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Avis de commission | Doc. 13247 | 25 juin 2013

La corruption: une menace à la prééminence du droit

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteur : M. Arcadio DÍAZ TEJERA, Espagne, SOC

Origine - Renvoi en commission: Décision du Bureau, Renvoi 3915 du 5 octobre 2012. Commission chargée du rapport: Commission des questions juridiques et des droits de l’homme. Voir Doc. 13228. Avis approuvé par la commission le 24 juin 2013 2013 - Troisième partie de session

A. Conclusions de la commission

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1. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles félicite la rapporteure de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, Mme Mailis Reps, pour son rapport complet et équilibré et soutient les projets de résolution et de recommandation proposés.
2. La corruption est un phénomène complexe, en particulier lorsqu’elle touche au niveau politique. La lutte contre la corruption est un effort à long terme; adopter des lois n’y suffit pas. La commission partage les conclusions du rapport, selon lesquelles les nécessaires améliorations législatives doivent s’accompagner d’une évolution des attitudes culturelles: la corruption doit être clairement reconnue comme une pratique intolérable faisant peser une menace majeure sur la prééminence du droit. Les parlementaires doivent montrer l’exemple en respectant de bonne foi la lettre et l’esprit de la loi.
3. Compte tenu de la nécessité de renforcer l’action globale du Conseil de l’Europe contre la corruption, la commission du Règlement souhaite proposer des modifications pour renforcer encore les projets de résolution et de recommandation.

B. Amendements proposés

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Amendement A (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, paragraphe 3, remplacer les mots «doivent être le fer de lance» par «doivent rester le fer de lance».

Amendement B (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, après le paragraphe 4, insérer le paragraphe suivant:

« L’Assemblée salue la décision du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe de faire de la lutte contre la corruption l’une des activités prioritaires du Conseil de l’Europe pour 2014-2015, notamment dans le cadre d’un effort plus large pour restaurer la confiance de la population envers le bon fonctionnement des institutions démocratiques ».

Amendement C (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, paragraphe 5, à la fin de la dernière phrase, ajouter:

«, en insistant particulièrement sur la mise en œuvre des recommandations issues du Quatrième Cycle d’Evaluation du GRECO, centré sur la prévention de la corruption concernant les parlementaires, les juges et les procureurs.»

Amendement D (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 5, ajouter la phrase suivante:

«Dans le cadre des efforts pour renforcer la démocratie, les droits de l’homme et la prééminence du droit au bénéfice de tous, l’Assemblée salue l’intention du GRECO d’examiner la dimension de genre de la corruption et d’intégrer l’égalité des sexes dans ses activités de suivi anti-corruption.»

Amendement E (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 8, ajouter la phrase suivante:

« L’Assemblée affirme sa volonté de continuer à détecter les nouvelles tendances en matière de transparence et de risques de corruption au sein des parlements, en partenariat avec les organisations non gouvernementales (ONG) et la société civile, et d’offrir aux parlements nationaux des garanties appropriées.»

Amendement F (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, après le paragraphe 8, ajouter le paragraphe suivant:

«L’Assemblée décide de renforcer encore sa coopération avec le GRECO en vue d’améliorer la mise en œuvre des recommandations formulées dans ses rapports sur l’observation d’élections, notamment à travers un meilleur échange d’informations sur les réglementations et les pratiques relatives au financement des campagnes électorales.»

Amendement G (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, au début du paragraphe 11, insérer la phrase suivante:

«L’Assemblée rappelle que le respect du principe de leadership et le devoir d’exemplarité qui incombe à ses membres représenteraient une avancée certes modeste mais essentielle vers la restauration de la confiance envers les institutions démocratiques.»

Amendement H (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, après le paragraphe 11, insérer le paragraphe suivant:

«L’Assemblée décide de renforcer la dimension interparlementaire de la lutte contre la corruption et de promouvoir une plate-forme de coopération, ayant pour objectifs:
– de promouvoir la ratification et la mise en œuvre des conventions et des recommandations du Conseil de l'Europe en matière de lutte contre la corruption, en particulier les recommandations du GRECO, auprès des parlements nationaux;
– de faire le point sur les initiatives nationales anti-corruption, de partager les bonnes pratiques et de réfléchir ensemble à de nouvelles approches et méthodes de travail visant à réprimer efficacement la corruption;
– d’obtenir des informations sur les activités en cours au sein des organismes anti-corruption du Conseil de l’Europe et sur les initiatives des autres acteurs internationaux clés dans la lutte contre la corruption, ainsi que des statistiques et données corrélées venues d’ONG et de la société civile concernant un pays donné ou les tendances de la corruption dans des domaines spécifiques.»

Amendement I (au projet de recommandation)

Dans le projet de recommandation, paragraphe 2, remplacer «L’Assemblée recommande au Comité des Ministres» par «Le Comité des Ministres et l’Assemblée parlementaire montrent depuis des années leur forte volonté politique de lutter contre la corruption. L’Assemblée recommande donc au Comité des Ministres».

Amendement J (au projet de recommandation)

Dans le projet de recommandation, après le paragraphe 2, insérer le paragraphe suivant:

«Afin de répondre efficacement aux défis d’aujourd’hui et de demain, elle invite également le Comité des Ministres à réévaluer et à consolider la stratégie du Conseil de l’Europe dans le domaine de la lutte contre la corruption, qui représente un secteur clé et un atout majeur pour notre Organisation:
– en faisant le point sur les réussites et les écueils actuels, en identifiant clairement les priorités d’action et en mesurant l’avancée de ces actions;
– en donnant aux organes du Conseil de l’Europe actifs dans la lutte contre la corruption, comme le GRECO, les moyens de contribuer à la mise en œuvre effective de la nouvelle stratégie, si nécessaire à travers une révision de leur mandat;
– en intégrant la lutte contre la corruption aux diverses activités et programmes du Conseil de l'Europe, dans des domaines tels que l’éducation à la citoyenneté démocratique, la cohésion sociale, les médias, le sport, etc.»

