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Rapport d’observation d’élection | Doc. 12938 | 24 mai 2012

Observation des élections législatives et de l’élection présidentielle anticipée en Serbie (6 mai 2012)

Auteur(s) : Commission ad hoc du Bureau

Rapporteur : M. Jean-Charles GARDETTO, Monaco, PPE/DC

1. Introduction

1. A sa réunion du 23 janvier 2012, le Bureau de l’Assemblée parlementaire a décidé, en principe et sous réserve de recevoir une invitation des autorités nationales compétentes et confirmation de la date, d’observer les élections en Serbie et de constituer une commission ad hoc à cette fin composée de 30 membres et a autorisé une mission préélectorale qui aurait lieu un mois environ avant les élections. Le Bureau, à sa réunion du 8 mars 2012, a pris note des déclarations sur l’absence de conflit d’intérêts pour les candidat(e)s à la mission d’observation, a approuvé la composition de la commission ad hoc et a désigné M. Jean-Charles Gardetto comme Président. Le 23 avril 2012, le Bureau a approuvé la composition définitive de la commission ad hoc (voir annexe 1).
2. Selon les termes de l’article 15 de l’accord de coopération signé entre l’Assemblée parlementaire et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) le 4 octobre 2004, «lorsque le Bureau de l’Assemblée décide d’observer des élections dans un pays où la législation électorale a été précédemment examinée par la Commission de Venise, l’un des rapporteurs de la Commission de Venise sur cette question pourra être invité en qualité de conseiller juridique à participer à la mission d’observation de l’Assemblée». Conformément à cette disposition, le Bureau de l’Assemblée a invité un expert de la Commission de Venise à se joindre à la commission ad hoc en qualité de conseiller.
3. Une délégation s’est rendue à Belgrade les 17 et 18 avril 2012 dans le cadre d’une mission préélectorale pour évaluer la préparation des élections et la campagne électorale, à la veille des élections législatives et de l’élection présidentielle anticipée du 6 mai 2012. La délégation a rencontré Mme Slavica Ðukic Dejanovic, Présidente du Parlement, M. Ivica Dacic, Vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur, M. Duško Radakovic, Secrétaire d'Etat, ministère des Droits de l'homme et des droits des minorités, de l'Administration publique et de l'Autonomie locale, le président de la Commission électorale de la République (CER), le Président de l'Agence nationale de radiodiffusion, des représentants des principaux groupes parlementaires. Toutefois les représentants du principal groupe parlementaire de l'opposition, «Pour la Serbie», n’ont pas été disponibles pour rencontrer les membres de la délégation. Des réunions ont également été organisées avec des représentants de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de la mission limitée du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'OSCE (OSCE/BIDDH), ainsi qu’avec des représentants de la société civile et des médias.
4. Dans l’ensemble, lors de la mission préélectorale, la délégation a constaté avec satisfaction que tous les acteurs politiques ont indiqué faire confiance au processus électoral, y compris la campagne électorale, qui, pour la plupart des partis politiques, était essentiellement axée sur les questions de chômage, de développement socio-économique, sur l'intégration européenne et, à un degré bien moindre, sur le Kosovo 
			(1) 
			Toute référence
au Kosovo dans le présent document, qu'il s'agisse de son territoire,
de ses institutions ou de sa population, doit être entendue dans
le plein respect de la Résolution 1244 du Conseil de sécurité de
l'Organisation des Nations Unies, sans préjuger du statut du Kosovo..
5. La délégation a souligné qu’un certain nombre de dispositions introduites dans la la législation électorale, amendée en 2011, améliorerait le choix effectif des citoyens: l'introduction de listes bloquées et la fin des mandats «gérés par les partis», l’abolition des «lettres de démission en blanc» et un meilleur accès des femmes au parlement par le biais d'un quota par sexe. Tout en constatant que ce cadre établit les conditions pour des élections concurrentielles, elle a exhorté tous les partis politiques à mettre en œuvre ces changements en toute bonne foi et dans l'esprit de la loi. L’introduction d'une liste unique d'électeurs au niveau national est également une mesure positive. La délégation a aussi pris note des plaintes déposées par de petits partis politiques concernant l'accès équitable au financement et aux médias.
6. La commission ad hoc a travaillé dans le cadre d’une mission internationale d’observation des élections (MIOE) aux côtés de la mission d’observation de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE et de la mission limitée d’observation des élections (MLOE) de l’OSCE/BIDDH. Une délégation du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe a par ailleurs observé les élections locales et provinciales qui avaient lieu le même jour.
7. La commission ad hoc s’est réunie à Belgrade les 4 et 5 mai 2012. Elle a notamment rencontré Mme Slavica Ðukic Dejanovic, Présidente du Parlement, des représentants des partis politiques en lice et des candidats à l’élection présidentielle, un membre de la Commission électorale de la République, le chef de la MLOE de l’OSCE/BIDDH et ses collaborateurs, ainsi que des représentants de la société civile et des médias. Le programme des réunions de la commission ad hoc figure en annexe 2. La commission ad hoc souhaite remercier le personnel du bureau du Conseil de l’Europe à Belgrade, ainsi que la mission limitée d’observation électorale (OSCE/BIDDH) pour leur coopération et leur assistance.
8. Le jour du scrutin, la commission ad hoc s’est répartie en 11 équipes qui ont observé les élections à Belgrade et dans sa périphérie, ainsi que dans les régions et municipalités suivantes: Novi Sad, Bačka Palanka, Vrbas, Sombor, Zemun, Pancevo, Smederevo, Mladenovac, Obrenovac, Smederevo Palanka, Kragujevac, Kraljevo, Kruševac Čačak, Niš, Paracin, Aleksinac, Prokuplje, Leskovac, Pirot, Vranje, Bujanovac, Preševo, Novi Pazar, Tutin et Raška. Au total, les membres de la commission ad hoc ont visité plus de 182 bureaux de vote le jour du scrutin.
9. La commission ad hoc a conclu que les élections législatives et l’élection présidentielle anticipée tenues en Serbie le 6 mai 2012 «ont satisfait à la plupart des normes du Conseil de l’Europe en matière d’élections démocratiques. Les citoyens ont choisi librement parmi un grand nombre de partis et de candidats à la présidence. Toutefois, la couverture médiatique aurait pu être plus équilibrée. En ce qui concerne la transparence du financement de la campagne, la délégation de l’Assemblée attend avec intérêt le rapport de l’Agence anti-corruption sur cette question». La commission ad hoc a également salué les efforts déployés par la communauté internationale ainsi que par Belgrade et Pristina, qui ont permis aux citoyens serbes du Kosovo d’exercer leur droit de vote. Le communiqué de presse publié après ces élections figure à l’annexe 3.

