1. Le rapport présenté par notre collègue, M. Jean-Louis
Lorrain, aborde un vaste sujet et résume parfaitement les principales
thématiques à couvrir. Il prend pleinement en compte les deux propositions
de résolution qui forment la base du rapport, dont une intitulée
«Garantissons l'accès des migrants/étrangers aux soins de santé».
2. Dans son rapport, M. Lorrain traite bon nombre de problèmes
rencontrés par les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile
dans l’accès aux soins de santé, y compris le cas problématique
de certains professionnels de santé obligés de signaler les migrants
en situation irrégulière lorsqu’ils ont recours aux soins de santé
(et il appelle à supprimer l’obligation de signalement).
1. Accès aux soins de santé des femmes enceintes
et des enfants (amendement D)
3. A la fin de son rapport, le rapporteur évoque une
question délicate mais importante, à savoir l’accès aux soins de
santé des femmes enceintes et des enfants. Il évoque les problèmes
qui se posent en Grèce, qui ont aussi été portés à l’attention de
la commission des migrations, et notamment le cas des nouveau-nés
qui ne peuvent quitter l’hôpital tant que les frais d’accouchement
ne sont pas payés. Cela serait semble-t-il un problème qui affecte
particulièrement les femmes sans papiers suite à la naissance de
leur enfant. Ce problème, s’il touche les femmes enceintes sans
papier et leurs enfants, va bien au-delà de cet exemple et, dans
beaucoup de pays, ces femmes sont confrontées à de nombreuses difficultés
pour accéder aux soins de santé pré- et postnatals.
4. Aujourd’hui, nos sociétés font face à toutes sortes de problèmes
économiques et de diverses autres natures. Mais, si nous ne pouvons
garantir aux femmes enceintes l’accès aux soins de santé et la sécurité
de leur enfant pendant et après la grossesse, c’est que nos sociétés
sont en train de perdre leur humanité. La Convention des Nations
Unies relative aux droits de l’enfant énonce clairement à l’article
24 que «les Etats parties reconnaissent le droit de l'enfant de
jouir du meilleur état de santé possible» et «s'efforcent de garantir qu'aucun
enfant ne soit privé du droit d'avoir accès à ces services», qui
incluent (à l’alinéa 24.2.d) le fait d’«assurer
aux mères des soins prénatals et postnatals appropriés».
5. Médecins du Monde a mené une étude sur 16 pays afin de mettre
en évidence dans ces pays le niveau d’accès aux soins de santé des
femmes enceintes sans papier et de leurs enfants: les résultats
figurent dans le tableau ci-dessous
.
Groupe
1
|
Groupe
2
|
Groupe
3
|
Pays dans lesquels les
droits des enfants et des femmes enceintes sans papier sont pratiquement
les mêmes que ceux des ressortissants nationaux, avec parfois quelques
différences en termes de conditions d’accès
|
Pays dans lesquels certains
droits sont garantis aux enfants et aux femmes enceintes sans papier,
mais il existe une discrimination à l’encontre de l’un de ces groupes,
ou des deux
|
Pays dans lesquels les
enfants et les femmes enceintes sans papier n’ont aucun droit, sauf
dans de rares circonstances, comme les situations d’urgence
|
Belgique, France, Italie,
Malte, Portugal, Roumanie, Espagne
|
République tchèque, Grèce,
Pays-Bas, Slovénie et Royaume-Uni
|
Chypre, Allemagne, Pologne
et Suède
|
6. Les problèmes concernant ces femmes et leurs enfants
sont nombreux, et notamment: la crainte de ces femmes d’être signalées
si elles recourent à des soins médicaux ou entrent à l’hôpital,
le financement des soins, la communication avec les responsables
de santé et la méconnaissance de leurs droits. Ce sont là quelques-uns
des problèmes généralement rencontrés, mais des problèmes spécifiques
se posent à des groupes et sous-groupes particuliers. Par exemple,
au Royaume-Uni, les demandeurs d’asile sont confrontés à des problèmes
spécifiques parce que, souvent, ils sont déplacés à l’intérieur
du pays, et ce à plusieurs reprises. Ces déplacements les arrachent
à leurs familles et à leurs amis et les éloignent des sages-femmes et
des soins. Un certain nombre de pays suspendent l’expulsion des
migrantes en situation irrégulière durant une période déterminée,
mais cela ne leur donne pas droit aux soins de santé
. Quelques
pays n’assurent des soins qu’en situation d’urgence, mais se pose
alors la question de la définition du caractère urgent.
7. Je suis conscient que ce problème peut paraître mineur, pour
autant il fait partie de ceux sur lesquels l’Assemblée devrait prendre
position et s’exprimer clairement. Qui plus est, c’est une question
à laquelle les Etats membres devraient accorder une attention immédiate,
même en période d’austérité économique.
2. Les besoins des personnes détenues et des réfugiés
en matière de soins de santé (amendements B et C)
8. Les soins de santé dans le cadre de la détention
liée à l’immigration est une question que la commission des migrations,
des réfugiés et de la population a été amenée à traiter en de nombreuses
occasions dans les différents Etats membres. C’est aussi un problème
auquel j’ai été confronté lors de plusieurs visites dans des centres
de rétention en France, Grèce et Italie, ainsi que dans mon propre
pays, la Suède, dans le cadre des fonctions d’officier de police
que j’ai exercées.
9. Les personnes placées en rétention sont particulièrement vulnérables,
qu’il s’agisse de détenus en prison ou de migrants en centre de
rétention. Je propose par conséquent de les mentionner en tant que
groupe particulièrement vulnérable parmi les autres groupes vulnérables
listés au paragraphe 3 du projet de résolution.
10. Dans ce même ordre idée, les réfugiés arrivent dans leur pays
d’accueil après avoir été victimes de persécutions. En conséquence
des souffrances endurées, ils peuvent nécessiter des soins de santé
physique et mentale. Qui plus est, il arrive qu’ils aient dû effectuer
un long voyage, pénible et dangereux, pour atteindre leur pays d’accueil.
En cela, ils constituent un groupe vulnérable qu’il conviendrait
de mentionner.
3. La santé mentale (amendement A)
11. Comme je viens de le mentionner, de nombreux réfugiés,
mais aussi des migrants en situation irrégulière, embarqués dans
de longs et périlleux voyages, arrivent parfois avec de graves problèmes
de santé mentale. Et ces problèmes peuvent être exacerbés dans le
cas des enfants. Par ailleurs, les migrants, dans la société d’accueil,
peuvent rencontrer des problèmes pour accéder aux soins de santé
mentale, pour des raisons diverses et variées, liées notamment à
leur sensibilité culturelle et à des difficultés à communiquer et à
comprendre les prestations à leur disposition. Dans un nouveau rapport
du Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit de toute personne
de jouir du meilleur état de santé physique et mentale susceptible
d'être atteint
, le rapporteur
recommande que les Etats garantissent l’accès aux infrastructures,
biens et services de santé mentale, y compris les groupes d’aide
sociale et les programmes de réunification familiale, à tous les travailleurs
migrants – y compris les travailleurs migrants en situation irrégulière
et les travailleurs migrants rapatriés.
12. Les questions de soins de santé mentale sont importantes pour
l’ensemble de la population et le sont plus encore pour les groupes
vulnérables que sont les migrants, les réfugiés et les demandeurs
d’asile. En conséquence, je propose une référence générale aux soins
de santé mentale au paragraphe 3 du projet de résolution.