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Résolution 1851 (2011) Version finale

Les conflits armés et l’environnement

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 25 novembre 2011 (voir Doc. 12774, rapport de la commission de l’environnement, de l’agriculture et des questions territoriales, rapporteur: M. R. Huseynov).

1. L’Assemblée parlementaire note avec inquiétude que les conflits armés ont des conséquences désastreuses sur l’environnement: destruction des infrastructures, pollution des systèmes d’approvisionnement en eau, empoisonnement des sols et des champs, destruction des cultures et des forêts.
2. Les ressources naturelles elles-mêmes peuvent ainsi être une source de conflits quand elles constituent une cible prioritaire pour les opérations militaires.
3. L’Assemblée constate également que les conflits génèrent une surexploitation des ressources naturelles, entraînant des pénuries alimentaires, la déforestation, l’érosion des sols et la disparition de la faune sauvage.
4. De surcroît, les dégâts sur l’environnement sont souvent plus importants à la fin du conflit, au moment du retour de la population et de la reconstruction du pays. Le retour des réfugiés engendre une surexploitation des ressources pour satisfaire leurs besoins alimentaires et énergétiques, mais également des coûts économiques, sociaux et politiques élevés.
5. Dans ce contexte, l’Assemblée rappelle sa Recommandation 1495 (2001) sur les conséquences de la guerre en Yougoslavie pour l’environnement de l’Europe du Sud-Est, qui indique clairement que, «comme dans le cas des opérations conduites en Bosnie et en Tchétchénie, les Etats qui ont participé à ces opérations ont méconnu les réglementations internationales contenues dans les articles 55 et 56 du Protocole I (1977) aux Conventions de Genève de 1949, visant à limiter les dommages causés à l’environnement en cas de conflit armé».
6. L’Assemblée regrette que l’environnement naturel ne soit pas défini dans l’article 52 du Protocole I aux Conventions de Genève.
7. A cet égard, l’Assemblée déplore que, malgré les divers textes internationaux en vigueur, tels que la Convention sur l’interdiction d’utiliser des techniques de modification de l’environnement à des fins militaires ou toutes autres fins hostiles (Convention ENMOD), qui est entrée en vigueur en 1978 et qui est considérée comme le texte de référence sur la protection environnementale pendant les conflits armés, et le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 interdisant le recours à la guerre écologique, les conflits armés continuent incontestablement d’avoir des effets délétères sur l’environnement, ce pendant des années ou des décennies.
8. L’Assemblée demande instamment aux gouvernements des Etats membres et observateurs du Conseil de l’Europe de respecter scrupuleusement les instruments juridiques relatifs au lien entre conflits armés et environnement, et de mettre au point des programmes de sensibilisation destinés en particulier aux responsables de la planification militaire.
9. L’Assemblée est convaincue qu’un renforcement de la responsabilité environnementale internationale, conjugué avec la répression internationale des crimes de guerre et des violations des droits de l’homme, pourrait prévenir les conflits armés.
10. L’Assemblée estime, en outre, que les organisations internationales et humanitaires qui sont directement associées à la gestion de l’après-conflit ont un rôle important à jouer dans les évaluations environnementales. L’élaboration de stratégies relatives aux mouvements de population, à la planification d’urgence et à la mise en place de camps de réfugiés les aiderait à trouver des solutions rapides acceptables à la fois sur le plan social et sur le plan environnemental.
11. L’Assemblée souligne le rôle important des médias pour attirer l’attention de l’opinion publique sur l’impact environnemental des conflits armés.
12. A la lumière de ces considérations, l’Assemblée recommande aux Etats membres et non membres du Conseil de l’Europe:
12.1. d’assurer la formation du personnel civil et militaire et des états-majors sur les enjeux environnementaux en période de conflit armé;
12.2. d’appliquer les lignes directrices pour les manuels et instructions militaires de la Croix-Rouge de 1994, sur la protection de l’environnement en période de conflit armé, dans les programmes de formation nationaux des militaires;
12.3. de promouvoir l’échange d’informations entre les Etats membres du Conseil de l’Europe sur la gestion environnementale en période de conflit armé et l’harmonisation des législations en vigueur dans ce domaine;
12.4. de désigner un correspondant «développement durable» au sein de l’Agence européenne de défense;
12.5. de relancer la Convention ENMOD afin de restreindre les programmes militaires de contrôle du climat;
12.6. d’intégrer l’écoconception dans les programmes d’armement;
12.7. d’évaluer les risques que font peser les manœuvres militaires sur l’environnement, comme les bruits ou les menaces sur la faune sauvage;
12.8. d’encourager les organisations humanitaires à mener des évaluations environnementales préconflit quand cela est possible, afin de mieux planifier la gestion humanitaire des conflits, en particulier l’emplacement des camps de réfugiés;
12.9. de débloquer des fonds afin que les organisations internationales, telles que le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), réalisent des évaluations environnementales préconflit;
12.10. de ratifier la Convention sur les armes à sous-munitions entrée en vigueur le 1er août 2010 et d’encourager les Etats partenaires comme Israël ou l’Afghanistan à faire de même;
12.11. d’encourager la rédaction d’un traité interdisant les armes au phosphore.
13. L’Assemblée appelle les parlements des Etats membres à conduire l’introduction de mesures législatives sur l’environnement, particulièrement pendant les conflits armés, en portant une attention particulière à la question des crimes écologiques.