1. Commentaires généraux
1. Je voudrais féliciter M. Volontè pour son rapport
détaillé sur les progrès de la mise en œuvre des engagements politiques
pris par le Parlement du Maroc dans le cadre de sa demande de statut
de partenaire pour la démocratie.
2. Le présent avis s'emploiera à compléter les informations et
l'analyse fournies par M. Volontè à la fois sur la participation
équilibrée des femmes et des hommes à la vie publique et politique
(qui représente l'un des engagements politiques mentionné dans la
demande de statut de partenaire pour la démocratie du Parlement marocain)
et sur «les mesures concrètes [qui] sont essentielles pour renforcer
la démocratie, l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme
et des libertés fondamentales au Maroc», telles qu'énoncées dans
la
Résolution 1818 (2011), par laquelle l'Assemblée a accordé le statut de partenaire
pour la démocratie au Parlement marocain. Je rappellerai certaines
recommandations de la
Résolution 1873 (2012) de l'Assemblée sur l’égalité entre les femmes et les
hommes: une condition du succès du printemps arabe.
3. Avant de commencer mon analyse, je tiens à féliciter les autorités
marocaines pour l'esprit constructif de coopération et de dialogue
dont elles ont fait preuve dans leurs relations avec l'Assemblée
parlementaire et le Conseil de l'Europe ces dernières années dans
le domaine de l'égalité. Je voudrais mentionner la participation
de Mme Bassima Hakkaoui, Ministre de la solidarité, des femmes,
de la famille et du développement social, au débat de l'Assemblée
relatif au rapport de la commission sur l'égalité et la non-discrimination
relatif à «L'égalité entre les femmes et les hommes: une condition
du succès du printemps arabe» (avril 2012). Il convient également
de souligner la participation active des membres de la délégation marocaine
aux activités de la commission et du Réseau parlementaire pour le
droit des femmes de vivre sans violence, ainsi que l'organisation
d'événements et de conférences sur la situation des femmes, en coopération avec
le Centre européen pour l’interdépendance et la solidarité mondiales
(Centre Nord-Sud) et d'autres structures du Conseil de l'Europe.
J'espère que le contenu du présent avis sera considéré comme constructif pour
les travaux à venir dans le contexte d'un dialogue appelé, je n'en
doute pas, à s'approfondir.
2. «Garantir l’égalité des chances entre les femmes
et les hommes dans la vie politique et publique» (engagement politique
pris par le Parlement marocain, paragraphe 8.6 de la Résolution 1818
(2011))
4. La législation électorale actuellement en vigueur
au Maroc a permis une amélioration importante de la représentation
politique des femmes au parlement. Comme le rappelle M. Volontè,
la Chambre des représentants (la Chambre basse du parlement) compte
67 femmes sur 395 membres: ce sont 34 de plus que dans la législature
précédente.
5. Ces chiffres sont largement le résultat d'un système de quota
réservant 60 sièges aux femmes, tandis que sept ont été élues à
partir de listes générales. J'espère que cette part supplémentaire
augmentera dans les années à venir, de manière à refléter le rôle
essentiel acquis par les femmes au cours des dernières décennies
dans tous les domaines de la vie publique au Maroc. Les partis politiques
devraient jouer un rôle plus important dans ce processus, en garantissant
une participation plus équilibrée des femmes dans leurs activités
à tous les niveaux et en mettant en place des mécanismes de sélection
des candidats sensibles à la dimension de genre. Les recommandations
formulées par l'Assemblée dans sa
Résolution 1898 (2012) sur les partis politiques et la représentation politique
des femmes sont totalement pertinents en ce qui concerne les partis
politiques marocains.
6. Comme le fait remarquer M. Volontè, aujourd'hui une seule
femme siège au Gouvernement marocain. Or la présence de sept femmes
dans le gouvernement précédent indique que le pays est culturellement
et politiquement prêt à assumer un cabinet plus équilibré en termes
de genre. J'espère que la mise en œuvre progressive de la nouvelle
Constitution, par l'adoption des lois organiques, notamment en ce
qui concerne l'application de l'article 19 sur le principe de l'égalité
des genres, aura également une incidence sur la vie politique marocaine.
Si l’Etat s'efforce de pratiquer l'égalité des genres, comme le
demande la Constitution, les futurs gouvernements seront nécessairement
plus équilibrés du point de vue du genre.
