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Rapport | Doc. 13009 | 04 septembre 2012

La consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur

Commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias

Rapporteur : M. Rafael HUSEYNOV, Azerbaïdjan, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 12289, Renvoi 3696 du 25 juin 2010. 2012 - Quatrième partie de session

Résumé

Le Conseil de l'Europe a posé les bases de l'une des plus importantes réformes dans le domaine de l'éducation au XXe siècle, la création de l'Espace européen de l'enseignement supérieur (EEES). Etudiants, enseignants et personnel universitaire peuvent avoir accès aux meilleurs programmes universitaires à l'échelle européenne. L'enseignement supérieur devient progressivement sans frontières et joue un rôle plus important en rapprochant les peuples européens sur la base de valeurs communes.

L’adhésion aux principes fondamentaux de l'EEES, tels que la liberté académique, l'autonomie et la participation des étudiants, détermine le degré d'ouverture internationale de l'EEES. Les pays désireux d'améliorer la coopération avec les membres de l'EEES, ou d’en devenir membres, doivent s'assurer du respect de ces valeurs fondamentales par le biais de leurs politiques et de leurs pratiques.

La consolidation de l'EEES entraînerait des possibilités accrues d'accès à un enseignement supérieur de bonne qualité et assurerait l'égalité d'accès. Des programmes de financement durables et des régimes de visa améliorés, éliminant les obstacles administratifs à la mobilité académique, sont essentiels pour le succès de l'EEES.

Les Etats membres doivent s'assurer que l'Europe reste attrayante comme destination pour l'enseignement supérieur. Ils doivent construire un espace européen de l'enseignement supérieur cohérent dans un cadre élaboré en commun et qui préserve la richesse et la diversité des systèmes nationaux.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 29 mai 2012.

(open)
1. L'Assemblée parlementaire réaffirme son soutien au Processus de Bologne et à l’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES) comme garant d'un développement social durable fondé sur la connaissance et la recherche. Elle se félicite du rôle important que joue le Conseil de l’Europe dans ce processus, ainsi que des efforts permanents déployés par les Etats membres pour établir en Europe un système efficace d’enseignement supérieur à la hauteur des défis du XXIe siècle.
2. Toutefois, l'Assemblée estime que de nouvelles actions s’imposent pour renforcer l’EEES et pour le rendre plus ouvert et attrayant. L’Europe a beaucoup à offrir mais aussi beaucoup à apprendre des autres régions du monde; il est nécessaire de prendre dûment en considération la perspective mondiale et son influence sur l’enseignement supérieur en Europe.
3. L’enseignement supérieur doit armer les étudiants de compétences leur permettant de trouver un emploi durable, de devenir des citoyens actifs dans des sociétés démocratiques et de pouvoir relever les défis auxquels ils seront confrontés dans la vie. L’Europe doit demeurer un lieu où talent et savoir sont préservés, développés et valorisés, et où l’excellence de l’enseignement supérieur et de la recherche attire les étudiants d’origines et de milieux multiples. Enseignants et chercheurs doivent être mieux préparés à une plus forte coopération internationale.
4. L’efficacité de la coopération internationale dépend de la mobilité universitaire. Pourtant, bon nombre de gouvernements ont pour politique de réduire l’immigration et semblent peu enclins à faire des exceptions pour la mobilité universitaire. Il est nécessaire d’harmoniser les objectifs déclarés par l’EEES et par les politiques nationales d’immigration. Cette question est d’autant plus importante que près de la moitié des Etats membres de l’EEES ne font pas partie de l’Espace Schengen.
5. Il faut encourager une plus forte coopération bilatérale et multilatérale entre les pays participant à l’EEES et les autres, tant à l’échelon politique au sens large qu’à l’échelon des établissements individuels.
6. L'Assemblée réaffirme son soutien aux principes qui déterminent l’appartenance à l’EEES – tels l’engagement envers la liberté académique, l’autonomie des universités et la participation des étudiants – et elle appelle les pouvoirs publics des pays souhaitant renforcer la coopération avec des membres de l’EEES, ou souhaitant en devenir membre, à garantir le respect des valeurs fondamentales à travers leurs politiques et leurs pratiques, et à résister à toute tentative pour limiter ou contrôler la liberté académique par l'ingérence du gouvernement.
7. La réussite de la mise en œuvre et le bon fonctionnement de l’EEES requièrent la participation active et le soutien de tous les acteurs impliqués dans le Processus de Bologne. Les gouvernements, les établissements d'enseignement supérieur et les associations d'étudiants sont représentés dans le Processus, tandis que les parlements nationaux ne le sont pas encore. Ces derniers doivent être pleinement impliqués dans le Processus. En outre, l'Assemblée parlementaire et le Parlement européen doivent être représentés aux conférences ministérielles du Processus de Bologne.
8. Les parlements nationaux doivent apporter tout le soutien politique nécessaire à la mise en œuvre de l’EEES. En la matière, l’élaboration des politiques doit s’efforcer d’élargir l’aire géographique des pays partageant les objectifs du Processus de Bologne, et de rendre l’EEES plus ouvert et intéressant pour les initiatives de coopération mondiale. En outre, pour améliorer la mobilité universitaire, une plus forte implication parlementaire devrait contribuer à attirer un soutien des ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères chargés de définir les politiques d’immigration, tant au niveau national qu’européen.
9. En conséquence, l'Assemblée invite les Etats membres du Conseil de l’Europe à mener les actions suivantes:
9.1. veiller à ce que le Conseil de l’Europe demeure un partenaire actif du Processus de Bologne et à ce qu’il contribue, par le biais de la Dimension extérieure du Processus, à la coopération avec d’autres pays;
9.2. continuer à soutenir le développement de l’EEES et assurer la mise en œuvre cohérente des objectifs de Bologne dans l’ensemble de l’EEES et, en particulier:
9.2.1. mener les réformes structurelles encore nécessaires – notamment, examen de la législation et des règlements nationaux, mise au point des cadres de qualifications – en encourageant la participation de toutes les parties prenantes;
9.2.2. renforcer la coordination et fournir une assistance mutuelle afin de réduire les disparités dans le rythme de mise en œuvre;
9.2.3. envisager la possibilité de fournir des bourses ou des contributions forfaitaires pour compléter l’investissement des étudiants qui, sinon, n’auraient pas les moyens d’accéder à l’enseignement supérieur, tout en assurant un contrôle rigoureux de la distribution des bourses;
9.3. favoriser la mobilité et les échanges des étudiants, enseignants, chercheurs et responsables universitaires et, à cet effet:
9.3.1. prendre des mesures pour réduire encore les obstacles administratifs à la mobilité internationale – par exemple, ceux qui empêchent l’obtention de visas, d’une couverture sociale et de permis de séjour/travail pour le personnel;
9.3.2. assurer, au terme d’un programme de mobilité, une réelle reconnaissance des qualifications acquises à l’étranger;
9.3.3. assurer un financement adéquat et l’accès à ce financement par le biais de programmes de mobilité à l’échelon européen;
9.4. mettre en œuvre le Système européen de transfert et d’accumulation de crédits (ECTS), ainsi que prendre des mesures pour améliorer la compatibilité et la comparabilité des diplômes et, en particulier:
9.4.1. harmoniser le contenu des crédits pris en compte dans l’ECTS, notamment par une évaluation claire des crédits de ceux-ci en termes de charge de travail de l’étudiant et par une mise en correspondance directe avec les résultats de l’apprentissage;
9.4.2. mettre en œuvre le dispositif Supplément au diplôme Europass;
9.5. encourager la mise en œuvre effective des principes et des dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe et de l’UNESCO sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE n° 165) et intensifier la coopération avec les pays candidats à l'adhésion;
9.6. développer la communication et diffuser toutes les informations pertinentes sur l’EEES, tant en interne qu’en externe;
9.7. renforcer la coopération et le partenariat avec les pays n’appartenant pas à l’EEES, en incitant à l’échange d’idées neuves et au partage des bonnes pratiques.