Amendement K (au projet de recommandation)

Dans le projet de recommandation, après le paragraphe 2, insérer le paragraphe suivant:

«En outre, l’Assemblée invite le Comité des Ministres à mener une évaluation complète de la coopération existante entre le Conseil de l’Europe et d’autres organisations internationales, telles que les Nations Unies, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l’Union européenne, en vue de créer de nouvelles synergies et d’éviter l’éventuel recoupement des activités.»

Amendement L (au projet de recommandation)

Dans le projet de recommandation, après le paragraphe 2, insérer le paragraphe suivant:

«L’Assemblée demande au Comité des Ministres de renforcer encore la coopération entre l’Union européenne et le Conseil de l'Europe dans la lutte contre la corruption, en particulier en invitant l’Union européenne à adhérer à la Convention pénale sur la corruption (STE n° 173) et en accélérant les négociations sur la participation de l’Union européenne au Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO), afin de favoriser une meilleure coordination des politiques anti-corruption en Europe. En outre, rappelant son Avis 284 (2013) sur les budgets et priorités du Conseil de l’Europe pour l’exercice biennal 2014-2015, l’Assemblée demande au Comité des Ministres que les programmes conjoints soient encore développés, reposent sur un système de financement stable et adéquat et englobent une dimension parlementaire.»

Amendement M (au projet de recommandation)

Dans le projet de recommandation, après le paragraphe 5, insérer le paragraphe suivant:

«Enfin, compte tenu de la nécessité croissante d’un cadre réglementaire à dimension européenne concernant les groupes de pression, du haut niveau d’expertise des organes spécialisés du Conseil de l’Europe, des études complètes qu’ils ont déjà menées et des données solides qu’ils ont recueillies à ce sujet, l’Assemblée invite le Comité des Ministres à lancer une étude de faisabilité sur le lobbying, qui pourrait servir de point de départ à d’autres travaux normatifs. Ce serait pour le Conseil de l’Europe une excellente occasion de prendre les devants et de gagner en visibilité en tant que gardien des droits de l’homme et des valeurs démocratiques.»

