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Rapport | Doc. 13291 | 20 août 2013

La participation d'Etats non membres aux conventions du Conseil de l'Europe

Commission des questions juridiques et des droits de l'homme

Rapporteur : M. Rafael HUSEYNOV, Azerbaïdjan, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 12667, Renvoi 3793 du 3 octobre 2011. 2013 - Commission permanente de novembre

Résumé

La valorisation de l’acquis conventionnel du Conseil de l'Europe et la promotion de ces conventions auprès des Etats non membres contribuent à accroître la visibilité de l’Organisation, sa dimension politique et sa capacité à trouver sa place et à jouer son rôle de gardien des droits de l’homme et de la démocratie, non seulement en Europe, mais également dans le nouvel espace de liberté actuellement en expansion autour de ses frontières.

Seules 41 des 213 conventions du Conseil de l'Europe sont effectivement fermées aux Etats non membres, mais rares sont ceux qui ont effectivement ratifié les instruments de l’Organisation qui leur sont ouverts.

La mondialisation a eu des conséquences sur l’activité normative du Conseil de l'Europe, car plusieurs de ses conventions traitent de questions qui concernent non seulement le territoire de ses Etats membres, mais qui peuvent également avoir une portée mondiale. Parmi ces questions figurent notamment la lutte contre le terrorisme, le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, la traite des êtres humains, l’exploitation sexuelle des enfants et la cybercriminalité. C'est la raison pour laquelle, sous réserve de certaines conditions, certaines conventions devraient être ouvertes à la participation des Etats non membres.

Compte tenu de ce qui précède, il importe que le Conseil de l'Europe conserve ses normes exigeantes et que celles-ci ne soient pas mises en péril par des Etats qui ne les partagent pas, tant pour les conventions déjà en vigueur qui sont ou doivent être ouvertes à l’adhésion des Etats non membres que pour les conventions futures.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 23 avril
2013.

(open)
1. Le Conseil de l'Europe a joué un rôle de premier plan dans l’adoption de conventions visant à garantir le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de la prééminence du droit dans ses Etats membres. Certaines conventions du Conseil de l'Europe traitent de questions qui concernent également les Etats non membres, comme la lutte contre le terrorisme, le blanchiment de capitaux, la traite des êtres humains et la protection des données à caractère personnel.
2. La majorité des conventions du Conseil de l'Europe sont ouvertes aux Etats non membres, mais rares sont ceux qui ont profité de cette possibilité.
3. Compte tenu de la nécessité de préserver et de consolider ses normes et valeurs, il importe que le Conseil de l'Europe promeuve l’adhésion d’Etats non membres aux conventions pertinentes.
4. Le Conseil de l'Europe devrait privilégier les Etats qui ont déjà été invités à adhérer aux instruments du Conseil de l'Europe, mais qui ne l’ont pas encore fait. Les mesures suivantes pourraient être envisagées:
4.1. organiser des conférences, séminaires et ateliers de formation consacrés à des sujets traités par les instruments pertinents du Conseil de l'Europe;
4.2. organiser, dans le cadre de sessions ou conférences ministérielles, une cérémonie au cours de laquelle les instruments du Conseil de l'Europe seront signés et/ou ratifiés;
4.3. aborder la question de l’adhésion aux conventions du Conseil de l'Europe à l’occasion de visites à haut niveau dans les Etats pertinents, en particulier les Etats qui jouissent du statut d’observateur auprès du Conseil de l'Europe et ceux dont les parlements jouissent du statut d’observateur ou de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire;
4.4. communiquer des informations sur les conventions pertinentes par l’intermédiaire des bureaux du Conseil de l'Europe qui assurent la liaison avec les organisations internationales;
4.5. établir des contacts aux niveaux politique et technique dans le cadre de la Politique de voisinage et des nouveaux programmes de coopération du Conseil de l'Europe avec les pays de la région méditerranéenne et d’Asie centrale.
5. Pour ce qui est des futurs instruments du Conseil de l'Europe, les bureaux de l’Organisation qui assurent la liaison avec les organisations internationales devraient mettre en place une «procédure d’alerte» visant à informer les organisations internationales et les Etats non membres concernés de l’ouverture des négociations de nouvelles conventions du Conseil de l'Europe susceptibles de prévoir l’adhésion d’Etats non membres.