2. Cadre politique et juridique

10. Le 13 mars 2012, le Président de la République de Serbie, M. Boris Tadic, a décidé de tenir des élections législatives le 6 mai 2012. Les élections locales et provinciales ont été fixées le même jour. Le 5 avril 2012, plus de 10 mois avant la fin de son mandat, le Président de la République a donné sa démission et la Présidente du Parlement de la Serbie a décidé de tenir l’élection présidentielle anticipée le 6 mai également. Depuis le début de l’organisation des élections multipartites en Serbie en 1990, c’était la première fois que différentes élections ont eu lieu le même jour.
11. En Serbie, les élections législatives et l’élection présidentielle sont régies par la Constitution de 2006. En 2003, l’Assemblée parlementaire a adopté la Résolution 1320 (2003) sur un code de bonne conduite en matière électorale, invitant la Commission de Venise, en coopération avec l'OSCE/BIDDH, à préparer des avis sur les améliorations possibles de la législation et des pratiques électorales en République de Serbie. Depuis cette date, la Commission de Venise a adopté des avis communs avec l'OSCE/BIDDH sur la loi sur les élections législatives, présidentielles et locales (2006), sur le projet de loi sur les élections législatives en Serbie (2009), sur le projet de loi «modifiant et amendant la loi sur les élections des membres du Parlement» (2001) et sur le projet de loi sur le financement des activités politiques en République de Serbie. En janvier 2012, la CER a adopté des règles de procédure pour les élections du 6 mai 2012.
12. Dans l’ensemble, le cadre juridique modifié constitue une base crédible pour mener des élections démocratiques. Néanmoins, certains aspects du processus électoral nécessitent d’être améliorés. La Commission de Venise et l'OSCE/BIDDH avaient notamment recommandé que la loi soit amendée en vue de contraindre les partis politiques et les coalitions à définir et annoncer l’ordre des candidatures sur leurs listes avant le scrutin, plutôt que de les laisser choisir après les élections les candidats qui occuperont un siège.
13. A cet égard, conformément à une décision de la Cour constitutionnelle de Serbie de 2011 et compte tenu des recommandations précitées de la Commission de Venise, la loi électorale a été modifiée en 2011 en clarifiant l’ordre des candidatures sur les listes avant le scrutin. Néanmoins, la Constitution permet toujours qu’un député élu mette son mandat à la disposition de son propre parti. La mission préélectorale de l’Assemblée parlementaire a été informée que le Parti radical serbe avait annoncé son intention de faire signer à ses candidats un mémorandum avec l’engagement de rendre au parti l’équivalent de 30 000 euros si le candidat élu figurant sur sa liste quittait le parti.
14. En 2011, le parlement a adopté la loi sur le financement des activités politiques qui permet un financement tant public que privé, reconnaissant ainsi que les partis ont besoin de ressources suffisantes pour remplir leur rôle. La loi nouvellement adoptée peut constituer une avancée vers la création d'un système moderne et complet de financement des activités politiques en Serbie à condition que l’Agence de lutte contre la corruption de la Serbie (ALC) dispose des moyens humains et financiers nécessaires pour assurer une surveillance adéquate et transparente.
15. Le financement public représente environ 8 millions d’euros pour l’organisation de chaque élection nationale. Pour les élections législatives du 6 mai 2012, 20 % de cette somme auraient été distribués entre tous les participants aux élections, les autres 80 % seraient distribués après les élections entre les partis politiques ayant franchi le seuil de 5 % et en proportion du nombre de sièges obtenus. Pour l’élection présidentielle, 50 % de la somme seront distribués entre tous les candidats participant au premier tour et les 50 % restants aux deux candidats ayant participé au second tour.
16. L’ALC est chargée, pour la première fois, de contrôler les dépenses des participants aux élections. Lors de la campagne électorale, l’ALC n’a pas constaté de violations de la loi, mais a demandé des informations sur les dépenses de deux partis politiques. La loi sur les activités politiques n’exige pas de l’ALC de publier ses conclusions et ne précise pas les dates limites de publication de ses rapports après les élections. Cependant, de nombreux interlocuteurs ont fait part de leurs soupçons, craignant que la corruption continue malgré tout. A cet égard, le dernier rapport du GRECO sur la Serbie, publié en 2010, a soulevé des problèmes concernant l’application des règles de financement des campagnes électorales, le manque de transparence dans ce domaine et l’efficacité des sanctions contre les violations de la législation. La commission ad hoc de l’Assemblée, dans sa déclaration après les élections du 6 mai, a souligné: «En ce qui concerne la transparence du financement de la campagne, la délégation de l’APCE attend avec intérêt le rapport de l’Agence anti-corruption sur cette question».