B. Projet de recommandation 
			(2) 
			Projet
de recommandation adopté à l’unanimité par la commission le 29 mai
2012.

(open)
1. L'Assemblée parlementaire, se référant à sa Résolution … (2012) sur la consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur, salue les initiatives prises par le Comité des Ministres pour renforcer le dialogue entre les pouvoirs publics, le monde universitaire, les représentants étudiants et la société civile en vue de mieux définir la contribution du Conseil de l’Europe au Processus de Bologne. L'Assemblée salue également la représentation de l’Organisation dans le Groupe de suivi du Processus de Bologne, ainsi que l’assistance apportée pour élaborer des cadres de qualifications nationaux dans plusieurs Etats membres du Conseil de l’Europe.
2. L'Assemblée est convaincue que le rôle du Conseil de l’Europe dans le secteur de l’enseignement supérieur est crucial et irremplaçable. Malgré le contexte budgétaire actuel difficile et les contraintes qu’il impose, le Conseil de l’Europe doit continuer de soutenir les réformes de l’enseignement supérieur qui visent à satisfaire aux objectifs du Processus de Bologne et à renforcer l’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES).
3. Se référant à sa Résolution … (2012) sur la gouvernance des institutions d’enseignement supérieur, l'Assemblée souligne qu’il est important de préserver et de renforcer l’indépendance des institutions d’enseignement supérieur et la liberté académique en tant que principes fondamentaux de l’EEES.
4. En conséquence, l'Assemblée invite le Comité des Ministres:
4.1. à témoigner de l’importance stratégique de l’enseignement supérieur à travers ses décisions sur le programme d’activités du Conseil de l’Europe, et à continuer d’assurer la participation active du Conseil de l’Europe à la mise en œuvre de l’EEES et au Processus de Bologne;
4.2. à demander à son comité directeur compétent:
4.2.1. d’étudier la relation et l'interaction entre les cadres de qualifications, la reconnaissance des qualifications et l'assurance de la qualité, et d'identifier les mesures nécessaires pour assurer la cohérence dans la mise en œuvre des instruments de l'EEES;
4.2.2. d’étudier les possibilités de concevoir un dispositif paneuropéen permettant de faciliter la reconnaissance des qualifications – tel qu’un passeport européen de qualifications;
4.2.3. d’envisager des moyens de favoriser l’échange de bonnes pratiques entre pays membres et non membres de l’EEES en matière de réforme de l’enseignement supérieur;
4.3. à renforcer la coopération avec l’Union européenne dans ce domaine, afin d’apporter un soutien ciblé à la consolidation de l’EEES dans les pays membres ayant adhéré récemment, ainsi qu’à la réalisation des objectifs du Processus de Bologne, notamment en termes de mobilité académique.

C. Exposé des motifs, par M. Huseynov, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. A la suite de la proposition de recommandation sur l’extension de l’Espace européen de l’enseignement supérieur à tous les pays (Doc. 12289), présentée par M. Luca Volontè et plusieurs de ses collègues, la commission de la culture, de la science et de l’éducation m’a nommé rapporteur le 10 octobre 2010 
			(3) 
			Je saisis l’occasion de remercier
la professeure Marina Lebedeva et Mme Maria
A. Chepurina de l’Institut public des relations internationales
de Moscou pour leur coopération lors de la préparation de ce rapport.. Un schéma de rapport a été présenté à la commission à Zagreb le 13 mai 2011 et l’intitulé du rapport a été changé. La commission a pris sa décision définitive sur l’intitulé du rapport, comme il apparaît ci-dessus, lors de sa réunion des 23 et 26 juin 2012. Mme Marina Lebedeva (Moscou) a été chargée d’élaborer un rapport de base, examiné à Paris le 6 décembre 2011. Une note introductive a été présentée et examinée le 5 mars 2012, à Paris, lors de l’audition organisée conjointement avec l’UNESCO, avec la participation des personnes suivantes: l’ambassadeur Arif Mammadov, président du Groupe de rapporteurs du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe sur l’éducation, la culture, le sport, la jeunesse et l’environnement (GR-C); M. Pavel Zgaga, directeur du Centre pour les études sur les politiques éducationnelles (université de Ljubljana); M. Germain Dondelinger, coordinateur de l’enseignement supérieur, ministère de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (Luxembourg); Mme Anette Pieper de Avila, consultante, Section de l’enseignement supérieur (UNESCO); Mme Anna Glass, secrétaire générale, Observatoire Magna Charta (Bologne); Mme Ligia Deca, coordinatrice, secrétariat roumain du Groupe de suivi du Processus de Bologne (Bucarest); enfin, M. Frank Petrikowski, Unité de l’enseignement supérieur, Direction générale de l’éducation et de la culture, Commission européenne (Bruxelles) 
			(4) 
			Voir le document AS/Cult/Inf
(2012) 5..
2. La création de l’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES) 
			(5) 
			<a href='http://www.ehea.info/'>www.ehea.info</a>. constitue un progrès substantiel dans la coopération internationale entre les établissements d’enseignement supérieur dans le cadre du Processus de Bologne, qui a été lancé en 1999. Elle contribue à mettre plus fortement la réforme de l’enseignement supérieur sur l’agenda politique général, parmi les domaines désignés comme devant faire l’objet de réformes structurelles, non seulement dans le secteur de l’éducation en tant que tel mais aussi dans de nombreux autres secteurs de l’action publique.
3. Certaines de ces réformes ne sont pas encore achevées et il existe encore d’importantes disparités parmi les Etats membres de l’EEES. La réussite de la mise en œuvre et le bon fonctionnement de l’EEES requièrent la participation active et le soutien de tous les acteurs impliqués dans le Processus de Bologne. Un cadre intergouvernemental constitue un outil efficace de prise de décision rapide et de promotion de la réforme, mais le succès de la mise en œuvre effective dépend du soutien apporté par les parlements nationaux, les établissements d’enseignement supérieur et les associations d’étudiants.
4. Le présent rapport vise à proposer des mesures spécifiques pouvant et devant être prises pour garantir la réalisation des objectifs de l’EEES. Approfondir la réforme de l’enseignement supérieur requiert détermination et engagement de la part des pouvoirs publics et des établissements d’enseignement supérieur. Cependant, en l’absence d’un soutien politique, un tel engagement ne saurait être durable. Il m’apparaît, par conséquent, que l’Assemblée parlementaire a un rôle à jouer pour assurer la durabilité de ce processus.
5. Je pense également que l’EEES ne doit pas devenir une forteresse excluant les pays non européens. Il doit rester ouvert et permettre aux étudiants, aux enseignants et aux chercheurs de poursuivre des programmes d’échanges internationaux avec des pays n’appartenant pas à l’EEES. Ainsi, le rapport propose d’ouvrir les processus ayant conduit à la création de l’EEES à des pays situés en dehors de l’aire géographique déjà couverte par le Processus de Bologne, sous la forme d’une communauté de pratiques apte à permettre de nouveaux progrès et à favoriser le développement de la coopération internationale dans un cadre global.
6. Les travaux antérieurs de la commission dans ce domaine ont abouti à la Recommandation 1892 (2009) de l'Assemblée sur la contribution du Conseil de l'Europe au développement de l’Espace européen de l’enseignement supérieur, élaborée par notre éminent défunt collègue, Andrew McIntosh, précédée de la Recommandation 1620 (2003) sur la contribution du Conseil de l’Europe à l’espace de l’enseignement supérieur et de la Recommandation 1762 (2006) sur la liberté académique et l’autonomie des universités.
7. Le secteur intergouvernemental du Conseil de l'Europe est étroitement associé au Processus de Bologne et à l’EEES. Ses plus récentes contributions concrètes sont résumées dans le document soumis à la réunion du Groupe de suivi de Bologne (BFUG), qui s’est tenue les 17 et 18 mars 2011 à Gödöllö (Hongrie) 
			(6) 
			Voir <a href='http://www.ehea.info/Uploads/Irina/BFUG_HU_AD_24_13a CoE update.pdf'>www.ehea.info/Uploads/Irina/BFUG_HU_AD_24_13a%20CoE%20update.pdf</a>..