3. «Lutter contre toutes les formes de discrimination
(en droit et en fait) fondée sur le genre; combattre toutes les
formes de violence fondée sur le genre (…); promouvoir activement
l’égalité des chances pour les femmes et les hommes» (paragraphe 8.20
de la Résolution 1818 (2011))
3.1. Discrimination à l’égard des femmes
7. Le principe de l’égalité des genres est inscrit dans
la Constitution marocaine de 2011. L’article 19 dispose: «L'homme
et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractères
civil, politique, économique, social, culturel et environnemental,
énoncés dans le présent titre et dans les autres dispositions de
la Constitution, ainsi que dans les conventions et pactes internationaux
dûment ratifiés par le Royaume et ce, dans le respect des dispositions
de la Constitution, des constantes et des lois du Royaume. L’Etat
marocain œuvre à la réalisation de la parité entre les hommes et
les femmes. Il est créé, à cet effet, une Autorité pour la parité
et la lutte contre toutes formes de discrimination.»
8. Je voudrais réitérer la recommandation déjà émise par l’Assemblée
dans sa
Résolution 1873 (2012) «L’égalité entre les femmes et les hommes: une condition
du succès du printemps arabe», qui appelle les autorités du Maroc
«à établir d’urgence une autorité pour la parité et la lutte contre
toutes les formes de discrimination, comme prévu dans l’article 19
de la Constitution, et à la doter des ressources humaines et financières
suffisantes»
.
9. Depuis que le Maroc a obtenu le statut de partenaire pour
la démocratie, une évolution positive est intervenue concernant
la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination
à l’égard des femmes (CEDEF): en avril 2011, le Maroc a levé ses
réserves quant aux articles 9.2 (égalité des droits au regard de
la nationalité) et 16 (égalité dans toutes les questions découlant
du mariage et de la vie de famille). Actuellement, le Maroc maintient
la réserve formulée relativement à l’article 29.1 – sur l’obligation
de soumettre à l’arbitrage tout différend concernant l'interprétation
ou l’application de la Convention – et une déclaration émise relativement
à l’article 2 sur l’obligation de poursuivre par tous les moyens
une politique tendant à éliminer les discriminations et précisant
que le Gouvernement marocain est prêt à appliquer les dispositions de
l’article dans la mesure où elles ne portent pas atteinte à la loi
islamique.
10. J’espère que, dans un avenir proche, le Maroc signera et ratifiera
également le Protocole facultatif à la CEDEF, qui reconnaît le Comité
pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes compétent
pour recevoir les plaintes de particuliers ou de groupes, ainsi
que le recommande la
Résolution 1873 (2012).
3.2. Violence à l’égard des femmes
11. Le Maroc assiste à une prise de conscience de plus
en plus forte des violences faites aux femmes, qui sont une atteinte
aux droits fondamentaux, un obstacle majeur au progrès vers l’égalité
des genres et un véritable fléau, très répandu et souvent sous-estimé.
Une volonté politique forte et partagée existe aujourd'hui pour
éliminer ce dernier; elle devrait permettre de prendre les mesures
nécessaires, notamment en termes de modification de la législation
et d'adoption de nouvelles politiques.
12. L’une des priorités à cet égard devrait être d’amender le
Code pénal de 1962, très obsolète: il met l’emphase sur «l’honneur»
et «la respectabilité» des femmes et de leurs familles, tout en
négligeant le besoin de protéger les victimes. Par exemple, le viol
– qui n’est pas neutre sur le plan du genre et est défini comme «un
homme ayant des relations sexuelles avec une femme contre sa volonté»
– est considéré comme une «atteinte aux bonnes mœurs»; la sévérité
de la sanction en cas de viol varie selon l’état civil de la victime;
la sanction est plus sévère si la victime perd sa virginité
.
13. Le cas d’Amina Filali, une jeune fille de 16 ans qui s’est
suicidée après avoir été contrainte d’épouser son violeur, a suscité
l’indignation dans l’opinion publique marocaine. L’article 475 du
Code pénal sur le détournement de mineur permet au violeur les poursuites
pénales en épousant la victime
. Cela est non seulement injuste
mais inflige également une double violence à la victime.
