Imprimer
Autres documents liés
Résolution 1987 (2014) Version finale
Le droit d'accès à internet
1. L’Assemblée parlementaire rappelle
que le droit à la liberté d’expression est à la fois un droit fondamental
en soi et un instrument essentiel à l’exercice d’autres droits fondamentaux,
parmi lesquels le droit à l’éducation, le droit de prendre part
à la vie culturelle et les droits à la liberté d’association et
de réunion.
2. Internet a révolutionné la manière dont les citoyens interagissent,
et exercent leur liberté d’expression et d’information, ainsi que
les droits fondamentaux connexes. L’accès à internet facilite ainsi
la réalisation des droits culturels, civils et politiques. Par conséquent,
l’Assemblée souligne l’importance de l’accès à internet dans une
société démocratique selon l’article 10 de la Convention européenne
des droits de l’homme (STE n° 5).
3. Rappelant la Recommandation CM/Rec(2007)16 du Comité des Ministres
aux Etats membres sur des mesures visant à promouvoir la valeur
de service public de l’internet, ainsi que les obligations internationales de
service universel établies par l’Union internationale des télécommunications
des Nations Unies et la Directive de l’Union européenne concernant
le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux
et services de communications électroniques (Directive 2002/22/CE),
l’Assemblée souligne la nécessité d’obligations de service universel
concernant internet en Europe et au-delà.
4. L’Assemblée considère qu’internet, eu égard à son rôle important
pour les individus, les groupes et les Etats dans la société moderne,
doit être accessible à tous, sans considération d’âge, de lieu de
résidence ou de revenu, et que des efforts accrus sont nécessaires
aux niveaux local, régional, national et européen pour garantir
l’accès à internet pour tous.
5. Les pouvoirs publics ont le devoir de garantir la jouissance
effective du droit à la liberté d'expression en ligne. Par conséquent,
l’Assemblée recommande aux Etats membres du Conseil de l’Europe
de garantir le droit d’accès à internet sur la base des principes
suivants:
5.1. chacun doit jouir
du droit d’accès à internet en tant que condition essentielle à
l’exercice des droits en vertu de la Convention européenne des droits
de l’homme;
5.2. le droit d’accès à internet inclut celui d’avoir accès
à des informations ou des idées, ainsi que d’en recevoir et d’en
communiquer via internet, sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités
publiques et sans considération de frontière, sous réserve seulement
des restrictions prévues par l'article 10 de la Convention européenne
des droits de l'homme; compte tenu de l’importance d’internet pour
les sociétés démocratiques, toute restriction de ce type devrait
faire l’objet d’une définition claire et rigoureuse;
5.3. comme la crainte d’une surveillance peut engendrer l’autocensure,
toute mesure de ce type devrait respecter les limites fixées par
les articles 8 et 10 de la Convention européenne des droits de l’homme;
5.4. comme l’accès à internet est également essentiel pour
l’exercice d’autres droits de l’homme, tels que le droit à la liberté
de réunion et le droit au respect de la vie privée et familiale,
les Etats membres devraient reconnaître le droit fondamental à l’accès
à internet dans la loi et la pratique;
5.5. les fournisseurs d’accès et de services internet doivent
se conformer aux obligations de service universel relatives à internet,
qui ont été établies par exemple par les Nations Unies et l’Union européenne;
5.6. la possibilité pour tous d’accéder à un minimum de qualité
des services internet est une responsabilité conjointe des Etats
membres, et des fournisseurs d’accès et de services internet; il conviendra
en particulier de veiller à ce que ces services soient abordables,
ainsi qu’à leur interopérabilité et à leur intégrité, en tenant
compte des dernières innovations technologiques;
5.7. il ne devrait y avoir aucune discrimination dans le traitement
des données et de trafic d’internet, sur la base de l'appareil,
du contenu, de l'auteur, de l'origine ou de la destination du contenu,
de l’application ou du service, assurant ainsi la neutralité du
Net en vertu des lois nationales;
5.8. les législations et pratiques nationales devraient reconnaître
l'accès individuel à internet, et toutes les restrictions à ce droit
devraient être prévues par la loi, poursuivre un but légitime et
être nécessaires dans une société démocratique; l’Assemblée ne considère
pas que l’imposition de restrictions générales à l’accès des personnes
à internet soit une sanction adaptée aux atteintes mineures aux
droits de propriété intellectuelle;
5.9. l’accès à internet par le biais de points d’accès public
devrait être encouragé, en particulier de la part des institutions
éducatives et culturelles;
5.10. les Etats membres devraient intensifier leur action visant
à garantir l’accès à internet pour les personnes ayant des besoins
spéciaux et les usagers d’internet défavorisés;
5.11. les Etats membres devraient promouvoir la recherche technologique
sur l’amélioration de l’accès à internet ainsi que l’accès aux logiciels
et services de base; les Etats membres peuvent restreindre la diffusion
de logiciels susceptibles de nuire aux droits de l'homme ou à la
sécurité nationale;
5.12. les Etats membres devraient obliger les administrations
à permettre également le libre accès à leurs informations et à leurs
services par le biais d’internet; dans la mesure du possible, l’accès multilingue
à internet devrait être un objectif public.
6. L’Assemblée appelle les Nations Unies et l’Union européenne
à coopérer plus étroitement avec le Conseil de l’Europe pour définir
de manière universelle et mettre en œuvre au niveau européen le
droit d’accès à internet et les normes relatives à ce droit.
7. L’Assemblée invite les acteurs commerciaux d’internet à coopérer
aux efforts déployés par les gouvernements et les parlements pour
mettre en œuvre les principes ci-dessus, et à réaliser l’accès universel à
internet. L’Association européenne des fournisseurs de services
internet est invitée à développer des normes de qualité à cet égard.
8. L’Assemblée demande au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe
d’élaborer des programmes ciblés pour soutenir les initiatives législatives
nationales des Etats membres visant à garantir l’accès universel
à internet partout en Europe.