2. De la coopération européenne en matière d’enseignement supérieur à l’EEES

2.1. Normalisation de l’enseignement supérieur – un aperçu historique

8. L’enseignement supérieur est considéré depuis longtemps comme un facteur déterminant dans la création d’un environnement propice à l’intégration européenne. La coopération européenne en matière d’enseignement supérieur a commencé essentiellement grâce à trois traités du Conseil de l'Europe: la Convention européenne relative à l’équivalence des diplômes donnant accès aux établissements universitaires (STE no 15) (1953), la Convention européenne sur l’équivalence des périodes d’études universitaires (STE no 21) (1956) et la Convention européenne sur la reconnaissance académique des qualifications universitaires (STE no 32) (1959). Une autre étape importante en la matière a été franchie grâce à l’Accord européen sur le maintien du paiement des bourses aux étudiants poursuivant leurs études à l’étranger (STE no 69) (1969). Les trois premières conventions de Paris ont été largement actualisées en 1997 par le biais de la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE no 165, «Convention de reconnaissance de Lisbonne»), élaborée par le Conseil de l'Europe avec le concours de l’UNESCO 
			(7) 
			Voir <a href='http://conventions.coe.int/treaty/fr/Treaties/Html/165.htm'>http://conventions.coe.int/treaty/fr/Treaties/Html/165.htm</a>..
9. Avec l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne de l’Union européenne en décembre 2009, le rôle de l’Union européenne concernant les politiques éducatives a été clairement défini à l’article 165 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qui énonce que:
«L’Union contribue au développement d’une éducation de qualité en encourageant la coopération entre Etats membres et, si nécessaire, en appuyant et en complétant leur action tout en respectant pleinement la responsabilité des Etats membres pour le contenu de l’enseignement et l’organisation du système éducatif ainsi que leur diversité culturelle et linguistique. (…) L’action de l’Union vise à: (…) favoriser la mobilité des étudiants et des enseignants, y compris en encourageant la reconnaissance académique des diplômes et des périodes d’études, promouvoir la coopération entre les établissements d’enseignement, développer l’échange d’informations et d’expériences sur les questions communes aux systèmes d’éducation des Etats membres, (…) encourager le développement de l’éducation à distance. (…) L’Union et les Etats membres favorisent la coopération avec les pays tiers et les organisations internationales compétentes en matière d’éducation et de sport, et en particulier avec le Conseil de l'Europe.»
10. La Commission européenne est une source majeure de financement de la mobilité des étudiants entre les universités depuis la création du programme Erasmus en 1987, qui a permis à plus de deux millions d’étudiants de participer à des programmes d’échange au cours de ses deux premières décennies d'existence. Ce programme représente actuellement environ 40 % du Programme 2007‑2013 de l’Union européenne pour l’éducation et la formation tout au long de la vie, dont le budget total avoisine les sept milliards d’euros. En outre, la Commission européenne a créé le programme Erasmus Mundus en 2004, qui finance les échanges d’étudiants dans le cadre de formations de master d’un an ou deux dans des universités des pays de l’Union européenne et de l’EEE/AELE (Espace économique européen/Association européenne de libre-échange) pour les étudiants étrangers.
11. Des universités d’Europe et d’ailleurs coopèrent aussi directement dans le cadre de la Magna Charta Universitatum et de son observatoire situé à Bologne. La Magna Charta Universitatum est un texte politique qui a été ouvert à la signature des universités en 1988 à Bologne 
			(8) 
			Voir
www.magna-charta.org/library/userfiles/file/mc_french.pdf.. Elle énonce des principes de base concernant l’autonomie des université et la liberté académique et de la recherche.

2.2. L’EEES aujourd’hui

12. L’Espace européen de l’enseignement supérieur a été officiellement lancé lors de la Conférence ministérielle de Budapest et Vienne en mars 2010, à l’occasion de la célébration du 10e anniversaire du Processus de Bologne – une initiative politique proposée par plusieurs ministres européens de l’Education en 1999. L’EEES maintient cette structure de coopération politique multilatérale entre les ministres de l’Education d'à présent 47 Etats européens et du Saint-Siège. Les ministres de l’Education participants font régulièrement des déclarations politiques dans le cadre du Processus de Bologne. Les nouveaux Etats membres doivent adhérer à ces déclarations, qui ne sont pas, néanmoins, des traités juridiquement contraignants aux termes du droit public international.
13. L’Union européenne n’a pas signé les déclarations du Processus de Bologne. Néanmoins, l’article 165 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne désigne le Parlement européen et le Conseil européen comme étant les organes de l’Union chargés de concevoir des instruments pour soutenir le développement des politiques éducatives. Le pays qui préside le Conseil européen copréside également le Groupe de suivi de Bologne 
			(9) 
			En vertu d’une décision ministérielle
de 2009, le BFUG, responsable de l’administration générale du Processus
de Bologne, est présidé par deux Etats: le pays occupant la présidence
de l’Union européenne et un pays ne faisant pas partie de l’Union
européenne. Cette décision a permis de sortir du système uniquement
calqué sur la Présidence de l’Union européenne, qui excluait finalement
20 pays..
14. Le Conseil de l'Europe participe à l’EEES en tant que «membre consultatif» aux côtés du Centre européen pour l’enseignement supérieur de l’UNESCO (Bucarest), l’Association de l’Université européenne (EUA, Bruxelles), l’Association européenne des établissements d’enseignement supérieur (EURASHE, Bruxelles), l’Union des étudiants d’Europe (ESU, Bruxelles), l’Association européenne pour la garantie de la qualité dans l’enseignement supérieur (ENQA, Helsinki), l’Internationale de l’éducation (IE, Bruxelles) et Business Europe (Bruxelles) 
			(10) 
			Voir
l’organigramme présenté à l’annexe de la note introductive (AS/Cult
(2012) 10)..
15. L’EEES entend jeter des ponts entre les structures nationales et renforcer leur compatibilité, mais sans pour autant chercher à les harmoniser ni à développer un système européen d’enseignement supérieur unique. Durant la première décennie, le Processus de Bologne était axé sur les réformes structurelles: cadres de qualifications et systèmes de diplômes, avec adoption d’un système de diplômes faciles à comprendre et à comparer; assurance qualité et reconnaissance, avec établissement d’un Système européen de transfert et d’accumulation de crédits (ECTS), avec renforcement de la mobilité et de l’attrait en tant qu’objectifs transversaux. Au cours de cette période, la dimension sociale et la perspective mondiale de l’EEES ont progressivement gagné en importance.
16. Le principal impact du Processus de Bologne a été l’introduction, dans toute l’Europe, de diplômes de niveau licence au terme d’une période d’études de trois ans généralement ainsi que d’un système de crédits (ECTS) pour des études supérieures ou un certain nombre d'heures de travail par année universitaire, sur le modèle à la fois des systèmes de crédits instaurés bien avant par les universités des Etats-Unis et des systèmes de diplômes traditionnels des universités américaines et britanniques. La distinction entre les universités et d’autres établissements d’enseignement supérieur comme les instituts universitaires de technologie a été largement abolie en limitant le premier grade universitaire à un diplôme de licence obtenu au terme d’une période d’études de trois ans, au lieu de maintenir un premier grade universitaire sanctionnant une période d’études d’au moins quatre ans, ce qui était, jusque-là, le système le plus répandu en Europe continentale.
17. En outre, un grand nombre de ministères de l’Education et d'organisations non gouvernementales (ONG) concernées participant au Processus de Bologne ont créé, à Bruxelles, le Registre européen d’assurance qualité pour l’enseignement supérieur, qui met en place un réseau d’agences nationales de garantie de la qualité 
			(11) 
			L’assurance
qualité au sein de l’EEES, tout en respectant le principe de subsidiarité,
repose sur un terreau de valeurs et de principes communs et est
menée en s’appuyant, de manière spécifiquement européenne, sur des
processus professionnels rigoureux avec la participation de tous
les acteurs. La responsabilité de la qualité incombe en premier
lieu aux établissements eux-mêmes. La participation de tous les
acteurs pertinents, y compris les étudiants, aux processus d’assurance
qualité et aux organes chargés de l’assurance qualité est considérée
comme essentielle..
18. Le Processus de Bologne est devenu une institution dans un sens plus sociologique, ayant acquis une valeur et une légitimité au-delà de l’accomplissement de tâches concrètes. Il est le reflet d’une vision politique commune. S’agissant de l’élaboration des politiques, il s’est également avéré être un mécanisme de développement des politiques et de test des modes de coopération au sein de la communauté paneuropéenne élargie, intervenant sur un pied d'égalité et de manière bénévole, ce qui signifie qu’il n’existe pas de pouvoir supranational pour faire appliquer les réformes: c’est le pays lui-même qui décide des mesures à prendre.
19. Le Conseil de l’Europe établit le cadre géographique du Processus de Bologne par le biais de la Convention culturelle européenne (STE no 18). Toutefois, être Partie à celle-ci ne suffit pas pour être admis dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur, car les autorités compétentes doivent aussi adhérer aux valeurs et aux priorités du Processus de Bologne, notamment à ses valeurs fondamentales: liberté académique, autonomie institutionnelle et participation des étudiants – toutes constituant de solides valeurs du Conseil de l’Europe.