14. De nombreuses voix se sont élevées au Maroc pour exiger le
retrait de cette disposition. L’Assemblée y a joint la sienne, quelques
semaines après le geste dramatique d’Amina: dans sa
Résolution 1873 (2012) «L’égalité entre les femmes et les hommes: une condition
du succès du printemps arabe», elle demande au Maroc (et à la Tunisie)
d’abroger «la disposition juridique qui permet au violeur d’une
mineure d’éviter des poursuites criminelles s’il épouse la victime»
.
15. Je me félicite d’apprendre, de diverses sources, que le gouvernement
a déclaré son intention d’amender le Code pénal, notamment l’article 475
. Je salue également la décision
exprimée par la ministre Mme Hakkaoui de déclarer 2013 l’année de
la lutte contre la violence à l’égard des femmes
et de soumettre au parlement un
projet de loi s’inscrivant spécifiquement dans le cadre de cette
lutte. J’espère que les autorités décideront de mettre à profit
l’expertise du Conseil de l’Europe dans ce domaine en demandant
conseil sur le projet de loi, afin d’en garantir également la pleine
conformité avec les normes du Conseil de l’Europe. Dans ce contexte,
je soutiens totalement l’appel lancé aux autorités marocaines à
adopter la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et
la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence
domestique (Convention d’Istanbul, STCE n° 210), qui offre un ensemble
de dispositions avant-gardistes et de grande portée sur ce sujet
et est ouverte aux Etats non membres.
3.3. Traite des êtres humains
16. La traite des êtres humains est une atteinte aux
droits de l’homme qui touche spécialement les femmes. Le Maroc est
un pays d’origine, de destination et de transit des personnes victimes
de la traite des êtres humains. Un grand nombre de ces dernières
passent par le Maroc lorsqu’elles sont acheminées vers l’Europe. Ce
sont des femmes, des enfants et des hommes que l’on destine pour
la plupart au travail forcé et à l’exploitation sexuelle. Les Marocaines
sont emmenées pour se prostituer dans les Pays du Golfe, en Jordanie, en
Libye et en Syrie, ainsi que dans certains pays européens, tandis
que les hommes se voient promettre des emplois dans la région du
Golfe puis confisquer leur passeport et contraints au travail forcé
à leur arrivée.
17. Lutter contre les réseaux transnationaux de traite des êtres
humains requiert une intense coopération internationale en matière
pénale. A cet égard, le Maroc coopère avec divers interlocuteurs
et notamment avec des organisations européennes. Par exemple, le
programme Euromed Police III, financé par l’Union européenne, comporte
des activités de formation pour les forces de police dans plusieurs
domaines, dont la traite des êtres humains.
18. Mais le phénomène sévit également à l’intérieur du pays. L’asservissement
involontaire de très jeunes filles de zones rurales (appelées
petites bonnes) est chose courante.
Ces jeunes filles, parfois âgées de 13 ans seulement, souvent ne
sont pas payées, font l’objet de mauvais traitements physiques et
psychologiques, subissent des violences sexuelles et voient leur
liberté de mouvement très restreinte. Un rapport de
Human Rights Watch publié en novembre 2012
indique que les travailleurs domestiques – des filles pour la plupart
– travaillent 12 heures par jour, 7 jours sur 7, pour des sommes
aussi insignifiantes que 11 dollars par mois
. Ils ne reçoivent pas toujours une
nourriture suffisante. Dans les cas extrêmes, ils sont victimes
de mauvais traitements et parfois assassinés. Des cas similaires
sont régulièrement rapportés dans la presse. En mars 2013, le décès
d’une jeune fille de 13 ans à Agadir a choqué l’opinion publique
une fois de plus et suscité une remise en question du ministre de
la Justice par le parlement
.
19. En mai 2013, le Gouvernement marocain a présenté un projet
de loi sur le travail domestique, confirmant l’interdiction absolue
d’employer des mineurs de moins de 15 ans. Cette loi a été critiquée
par des organisations marocaines de défense des droits fondamentaux:
l'Organisation marocaine des droits de l'homme (OMDH) a estimé,
en particulier, que le projet de loi devait prévoir des sanctions
plus lourdes et la mise en place d'un mécanisme de contrôle. Sans
cela, le texte resterait faible et inefficace
. En revanche, il comporte des dispositions
innovantes comme celles sur les travailleurs étrangers, rendant
obligatoire l'inscription auprès du ministère du Travail. Ces mesures
devraient contribuer à la lutte contre la traite des êtres humains
aux fins de travail forcé et autres formes de violence auxquelles
de nombreuses personnes sont confrontées au Maroc, et en particulier
les femmes d’Afrique subsaharienne et d’Asie.