B. Projet de recommandation 
			(2) 
			Projet
de recommandation adopté à l’unanimité par la commission le 23 avril
2013.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire renvoie à sa Résolution … (2013) sur la participation d’Etats non membres aux conventions du Conseil de l'Europe et réaffirme son point de vue selon lequel il convient de privilégier les Etats qui ont déjà été invités à adhérer aux instruments de l’Organisation, mais qui ne l’ont pas encore fait.
2. En sus des mesures mentionnées dans la Résolution …(2013), l’Assemblée invite le Comité des Ministres:
2.1. à réfléchir à l’octroi aux Etats non membres du statut d’observateur auprès des comités intergouvernementaux chargés de la mise en œuvre et/ou de la surveillance des conventions auxquelles ces Etats peuvent adhérer;
2.2. à envisager, en guise de mesures à prendre avant l’adhésion, la négociation d’accords bilatéraux ou de mémorandums d’accord avec les Etats non membres, qui précisent les contributions financières de ces derniers destinées à la mise en œuvre des conventions;
2.3. à permettre aux Etats non membres qui ont été invités à adhérer à une convention, mais qui ne l’ont pas encore fait, d’être autorisés – avec l’accord de l’ensemble des Parties à la convention – à participer aux travaux intergouvernementaux relatifs à la modification d’un tel instrument.

C. Exposé des motifs, par M. Huseynov, rapporteur

(open)

1. Introduction

1.1. Procédure

1. Le 3 octobre 2011, l'Assemblée parlementaire a décidé de renvoyer à la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, pour rapport, la proposition de résolution «L'adhésion d’Etats non membres aux conventions du Conseil de l'Europe» 
			(3) 
			Doc. 12667.. Lors de sa réunion du 16 novembre 2011, la commission m'a désigné rapporteur. Le 11 décembre 2012 à Paris, la commission a procédé à l’audition des experts suivants:
  • M. Guy De Vel, ancien directeur général des Affaires juridiques, Conseil de l’Europe
  • M. Rolf Fife Einar, directeur général du service des Questions juridiques, ministère des Affaires étrangères, Norvège

1.2. Le champ d’application du rapport

2. Le présent rapport vise à examiner les modalités selon lesquelles le Conseil de l'Europe ouvre ses conventions aux Etats non membres. L’ouverture de plus de conventions du Conseil de l'Europe aux Etats non membres pourrait les aider à renforcer leurs normes relatives aux droits de l’homme et le respect de l’Etat de droit, mais il convient de trouver un juste équilibre entre cette idée de départ et la garantie que le respect des normes de l’Organisation ne sera pas compromis par les Etats qui ne partagent pas ses valeurs.
3. Les travaux préparatoires de ce rapport ont montré que la participation des Etats non membres fait rarement l’objet de débats et d’analyses approfondis et que très peu de ces Etats ont adhéré aux conventions du Conseil de l'Europe.
4. Lorsque le Conseil de l’Europe élabore puis adopte une convention, il peut décider de l’ouvrir à la participation d’Etats qui ne sont pas membres de l’Organisation. Si des Etats non membres ont participé aux négociations relatives à l’instrument en question, ils peuvent en général de plein droit le ratifier et en devenir Partie. D’autres Etats non membres du Conseil de l’Europe et n’ayant pas participé aux négociations peuvent demander à être invités à y adhérer si la convention le prévoit. Il semble que l’intitulé actuel de la proposition de résolution ne tienne pas compte de cette distinction. C'est la raison pour laquelle j’ai proposé de modifier l'intitulé du rapport comme suit: «La participation d’Etats non membres aux conventions du Conseil de l'Europe». La commission a accepté ma proposition le 11 décembre 2012.
5. Je n’ai pas traité la question de l’adhésion de l’Union européenne aux conventions du Conseil de l'Europe, car j’estime qu’elle sort du cadre du présent rapport, dans la mesure où l’élargissement du champ d’application des conventions au‑delà de l’espace juridique européen commun devrait être distinct de l’adhésion de l’Union européenne à ces conventions. Ce dernier point exige de réfléchir davantage à la répartition des compétences entre l’Union européenne et ses propres Etats membres et aux obligations juridiques nées des traités du Conseil de l'Europe.

