du rapport le plus récent du CPT, ainsi que des efforts des autorités visant à améliorer les conditions de détention;
11.10. se félicite de la ratification par le Monténégro de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE no 197) ainsi que des efforts des autorités en matière de lutte contre la traite des êtres humains;
11.11. prend note de l’adoption de la loi sur la citoyenneté et invite les autorités monténégrines à poursuivre les négociations avec les pays voisins, afin de conclure des accords sur la double citoyenneté;
11.12. regrette que la nouvelle loi sur l’asile ne soit pas pleinement conforme aux dispositions de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés;
11.13. suit de près les actions des autorités monténégrines visant à réenregistrer les personnes déplacées afin de négocier leur retour durable ou d’assurer l’intégration locale de ceux qui décident de rester au Monténégro;
11.14. invite, par conséquent, les autorités monténégrines:
11.14.1. à tenir compte de l’avis de la Commission de Venise dans la finalisation de la loi relative à l’interdiction de la discrimination et à adopter cette loi d’urgence;
11.14.2. à continuer à œuvrer à l’application effective des garanties constitutionnelles des droits des minorités, en révisant si nécessaire la législation relative à ces droits;
11.14.3. à prendre toutes les mesures qui s’imposent pour enquêter sur toutes les allégations de torture ou de mauvais traitements, en particulier celles formulées par des personnes détenues par la police, et à sanctionner les auteurs de tels actes;
11.14.4. à enquêter sur toutes les allégations de violence contre les défenseurs des droits de l’homme, les journalistes et la population LGBT; à offrir une protection adéquate aux individus concernés, y compris aux témoins, avant, pendant et après les procédures, à poursuivre et à sanctionner les auteurs de ces infractions; et à apprendre à la population, en particulier à la police et aux jeunes, à accepter les différences;
11.14.5. à mettre en œuvre les principes de la Résolution 1577 (2007) de l’Assemblée «Vers une dépénalisation de la diffamation», notamment en instaurant des plafonds raisonnables et proportionnés en matière de montant des dommages-intérêts dans les affaires de diffamation, de sorte que celui-ci ne puisse mettre en péril la viabilité même du média poursuivi;
11.14.6. à coopérer pleinement avec le CPT dans la mise en œuvre des recommandations de ce dernier et à établir un mécanisme national de prévention de la torture, conformément au Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (OPCAT);
11.14.7. à poursuivre la réforme de l’éducation, afin d’enseigner la tolérance et le respect d’autrui à l’école;
11.14.8. à poursuivre la mise en œuvre de la stratégie pour l’amélioration de la situation des Roms;
11.14.9. à réviser la législation sur la citoyenneté et l’asile, compte tenu des dispositions de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés;
11.14.10. à continuer à œuvrer à l’amélioration de la situation des réfugiés et des personnes déplacées en supprimant toutes les dispositions discriminatoires dans les secteurs de l’emploi et de l’éducation, ainsi qu’en matière d’accès aux droits de propriété, au droit à réparation, au droit d’accès à la citoyenneté et aux services de santé; et à poursuivre les négociations avec les pays voisins du Monténégro afin d’assurer le retour durable des personnes déplacées ou l’intégration locale de ceux qui décident de rester au Monténégro;
11.14.11. à poursuivre la lutte contre la traite des êtres humains.
12. L’Assemblée prend note de la bonne coopération des autorités monténégrines avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et encourage les autorités à poursuivre cette étroite coopération avec le tribunal, surtout en ce qui concerne la recherche et l’arrestation des personnes mises en examen qui sont toujours en fuite.
13. Dans l’attente de progrès dans la mise en œuvre des recommandations susmentionnées, l’Assemblée décide de poursuivre la procédure de suivi à l’égard du Monténégro.