C. Exposé des motifs, par M. Díaz Tejera, rapporteur pour avis

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1. Introduction

1. Le rapporteur salue le rapport de Mme Mailis Reps visant à relancer les actions anti-corruption dans toute l’Europe, ainsi que la décision du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe de faire de la lutte contre la corruption l’une des principales activités de l’Organisation et une priorité budgétaire pour 2014-2015. Dans une communication récente intitulée «Démocratie, droits de l’homme et Etat de droit en Europe: renforcer l’impact des activités du Conseil de l’Europe», publiée le 7 mai 2013, le Secrétaire Général détaille sa volonté d’action en pointant les lacunes suivantes: «absence de mécanisme efficace concernant le financement des partis politiques et des campagnes électorales; application ineffective de la législation par manque de détection et de répression de la corruption; criminalisation insuffisante de la corruption des parlementaires et des membres des autres assemblées existant au niveau national, immunités excessives, (...)».
2. Ces dernières années, les scandales régulièrement dévoilés dans de nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe ont alimenté une défiance croissante des citoyens envers les responsables politiques et, par extension, les institutions politiques. Fait linguistique intéressant, en France, le mot «politicien» est devenu péjoratif et il est désormais remplacé par des synonymes. En outre, la défiance autrefois centrée sur les forces politiques au pouvoir concerne maintenant les forces politiques et les institutions en général, indépendamment de l’alternance 
			(1) 
			C’est ce qui ressort
des enquêtes d’opinion. Dans presque tous les pays de l’Union européenne
étudiés par Transparency International pour son Baromètre mondial
de la corruption 2010-2011, les personnes interrogées classaient les
partis politiques comme le secteur le plus corrompu. Les seules
exceptions étaient la Bulgarie (où cette place était occupée par
le secteur judiciaire) et les Pays-Bas, la Norvège et la Suisse
(où le secteur considéré comme le plus corrompu était le secteur
privé). De récentes révélations sur le financement de partis ont
abouti à l’ouverture d’enquêtes, comme dans le cas des soupçons
de dons illégaux par Liliane Bettencourt, héritière de l’Oréal,
pour la campagne électorale du parti français Union pour un mouvement
populaire, ou des allégations de comptes falsifiés par l’ancien trésorier
du Parti populaire, en Espagne.. La corruption, aggravée par les nombreux scandales politico-financiers que presque tous les pays européens ont traversés ces dix dernières années, est l’un des facteurs qui nourrissent la défiance envers la classe politique et les institutions démocratiques. L’Assemblée alerte sur ce fléau depuis 2007 
			(2) 
			Résolution 1547 (2007) sur la situation des droits de l’homme et de la démocratie
en Europe; Résolution
1746 (2010), «Démocratie en Europe : crises et perspectives»; Résolution 1888 (2012) sur la crise de la démocratie et le rôle de l’Etat dans
l’Europe d’aujourd’hui.. La corruption dans les prises de décisions est un poison potentiellement mortel: elle ouvre la voie à des risques sanitaires volontairement sous-estimés, à la délivrance de permis d’exploitation en dépit de problèmes de sécurité, etc 
			(3) 
			«D’après les
estimations de la Banque mondiale, plus de mille milliards de dollars
US de pots-de-vin sont versés chaque année, le plus souvent pour
obtenir des marchés publics ou des monopoles. L’Office des Nations
Unies contre la drogue et le crime estime que la criminalité multinationale,
favorisée par la collusion active ou l’inattention passive des régulateurs,
fait passer les frontières à plus de 2 100 milliards de dollars
US par an. D’après le Réseau mondial pour la justice fiscale, l’évasion
fiscale, très souvent du fait de contribuables ayant suffisamment
de ressources pour influencer des fonctionnaires ou des décideurs
politiques, fait perdre chaque année 3 100 milliards de dollars
US aux pouvoirs publics. À titre de comparaison, pour remplir les
Objectifs du Millénaire pour le développement, si souvent vantés
– éradiquer la famine et la pauvreté, assurer l’enseignement primaire
pour tous, réduire des deux tiers la mortalité infantile, réduire
des trois quarts la mortalité maternelle, enrayer la propagation
du VIH et du paludisme, diminuer de moitié la proportion de personnes
sans accès à l’eau potable et à l’assainissement et promouvoir l’égalité
des sexes à l’école et au travail –, il ne faudrait pas plus de
481 milliards de dollars US investis dans les politiques de développement». Organisation
mondiale des parlementaires contre la corruption (GOPAC), «Parliamentarians
and NGOs to work together to fight political corruption»..
3. L’arène politique est depuis des siècles un lieu de rencontre entre l’argent et le pouvoir. Les liens étroits entre partis politiques, entreprises, syndicats et institutions publiques existent de longue date. Cependant, dans un contexte de difficultés économiques, de chômage et de paupérisation, la population se montre de moins en moins tolérante envers les abus de pouvoir de la part des politiques. Plus que jamais, l’élite politique et les représentants du peuple ont le devoir de montrer l’exemple.
4. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, cette défiance est aussi un signe positif, puisqu’elle témoigne de la maturité politique des citoyens. On ne compte plus les initiatives de responsabilisation mises en place par la société civile. Plus attentifs aux écarts entre les promesses électorales et les politiques appliquées, les citoyens connaissent également mieux leurs droits 
			(4) 
			Un tribunal français
a récemment pris une décision particulièrement ferme, allant au-delà
de la peine requise par le procureur, contre un élu local qui avait
détourné des fonds pour attirer les électeurs.. Le Conseil de l’Europe doit profiter de cet élan pour renforcer ses efforts de lutte contre la corruption, quitte à procéder peut-être à des ajustements pour pouvoir anticiper les difficultés, les prévenir et y apporter une réponse rapide et adéquate.
5. Le rapporteur souhaite donc faire le point sur les initiatives de l’Assemblée visant à une plus grande transparence pour ses propres membres, avant de présenter quelques propositions supplémentaires concernant l’action institutionnelle du Conseil de l’Europe, propositions qui devraient être reflétées dans les projets de recommandation et de résolution. Le présent avis donne aussi à la commission du Règlement l’occasion de présenter des observations sur le programme de l’Organisation pour 2014-2015 concernant les points liés à la lutte contre la corruption. Le programme a été présenté par le Secrétaire Général le 30 avril 2013, trop tard pour que l’Assemblée puisse le commenter en débattant de son Avis 284 (2013), «Budgets et priorités du Conseil de l’Europe pour l’exercice biennal 2014-2015 
			(5) 
			Le
Secrétaire Général du Conseil de l’Europe n’a présenté que le 22
avril 2013 ses priorités pour l’exercice biennal, ne laissant pas
assez de temps au rapporteur général de l’Assemblée sur le budget
pour préparer un avis détaillé sur le budget et le programme du
Conseil de l’Europe pour 2014 et 2015 et sur les dépenses de l’Assemblée,
pour adoption par la Commission du Règlement lors de sa réunion
de la partie de session d’avril 2013. ».