2. Vue d’ensemble de la situation actuelle

2.1. Le niveau d’adhésion des Etats non membres aux conventions du Conseil de l'Europe

6. Seules 41 des 213 conventions du Conseil de l'Europe sont effectivement fermées aux Etats non membres, principalement parce qu’elles traitent de questions institutionnelles qui ne les concernent pas (par exemple le Statut du Conseil de l’Europe (STE n° 1) et l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe (STE n° 2) et ses six protocoles). Toutes les autres conventions autorisent les Etats non membres à y être Parties de plein droit (cette faculté est ouverte aux Etats qui jouissent d’un statut d’observateur auprès du Conseil de l'Europe, aux Etats qui ont pris part à l’élaboration des conventions ou aux Etats qui sont Parties aux conventions connexes) ou sur invitation du Comité des Ministres, à leur demande. La quasi-totalité des conventions essentielles, à l’exception de la Convention européenne des droits de l’homme (STE n° 5), de la Charte sociale européenne (révisée) (STE n° 139) et de leurs protocoles respectifs, sont ouvertes aux Etats non membres. Mais rares sont les Etats non membres à avoir effectivement ratifié les instruments du Conseil de l'Europe 
			(4) 
			S’agissant des Etats
qui jouissent d’un statut d’observateur, le Canada a ratifié deux
des 27 conventions auxquelles il est habilité à devenir Partie,
le Japon une sur 20, le Saint‑Siège six sur 34, le Mexique trois
sur 18 et les Etats‑Unis d’Amérique trois sur 26. 33 autres Etats
sont Parties de plein droit ou ont été invités par le Comité des
Ministres à devenir Parties à une ou plusieurs conventions du Conseil
de l’Europe. Ce chiffre englobe les Etats Parties aux conventions conclues
en coopération avec d’autres organisations internationales, comme
la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives
à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE n° 165),
qui est ouverte aux Etats membres de la région Europe de l’Organisation
des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO)
et aux Etats Parties aux autres conventions du Conseil de l’Europe
ou de l’UNESCO. Rares sont les conventions auxquelles plus de 10
Etats non membres sont Parties de plein droit ou ont été invités
par le Comité des Ministres à devenir Parties, la plus connue d’entre
elles étant la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées
(STE n° 112), qui a été ratifiée par 18 Etats non membres, et la
Convention sur la cybercriminalité (STE n° 185), à laquelle 12 Etats
non membres ont le droit de participer de plein droit ou ont été
invités par le Comité des Ministres à devenir Parties. et les conventions auxquelles ils participent ont été pour la plupart ouvertes à la signature avant 1990, c’est‑à‑dire avant que l’Organisation ne s’ouvre aux pays d’Europe centrale et orientale.
7. La principale raison pour laquelle si peu d’Etats non membres ont adhéré aux conventions du Conseil de l'Europe peut tout simplement tenir au fait qu’ils en ignorent l’existence. C’est pourquoi je partage le point de vue exprimé par le Secrétaire Général dans son Rapport sur le passage en revue des conventions du Conseil de l'Europe selon lequel «une première mesure nécessaire consisterait à faire connaître davantage les conventions du Conseil de l’Europe qui sont (…) particulièrement adaptées, au vu de leurs caractéristiques, à une participation des Etats non membres 
			(5) 
			Document
d’information SG/Inf(2012)12, Rapport du Secrétaire Général sur
le passage en revue des conventions du Conseil de l’Europe, paragraphe
68, <a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=1940549'>https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=1940549</a>.». Les mesures particulières qui pourraient être prises pour améliorer cette visibilité seront abordées ci-dessous de manière plus approfondie.

3. Les questions qui méritent d’être prises en compte

3.1. Les raisons qui justifient l’ouverture de certaines conventions aux Etats non membres

8. La mondialisation a eu des conséquences sur l’activité normative du Conseil de l'Europe, car plusieurs de ses conventions traitent de questions qui concernent non seulement le territoire de ses Etats membres, mais qui peuvent également avoir une portée mondiale. Parmi ces questions figurent notamment la lutte contre le terrorisme, le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, la traite des êtres humains, l’exploitation sexuelle des enfants, la cybercriminalité, la contrefaçon de produits médicaux, la protection des données à caractère personnel et le transfèrement des personnes condamnées. En outre, les Etats non membres peuvent avoir intérêt à adhérer aux conventions du Conseil de l'Europe, dans la mesure où certaines d’entre elles remplacent de nombreux accords bilatéraux, par exemple en matière de coopération judiciaire et pénale. De plus, quelques conventions du Conseil de l'Europe peuvent permettre aux démocraties naissantes de renforcer la prééminence du droit dans leur pays, par exemple dans les domaines de la lutte contre la corruption et la traite des êtres humains. Lors de notre audition du 11 décembre 2011, l’un des experts, M. Einar, a déclaré qu’au moment de la définition des conditions imposées aux Etats non membres pour l’adhésion aux conventions du Conseil de l'Europe, il était indispensable d’appliquer une procédure de contrôle complète et crédible pour garantir le maintien de critères uniformes et exigeants, afin d’éviter de transiger sur les normes du Conseil de l'Europe. Je partage cet avis.

