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Résolution 1828 (2011)

La forte baisse du taux d’emploi des jeunes: inverser la tendance

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 24 juin 2011 (27e séance) (voir Doc. 12626, rapport de la commission des questions économiques et du développement, rapporteur: Mme Pejčinović-Burić; et Doc. 12665, avis de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille, rapporteur: Mme Karamanli). Texte adopté par l’Assemblée le 24 juin 2011 (27e séance).

1. L’accès à un emploi correctement rémunéré est essentiel pour pouvoir gagner sa vie de manière durable, être à l’abri de la pauvreté et de l’exclusion socio-économique, et exercer ses droits fondamentaux. Afin de garantir la mise en œuvre effective du droit au travail – consacré par la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163) –, les Etats européens sont tenus de prendre des mesures législatives ou d’élaborer des politiques ou des programmes spécifiques, notamment pour réduire au minimum les conséquences négatives et le coût considérable du chômage pour la société. Si le chômage et les emplois précaires portent atteinte à la dignité de chaque individu concerné et nuisent au progrès humain de l’ensemble de la société, les jeunes sont toutefois particulièrement vulnérables à de telles situations.
2. En Europe, le chômage des jeunes reste deux fois plus élevé que celui d’autres groupes de population en âge de travailler et la situation est encore aggravée par les effets de la crise économique. A la fin de 2010, un jeune sur cinq en moyenne était sans emploi, tant dans les Etats membres de l’Union européenne que dans les pays d’Europe centrale et orientale; le taux de chômage des jeunes atteignait 42 % en Espagne, mais demeurait inférieur à 10 % dans quelques pays, dont l’Allemagne, les Pays-Bas et la Norvège. A l’échelle mondiale, le chômage frappait environ 13 % des jeunes actifs, taux le plus élevé jamais enregistré par l’Organisation internationale du travail.
3. L’Assemblée parlementaire constate avec préoccupation que, en dépit du meilleur niveau d’études qu’ont les jeunes aujourd’hui en Europe par rapport à leurs parents et de la pénurie de personnel à laquelle beaucoup de pays européens sont confrontés dans un nombre croissant de secteurs, les jeunes rencontrent plus de difficultés pour s’insérer ou se réinsérer sur le marché du travail que le reste de la population. Si les gouvernements ne parviennent pas à proposer de solutions réalistes au chômage des jeunes, l’Europe risque fort de le payer au prix d’une «génération sacrifiée» et de compromettre sa compétitivité, sa sécurité, la paix sociale et ses perspectives de développement. Au vu des défis liés à la mondialisation et des effets persistants de la crise économique, l’Europe ne peut tout simplement pas se permettre de gâcher les talents, l’énergie, la mobilité et la créativité de sa jeunesse.
4. L’Assemblée considère que le chômage et le sous-emploi des jeunes sont principalement imputables à l’inadéquation entre les qualifications des jeunes et les besoins du marché du travail, à l’évolution rapide des conditions du marché du travail, aux mutations économiques structurelles et à l’érosion des dépenses publiques consacrées aux stratégies intégrées en faveur de l’emploi. Il importe donc de remanier les politiques publiques, aux niveaux tant européen que national, en vue d’appliquer pleinement les dispositions de la Charte sociale européenne (révisée) concernant le travail et de promouvoir l’acquisition de meilleures qualifications et compétences, une plus grande mobilité, un meilleur accès aux offres d’emploi et aux programmes d’apprentissage, ainsi qu’une plus grande interaction entre employeurs, agences nationales pour l’emploi et jeunes demandeurs d’emploi.
5. Prenant en compte la taille et les implications éventuelles du problème du chômage des jeunes, l’Assemblée estime que les responsables politiques européens sont soumis à l’impératif de favoriser l’intégration des jeunes demandeurs d’emploi avant de faire venir des travailleurs hautement qualifiés de pays non européens. Un renforcement de la solidarité intergénérationnelle et la mise en œuvre de dispositions innovantes sur les lieux de travail devraient permettre de faciliter le transfert de compétences entre les travailleurs expérimentés et les jeunes, tout en aidant les seconds à accéder plus rapidement à un emploi rémunéré et les premiers à préparer progressivement leur retraite.
6. L’Assemblée est convaincue que les organisations européennes, notamment l’Union européenne et le Conseil de l’Europe, peuvent et doivent consentir des efforts supplémentaires pour aider leurs Etats membres à multiplier et à améliorer les emplois offerts à la jeune génération. D’autres partenaires, tels que la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la Banque de développement du Conseil de l’Europe (CEB), le Centre européen pour l’interdépendance et la solidarité mondiales (Centre Nord-Sud), le Fonds social européen (FSE) et la Banque européenne d’investissement (BEI), pourraient compléter utilement les programmes d’action européens et nationaux.