2. Travaux de l’Assemblée sur la transparence, la responsabilité et l’intégrité

6. Rappelant les résolutions et recommandations antérieures de l’Assemblée sur les différents aspects de la lutte contre la corruption, citées dans le projet de résolution présenté par la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, le rapporteur souhaite revenir sur les travaux de l’Assemblée concernant ses propres règles en matière de transparence, d’intégrité et d’obligation de rendre des comptes. Lors de ses travaux sur les questions de démocratie et de lutte contre la corruption dans les années 2000, l’Assemblée a plusieurs fois souligné la nécessité que les parlementaires déclarent leurs intérêts financiers. Cela a abouti en 2007 à l’adoption de la Résolution 1554 (2007) «Conflit d’intérêts», qui ajoute au Règlement de l’Assemblée l’obligation pour tous les rapporteurs de l’Assemblée de faire une déclaration orale concernant tout intérêt professionnel, personnel, financier ou économique susceptible d’être jugé pertinent ou d’entrer en conflit avec le sujet du rapport. Tous les membres sont en outre encouragés à faire une déclaration orale avant de s’exprimer sur un sujet relevant d’un domaine dans lequel ils ont un intérêt professionnel, personnel, financier ou économique susceptible d’être jugé pertinent ou source de conflit. En 2006, un code de conduite pour les corapporteurs de la commission de suivi a été adopté. Il a ensuite été décidé de mettre en place un cadre de référence à l’attention de tous les membres de l’Assemblée pour couvrir la question des cadeaux, offrir des garanties appropriées contre les offres d’hospitalité en échange de faveurs politiques et réglementer les activités des groupes d’intérêts. Le code de conduite pour les membres de l’Assemblée a été adopté en 2012 
			(6) 
			Voir Résolution 1903 (2012) «Déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire :
bonne pratique ou devoir ?», et le rapport de la Commission du Règlement,
des immunités et des affaires institutionnelles, Doc. 13000.. Compte tenu des différents niveaux de réglementation existant dans les parlements nationaux et de l’environnement multiculturel de l’Assemblée, le code de conduite réunit les principes et les politiques qui peuvent être partagés par tous les membres indépendamment de leur affiliation idéologique ou politique. Il se compose de principes généraux, traduisant le comportement attendu des parlementaires, et d’un ensemble de règles traitant entre autres des conflits d’intérêts, qui doivent être résolus de manière à protéger l’intérêt général ou rendus publics s’ils ne peuvent être résolus, et de l’interdiction de la promotion rémunérée d’intérêts. Les activités de promotion rémunérées sont interdites. En outre, les cadeaux ou avantages similaires reçus par les membres doivent être enregistrés auprès du Secrétariat de l’Assemblée si leur valeur dépasse 200 euros 
			(7) 
			Le Bureau
du Parlement européen a récemment décidé d’aller au-delà de la proposition
initiale, la déclaration de cadeaux ou d’actes d’hospitalité au-delà
de 150 euros, pour rendre la déclaration obligatoire sans critère
de valeur. Cette décision visait en partie à soulager les services
administratifs du travail consistant à estimer la valeur monétaire
des cadeaux et actes d’hospitalité. . Un mécanisme de mise en œuvre est prévu, confiant principalement au Président de l’Assemblée la tâche d’ouvrir des enquêtes et de décider de sanctions, en fonction de la gravité et de la fiabilité des informations concernant les conduites frauduleuses.
7. Cependant, l’obligation de déclarer ou d’enregistrer les cadeaux, les actes d’hospitalité et les conflits d’intérêts n’a rien d’une solution magique 
			(8) 
			Les
solutions sont généralement adoptées après des révélations scandaleuses
et donnent rarement les résultats escomptés. Le Code de conduite
du Parlement européen a été adopté à la suite de faits de corruption
révélés par le Sunday Times. En France, la
soudaine publication du patrimoine des membres du gouvernement,
à la suite du scandale provoqué par l’évasion fiscale d’un ministre,
a divisé l’opinion publique : certains, non préparés à de telles
révélations, ont été tentés d’accuser de malhonnêteté à la fois
les ministres aisés et ceux qui ne déclaraient qu’un faible patrimoine. Généralement
parlant, la transparence doit être traitée avec prudence. Dans les
pays où la séparation des pouvoirs est faible, la transparence sur
le financement des partis politiques et des ONG pourrait être utilisée
par l’exécutif pour saper l’opposition. . Aucune règle ne mettra fin aux turpitudes si certains n’ont pas la volonté de s’y plier de bonne foi. Par conséquent, pour commencer à restaurer la confiance du public en ce temps de crise et de turbulences, le premier devoir des élus consiste à se placer soi-même en tête de la lutte contre la corruption, en montrant l’exemple et en respectant les règles de fair play sur lesquelles repose le modèle démocratique européen.
8. Au sein du Conseil de l’Europe, le Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) est allé au cœur du financement du système politique en décidant de s’intéresser au financement des partis politiques et à la corruption au sein des parlements dans le cadre de ses Troisième et Quatrième Cycles d’Evaluation. Les premières évaluations du Quatrième Cycle ont déjà identifié des mesures de prévention efficaces, comme la plus grande transparence du processus parlementaire et l’usage accru des nouvelles technologies pour que le public ait plus facilement accès aux lois en préparation et à l’ordre du jour des parlementaires; ainsi que certains point problématiques, notamment la participation de groupes d’intérêts aux travaux parlementaires et l’obligation, pour les parlementaires, de rendre compte de leurs contacts avec ces groupes.
9. Le problème du lobbying a également été étudié par la commission du Règlement au cours de l’élaboration du code de conduite des membres de l’Assemblée. La plupart des parlements modernes s’acheminent vers un contrôle resserré des influences extérieures, reconnaissant que des abus peuvent se produire. Une récente étude affirme que «quelque 80 % de tous les amendements déposés» au Parlement européen viennent directement de représentants d’intérêts et que «les 20 % restants sont souvent inspirés par des acteurs extérieurs au Parlement». Plusieurs parlements ont mis en place un registre des lobbyistes. Cependant, une enquête publiée par Transparency International France pour 2009-2010 pointe un écart entre le nombre de groupes officiellement déclarés et le nombre de groupes réellement impliqués dans la préparation d’un rapport. En outre, la proposition déposée par quelques députés européens visant à rendre obligatoire la publication des noms de tous ceux ayant participé à la rédaction d’un rapport s’est heurtée à l’opposition de plusieurs parlementaires, désireux de protéger leurs sources.
10. On voit ici que le lobbying est une question complexe. Les modalités d’interaction entre les parlementaires et les groupes d’intérêts sont en train d’évoluer, dans un effort pour concilier au mieux d’une part le lobbying et les prises de décisions éclairées, d’autre part la nécessité de préserver l’intérêt public et de placer toutes les parties prenantes au même niveau. De nouvelles règles ont été mises en place dans certains pays européens, mais leur impact reste à mesurer 
			(9) 
			A
la suite d’un récent scandale lié au lobbying à la Chambre des Communes,
le Gouvernement britannique a décidé de présenter avant la pause
estivale un projet de loi visant la création d’un registre obligatoire
des lobbyistes.. Le rapporteur rappelle la Résolution 1744 (2010) de l’Assemblée sur les acteurs extra-institutionnels dans un régime démocratique, à la suite de laquelle la Commission de Venise a décidé de mener une étude spéciale sur ce thème 
			(10) 
			Commission de Venise,
«Report on the role of extra-institutional actors in the democratic
system (lobbying)», CDL-AD(2013)011, 22 mars 2013. Ce rapport analyse
les différents systèmes de réglementation des groupes d’intérêts
avec leurs avantages et leurs inconvénients. Voir aussi «Report
on the legal framework for the regulation of lobbying in the Council
of Europe member States», CDL-DEM(2011)002., ainsi que la Recommandation 1908 (2010) sur le lobbying dans une société démocratique (code européen de bonne conduite en matière de lobbying). L’Assemblée s’attache à poursuivre l’identification des tendances liées à la corruption dans ce domaine, à réfléchir aux solutions possibles et à maintenir son Règlement à jour.
11. Comme le GRECO l’a récemment souligné, il existe «une demande croissante, en Europe et ailleurs, en faveur de la mise en place de cadres réglementaires sur le lobbying». Selon le rapporteur, il serait regrettable que le Comité des Ministres ne profite pas de cet élan pour envisager une étude qui permettrait d’évaluer la nécessité d’autres travaux normatifs. Le Conseil de l’Europe est en pointe sur ce sujet: il peut s’appuyer sur les importants travaux déjà réalisés, sur les données solides collectées par ses organes (le GRECO et la Commission de Venise) et sur son excellent réseau d’experts représentant des gouvernements, des parlements, des groupes d’intérêts et des ONG pour acquérir une forte visibilité et devenir la première institution internationale à adopter un document complet sur la question du lobbying.