3.2. Les conventions susceptibles d’être ouvertes aux Etats non membres

9. Pour ce qui est des conventions existantes, la majorité d’entre elles sont en principe ouvertes à la participation des Etats non membres. Toutefois, certaines sont uniquement ouvertes aux Etats européens, mais comme tous les pays européens sauf un sont membres du Conseil de l'Europe, cette restriction est pratiquement obsolète. Ces conventions pourraient être ouvertes au cas par cas: 1) aux Etats non européens qui en manifestent un véritable intérêt; 2) s’il devient difficile de régler un problème donné dans un contexte strictement européen; ou 3) si le Conseil de l'Europe a personnellement intérêt à étendre l’application de certaines normes au‑delà de l’Europe. C’est le cas, par exemple, de la Convention européenne pour la répression du terrorisme (STE n° 90), qui sera ouverte aux Etats non membres lorsque son protocole portant amendement à la convention entrera en vigueur.
10. S’agissant des futures conventions, il convient d’appliquer les mêmes critères que ceux qui valent pour les conventions existantes, à la condition supplémentaire que les nouvelles conventions soient établies en prenant systématiquement en compte leur éventuelle applicabilité à des Etats non membres. Pour le cas où une convention serait ouverte aux Etats non membres, il serait utile de définir la procédure selon laquelle elles entreraient en vigueur (par exemple entrée en vigueur automatique à l’issue d’une certaine période, en l’absence de toute opposition des Parties).

3.3. Les domaines dans lesquels les conventions du Conseil de l'Europe pourraient être ouvertes aux Etats non membres

11. Il existe des domaines dans lesquels il est de plus en plus difficile de limiter la coopération à la seule Europe si l’on compte agir efficacement. C’est le cas de la lutte contre la criminalité organisée et de la coopération judiciaire. Du fait de la mondialisation croissante, il est probable que l’ouverture des futures conventions du Conseil de l'Europe se révélera de plus en plus indispensable. En outre, on ne saurait exclure d’ouvrir les futures conventions consacrées aux domaines des droits fondamentaux aux Etats non membres, même si certaines d’entre elles devaient renvoyer à la Convention européenne des droits de l’homme et/ou à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Il existe déjà un précédent en la matière en ce que la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme (STCE n° 196), qui est ouverte aux Etats non membres, comporte deux renvois 
			(6) 
			Articles 3.1 et 12.1. à la Convention européenne des droits de l’homme. Il convient toutefois de veiller à ce que les conventions du Conseil de l'Europe qui sont ouvertes aux Etats non membres ne traitent pas de domaines déjà pris en compte par d’autres traités, comme les conventions des Nations Unies, car il est probable que les Etats non membres ne ressentiront pas le besoin d’y adhérer. Ainsi, le Protocole n° 1 à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STE n° 126) a ouvert cette convention aux Etats non membres, mais aucun d’eux n’y a jusqu’ici adhéré. Cette situation peut fort bien être due au fait qu’ils sont déjà Parties à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants 
			(7) 
			Sur l’interaction entre
les conventions du Conseil de l’Europe et la Convention des Nations
Unies contre la torture, voir le rapport de Jean‑Charles Gardetto,
«Renforcer les mécanismes de prévention de la torture en Europe», Doc.12551.. En revanche, la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE n° 210) devrait susciter un très grand intérêt de la part des Etats non membres, car ce domaine n’est pas encore pris en compte par une autre convention.
12. Le Conseil de l'Europe pourrait mettre davantage l’accent sur les Etats observateurs, puisque ce statut a été octroyé aux Etats qui respectent la démocratie, les droits de l’homme et l’Etat de droit. Lorsque la décision est prise d’élaborer une convention qui sera ouverte aux Etats non membres, les pays qui ont manifesté un véritable intérêt pour cet instrument devraient déjà prendre part à son élaboration.

