Imprimer
Autres documents liés

Résolution 1940 (2013) Version finale

La situation au Proche-Orient

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 25 juin 2013 (21e séance) (voir Doc. 13231, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteur: M. Marcenaro). Texte adopté par l’Assemblée le 25 juin 2013 (21e séance).

1. L’Assemblée parlementaire rappelle ses précédentes résolutions sur la question du Proche-Orient, et réaffirme sa position et les appels qu’elle a le plus récemment lancés à toutes les parties concernées dans sa Résolution 1700 (2010) sur la situation au Proche-Orient et sa Résolution 1748 (2010) sur le regain de tensions au Proche-Orient. Elle réitère notamment son soutien à deux aspirations aussi légitimes l’une que l’autre: le droit d’Israël d’être reconnu et d’exister en toute sécurité, et le droit des Palestiniens d’avoir un Etat indépendant, viable et contigu.
2. Toutefois, depuis 2010, le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens n’a pas progressé. La réconciliation palestinienne, plusieurs fois annoncée, n’a pas eu lieu; la construction de colonies israéliennes dans les territoires occupés, y compris à Jérusalem-Est, s’est poursuivie, de même que la mise en place d’un vaste réseau de routes et de tunnels pour les desservir et les relier à Israël, et la construction de «barrières de séparation»; les tirs de roquettes ont également continué depuis la bande de Gaza vers Israël.
3. Dans le même temps, l’Assemblée note que plusieurs événements ont eu depuis un impact sur la situation: les révolutions arabes, la poursuite du développement du programme nucléaire iranien, la guerre civile en Syrie, la reconnaissance d’un Etat palestinien par l’Assemblée générale des Nations Unies en novembre 2012, l’octroi du statut de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée au Conseil national palestinien, les élections tenues en Israël en janvier 2013, la reprise des relations entre Israël et la Turquie, sous les auspices du Président Obama, et les efforts récemment renouvelés de l’Administration des Etats-Unis en faveur de la reprise des négociations de paix entre Israéliens et Palestiniens.
4. Début 2011, des mobilisations de masse dans de nombreux pays arabes ont abouti à une transformation du paysage politique. En Syrie, la guerre civile a fait presque 100 000 morts et entraîné la fuite de plus de 1,2 million de réfugiés et le déplacement de plusieurs millions de personnes à l’intérieur du pays.
5. L’Assemblée rappelle ses Résolutions 1791 (2011), 1819 (2011) et 1893 (2012) sur la situation et la transition politique en Tunisie, 1831 (2011) sur la coopération entre le Conseil de l’Europe et les démocraties émergentes dans le monde arabe et 1892 (2012) sur la crise de la transition démocratique en Egypte, ainsi que sa Recommandation 1957 (2011) sur la violence à l’encontre des chrétiens au Proche et au Moyen-Orient. Que l’on soit optimiste ou pessimiste à l’égard du «Printemps arabe», l’Assemblée réitère son soutien à ceux qui se battent pour les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit. Le chemin vers la démocratie a toujours été long et difficile, et pas uniquement dans le monde arabe. De plus, l’idée que la stabilité puisse être garantie, comme par le passé, par des dictateurs est non seulement immorale, mais également dénuée de tout réalisme politique.
6. L’Assemblée se réfère à ses Résolutions 1878 (2012) sur la situation en Syrie et 1902 (2012) sur la réponse européenne face à la crise humanitaire en Syrie, ainsi qu’au débat d’actualité sur «Les réfugiés syriens en Jordanie, en Turquie, au Liban et en Irak: comment organiser et soutenir l’aide internationale», tenu en avril 2013 à la suite de la visite de la sous-commission sur le Proche-Orient de sa commission des questions politiques et de la démocratie dans le camp de réfugiés syriens de Za’atri en Jordanie. Préoccupée par de récents actes d’hostilité du régime Assad contre Israël et d’autres pays voisins, et par l’afflux immense d’armes dans la région, l’Assemblée met en garde contre une escalade du conflit.