3. Inventaire des activités anti-corruption du Conseil de l’Europe

12. Comme le souligne à juste titre Mme Reps dans son rapport, la corruption a des conséquences désastreuses sur la protection des droits de l’homme; elle met en péril la démocratie et la prééminence du droit. L’actuelle réforme du Conseil de l’Europe, lancée par le Secrétaire Général en vue de renforcer l’impact de ses activités, offre l’occasion de se demander si notre Organisation devrait revoir ses stratégies de lutte contre la corruption, compte tenu de la dimension multidisciplinaire du problème.

3.1. Nouvelle architecture institutionnelle

13. Aujourd’hui, l’action anti-corruption du Conseil de l’Europe se compose d’activités normatives, assurées par les comités intergouvernementaux, d’une assistance technique, avant tout dans le cadre de programmes conjoints Union européenne–Conseil de l'Europe, et de mécanismes de suivi, au premier rang desquels le GRECO, qui regroupe les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe plus les Etats-Unis et le Bélarus (le Kazakhstan pourrait devenir un nouveau partenaire). De nombreux organes du Conseil de l’Europe œuvrent à l’éradication de la corruption sous des angles différents, et leurs conclusions s’enrichissent mutuellement 
			(11) 
			GRECO, Moneyval, Commission
de Venise, Commission européenne pour l’efficacité de la justice,
Comité européen pour les problèmes criminels, Comité européen de
coopération juridique, Congrès des pouvoirs locaux et régionaux
du Conseil de l'Europe, etc. . Il est regrettable qu’une approche potentiellement aussi complète ne soit pas pleinement exploitée. De fait, la corruption est un phénomène aux multiples facettes, qui trouve ses racines dans un environnement politique non concurrentiel, un système d’équilibre des pouvoirs trop faible, des droits de l’opposition insuffisants, un manque de transparence du processus de prise de décisions, dont des activités de lobbying inéquitables, et une réglementation imprécise des partis politiques et des campagnes électorales. Pour apporter à un problème une réponse décisive et adaptée, il faut une dimension normative, une bonne analyse des risques et la conception simultanée de stratégies de mise en œuvre pour les trois branches du pouvoir. Cette approche transversale et coordonnée a déjà été adoptée par le Conseil de l’Europe dans des domaines comme la lutte contre le terrorisme, la protection de l’enfance et la gouvernance d’Internet. En outre, le Conseil de l’Europe doit régulièrement faire le point sur les domaines potentiels de coopération avec d’autres entités internationales comme le mécanisme de suivi de la Convention des Nations Unies contre la corruption, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les rapports anti-corruption de l’Union européenne et les travaux des parlementaires de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en matière de déontologie, afin de renforcer les échanges de vues et d’éviter que des initiatives ne se recoupent.