3. Administration des élections et enregistrement des listes et des candidats présidentiels

17. La Serbie dispose d’une administration électorale à plusieurs niveaux: la Commission électorale de la République (CER), une commission électorale provinciale en Voïvodine, deux commissions électorales pour les métropoles de Belgrade et de Niš, 160 commissions électorales municipales et 8 588 bureaux de vote. De plus, 38 bureaux de vote ont été ouverts dans 22 pays étrangers.
18. Le 30 avril 2012, les autorités de Belgrade et de Pristina ont trouvé un accord concernant le vote des citoyens de la Serbie résidant au Kosovo. Conformément à cet accord, largement salué par la communauté internationale, tout le processus électoral sur le territoire du Kosovo a été organisé par la mission de l’OSCE, qui a ouvert 28 bureaux de vote au Kosovo le jour du scrutin où les citoyens serbes ont pu participer aux élections législatives et à l’élection présidentielle. Ensuite, le personnel de la mission de l’OSCE a transféré les bulletins de vote dans deux centres de dépouillement qui se trouvaient dans les villes de Raska et Vranje – en Serbie. Une équipe de la commission ad hoc de l’Assemblée a fait le déplacement à Raska et a constaté que le processus électoral s’est déroulé dans des conditions calmes.
19. La CER se compose d’un président et de 16 membres (et de leurs suppléants) désignés par l’Assemblée nationale. Cette dernière désigne également un secrétaire sans voix délibérative, ainsi qu’un membre sans voix délibérative représentant l’Office national des statistiques. Dans sa composition étendue, la CER comprend en outre un représentant de chaque entité présentant une liste de candidats enregistrés. La grande majorité des interlocuteurs rencontrés par la commission ad hoc ont exprimé leur appui à la CER et se sont dits confiants dans son fonctionnement.
20. En décembre 2011, la nouvelle loi sur le registre électoral uniforme est entrée en vigueur. Elle prévoit l’établissement d’une liste électorale nationale uniforme informatisée. Pour la première fois, les élections du 6 mai 2012 ont eu lieu sur la base de cette liste. Le ministère de l’Administration publique et de l’Autonomie locale a établi la liste électorale nationale sur la base des listes électorales municipales informatisées, tenues auparavant par des autorités municipales et par le ministère de l’Intérieur sous différents formats électroniques. Les électeurs ont été invités à vérifier les données les concernant figurant sur les listes entre le 14 mars et le 20 avril 2012. Selon les données de la CER, à la date du 3 mai, 6 770 013 électeurs étaient inscrits sur le registre national uniforme informatisé. Cependant, la MLOE de l’OSCE/BIDDH a constaté un certain manque de transparence dans le processus de l’établissement du registre électoral.
21. L’Assemblée nationale de Serbie se compose de 250 députés élus pour quatre ans dans une circonscription nationale unique. Les sièges sont répartis proportionnellement entre les listes qui ont obtenu plus de 5 % des suffrages. La règle des 5 % ne s’applique pas aux partis des minorités. Toutefois, les dirigeants des partis politiques disposent toujours d’une marge de manœuvre, il est vrai limitée après le changement de la législation électorale en 2011, concernant leur liste de candidats, dans la mesure où les candidats élus peuvent mettre leurs mandats à la disposition de leurs partis.
22. Actuellement, en Serbie, il existe 89 partis politiques enregistrés selon la loi sur les partis politiques qui a été adoptée en 2009. Environ deux millions de serbes sont adhérents à des partis politiques, ce chiffre ayant augmenté d’environ 70 000 personnes en 2012. D’une manière générale, l’enregistrement des listes de candidats a respecté le pluralisme, puisque la CER a enregistré 28 listes présentées par 7 coalitions (41 partis politiques et 2 associations), 9 partis politiques et 2 groupes de citoyens.
23. Environ 17% de la population de la Serbie ont déclaré faire partie des 20 minorités nationales lors du recensement de 2002. La loi sur les partis politiques exige 1 000 membres pour établir un parti politique représentant une minorité nationale, tandis que pour un parti ordinaire, il faut dix fois plus de membres. Pour les élections législatives du 6 mai 2012, quatre listes de partis et deux coalitions des minorités nationales ont été enregistrées. Des représentants de différentes minorités nationales ont également été enregistrés sur les listes d’autres partis politiques et d’autres coalitions.
24. Quant à l’élection présidentielle, 12 candidats ont été enregistrés pour participer à l’élection, dont le Président sortant Boris Tadić, de la Coalition pour une vie meilleure; Tomislav Nikolić, Président du Parti progressiste serbe; Ivica Dačić, ministre de l’Intérieur représentant le Parti socialiste de Serbie; Vojislav Koštunica, du Parti démocratique de Serbie; Čedomir Jovanović du Parti libéral démocrate. Parmi les candidats présidentiels il y avait deux femmes, ainsi qu’un représentant de la minorité hongroise et le mufti de la région du Sandžak.