3. Défis que doit relever l’EEES

20. Douze ans après le lancement du Processus de Bologne et un an après celui de l’EEES, ce dernier se trouve confronté à plusieurs défis: les systèmes d’enseignement supérieur des 47 pays de l’EEES ont radicalement changé car la plupart des éléments structurels de l’Espace, c’est-à-dire ceux impliquant la législation et les règlements nationaux, sont au moins partiellement mis en œuvre, et presque toutes les réformes sont à présent en place. Toutefois, le degré de mise en œuvre des nouvelles structures varie quelque peu et, dans certains pays, les cadres de qualifications restent encore à finaliser. Il faut aussi tenir compte du fait que, parmi les résultats escomptés pour les objectifs clés de compatibilité, comparabilité et attrait, certains ne peuvent porter leurs fruits du jour au lendemain.

3.1. Disparités dans le rythme de mise en œuvre

21. Dix-huit pays ont adhéré au Processus de Bologne entre 2001 et 2010, ce qui a engendré des disparités dans le rythme de mise en œuvre aux niveaux des gouvernements nationaux et des établissements d’enseignement, certains pays et établissements restant à la traîne ou choisissant l’approche «à la carte». Comme l’EEES est un engagement politique pris par chaque pays participant, il n’y a aucun moyen d’imposer un fonctionnement ou des pratiques uniformes. En effet, le Processus de Bologne et l’EEES ont tous deux été conçus en tant que cadre non contraignant, une communauté de pratique dans laquelle la mise en œuvre de la réforme relève de la responsabilité de chaque pays. Tous les membres de l’EEES ne sont pas partis d’une même base, dans la mesure où certains disposaient déjà dans leur système d’enseignement supérieur de certains éléments similaires à ceux requis par le Processus de Bologne et n’ont eu ainsi qu’à procéder à des ajustements.
22. La Déclaration de Budapest-Vienne de 2010 souligne que les lignes d’action de l’EEES, telles que la réforme des diplômes et des programmes d’études, la garantie de la qualité, la reconnaissance, la mobilité et la dimension sociale, sont mises en œuvre à des degrés divers. Ces conclusions sont reprises dans le dernier rapport sur le bilan du Processus de Bologne (2009), qui démontre que les objectifs initiaux du Processus de Bologne, censés être atteints en 2010, se sont avérés trop ambitieux. En outre, compte tenu du caractère volontaire de la participation, certains pays n’ont pas toujours été en mesure ou fait suffisamment d’efforts pour suivre le rythme du Processus. Il reste ainsi plusieurs objectifs à réaliser pour pouvoir prétendre à un espace européen de l’enseignement supérieur véritablement cohésif.
23. Il importe d’assurer la mise en œuvre cohérente des «politiques de Bologne» dans l’ensemble de l’EEES, afin que celui-ci puisse s’affirmer comme un acteur mondial apte à renforcer l’attrait de l’enseignement supérieur européen. Une décision reste à prendre au sujet des pays qui sont encore très loin de la mise en œuvre des objectifs principaux. Ces pays doivent-ils être maintenus à l’intérieur de l’EEES, en ne bénéficiant que d’un soutien limité sous forme de conseils techniques fournis par d’autres pays membres, ou bien leur appartenance à l’EEES doit-elle être remise en cause?

3.2. Accroître la mobilité

24. La mobilité constitue l’un des principaux objectifs du Processus de Bologne. Les objectifs clés sont de renforcer l’attrait exercé par l’EEES aux yeux des étudiants de pays non membres de l’Espace ainsi que de dynamiser la circulation des étudiants et du personnel au sein de l’Espace lui-même. Le Communiqué de Louvain-la-Neuve a fixé pour objectif concret un taux de 20 % d’ici 2020. La mobilité des étudiants inclut la mobilité des crédits (des séjours relativement courts à l’étranger intégrés dans le cursus général des études) et la mobilité des diplômes, qui présuppose une période complète d’études menant à la remise d’un diplôme. L’ouverture interne de l’EEES se mesure à l’aune de la croissance de la mobilité intra-européenne des diplômes et de l’augmentation du nombre d’étudiants ayant bénéficié d’une période d’études ou de formation à l’étranger dans un autre pays de l’EEES.
25. La facilitation de la mobilité, point crucial pour la consolidation de l’EEES, est étroitement interconnectée avec une meilleure mise en œuvre d’autres processus comme la Convention de reconnaissance de Lisbonne, du Supplément au diplôme et du Système européen de transfert et d’accumulation de crédits, ainsi que des cadres de qualifications et des systèmes d’assurance qualité.
26. Malheureusement, le déséquilibre des flux de mobilité entre les Etats perdure. Les pays d’Europe occidentale restent les principaux destinataires d’étudiants étrangers de l’EEES, tandis que l’Europe de l’Est et la Turquie sont les principaux exportateurs de l’Espace. Le rapport 2012 sur la mise en œuvre du Processus de Bologne établit le taux de mobilité 
			(12) 
			Voir Image 7.1, p. 154 (<a href='http://eacea.ec.europa.eu/education/eurydice/documents/thematic_reports/138EN.pdf'>http://eacea.ec.europa.eu/education/eurydice/documents/thematic_reports/138EN.pdf</a>). des étudiants entrant dans les pays de l’EEES et montre des étudiants mobiles du monde entier venant dans un pays de l'EEES, mais excluant ceux provenant d'autres pays de l'EEES. Dans quatre pays, à savoir Chypre, le Royaume-Uni, la France et l'Irlande, le nombre de ces étudiants dépasse 5 % du total des étudiants enregistrés. Ainsi, ces pays semblent être les pays les plus attractifs pour les étudiants provenant de l'extérieur de l'EEES. A l'autre extrémité du spectre, dans 16 pays ce ratio reste en dessous de 1 %. La moyenne pondérée de tous les pays est de 2,25 %. Néanmoins, le volume global des étudiants entrants doit être également pris en considération. En effet, une image différente se dégage lorsqu'on examine la répartition des étudiants mobiles entrants par pays de destination 
			(13) 
			Ibid., Image 7.2, p. 155.. Quatre pays – le Royaume-Uni, la France, la Russie et l’Allemagne – attirent 76 % de tous les étudiants de l'extérieur de l'EEES. Il faut aussi signaler le cas particulier de petits pays comme le Luxembourg, Andorre et le Liechtenstein qui ne disposent que de capacités limitées d’enseignement supérieur et dont la proportion d’étudiants poursuivant leurs études à l’étranger est très élevée.
27. La République tchèque est un cas à part, aussi exceptionnel qu’instructif. Le pays a enregistré une augmentation de près de 400 % (passant de 1,2 % à 5,8 %) du nombre d’étudiants entrants de l’EEES entre 1999 et 2007. Le secret d’un tel succès réside dans la fourniture de services éducatifs gratuits aux étudiants étrangers qui suivent un programme d’études en langue tchèque, accompagnée d’un large éventail de bourses d’Etat, universitaires et régionales (comme, par exemple, les bourses du Fonds Višegrad). Les étudiants étrangers intéressés ont la possibilité d’entreprendre une formation rémunérée d’un an de maîtrise de la langue afin de pouvoir ensuite poursuivre gratuitement leurs études dans la langue nationale (le tchèque) auprès d’un établissement public ou d’Etat. Ce concept a permis au pays de s’internationaliser (c'est‑à-dire d’augmenter le nombre d’étudiants étrangers) et de promouvoir sa langue nationale.
28. Pour promouvoir la mobilité des étudiants venant de tous les pays de l’EEES, il faudra lever les obstacles, tels que les difficultés financières, les barrières en matière de visa et de langues ou les problèmes liés au manque d’informations appropriées et aux différences de calendrier universitaire. Les aspects positifs de la mobilité risquent aussi d’être compromis par la tendance à la fuite des cerveaux dans certains Etats de l’EEES, perçue comme une conséquence des échanges d’étudiants.
29. Les gouvernements européens ont approuvé le développement de la mobilité académique; cependant, de nombreux gouvernements ont adopté officiellement une politique de réduction de l’immigration et ne semblent guère prêts à autoriser des exceptions pour faciliter la mobilité des étudiants. Il existe, par conséquent, une incohérence entre les objectifs déclarés de l’EEES, dont tous les pays se sont engagés à assurer la réalisation par le biais de leurs ministres, et les politiques et pratiques nationales en matière d’immigration.
30. L’incohérence des processus décisionnels nationaux, lorsque les engagements pris par les ministres de l’Education dans le cadre de la coopération internationale ne sont pas soutenus par les ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères chargés de définir les politiques de l’immigration à la fois au niveau intérieur et au niveau européen, est un problème que l’implication des parlementaires peut aider à résoudre. La question est particulièrement importante et ne doit pas être négligée puisque près de la moitié des Etats membres de l’EEES ne font pas partie de l’Espace Schengen 
			(14) 
			La
coopération Schengen a été intégrée au cadre juridique de l’Union
européenne par le Traité d’Amsterdam de 1997. Voir <a href='http://biblio.ucv.ro/bib_web/bib_pdf/EU_books/0056.pdf'>http://biblio.ucv.ro/bib_web/bib_pdf/EU_books/0056.pdf</a>..
31. Il convient également de prêter une plus grande attention au développement de la mobilité des chercheurs et des professeurs au sein de l’EEES, une question actuellement négligée. Si un taux plus élevé de mobilité étudiante est un facteur clé de la construction d’une «Europe du savoir», le paradoxe d’une formation mondialisée et d’un enseignement localisé devrait être évité. L’internationalisation de la recherche et des publications scientifiques, conduite dans le cadre d’un programme commun par plusieurs universités de l’EEES, peut être l’une des premières mesures viables dans cette voie. Je salue, donc, le Communiqué de Bucarest 
			(15) 
			<a href='http://www.ehea.info/Uploads/%281%29/Bucharest Communique 2012%281%29.pdf'>www.ehea.info/Uploads/%281%29/Bucharest%20Communique%202012%281%29.pdf</a> (en
anglais uniquement)., adopté à la Conférence des ministres chargés de l'enseignement supérieur de l'EEES lors de la réunion des 26 et 27 avril 2012 
			(16) 
			<a href='http://bologna-bucharest2012.ehea.info/'>http://bologna-bucharest2012.ehea.info/</a>., qui appelle les Etats membres à promouvoir la qualité, la transparence, l'employabilité et la mobilité dans le troisième cycle, puisque l'éducation et la formation des candidats au doctorat a un rôle particulier à jouer pour réduire l'écart entre l'EEES et l'Espace européen de la recherche (EER).

