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Avis de commission | Doc. 13249 | 25 juin 2013

L’égalité de l’accès aux soins de santé

Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées

Rapporteur : M. Mikael CEDERBRATT, Suède, PPE/DC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 12504 et Doc. 12512, Renvoi 3753 du 11 avril 2011. Commission chargée du rapport: Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable. Voir Doc. 13225 . Avis approuvé par la commission le 25 juin 2013. 2013 - Troisième partie de session

A. Conclusions de la commission

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1. La commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées soutient le rapport établi par la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable et félicite son rapporteur, M. Jean-Louis Lorrain, pour son travail de synthèse réussi sur un sujet aussi vaste et complexe que l’égalité d’accès aux soins de santé.
2. La commission rappelle que ce rapport est le fruit de la fusion de deux propositions de résolution, dont une intitulée «Garantissons l'accès des migrants/étrangers aux soins de santé». Elle se félicite notamment de la sensibilité dont a su faire preuve le rapporteur dans son rapport concernant la question des migrants. Dans ces conditions, la commission souhaite se limiter à quatre amendements.

B. Propositions d'amendement au projet de résolution

(open)

Amendement A (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, paragraphe 3, après les mots «L’Assemblée note que les inégalités d’accès aux soins», ajouter les mots «, y compris les soins de santé mentale,».

Amendement B (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, paragraphe 3, après les mots «ainsi que les Roms,» ajouter les mots «les réfugiés,».

Amendement C (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, paragraphe 3, après les mots «notamment ceux en situation irrégulière», ajouter les mots «les personnes détenues,».

Amendement D (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, après le paragraphe 6.3, insérer l’alinéa suivant:

«à garantir que les femmes enceintes et les enfants, en tant que groupes vulnérables spécifiques, bénéficient d’un plein accès aux soins de santé et à la protection sociale, quel que soit leur statut;»

C. Exposé des motifs par M. Cederbratt, rapporteur pour avis

(open)
1. Le rapport présenté par notre collègue, M. Jean-Louis Lorrain, aborde un vaste sujet et résume parfaitement les principales thématiques à couvrir. Il prend pleinement en compte les deux propositions de résolution qui forment la base du rapport, dont une intitulée «Garantissons l'accès des migrants/étrangers aux soins de santé».
2. Dans son rapport, M. Lorrain traite bon nombre de problèmes rencontrés par les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile dans l’accès aux soins de santé, y compris le cas problématique de certains professionnels de santé obligés de signaler les migrants en situation irrégulière lorsqu’ils ont recours aux soins de santé (et il appelle à supprimer l’obligation de signalement).

1. Accès aux soins de santé des femmes enceintes et des enfants (amendement D)

3. A la fin de son rapport, le rapporteur évoque une question délicate mais importante, à savoir l’accès aux soins de santé des femmes enceintes et des enfants. Il évoque les problèmes qui se posent en Grèce, qui ont aussi été portés à l’attention de la commission des migrations, et notamment le cas des nouveau-nés qui ne peuvent quitter l’hôpital tant que les frais d’accouchement ne sont pas payés. Cela serait semble-t-il un problème qui affecte particulièrement les femmes sans papiers suite à la naissance de leur enfant. Ce problème, s’il touche les femmes enceintes sans papier et leurs enfants, va bien au-delà de cet exemple et, dans beaucoup de pays, ces femmes sont confrontées à de nombreuses difficultés pour accéder aux soins de santé pré- et postnatals.
4. Aujourd’hui, nos sociétés font face à toutes sortes de problèmes économiques et de diverses autres natures. Mais, si nous ne pouvons garantir aux femmes enceintes l’accès aux soins de santé et la sécurité de leur enfant pendant et après la grossesse, c’est que nos sociétés sont en train de perdre leur humanité. La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant énonce clairement à l’article 24 que «les Etats parties reconnaissent le droit de l'enfant de jouir du meilleur état de santé possible» et «s'efforcent de garantir qu'aucun enfant ne soit privé du droit d'avoir accès à ces services», qui incluent (à l’alinéa 24.2.d) le fait d’«assurer aux mères des soins prénatals et postnatals appropriés».
5. Médecins du Monde a mené une étude sur 16 pays afin de mettre en évidence dans ces pays le niveau d’accès aux soins de santé des femmes enceintes sans papier et de leurs enfants: les résultats figurent dans le tableau ci-dessous 
			(1) 
			Ce tableau est extrait
de «Preventing Undocumented Pregnant
Women and Children from Accessing Health Care: Fostering Health
Inequalities in Europe», rapport d’une audition publique
organisée à Bruxelles le 8 décembre 2012 à l’initiative de plusieurs
partenaires: le Parlement européen, le Groupe de l'Alliance progressiste
des socialistes et démocrates, les Verts, la Gauche unitaire européenne/Gauche
verte nordique et un réseau d’ONG dont le Réseau européen de lutte
contre la pauvreté, le Lobby des femmes européennes, Médecins du
Monde et la Plateforme pour la Coopération internationale sur les
sans-papiers..

