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Résolution 1834 (2011) Version finale

Combattre les «images d'abus commis sur des enfants» par une action engagée, transversale et internationalement coordonnée

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 5 octobre 2011 (32e et 33e séances) (voir Doc. 12720, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille, rapporteur: M. Conde Bajén). Texte adopté par l’Assemblée le 5 octobre 2011 (33e séance). Voir également la Recommandation 1980 (2011).

1. Les «images d’abus commis sur des enfants» ou la «pornographie enfantine» ne sont pas de simples images. Les deux expressions renvoient à une série d’infractions, depuis la sollicitation, la corruption ou la traite d’enfants (de moins de 18 ans) à des fins sexuelles jusqu’à la diffusion, la collecte et la consultation d’images de l’abus perpétré, en passant par diverses formes d’abus sexuels commis sur des enfants – conduisant parfois même à leur mort.
2. L’Assemblée parlementaire est vivement préoccupée par l’ampleur de telles infractions dans notre société et par la manière dont elles sont facilitées par l’internet et d’autres technologies de l’information et de la communication qui révèlent leur «face sombre» dès lors qu’il s’agit d’images d’abus commis sur des enfants. Elle rappelle que, en raison de l’anonymat de l’internet, il est extrêmement difficile de découvrir et de poursuivre efficacement les délinquants, ainsi que d’identifier et d’aider les victimes. Aussi l’Assemblée parlementaire en appelle-t-elle à une action engagée, transversale et internationalement coordonnée pour combattre tous les types de délits liés à des images d’abus commis sur des enfants.
3. Bien que la plupart des images fassent partie d’un «monde virtuel», il ne faut jamais oublier que derrière chaque image d’abus commis sur des enfants il y a au moins un enfant victime d’abus sexuels dans la vie réelle.
4. Les images d’abus commis sur des enfants ne sont pas seulement le résultat et la représentation visuelle d’abus, elles peuvent aussi inciter à de nouveaux délits, et ainsi devenir un «multiplicateur» d’abus sexuels sur des enfants et d’exploitation sexuelle de ces derniers. Pour cette raison, déjà le «simple» fait de regarder des images d’abus commis sur des enfants devrait être érigé en infraction pénale dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe.
5. La Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (Convention de Lanzarote, STCE no 201) constitue aujourd’hui la norme la plus complète et la plus avancée dans ce domaine, avec la Convention sur la cybercriminalité (Convention de Budapest, STE no 185). Elles seront bientôt complétées par la prochaine directive de l’Union européenne relative à l’exploitation et aux abus sexuels concernant des enfants et à la pédopornographie, qui devrait être adoptée par le Parlement européen et le Conseil européen avant la fin 2011. Ces textes constituent une solide base juridique, mais ils doivent être renforcés sur certains aspects tels que la criminalisation de la consultation intentionnelle d’images d’abus commis sur des enfants (en ce qui concerne la Convention de Lanzarote) et l’obligation de blocage des sites web en cas de suppression impossible, ce que, au regret de l’Assemblée parlementaire, ne prévoit pas le projet final de directive de l’Union européenne.
6. De nombreux Etats membres ont commencé à traiter la question en mettant en place une législation et des politiques fermes. Le renforcement des échanges d’informations et de bonnes pratiques à l’échelon européen devrait permettre de mener une lutte plus efficace contre les images d’abus commis sur des enfants. Pour mieux refléter la complexité du problème, les notions d’«images d’abus commis sur des enfants» ou de «matériels relatifs aux abus commis sur des enfants» devraient, à long terme, remplacer l’expression «pornographie enfantine» dans tous les textes juridiques et débats politiques.
7. A la lumière de la coopération fructueuse avec le secteur privé, l’engagement des fournisseurs d’accès à internet (FAI) et du secteur financier devrait être davantage encouragé à l’avenir, de manière à inciter toutes les entreprises à adopter des approches d’autorégulation et de signalement systématique des contenus internet illégaux aux autorités.
8. Ainsi, l’Assemblée appelle les Etats membres du Conseil de l’Europe:
8.1. en ce qui concerne la Convention de Lanzarote et la Convention de Budapest:
8.1.1. à signer et à ratifier ces conventions dès que possible, si ce n’est déjà fait, et, s’agissant des Etats membres de l’Union européenne, à les mettre en œuvre de manière coordonnée en tenant compte de la prochaine directive de l’Union européenne;
8.1.2. à renforcer leur législation nationale dans ce domaine, notamment en créant une base juridique solide autorisant les services de répression à intervenir selon des procédures transparentes et totalement respectueuses des principes démocratiques et des droits humains;
8.1.3. à soutenir le renforcement de la Convention de Lanzarote par un protocole additionnel visant à couvrir de façon plus détaillée les délits liés à des images d’abus commis sur des enfants; 
8.2. en ce qui concerne les mesures politiques à prendre:
8.2.1. à mettre en place des politiques nationales globales traitant le problème sous tous les angles possibles tout en adoptant une «approche centrée sur les victimes» afin d’identifier victimes et délinquants aussi rapidement que possible, d’arrêter les abus et d’aider les victimes – y compris dans le cadre de systèmes de justice adaptés aux enfants, systèmes à développer selon les Lignes directrices du Conseil de l’Europe sur une justice adaptée aux enfants, adoptées en novembre 2010;
8.2.2. à établir des mécanismes efficaces permettant d’interrompre la diffusion en ligne, commerciale et non commerciale, d’images d’abus commis sur des enfants, en donnant la priorité au retrait rapide des contenus illégaux chaque fois que cela est possible, et en prévoyant le blocage des sites web comme mesure complémentaire s’il y a lieu;
8.2.3. à renforcer le dialogue avec le secteur privé pour qu’il prenne la responsabilité de signaler immédiatement les images d’abus commis sur des enfants qu’il a identifiées et à coopérer avec les services de répression;
8.2.4. à favoriser, d’une part, des échanges d’informations plus systématiques aux niveaux européen et international et, d’autre part, des recherches ultérieures concernant les images d’abus commis sur des enfants et les infractions associées;
8.3. en ce qui concerne une sensibilisation générale à la question des images d’abus commis sur des enfants et des délits associés:
8.3.1. à renforcer le dialogue général par une approche «multipartite»: autorités publiques, services de répression, organisations de la société civile, établissements d’enseignement et, au niveau individuel, la famille et l’enfant, y compris les victimes de délits commis dans le passé;
8.3.2. à responsabiliser enfants et adolescents pour leur permettre de se protéger quand c’est possible et de renforcer leur sensibilisation aux médias, ainsi qu’à sensibiliser la société en général à l’impact et aux dangers d’une «sexualisation» croissante des enfants dans les médias;
8.3.3. à soutenir la Campagne UN sur CINQ du Conseil de l’Europe contre la violence sexuelle à l’égard des enfants (2010-2014) en contribuant activement à ses activités européennes (y compris par le soutien financier de sa dimension parlementaire) et en développant des activités nationales dans le cadre de la campagne ou des liens directs avec les politiques nationales existantes, y compris aux niveaux parlementaire, local et régional.