3.3. Améliorer le Système européen de transfert et d’accumulation de crédits

32. La pierre angulaire du Processus de Bologne est la Convention de reconnaissance de Lisbonne de 1997, qui stipule que chaque Partie à la convention doit reconnaître «les qualifications délivrées par les autres Parties et qui satisfont, dans ces Parties, aux conditions générales d'accès à l'enseignement supérieur» (article 4(1)). En 2003, le Communiqué de Berlin a réaffirmé l’importance de la convention. A ce jour, des progrès considérables ont été réalisés en termes de respect des législations nationales à cet égard. Néanmoins, les pratiques actuelles en matière de reconnaissance, notamment au sein des établissements d’enseignement supérieur, montrent qu’il y a encore matière à amélioration 
			(17) 
			Rapport de bilan
2009..
33. Des diplômes lisibles et comparables supposent une structure des grades universitaires commune (bachelor (licence) – master – doctorat) qui, elle-même, nécessite le développement d’«outils» de Bologne communs, comme le Système européen de transfert et d’accumulation de crédits et le Supplément au diplôme. Aujourd’hui, l’ECTS, qui permet aux étudiants d’obtenir des crédits pour les formations menées durant leur période d’études et de valider automatiquement les cours suivis à l’étranger auprès de leur université d’origine sur la base des crédits ainsi gagnés, est pleinement opérationnel dans 36 Etats participants (Eurydice 2010). Le principal défi consiste à harmoniser le contenu des crédits pris en compte dans l’ECTS, d’où la nécessité de normes claires de mesure des crédits en terme de charge de travail de l’étudiant et une mise en relation non équivoque avec les résultats attendus de formation, alors qu’à l’heure actuelle les crédits sont principalement calculés sur la base des heures de contact (heures de présence aux cours).
34. Par ailleurs, le nombre d’heures requis pour obtenir un crédit varie significativement selon les pays: il est par exemple fixé à 20 heures en Norvège et à 10 en Espagne. Une mise en œuvre plus large de l’ECTS est également un facteur crucial de réalisation de l’un des objectifs les plus innovants et prospectifs du Processus de Bologne – la popularisation du processus d’éducation tout au long de la vie –, grâce auquel les étudiants qui n’ont pas été en mesure d’emprunter la voie traditionnelle dans l’enseignement supérieur auront la possibilité d’accumuler des crédits et d’obtenir un diplôme sur une plus longue période. Ce système semble avoir un fort potentiel compte tenu du fait que les employeurs actuels privilégient le savoir-faire des diplômés plutôt que la procédure d’acquisition de la qualification 
			(18) 
			Bergan, in P. Zgaga, Looking
out: the Bologna Process in a Global Setting, 2006..
35. Le deuxième instrument de la Boîte à outils de Bologne est le Supplément au diplôme, défini en tant que document officiel accompagnant le diplôme d’enseignement supérieur et décrivant la nature, le niveau, le contenu et le statut de la formation ainsi que les compétences et les connaissances acquises. Le Communiqué de Berlin stipule que chaque étudiant qui termine ses études devrait recevoir le Supplément au diplôme automatiquement, sans frais et dans une langue largement répandue en Europe. Alors que dans l’ensemble, des progrès ont été réalisés, seule la moitié des Etats membres a pleinement mis en œuvre cette mesure, les autres omettant de le délivrer automatiquement et à tous les diplômés, ou ne produisant pas un document standardisé facilement lisible.
36. Les Etats membre de l’EEES devraient s’assurer que l’instauration du Système européen de transfert et d’accumulation de crédits ne reste pas un exercice formel déconnecté des nouveaux développements comme les résultats de l’apprentissage et les cadres de qualifications. La reconnaissance du transfert de crédits, essentiel pour la promotion de la mobilité, doit être améliorée.
37. Un dispositif paneuropéen propre à faciliter la reconnaissance des qualifications (par exemple, un passeport européen de qualifications) pourrait être élaboré pour permettre de reconnaître l’apprentissage, tant formel que non formel, ainsi que de développer les compétences tout au long de la vie 
			(19) 
			Des propositions pour un
passeport européen de qualifications ont été faites dans les secteurs
de la construction (voir BASICON Qualification passport, http://cc.basicon.org/index/523/)
et de l’accueil – par la Fédération européenne des syndicats de
l’alimentation, de l’agriculture et du tourisme (EFFAT) et par l’Association
européenne des hôtels, restaurants et cafés en Europe (HOTREC) (<a href='http://www.hotrec.eu/cust/search.aspx?q=European%20Qualification%20passport'>www.hotrec.eu/cust/search.aspx?q=European%20Qualification%20passport</a>).. Ce type de document pourrait faire mention des qualifications certifiées (diplômes, par exemple), du parcours professionnel, des compétences professionnelles (acquises dans l’emploi mais non certifiées) et autres compétences (langues, informatique, etc.)