4. La campagne électorale et l’environnement médiatique

25. La campagne a commencé le 13 mars pour les élections législatives et le 5 avril pour l’élection présidentielle. Durant la campagne le climat politique a généralement été paisible. La campagne est devenue plus intense lors des deux dernières semaines. Les questions qui ont dominé la campagne étaient le chômage et le développement socio-économique, la privatisation et la lutte contre la corruption, l’intégration européenne et, dans une bien moindre mesure, le Kosovo. D’une manière générale, la campagne pour les élections législatives et celle de l’élection présidentielle ont été marquées par la confrontation entre les deux principaux candidats à l’élection présidentielle, M.Tadić et M. Nikolić.
26. La commission ad hoc a été informée par certains représentants de partis politiques et d’ONG, de cas d’achat de voix, notamment parmi la population Rom, surtout dans les localités rurales, de l’utilisation abusive des ressources administratives et de cas isolés d’intimidation des électeurs. A cet égard, la commission ad hoc demande aux autorités compétentes du pays de faire toute la lumière sur ces allégations afin d’établir les responsabilités et d’en informer l’opinion publique. La commission ad hoc est convaincue qu’il faut à tout prix éviter que de telles pratiques se reproduisent lors de futures échéances électorales.
27. Deux jours avant le scrutin, des personnes d’origine albanaise ont été arrêtées au sud de la Serbie – dans les localités de Bujanovac, Veliki Trnovac et Breznica, y compris un candidat aux élections locales. Selon les autorités serbes, les personnes arrêtées auraient été impliquées dans les crimes de guerre de 2001. La commission ad hoc n’ayant pas les moyens de vérifier les faits, elle s’interroge néanmoins sur le moment choisi pour arrêter ces personnes, sur la couverture médiatique de cet événement ainsi que sur le fait que l’arrestation ait été annoncée par le ministre de l’Intérieur qui était lui-même candidat à l’élection présidentielle.
28. Le paysage médiatique de la Serbie est très diversifié et reflète toutes les tendances de l’opinion publique. Le cadre juridique de la couverture médiatique de la campagne est établi par la loi sur l’élection des représentants et la loi sur la radiodiffusion. Cette dernière a instauré une autorité de régulation, l’Agence de radiodiffusion de la République, dotée de pouvoirs étendus dans divers domaines en rapport avec les médias. La commission ad hoc a constaté avec satisfaction que l’Agence nationale de radiodiffusion a veillé à ce que les partis politiques bénéficient d'un temps d'antenne libre et égal et que les règles relatives aux publicités commerciales soient respectées. Par contre, la communication politique sur internet devrait respecter le code de déontologie des élections.
29. L’un des problèmes majeurs dans le domaine des médias est le manque de transparence concernant les propriétaires des médias. Différents interlocuteurs ont souligné le phénomène d’interconnexion étroite entre la politique et les flux financiers. La commission ad hoc a été informée de cas de pressions économiques et politiques exercées sur des journalistes. Selon le rapport de monitoring des médias de la MLOE de l'OSCE/BIDDH, le candidat à l’élection présidentielle, M. Tadić, a bénéficié davantage de la couverture médiatique avant le début de la campagne officielle. D’une manière générale, certains des interlocuteurs de la commission ad hoc ont exprimé leurs doutes concernant l’indépendance et l’objectivité des médias.

5. Le jour du scrutin

30. Le jour du scrutin a été calme. Les membres de la commission ad hoc ont visité 182 bureaux de vote et ont pu relever que le scrutin s’est déroulé de façon organisée. Les opérations de vote et de dépouillement ont été conduites, en général, avec professionnalisme et dans le calme. Il a été rapporté que la coopération entre les personnes composant les équipes des bureaux de vote a été sans faille et que leur connaissance des procédures de vote était satisfaisante.