3.2. Nécessité d’un nouveau plan d’action anti-corruption au Conseil de l’Europe

14. La stratégie anti-corruption du Conseil de l’Europe remonte aux années 1990. Elle repose sur le Programme d’action contre la corruption, adopté en 1995, et sur les Vingt principes directeurs pour la lutte contre la corruption, adoptés en 1997. Le Programme, élaboré par un Groupe multidisciplinaire contre la corruption, comprenait un programme de travail détaillé pour 1996-2000, englobant la rédaction de la Convention pénale sur la corruption 
			(12) 
			STE n° 173, adoptée
en 1999 et entrée en vigueur en 2002. et de la Convention civile sur la corruption 
			(13) 
			STE n° 174, adoptée
en 1999 et entrée en vigueur en 2003. avec d’éventuels protocoles additionnels, d’un Code européen pour les agents publics 
			(14) 
			Recommandation n° R
(2000) 10 du Comité des Ministres sur les codes de conduite pour
les agents publics. et d’une recommandation sur le financement des partis politiques 
			(15) 
			Recommandation Rec(2003)4
du Comité des Ministres sur les règles communes contre la corruption
dans le financement des partis politiques et des campagnes électorales.. Aujourd’hui, les instruments juridiques en vigueur sont devenus une référence, servant d’inspiration aux législations nationales. En outre, plusieurs études sur des sujets tels que les immunités, le rôle et la responsabilité des journalistes et les sanctions et mesures pénales ont déjà été menées à bien par les organes du Conseil de l’Europe dans le cadre du Programme d’action.
15. Malgré les nombreux outils anti-corruption déjà en place, la corruption reste très présente dans beaucoup d’Etats membres. Il est donc nécessaire de faire le point sur le contexte actuel et de répondre aux défis soulevés aujourd’hui par les besoins des États membres en ce domaine. L’inventaire proposé et la consolidation du plan anti-corruption vont dans le sens de la proposition du Secrétaire Général, qui souhaite améliorer l’évaluation et le traitement des données pour permettre la détection de sources de préoccupation communes ou de priorités spécifiques par pays et pouvoir agir en conséquence 
			(16) 
			Voir la communication
du Secrétaire Général «Démocratie, droits de l’homme et Etat de
droit en Europe: renforcer l’impact des activités du Conseil de
l’Europe», 7 mai 2013.. Dans l’application de ses normes anti-corruption, le Conseil de l’Europe tiendra compte des priorités stratégiques des gouvernements et valorisera les programmes d’assistance ciblés donnant des résultats notoirement durables, en se concentrant dans le même temps sur les perspectives à long terme. Les efforts anti-corruption mettent souvent plusieurs générations à porter leurs fruits; il faut donc mettre l’accent sur le maintien de ces efforts.
16. Si nécessaire, les mécanismes de suivi actuels doivent se voir dotés des compétences dont ils ont besoin pour contribuer de façon efficace et crédible à la mise en œuvre du nouveau plan d’action. Par exemple, le champ d’action actuel du GRECO repose sur un mandat négocié en 1999 
			(17) 
			En
vertu de l’article 2, «Fonctions du GRECO» (annexe à la Résolution
(99) 5), les compétences du GRECO se limitent au suivi des Principes
directeurs et du Programme d’action.. Ce mandat pourrait être modifié pour s’adapter à la nouvelle stratégie anti-corruption du Conseil de l’Europe, ce qui répondrait aussi aux critiques actuelles concernant la faible visibilité de la procédure d’évaluation du GRECO et de ses mécanismes de suivi, le champ trop limité de son travail de suivi et son incapacité à repérer les tendances de corruption par manque d’analyses comparatives 
			(18) 
			Communication de la
Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique
et social européen, «La lutte contre la corruption dans l’Union
européenne», COM(2011)308 final. .

4. Coopération avec l’Union européenne

17. En 2007, le Conseil de l’Europe et l’Union européenne ont conclu un Mémorandum d’accord invitant les deux institutions à développer des stratégies communes à moyen et long terme et coordonnant les activités opérationnelles dans des domaines prioritaires, dont la lutte contre la corruption. Les résultats des procédures d’évaluation et de conformité du GRECO constituent l’une des sources des rapports de la Commission européenne sur les progrès réalisés par les pays candidats et candidats potentiels et des rapports sur l’avancement des plans d’action de la Politique européenne de voisinage.

4.1. Adhésion de l’Union européenne au GRECO

18. La nécessité d’une plus grande synergie entre les deux organisations a été affirmée plusieurs fois par le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et par le Président de l’Assemblée. La participation formelle de l’Union européenne au GRECO est revenue à l’ordre du jour depuis l’adoption par l’Union du Programme de Stockholm, en 2010, et la publication en juin 2011 du «paquet de mesures anti-corruption» de la Commission européenne. Le GRECO, dont le statut prévoit dès l’origine une telle participation, s’en est félicité. Cependant, la récente Communication de la Commission sur la participation au GRECO 
			(19) 
			Communication de la
Commission «Participation de l’Union européenne au Groupe d’Etats
contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe», COM(2012)604
final. a déclenché une controverse au niveau de l’Union européenne: la Commission propose de procéder en deux étapes, commençant par un statut de «participant à part entière» qui autoriserait l’Union à participer à l’évaluation de ses Etats membres et/ou des pays candidats sans se soumettre elle-même à la procédure d’évaluation du GRECO.
19. Cette controverse demande à être résolue rapidement, afin que les deux organisations puissent entamer des pourparlers concrets sur la forme et le contenu précis d’une telle participation. La participation de l’Union européenne au GRECO favoriserait des politiques anti-corruption plus coordonnées en Europe et renforcerait l’impact des efforts respectifs de l’Union et du GRECO en matière de lutte contre la corruption. Le rapporteur rappelle que le Mémorandum d’accord de 2007 confirme le rôle du Conseil de l’Europe comme référence en matière de droits de l’homme, de démocratie et de prééminence du droit en Europe et affirme la nécessaire cohérence entre les systèmes normatifs des deux organisations dans le domaine des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, alors même que les décisions prises au niveau de l’Union européenne ont un impact croissant sur le continent européen en raison de l’élargissement de l’Union et du renforcement de ses compétences juridiques, l’Union elle-même n’est pas exempte de corruption: d’après une étude de la Commission européenne, 73 % des personnes interrogées dans les pays de l’Union européenne pensent qu’il y a de la corruption au sein des institutions européennes 
			(20) 
			Special Eurobarometer
374, février 2012, <a href='http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/ebs/ebs_374_en.pdf'>http://ec.europa.eu/public_opinion/archives/ebs/ebs_374_en.pdf</a>. L’attente générale est donc que les règles de transparence que l’Union européenne exige de ses Etats membres s’appliquent aussi aux institutions européennes. C’est pour l’Union une bonne raison supplémentaire d’adhérer au GRECO comme membre à part entière.
20. Le rapporteur s’inquiète de la décision de la Commission européenne de mettre en place un autre mécanisme de suivi anti-corruption, qui générerait des dépenses supplémentaires alors même que le budget de l’Union européenne est en diminution et que les politiques d’austérité se renforcent dans les Etats membres 
			(21) 
			La communication de
la Commission «La lutte contre la corruption dans l’Union européenne»
prévoit la mise en place d’un Rapport anti-corruption de l’Union
européenne, dont le premier devrait être publié en juin 2013.. En outre, le flou demeure sur la contribution des Etats membres de l’Union européenne à ce mécanisme. Une révision du mandat du GRECO serait nécessaire pour regrouper les activités européennes anti-corruption, faisant du GRECO un mécanisme complet d’analyse, mais aussi d’évaluation des risques et un forum européen de partage d’informations et de bonnes pratiques, associant toutes les parties sur un pied d’égalité et prévoyant une procédure de conformité solide 
			(22) 
			Le rapporteur souhaite
saluer les modifications récemment apportées au Règlement du GRECO..