3.4. Autres questions

38. Afin de se développer, l’EEES doit sortir des limites de la coopération intergouvernementale pour recueillir un soutien politique plus large, notamment auprès des parlements nationaux, des établissements d’enseignement supérieur, des étudiants et du personnel enseignant. Les établissements d’enseignement supérieur doivent être mieux préparés à une concurrence accrue avec d’autres établissements tant au niveau national qu’international. Parallèlement, les enseignants et les chercheurs doivent être mieux préparés à une coopération internationale plus accrue.
39. Un cadre intergouvernemental constitue un outil efficace pour une prise de décision rapide et la promotion des réformes mais sa mise en œuvre concrète exige, pour réussir, que ce cadre soit approuvé par les parlements nationaux, les établissements d’enseignement supérieur et les associations d’étudiants. C’est la raison pour laquelle les membres de l’Assemblée parlementaire doivent être prêts à apporter tout le soutien politique nécessaire pour assurer la mise en œuvre des «politiques de Bologne» dans leurs pays respectifs.
40. Lors de l’audition sur les politiques éducatives, tenue à Paris le 5 mars 2012, Mme Ligia Deca, Coordinatrice du secrétariat roumain du Groupe de suivi du Processus de Bologne, a confirmé que les principaux objectifs de l’EEES pour les prochaines années ne pouvaient être réalisés sans une étroite coopération entre gouvernements, établissements d’enseignement supérieur et parties prenantes. Elle a également souligné que le dialogue mondial entre étudiants et personnel universitaire, de même que l’internationalisation des institutions d’enseignement supérieur, sont des éléments essentiels pour créer des liens dépassant les simples débats intergouvernementaux. A l’avenir, ce dialogue doit être intensifié et axé sur des sujets d’intérêt spécifiques 
			(20) 
			Voir le document AS/Cult/Inf
(2012) 5..

4. La consolidation et l’ouverture internationale de l’EEES

41. N’étant ni une forteresse européenne, ni une tour d’ivoire, l’EEES doit prendre en compte la mondialisation, en renforçant la coopération internationale en matière d’enseignement supérieur. La Convention de Lisbonne sur la reconnaissance des qualifications fournit une base juridique adéquate pour la coopération avec les Etats non européens. En effet, les Etats non européens signataires de cette convention devraient avoir la possibilité de coopérer plus étroitement avec les établissements d’enseignement supérieur au sein de l’EEES. Toutefois, bien qu’un éventuel élargissement géographique soit considéré d’un œil favorable, l’approfondissement du processus au sein des Etats déjà membres reste une priorité.
42. La consolidation de l’EEES est parfois interprétée comme une «normalisation». Même si le but est d’obtenir des structures de diplômes comparables, ce qui nécessite de mettre en place un certain système, cela ne doit pas conduire à une uniformité de l’enseignement supérieur européen. La grande force de l’EEES est sa riche diversité. Ainsi que l’a expliqué Anna Glass, chaque université, tout en promouvant les principes et valeurs académiques exposés dans la Magna Charta Universitatum, doit chercher à dispenser non pas le meilleur en général, mais le meilleur dans telle ou telle discipline, le meilleur pour tel ou tel objectif, le meilleur pour tel ou tel individu. Certification, accréditation et assurance de la qualité doivent prendre en compte la mission et les objectifs spécifiques d’une université donnée 
			(21) 
			Déclaration d’Anna Glass, secrétaire
générale de l’Observatoire Magna Charta, lors de l’audition du 5 mars
2012 à Paris (AS/Cult/Inf (2012) 5)..
43. La Déclaration de Bologne se donne pour objectif d’assurer que «le système européen d’enseignement supérieur exerce dans le monde entier un attrait». La consolidation de l’EEES grâce à l’approfondissement des processus de réforme et l’extension de l’aire géographique des pays partageant les buts du Processus de Bologne contribueront à accroître l’attrait de l’EEES et à le rendre plus ouvert aux initiatives de coopération mondiale. L’EEES se renforcera ainsi de l’intérieur, tout en bénéficiant du soutien du monde extérieur grâce à ses alliés.
44. La Stratégie relative à la dimension extérieure du Processus de Bologne – «L’Espace européen de l’enseignement supérieur dans un contexte mondial» 
			(22) 
			<a href='http://www.ehea.info/Uploads/Documents/Strategy-for-EHEA-in-global-setting.pdf'>www.ehea.info/Uploads/Documents/Strategy-for-EHEA-in-global-setting.pdf</a>. – constitue une base solide pour les propositions mises en avant dans ce rapport. La Stratégie n’exclut aucune région ni aucun pays du monde. Cependant, certains pays européens entretiennent des liens étroits avec des régions ou des pays particuliers hors d’Europe et il est probable qu’ils souhaiteront développer encore ces liens. La diversité des activités de coopération internationale de chaque pays et de chaque établissement d’enseignement supérieur dans le monde entier devrait être considérée comme une force et un atout pour l’EEES.
45. La Stratégie couvre les domaines d’action essentiels suivants, qui sont présentés plus en détail ci-dessous: améliorer l’information sur l’EEES; promouvoir l’enseignement supérieur européen afin d’en accroître l’attrait et la compétitivité au niveau mondial; renforcer la coopération sur la base du partenariat; intensifier le dialogue sur les politiques; développer la reconnaissance des qualifications.

4.1. Améliorer l’information sur l’EEES

46. Le Processus de Bologne présente un fort degré de visibilité en dehors de l’EEES. Il a contribué à renforcer l’attrait de l’Europe en tant que destination pour les étudiants et les universitaires d’autres régions du monde. La mobilité des étudiants convergeant depuis d’autres parties du globe vers l’EEES a augmenté de manière substantielle et plus rapidement qu’au plan mondial, les pays de l’EEES attirant 30 % du nombre total des étudiants étrangers en 2007 
			(23) 
			First decade of working on the EHEA, vol. 1,
2009.. Toutefois, cela ne veut pas dire que l’ensemble des acteurs concernés hors d’Europe sont suffisamment informés des aspects essentiels du Processus de Bologne. Dans de nombreux cas subsistent même des malentendus auxquels il convient de remédier. Il importe, par conséquent, de suivre de près la perception et l’évaluation du Processus de Bologne au niveau mondial, de manière à fournir des informations correctes sur l’EEES et à mieux faire connaître le «label de Bologne».
47. Malgré le lancement d’un site web consacré à l’EEES, les systèmes européens d’enseignement supérieur ne déploient que peu d’efforts pour traduire dans les faits la «personnalité» juridique du Processus, la plupart des pays préférant promouvoir au plan international leur propre système d’enseignement supérieur plutôt que l’EEES dans son ensemble 
			(24) 
			Rapport de bilan 2009.. Il semblerait que la situation soit amenée à changer dans un avenir proche, un nombre croissant d’établissements d’enseignement supérieur de l’EEES proposant des programmes en anglais et des conditions financières favorables aux étudiants de pays extérieurs à l’Espace qui souhaitent suivre leurs programmes. Les diplômes conjoints intra-EEES et les programmes de mobilité entre des établissements plus ou moins renommés peuvent susciter l’intérêt des étudiants même pour des destinations traditionnellement moins populaires, à condition qu’elles offrent des services de bonne qualité à des prix modérés. Assurer la qualité comparative des normes éducationnelles est un prérequis essentiel pour rendre l’EEES plus ouvert et attrayant à l’échelon international.

4.2. Promouvoir l’enseignement supérieur européen afin d’en accroître l’attrait et la compétitivité au niveau mondial

48. L’Europe doit engager des efforts concertés afin de renforcer son attrait international pour les étudiants, les enseignants et les chercheurs du monde entier. A cette fin, tous les pays participant au Processus de Bologne devraient désigner un organisme qui serait principalement chargé de coordonner les activités de promotion de leurs systèmes et établissements d’enseignement supérieur au niveau international.
49. L’objectif d’un EEES à l’intérieur duquel les étudiants, le personnel et les détenteurs de qualifications pourront se déplacer librement pourra être atteint uniquement à l’aide de mesures relevant des politiques de l’enseignement supérieur. La réalisation de cet objectif important exige aussi l’assouplissement des procédures de délivrance des visas et la simplification de l’accès à une couverture sociale, et aussi la facilitation de l’octroi de permis de travail aux personnels concernés. Ces mesures n’entrent pas, bien entendu, dans les attributions des ministres chargés de l’enseignement supérieur mais elles relèvent des compétences des gouvernements des pays participant au Processus de Bologne.
50. Comme l’a souligné le Dr Anette Pieper de Avila, consultante à l’UNESCO, lors de l’audition sur les politiques éducatives qui s’est déroulée à Paris, l’«ouverture internationale» signifie une coopération avec des universités situées hors de l’EEES et dans des pays en développement. Une porte ouverte est une invitation à entrer, mais aussi une invitation à sortir, tout au moins quelque temps. Par conséquent, lorsque l’on parle d’ouverture internationale de l’EEES, l’attrait de cet Espace pour les étudiants et les chercheurs n’en faisant pas partie entre en jeu. Reste que, pour les étudiants et les enseignants de l’EEES, les possibilités de sortir et de coopérer avec des universités du monde entier sont tout aussi importantes. L’ouverture internationale ne doit jamais être vue comme une voie à sens unique – d’ailleurs l’UNESCO a vivement encouragé cette double dimension 
			(25) 
			Voir le document
AS/Cult/Inf (2012) 5..