31. Les membres de la commission ad hoc ont identifié un certain nombre de problèmes techniques dans les bureaux de vote visités:
  • la conception des isoloirs – particulièrement la fragilité des cloisons – n’était pas de nature à assurer le secret du vote. Néanmoins, aucune tentative pour tirer profit de cette anomalie n’a été mentionnée. Ce même problème a déjà été signalé lors de l’observation des élections en 2008;
  • la présence d’un nombre considérable de personnes dans les bureaux de vote. Parfois, ce nombre dépassait 20 personnes. En effet, la composition très ouverte des bureaux de vote a contribué à la transparence et à la fiabilité du processus électoral. Toutefois, elle a eu pour conséquence un encombrement des locaux, notamment au moment de l’ouverture des urnes et du dépouillement;
  • de façon générale, les bureaux de vote n’étaient pas accessibles aux personnes handicapées. Néanmoins, ces dernières pouvaient voter depuis chez elles (bureaux de vote mobiles);
  • dans certains des bureaux de vote visités, les urnes n’étaient pas correctement scellées;
  • des cas de non respect des procédures de dépouillement dans certains bureaux de vote ont été observés, notamment dans les localités rurales;
  • de longues files d’attente ont été observées dans certains bureaux de vote dans les localités à population albanophone ou à population mixte. Les listes électorales étant en cyrillique, toutes les personnes composant les équipes des bureaux de vote ne pouvaient pas lire les noms des électeurs, ce qui a retardé le processus de vote;
  • dans certains bureaux de vote, les listes électorales n'avaient pas été établies par ordre alphabétique.
32. 32. Le 7 mai 2012, la CER a annoncé les résultats provisoires des élections législatives. Les partis et les coalitions ont obtenu les résultats suivants: Parti progressiste serbe (Coalition «La Serbie en mouvement») – 24,1 %; Parti démocratique (Coalition «Choix pour une vie meilleure») – 22,4 %; Parti libéral démocrate – 6,33 %; Parti des régions unifiées de Serbie – 5,51 %; Parti socialiste de Serbie – 14,4 %; Parti démocratique de Serbie – 6,9 %; Coalition hongroise de Voïvodine – 1,9 %.
33. A l’occasion du premier tour de scrutin de l’élection présidentielle, le candidat DS, Boris Tadić, et le candidat du Parti progressiste serbe, Tomislav Nikolić, ont recueilli le plus grand nombre de voix: 26,7 % pour Boris Tadić et 25,5 % pour Tomislav Nikolić. Les autres candidats ont obtenu les résultats suivants: Zoran Dragisic (Indépendant) – 21,7 %; Ivica Dacic (Parti socialiste de Serbie) – 15,3 %; Vojislav Kostunica (Parti démocratique de Serbie) – 7,7 %. Aucun des candidats n’ayant obtenu plus de 50 % des suffrages exprimés, un second tour a été prévu le 20 mai 2012, opposant les deux candidats comptabilisant le plus de voix. Le taux de participation des élections a été d’environ 58 %, ce qui montre l’intérêt des électeurs vis-à-vis du scrutin.
34. La commission ad hoc a considéré qu’il ne serait pas nécessaire d’observer le deuxième tour de l’élection présidentielle compte tenu du fait que le jour du scrutin n'a pas suscité de problèmes majeurs et d’autant plus que la mission limitée d’observation électorale de l’OSCE/BIDDH allait suivre de près le scrutin sur place. Selon les résultats provisoires annoncés par la CER le lendemain du deuxième tour, Tomislav Nikolić a gagné l’élection présidentielle avec 49,55 % des suffrages exprimées, son adversaire Boris Tadić a obtenu 47,30 % des suffrages exprimés.
35. Le taux de participation au second tour de l’élection présidentielle du 20 mai 2012 a été 46,37 %.

