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Résolution 1828 (2011)
La forte baisse du taux d’emploi des jeunes: inverser la tendance
1. L’accès à un emploi correctement
rémunéré est essentiel pour pouvoir gagner sa vie de manière durable,
être à l’abri de la pauvreté et de l’exclusion socio-économique,
et exercer ses droits fondamentaux. Afin de garantir la mise en
œuvre effective du droit au travail – consacré par la Charte sociale
européenne (révisée) (STE no 163) –, les Etats européens sont tenus
de prendre des mesures législatives ou d’élaborer des politiques
ou des programmes spécifiques, notamment pour réduire au minimum
les conséquences négatives et le coût considérable du chômage pour
la société. Si le chômage et les emplois précaires portent atteinte
à la dignité de chaque individu concerné et nuisent au progrès humain
de l’ensemble de la société, les jeunes sont toutefois particulièrement
vulnérables à de telles situations.
2. En Europe, le chômage des jeunes reste deux fois plus élevé
que celui d’autres groupes de population en âge de travailler et
la situation est encore aggravée par les effets de la crise économique.
A la fin de 2010, un jeune sur cinq en moyenne était sans emploi,
tant dans les Etats membres de l’Union européenne que dans les pays
d’Europe centrale et orientale; le taux de chômage des jeunes atteignait
42 % en Espagne, mais demeurait inférieur à 10 % dans quelques pays,
dont l’Allemagne, les Pays-Bas et la Norvège. A l’échelle mondiale,
le chômage frappait environ 13 % des jeunes actifs, taux le plus
élevé jamais enregistré par l’Organisation internationale du travail.
3. L’Assemblée parlementaire constate avec préoccupation que,
en dépit du meilleur niveau d’études qu’ont les jeunes aujourd’hui
en Europe par rapport à leurs parents et de la pénurie de personnel
à laquelle beaucoup de pays européens sont confrontés dans un nombre
croissant de secteurs, les jeunes rencontrent plus de difficultés
pour s’insérer ou se réinsérer sur le marché du travail que le reste
de la population. Si les gouvernements ne parviennent pas à proposer
de solutions réalistes au chômage des jeunes, l’Europe risque fort
de le payer au prix d’une «génération sacrifiée» et de compromettre
sa compétitivité, sa sécurité, la paix sociale et ses perspectives
de développement. Au vu des défis liés à la mondialisation et des
effets persistants de la crise économique, l’Europe ne peut tout
simplement pas se permettre de gâcher les talents, l’énergie, la mobilité
et la créativité de sa jeunesse.
4. L’Assemblée considère que le chômage et le sous-emploi des
jeunes sont principalement imputables à l’inadéquation entre les
qualifications des jeunes et les besoins du marché du travail, à
l’évolution rapide des conditions du marché du travail, aux mutations
économiques structurelles et à l’érosion des dépenses publiques
consacrées aux stratégies intégrées en faveur de l’emploi. Il importe
donc de remanier les politiques publiques, aux niveaux tant européen
que national, en vue d’appliquer pleinement les dispositions de
la Charte sociale européenne (révisée) concernant le travail et
de promouvoir l’acquisition de meilleures qualifications et compétences,
une plus grande mobilité, un meilleur accès aux offres d’emploi
et aux programmes d’apprentissage, ainsi qu’une plus grande interaction
entre employeurs, agences nationales pour l’emploi et jeunes demandeurs
d’emploi.
5. Prenant en compte la taille et les implications éventuelles
du problème du chômage des jeunes, l’Assemblée estime que les responsables
politiques européens sont soumis à l’impératif de favoriser l’intégration
des jeunes demandeurs d’emploi avant de faire venir des travailleurs
hautement qualifiés de pays non européens. Un renforcement de la
solidarité intergénérationnelle et la mise en œuvre de dispositions innovantes
sur les lieux de travail devraient permettre de faciliter le transfert
de compétences entre les travailleurs expérimentés et les jeunes,
tout en aidant les seconds à accéder plus rapidement à un emploi rémunéré
et les premiers à préparer progressivement leur retraite.
6. L’Assemblée est convaincue que les organisations européennes,
notamment l’Union européenne et le Conseil de l’Europe, peuvent
et doivent consentir des efforts supplémentaires pour aider leurs
Etats membres à multiplier et à améliorer les emplois offerts à
la jeune génération. D’autres partenaires, tels que la Banque européenne
pour la reconstruction et le développement (BERD), la Banque de
développement du Conseil de l’Europe (CEB), le Centre européen pour
l’interdépendance et la solidarité mondiales (Centre Nord-Sud),
le Fonds social européen (FSE) et la Banque européenne d’investissement
(BEI), pourraient compléter utilement les programmes d’action européens
et nationaux.