3.4. Les modalités par lesquelles des Conventions du Conseil de l'Europe pourraient être ouvertes aux Etats non membres

13. Une fois de plus, il convient d’adopter une approche pragmatique pour fixer les modalités selon lesquelles des traités du Conseil de l'Europe pourraient être ouverts aux Etats non membres. Je souscris à cet égard à la proposition du Secrétaire Général selon laquelle «il convient de garder à l’esprit qu’il faut rechercher un équilibre entre, d’une part, la nécessité de maintenir, au moins pour certaines conventions, la possibilité pour les Parties existantes de décider de l’admission d’un Etat non membre et, d’autre part, l’opportunité d’assurer une plus large diffusion de certaines conventions du Conseil de l'Europe» 
			(8) 
			Document
d’information SG/Inf(2012)12, op. cit.,
paragraphe 86. . Le Secrétaire Général a proposé différents degrés de contrôle exercé par le Comité des Ministres pour une convention donnée: i) ouvrir une convention à l’adhésion d’un Etat non membre sans aucun contrôle; ii) exercer un certain degré de contrôle lorsqu’un Etat demande à adhérer à une convention, étant entendu que cette demande serait agréée, sauf opposition d’un Etat Partie dans un certain délai; iii) répondre favorablement à la demande d’un Etat au terme d’une période «d’observation» de son aptitude à participer utilement à une coopération née de la convention en question et à respecter les obligations qui en découlent. Il peut également exister; iv) des situations dans lesquelles le Comité des Ministres souhaite s’assurer que seuls les Etats qui partagent pleinement les valeurs du Conseil de l'Europe adhèrent à une convention donnée 
			(9) 
			Ibid.,
paragraphes 87-89.. Ces trois dernières options semblent les mieux à même de garantir que l’Organisation reste fidèle aux valeurs et aux normes qui sont les siennes et n’autorise pas les Etats qui ne les partagent pas à adhérer à ses conventions.
14. Il arrive également que les invitations déjà adressées aux Etats non membres pour qu’ils adhèrent à une convention du Conseil de l'Europe ne soient pas suivies d’effet. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette situation, notamment un changement de gouvernement ou de majorité parlementaire ou un certain nombre de retards survenus sur le plan administratif. A cet égard, la proposition faite par le Secrétaire Général, qui préconise de réfléchir à la modification de la procédure suivie par le Comité des Ministres afin de veiller à ce que les demandes d’adhésion aux instruments du Conseil de l'Europe soient motivées par un véritable intérêt, en renforçant le dialogue préparatoire avec l’Etat concerné ou en lui demandant de s’engager à adhérer à la convention dans un délai donné (par exemple cinq ans), au‑delà duquel l’invitation ne serait plus valable, mérite d’être prise en considération 
			(10) 
			Ibid., paragraphe 91..