6. Conclusions et recommandations

36. La commission ad hoc a conclu que les élections législatives et présidentielles du 6 mai 2012 tenues en Serbie ont satisfait à la plupart des normes du Conseil de l’Europe en matière d’élections démocratiques. Les citoyens ont choisi librement parmi un grand nombre de partis et de candidats à la présidence. Le jour du scrutin a été calme. Les membres de la commission ad hoc ont visité 182 bureaux de vote et ont pu relever que le scrutin s’est déroulé d’une manière organisée et que les opérations de vote et de dépouillement ont été conduites, en général, avec professionnalisme et dans le calme.
37. La commission ad hoc a souligné l’importance de la participation des citoyens serbes résidant au Kosovo aux élections législatives et présidentielles en Serbie et, à cet égard, elle a salué les efforts déployés par la communauté internationale ainsi que par Belgrade et Pristina.
38. La commission ad hoc a noté avec satisfaction que les autorités de la Serbie on suivi les recommandations contenues dans le rapport de l’Assemblée sur l’observation des élections de 2008. Le cadre juridique modifié constitue une base crédible pour mener des élections démocratiques. La commission invite cependant les autorités serbes à améliorer la législation électorale conformément aux recommandations conjointes de la Commission de Venise et de l’OSCE/BIDDH, et ceci avant les prochaines élections nationales.
39. La loi sur le financement des activités politiques adoptée en 2011 peut constituer une avancée vers la création d'un système moderne et complet de financement des activités politiques en Serbie à condition que l’Agence de lutte contre la corruption de la Serbie dispose de moyens humains et financiers nécessaires pour surveiller leur financement de manière adéquate et transparente. La commission ad hoc considère que la loi sur les activités politiques devrait être modifiée afin d’inclure l’obligation pour l’Agence anti-corruption de publier ses rapports après les élections dans un délai impératif, ainsi des sanctions en cas de violation des règles de financement des campagnes électorales.
40. La commission ad hoc a noté que la couverture médiatique de la campagne électorale aurait dû être plus équilibrée. Elle a également exprimé son inquiétude concernant le manque de transparence relative aux propriétaires des médias et à l’interconnexion étroite entre la politique et les flux financiers. La commission ad hoc a été informée par différents interlocuteurs de cas de pressions économiques et politiques exercées sur des journalistes. N’ayant pas les moyens de vérifier les faits, la commission ad hoc demande aux autorités compétentes du pays de faire toute la lumière sur ces allégations afin d’établir les responsabilités, de mettre en œuvre des sanctions adéquates, et d’en informer l’opinion publique du pays. La commission ad hoc est convaincue qu’il faut à tout prix éviter que de telles pratiques se reproduisent lors de futures échéances électorales.
41. Pour améliorer encore le processus électoral en Serbie, la commission ad hoc invite les autorités serbes:
  • à améliorer, de façon générale, l’aménagement des bureaux de vote, y compris l’équipement technique, afin de mieux les adapter au déroulement du scrutin;
  • à améliorer la conception des isoloirs pour renforcer la confidentialité du vote;
  • à rendre les bureaux de vote accessibles aux personnes handicapées;
  • à étudier la possibilité d’établir une seule liste électorale en caractères cyrilliques et latins dans les localités ayant une population mixte afin d’accélérer la recherche des noms des électeurs et d’éviter ainsi les encombrements dans les bureaux de vote;
  • à établir les listes électorales dans l’ordre alphabétique dans tous les bureaux de vote;
  • à améliorer la qualité des scellés sur les urnes;
  • à organiser des formations pour les membres des bureaux de vote, notamment en milieu rural, afin d’améliorer leur maîtrise des procédures de vote.