Groupe 1

Groupe 2

Groupe 3

Pays dans lesquels les droits des enfants et des femmes enceintes sans papier sont pratiquement les mêmes que ceux des ressortissants nationaux, avec parfois quelques différences en termes de conditions d’accès

Pays dans lesquels certains droits sont garantis aux enfants et aux femmes enceintes sans papier, mais il existe une discrimination à l’encontre de l’un de ces groupes, ou des deux

Pays dans lesquels les enfants et les femmes enceintes sans papier n’ont aucun droit, sauf dans de rares circonstances, comme les situations d’urgence

Belgique, France, Italie, Malte, Portugal, Roumanie, Espagne

République tchèque, Grèce, Pays-Bas, Slovénie et Royaume-Uni

Chypre, Allemagne, Pologne et Suède 
			(2) 
			A partir
du 1er juillet 2013, des changements
seront introduits dans la loi en Suède pour veiller à ce que les
enfants et les femmes enceintes aient un accès aux soins de santé
plus ou moins identique que les nationaux.

6. Les problèmes concernant ces femmes et leurs enfants sont nombreux, et notamment: la crainte de ces femmes d’être signalées si elles recourent à des soins médicaux ou entrent à l’hôpital, le financement des soins, la communication avec les responsables de santé et la méconnaissance de leurs droits. Ce sont là quelques-uns des problèmes généralement rencontrés, mais des problèmes spécifiques se posent à des groupes et sous-groupes particuliers. Par exemple, au Royaume-Uni, les demandeurs d’asile sont confrontés à des problèmes spécifiques parce que, souvent, ils sont déplacés à l’intérieur du pays, et ce à plusieurs reprises. Ces déplacements les arrachent à leurs familles et à leurs amis et les éloignent des sages-femmes et des soins. Un certain nombre de pays suspendent l’expulsion des migrantes en situation irrégulière durant une période déterminée, mais cela ne leur donne pas droit aux soins de santé 
			(3) 
			C’est par exemple le
cas en Allemagne, en Grèce et en Italie; voir le rapport de l’Agence
des droits fondamentaux de l’Union européenne, 2011, «L’accès aux
soins de santé des migrants en situation irrégulière dans 10 Etats
membres de l’Union européenne», p. 29.. Quelques pays n’assurent des soins qu’en situation d’urgence, mais se pose alors la question de la définition du caractère urgent.
7. Je suis conscient que ce problème peut paraître mineur, pour autant il fait partie de ceux sur lesquels l’Assemblée devrait prendre position et s’exprimer clairement. Qui plus est, c’est une question à laquelle les Etats membres devraient accorder une attention immédiate, même en période d’austérité économique.

2. Les besoins des personnes détenues et des réfugiés en matière de soins de santé (amendements B et C)

8. Les soins de santé dans le cadre de la détention liée à l’immigration est une question que la commission des migrations, des réfugiés et de la population a été amenée à traiter en de nombreuses occasions dans les différents Etats membres. C’est aussi un problème auquel j’ai été confronté lors de plusieurs visites dans des centres de rétention en France, Grèce et Italie, ainsi que dans mon propre pays, la Suède, dans le cadre des fonctions d’officier de police que j’ai exercées.
9. Les personnes placées en rétention sont particulièrement vulnérables, qu’il s’agisse de détenus en prison ou de migrants en centre de rétention. Je propose par conséquent de les mentionner en tant que groupe particulièrement vulnérable parmi les autres groupes vulnérables listés au paragraphe 3 du projet de résolution.
10. Dans ce même ordre idée, les réfugiés arrivent dans leur pays d’accueil après avoir été victimes de persécutions. En conséquence des souffrances endurées, ils peuvent nécessiter des soins de santé physique et mentale. Qui plus est, il arrive qu’ils aient dû effectuer un long voyage, pénible et dangereux, pour atteindre leur pays d’accueil. En cela, ils constituent un groupe vulnérable qu’il conviendrait de mentionner.

3. La santé mentale (amendement A)

11. Comme je viens de le mentionner, de nombreux réfugiés, mais aussi des migrants en situation irrégulière, embarqués dans de longs et périlleux voyages, arrivent parfois avec de graves problèmes de santé mentale. Et ces problèmes peuvent être exacerbés dans le cas des enfants. Par ailleurs, les migrants, dans la société d’accueil, peuvent rencontrer des problèmes pour accéder aux soins de santé mentale, pour des raisons diverses et variées, liées notamment à leur sensibilité culturelle et à des difficultés à communiquer et à comprendre les prestations à leur disposition. Dans un nouveau rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale susceptible d'être atteint 
			(4) 
			Anand
Grover, Nations Unies, Assemblée générale, 15 mai 2013, A/HRC/23/41,
page 23.V.e, le rapporteur recommande que les Etats garantissent l’accès aux infrastructures, biens et services de santé mentale, y compris les groupes d’aide sociale et les programmes de réunification familiale, à tous les travailleurs migrants – y compris les travailleurs migrants en situation irrégulière et les travailleurs migrants rapatriés.
12. Les questions de soins de santé mentale sont importantes pour l’ensemble de la population et le sont plus encore pour les groupes vulnérables que sont les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile. En conséquence, je propose une référence générale aux soins de santé mentale au paragraphe 3 du projet de résolution.