4.2. Programmes conjoints Conseil de l'Europe–Union européenne pour le renforcement de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption

21. Inaugurés en 1993, les programmes conjoints entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne sont devenus l’un des instruments majeurs de la coopération des deux institutions pour la poursuite d’un objectif commun, la promotion des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de la prééminence du droit en Europe. Confirmant une tendance de longue date, les programmes conjoints de l’année écoulée ont continué de représenter la plus grande source de financement en faveur des activités de coopération et d’assistance technique du Conseil de l'Europe. Le processus d’évaluation de la coopération Conseil de l'Europe-Union européenne par l’Union européenne a souligné la capacité du Conseil de l’Europe à mobiliser les savoirs dans ses domaines de spécialité 
			(23) 
			ODGProg/Inf
(2013)3.. Le rapport salue la réflexion en cours au sein du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne en vue d’une forme plus structurée de programmes conjoints, intégrée au cadre financier de l’Union européenne pour 2014-2020 et comprenant les aspects de lutte contre la corruption. Une phase de préparation plus courte et davantage de flexibilité permettraient un soutien rapide aux recommandations du GRECO dans la période d’échanges suivant l’adoption d’un rapport par pays. Le rapporteur renvoie aux appels de l’Assemblée au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe pour qu’un partenariat avec l’Union européenne soit négocié, en vue de mettre en place un système stable et durable de financement des programmes conjoints, qui devraient par ailleurs inclure une dimension parlementaire 
			(24) 
			Avis 284 (2013) sur les budgets et priorités du Conseil de l’Europe
pour l’exercice biennal 2014-2015..

5. Moyens d’améliorer l’action de l’Assemblée parlementaire contre la corruption

5.1. Renforcer la coopération en matière de financement des campagnes électorales

22. Dans son Avis 284 (2013) sur les budgets et priorités du Conseil de l’Europe pour l’exercice biennal 2014-2015, l’Assemblée appelle à trouver des synergies pour faire progresser les priorités au niveau du Conseil de l’Europe, dans le respect des règles statutaires de l’Organisation. Les membres de l’Assemblée participent régulièrement aux travaux de plusieurs organes qui traitent des problèmes de corruption 
			(25) 
			Au début de chaque
session, la Commission des questions juridiques et des droits de
l’homme nomme des représentants de l’Assemblée au GRECO et à la
Commission de Venise.. Les relations entre l’Assemblée parlementaire et la Commission de Venise sont un exemple de réussite, puisqu’une bonne part des risques de corruption est étroitement liée à l’ordre constitutionnel, à une séparation des pouvoirs trop ténue et à l’inefficacité du mécanisme d’équilibre des pouvoirs. Dans le domaine des élections, l’Assemblée et la Commission de Venise ont entamé une coopération régulière. Un mémorandum sur la législation électorale du pays, soulignant les points les plus importants et les plus problématiques, est préparé à l’attention des membres des missions d’observation d’élections de l’Assemblée, et un membre de la Commission de Venise peut être invité à se joindre à la mission en tant que conseiller juridique. D’autre part, si le rapport de la mission d’observation signale des problèmes liés à la législation électorale, le Bureau de l’Assemblée peut inviter la Commission de Venise à étudier les moyens d’améliorer cette législation 
			(26) 
			Accord de coopération
entre l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et la Commission
européenne pour la démocratie par le droit, 4 octobre 2004.. L’Assemblée est reconnaissante envers la Commission de Venise et ses experts pour l’excellente coopération tissée sur le terrain au cours des observations d’élections législatives ou présidentielles. Ce tandem permet au Conseil de l’Europe de parler d’une seule voix, de mieux mettre en lumière ses missions d’observation et de renforcer la crédibilité et l’autorité de ses recommandations.
23. Le rapporteur souhaite souligner que les rapports de conformité et d’évaluation publiés dans le cadre du Troisième Cycle d’Evaluation, concernant entre autres la transparence du financement des partis, ont permis au GRECO d’acquérir de vastes connaissances et de mettre en place une importante base de données concernant la législation en matière de campagnes électorales et son application pratique. Par conséquent, afin de renforcer la complémentarité entre les organes du Conseil de l’Europe et d’améliorer la mise en œuvre des recommandations formulées dans les rapports des missions d’observation d’élections, des modalités de coopération pourraient être mises en place entre l’Assemblée parlementaire et le GRECO, avec entre autres la préparation d’un mémorandum qui attirerait l’attention des membres d’une mission d’observation d’élections sur les questions spécifiques liées au financement de la campagne électorale dans le pays concerné et la participation d’un membre du GRECO aux missions d’observation.