20. La lutte efficace contre la traite des êtres humains nécessite
une coopération solide et structurée. Pour cette raison, je soutiens
résolument l’appel lancé dans le projet de résolution aux autorités
marocaines pour qu’elles envisagent d’adhérer à la Convention du
Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains
(STCE n° 197). Cette convention, déjà signée et ratifiée par plusieurs
Etats non membres du Conseil de l’Europe, offre à cette lutte un
cadre d’action et de coopération effectif et d’une portée considérable.
3.4. Discrimination fondée sur l'orientation ou l'identité
sexuelle
21. Au Maroc, les discriminations à l'encontre des lesbiennes,
gays, bisexuels et transgenres (LGBT) sont monnaie courante dans
l’éducation, dans la santé et dans le monde du travail
. Cependant, elles passent largement
inaperçues et sont très rarement signalées, entre autres parce que
l’homosexualité est punie par la loi.
22. Les actes sexuels consentis entre personnes de même sexe sont
proscrites par l’article 489 du Code pénal marocain de 1962, qui
stipule que «toute personne qui commet des actes obscènes ou contre
nature avec une personne du même sexe est passible d'une peine d'emprisonnement
allant de 6 mois à 3 ans et d’une amende de 200 à 1 000 dirhams».
Tandis que ces dispositions ont rarement été appliquées dans le passé,
elles ont récemment causé la condamnation d’un certain nombre de
personnes. Quatre ont été poursuivies en mai 2013, dont deux hommes
de Souk el-Arbaa, près de Rabat, qui ont été condamnés à trois ans
de prison ferme
.
23. Ces peines et les dispositions du Code pénal sur lesquelles
elles s’appuient portent atteinte au principe de non-discrimination,
ainsi qu’aux droits de l’homme et en particulier au droit au respect
de la vie privée et de la dignité. Bien que promouvoir le changement
des mentalités, de la tolérance et du respect envers la population LGBT
puisse prendre du temps, il est urgent de dépénaliser l’homosexualité.
4. «S’assurer que le Code de la famille est pleinement
appliqué tout en lançant un débat public et politique en vue de
réviser ses dispositions qui ne sont pas conformes avec les normes
internationales en matière de droits de l’homme, y compris sur la
question de la polygamie» (paragraphe 8.21 de la Résolution 1818
(2011)).
24. Près de dix ans après l’adoption du nouveau Moudawana ou Code de la famille,
il reste encore des progrès à faire concernant le droit familial
au Maroc et son application. Les remarques de mon prédécesseur Mme Nursuna
Memecan, rapporteure pour avis de la commission sur l'égalité des
chances pour les femmes et les hommes relativement à la demande
d'octroi du statut de partenaire pour la démocratie du Parlement marocain
auprès de l'Assemblée sont toujours valides. Comme elle l’a souligné
il y a deux ans, l’écart entre la loi et sa mise en œuvre est considérable.
25. Comme l’a mentionné le Comité des Nations Unies pour l'élimination
de la discrimination raciale (CERD), l’un des problèmes particuliers
s’agissant du code de la famille est qu’il n’est pas appliqué de manière
uniforme sur l’ensemble du territoire, où une partie de la population,
telle que les femmes et les enfants des zones reculées, sont victimes
d’une double discrimination, voire d’une discrimination multiple.
26. Les activités de formation organisées au sein du système judiciaire
et des professions juridiques par les autorités également en coopération
avec la société civile et des partenaires internationaux devraient
se poursuivre. Un large éventail d’acteurs, dont des organisations
non gouvernementales (ONG), ont mené des activités de sensibilisation
auprès des femmes afin de les informer des droits qui leur sont
garantis par la loi. Il est impératif d’élargir l’accès des femmes
à la justice, objectif qui devrait représenter une priorité absolue dans
ce domaine.
