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Résolution 1835 (2011) Version finale
La pornographie violente et extrême
1. Depuis quelques années, la pornographie
est devenue un commerce très lucratif, notamment du fait du rôle
croissant que joue l’internet dans sa diffusion. Dans le même temps,
de nouveaux types d’équipement très répandus ont donné la possibilité
à des personnes privées de devenir producteurs de pornographie,
celle-ci étant distribuée et échangée principalement via les réseaux
et médias sociaux sur internet.
2. L’Assemblée parlementaire se déclare profondément préoccupée
par l’accessibilité croissante du public aux contenus pornographiques
violents et extrêmes montrant explicitement des scènes de dégradation,
de violence sexuelle, de torture, de meurtre, de nécrophilie ou
de zoophilie dans un but d’excitation sexuelle.
3. Tout en rappelant que la liberté d’expression est l’un des
fondements d’une société démocratique et un droit garanti par la
Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5), l’Assemblée
souligne qu’il est possible de poser des limites à ce droit si de
telles limites sont prescrites par la loi et paraissent nécessaires, notamment
dans l’intérêt de la prévention de la criminalité, de la protection
des mœurs et de la protection des droits d’autrui.
4. L’Assemblée constate l’existence de fortes disparités entre
les Etats membres du Conseil de l’Europe quant au degré de réglementation
de la pornographie avec, d’un côté, des pays dans lesquels la production, la
distribution et la possession de matériel pornographique sont complètement
interdites et, de l’autre, des pays où il n’existe pratiquement
aucune interdiction, même à l’égard des formes de pornographie violente
et extrême.
5. Elle regrette de constater aussi que les Etats membres ont
en commun de ne pas appliquer suffisamment la législation et la
réglementation en vigueur sur la production et la distribution de
pornographie.
6. Devant l’augmentation du nombre de consommateurs de pornographie
en Europe, l’Assemblée met en garde contre le risque de banalisation
pouvant résulter de l’exposition constante ou de la dépendance à
la pornographie, en soulignant le danger d’une normalisation progressive
qui amènerait à considérer la coercition morale et la violence physique
comme acceptables.
7. En outre, constatant que les victimes représentées sont en
grande majorité des femmes, l’Assemblée se déclare préoccupée par
les conséquences négatives de la pornographie violente et extrême
du point de vue de la dignité des femmes et de leur droit de vivre
à l’abri de la violence sexuelle. A cet égard, l’Assemblée considère
que ce type de pornographie représente un obstacle de plus sur le
chemin vers une réelle égalité entre les sexes, à côté des autres
formes de pornographie hard et soft, de l’utilisation très répandue
d’images sexualisées de femmes à des fins commerciales et de l’exploitation
des stéréotypes sexuels par les médias et l’industrie du divertissement.
8. D’autre part, l’Assemblée souligne une nouvelle fois la nécessité
de protéger les enfants de l’exposition aux contenus pornographiques
violents et extrêmes, qui pourrait nuire à leur développement équilibré.
9. Au vu de ces considérations, l’Assemblée appelle les Etats
membres:
9.1. en ce qui concerne
la législation et les politiques:
9.1.1. à assurer la mise
en œuvre effective de la législation en vigueur régissant la production, la
distribution et la vente de matériel pornographique;
9.1.2. à réviser, le cas échéant, les lois existantes afin d’assurer
la mise en place de sanctions adéquates en cas de violations, et
à contrôler leur application et leur mise en œuvre;
9.1.3. à obliger les entreprises à soumettre toute œuvre audiovisuelle
pour classification avant sa distribution commerciale;
9.1.4. à renforcer les sanctions en cas de non-respect de l’obligation
de soumettre les œuvres audiovisuelles pour classification auprès
de l’organe pertinent, ainsi qu’en cas de distribution de tels contenus
sans obtention préalable d’un code de classification;
9.1.5. à évaluer l’impact de la législation et de la réglementation
en vigueur s’appliquant à la pornographie violente et extrême, et,
le cas échéant, à réviser les textes existants, en prenant en considération
la possibilité:
9.1.5.1. d’introduire des dispositions spécifiques
criminalisant la production et la distribution de pornographie violente
et extrême;
9.1.5.2. de criminaliser la possession de matériel pornographique
violent et extrême, y compris à des fins d’usage personnel;
9.1.6. à assurer une mise en œuvre non discriminatoire de la
législation existante, y compris du point de vue de l’orientation
sexuelle;
9.1.7. à établir ou soutenir l’établissement de services d’assistance
téléphonique ou d’autres structures afin de prodiguer des conseils
au public et de recevoir des plaintes concernant le matériel illégal;
9.2. en ce qui concerne la protection des mineurs:
9.2.1. à
intensifier les efforts pour combattre la pornographie enfantine;
9.2.2. 9.2.2. à introduire et à appliquer des sanctions adéquates
pour réprimer la vente de matériel pornographique aux mineurs;
9.2.3. 9.2.3. à appliquer des sanctions adéquates en cas de violation
de l’interdiction de représenter des adultes comme s’il s’agissait
de mineurs;
9.2.4. à introduire une classification obligatoire de tous les
jeux vidéo, y compris les jeux pornographiques et violents, et à
soumettre leur vente et leur distribution à une autorisation préalable
de l’organisme de classification pertinent;
9.3. en ce qui concerne la recherche:
9.3.1. 9.3.1.
à encourager et à soutenir les études scientifiques visant à évaluer
l’impact des images pornographiques violentes et extrêmes sur les
utilisateurs, notamment en vue de déterminer les liens pouvant exister
entre la consommation fréquente de pornographie violente et extrême
et une inclination accrue à des comportements sexuels violents.
La recherche devrait aussi déterminer, au moyen d’études comparatives,
si l’effet sur les utilisateurs varie en fonction de la nature réelle
ou fictive des images;
9.3.2. 9.3.2. à encourager ou effectuer régulièrement des enquêtes
parmi le public, ainsi que des consultations au sein de la société
civile, sur les normes en matière d’obscénité;
9.3.3. 9.3.3. à encourager ou soutenir l’étude des liens entre
la pornographie violente et extrême et, d’une part, la prostitution
et la traite des êtres humains, d’autre part, les images d’abus
sexuels d’enfant;
9.4. en ce qui concerne la formation et la sensibilisation:
9.4.1. 9.4.1. à développer des matériaux et des programmes d’éducation
sexuelle pour les enfants et les jeunes;
9.4.2. 9.4.2. à soutenir la formation des travailleurs sociaux
et des professionnels de santé ayant à traiter la dépendance à la
pornographie;
9.4.3. 9.4.3. à soutenir la formation des travailleurs sociaux
et des agents des forces de l’ordre ayant affaire à des personnes
qui ont été contraintes de travailler dans la pornographie.
10. Enfin, l’Assemblée appelle une nouvelle fois les Etats membres
et les Etats observateurs du Conseil de l’Europe à signer et ratifier:
10.1. 10.1. la Convention du Conseil
de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des
femmes et la violence domestique (STCE no 210);
10.2. 10.2. la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection
des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (STCE no 201);
10.3. la Convention sur la cybercriminalité (STE no 185).