3.5. La promotion des conventions ouvertes aux Etats non membres

15. Comme nous l’avons indiqué plus haut, la participation des Etats non membres aux conventions du Conseil de l'Europe est assez faible et se concentre presque exclusivement sur les instruments ouverts à la signature avant 1990, c’est‑à‑dire avant que l’Organisation elle‑même ne s’ouvre aux pays d’Europe centrale et orientale. Cela s’explique principalement par le fait qu’après la chute du mur de Berlin, le Conseil de l'Europe a surtout incité les nouveaux Etats membres et les Etats candidats à adhérer à un certain nombre de conventions, pour leur permettre de devenir des Etats membres ou de respecter les engagements pris lors de leur adhésion à l’Organisation.
16. Au cours de notre audition du 11 décembre 2011, l’un de nos experts, M. de Vel, a déclaré que l’adhésion aux traités qui, compte tenu de leurs caractéristiques et de leur teneur, sont particulièrement adaptés à la participation d’Etats non membres devrait être promue plus activement; je partage ce point de vue. Cette promotion pourrait prendre la forme de conférences, de séminaires et d’ateliers de formation consacrés à un ou plusieurs grands thèmes (comme la protection de l’enfance) pris en compte par un certain nombre d’instruments du Conseil de l'Europe. Afin de donner davantage de visibilité à ces adhésions, le Conseil de l'Europe pourrait organiser des cérémonies de traités comme celles des Nations Unies. Aux Nations Unies, le Secrétaire Général invite chaque année les chefs d’Etat et de gouvernement à participer à une cérémonie organisée par le Bureau des traités au cours de laquelle les conventions sont signées ou ratifiées, afin d’encourager à la fois une plus grande participation aux conventions multilatérales dont il est le dépositaire et une entrée en vigueur plus rapide de ces instruments. La proposition du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, qui préconise d’organiser des événements de ce type dans le cadre de sessions ministérielles ou de conférences spécialisées des ministres de la Justice 
			(11) 
			Ibid.,
paragraphe 56. , mérite d’être prise en considération
17. L’Assemblée parlementaire pourrait également jouer un rôle comparable à celui qu’elle a tenu le 15 juin 2011 
			(12) 
			Voir le communiqué
de presse du 15 juin 2011, APCE 029(2011), <a href='http://www.assembly.coe.int/ASP/NewsManager/FMB_NewsManagerView.asp?ID=6738'>www.assembly.coe.int/ASP/NewsManager/FMB_NewsManagerView.asp?ID=6738.</a>, lorsque ses représentants et ceux des Nations Unies ont appelé conjointement les 27 Etats membres de l’Union européenne et l’Union européenne elle‑même à adhérer à la nouvelle Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.
18. Parmi les autres mesures qui pourraient être prises pour promouvoir les conventions du Conseil de l'Europe figurent les visites effectuées par des responsables politiques de haut rang ou des hauts fonctionnaires du Conseil de l'Europe dans les Etats non membres, par exemple pour examiner l’adhésion à certaines conventions auxquelles ils ont été invités à adhérer, sans y donner suite, ou qu’ils ont signées, sans les ratifier. Par ailleurs, des réunions des divers organes concernés par l’adhésion aux instruments du Conseil de l'Europe pourraient être organisées, en commençant par les Etats qui jouissent d’un statut d’observateur auprès du Conseil de l'Europe et ceux dont les parlements jouissent du statut d’observateur ou de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée, en vue d’examiner la possibilité d’une adhésion et de lever tout obstacle en la matière. Un argument qui pourrait être avancé pour promouvoir les Conventions du Conseil de l'Europe est qu’elles remplacent un grand nombre de traités bilatéraux, par exemple dans des domaines tels que la coopération judiciaire et la lutte contre la criminalité.
19. Les bureaux du Conseil de l'Europe, à commencer par ceux qui assurent la liaison avec les organisations internationales, pourraient également promouvoir les conventions du Conseil de l'Europe, comme le faisait le Bureau de Genève lorsqu’il a tenu des réunions sur les conventions ouvertes, notamment la Convention sur la cybercriminalité (STE n° 185), la Convention du Conseil de l'Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (STCE n° 211) et la Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (STE n° 108).
20. Il existe d’autres moyens de promouvoir les conventions du Conseil de l'Europe ouvertes aux Etats non membres, par exemple en utilisant les contacts dont nous disposons sur le plan politique et technique dans le cadre de la Politique de voisinage et des nouveaux programmes de coopération du Conseil de l'Europe avec les pays de la région méditerranéenne et de l’Asie centrale 
			(13) 
			En 2011, le Secrétaire
Général a admis que plusieurs activités prioritaires de l’Organisation,
y compris la plupart de ses principales conventions récentes, visaient
à étendre la coopération au‑delà des frontières de l’Europe. Voir
le document d’information SG/INF(2011)7 rev 2, 19 avril 2011, Politique
de voisinage du Conseil de l’Europe, <a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=1767825&Site=CM'>https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=1767825&Site=CM</a>. . Le Forum pour la démocratie pourrait également servir de tribune à la promotion des instruments du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général a proposé de rendre l’adhésion aux conventions du Conseil de l'Europe plus intéressante pour les Etats non membres en facilitant leur participation à la «vie» de ces conventions, et en limitant autant que possible les différences de statuts entre les Parties membres du Conseil de l'Europe et les Parties qui ne le sont pas 
			(14) 
			Document
d’information SG/Inf(2012)12, op. cit.,
paragraphe 93. ; cette proposition est particulièrement pertinente. J’examinerai ci‑dessous comment on pourrait procéder.