5.2. Prise en compte des aspects de genre

24. En 2012, le GRECO a ouvert un processus de réflexion inspiré des politiques d’égalité homme-femme menées par le Conseil de l’Europe, notamment concernant la prise en compte du genre dans l’élaboration des politiques, afin de rechercher une éventuelle dimension de genre dans le phénomène de corruption. Sur la scène internationale, la question du genre et de la corruption est prise au sérieux dans le contexte de l’aide au développement, concernant notamment les droits des femmes, l’impact de la corruption sur les femmes et les relations entre le niveau de corruption et le niveau de participation et la représentation des femmes. En juin 2012, le GRECO a nommé une rapporteure pour l’égalité entre les femmes et les hommes, afin d’assurer une meilleure communication entre le GRECO et les autres organes du Conseil de l’Europe sur les questions d’égalité des sexes et de prise en compte du genre.
25. Le rapporteur aimerait donc encourager la prise en compte du genre comme élément des stratégies de prévention de la corruption et, plus largement, comme moyen de renforcer la démocratie et la prééminence du droit au bénéfice de tous les citoyens – objectif permanent pour l’Assemblée.

5.3. Renforcer la dimension parlementaire de la lutte contre la corruption

26. Plusieurs organisations intergouvernementales et initiatives internationales ont leur propre dimension parlementaire. Outre qu’elle donne une légitimité démocratique, cette dimension a aussi des répercussions pratiques, puisque plusieurs sujets peuvent tomber en dehors du champ direct de l’action gouvernementale. L’Assemblée parlementaire a déjà élaboré un appui aux campagnes intergouvernementales du Conseil de l’Europe contre les violences faites aux femmes ou contre la violence sexuelle à l’égard des enfants. En outre, des auditions des chefs des délégations nationales concernant la (non-)mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme sont régulièrement organisées par la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, contribuant au mécanisme de mise en œuvre des conventions placé sous l’égide du Comité des Ministres.
27. Selon le rapporteur, l’Assemblée parlementaire pourrait contribuer aux efforts nationaux de lutte contre la corruption, entre autres en renforçant la visibilité des normes existantes du Conseil de l’Europe, les échanges de bonnes pratiques et l’application de ces normes à travers des propositions concrètes d’action politique et législative. Des réunions régulières pourraient être organisées pendant les parties de session, au cours desquelles des représentants des organes du Conseil de l’Europe, des programmes conjoints ou d’ONG informeraient les membres de problèmes spécifiques de corruption dans un pays donné ou de la corruption en lien avec un domaine spécifique (comme le sport, les ressources naturelles, le changement climatique, la politique, le secteur privé ou la responsabilité des entreprises). Cela permettrait aux membres de prendre connaissance des derniers chiffres et des dernières préoccupations en date, ainsi que d’intégrer la lutte contre la corruption aux actions de l’Assemblée dans divers domaines. Le rapporteur souhaite spécialement souligner la nécessité d’une plus grande participation de la société civile et des ONG. L’Assemblée a récemment adopté une résolution 
			(27) 
			Résolution 1910 (2012) sur le rôle des ONG dans la lutte contre l’intolérance,
le racisme et la xénophobie. qui reconnaît le rôle précieux joué par les ONG pour sensibiliser la population aux problèmes, faire entendre la voix des victimes et promouvoir les politiques nationales et locales.

6. Propositions

28. A la lumière des considérations ci-dessus, la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles souhaiterait compléter les projets de résolution et de recommandation présentés par la commission des questions juridiques et des droits de l’homme par les ajouts suivants:
  • mettre l’accent sur le principe de leadership et le devoir d’exemplarité qui incombe aux membres de l’Assemblée;
  • souligner la volonté de l’Assemblée de continuer à détecter les nouvelles tendances en matière de transparence et de risques de corruption au sein des parlements;
  • inviter le Comité des Ministres à réévaluer et à consolider la stratégie du Conseil de l’Europe dans le domaine de la lutte contre la corruption en faisant le point sur les réussites et les écueils actuels, en envisageant de nouvelles priorités pour répondre aux défis rencontrés actuellement par les Etats membres et en donnant aux organes concernés du Conseil de l’Europe, comme le GRECO, les moyens d’appliquer effectivement la nouvelle stratégie;
  • inviter l’Union européenne à adhérer à la Convention pénale sur la corruption et à accélérer les négociations sur la participation de l’Union européenne au GRECO afin de favoriser une meilleure coordination des politiques anti-corruption en Europe et de renforcer l’impact des efforts respectifs de l’Union européenne et du GRECO;
  • saluer l’actuel partenariat Union européenne–Conseil de l'Europe dans le cadre des programmes conjoints, notamment dans le domaine de la lutte contre la corruption, et affirmer la nécessité de renforcer ce partenariat et d’y inclure une dimension parlementaire;
  • inviter le GRECO à renforcer sa coopération avec l’Assemblée, notamment dans le cadre des missions d’observation d’élections, à travers un meilleur échange d’informations concernant le financement des campagnes électorales;
  • inviter le Comité des Ministres à lancer une étude de faisabilité sur le lobbying, qui pourrait servir de point de départ à d’autres travaux normatifs;
  • saluer l’étude du GRECO sur la prise en compte du genre dans son suivi des problèmes de corruption, qui entre dans l’effort global de l’Assemblée pour renforcer la démocratie, les droits de l’homme et la prééminence du droit au bénéfice de tous;
  • renforcer le rôle de l’Assemblée parlementaire sur les questions de lutte contre la corruption en organisant régulièrement des rencontres entre les membres de l’Assemblée et des représentants des organes du Conseil de l’Europe, des programmes conjoints ou d’ONG au cours desquelles seraient abordées des préoccupations spécifiques concernant un pays donné ou un domaine en particulier (sport, ressources naturelles, pétrole et gaz, changement climatique, politique, secteur privé, responsabilité des entreprises etc.).