7. Dans ce contexte, l’Assemblée souligne la nécessité pour les responsables politiques européens de prendre davantage en compte la réalité démographique, les problèmes de développement économique et les défis démocratiques auxquels doivent faire face les pays méditerranéens voisins de l’Europe, où des millions de jeunes qualifiés frustrés de ne pas trouver de travail sont prêts à tout pour avoir une vie meilleure et un emploi, y compris à émigrer. L’Assemblée estime qu’il serait dans l’intérêt des Etats européens, à tous égards et dans une perspective à long terme, de soutenir l’action de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe – par le biais de leurs politiques de voisinage et stratégies pour la jeunesse respectives, et en impliquant le Centre Nord-Sud – afin d’aider les pays du sud de la Méditerranée à exploiter pleinement leur potentiel de développement et à proposer un avenir meilleur à leur jeunesse.
8. En conséquence, l’Assemblée invite les Etats membres du Conseil de l’Europe:
8.1. à faire de l’emploi des jeunes l’une des grandes priorités des politiques en faveur de l’emploi et à initier des mesures immédiates en s’inspirant des meilleures pratiques européennes en la matière;
8.2. à encourager la création d’emplois de qualité, le dialogue social et les incitations à embaucher des jeunes, en particulier dans les secteurs économiques les plus porteurs, notamment les services, et dans ceux qui souffrent d’une pénurie de main-d’œuvre;
8.3. à améliorer l’interaction entre employeurs, agences nationales pour l’emploi et jeunes demandeurs d’emploi;
8.4. à renforcer les liens entre les établissements d’enseignement et les entreprises, afin de parvenir à une meilleure adéquation entre les qualifications des jeunes et les besoins du marché du travail – actuels et futurs;
8.5. à améliorer l’orientation scolaire, le développement des compétences, l’orientation professionnelle, la formation à l’employabilité et les services de recherche d’emploi, afin d’aider les jeunes à passer plus facilement des études au travail;
8.6. à garantir une aide supplémentaire en matière d’éducation, de formation et un complément de revenu, afin de faciliter l’accès au marché du travail et d’offrir des perspectives professionnelles aux jeunes défavorisés ou vulnérables, y compris ceux qui sont d’origine immigrée ou qui appartiennent à une minorité et ceux qui vivent dans des zones rurales ou isolées, et à soutenir les organisations de jeunesse qui travaillent sur le terrain dans ce domaine;
8.7. à veiller attentivement à ce que les employeurs respectent leur obligation de garantir des conditions de travail décentes, des formations régulières et une rémunération adéquate aux jeunes travailleurs, notamment dans le cadre des contrats de travail temporaire;
8.8. à envisager de créer ou de renforcer, selon le cas, des partenariats entre le public et le privé, qui aident les jeunes à acquérir une première expérience professionnelle et à bénéficier d’une formation en entreprise;
8.9. à mettre en place des mesures fiscales ou sociales destinées à inciter les entreprises à proposer à des jeunes des contrats de travail de longue durée ou des contrats considérés comme de véritables premiers emplois durables et de qualité pour les jeunes les occupant, notamment pour favoriser l’intégration des jeunes handicapés et de ceux qui sont les plus exposés au risque d’exclusion sociale ou de marginalisation;
8.10. à développer des dispositifs permettant aux jeunes, et notamment aux plus fragiles d’entre eux, d’accéder à des emplois aidés qui représentent de véritables «passerelles» entre le monde de la formation et celui du travail;
8.11. à étudier les politiques et pratiques, notamment les formes de «flexisécurité», mises en œuvre par des pays qui ont le meilleur taux d’emploi des jeunes, en vue d’en tirer des enseignements pour réduire le chômage des jeunes dans leur propre pays;
8.12. à soutenir, notamment par des contributions volontaires, les projets du Conseil de l’Europe visant à promouvoir l’emploi des jeunes, leur mobilité, le développement de leurs compétences linguistiques et d’autres compétences;
8.13. à promouvoir l’accès de la jeune génération à une activité indépendante, à des dispositifs de microcrédit et à des services de conseil pour la création d’entreprise;
8.14. à encourager les banques de développement multilatérales, en particulier la Banque européenne d’investissement (BEI), la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et la Banque de développement du Conseil de l’Europe (CEB), ainsi que d’autres institutions pertinentes, comme le Centre Nord-Sud, à contribuer à la mise en œuvre des politiques de voisinage de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe, notamment par le biais de projets visant à favoriser la création d’emplois et l’emploi des jeunes dans les pays du sud de la Méditerranée.
9. L’Assemblée invite les parlements nationaux des Etats membres du Conseil de l’Europe à envisager de tenir des débats annuels sur les problèmes de la jeunesse, y compris les défis liés à l’emploi des jeunes, et à étudier la possibilité de proposer des plans d’action pour la jeunesse afin de traiter les problèmes ainsi identifiés.