Annexe 1 – Composition de la commission ad hoc

(open)

Sur la base des propositions faites par les groupes politiques, la commission ad hoc se composait comme suit:

  • Jean-Charles GARDETTO, Chef de la délégation
  • Groupe du Parti populaire européen (PPE/DC)
    • Jean-Charles GARDETTO, Monaco
    • Marietta de POURBAIX-LUNDIN, Suède
    • Kimmo SASI, Finlande
    • Stefaan VERCAMER, Belgique
    • Luca VOLONTÈ, Italie
  • Groupe socialiste (SOC)
    • Josette DURRIEU, France
    • Jonas GUNNARSSON, Suède
    • Hakon HAUGLI, Norvège
    • Tadeusz IWIŃSKI, Pologne
    • Patrick MORIAU, Belgique
    • Indrek SAAR, Estonie
    • Lord TOMLINSON, Royaume-Uni
    • Zoran VUKCEVIC, Monténégro
  • Groupe démocrate européen (GDE)
    • Mevlüt ÇAVUŞOĞLU, Turquie
  • Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE)
    • Bernard MARQUET, Monaco
    • Fazil MUSTAPHA, Azerbaïdjan
    • Andrea RIGONI, Italie
  • Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise)
    • Serguei KOUZNETSOV, Administrateur, Division des élections et des referendums
  • Secrétariat
    • Chemavon Chahbazian, Adjoint au chef du secrétariat, Unité de coopération parlementaire et d’observation des élections
    • Franck Daeschler, Assistant administratif principal

Annexe 2 – Programme de l’observation des élections législatives et de l’élection présidentielle anticipée

(open)

Vendredi 4 mai 2012

08h15-08h45 Réunion de la Commission ad hoc:

  • Ouverture de la réunion et présentation des résultats de la mission préélectorale par M. Jean-Charles Gardetto, chef de la délégation
  • Interventions d'autres membres de la mission préélectorale
  • Les développements récents dans le domaine de la législation électorale et les activités de la Commission de Venise en Serbie, intervention du membre du secrétariat de la Commission de Venise
09:00-09:15 Ouverture de la réunion commune de la mission internationale d’observation des élections:

9h15-10h30 Intervention de la mission limitée de l’OSCE/BIDDH:

  • Mme Corien Jonker, Chef la mission limitée d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH
  • Membres de l’équipe de l’OSCE/BIDDH
10:00-10:05 Intervention de Mme Slavica Đukić-Dejanović, Présidente du Parlement de la Serbie et Présidente par intérim

10h30-11h00 Parti démocratique (PD) – M. Nenad Konstantinović, Directeur du service juridique du PD

11h00-11h30 Parti socialiste de Serbie (PCS) – Marijana Vukomanović, Vice-President du PCS

11h30-12h00 Parti progressiste de Serbie (PPS) – M. Marko Đurić, Membre de la direction du PPS

12h00-12h30 Parti liberal-démocrate (PLD) – Mme Judita Popović, Membre de la direction du parti, Vice-Présidente du Parlement

12h30-13h00 Parti démocratique de Serbie (PDS) – M. Slobodan Samardžić, Vice-président du PDS

14h30-15h00 Parti des régions unifiées de Serbie (RUS) – Mme Suzana Grubješić, Vice-Présidente

15h00-16h00 Questions des minorités nationales:

  • M. Vladimir Bilandžić, Conseiller spécial chargé des questions des mesures de confiance et de sécurité, bureau de la mission de l’OSCE en Serbie
  • M. Vitomir Mihajlović, Président du Conseil national des Roms
16h00-17h00 – M. Marko Blagojević, Directeur du Centre pour les élections libres et démocratiques (CESID)