7. L’Assemblée exprime sa gratitude aux pays d’accueil, et notamment aux autorités de la Jordanie, de la Turquie et du Liban, qui accueillent et aident plus d’un million et demi de réfugiés syriens, selon les estimations du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Elle appelle les Etats membres du Conseil de l’Europe, les Etats observateurs et ceux ayant le statut de partenaire pour la démocratie, ainsi que l’ensemble de la communauté internationale à intensifier leur aide financière à la Jordanie, à la Turquie et au Liban, au vu des vastes besoins quotidiens des réfugiés syriens. Elle rend également hommage au rôle plus global joué par la Jordanie en tant que facteur de stabilité dans la région, mais aussi en tant qu’acteur clé dans la recherche d’une solution juste et équitable au conflit israélo-palestinien.
8. L’Assemblée réitère son soutien à une solution à deux Etats dans le conflit israëlo-palestinien, sur la base des frontières de 1967, laquelle pourrait s’accompagner, compte tenu des nouvelles réalités sur le terrain, d’un échange limité de territoires, tel que récemment accepté par les pays arabes. Elle soutient notamment les efforts de l’Administration des Etats-Unis qui se sont récemment intensifiés en faveur d’une reprise rapide des négociations entre Israéliens et Palestiniens, en vue de trouver une solution juste et durable.
9. Dans le même temps, l’Assemblée considère que, dans l’attente d’un accord permanent et en vue d’en faciliter sa conclusion, des accords parallèles pourraient être conclus, tel qu’un accord sur les méthodes de gestion du conflit, des mesures de confiance et une coopération pratique continue sur le terrain.
10. Les mesures d’apaisement devraient notamment inclure: la libération des membres du Conseil législatif palestinien détenus, sous réserve qu’ils ne soient pas condamnés pour participation directe à des actes terroristes; des mesures concrètes pour geler les activités de construction de colonies; la cessation des destructions d’habitations et des expulsions forcées; la diminution des obstacles à la circulation des personnes et des biens en Cisjordanie et entre la Cisjordanie et Israël, et la délivrance d’un nombre accru de permis de travail en Israël; le réexamen de la possibilité du regroupement familial et la révision de la législation sur le mariage; la coopération sur les questions de sécurité; et le transfert à l’Autorité palestinienne de certaines parties de la zone C de Cisjordanie se trouvant actuellement entièrement sous contrôle israélien.
11. L’Assemblée note que, parallèlement aux questions de statut, les aspects relatifs aux normes devraient également être examinés pour que tous – Arabes et Juifs, citoyens israéliens et palestiniens – que ce soit dans les territoires sous contrôle israélien ou palestinien, puissent bénéficier du respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit. C’est pourquoi elle estime qu’il convient de compléter la condition «une solution à deux Etats» par la formule «deux Etats démocratiques et pluralistes».
12. L’Assemblée salue la libération du soldat israélien Shalit et de plus de 1 000 détenus palestiniens, et rappelle sa Résolution 1830 (2011) par laquelle elle a accordé le statut de partenaire pour la démocratie au Conseil national palestinien.