4.3. Renforcer la coopération sur la base du partenariat

51. Outre les activités d’information et de promotion visant à mettre en valeur et à renforcer l’attrait de l’Europe, il est nécessaire de développer la coopération dans le domaine de l’enseignement supérieur avec les pays non membres de l’EEES dans un esprit de partenariat et de solidarité, afin d’en obtenir des bénéfices mutuels à tous les niveaux et en y incluant la gamme complète des programmes d’enseignement supérieur, y compris l’apprentissage tout au long de la vie.
52. Ce besoin de coopération et de partenariat s’étend à toutes les régions du monde, incluant aussi bien les pays hautement développés que les pays émergents et les pays en voie de développement. Cependant, la coopération avec les établissements d’enseignement supérieur des pays en développement a été et doit demeurer une tâche particulièrement importante des pays membres de l’EEES, afin d’accroître les capacités d’enseignement supérieur des pays en développement car cela constitue une condition déterminante de leur développement socio-économique.
53. A l’instar du programme Tempus lancé au début des années 1990 pour promouvoir l’idée d’un changement politique en Europe centrale et orientale, «l’esprit» de Bologne en termes de coopération et de partenariat peut également être partagé avec d’autres parties d’un monde de plus en plus interconnecté et ouvert. A cet égard, une étape cruciale a été franchie avec la création du Forum politique de Bologne, réuni pour la première fois en 2009, suivi du second Forum en 2010 (le troisième étant prévu en 2012).
54. La Chine examine soigneusement la synchronisation de la structure des grades universitaires entreprise en Europe ainsi que les mesures de renforcement de la mobilité, et s’inspire de l’expérience européenne pour élaborer son plan stratégique de l’enseignement supérieur jusqu’en 2020. L’Australie est allée au-delà en déclarant clairement qu’elle ne pouvait pas se permettre d’ignorer les changements opérés en Europe, au risque sinon de «rester sur le banc de touche» 
			(26) 
			D.
Illing, «European standard poses a challenge», The Australian, avril 2006.. Par conséquent, des projets de coopération renforcée ont été lancés entre des universités européennes et australiennes qui entretiennent déjà des liens étroits, mais également au sein de la région, ce qui a conduit ainsi à l’adoption du Communiqué de Brisbane de 2006, à l’origine de l’Espace d’enseignement supérieur de la région Asie‑Pacifique, qui couvre 52 pays.
55. Tous les acteurs doivent unir leurs forces pour créer les conditions-cadres requises, en particulier des échanges équilibrés ou des mesures visant à développer les capacités afin d’enrayer la fuite des cerveaux. Pour prendre en exemple l’une des initiatives récentes de l’Assemblée parlementaire, on pourrait suggérer d’étendre la coopération avec les pays qui obtiennent le statut de Partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire, de façon à y inclure la coopération dans le domaine de l’enseignement supérieur.
56. Il convient d’encourager une plus forte coopération bilatérale et multilatérale entre les pays participant à l’EEES et les autres, à la fois à l’échelon politique au sens large et au niveau des établissements individuels, notamment lorsque des liens historiques et culturels sont déjà en place. Le développement du projet d’Espace euro-méditerranéen de l’enseignement supérieur, bien complété par le Forum universitaire euro-méditerranéen, est par conséquent souhaitable. Ce type de coopération,, fondé sur un dialogue étroit et un partage des bonnes pratiques, profite non seulement aux pays directement impliqués mais aussi à l’ensemble de l’Espace, assurant une meilleure compréhension de ses valeurs et de son potentiel.
57. Un autre cas intéressant est l’espace russophone, qui dépasse les «frontières» de l’EEES. La Russie entretient des relations étroites et une coopération forte avec les systèmes d’enseignement supérieur d’Etats d’Asie centrale comme le Kirghizistan, l’Ouzbékistan et le Turkménistan, qui ne sont pas membres de l’EEES. Traditionnellement, leurs systèmes d’enseignement supérieur étaient quasi interconnectés avec les universités russes, mais le Processus de Bologne les a placés en marge. En ce sens, il est d’une importance cruciale de ne pas ériger de frontières artificielles mais de jeter un pont entre ces pays et la communauté élargie de l’EEES, susceptible également de jouer le rôle d’initiateur d’une réforme plus profonde dans la sphère de l’enseignement supérieur. En outre, le rythme et la qualité des réformes en Russie affectent d’autres pays dans cet espace. Par exemple, bien que la Fédération de Russie ait adhéré au Processus de Bologne en 2003, il n'y a toujours pas d’accès direct à l'enseignement supérieur après douze ans d'études. Cela a un impact négatif direct sur le système de la région de Transnistrie en République de Moldova, où les universités continuent d’appliquer les règles de la Fédération de Russie. Améliorer la mise en œuvre de la réforme de Bologne en Russie aurait, par conséquent, un impact positif ailleurs en Europe.
58. Il est également possible de promouvoir une plus grande ouverture et visibilité de l’EEES par l’intermédiaire des projets Tuning, mis en œuvre actuellement dans 60 pays du monde entier. Ces projets ont été lancés, en commençant par «Tuning Amérique Latine» en 2003, à la suite de la proposition formulée par des établissements d’enseignement supérieur d’Amérique latine d’initier un projet intercontinental s’inspirant de l’expérience du Processus de Bologne. Son objectif est d’«accorder» les établissements d’enseignement supérieur de la région, d’harmoniser leur cadre des qualifications et d’améliorer la compatibilité des programmes d’Amérique latine avec l’infrastructure européenne.
59. Cette expérience s’est révélée positive et a ouvert la voie à de nouveaux projets Tuning comme «Tuning Etats-Unis», «Tuning Australie» et «Tuning Afrique», qui a été lancé récemment. Aux Etats‑Unis, les systèmes d’enseignement supérieur de trois Etats (Indiana, Minnesota et Utah) ont établi des groupes d’étude pour examiner la possibilité d’appliquer l’expérience européenne aux établissements d’enseignement supérieur américains et de mettre à l’essai quelques-unes des procédures introduites en Europe. L’Utah est allé encore plus loin en adoptant une version adaptée du Supplément au diplôme en tant qu’outil d’information 
			(27) 
			C.
Adelman, «The Bologna Club: What U.S. Higher Education Can Learn
from a Decade of European Reconstruction», IHEP, 2008 (www.ihep.org/assets/files/TheBolognaClub.pdf)..
60. La coopération et les partenariats devraient être développés aussi bien de façon externe qu’interne. L’EEES pourrait bénéficier également de l’ouverture des établissements d’enseignement supérieur européens au monde socio-économique. Les universités ont noué des liens importants avec les acteurs économiques et sociaux de leur région. Ces liens se construisent via le développement de canaux professionnels, qui permettent à des professionnels de participer à l’enseignement et d’offrir aux étudiants des stages en entreprises, la participation des universités à la formation continue et l’établissement de contrats de recherche.