3.6. La promotion des futures conventions

21. Les Etats non membres qui manifestent un intérêt véritable pour une future convention devraient être incités à participer plus régulièrement à sa négociation et à son élaboration. C’est la raison pour laquelle je souscris à la proposition du Secrétaire Général préconisant «la création d’une sorte de procédure d’alerte pour informer les organisations internationales et les Etats non membres concernés de l’ouverture des négociations de nouvelles conventions du Conseil de l'Europe prévoyant l’adhésion d’Etats non membres» 
			(15) 
			Ibid.,
paragraphe 70. . Là encore, les bureaux du Conseil de l'Europe qui assurent la liaison avec les Nations Unies et les autres organisations internationales établies à Vienne et à Genève, ainsi qu’avec l’OSCE, pourraient jouer un rôle important en la matière. 
			(16) 
			Le Comité des Ministres
a invité le Secrétaire Général à veiller à la publication d’informations
sur le lancement de négociations de nouvelles conventions, y compris
par le biais du site internet du Conseil de l’Europe, Comité des Ministres,
1168e session, 10 avril 2013, CM/Del/Dec(2013)1168,
Point 10.2, paragraphe 4, <a href='https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CM/Del/Dec(2013)1168'>https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CM/Del/Dec(2013)1168.</a>

3.7. Intégrer les conventions ouvertes aux Etats non membres au sein du cadre institutionnel du Conseil de l'Europe (suivi, amendements, etc.)

22. Il convient de prendre des mesures pour veiller à ce que toutes les Parties à une convention prennent part, autant que possible, aux principales décisions relatives à cet instrument. Cela pourrait se faire, par exemple, en accordant le statut d’observateur ou de participant aux Parties qui n’ont pas la qualité d’Etats membres dans les comités intergouvernementaux chargés de la mise en œuvre d’un instrument (lorsqu’il n’existe pas d’organe ad hoc, établi sur la base de la convention, qui englobe l’ensemble des Parties). Cette participation peut même consister, dans les situations pertinentes où l’accord de toutes les Parties à la convention est requis, à accorder un droit de vote aux Etats non membres pour la prise de décisions au sein de ces organes intergouvernementaux. 
			(17) 
			Le Comité des Ministres
a décidé, lorsque l’adhésion d’Etats non membres est prévue par
une convention, de prévoir en l’absence d’organe conventionnel réunissant
toutes les Parties, la participation avec droit de vote des Etats
non membres aux réunions des comités directeurs ou ad hoc consacrées
à des conventions auxquelles ces Etats sont Parties, ibid., paragraphe 14.
23. La pleine participation des Etats non membres devient particulièrement importante pour l’examen des questions financières et des amendements à une convention 
			(18) 
			Ibid, paragraphe 93. . La question de la participation d’Etats non membres aux décisions du Comité des Ministres est plus délicate, notamment pour les questions financières, les amendements à une convention et le suivi de sa mise en œuvre par les Parties à celle‑ci. S’agissant des questions financières, les Etats non membres ne sont pas tenus pour le moment, conformément aux conventions, de verser une contribution financière, bien qu’ils tirent profit des travaux du Conseil de l'Europe (y compris, dans certains cas, du remboursement de la participation de leurs experts aux réunions). Pour les conventions déjà en vigueur auxquelles un Etat non membre est Partie, il sera difficile d’exiger a posteriori que cet Etat contribue financièrement à la mise en œuvre d’une convention lorsque le texte de cet instrument ne comporte aucune disposition à cet effet, et ce même lorsqu’un mécanisme de suivi qui entraîne des implications financières est créé 
			(19) 
			Document d’information
SG/Inf(2012)12, op. cit.,
paragraphe 95. .
24. Pour les nouvelles conventions dont la mise en œuvre a des incidences financières pour le Conseil de l'Europe, on peut envisager l’ajout de dispositions prévoyant la contribution financière des Etats non membres qui sont Parties aux instruments. On peut également prévoir que le fait d’inviter les Etats non membres à devenir Parties aux conventions déjà en vigueur soit soumis à des conditions particulières, qui exigent le versement d’une contribution financière 
			(20) 
			Ibid. . Il peut être utile de déterminer, en fonction des conventions et des Etats concernés, des modalités précises qui garantissent un certain degré de participation à la prise de décisions – notamment en matière financière – sans pour autant exiger que ces Etats participent systématiquement au Comité des Ministres en y ayant un droit de vote. Le Secrétaire Général propose à ce sujet la signature d’accords bilatéraux ou de mémorandums d’accord avec les Etats concernés, dans lesquels sera prévue une forme de contribution volontaire régulière au financement des activités relatives à la mise en œuvre de la convention 
			(21) 
			Ibid,
paragraphe 97.. Toutefois, afin de ne pas dissuader certains Etats non membres d’adhérer aux conventions ouvertes pour des raisons financières, un système raisonnable pourrait être envisagé, qui tienne compte des ressources du pays.
25. En ce qui concerne la contribution financière des Etats non membres, le Comité des Ministres a décidé qu’ils seront invités à faire une contribution minimale de 10 000 € lorsqu’ils participent de plein droit au mécanisme de suivi d’une convention à laquelle ils sont Parties. 
			(22) 
			Voir
CM/Del/Dec(2013)1168, op. cit., Annexe 8, paragraphes
1 et 2. Le Comité des Ministres a en outre décidé que lorsque la
participation d’Etats non membres à une convention est envisagée
pendant la procédure de rédaction, une disposition sur la contribution
financière desdits Etats devrait être insérée. Voir le paragraphe
13.
26. La modification d’une convention soulève la question de savoir s’il faut appliquer le Statut et la pratique du Conseil de l'Europe en matière de droit des traités (adoption à la majorité du Comité des Ministres, comme le prévoit l’article 20.d du Statut de l’Organisation) ou si c’est l’article 39 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, en vertu duquel «un traité peut être amendé par accord entre les parties» qui prévaut. 
			(23) 
			<a href='http://untreaty.un.org/ilc/texts/instruments/francais/traites/1_1_1969_francais.pdf'>http://untreaty.un.org/ilc/texts/instruments/francais/traites/1_1_1969_francais.pdf</a>. . Dans les faits, l’étendue de la participation des Etats parties qui ne sont pas membres du Conseil de l'Europe à la proposition, l’examen et l’adoption des amendements à une convention varie sensiblement. Dans la plupart des cas, ils sont consultés, soit par le Comité des Ministres, soit dans le cadre d’une consultation organisée par les Parties, mais leur accord n’est pas formellement nécessaire à l’adoption des amendements par le Comité des Ministres 
			(24) 
			La
seule exception notable en la matière est celle de la Convention
du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains
(STCE n° 197), qui impose, pour l’adoption des amendements par le
Comité des Ministres, un consentement à l’unanimité des Parties
à la convention. . Le Comité des Ministres peut souhaiter à ce propos examiner la possibilité d’autoriser la participation et l’accord de l’ensemble des Parties à une convention au niveau du comité intergouvernemental chargé de l’élaboration des projets d’amendements.