13. Afin de garantir et de promouvoir davantage le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit, et de faciliter la reprise des négociations de paix, l’Assemblée appelle:
13.1. les autorités israéliennes:
13.1.1. à assurer les mêmes droits individuels à tous les citoyens israéliens, y compris aux membres de la minorité arabe, et à reconnaître à ces derniers des droits des minorités;
13.1.2. à mettre un terme aux arrestations arbitraires et aux détentions administratives de Palestiniens (y compris de nombreux enfants), aux procès non équitables et aux actes de violence à l’égard des détenus, mais aussi au transfert de détenus palestiniens dans des prisons israéliennes, en violation du droit humanitaire international;
13.1.3. à libérer les membres du Conseil législatif palestinien détenus et de nombreux autres prisonniers (sous réserve qu’ils ne soient pas condamnés pour participation directe à des actes terroristes), conformément à l’Accord d’Annapolis; à permettre aux membres de la délégation palestinienne, partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée, de voyager afin de participer aux réunions de l’Assemblée;
13.1.4. à cesser la construction de nouvelles colonies et l’extension de celles existantes, toutes les destructions d’habitations, les expulsions forcées et les confiscations de terres dans les territoires occupés, y compris à Jérusalem-Est; à permettre aux Palestiniens de prendre le contrôle de leurs ressources naturelles (en particulier de l’eau); à lever les restrictions à la liberté de circulation des Palestiniens en Cisjordanie et à cesser d’entraver leur accès à leurs terres, à leurs lieux de travail, à l’éducation, à la santé et à d’autres services et installations; à arrêter la construction du «mur de séparation», en échange de garanties de sécurité appropriées;
13.1.5. à lever le blocus de Gaza;
13.2. l’ensemble des forces palestiniennes:
13.2.1. à conclure sans plus attendre et de manière transparente la réconciliation plusieurs fois annoncée entre le Fatah et le Hamas, sur la base des principes du Quartet, renforçant ainsi également la crédibilité de la partie palestinienne dans les négociations avec Israël; à cet égard, l’Assemblée encourage le Président égyptien Morsi à intensifier ses efforts de médiation;
13.2.2. à organiser les élections présidentielle et législatives depuis longtemps nécessaires;
13.2.3. à s’abstenir d’user de la violence contre les citoyens israéliens et de toute rhétorique anti-israélienne et propagande antisémite, ainsi qu’à s’abstenir d’inclure les auteurs d’attentats suicides et autres terroristes parmi les martyrs palestiniens, étant donné que de tels phénomènes nuisent à la culture de la paix;
13.2.4. à mettre un terme aux détentions arbitraires et aux actes de violence à l’égard des détenus.
14. L’Assemblée est particulièrement préoccupée par les violations des droits de l’homme commises dans la bande de Gaza contrôlée par le Hamas, notamment par les exécutions faisant suite à des procès non équitables, les exécutions sommaires de Palestiniens accusés d’espionnage pour le compte d’Israël et les tirs non ciblés de roquettes contre Israël, qui tuent des civils. Elle exhorte par conséquent le Hamas à cesser toutes les violations des droits de l’homme et à traduire en justice leurs auteurs, à adopter un moratoire immédiat sur les exécutions dans l’attente de l’abolition de jure de la peine de mort, à reconnaître à l’Etat d’Israël le droit d’exister et à approuver le plan de paix arabe, à cesser les tirs de roquettes et tous les types d’attaques contre Israël, à refuser le recours au terrorisme et à le combattre efficacement.
15. L’Assemblée souligne que le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit, à la fois par les Israéliens et par les Palestiniens, peut contribuer à la réussite des négociations d’un accord de paix en rétablissant la confiance entre les parties, mais aussi ultérieurement, tout accord de paix n’étant que le début d’un long processus de réconciliation après des décennies de conflits. Dans ce contexte, le Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire peuvent apporter leur propre contribution spécifique
16. L’Assemblée décide par conséquent:
16.1. de continuer à promouvoir le dialogue et la confiance entre les représentants de la Knesset et du Conseil national palestinien, en particulier dans le cadre de sa sous-commission sur le Proche-Orient;
16.2. de mettre à la disposition des deux instances représentatives sa propre expérience dans le domaine des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit;
16.3. de poursuivre ses efforts visant à établir des contacts avec d’autres parlements dans la région, notamment en Egypte et en Jordanie, à la lumière, en particulier, des perspectives de coopération offertes par le statut de partenaire pour la démocratie à ces pays. A cet égard, l’Assemblée se félicite de l’intérêt manifesté par le président de la Chambre des représentants du Royaume de Jordanie pour obtenir le statut de partenaire pour la démocratie, déjà accordé au Parlement du Maroc et au Conseil national palestinien en 2011.
17. L’Assemblée salue l’action intergouvernementale du Conseil de l’Europe à l’égard de la Jordanie et demande au Secrétaire Général de développer également les relations avec Israël et la Palestine en vue de définir comment l’Organisation pourrait contribuer à promouvoir les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit dans la région.
18. Elle décide de continuer à suivre de près la situation au Proche-Orient et, en particulier, l’état d’avancement du processus de paix israélo-palestinien et la situation des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit dans la région, en accordant une attention particulière aux graves événements qui se produisent en Egypte et en Syrie.