7. Dans ce contexte, l’Assemblée souligne la nécessité pour les
responsables politiques européens de prendre davantage en compte
la réalité démographique, les problèmes de développement économique
et les défis démocratiques auxquels doivent faire face les pays
méditerranéens voisins de l’Europe, où des millions de jeunes qualifiés
frustrés de ne pas trouver de travail sont prêts à tout pour avoir
une vie meilleure et un emploi, y compris à émigrer. L’Assemblée
estime qu’il serait dans l’intérêt des Etats européens, à tous égards et
dans une perspective à long terme, de soutenir l’action de l’Union
européenne et du Conseil de l’Europe – par le biais de leurs politiques
de voisinage et stratégies pour la jeunesse respectives, et en impliquant
le Centre Nord-Sud – afin d’aider les pays du sud de la Méditerranée
à exploiter pleinement leur potentiel de développement et à proposer
un avenir meilleur à leur jeunesse.
8. En conséquence, l’Assemblée invite les Etats membres du Conseil
de l’Europe:
8.1. à faire de l’emploi
des jeunes l’une des grandes priorités des politiques en faveur
de l’emploi et à initier des mesures immédiates en s’inspirant des
meilleures pratiques européennes en la matière;
8.2. à encourager la création d’emplois de qualité, le dialogue
social et les incitations à embaucher des jeunes, en particulier
dans les secteurs économiques les plus porteurs, notamment les services,
et dans ceux qui souffrent d’une pénurie de main-d’œuvre;
8.3. à améliorer l’interaction entre employeurs, agences nationales
pour l’emploi et jeunes demandeurs d’emploi;
8.4. à renforcer les liens entre les établissements d’enseignement
et les entreprises, afin de parvenir à une meilleure adéquation
entre les qualifications des jeunes et les besoins du marché du
travail – actuels et futurs;
8.5. à améliorer l’orientation scolaire, le développement des
compétences, l’orientation professionnelle, la formation à l’employabilité
et les services de recherche d’emploi, afin d’aider les jeunes à
passer plus facilement des études au travail;
8.6. à garantir une aide supplémentaire en matière d’éducation,
de formation et un complément de revenu, afin de faciliter l’accès
au marché du travail et d’offrir des perspectives professionnelles
aux jeunes défavorisés ou vulnérables, y compris ceux qui sont d’origine
immigrée ou qui appartiennent à une minorité et ceux qui vivent
dans des zones rurales ou isolées, et à soutenir les organisations
de jeunesse qui travaillent sur le terrain dans ce domaine;
8.7. à veiller attentivement à ce que les employeurs respectent
leur obligation de garantir des conditions de travail décentes,
des formations régulières et une rémunération adéquate aux jeunes travailleurs,
notamment dans le cadre des contrats de travail temporaire;
8.8. à envisager de créer ou de renforcer, selon le cas, des
partenariats entre le public et le privé, qui aident les jeunes
à acquérir une première expérience professionnelle et à bénéficier
d’une formation en entreprise;
8.9. à mettre en place des mesures fiscales ou sociales destinées
à inciter les entreprises à proposer à des jeunes des contrats de
travail de longue durée ou des contrats considérés comme de véritables premiers
emplois durables et de qualité pour les jeunes les occupant, notamment
pour favoriser l’intégration des jeunes handicapés et de ceux qui
sont les plus exposés au risque d’exclusion sociale ou de marginalisation;
8.10. à développer des dispositifs permettant aux jeunes, et
notamment aux plus fragiles d’entre eux, d’accéder à des emplois
aidés qui représentent de véritables «passerelles» entre le monde
de la formation et celui du travail;
8.11. à étudier les politiques et pratiques, notamment les formes
de «flexisécurité», mises en œuvre par des pays qui ont le meilleur
taux d’emploi des jeunes, en vue d’en tirer des enseignements pour réduire
le chômage des jeunes dans leur propre pays;
8.12. à soutenir, notamment par des contributions volontaires,
les projets du Conseil de l’Europe visant à promouvoir l’emploi
des jeunes, leur mobilité, le développement de leurs compétences
linguistiques et d’autres compétences;
8.13. à promouvoir l’accès de la jeune génération à une activité
indépendante, à des dispositifs de microcrédit et à des services
de conseil pour la création d’entreprise;
8.14. à encourager les banques de développement multilatérales,
en particulier la Banque européenne d’investissement (BEI), la Banque
européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et
la Banque de développement du Conseil de l’Europe (CEB), ainsi que
d’autres institutions pertinentes, comme le Centre Nord-Sud, à contribuer
à la mise en œuvre des politiques de voisinage de l’Union européenne
et du Conseil de l’Europe, notamment par le biais de projets visant
à favoriser la création d’emplois et l’emploi des jeunes dans les
pays du sud de la Méditerranée.
9. L’Assemblée invite les parlements nationaux des Etats membres
du Conseil de l’Europe à envisager de tenir des débats annuels sur
les problèmes de la jeunesse, y compris les défis liés à l’emploi
des jeunes, et à étudier la possibilité de proposer des plans d’action
pour la jeunesse afin de traiter les problèmes ainsi identifiés.