4.4. Intensifier le dialogue sur les politiques

61. Le Processus de Bologne a eu jusqu’ici et continuera d’exercer un fort impact sur l’architecture mondiale de l’enseignement supérieur, non seulement sous l’angle de la mobilité des étudiants mais aussi sous celui de l’élaboration des politiques. Il serait utile de systématiser et d’élargir le dialogue sur les politiques déjà engagé avec les gouvernements et les parties prenantes de pays non membres de l’EEES sur l’introduction de la réforme de l’enseignement supérieur et sur l’innovation, afin d’échanger de nouvelles idées et des bonnes pratiques. La participation d’acteurs de pays non membres de l’EEES aux séminaires de Bologne constitue une méthode à envisager à cet égard. Une autre possibilité serait l’organisation conjointe, en plusieurs langues, de conférences et de séminaires sur des questions d’intérêt commun.
62. Le dialogue sur les politiques devrait avoir lieu autour des forums existants et déjà bien rodés comme les conférences ministérielles de Bologne et les Forums politiques de Bologne (depuis 2009, le Forum est organisé en marge des conférences ministérielles; un certain nombre de pays non européens sont invités à ce Forum), sans que cela n’implique néanmoins une reconnaissance formelle de la part de l’EEES.
63. La coopération avec l’UNESCO devrait être renforcée afin de permettre un dialogue sur les politiques avec d’autres régions du monde. Toutefois, cela exige des ressources. Les coupures budgétaires récentes résultant des politiques d’austérité qui affectent les programmes d’échange de l’enseignement supérieur vont mettre un terme à toute une série d’initiatives, en faisant perdre à l’Europe de son élan dans la réforme de l’enseignement supérieur et en rendant plus difficile à long terme de répondre aux défis dans un contexte mondial.
64. L’Union européenne soutient déjà très activement le Processus de Bologne 
			(28) 
			Voir le projet de rapport «Moderniser
les systèmes d’enseignement supérieur en Europe», M. László Tőkés, commission
de la culture et de l’éducation, Parlement européen (2011/2294(INI)). et elle devrait donc être impliquée de façon systématique dans l’élaboration des politiques touchant à la mise en œuvre de l’EEES. Le développement d’une économie fondée sur le savoir – qui constitue l’un des objectifs essentiels de l’Union européenne – ne sera possible qu’à condition que le transfert des connaissances ne soit pas entravé par des obstacles administratifs, comme par exemple les différences entre systèmes de visa, ou par des réglementations empêchant l’obtention d’un permis de résidence et de travail.
65. L’Assemblée devrait agir pour que le Conseil de l’Europe demeure un partenaire actif du Processus de Bologne, notamment en ce qui concerne la Dimension extérieure du processus, qui définit les modalités de coopération avec les pays non membres du Conseil de l’Europe.

4.5. Développer la reconnaissance des qualifications

66. La reconnaissance des qualifications est un élément clé pour faciliter la mobilité vers, depuis et à l’intérieur de l’EEES. Développer des politiques et des pratiques favorisant une reconnaissance équitable des qualifications constitue, par conséquent, une composante essentielle de la Stratégie pour l’Espace européen de l’enseignement supérieur dans un contexte mondial 
			(29) 
			<a href='http://www.ehea.info/Uploads/Documents/Strategy-for-EHEA-in-global-setting.pdf'>www.ehea.info/Uploads/Documents/Strategy-for-EHEA-in-global-setting.pdf</a>.. La reconnaissance des qualifications devrait également conduire à un traitement équitable des conférenciers visiteurs, en leur assurant le même salaire qu’aux ressortissants du pays hôte. La différence de revenu, si elle est significative, peut agir comme un obstacle et décourager la mobilité d’étudiants du troisième cycle.
67. A l’intérieur de l’EEES, la reconnaissance des qualifications repose sur la Convention de reconnaissance de Lisbonne (Conseil de l’Europe/UNESCO, 1997) et ses quatre textes subsidiaires. Ce cadre légal est mis en œuvre au moyen des politiques et des pratiques développées à l’échelon national – notamment, depuis 2007, les plans d’action nationaux du Processus de Bologne – et, en particulier, dans le cadre du réseau ENIC-NARIC coordonné conjointement par le Conseil de l’Europe, la Commission européenne et l’UNESCO-CEPES (Centre européen pour l'enseignement supérieur).
68. Deux traits importants se dégagent de l’évolution actuelle des politiques: premièrement, un déplacement d’accent des procédures et aspects formels de l’enseignement supérieur au profit des résultats de l’apprentissage; deuxièmement, une meilleure compréhension commune de la notion d’«écarts substantiels», c’est-à-dire des différences entre qualifications pouvant entraîner une reconnaissance partielle ou une non-reconnaissance. Une priorité accrue devrait aussi être accordée à la reconnaissance de l’apprentissage antérieur.

5. Remarques finales

69. Les Etats membres devraient faire tout ce qui est en leur pouvoir pour maintenir l’attrait de l’Europe en tant que destination pour les études supérieures. Pour ce faire, les gouvernements européens doivent faciliter la mobilité des étudiants et des enseignants. Ils doivent construire un espace d’enseignement supérieur européen cohérent, reposant sur un cadre conçu en commun et apte à préserver la richesse et la diversité des systèmes nationaux.
70. Le Traité de Lisbonne de l’Union européenne mentionnant explicitement le rôle du Conseil de l’Europe dans le domaine de l’éducation, les organes du Conseil de l’Europe devraient renforcer leur action au bénéfice de l’EEES. Le Comité des Ministres et les conférences ministérielles spécialisées, ainsi que l’Assemblée parlementaire, la Conférence des ONG internationales et le Forum européen de la jeunesse, devraient jouer un rôle plus actif à cet égard.
71. Compte tenu du principe de la liberté académique et de l’autonomie des universités 
			(30) 
			Voir Recommandation 1762 (2006) de l’Assemblée
sur la liberté académique et l’autonomie des universités., il importe de considérer les établissements d’enseignement supérieur comme des acteurs clés de l’EEES. Les normes relatives aux diplômes et aux filières ne devraient pas être imposées d’en haut. Les établissements de l’enseignement supérieur doivent déterminer ces conditions de manière plus approfondie, car ils sont les mieux à même de connaître les problèmes systématiques et les attentes des étudiants. Le mot clé doit être celui de subsidiarité.
72. L’Accord européen sur le maintien du paiement des bourses aux étudiants poursuivant leurs études à l'étranger devrait être réactivé et éventuellement amendé, car il pourrait aider tout particulièrement les étudiants des pays non membres de l’Union européenne et être élargi aux pays non européens.
73. Etant le seul traité international en ce domaine, la Convention de reconnaissance de Lisbonne (Conseil de l’Europe/Unesco) devrait devenir une convention mondiale, afin de permettre les échanges d’étudiants au-delà de l’Europe. Cette convention a déjà été ratifiée par l’Australie, le Bélarus, le Saint-Siège, Israël, le Kazakhstan, la République kirghize, la Nouvelle-Zélande et le Tadjikistan et signée par le Canada et les Etats-Unis. Il conviendrait, par conséquent, de faire plus pour inciter d’autres pays dans le monde à adhérer à cette convention.
74. L’ouverture internationale de l’EEES permettrait non seulement de stimuler et de faciliter les contacts et la coopération mais tendrait aussi aux Européens un miroir leur permettant de mieux percevoir les enjeux auxquels ils sont confrontés. En outre, le désir d’ouverture internationale conduirait à une modernisation des approches pédagogiques au niveau national.
75. L’ouverture internationale ne doit jamais être vue comme une voie à sens unique. D’une part, étudiants et chercheurs n’appartenant pas à l’EEES sont invités à entrer et, d’autre part, pour les étudiants et enseignants faisant partie de l’EEES, les possibilités de sortir pour coopérer avec des universités du monde entier sont tout aussi importantes. Cette double dimension de l’ouverture internationale doit être soutenue par tous les acteurs.
76. La participation accrue de l’ensemble des acteurs au fonctionnement et à la mise en œuvre de l’EEES est absolument essentielle, car le développement de l’Espace ne peut plus procéder uniquement d’une coopération intergouvernementale fermée. Tous ceux qui sont concernés et impliqués dans le processus ne doivent pas participer uniquement en tant que sujets mais en qualité d’acteurs autonomes dont la contribution enrichit l’ensemble du processus.
77. Les potentialités offertes par une plus grande participation des autorités locales et régionales ne doivent pas non plus être négligées. L’enseignement supérieur et la recherche sont au cœur du développement économique, social et culturel. Ils constituent des facteurs d’attrait et de développement pour les villes et les régions et ont un rôle déterminant à jouer dans les progrès de l’innovation et de la société du savoir au XXIe siècle en Europe.
78. Le Conseil de l’Europe devrait jouer un rôle actif dans le développement de l’EEES. Fort de sa participation et de l’expertise déjà apportée en Arménie, en Bosnie-Herzégovine, au Kazakhstan et en Ukraine, le Conseil de l’Europe dispose des outils et des capacités nécessaires pour stimuler la compréhension du Processus de Bologne au niveau gouvernemental, mais aussi au niveau du citoyen ordinaire, et aider les pays à mener à bien leurs réformes.