27. Dans ce contexte, il convient de saluer l’accueil favorable
du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe en mai 2013 à la
demande du Maroc concernant le statut d’observateur auprès de la
Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ). La CEPEJ
collabore déjà étroitement avec les autorités marocaines depuis
plus d’un an afin d’évaluer le fonctionnement du système juridique
du pays et de fournir des orientations sur sa réforme. Cela fait
partie d’un programme plus large de renforcement de l’indépendance et
de l’efficacité des systèmes juridiques marocain et tunisien mené
par le Conseil de l’Europe en coopération avec l’Union européenne.
J’espère que ce programme aura des incidences positives en ce qui
concerne l’accès des femmes à la justice et la mise en œuvre du
Code de la famille.
28. Dans son avis sur la demande de statut de partenaire pour
la démocratie présentée du Parlement marocain à l’Assemblée parlementaire,
Mme Nursuna Memecan avait déjà fait remarquer que, bien que les autorités
marocaines aient restreint les conditions du mariage polygame pour
en décourager la pratique, la polygamie reste légale au Maroc. Depuis
l’adoption de la
Résolution 1818 (2011) de l’Assemblée, aucun amendement des dispositions juridiques
relatives à la polygamie n’a été effectué. De plus, aucun débat
public n’a eu lieu sur son éventuelle abolition, contrairement aux
recommandations des
Résolutions 1818 (2011) et
1873 (2012).
29. Je voudrais rappeler que, d’après le Comité sur l’élimination
de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, «la
polygamie est contraire à l'égalité des sexes et peut avoir de si
graves conséquences affectives et financières pour la femme et les
personnes à sa charge qu'il faudrait décourager et même interdire cette
forme de mariage. Il est inquiétant de constater que certains Etats
Parties, dont la Constitution garantit pourtant l'égalité des droits
des deux sexes, autorisent la polygamie, soit par conviction, soit
pour respecter la tradition, portant ainsi atteinte aux droits constitutionnels
des femmes et en infraction à la disposition 5.
a de
la Convention»
.
5. «Combattre le racisme, la xénophobie et toutes
les formes de discrimination» (paragraphe 8.16 de la Résolution 1818
(2011))
30. Un nombre croissant d’étrangers, originaires notamment
de pays de l'Afrique subsaharienne, émigrent au Maroc pour travailler
ou pour étudier. Alors que le développement économique du pays crée
des emplois attractifs pour les migrants, ses programmes de coopération
et de relations interafricaines attirent de nombreux étudiants,
particulièrement d’Afrique centrale et occidentale.
31. Les migrants et les étudiants de pays d’Afrique subsaharienne
sont victimes de préjugés et de discrimination. Aux stéréotypes
classiques, datant du temps de l’esclavage, se mêlent la crainte
de voir l’étranger «voler le travail des Marocains». Il faut encore
ajouter à cela les stéréotypes modernes liés au SIDA, à l’instabilité
politique et au taux de criminalité des pays subsahariens.
32. Bien que le racisme, surtout envers les gens de couleur étrangers
non musulmans soit dénoncé par les médias depuis des années
et
qu’il ait été pointé du doigt par le Comité des Nations Unies pour
l'élimination de la discrimination raciale (CERD)
ainsi
que par des ONG marocaines, le sujet reste tabou dans un pays où
l’hospitalité constitue une valeur importante. Comme la plupart
des cas ne sont pas signalés et que les groupes concernés ont un
accès limité à la justice, les affaires de discrimination raciale
et de racisme ne sont pratiquement jamais portées devant les tribunaux
.
33. Les autorités marocaines devraient mettre sur pied des programmes
de lutte contre le racisme et la xénophobie basés sur trois éléments:
1) la sensibilisation du public et la diffusion du message que toute discrimination
est inacceptable quels qu’en soient les motifs, y compris raciaux;
2) la formation des responsables de l’application de la loi, notamment
ceux amenés à travailler dans le domaine de l’immigration, ainsi
que les garde-frontières et les juges; 3) l'information sur la législation
et les moyens de recours disponibles, à l’intention des groupes
et des avocats concernés.
34. J’aimerais aussi évoquer brièvement la situation des personnes
ayant besoin d’une protection internationale et celle des migrants
qui transitent par le Maroc pour atteindre d’autres destinations.
Les défis auxquels est confronté le Maroc dans ce domaine ont suscité
un échange de vues approfondi entre le Parlement marocain et la
commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées
(Rabat, 5 avril 2013)
.