18h00 Réception offerte par S.E. Armando Varricchio, Ambassadeur de l’Italie en Serbie

Samedi 5 mai 2012

09h15-09h45 Réunion de la commission ad hoc: Déploiement et questions logistiques

10h00-10h30 M. Miodrag Petrović, Membre de la Commission électorale de la République

10h30-11h30 Rencontre avec des représentants des médias:

  • M. Saša Mirković, Directeur TV B92
  • M. Zoran Stanojević, Editeur, Radio Télévision de Serbie
  • M. Predrag Mihailović, Adjoint de l’éditeur exécutif du quotidien Blic
  • M. Dragan Janjić, Vice-président de l’Association des journalistes indépendants
  • Mme Dragona Solomon, mission de l’OSCE
11h30-12h30 Rencontre avec des représentants des ONG:

Dimanche 6 mai 2012

Toute la journée Observation des élections

Lundi 7 mai 2012

09h00-10h00 Réunion de la commission ad hoc: débriefing, évaluation des élections

10h30-11h30 Réunion des Chefs de délégation

13h30 Conférence de presse (Media Centre)

Annexe 3 – Déclaration de la Mission internationale d’observation des élections (MIOE)

(open)

Serbie: des élections ouvertes et fortement concurrentielles, mais une plus grande transparence est nécessaire

Strasbourg, 07.05.2012 – Les élections législatives et l’élection présidentielle anticipée tenues le 6 mai 2012 en Serbie se sont déroulées dans un contexte d’ouverture et de concurrence, mais des efforts supplémentaires sont nécessaires pour améliorer la transparence du processus électoral et le fonctionnement des médias, ont estimé les observateurs internationaux dans une déclaration publiée aujourd’hui.

Les observateurs ont noté que les électeurs disposaient d’un large choix entre différentes options politiques et que les candidats avaient pu faire campagne librement. La plupart des parties prenantes se sont montrées très confiantes dans le professionnalisme de l’administration électorale. Le jour du scrutin, les commissions se sont acquittées de leurs fonctions avec professionnalisme. Certains problèmes procéduraux ont été relevés, mais aucun incident grave ne s’est produit.

La propriété des médias manque de transparence et la couverture médiatique devrait être plus équilibrée et plus analytique.

La création d’un seul registre électoral unifié est une mesure positive, mais dont l’application a commencé tardivement. Il semble en outre que le registre n’ait pas été établi en toute transparence.

«Ces élections ont été ouvertes et concurrentielles, grâce aux réformes législatives mises en œuvre ces dernières années. Je suis heureux de pouvoir dire que les citoyens serbes progressent sur la voie d’une démocratie accomplie qui leur permettra de relever les défis qui les attendent», a déclaré Matteo Mecacci, le coordinateur spécial qui conduisait la mission d’observation à court terme de l’OSCE.
«Les élections tenues en Serbie ont satisfait à la plupart des normes du Conseil de l’Europe en matière d’élections démocratiques. Les citoyens ont choisi librement parmi un grand nombre de partis et de candidats à la présidence. Toutefois, la couverture médiatique aurait pu être plus équilibrée. En ce qui concerne la transparence du financement de la campagne, la délégation de l’APCE attend avec intérêt le rapport de l’Agence anticorruption sur cette question», a déclaré Jean-Charles Gardetto, chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE).
«La délégation salue les efforts déployés par la communauté internationale ainsi que par Belgrade et Pristina, qui ont permis aux citoyens serbes du Kosovo* d’exercer leur droit de vote», a-t-il ajouté.
Corien Jonker, chef de la mission restreinte d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH, a déclaré: «Nous sommes heureux que les élections se soient déroulées dans le calme. Nous nous réjouissons également de voir que le processus électoral inspire largement confiance. En même temps, il ressort clairement de notre mission d’observation à long terme qu’une plus grande transparence est essentielle pour maintenir et accroître encore cette confiance, indispensable à une démocratie dynamique. Les citoyens ont ici un rôle primordial à jouer en réclamant davantage d’ouverture de la part de leurs institutions».

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* Toute référence au Kosovo dans le présent document, qu’il s’agisse de son territoire, de ses institutions ou de sa population, doit être entendue dans le plein respect de la Résolution 1244 du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies, sans préjuger du statut du Kosovo.