4. Conclusions

27. La valorisation de l’acquis conventionnel du Conseil de l'Europe et la promotion de ces conventions auprès des Etats non membres contribuent à la visibilité de l’Organisation, à sa dimension politique, à sa capacité à trouver sa place et à jouer son rôle de gardien des droits de l’homme et de la démocratie, non seulement en Europe, mais également dans le nouvel espace de liberté actuellement en expansion autour de ses frontières. En outre, dans un monde de plus en plus en proie à la mondialisation, un certain nombre de problèmes de société ne peuvent plus être réglés dans un cadre strictement européen. Le Conseil de l'Europe a déjà pris cet élément en compte, par exemple pour sa Convention sur la cybercriminalité et sa Convention sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique.
28. Compte tenu de cette situation, il importe que le Conseil de l'Europe conserve ses normes exigeantes et ne transige pas à leur sujet vis-à-vis des Etats qui ne les partagent pas, tant pour les conventions déjà en vigueur qui sont ou doivent être ouvertes à l’adhésion d’Etats non membres que pour de futures conventions.
29. Dans le projet de résolution, je propose un libellé qui résume comment mieux promouvoir les conventions qui sont ouvertes aux Etats non membres, considérant que ces Etats ont jusqu’ici très rarement adhéré à ces instruments. Je propose par ailleurs un libellé qui indique comment rendre les futures conventions plus attrayantes pour les Etats non membres.
30. Dans le projet de recommandation, je propose que l’Assemblée invite le Comité des Ministres à prendre des mesures particulières pour intégrer les Etats non membres à la vie des conventions auxquelles ils ont adhéré, notamment pour les questions financières, les amendements et la participation aux décisions relatives à leur mise en œuvre.